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Les guerriers d'Halzagar - Tome 1: Kellmer de Volk
Les guerriers d'Halzagar - Tome 1: Kellmer de Volk
Les guerriers d'Halzagar - Tome 1: Kellmer de Volk
Livre électronique477 pages6 heures

Les guerriers d'Halzagar - Tome 1: Kellmer de Volk

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À propos de ce livre électronique

Hélène Marie Chassé nous offre d’une trilogie fantastique nommée « Les Guerriers d’Hazalgar ».
Le premier tome est « Kellmer de Volk » où le bien et le mal se font la guerre, où les humains côtoient des entités surnaturelles, où un adolescent est le héros qui sauvera le monde de l’invasion des Ténèbres. Que fera le jeune et vaillant Kellmer de Volk lorsqu’il apprendra que le sort de Gallior repose sur ses frêles épaules? Mènera-t-il à bien sa mission en sachant que plusieurs siècles auparavant, les armées de la Bête sont parvenues à écraser les anciens royaumes ? Saura-t-il répondre aux vibrants espoirs du peuple de Gallior ? C’est avec la foi au cœur et le courage au ventre qu’il se lance dans l’aventure pour la sauvegarde de l’humanité.


À PROPOS DE L'AUTEURE


Hélène Marie Chassé est une passionnée d’écriture. Dès sa petite enfance, elle a grandi dans un village peu peuplé du Pontiac où le petit bois de son enfance représentait une forêt magique, où le ruisseau qui bordait le lopin de terre de son oncle était un marais mystérieux, où la ferme voisine était le vaste royaume d’un roi soumis au pouvoir d’un puissant sorcier, où les grondements du tonnerre annonçaient l’arrivée des dragons, où les éclairs constituaient l’arme de prédilection de guerriers aux pouvoirs surnaturels.
LangueFrançais
ÉditeurTullinois
Date de sortie22 févr. 2022
ISBN9782898091285
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    Aperçu du livre

    Les guerriers d'Halzagar - Tome 1 - Hélène Marie Chassé

    Dédicace

    Je dédie ce livre à mon ami Yves Lebrun, affectueusement surnommé Melzeau par son amoureuse et ses amis,

    un homme intègre, un ami fidèle,

    un amoureux de la vie et des livres,

    qui nous a quittés trop tôt.

    Citation

    « Cette histoire est vraie puisque je l’ai inventée ! »

    Boris Vian (L’écume des jours)

    Remerciements

    Je remercie tous ceux et celles qui ont cru en moi : mon frère Marcel qui m’a soutenue à travers toutes les intempéries de l’existence, mes chers amis qui m’ont encouragée à écrire au fil des ans. Je remercie aussi mes amis Facebook de leur fidélité, de leurs encouragements, de leur assiduité à suivre mes nombreuses publications. Leurs appréciations fleurissent chaque jour dans mon cœur. Je remercie particulièrement ma chère amie Nany Marchand, complice dévouée de mes équipées littéraires. Enfin, je remercie mon éditeur, Monsieur Claude Rey des Éditions du Tullinois, ainsi que ses collaborateurs, de rendre Kellmer de Volk, le premier Tome de ma trilogie Les Guerriers d’Hazalgar, accessible à mes lecteurs et lectrices éventuels.

