Le temps des barbares: Attila, les dernières années de Calugum
Par Didier Moreau
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À propos de ce livre électronique
Cent ans plus tard, des hordes de Vandales déferlent par l'est avec femmes, enfants, bétail et charrois. Viennent ensuite les Bagaudes et les Burgondes puis, de nouveau les Alamans, les Suèves et les Vandales s'élançant vers le sud en route vers l'Ispania.
Déjà fortement affaibli et diminué par les occupations franques, annihilé et presque anéanti par les incursions Vandales, maintes fois saccagé, Calagum n'est plus qu'une ombre désolée. Son domaine et ses vici sont languissants. L'axiome de cette nouvelle déferlante de barbares, les huns, ne confirme en rien l'instabilité de ces temps troublés. Pourtant, à l'issu de ce dramatique épisode, le domaine, terrassé, ne se relèvera pas... Jamais.
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Avis sur Le temps des barbares
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Aperçu du livre
Le temps des barbares - Didier Moreau
Sommaire
Préambule
Chapitre premier
Chapitre deuxième
Chapitre troisième
Chapitre quatrième
Chapitre cinquième
Compendium
Préambule
Cette année MCCIV de l’Empire (+451) s’annonce fort hostile et difficile. L’enceinte renforcée de la cité impériale et sa deuxième défense extérieure, insignifiante, reflètent l’image d’une crainte caractérisée. Les vivres s'avèrent maigres, le luxe et l’opulence qui faisaient la splendeur des riches quartiers ne sont plus que souvenirs. A l’extérieur des murs quantité de cabanes et d’abris de fortune offrent à une population miséreuse un ramassis de tuguria inconfortables et puantes.
Depuis que l'Empereur Constantinus avait transféré le siège de l’Empire à Byzance, en cette fâcheuse année MLXXXIII (+330) de Rome, les choses allaient de mal en pis. La corruption, le vice, les débauches et quantité d’excès s'étaient installés. Après les conclusions du concile de Nicée la foi devait être rassemblée en une seule, inéluctable. Malheureusement, il n’en fut rien. Les barbares mugissaient toujours à chacune des frontières provoquant la fougue des chefs de guerre Romains. Les armées étaient tenues en perpétuelle alerte, repoussant chaque jour de nouveaux assauts.
Cette décision d’établir la nouvelle capitale en Orient faisait vaciller l’Empire et changeait considérablement sa situation. Rome n’était plus le centre du monde. Les menaces d’invasions grondaient sans cesse, ce qui obligea le Sénat à nommer plusieurs chefs de guerre à la tête des armées dorénavant morcelées. Les Gaules restaient les terres de convoitise par excellence et chaque jour de nouveaux peuples hostiles s’amassaient le long des frontières. Mais l’appauvrissement de cette puissance colossale avait véritablement débuté quelques années plus tôt…
En l’an MLVI de l’Empire de Rome (+303) le Cæsar Diocletianus ou plutôt les Cæsars, devrait-on dire car ils sont alors quatre, tentent de relever l’Empire d’une période anarchique prolongée. Iatinum fait désormais partie de la province de la quatrième Lyonnaise et le Gouverneur réside à Agedincum. La lourde machine administrative s’enlise, se disloque. Face à des généraux de plus en plus indispensables, prenant de l’importance, le Sénat de Rome voit son influence diminuer, réduite à entériner les décisions des militaires.
Depuis une cinquantaine d’année les incursions barbares ne cessent de se multiplier, poussées par la révolte des peuples frontaliers. Les tribus franques et alamanes pénètrent régulièrement sur les terres de la Gaule et y séjournent.
Même si les empereurs successifs persistent à les repousser, celles-ci parviennent malgré tout à mener des campagnes de plus en plus nombreuses et finissent par s’installer.
