[go: up one dir, main page]

Explorez plus de 1,5 million de livres audio et livres électroniques gratuitement pendant  jours.

À partir de $11.99/mois après l'essai. Annulez à tout moment.

Les naufragés
Les naufragés
Les naufragés
Livre électronique385 pages4 heures

Les naufragés

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Les vacances sont enfin arrivées pour Virginie ! Accompagnée par sa belle-soeur, Olivia, elle compte bien profiter pleinement d’un séjour de rêve aux Bahamas. À l’aéroport, des frères particulièrement sexy, Matt et Joey, attirent son attention. Par un heureux hasard, tous ont la même destination voyage. Le Royal Palace leur en met plein la vue et un surclassement surprise charme les jeunes touristes au-delà de leurs espérances. Après les cocktails à la plage, le quatuor de nouveaux amis s’embarque pour une trépidante expédition de plongée en apnée. L’éblouissement cède cependant la place à un brutal désenchantement au cours de l’activité alors qu’ils se retrouvent coincés sur une île déserte. Les esprits s’échauffent rapidement. La panique s’installe. En bikini et en petites shorts, la bande se met à la recherche d’un abri pour la nuit, tout en échangeant sur des scénarios farfelus pour se sortir de ce cauchemar. Malgré tout, l’organisation se met en place, et des étincelles s’allumeront dans les yeux de certains de nos naufragés. Survivront-ils à cette épreuve difficile ?
LangueFrançais
ÉditeurLes Éditeurs réunis
Date de sortie7 févr. 2024
ISBN9782897838294
Les naufragés

En savoir plus sur Martine Labonté Chartrand

Auteurs associés

Lié à Les naufragés

Livres électroniques liés

Fiction générale pour vous

Voir plus

Catégories liées

Avis sur Les naufragés

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    Les naufragés - Martine Labonté-Chartrand

    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales

    du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Titre : Les naufragés / Martine Labonté-Chartrand

    Nom : Labonté-Chartrand, Martine, 1985- , auteure

    Identifiants : Canadiana 20230078605 | ISBN 9782897838294

    Classification : LCC PS8623.A263 N38 2024 | CDD C843/.6–dc23

    © 2024 Les Éditeurs réunis

    Illustration de la couverture : Géraldine Charette

    Les Éditeurs réunis bénéficient du soutien financier de la SODEC

    et du Programme de crédit d’impôt du gouvernement du Québec.

    Édition 

    LES ÉDITEURS RÉUNIS

    lesediteursreunis.com

    Distribution nationale

    PROLOGUE

    prologue.ca

    Imprimé au Canada

    Dépôt légal : 2024

    Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    Bibliothèque et Archives Canada

    De la même auteure

    chez Les Éditeurs réunis

    Chicanes de coachs, 2023

    Angélique à la boutique spécialisée, 2023

    Frédérique s’autoconstruit, 2022

    Le retour à la terre de Marie-Ève Casgrain, 2021

    Sous le charme de ses yeux trop bleus, 2021

    Party de bulles, 2020

    Méchantes menteuses, 2020

    Il était une fois dans la friend zone, 2019

    Cherche homme marié pour mieux le piéger, 2019

    Pour en finir avec mon ex, 2018

    Fantasmes d’une femme mariée – Le retour de l’amant, 2018

    Miss best-seller, 2018

    Lune de miel accidentelle, 2017

    Fantasmes d’une femme mariée, 2017

    Nos voisines, ces espionnes, 2017

    Jamais trop tard ! – Marion réoriente sa vie, 2016

    Rester jeune – Le défi ultime de Lucy Tremblay, 2016

    Ma vie en horoscope, 2015

    1

    Il est trois heures du matin et ma montre intelligente se met à sonner. Je me lève d’un bond. Je n’ai dormi que quelques heures, mais je pourrai toujours rattraper mon sommeil manquant dans l’avion plus tard. Mon chat lève la tête vers moi, surpris de se faire réveiller aussi tôt. Je lui caresse doucement les oreilles et lui murmure quelques mots :

    — Maman revient dans une semaine. Sois sage. Julie va venir prendre soin de toi.