    Les personnages principaux

    1. Ardanor, Seigneur du clan de Volk, père de Kellmer

    2. Darex, Seigneur du clan de Nyx

    3. Delzar, le loup, Seigneur du clan de Rorm, éclaireur

    4. Farènz, Seigneur du clan de Prax

    5. Gülrik, Seigneur du clan de Tork

    6. Haxor, maître d’armes, amoureux de Lilythe

    7. Jaline, devineresse (lecture des runes)

    8. Kalir, l’aigle, Seigneur du clan de Fën

    9. Kellmer de Volk, fils d’Ardanor de Volk

    10. Krogn, La Bête (Ténèbres)

    11. Lédane, Seigneure du clan de Hanor, amie de Kellmer

    12. Lilythe, la fée, Seigneure du clan de Khirf

    13. Mellzo, l’Homme Sage, clan de Volk

    14. Melrik d’Olbro, Nordien, éclaireur

    15. Myrise, la panthère, Seigneure du clan de Dorn

    16. Olliah, chevalier, fiancée, puis épouse de Kellmer

    17. Sharane, mage de la Confrérie d’Arganior (Astrann)

    18. Skarell, chevalier maître d’armes

    19. Sorène, Gardien de l’Ourse, protecteur de Kellmer

    20. Tanguil, cousin Nordien de Melrik

    21. Théorène, mage de la Confrérie d’Arganior (Astrann)

    22. Viloss, fils de Krogn (la Bête)

    23. Xandor de Prax, grand mage du clan de Prax

    24. Xordo, sorcier de Démogorth, ancien maître de Sharane

    25. Zolthèz, Grand Maître du Haut Conseil, Cité de Volk

    Les personnages secondaires

    1. Aldorik, membre du Haut Conseil

    2. Alida, mage de la Confrérie d’Arganior (Astrann)

    3. Améane, épouse du roi Férys, entité cristalline

    4. Anginus, Grand Magellor, Confrérie d’Arganior

    5. Aranie, Princesse de l’ancien royaume de Pèl

    6. Arée, capturée par Norouk, aux Montagnes de l’Ourse

    7. Éziëlle, Protectrice de la Cité d’Ork (Cité Éternelle)