Cependant, pendant un temps, un climat de prospérité et de sérénité semble s’établir. De nouvelles monnaies sont frappées et, par un édit se voulant de bonne volonté, les prix des marchandises se trouvent bloqués. Mais cette mesure se voit rapidement dépassée par la réalité. La multiplication des fonctionnaires, les fastes de la cour et les dépenses engagées pour des constructions démesurées pèsent lourdement sur le budget de l’Empire. Les sommes colossales nécessaires pour entretenir une armée toujours plus importante, les cantonnements, les machines de guerre et l’infrastructure militaire plombent littéralement le trésor. Une réforme fiscale, tout d’abord bien accueillie par la populace, se décline bientôt en un appauvrissement progressif des domaines et des civitas. Les saisies de biens des propriétaires terriens et des artisans se multiplient. Les petites gens grondent. Des bandes de paysans ou de petits notables ruinés se forment. Ces hommes, devenus des bacaudæ, se déversent dans les bourgs insuffisamment protégés de même que sur les petites exploitations fragiles.
Cette même année paraît un autre édit qui autorise la persécution des chrétiens.
Ce vaste programme, mené par le co-Empereur Caius Galerius, vise sans aucun doute à évincer ces impies des hautes fonctions administratives ou militaires. Ceux-là, que l’on nomme « les mauvais soldats », sont encore peu nombreux certes, mais ils sont partout.
Quelques décennies plus tard, en l’an romain MCXXXI (+378), la situation devient vraiment très préoccupante. Quarante années après la mort de l’Empereur Constantinus, le peuple des Huns passe pour la première fois le Danube et s’apprête à piller l’Orient, mais il est battu par les troupes du grand Empereur Theodose qui les force longtemps à respecter les frontières.
L’année suivante, durant le mois de Februarius, les tribus des Alamans franchissent en nombre le limes rhénan. Ces barbares envahissent et saccagent tout l’est de la Gaule de la même manière qu’ils l’avaient déjà fait douze années plus tôt en traversant le Rhin gelé. A cette époque, ils avaient subi une cruelle défaite dans les plaines de Durocatalaunum et l’Empire, fort de cette victoire, les croyait fédérés pour toujours. Les plaies de l’histoire se rouvriraient-elles ?
Leur incursion n’est pourtant que de courte durée. L'Empereur Gratianus les repousse trois mois plus tard en leur infligeant de nouveau une sévère punition près de la civitas de Argentovaria.
Dans le même temps, en Orient, les Goths, poussés par le froid et la faim, franchissent le Danube pour marcher avec haine et désespoir vers le sud des terres de Thrace. Ils emmènent avec eux femmes, enfants, bétail et chevaux. Cette fois, les hommes sont fortement armés, déterminés, prêts à en découdre avec l'Empire morcelé, rongé de l’intérieur, vieillissant. Unis aux Huns et aux Alains, sous la conduite d’un chef Wisigoth de grande qualité nommé Fritigern, ils atteignent sans grande difficulté les riches plaines de la cité d’Andrinople.
En ce lieu, la mutinerie des fédérés Goths se heurte aux troupes de l’Empereur d’Orient, Flavius Julius Valens. Mais, contre toute attente, à la fin de l’été, les Goths et leurs alliés sont vainqueurs. Ils déciment leurs assaillants puis mettent le siège devant la riche cité où sont entreposés les trésors de l’Empire d’Asie. Toutefois, impuissants devant cette civitas solidement fortifiée, ces peuples repartent furieux, rivalisant de pillages, de destructions et de haine envers leur ennemi commun : l’Empire romain.
Quelques années plus tard, les Goths, menés par les Huns, et sous la conduite d’un chef nommé Alaric, dévastent la Grèce sans défense.
En ces temps, l’Empire chancelle de toutes parts. Les conflits et leurs ravages sont partout, en Occident comme en Orient.
Survient ensuite cette funeste année où les mêmes hordes envahissent l’Italie, saccagent la cité impériale, puis se répandent telle la lave d’un volcan dans tout le pays. La famine, les épidémies et la peur remplacent l’opulence et la splendeur de Rome pourtant déjà bien diminuée depuis près d'un siècle.