    Je lui donne un petit bisou et je m’enferme dans la salle de bain. Le taxi arrivera bientôt et je dois être prête pile à l’heure, sinon ma belle-sœur Olivia m’en fera la remarque. Elle déteste les retardataires. Je noue ma longue chevelure blonde en un chignon haut, je me brosse les dents, je me lave le visage et je lance mes derniers effets dans ma valise. Je suis tellement contente de partir pour les Bahamas pendant une semaine ! J’ai travaillé fort au cours de la dernière année pour me payer ces vacances. Le seul point négatif à ce voyage est que je devais, au départ, y aller avec ma meilleure amie Sophie. Malheureusement, elle a dû se désister à la dernière minute à cause du boulot. Elle a réussi à annuler son voyage, mais ne bénéficiant pas d’une assurance annulation, je n’ai pas pu faire de même. J’ai dû improviser pour trouver une personne ayant une semaine de vacances devant elle, et le budget pour voyager aux Bahamas. C’est finalement la copine de mon frère qui s’est proposée pour m’accompagner. Je ne la fréquente pas beaucoup, même si elle est en couple avec mon jumeau depuis quelques années déjà. Je me dis que ce sera une bonne façon d’apprendre à la connaître dans l’intimité, et mon frère m’assure qu’elle mérite ces vacances.

    Les Bahamas… J’ai l’impression qu’un rêve va se réaliser. J’ai toujours souhaité y mettre les pieds. C’est tellement chic, comme destination ! J’imagine déjà les résidences fabuleuses au bord de la plage, les bateaux de luxe et les restaurants haut de gamme. Bien sûr, je n’ai pas les moyens d’accéder à toutes ces richesses, mais zieuter est un incontournable. J’espère qu’Olivia sera aussi partante pour une virée en ville afin de mieux découvrir la culture locale. On n’a pas eu le temps de discuter des activités qu’on fera sur place. On va dans un tout-inclus, il n’est donc pas nécessaire de sortir, mais j’aimerais bien tenter l’aventure quand même. On verra ce que la semaine nous réserve !

    Je reçois une notification sur mon téléphone m’indiquant que le taxi se stationnera devant chez moi dans quelques minutes. Je me précipite dans l’entrée, j’enfile mes espadrilles – pas question de traîner mes bottes d’hiver là-bas –, un manteau léger, je m’assure que mon passeport est bien dans mon sac à main et je regarde dans la minuscule fenêtre, cherchant les lumières du véhicule. Dès qu’il tourne dans l’entrée, j’ouvre la porte et je suis accueillie par une bourrasque de poudrerie spectaculaire qui me frigorifie sur place. J’ai de la neige plein le visage ! Je n’avais même pas remarqué qu’une tempête s’était levée. J’espère que cela n’aura pas d’incidence sur notre vol. Je n’aimerais pas que l’avion décolle en retard. Je ne veux pas manquer une seule minute de mon voyage.

    Le chauffeur a la courtoisie de descendre de la voiture et il m’aide à placer mon bagage dans le coffre arrière. Je m’installe sur la banquette, où je retrouve Olivia toute souriante, emmitouflée dans une grosse doudoune en plumes.

    — Tu as apporté ton manteau d’hiver ? remarqué-je.

    — Bien sûr ! Tu as vu la température ? Je ne vais pas me geler dehors et risquer d’attraper froid cette semaine.

    — Ça va prendre de l’espace inutilement dans tes bagages.

    — Ce n’est pas grave. Une fois à l’hôtel, je le placerai dans le placard et je ne le verrai plus.

    — Comme tes bottes, ajouté-je, en pointant ses pieds.

    — J’ai toujours froid aux pieds dans l’avion.

    — Au point de mettre des bottillons doublés ?

    — Laisse-moi me gérer, d’accord ? Déjà que je prends une semaine de vacances, je ne peux pas me permettre d’être malade au retour. Je mets tous les moyens en place pour éviter de prendre froid.

    — As-tu apporté ton bikini doublé de fourrure ?

    — Non, celui-là, je l’ai laissé à la maison. Tu es prête ? Tu as ton passeport ?

    — Oui, maman. Et j’ai même téléchargé ma carte d’embarquement.

    — Je valide, tout simplement. Imagine qu’on arrive à l’aéroport sans les documents de voyage. On aurait l’air bêtes.

    — Ne t’inquiète pas, tout ira bien. Tu as l’air stressée.

    — Stressée, moi ? Pfff ! Voyons, pourquoi je serais stressée ? Après tout, je laisse ton frère gérer la maisonnée. C’est bien la première fois que ça arrive.

    — Par maisonnée, tu parles bien de tes deux chats, non ?

    — Ce sont comme des enfants pour moi. Tu aurais dû les voir pendant que je faisais ma valise. Ils n’arrêtaient pas de miauler et de me tourner autour, comme s’ils se doutaient que je partais. Ce sont des petites bêtes très intelligentes, mais pour qui la routine est très importante.