    8. Dékarius, Maître des Ténèbres

    9. Donathus, mage de la Confrérie d’Arganior (Astrann)

    10. Doumi, enfant esclave de la Bête

    11. Elléliah, Déesse Suprême de la Lumière

    12. Énée, fille de l’Ourse, future enfant de Lédane

    13. Énor, Roi de l’ancien royaume de Pèl, père d’Aranie

    14. Fées du Grand Val, créées par les dieux

    15. Férys, roi de la forêt mystérieuse, entité cristalline

    16. Fréna, capturée par Norouk, aux Montagnes de l’Ourse

    17. Gabrion des Trois Moulins, 2e incarnation de Xandor

    18. Gann, gardien de la Confrérie d’Arganior (Astrann)

    19. Guillo d’Orem, historien et ancien époux de Sharane

    20. Hanie, Intendante, maison des soins et des morts

    21. Haziell, Esprit de l’Ourse (entité cristalline)

    22. Horus, sorte de chien de la princesse Prina

    23. Inok, Gouverneur du Nord

    24. Izérias, mage de la Confrérie d’Arganior (Astrann)

    25. Joranis, Seigneur du clan de Galih

    26. Karion, fils de Férys et Améane, entité cristalline

    27. Katria, fille de Férys et Améane, entité cristalline

    28. Kellmerik, ancien Seigneur de Volk, père d’Ardanor

    29. Kimo, rapace appartenant désormais au Grand Val

    30. Kolthas, mage de la Confrérie d’Arganior (Astrann)

    31. Lyzère, mage de la Confrérie d’Arganior (Astrann)

    32. Marée, fille de l’Ourse, future enfant de Sharane

    33. Matriarches, Nordiennes aveugles, lisant les étoiles

    34. Meknor, Consul suprême du Haut Conseil

    35. Miro, enfant trouvé aux Montagnes de l’Ourse

    36. Nilou, fils de l’Ourse, futur enfant de Lilythe

    37. Nomade, chien du Nordien Melrik

    38. Norouk, Nordien, ami de Melrik

    39. Oruk, jeune Nordien

    40. Pères de Brème, Sages de la Cité de Brème

    41. Prina, princesse du royaume de l’Arc-en-Ciel

    42. Rafaël de Volk, fils aîné d’Ardanor, esclave de la Bête

    43. Roaki, entité cristalline, forêt mystérieuse

    44. Sarine, mage de la Confrérie d’Arganior (Astrann)

    45. Sénée, fille de l’Ourse, future enfant de Myrise

    46. Tara, petite fée du Grand Val, unie à Lilythe

    47. Thoranz, Seigneur du clan de Kiam

    48. Tirou, fils de l’Ourse, futur enfant d’Olliah et Kellmer

    49. Xelliaz, esprit du Grand Val, entité unie à Jaline

    50. Xériel, fantôme du Nord, Cité d’Ork, dite Éternelle

    Les lieux

    1. Astrann, lune, siège de la Confrérie d’Arganior

    2. Berceau de l’Âme cosmique

    3. Berceau des Âmes mauvaises

    4. Bourg du Goéland

    5. Cité de Brème

    6. Cité d’Olbro

    7. Cité d’Ork (Cité Éternelle)

    8. Cité de verre (Grand Val)

    9. Cité de Volk

    10. Démogorth, monde des Ténèbres

    11. Forêt morte, contrôlée par la Bête

    12. Forêt mystérieuse, habitée par des entités cristallines

    13. Gallior, le monde où l’action se déroule

    14. Gouffre de la Bête

    15. Grand Val (entité cristalline)

    16. Ile d’Hazalgar

    17. Krithon (dans les profondeurs de Démogorth)

    18. Maison des morts

    19. Maison des prières

    20. Maison des soins

    21. Mines de Démogorth

    22. Montagnes de Glace

    23. Montagnes de l’Ourse (entité cristalline)

    24. Royaume de Pèl (ancien royaume)

    25. Royaume des Âmes

    Prologue

    Au commencement du monde, avant que l’univers n’existe, il n’y avait jamais eu que le néant. Pas une brise, pas une lueur, pas une odeur, pas un son, pas même une pensée, rien que le vide absolu. C’est alors que deux énergies latentes et opposées émergèrent, se jaugèrent, puis se heurtèrent violemment. Une étincelle aveuglante brilla durant un infinitésimal instant, puis les énergies se combattirent brièvement avant de se séparer, à tout jamais. La Lumière et les Ténèbres se partagèrent l’univers, sans plus jamais chercher à se croiser. De fragments d’énergie, ils ne mirent que quelques milliards d’années à grandir, évoluer, et se hisser au rang de dieux. Elléliah, Déesse de la Lumière, et Dékarius, Maître des Ténèbres, entreprirent de régner chacun sur leur univers respectif en créant des mondes à leur mesure, des mondes qui sauraient les glorifier, les craindre et suivre aveuglément leurs enseignements.

    Si Elléliah fit preuve d’amour et de compassion envers les créatures qui peuplaient ses mondes, Dékarius s’appliqua plutôt à devenir le maître incontesté de la peur et de l’atrocité. Tandis qu’Elléliah s’évertuait à aimer, enseigner et protéger ses sujets, Dékarius soumettait, torturait, et tuait les siens sans la moindre retenue. Durant quelques millénaires, ils passèrent leur temps à s’épier, sans jamais se mêler des affaires de l’autre, jusqu’au jour où le Maître des Ténèbres commença à s’ennuyer dans sa solitude, et entreprit d’envahir les mondes de la Lumière. Même si Elléliah en fut à la fois agacée et attristée, elle se garda bien de lui déclarer la guerre. Elle savait que ce jour viendrait tôt ou tard, mais elle préférait choisir son heure plutôt que de céder à la provocation.

    Plusieurs millénaires s’écoulèrent sans qu’elle ne réagisse, mais un jour, lorsque Dékarius parvint à tailler une brèche dans son univers, la colère d’Elléliah gronda et finit par l’emporter sur sa retenue. Irritée par ses nombreux actes de barbarie, elle cessa peu à peu de résister et se laissa entraîner sur le chemin de la guerre, une guerre qui ne pourrait se conclure que par la soumission de Dékarius. C’était ainsi qu’elle voyait les choses. C’était avec cette intention qu’elle ordonna à ses armées de se préparer à intervenir lorsque le moment s’y prêterait.

    Première Partie

    Le retour de la Bête

    1 - L’Homme Sage

    L’Homme Sage, c’était ainsi qu’on le nommait dans tous les clans et même dans les contrées les plus éloignées de Gallior. Mais ceux qui le côtoyaient de près l’appelaient Mellzo. C’était un vieillard altruiste et cultivé, qui faisait peu de cas de l’avarice et de la méchanceté, et dont le caractère jovial et bourru pouvait en déconcerter plus d’un. Il appréciait par-dessus tout les plaisirs de la table, mais il aimait aussi les livres et les parfums, l’humour et le sarcasme, et de temps à autre, jouer des tours à sa façon, ce que d’aucuns avaient du mal à réconcilier.

    Il prit un livre ancien qui traînait sur le canapé et s’y plongea avec ardeur. Ses yeux n’y voyaient plus aussi bien qu’autrefois, mais il avait remarqué que son intuition et sa lucidité s’en étaient accrues. La porte de sa chaumière grinça soudain sur ses gonds et il se retrouva face à un homme à la stature imposante, qui entra sans attendre d’y être invité.

    — Bonjour Homme Sage, dit-il en le saluant. On m’a dit que vous pourriez m’aider à comprendre un mystère.

    — Ah oui, et de quel mystère parles-tu donc jeune homme ? demanda Mellzo en écarquillant les yeux.

    — D’un mystère incompréhensible à mon entendement.

    Mellzo tendit la main vers le paquet qu’il serrait contre lui.

    — Montre-moi donc ce que tu tiens-là.

    L’inconnu posa le paquet sur la table et prit place sur une chaise plutôt inconfortable pour un homme de sa stature.

    — Ce matin, en m’éveillant, j’ai aperçu cette étrange griffe au pied de mon lit. J’ai tout de suite senti son aura malsaine et je l’ai enveloppée dans ce chiffon, dit-il en tapotant le paquet. J’ai hâte de voir ce que vous allez m’en dire.

    Mellzo examina la griffe. Plus longue qu’une main d’homme, elle dégageait une odeur de chair putréfiée. Il s’empara d’une pince et la retira délicatement du chiffon, mais elle se désagrégea aussitôt en épais grumeaux verdâtres. Le souffle court, Mellzo souleva sa lourde silhouette et posa les mains à plat sur la table.

