Marie Chaieb

Si le mot tradition véhicule aujourd’hui dans la langue courante un ensemble d’habitudes – plus ou moins pesantes –, au début de notre ère, le mot tradition (paradosis ou traditio) résonnait différemment aux oreilles des citoyens de l’Empire romain. Il renvoyait en effet beaucoup plus spontanément à sa racine verbale (paradidomi ou trado) et dès lors à une action. Lorsque les auteurs chrétiens de cette époque emploient le mot traditio, c’est avec cette nuance verbale dynamique, pour désigner « le fait de transmettre », « le processus par lequel on transmet » plutôt que le contenu transmis. Une illustration remarquable de ce sens est accessible dans l’œuvre d’Irénée, deuxième évêque connu de Lyon à la fin du IIe siècle. À une époque charnière d’une importance capitale pour la vie des premières communautés chrétiennes, Irénée propose en effet la première réflexion théologique sur la tradition. Disséminée dans toute son œuvre, cette réflexion ne prend pas la forme d’un traité théorique, mais s’exprime au gré des besoins de son argumentation. Cette étude se donne pour objet de retracer les grandes lignes de cette théologie en répondant à cette question : en quoi la tradition était-elle un principe dynamisant pour l’Église selon Irénée ? Après avoir replacé cette œuvre dans son contexte, une étude de quelques passages significatifs permettra d’éclairer ce sens dynamique de la tradition et ouvrira le champ à une brève recherche en quête de son contenu.

Chez Irénée, la question de l’unité se pose avec une acuité décuplée par l’adversité. D’une part, après les martyres de 177, il s’agit de faire front contre l’ignorance meurtrière des persécutions ; d’autre part, en interne, les communautés et les structures ecclésiales nées dans la diversité culturelle et religieuse sont en plein essor. Aussi, lorsqu’à cette jeunesse s’ajoute le danger de l’éclatement gnostique, devient-il urgent de penser théologiquement l’unité. Des exemples contemporains..

Le carnet de recherches Irenaeus vise à favoriser les échanges scientifiques autour de l’œuvre d’Irénée de Lyon, théologien d'Asie mineure de la fin du IIe siècle, devenu deuxième évêque de Lyon. Aux prises avec l'expansion des courants gnostiques, Irénée rédige deux œuvres magistrales : Contre les hérésies, et Démonstration de la prédication apostolique qui font l'objet d'études renouvelées. Souhaitant devenir le plus possible bilingue (français-anglais), ce carnet vise à mettre en lien les ..

Vous trouverez ici la préface d'Érasme adressée à l'évêque de Trente en 1526, où il se félicite d'avoir rendu à la lumière "son" Irénée. La traduction est le fruit du travail de trois participantes du séminaire de latin médiéval de L. Mellerin aux Sources Chrétiennes, latinistes chevronnées : Geneviève Bussac, Marie-Claude Bois et Marie Couton

À la fin du iie siècle, Irénée de Lyon utilise une dizaine de fois Ga 4, 4 dans son œuvre de réfutation des mouvements gnostiques. Cette étude analyse en quel sens Irénée a commenté ces versets, comment il en a éclairé la centralité, et les axes de la théologie de l'incarnation qui en découlent.

Que peut bien signifier cette notion de modèle des cieux ? Si la première prière eucharistique du rite latin actuel garde les traces d’un autel céleste où l’ange est prié de porter les offrandes des fidèles, est-ce selon les mêmes harmoniques que dans Ex 25 ? Peut-on retracer les avatars de l’idée de modèle céleste dans la littérature patristique qui démontreraient l’existence de passerelles entre le modèle et la liturgie céleste ? Poursuivre la recherche de la Bible, à ses lectures patristiques et notamment chez Irénée de Lyon, ne permet pas seulement d’objectiver comment ce thème a pu être interprété , cela met en jeu les multiples facettes que la thématique contient en elle-même et que les divers âges ont tour à tour mis en valeur.