    — Je suis convaincue que Tom saura en prendre soin.

    Ce ne sont que des chats. À part les flatter, les nourrir et vider leur litière, il n’y a pas grand-chose à faire pour s’en occuper. Je vois mal comment mon jumeau pourrait se tromper. Et s’il fait quelque chose de pas correct, les animaux ne viendront certainement pas s’en plaindre !

    — Je pense qu’il s’en tirera très bien. Tu n’y penseras plus une fois que tu seras sur la plage.

    — Tu as raison, je ferai de mon mieux pour les laisser de côté. Merci, Virginie.

    — Pourquoi ?

    — De m’avoir invitée à venir en vacances avec toi. J’en ai vraiment besoin.

    Elle sait pertinemment qu’elle représente mon deuxième choix de compagne de voyage, mais je ne vais pas le lui remettre sous le nez. Je décide donc de me montrer bien gentille.

    — Il y a longtemps que j’ai envie qu’on apprenne à se connaître davantage. On va avoir du temps pour jaser de tout et de rien. Tu vas voir, on va passer la meilleure semaine de notre vie !

    Une bourrasque de vent propulse de la neige sur le pare-brise du véhicule et le conducteur peste contre la température. Je déglutis et j’ouvre l’application de la météo. Rien de pire que la neige pour retarder un vol. Il n’y a rien d’alarmant dans les prévisions locales, et je n’ai pas reçu d’alerte de la compagnie d’aviation. Tout est au beau fixe pour le moment.

    — Oh ! s’exclame Olivia.

    — Quoi ? As-tu reçu un message de la compagnie ?

    — De la compagnie ? Non. De ma mère.

    — À cette heure ?

    — Oui, elle est toujours stressée quand je pars en voyage. Elle n’en dort pas de la nuit. Elle vient de m’envoyer le lien menant aux consignes de sécurité émises par le gouvernement du Canada pour les voyageurs qui se rendent aux Bahamas.

    — Oh…, fais-je. Personne ne t’oblige à les lire. Ce genre de document est généralement très dissuasif pour les touristes. Es-tu certaine qu’il soit judicieux de le consulter avant de mettre le pied dans l’avion ?

    — Probablement pas. Pensons plutôt à du positif. Quel est le premier drink que tu penses commander au bar ?

    — J’aime ça ! On se met en mode vacances. Je penche pour un Aperol Spritz. Et toi ?

    — Probablement un mojito.

    — Ah oui ! Autre bon choix. C’est évident que j’en bois cette semaine. Wow, j’ai tellement hâte d’y être ! M’asseoir sur la plage, les fesses dans le sable.

    — L’hôtel est haut de gamme. Je suis curieuse de voir les services qui y seront offerts. Je n’ai pas l’intention de lever le petit doigt, annonce ma belle-sœur. Ce sera soleil, alcool, repos.

    Le niveau d’excitation est à son maximum. Je suis finalement contente de l’avoir invitée. Je pense que nous passerons du bon temps.

    Quelques minutes plus tard, le chauffeur nous dépose à la porte des départs et nous entrons dans l’aéroport, qui est pratiquement vide à cette heure. Comme nous n’avons aucun bagage à enregistrer, nous nous dirigeons directement vers la sécurité.

    — J’ai dû faire des choix déchirants dans mes tenues d’été pour réussir à voyager léger, me confie Olivia.

    — Je comprends, mais c’est tellement plus simple avec un bagage de cabine. Crois-moi, tu n’as pas envie de perdre ta valise en route. De toute manière, mes derniers déplacements m’ont confirmé que j’utilise rarement tout ce que j’apporte, et j’ai réellement adopté un mode de vie minimaliste depuis que je travaille de la maison. J’ai réalisé que je n’ai pas besoin de beaucoup de diversité dans ma garde-robe.

    — Tu as pris combien de maillots ?

    — Huit.

    — Huit ? Voyons, on reste juste une semaine. Heureuse­ment que tu es minimaliste…

    — Mais je n’ai que deux paires de chaussures…

    — Quand même, huit maillots. Tu penses faire des parades de mode ?

    — Non, mais je n’aime pas avoir les fesses mouillées longtemps.

    — Elles ne seront pas mouillées, elles seront dans le sable, me taquine-t-elle.

    — C’est vrai ! Oh, c’est à nous !