    — C’est la griffe d’une créature de la Bête, annonça-t-il.

    Le visage livide, l’inconnu le remercia et quitta la chaumière d’un pas pressé.

    ♦ ♦ ♦

    La nouvelle se répandit si vite que quelques jours plus tard, l’inconnu revint chez l’Homme Sage en compagnie de quelques chefs de clans. Comme ils ne pouvaient pas tous discuter avec lui en même temps, ils confièrent cette tâche à l’illustre Seigneur de Volk. Issu d’une longue lignée, Ardanor avait vu son clan s’agrandir jusqu’à devenir le plus puissant de tous, et il l’était resté, même après qu’il soit parvenu à instaurer la paix, une paix qui durait depuis plus de vingt ans.

    — De l’avis de certains, il n’est plus tout à fait de mon âge de participer aux choses de la guerre, mais je possède encore les qualités qui ont fait de moi un stratège efficace. J’en veux pour preuve la notoriété de mon clan, clama-t-il avec orgueil.

    Les autres chefs de clans s’écartèrent respectueusement pour le laisser entrer. Mellzo connaissait vaguement la plu-part d’entre eux, mais Ardanor de Volk lui était plus familier. L’ayant croisé à quelques reprises, il était à l’aise de le recevoir. Il l’invita donc à s’asseoir en face de lui et posa deux chopes de bière froide sur la table. Ardanor le remercia et avala la bière d’une traite.

    — La route était fatigante, expliqua-t-il pour s’excuser.

    Mellzo le resservit et s’installa en face de lui. Ardanor hésita un moment, puis se décida à poser une carte au milieu de la table. Elle était dessinée sur une feuille jaunie par le temps et déchirée par endroits.

    — C’est une carte très ancienne, observa l’Homme Sage.

    — En effet. Je l’ai apportée pour vous montrer le lieu précis où mon fils Kellmer a trouvé la griffe.

    Mellzo fronça les sourcils.

    — Je croyais qu’il l’avait trouvée au pied de son lit.

    — Non, mon fils a juste essayé de jouer un tour à un ami qui s’est empressé de courir vers vous.

    — Ah. Voyons un peu cette carte.

    Il la retourna dans tous les sens et s’attarda sur un gros X peint en rouge où était inscrit : Gouffre de la Bête.

    — C’est à cet endroit ? s’enquit-il, intrigué.

    — Oui, dans un simple cratère. La griffe semblait avoir été posée là.

    — Vraiment, dit Mellzo en relevant ses lunettes à montures dorées. Qu’attendez-vous de moi ?

    — Je serais soulagé si vous acceptiez de nous y accompagner. Mon fils affirme qu’il règne une étrange énergie en ce lieu.

    L’Homme Sage reposa la carte sur la table et avala lente-ment sa bière, comme si c’était le geste le plus important de toute sa vie. Lorsqu’ils eurent terminé, il rinça les chopes et les posa à leur place habituelle, sur un cabaret en bambou.

    — Nous irons demain, annonça-t-il en ouvrant la porte. Je vous attends à l’aube, ne soyez pas en retard.

    — Ça ne risque pas, puisque j’ai l’habitude d’être matinal.

    — C’est aussi mon cas, assurément.

    Ainsi congédié, Ardanor quitta la maison, déconcerté et guère satisfait de son entretien, car il savait aussi peu de choses qu’à son arrivée. Quant à Mellzo, il était particulièrement soucieux. Il y avait bien longtemps que la Bête avait dévasté Gallior. Les ravages avaient été tels que l’ordre ancien y avait à peine survécu. La plupart des chevaliers, nobles et soldats, avaient été décimés par les puissantes armées de la Bête, laissant le peuple sans défense et sans guides pour faire face à l’adversité. Tout s’était éteint et il avait fallu des centaines d’années avant que Gallior ne renaisse enfin de ses cendres. Seuls quelques rares manuscrits témoignaient encore de son Histoire. On y découvrait parfois des descriptions détaillées de l’horreur qui avait pétrifié les anciens royaumes. Et voilà que l’Histoire menaçait de se répéter. Voilà que le monde allait être à nouveau bouleversé, saccagé, anéanti. Mellzo sentit une douleur lancinante étreindre son cœur, mais il préféra l’ignorer. Il posa une pile de manuscrits anciens sur la table du séjour, puis se replongea dans les récits sanglants de Gallior. Il savait qu’on attendait de lui des réponses, mais il n’en avait aucune.

    ♦ ♦ ♦

    L’aube dessina un arc de lumière au-dessus de la chaumière de Mellzo. Il prit sa canne et son baluchon, puis sortit dans la cour où l’attendaient Ardanor et un garçon au regard espiègle.