Les barbares sont définis, étymologiquement, comme ceux qui ne parlent pas correctement la langue grecque ni, par extension, le latin. Ils sont le plus souvent extérieurs à l’Empire. Leur caractère d’« étrangers » s’étend donc à leurs modes de vie, leurs traditions, leurs croyances, ainsi qu’à leur organisation politique. À la pluralité de l’origine géographique des barbares, il faut aussi ajouter que leur impact va se modifier au gré même de l’évolution de l’Empire. Or la réaction de Rome devant les barbares ne se vit pas dans un face à face binaire ; la présence du christianisme traverse ces relations et la dimension religieuse de la gestion du phénomène est particulièrement intéressante à étudier. Les Pères de l’Église se trouvent ainsi aux premières loges des grandes questions autour de la définition dialectique d’un « nous » et d’un « eux » ou encore de la possibilité de vivre ensemble. Alors que les auteurs chrétiens sont le plus souvent cités à titre d’illustration, ce colloque a voulu prendre le temps de leur donner davantage la parole : qui sont pour eux les barbares ? Partagent-ils toujours les topoï rhétoriques qui en font des sauvages conquérants, mettant en cause jusqu’à l’existence même de Rome ? Les Pères portent en eux le double héritage de la tradition biblique et de la culture gréco-latine. À la lumière de cette double appartenance, comment pensent-ils la loyauté envers l’ordre établi ? Quelle interprétation religieuse donnent-ils des changements géopolitiques ? Quel regard posent-ils sur les frontières mouvantes entre civilisation et barbarie au sein de cette triangulation de relations entre culture païenne, culture barbare, et christianisme : car le « barbare » n’est pas forcément « païen », et les Pères s’inscrivent dans un mouvement, déjà engagé de longue date, de valorisation de la culture de l’autre au service de l’évangélisation.

Chez Irénée, évêque de Lyon à la fin du IIe siècle, la question de l’unité se pose avec une acuité décuplée par l’adversité. D’une part, après les martyres de 177, il s’agit de faire front contre l’ignorance meurtrière des persécutions ; d’autre part, en interne, les communautés et les structures ecclésiales nées dans la diversité culturelle et religieuse sont en plein essor. Aussi, lorsqu’à cette jeunesse s’ajoute le danger de l’éclatement gnostique, devient-il urgent de penser théologiqueme..

L'article traite de l'anthropologie d'Irenee, tiree de l'Ecriture. L'A. en montre les caractetistiques optimistes, la place occupee par les notions de liberte et de progres personnel et collectif, de croissance, et surtout la place centrale de l'eucharistie.

Égérie nous donne accès, peut-être parfois même à son insu, à quelques-unes des questions ecclésiologiques majeures de la fin du IVè s. cette communication s’arrête en particulier sur trois extraits que nous pourrons scruter comme autant d’arrêts sur image, de « photographies » de voyage, insérées dans son album souvenir. Ces « instantanés » donnent à voir des équilibres qui ne sont peut-être pas aussi stables que son texte le laisse croire entre la communauté et les ministres, entre l’autorité hiérarchique des clercs et l’autorité spirituelle des moines, et enfin entre hommes et femmes au sein des communautés.

Égérie nous donne accès, peut-être parfois même à son insu, à quelques-unes des questions ecclésiologiques majeures de la fin du IVè s. cette communication s’arrêtera en particulier sur trois extraits que nous pourrons scruter comme autant d’arrêts sur image, de « photographies » de voyage, insérées dans son album souvenir. Ces « instantanés » donnent à voir des équilibres qui ne sont peut-être pas aussi stables que son texte le laisse croire entre la communauté et les ministres, entre l’autorité hiérarchique des clercs et l’autorité spirituelle des moines, et enfin entre hommes et femmes au sein des communautés.

Égérie nous donne accès, peut-être parfois même à son insu, à quelques-unes des questions ecclésiologiques majeures de la fin du IVè s. cette communication s’arrête en particulier sur trois extraits que nous pourrons scruter comme autant d’arrêts sur image, de « photographies » de voyage, insérées dans son album souvenir. Ces « instantanés » donnent à voir des équilibres qui ne sont peut-être pas aussi stables que son texte le laisse croire entre la communauté et les ministres, entre l’autorité hiérarchique des clercs et l’autorité spirituelle des moines, et enfin entre hommes et femmes au sein des communautés.

Au cours de l'histoire de l'Eglise, l' expérience particulière de Novatien donne à voir ce qui se produit lorsque le pardon est refusé à des repentis. L'étude de ce cas, et des débats qu'il a suscités, permet d'analyser, comme en creux, la nature et les effets du repentir aussi bien au niveau individuel que collectif. Les Pères de l'Eglise qui ont eu à creuser leur discernement  dans cette situation pastorale difficile ont souvent recours à d'abondantes images qui viennent renforcer leurs arguments. Ces images(hypotyposes) par leur fort pouvoir de suggestion et d'évocation, constituent le corpus de cette étude permettant d'éclairer  les différents enjeux du repentir , ainsi que les différents visages de l'institution qui accepte, ou pas, le principe d'une réintégration.

Que peut bien signifier cette notion de modèle des cieux ?  Si la première prière eucharistique du rite latin actuel garde les traces d’un autel céleste où l’ange est prié de porter les offrandes des fidèles, est-ce selon les mêmes harmoniques que dans Ex 25 ? Peut-on retracer les avatars de l’idée de modèle céleste dans la littérature patristique  qui démontreraient l’existence de passerelles entre le modèle et la liturgie céleste ? Poursuivre la recherche de la Bible, à ses lectures patristiques et notamment chez Irénée de Lyon, ne permet pas seulement d’objectiver comment ce thème a pu être interprété , cela met en jeu les multiples facettes que  la thématique contient en elle-même et que les divers âges ont tour à tour mis en valeur.