    Je suis les indications du responsable de la sécurité qui nous fait signe d’avancer. Nous déposons nos effets dans des bacs sur les tapis roulants en papotant tranquillement. J’enlève mes chaussures, ma ceinture, je sors mon iPad de mon sac et je le place dans un bac en plastique. Olivia fait la même chose, mais il lui faut un temps fou pour se déshabiller. Sa doudoune entre difficilement dans le bac et ses bottes lacées ne coopèrent pas. Comme elle est devant moi, je n’ai d’autre choix que d’attendre.

    — Où allez-vous ? nous demande l’un des hommes.

    — Aux Bahamas, dis-je, excitée.

    — Vous n’êtes pas à la bonne place. Ici, c’est la sécurité menant aux vols vers les États-Unis. Vous devez continuer votre chemin vers la porte 100.

    — Sérieusement ? grommelé-je.

    — Désolé. Et bon voyage.

    Nous reprenons nos effets en silence et retournons sur nos pas. Nous marchons ensuite une dizaine de minutes, cherchant la porte 100. Enfin, nous arrivons à la bonne place. Cette fois, je passe la première. Tant qu’à faire le pied de grue, je préfère être proche des petites boutiques qui sont juste de l’autre côté. Cette fois, tout se déroule sans anicroche, et moins de cinq minutes plus tard, nous avons récupéré nos bagages.

    — Je pense que je n’ai jamais passé la sécurité aussi vite. Avoir su, j’aurais dormi un peu plus longtemps. On se retrouve avec deux heures trente devant nous à ne rien faire, dit Olivia.

    — Je préfère être en avance que me sentir stressée. Et, en plus, je t’invite à venir te prélasser avec moi dans un salon privé.

    — Un salon privé ?

    — Oui, madame !

    — Depuis quand as-tu accès à de tels privilèges ?

    — Depuis que je suis détentrice d’une carte de crédit platine. Je l’ai reçue pas plus tard qu’hier.

    — Wow, c’est génial ! J’ai hâte de voir l’endroit.

    — Allons-y, c’est par là.

    Olivia hoche la tête en souriant et nous roulons nos bagages vers le salon Feuille d’érable. Il nous faut quelques minutes pour repérer l’endroit et je brandis fièrement ma carte devant le préposé qui sommeillait à l’entrée. Les lieux ne semblent pas très fréquentés ce matin. Nous prenons un ascenseur qui nous mène au deuxième étage, où nous avons une vue exceptionnelle sur la piste d’atterrissage. Mais ce n’est pas ce qui attire mon œil au premier regard.

    — Tu as vu, il y a un bar. L’alcool est inclus.

    — Virginie, c’est techniquement encore la nuit.

    — Justement, on est plus près de l’heure de fermeture des bars que de celle à laquelle je me sers un café chaque matin ! On pourrait boire un petit mimosa. Il n’y a pas d’heure pour les mimosas.

    — Tu ne trouves pas que c’est exagéré ?

    — On est en vacances, non ? J’ai toujours dit qu’il n’existe pas d’horaire dans les aéroports. Tout le monde mange ou boit n’importe quoi à n’importe quelle heure.

    — Prendre l’avion assèche énormément la peau. Il n’est pas recommandé de boire de l’alcool si on ne veut pas trop se déshydrater.

    La sécheresse de ma peau est bien le dernier de mes soucis pour le moment. L’appel du mimosa est trop grand.

    — Me laisses-tu commencer par un café ? demande-t-elle. Ça me semble plus naturel pour l’instant.

    Je regarde ma montre. Elle a raison. Nous resterons ici deux bonnes heures. Nous avons le temps pour la caféine. Le mimosa s’invitera ensuite, j’en suis convaincue.

    Nous prenons un latté et nous nous installons sur une large banquette, tout près de la fenêtre. Nous voyons les avions et le salon dans un même coup d’œil. C’est parfait, on ne manque rien. Des employés s’affairent à remplir le buffet et mon estomac gronde.

    — Je vais aller me servir à manger. J’ai une faim de loup. Tu m’accompagnes ?

    — Pas tout de suite. Je vais finir mon café avant.

    — OK !

    Je me lève et je profite de l’occasion pour passer aux toilettes. Une fois sortie de la cabine, je jette un coup d’œil dans le miroir et je m’observe quelques secondes. Assurément, un peu de bronzage ne sera pas un luxe. Le teint pâle n’est pas ma meilleure arme pour me sentir séduisante. Je me sens d’attaque, cette semaine, pour attirer les hommes dans mes filets. Oui, je veux passer du temps avec ma belle-sœur, mais j’ai l’esprit 100 % ouvert à l’idée d’une brève rencontre en cours de route. On est en vacances ou on ne l’est pas ! Je replace mes cheveux et je sors des toilettes. Je m’arrête net avant de buter contre un homme qui s’apprête à rentrer dans la pièce juste à côté.