En ces temps de Rome MCCIV (+451), les Gaules sont bien morcelées entre les Francs, les Alains, les Bourguignons et les Wisigoths admis successivement au titre d’alliés. L’administration et l’armée de l’Empire d’Occident sont maintenant incapables d’enrayer définitivement les flux des réfugiés barbares que les régions de l’est du Rhin vomissent inlassablement. Les légions parviennent malgré tout à stopper ces hordes de guerriers avec des succès variés et, de ce fait, conscients de leurs limites, les militaires s’efforcent de composer avec eux. L'Empereur Flavius Placidius Valentinianus, troisième du nom, réside maintenant à Ravenne, terre de sa naissance. Mais c’est surtout le Consul et Général en chef des armées de l’Empire d’Occident, le Patrice Flavius Ætius qui, soutenu par l'armée et la milice, contrôle les Gaules voire la totalité de l'Empire...
Si, sous le règne du puissant Cæsar Hadrianus, à l'époque de la pax romana, le domaine de Calagum était véritablement prospère, les pagi environnants : Tillius, Gaudiacus, Eboriacum rayonnaient et leurs vici attachés, comme celui du Buyd ou de Columa, étaient en tranquille expansion. L'oppidum de Dodunum était souvent investi par les druides et nombreuses étaient les cérémonies de la vie quotidienne qui se déroulaient près du fanum. Mais la voix populaire dit qu’aujourd’hui les sentiers qui y mènent sont devenus étroits et semés d’embûches.
En quittant l’enceinte de Iatinum par la porte de l’est, après avoir franchi le pont, il faut parcourir deux ou trois stadia en traversant les regroupements de tuguria misérables plantés au milieu des osches formant la périphérie de la cité pour atteindre l’embranchement des « trois chemins ». C'est là que se tiennent quelques marchands, un rassemblement de tavernes hétéroclites, ainsi que des artisans offrant de multiples services pas toujours recommandables.
Toute cette population se trouve sous l’étroite surveillance indifférente de quatre décuries. Ces militaires sont censés protéger ce carrefour stratégique mais, en réalité, ce sont les gens eux-mêmes qui se gardent. Ils ont interdiction de porter quelque arme que ce soit et, de ce fait, pour leur propre sécurité, ils ont tissé un réseau de guet et d’alarme fort efficace.
Afin d’assurer leur protection vis à vis de la milice urbaine, un système de corruption hiérarchisé est établi. Il semble que cette situation siée à l’ensemble des intervenants. Ce qui frappe immédiatement, c’est l’accoutrement et la tenue désordonnée des soldats. Leur armement est nettement hétéroclite, disparate et mal entretenu.
De cette place se détachent trois directions distinctes : celle de Noviodunum qui permet d’atteindre le port de Gesoriacum par la civitas de Nemetacum, celle de Durocortorum et celle de Durocatalaunum d’où l’on peut poursuivre vers la grande cité marchande de Treverorum ou gagner le limes extrême de l’est : le limes rhénan.
Sur une lieue encore, si l'on poursuit vers l’est, le chemin devient pénible, harassant pour les montures, bien que son aménagement soit agréablement entretenu car on accède au plateau par un long sentier charretier très fortement pentu. A ce point haut, dominant la vallée, si l'on s'accorde quelques instants de repos, on ressent une grande satisfaction et le sentiment de puissance semblable à celui qu'à dû ressentir le Cæsar Julius lorsqu’il s’est retourné pour admirer le somptueux paysage de cette enclave îlienne de Iatinum, vaincue et définitivement sienne…
Tournant sur la droite, plein sud, la voie a été élargie et consolidée.
En suivant vers le sud la portion de l'itinéraire commun du cursus publicus, celle probablement empruntée en son temps par Julius, cette chaussée mène d’une part à Rigobriga en passant par Calagum pour atteindre Lugdunum et, d’autre part, permet de doubler Metlosedum pour rejoindre Aurelianum. C’est sur cette voie, menant à Iatinum, que convergent les axes secondaires venant du sud, de l’ouest et de l’est. De ce fait, ce trajet est très fréquenté.
Une lieue plus loin, juste avant la villa rustica du Colombarium, la voie se scinde de nouveau en deux, recevant les voyageurs des pagi de l’est. Les paysans appellent cette ferme fortifiée le castrum. Il est vrai qu’à plusieurs reprises, pendant les troubles des années précédentes, ils furent pressés de s’y réfugier pour y trouver la sécurité. Cette place est l'une des principales bases du cursus publicus. Elle détient presque quatre mille pigeons qui assurent, par tous les temps, l'échange rapide d'informations commerciales et civiles mais surtout militaires.