CHAIEB, Marie-Laure. L’appartenance à l’Église dans le débat entre Irénée de Lyon et les gnostiques. In : DELAGE, P-G.,  dir.  Dessiner la communion. Dissidence, exclusion, réintégration dans l’Eglise du IIe au VIe siècle , La Rochelle : Caritaspatrum éd., 2010, pp. 47-64.

Chaieb Marie-Laure, « La faiblesse de la chair selon Irénée de Lyon : de l’opiniâtreté théologique à assumer la corporéité dans la relation à Dieu », dans Les Pères de l’Eglise et la chair. Actes du 5è colloque de la Rochelle, PG Delage ed. Caritaspatrum, 2012, 47-64.

Entre 180 et 200, Irénée de Lyon, disciple de Jean via Polycarpe, est l’un des tout premiers Pères de l’Eglise qui donne autant d’importance à l’évangile de Jean qu’aux synoptiques. Il est donc d’autant plus intéressant de se pencher sur ses commentaires des péricopes proprement johanniques qu’il est l’un des premiers à en faire. En ce qui concerne les Noces de Cana, on constate qu’Irénée fait de ce passage un point d’appui théologique contre les gnostiques valentiniens. Evoquant cette péricope au livre III, 11, 5 de son Adversus Haereses comme une pièce maîtresse de sa réfutation, Irénée en déploie les enjeux avec force : la péricope est tour à tour manifestation que le créateur et le sauveur sont bien un seul et même Dieu, que Dieu se révèle dans l’histoire des hommes et les accompagne en s’adaptant à leurs capacités, et même, que la création est bonne au point d’être apte à « porter le salut ». En combinant le vocabulaire avec celui de la multiplication des pains, il exalte non seulement la dimension de préfiguration de l’eucharistie de la péricope mais il y trouve matière également pour approfondir encore sa réflexion sur la nature du culte chrétien. En déployant les enjeux de ce commentaire, nous voyons donc comment Irénée « lit » dans cette péricope une synthèse symbolique de la foi de la grande Eglise en matière de théologie de la création, de la Révélation, et du salut.

Tout au long de l'antiquité chrétienne et tardive, on rencontre sous des formes variées sinon l'expression, du moins l'idée du sensus fidelium, ce sens aiguisé qui agit au sein de la communauté comme un flair, un instinct pour repérer l'authenticité de la foi. Dans un mouvement d'adhésion plein et entier à la « Tradition qui vient des apôtres », le sensus fidelium peut d'abord jouer un rôle de conservation et de préservation. Mais les circonstances ne manquent pas pour lesquelles le sensus fidelium joue également un rôle de discernement : au sujet du contenu de la foi mise en question, et de sa transmission dans son intégrité. En outre, le souci de rechercher des voies toujours nouvelles d'actualisation et d'inculturation peut manifester aussi un sensus fidelium soucieux d'entrer en dialogue avec le monde contemporain. Comment cette catégorie at -elle émergé et selon quel vocabulaire grec, syriaque, latin… ? Comment les figures d'autorité ecclésiale, les Pères, font-ils écho à ce flair du peuple, dans ses trois dimensions réceptive, active et prospective ? Quel statut lui confèrent-ils, alors qu'ils sont eux-mêmes profondément engagés dans l'élaboration du discours théologique ? Loin de s'identifier à l'expression d'une démocratie d'opinion, qui l'emporterait simplement par le nombre, cette perspicacité s'est même fréquemment exercée au sein de minorités : comment les Pères l'ont-ils accueillie, consultée, soutenue ou contestée ? La rencontre des Pères avec cette réalité touche à l'articulation de la foi spontanée et de la foi éclairée, aux rapports entre foi, théologie et Magistère, à la question du dialogue ecclésial, mais aussi au processus d'émergence d'une orthodoxie : autant de questions que ce colloque a cherché à approfondir afin de mieux évaluer l'impact de ce sensus fidelium.

Annonce de publication
Lors de ce colloque, un soin particulier a été consacré à mesurer comment, fils de leur temps, certains Pères de l’Église ont reproduit les catégories de pensée de leur époque alors que d’autres ont effectivement contribué à l’amélioration du sort des esclaves ; comment certains auteurs chrétiens sont passés de la réflexion théologique à des conséquences pratiques et concrètes (rachats d’esclaves, affranchissements par testament...). Des liens explicites existent-ils avec la frange profane déjà prête à ce saut qualitatif ? Finalement c’est le mécanisme complexe de la participation du christianisme à un changement de société qui est interrogé à travers cette question.