    — Je m’appelle Kellmer de Volk… pour vous servir.

    Mellzo examina le jeune homme à la silhouette efflanquée qui le dévisageait effrontément, et fronça les sourcils.

    — Vraiment ? Et tu vas me servir à quoi, dis-moi ?

    Kellmer s’esclaffa.

    — Eh bien… à monter sur ce cheval par exemple.

    L’Homme Sage recula d’un pas.

    — Tu es fou. Il n’est pas question que je grimpe sur cette créature. Ce n’est plus de mon âge, je préfère aller à dos d’âne.

    Un rire franc monta dans la gorge du garçon.

    — À la bonne heure, je vais donc seller cet âne.

    Kellmer installa la selle avec soin. Moins d’une demi-heure plus tard, ils traversèrent la Cité de Volk, qui n’était guère plus qu’un vague assemblage de hameaux, et s’enfoncèrent tous les trois dans les fourrés. Kellmer les guida habilement à travers les sentiers étroits de la forêt. Curieux d’en apprendre davantage sur leur compagnon, il commença à l’interroger sur sa vie.

    — Crois-tu pouvoir te taire un petit moment ? J’aimerais bien méditer sur les bruits de la nature.

    — Ah, je suis bavard, s’excusa Kellmer, l’œil moqueur.

    — Effectivement mon garçon.

    Un large sourire éclaira le visage du jeune homme, mais il se résolut à taire sa curiosité et feignit de s’intéresser aussi à la nature environnante.

    — Attention Père, le sentier est de plus en plus étroit.

    — Ne t’en fais pas mon fils, je suis toujours prudent.

    Ils chevauchèrent tranquillement et près d’une heure plus tard, ils atteignirent un cratère qui empestait la pourriture. Le garçon aida Mellzo à descendre de l’âne.

    — C’est là, annonça-t-il fièrement en pointant le cratère.

    Dégoûté par la puanteur qui en émanait, le vieil homme se mit à toussoter.

    — Montre-moi l’endroit exact où tu as trouvé la griffe.

    — Il faut descendre au fond du cratère, l’informa Kellmer en fronçant les sourcils, mais je ne sais pas si vous allez y arriver.

    — Occupe-toi de toi et moi de moi, s’écria le vieil homme.

    Ignorant sa remarque acerbe, Kellmer prit son bras et le guida dans la descente. Mellzo avait envie de protester, mais il devinait que ce jeune impertinent ne le laisserait pas faire.

    — C’est là, s’écria Kellmer, c’est le trou à la forme bizarre.

    L’Homme Sage se pencha et l’examina avec soin.

    — Ce n’est pas un simple trou. On dirait une empreinte. Je ne serais guère étonné qu’elle appartienne à la Bête.

    Ardanor pâlit.

    — La Bête, vous en êtes certain ?

    Mellzo réfléchit un instant avant de répondre, car la terreur se lisait de plus en plus dans le regard du chef de clan.

    — Je ne vois aucune autre explication à la présence de cette empreinte. Que nous le voulions ou non, il est probable que la Bête soit de retour parmi nous et que nous devions faire face à une nouvelle invasion.

    Une ombre balaya le regard d’Ardanor de Volk. Il connaissait bien l’Histoire du monde, et même s’il craignait de l’envisager, il ne doutait pas vraiment de la pertinence de cette hypothèse. Ils reprirent le chemin du retour dans un silence oppressant. Même le joyeux Kellmer n’osait proférer un son.

    ♦ ♦ ♦

    Impatients d’entendre le récit de leur équipée, quelques chefs de clans vinrent à leur rencontre.

    — Alors, s’enquit Lédane, la valeureuse Seigneure de Hanor, cette griffe est-elle celle de la Bête, tel que nous le redoutions ?

    Mellzo promena son regard sur les visages inquiets qui l’entouraient.

    — Non, mais c’est sûrement celle de l’une de ses créatures. Je ne vois pas ce que ça pourrait être d’autre.

    Friande de nouvelles, la foule s’agglutinait autour d’eux. Les éclats de voix fusèrent, puis furent interrompus par un homme de haute taille qui fendit la foule en réclamant la parole.

    — Je suis Xandor de Prax, Grand Mage du clan de Prax, se présenta-t-il. Vous connaissez sans doute ma réputation.

    Mellzo l’ignora et s’adressa à la jeune Lédane de Hanor.

    — Il serait sans doute opportun d’informer le Haut Conseil de notre découverte. Qu’en dites-vous ma chère ?

    Une ombre envahit le regard de Lédane.

    — Bien que je sois le chef d’un autre clan, je pense qu’il est souhaitable de requérir une audience auprès de Maître Zolthèz. Après tout, cette découverte concerne d’abord le clan de Volk.