En obliquant vers le lieu-dit du « menhir des quatre chemins », sur la gauche, les larges sentiers maintenant aménagés mènent directement à Dodunum. Il faut compter cinq lieues gauloises pour atteindre cet oppidum sacré.
Même s’il est nécessaire de traverser d’épaisses forêts et quelquefois coucher de l’épée une poignée de branchages envahissants, le relief est agréable. Point de rivière ou de ru à traverser, pas de ravine abrupte non plus ; le trot peut se faire paisiblement sur un terrain quasiment plat. A mi-chemin, la végétation s’éclaircit pendant presque une demi-lieue pour reprendre immédiatement sa vigueur naturelle. À droite, ce sont les limites des plateaux cultivés du Tillius, ou ses essarts, et les parchets de Alnutium. A une autre demi-lieue encore on aperçoit cet envoûtant oppidum boisé avec, à son sommet, son fanum. Ce n'est pas par peur de le trouver abandonné ou détruit, mais par respect des temps anciens, qu'il est préférable de ne pas s'y rendre et de continuer à s'imaginer que nos druides y sont encore présents bien que l'on sache que ces sages n’ont pu résister aux coups répétés de l’Empire, à leurs soldats incultes ainsi qu'aux barbares. Il est donc préférable de prendre la direction du sud, vers le gué des Morins.
Deux lieues plus loin, traversant le vicus du Buyd par son côté est, quelques masures sont réunies dans une place que l’on nomme la Broccia. Le sentier qui descend en serpentant sur le flanc du coteau sud, derrière les granicæ, est tortueux. De cette hauteur, on peut apercevoir le gué. Une grande activité semble y régner et, sur les berges, une multitude d’enfants courent en criant. En aval, des tanneurs s’activent tandis qu'en amont les pêcheurs paraissent satisfaits de leurs prises.
Quelques bœufs franchissent le passage, escortés d’une bonne dizaine de paysans et d’un chariot gorgé de marchandises. Sur le versant sud, de l’autre côté du gué, le petit village de Britaniacum s’est agrandi. Nombre de chartils et de bâtisses supplémentaires ont été élevés.
En remontant au pas vers le plateau, les parcelles cultivées sont de moindres étendues et dispersées. Même les vergers et les jardins semblent de petite superficie.
Sur le sentier charretier qui remonte vers le domaine, on constate que Calagum fut sévèrement endommagé durant les attaques des dernières invasions. Les troupes de guerriers Vandales ont laissé des plaies ouvertes qui ont peine à s'effacer. Le domaine est amoindri, meurtri, vidé de sa réputation et de ses fastes. Son Seigneur actuel se nomme Aulius Cornelius mais il se fait appeler tout simplement Aulius par ses gens. Cornelius, son père, est décédé il y a maintenant huit automnes, quelques jours après les fêtes de Samain. Quant au régisseur qui seconde ce dominus, c'est un étranger, un Franc qui répond au nom de Fredebert.
Le gué des Morins traversé, une demi-heure à peine est suffisante pour franchir l’enceinte du domaine de Calagum.
Chapitre premier
Ces nones de Martius bénéficient d’un temps plutôt agréable. Hier, une petite pluie fine est tombée pendant quelques heures, mais sans vraiment pénétrer les terres. Pour cette journée, le temps est clément. Le soleil n’est pas encore très chaud bien que le ciel soit dégagé. Seules quelques traînées de nuages, d’un blanc immaculé, tachent cette voûte céleste d’un bleu intense.
Débouchant à flanc de coteau des bois qui protègent Britaniacum par le nord, un sentier carrossable mène à cet imposant portail de la villa de Calagum. À droite, quelques bœufs, entourés de jeunes cabris jouant inconsciemment, paissent avec empressement les premières herbes naissantes. A cette époque, même si le temps est incertain et que les nuits restent froides, la majorité des bêtes est déjà dans les champs. Certaines regagnent leur abri chaque soir, d’autres non. Malgré tout, le fourrage est distribué chaque matin car les ressources de la nature demeurent encore faibles.