    — Oups, désolée, dis-je.

    — Aucun problème, ça arrive tout le temps, lance-t-il.

    Je le regarde une fraction de seconde. Il est sans conteste très beau. Il porte une casquette de sport, un chandail serré qui montre bien ses biceps. Son commentaire est tout de même arrogant. Je décide de le relancer.

    — Vraiment ?

    — Bien sûr. Toutes les femmes aiment attirer l’attention de Joey.

    Et il parle de lui à la troisième personne ! Il m’offre un large sourire, qui déclenche tout de suite quelques frissons en moi. Du jamais vu. Il maîtrise bien son arme secrète. Il entre dans les toilettes, me laissant là, stupéfaite. Il n’avait vraiment pas tort. Il détient un charisme fou, malgré ses propos hautains.

    Je laisse de côté le buffet pour le moment et je retourne auprès d’Olivia, qui a les yeux rivés sur son cellulaire.

    — Tu as vu ça ? m’exclamé-je.

    — Oui, je l’ai vu.

    — Tu en penses quoi ? Ça sort assez de l’ordinaire.

    — Moi qui étais déjà stressée, une autre affaire à ajouter à mon fardeau.

    — Ton fardeau ?

    — C’est clair. Cet événement va me trotter dans la tête lors de chacun de nos déplacements.

    — N’exagère pas. Ce n’est pas comme si on allait le rencontrer partout.

    — Quoi ?

    Je me rends compte que nous ne parlons pas du tout du même sujet. Je prends tout de même le temps de valider l’information.

    — Je faisais référence au gars sur qui je suis tombée à la sortie des toilettes. C’est bien de lui que tu parlais ?

    — Non ! Je parlais de la tuerie qu’il y a eu à Nassau hier. Ma mère vient de m’envoyer l’article. C’est incroyable ! Deux personnes sont mortes alors qu’elles profitaient tout bonnement de leurs vacances au soleil.

    D’abord, les consignes de sécurité aux voyageurs, puis ça ? À croire que sa mère souhaite gâcher son voyage. À voir l’air inquiet d’Olivia, ce n’est pas loin de fonctionner. Je lui fais signe de me tendre son cellulaire. Je veux voir la nouvelle de mes propres yeux. Le titre est assez clair : « Tuerie à Nassau : deux touristes sont morts ».

    — Tu te rends compte ? ajoute-t-elle d’une voix aiguë. Ça aurait pu être nous !

    — Mais non, relaxe ! C’est grand, Nassau. Et on n’était même pas là ! Ta théorie selon laquelle on aurait pu y passer est donc improbable.

    Je lui rends son appareil d’un air satisfait, comme si ma réflexion était digne des meilleures recherches scientifiques.

    — Il faut que j’appelle Tom, je dois le rassurer.

    — Il est cinq heures du matin. Il va faire une crise de panique si le téléphone sonne à cette heure.

    — Je vais devoir me méfier de chaque individu qu’on va rencontrer aux Bahamas. Les tueurs se cachent partout !

    — Tu exagères ! Prends donc un mimosa avec moi, ça va te faire du bien.

    J’aperçois le beau mec, Joey, qui sort des toilettes. Son regard passe au-dessus de moi, comme si j’étais invisible. Je suis persuadée qu’il a fait exprès de m’ignorer. Il va s’asseoir juste à côté de l’endroit où l’on distribue les boissons. Question d’attirer son attention, et d’oublier les tueries des Bahamas, je me lève et me dirige d’un pas alerte vers le bar. Je souris au barman, comme s’il était l’homme le plus intéressant du monde.

    — Sers-moi deux mimosas, s’il te plaît. J’ai décidé que mes vacances commencent maintenant ! Dans quelques heures, je serai aux Bahamas ! dis-je, bien trop fort.

    J’espère attirer l’attention de Joey, mais il ne regarde pas dans ma direction. Il discute plutôt avec un autre homme. Je n’ai pas plus de succès auprès du barman. Il ne dit rien et prépare les boissons. Je m’attendais à quelques exclamations de sa part. Il aurait pu se forcer un peu et tenter d’engager la conversation. Mais non. Heureusement, malgré son manque d’intérêt pour moi, il se montre efficace dans la concoction des drinks. Moins d’une minute plus tard, je rejoins Olivia et je lui tends son mimosa.