    — Vous me feriez un grand honneur en m’y accompagnant.

    — J’y serai demain au soleil de midi, déclara-t-elle.

    — Parfait, répondit le vieil homme. Je vous y attendrai.

    En voyant la déconvenue de Xandor de Prax, Kellmer pouffa de rire sous l’œil réprobateur de son père. Ulcéré, le mage leur lança un regard méprisant, puis s’éloigna à grandes enjambées, en se promettant qu’il n’en resterait pas là.

    Mellzo salua Lédane et pria Kellmer de l’escorter chez lui.

    — J’ai quelque chose pour toi jeune impertinent. Et puis, je tiens à ce que tu m’accompagnes à l’audience du Haut Conseil. Si je t’offre un lit et un bon repas, ça te va ?

    — Oui, si ça convient à mon père, dit-il en souriant.

    Ardanor acquiesça et ils s’éloignèrent lentement des curieux. Mellzo sourit en réalisant que malgré ses bavardages incessants, il appréciait de plus en plus la compagnie du jeune homme.

    Kellmer le suivit à la cuisine et accepta une bière fraîche.

    — Tu n’as pas froid aux yeux à ce que je vois.

    — Pourquoi dites-vous ça ? l’interrogea Kellmer.

    Un sourire énigmatique caressa le visage de Mellzo.

    — Parce que tu n’as pas la permission de boire de la bière, que tu t’es moqué ouvertement de Xandor de Prax… et que tu as osé mentir à ton père au sujet de la Bête. Je t’écoute, dit-il en prenant place en face de lui.

    — J’ai vu la Bête, commença Kellmer. Elle est immense. Je n’ai jamais rien vu de tel. Mais comment l’avez-vous deviné ?

    Mellzo lui lança un regard narquois.

    — Tu parles trop quand tu essaies de cacher des choses.

    — Ah, me voilà pris en flagrant délit, railla Kellmer.

    — Oui, eh bien demain, tu devras leur raconter tout ce que tu sais. Finis ta bière et mange un morceau avant d’aller dormir. Tu pourras faire un brin de toilette dans ta chambre. Tiens, dit-il en lui tendant un œil de tigre. Je possède une très jolie collection de pierres et le soir, il m’arrive encore de les contempler avant de m’endormir.

    — Merci, dit Kellmer en glissant la pierre dans sa poche.

    Lui aussi aimait les pierres. Il ne savait pas pourquoi, mais elles le rassuraient. Ils terminèrent leur repas, puis Mellzo lui montra sa chambre, une toute petite pièce sobrement décorée. Kellmer fit rapidement sa toilette, puis ferma les persiennes et éteignit les lampes. Un peu plus tard, il s'endormit sous l’œil bleu de la lune.

    ♦ ♦ ♦

    Selon son habitude, Mellzo se leva à l’aube, se versa une tasse de thé et entreprit la lecture d’un manuscrit ancien, un ouvrage dont certains mots et symboles lui échappaient encore. Il attendit que le soleil se lève avant de réveiller Kellmer qui l’accueillit en souriant. Mellzo nota que la bonne humeur lui allait plutôt bien.

    — Tu as faim j’espère.

    — Je suis affamé, déclara-t-il en sautant du lit. Je pourrais même dévorer un bœuf.

    — Eh bien, tu devras te contenter d’un œuf, répondit Mellzo.

    Ils dégustèrent tranquillement leur repas et se mirent en route. Lédane les attendait à la porte du bâtiment où siégeait le Haut Conseil. Portant les couleurs de son clan, elle les accueillit en souriant. Le gardien les escorta dans la salle du Haut Conseil, puis referma discrètement les portes. Ils s’approchèrent d’une longue table, intimidés par les cinq paires d’yeux qui les fixaient avec curiosité.

    — Prenez place, dit Maître Zolthèz sur un ton courtois. Nous sommes impatients d’entendre tous les détails de votre aventure.

    Mellzo salua respectueusement les membres du Haut Conseil et entama un long récit ponctué d’anecdotes. Il invita ensuite le jeune Kellmer à raconter sa version des événements, ce qu’il fit sans omettre la forêt agonisante et les cratères disséminés autour du Gouffre de la Bête.

    — J’ai ouïe dire que Xandor de Prax souhaitait s’exprimer et que vous l’en avez dissuadé sans aucun ménagement, déclara le conseiller Meknor. Vous avez une explication ?

    Mellzo fronça les sourcils.

    — Assurément. Nous avions fait un long périple et j’avoue que je souhaitais me reposer. Aurais-je dû m’écrouler de fatigue à seule fin de le satisfaire, rétorqua-t-il sèchement.