Sur la gauche s’étale le plateau cultivé. Les labours de rafraîchissement de la terre débutent déjà. Sur deux parcelles toutes proches, quelques hommes s’affairent à guider les araires tractées par de puissants bœufs qui en parcourent inlassablement la surface. Lorsque chacune d'elles aura été sillonnée dans un sens, les hommes et leur machine repasseront une nouvelle fois perpendiculairement à leur précédente trace. Cette pratique permet de mieux aérer la terre en formant ainsi des sillons croisés.
Dès que la terre est entièrement bousculée, les araires s’éloignent plus loin pour reprendre leurs manèges. Le lendemain, les herses sont mises en mouvement. Tractées elles aussi par un bœuf solide, elles égratignent la surface de la terre pour en faire une nappe meuble parfaitement uniforme. Ces grandes plaques de bois, hérissées de longues pointes métalliques, lestées différemment en fonction de la nature du terrain, brisent les mottes rejetées par la lame de l’araire.
Les terres cultivées sont davantage plus morcelées et plus petites qu'au temps de la pax romana. De ce fait, chaque parcelle peut être travaillée en une seule journée, ce qui permet de se garantir journellement d’une tâche accomplie. Leur surface n'est souvent que d’un demi-jugerum, voire d'un jugerum au maximum. Les événements guerriers de ces deux derniers siècles ont considérablement modifié la manière de travailler puisque les grandes surfaces d’exploitation ne sont plus de mise aujourd’hui. L’époque est révolue où, hier, une trentaine d’hommes œuvraient de concert sur un seul champ et où deux valli fauchaient, à la rencontre l’un de l’autre, une même grande parcelle d’une surface de trente ou cinquante jugera. De ce fait, le seul vallus restant à Calagum n’est presque plus utilisé.
Ainsi, ces petites unités de terres cultivées présentent des avantages certains lors de ces temps troublés. Si l’une des parcelles est piétinée, détruite par la chevauchée d’une bande armée, incendiée, ou si elle reçoit un campement sauvage improvisé, l’autre peut être épargnée et rester intacte.
Sur les plateaux, là où les vents sont les plus forts, des fossés sont creusés pour délimiter les parchets tout proches. Cette démarcation assure à la fois un drainage des terres et une ligne coupe-feu.
Le lendemain, ou quelquefois le jour même après le zénith, ont lieu les semailles, traditionnellement opérées en touffes, à la volée.
Aux quatre vents du domaine, les hommes s’affairent. Depuis quelques étés les récoltes sont bonnes. Peu à peu, année après année, les réserves de grains consacrées aux semailles se remplissent davantage éloignant le spectre désolant de la famine ou même du manque. Le bétail, les cochons, les chèvres et les moutons sont eux aussi plus nombreux.
Un bruit sourd de martèlement de sabots surpasse le son mélodieux d’un vent léger. Six cavaliers se détachent en silhouettes sur la crête et déboulent à bride abattue en direction de la villa. Ils paraissent fortement armés. Quelques-uns poussent des rugissements inquiétants. Arrivés à un actus de l’enceinte ils ralentissent subitement leur monture pour pénétrer, au pas, dans la grande cour carrée principale. Ce sont les gens de Calagum et de son vicus client : le Buyd. Il y a là le dominus Aulius Cornelius, son pecorum et maître de la milice, Tarantann, le vicanus Prenitius et son régisseur ainsi que deux gardes du domaine. En fait, ces gens reviennent d’une âpre entrevue avec les décurions Romains cantonnés au Tillius. Pour calmer leur nervosité, ils ont décidé de mener une course sur les hauteurs depuis le gué de Nantoritum.
Une vingtaine de soldats Romains, tous mercenaires fédérés venant d’horizons différents, sont rassemblés dans ce pagus voisin et ami. Ils sont assistés de douze cavaliers comprenant les deux chevaliers qui commandent l’ensemble de ce petit contingent. Leur charge consiste à veiller à la sécurité du pagus et de ceux environnants afin de garantir le ravitaillement des troupes qui y font régulièrement halte.
Pour cela il faut assurer la tranquillité des paysans, garder les sentiers et les voies de communication, éloigner les bacaudæ et surveiller les entrepôts. Les granges,