    — Santé ! lancé-je.

    Elle prend la flûte et en avale le contenu en deux gorgées. Je la regarde faire, les yeux ronds. La tuerie à Nassau la stresse, je comprends, mais à ce point ?

    — Je t’en sers un autre ? C’est inclus, n’oublie pas.

    — Oui, répond-elle, en me tendant sa coupe. En fait, apporte la bouteille, si c’est possible. Et laisse tomber le jus d’orange. Il y a plein de sucre, là-dedans.

    — OK, je retourne au bar.

    Je ne suis pas fâchée de me lever encore. Cela me permet de tenter d’attirer l’attention de Joey une autre fois. Justement, il est en train de se commander à boire. Je vais donc me placer près de lui, de manière qu’il ne puisse pas me manquer. Je lui fais mon plus joli sourire, mais il n’y répond que très brièvement avant de retourner s’asseoir. C’est à mon tour de commander.

    — Mon amie est vraiment de bonne humeur ce matin. Elle a envie de fêter ! Peut-on prendre la bouteille ? Ça nous évitera de faire des allers-retours au bar.

    Sans doute habitué aux caprices des voyageurs, le barman me tend la bouteille que j’accepte, surprise. Je ne pensais pas que ma démarche fonctionnerait. N’ayant plus rien à faire là, je tourne les talons et retourne auprès d’Olivia. Je lui remplis sa coupe, puis la mienne. Je m’apprête à trinquer de nouveau, mais elle fait cul sec. On est passées de « Il est bien trop tôt pour boire » à « Faisons honneur à la bouteille ». Je tente donc de la rassurer un peu.

    — Des milliers de personnes voyagent chaque année aux Bahamas. Les risques de se retrouver dans une fusillade sont vraiment minimes.

    — Savais-tu que les voitures roulent du côté gauche là-bas ? me lance-t-elle.

    — Non. C’était écrit dans l’article portant sur la fusillade ? Je ne vois pas trop le rapport.

    — Non, je suis en train de lire les avertissements pour les voyageurs que ma mère m’a envoyés.

    — On nous y avertit du danger de conduire à gauche ? Du genre : « Entre deux fusillades, si vous tentez de vous enfuir, n’oubliez pas de garder la gauche ! »

    — Arrête, tu dis n’importe quoi !

    — C’est ce que tu lis qui est n’importe quoi ! ajouté-je, en lui arrachant son cellulaire.

    J’en profite pour jeter un rapide coup d’œil à son article. Il y a plusieurs points dans la section des consignes de sécurité. Beaucoup trop à mon goût. Pourquoi lire ces recommandations ? Partir avec toutes ces craintes rendrait n’importe qui anxieux. Je décide de blaguer pour calmer le jeu.

    — C’est écrit ici : « Évitez de consommer de l’alcool en tout temps. » Il est évident que cette recommandation n’est pas pour nous, ajouté-je, comme toutes les autres. Allez, ferme ton appareil et relaxe. On s’en va dans un tout-inclus. L’autobus nous prend à l’aéroport et on ne bougera pas de l’hôtel.

    — Tu avais parlé d’aller zieuter les villas et les restos chics.

    — Oui, c’est vrai. On ira pendant la journée. Je parie que les consignes s’appliquent la nuit, surtout dans les quartiers chauds. Maintenant, pense à autre chose.

    Comme si ma requête avait été entendue, une voix nous interpelle.

    — Salut ! Je vous ai entendues dire que vous alliez aux Bahamas.

    Je me tourne vers un homme, mi-trentaine, cheveux mi-longs, yeux bleus. À première vue, il n’a rien de bien particulier. Il est du type qu’on ne remarque pas dans la foule. Sans être très costaud, il a de bons biceps et son chandail moule son torse qui m’apparaît bien défini. Cependant, c’est plutôt son compagnon qui retient mon attention : le fameux Joey. Il se tient derrière, une bière dans la main. Il doit penser comme moi : dans les aéroports, il n’y a pas d’horaire. On peut boire à n’importe quelle heure. Il a plus ou moins l’air intéressé à engager la discussion avec nous, il suit plutôt son ami qui, lui, apparaît très motivé à nous aborder.

    — Est-ce qu’on peut s’asseoir avec vous ? demande-t-il.

    Si cette requête peut me permettre de connaître davantage Joey, je suis prête à accepter sans hésiter.

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1