    — Bien sûr que non, riposta Meknor. Personne n’exige cela d’un vieil érudit tel que vous, précisa-t-il.

    Malgré la note de sarcasme, Mellzo préféra garder le silence, mais c’était sans compter sur la promptitude de Kellmer.

    — Il était arrogant et prétentieux. Et puis il ne fait même pas partie de notre clan !

    Lédane posa la main sur son bras et lui souffla à l’oreille.

    — Moi non plus, jeune homme.

    Kellmer se mit à toussoter. Lédane attendit qu’il se calme et prit la parole d’une voix assurée qui parut plaire à l’assemblée.

    — Allons, mes amis, il me semble que nous ne sommes pas ici pour soigner les susceptibilités, mais pour informer le Haut Conseil des périls qui nous guettent. Mon clan est inquiet et je souhaite le rassurer. Nous comptons nous rallier au clan de Volk et j’espère qu’il en sera de même des autres clans, y compris du clan de Prax, si bien sûr, votre ami Xandor parle au nom du clan de Prax, souligna-t-elle en fixant Meknor d’un œil amusé.

    Le Conseiller s’abstint de riposter, pleinement conscient que l’heure n’était pas aux conflits internes et aux luttes de pouvoir.

    — Je suis aussi de cet avis, trancha Zolthèz, d’une voix forte. Il importe davantage d’identifier les menaces qui nous guettent que de s’attarder à des considérations personnelles. Poursuivez.

    Elle fit un compte rendu concis et termina en déclarant ce que Mellzo pensait aussi.

    — Nous ignorons depuis quand, mais à l’évidence, la Bête est de retour parmi nous, et je suis sûre que ses armées ne vont pas tarder à la rejoindre. Si nous n’agissons pas rapide-ment, une destruction proportionnelle à celle des anciens royaumes risque de nous rayer de la surface de Gallior.

    Un silence glacial enveloppa la salle du conseil et Zolthèz le rompit pour mettre fin à l’audience.

    — À présent, vous pouvez vous retirer. Nous allons discuter entre nous et déterminer les actions à entreprendre.

    Ils s’éloignèrent, l’esprit encombré de visions terrifiantes.

    — Sommes-nous tous appelés à nous éteindre ? demanda Lédane.

    — Pas sans nous battre, assura Kellmer avec passion.

    Mellzo le contempla longuement. Il y avait si longtemps que le vent de la jeunesse avait soufflé sur sa vie, si longtemps que sa passion était domptée. Un sourire espiègle franchit les ans et le ramena un moment dans la légèreté de la jeunesse. En ces temps difficiles, il en avait bien besoin. La fougue et la candeur de Kellmer lui permettaient de s’y replonger.

    — Un tout nouveau chapitre de l’Histoire de Gallior est en train de s’écrire, dit-il simplement.

    — Espérons que ce ne sera pas le dernier, soupira Lédane.

    Mellzo pressa sa main, comme il l’aurait fait avec une enfant.

    — Dans la vie, il n’y a ni commencement, ni fin, ma jeune amie. Il n’y a qu’un enchevêtrement inextricable de possibilités et de poursuites incessantes du bonheur.

    — Difficile de se préoccuper du bonheur avec la menace qui plane au-dessus de nos têtes.

    — La Bête n’a rien à y voir. Le bonheur est un état intérieur qui n’est régi que par notre propre état d’être.

    — J’avoue qu’en ce moment, ces mots me semblent futiles.

    — Et pourtant, la vérité s’y trouve.

    Kellmer les écouta jongler avec les mots et cela lui rappela la voix mélodieuse de sa mère qui lui parvenait certains soirs quand il s’allongeait pour écouter les étoiles discuter entre elles. Durant un instant fugace, il la retrouva dans la douceur et le parfum de Lédane. Une vive émotion monta dans sa gorge et il ferma les yeux pour ne pas pleurer.

    2 - Xandor et la Bête

    Après sa rencontre désastreuse avec l’Homme Sage, Xandor se sentait humilié. D’aussi loin qu’il s’en souvienne, personne ne l’avait jamais traité avec une pareille effronterie. Mellzo avait poussé l’opprobre jusqu’à le narguer en présence des chefs de clans, lui le Grand Mage de Prax. Il se servit un thé à la menthe en ruminant sa frustration, puis chercha le moyen le plus efficace de lui clouer le bec. Il s’installa à sa table de magie et se mit en quête d’une ruse qui pourrait lui permettre de détrôner son rival. Sincèrement soucieux de l’avenir de Gallior, Xandor voulait découvrir les dangers qui planaient sur eux. Il ferma les yeux et se plongea dans les méandres du monde invisible où les esprits des morts lui dévoilèrent l’avènement des armées de la Bête. Il aurait voulu partager ses visions et exprimer ses mises en garde, mais à cause de ce détestable Homme Sage que tous admirait, plus personne ne l’écoutait.

    Il entendit soudain qu’on grattait à la porte.

    — C’est moi, annonça Meknor. Laisse-moi entrer.

    Il ouvrit en fronçant les sourcils.

    — Pourquoi es-tu nerveux, qu’as-tu donc à m’apprendre ?

    Le conseiller hésita, de crainte de manquer de tact.

    — Hélas, rien qui n’aurait pu attendre à demain, mais je me devais de t’en informer. J’ai essayé de plaider en ta faveur auprès des membres du Haut Conseil, mais ils sont restés sourds à mes arguments. Je suis désolé, Xandor.

    Le mage ne répondit pas. Qu’aurait-il pu ajouter au fait qu’il n’avait plus la moindre crédibilité aux yeux du Haut Conseil ?

    — Je peux t’offrir une tasse de thé ?

    Embarrassé, Meknor fit la grimace.

    — Je te remercie, mais comme je n’ai pas envie de me mettre les autres à dos, je préfère ne pas être vu en ta compagnie. Tu devras te débrouiller seul cette fois, mon pauvre ami.

    Il se faufila dehors en relevant son col. Déçu, Xandor referma la porte en hochant la tête. « Ce ne sera pas la première fois que je mènerai une bataille en solitaire, maugréa-t-il. »

    ♦ ♦ ♦

    Après la visite de Meknor, la colère de Xandor le consuma. Quelques jours plus tard, nourri d’un feu intérieur que seule la vindicte pourrait éteindre, il rassembla quelques affaires et sortit discrètement, en sifflotant comme un promeneur soli-taire, puis emprunta un sentier qui menait au cœur de la forêt. Après plus d’une heure de marche, il s’aperçut qu’il tournait en rond et qu’il se trouvait encore en bordure de la cité. « Mince, je devrais être au Gouffre de la Bête. » Il rentra chez lui et se laissa glisser sur son lit, épuisé. « D’après Meknor, le Seigneur de Volk possède une carte qui devrait me permettre de trouver ce foutu gouffre. Je dois mettre la main dessus, pensa-t-il avant de s’endormir. »

    Se réveillant dans la soirée, il alluma une lampe et s’installa à sa table de magie, sans se donner la peine de clore les volets. En tournant les pages d’un grimoire ancien, il trouva des formules étonnantes. Si certaines semblaient assez inoffensives, d’autres s’avéraient incontestablement perverses. Il y avait des sorts pour à peu près tout, mais il hésitait à y avoir recours, car le prix à payer pouvait s’avérer très élevé. En jetant un bref regard par la fenêtre, il frémit d’horreur en remarquant qu’une masse informe recouvrait entièrement la lune. Il ferma les volets, puis éteignit les lampes et emporta le grimoire dans sa chambre.

    ♦ ♦ ♦

    Au matin, Xandor dévora son petit déjeuner, puis se rendit au manoir du Seigneur de Volk. Il frappa à la porte et attendit. Le jeune et agaçant Kellmer lui ouvrit en bâillant.

    — Bonjour, dit-il d’une voix sirupeuse. J’aimerais discuter avec votre père.

    Le garçon lui adressa un sourire moqueur.

    — Attendez là, je vais le prévenir de votre visite.

    Contre toute attente, un serviteur l’introduisit dans un salon richement décoré et lui proposa une tasse de café. L’attente lui parut interminable, mais lorsque le père et le fils le rejoignirent, il esquissa une grimace qui fut loin de leur échapper.

    — Xandor de Prax, que puis-je faire pour vous à cette heure matinale ? Êtes-vous tombé du lit ?

    Le mage hésita. Il aurait été plus à l’aise de discuter avec le maître des lieux sans la présence du garçon, mais il savait bien qu’il serait discourtois de le prier de quitter la pièce.

    — Je souhaite me rendre au Gouffre de la Bête, glissa-t-il aimablement, et on m’a dit que vous aviez une carte qui pourrait m’en indiquer le chemin. Je ne connais pas si bien la forêt après tout, alors je vous serais obligé de bien vouloir me la prêter.

    Ardanor fronça les sourcils.

    — Et vous souhaitez vous y rendre seul… sans escorte ?

    — Absolument, s’emporta Xandor de Prax. Je suis un grand garçon, n’est-ce pas ? Je n’ai pas besoin qu’on me tienne la main.

    Kellmer étouffa le rire qui montait dans sa gorge.

    — Je vais sans doute vous décevoir, soupira Ardanor, mais il n’en est pas question. Puisque vous tenez tant à votre escapade, nous allons vous y accompagner.

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