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La Baronne des Mont Noirs: Série fantastique
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Livre électronique267 pages3 heuresLa Baronne des Mont Noirs

La Baronne des Mont Noirs: Série fantastique

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À propos de ce livre électronique

Les Monts-Noirs du Morvan, an de grâce 1131…

Ida, jeune moniale au couvent de Sainte-Radegonde, donne naissance à un œuf alors qu’elle vient de fuir le massacre d’un village. De cet œuf, Flore voit le jour, conçue dans le péché lors d’un mystérieux sabbat commandité par une baronne déchue. Immédiatement abandonnée par sa génitrice ainsi souillée, elle est recueillie par le vieux Siméon, un ermite mystérieux qui lui enseigne tout son savoir. Les années passent et l’orpheline découvre, un jour, une bête insoupçonnée : mi-femme, mi-rapace, une véritable démone cruelle et coupable de bien des crimes sanglants. Le périple haletant de la jeune fille débute ainsi, un périple palpitant brodé comme ces tapisseries médiévales, rempli d’énigmes, de mystères, de passions destructrices et du Mal incarné. C’est ici un roman au rythme endiablé à la dimension de la Seconde Croisade : grandiose, terrible et bouleversant.

Céline Guillaume magnifie son récit en une mémorable légende médiévale, flamboyante et fantastique… Oserez-vous la suivre et ainsi voyager hors du temps, entre lumière et obscurité ?

EXTRAIT 

Sous la pierre de la Mal-Gardée, une créature étrange cachait un trésor qu’elle défendait âprement, mais, une fois l’an, elle déplaçait le rocher et étendait sa fortune lorsque les premiers rayons du soleil printanier réchauffaient la nature trop longtemps endormie…
Les villageois, gueux et seigneurs, tous sans exception, affirmaient que si un être jetait quelques miettes de son pain à l’épeautre, denrée quotidienne et indispensable à la survie, sur les richesses flamboyantes et inestimables : gemmes, émaux, écus, couronnes éclatantes fleurdelisées, éperons d’or ajourés formés de dragons entrelacés et affrontés, sceptres torsadés ornés de feuillages, médaillons sertis de grenats, diamants, turquoise et saphir, tout ce qui serait touché appartiendrait ainsi à l’heureux élu.
Si quelqu’un parvenait à dérober le trésor, pour échapper à la sirine, il suffisait de pouvoir franchir une rivière, ne serait-ce que ce mince filet d’eau du plus petit ru… La damnation et la condamnation aux feux de l’Enfer s’empareraient de lui…Telle serait la malédiction encourue.

A PROPOS DE L’AUTEUR

Céline Guillaume, auteur de nombreux ouvrages plusieurs fois primés dans lesquels son écriture limpide et à « fleur de mots » plonge le lecteur dans un univers personnel d’une grande profondeur, nous livre ici un  roman puissant et envoûtant, un roman  au style flamboyant, un roman  médiéval et fantastique. Elle devient ainsi une actrice incontournable dans les mondes de l’imaginaire. Avec La Baronne des Monts-Noirs, la magicienne féerique poursuit son ascension…
LangueFrançais
ÉditeurTerre de Brume
Date de sortie26 févr. 2015
ISBN9782843625473
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    Aperçu du livre

    La Baronne des Mont Noirs - Céline Guillaume

    PROLOGUE

    « L’œuf s’ouvrit. Les deux moitiés étaient l’une d’argent, l’autre d’or. La moitié d’argent devint cette terre ; celle d’or, le ciel ; l’épaisse membrane, l’obscurité des nuages ; les petites veines devinrent les rivières ; la partie liquide ; la mer. Et ce qui en naquit fut le soleil. » (Chândôgya-Upanishad, III, 19, I)

    Dans les Monts noirs du Morvan - Automne 1131

    Ida gisait au milieu des cadavres. Il y en avait au moins une trentaine : maris, femmes, enfants, tous de pauvres gens, des travailleurs acharnés, des villageois devenus de tristes pantins de chairs en décomposition.

    « Le monde entier est devenu fou, songea-t-elle vaguement. L’homme ressemble à une feuille morte, ballottée de-ci de-là par la brise. Peut-être le suis-je moi-même ? »

    Elle-même ressemblait à l’un des corps sans vie qui l’entouraient.

    Elle essaya de lever la tête, mais ne parvint à la soulever que de quelques centimètres au-dessus du sol tapissé de feuilles mouillées.

    Jamais elle ne s’était sentie aussi faible. Jamais elle ne s’était sentie si démunie.

    « Depuis combien temps suis-je là? » se demanda-t-elle.

    Des mouches vinrent bourdonner autour de son visage.

    Elle voulut les chasser, mais n’eut pas même la force de tendre le bras qu’elle avait raide, fragile, comme le reste de son être.

    « Je dois être ici depuis un bon moment », se dit-elle en remuant un doigt après l’autre.

    Le village, proche du couvent de Sainte-Radegonde, avait été pillé, massacré, les femmes violées par des routiers en mal de combats et de prouesses.

    Les habitants, démunis et surpris, avait, certainement, en de vaines tentatives, essayé de se protéger à l’aide de gourdins, de bâtons ou de fourches mais le sort s’était acharné sur cette gouaille miséreuse.

    Elle palpa enfin son ventre, gros, enflé et douloureux. Le ventre qui logeait l’enfant, celui dont elle aurait voulu se défaire, celui qu’elle ne supportait déjà plus, ni lui ni ses incessantes manifestations qui prouvaient son envie de vivre.

    Des nuages bas, sombres, menaçants traversèrent le ciel.

    Un cadavre, celui d’un petit garçon d’à peine quatre ans à en juger par ses traits, gisait à ses côtés. Son corps mutilé, maculé de sang, son abdomen tailladé de la gorge à la hanche droite montraient les sévices dont il avait été victime.

    L’odeur âcre du sang lui donna la nausée.

    Elle repoussa le corps sans vie, se projeta loin de lui, chercha à déchirer, fractionner le mur impalpable et flottant qui menaçait sa torpeur cadavérique en un barrage de brasses affolées.

    Ida ferma les yeux en plissant fortement les paupières, à s’en faire mal. Ainsi, elle tenta de rassembler ses esprits.

    Le bruit de la rivière, en contrebas, lissant inexorablement les pierres de granit grisâtre, lui fit tourner la tête.

    L’eau était rouge. Rouge de sang.

    Horrifiée, elle suivit du regard le flux sombre qui s’épanchait dans le ru et n’eut pas à remonter bien loin pour en trouver la source.

    Là, à plusieurs enjambées, s’amoncelaient d’autres corps de paysans, de chevaux, pareils à de vulgaires ballots jetés à tout va, proies d’une barbarie et d’une cruauté sans nom. Atroce avait dû être leur agonie. Elle imagina les morceaux de joues enlevées par des coups de cimeterres, les poitrails transpercés jusque dans les chairs, les cuisses crevées par les assauts de flèches, les tripes accrochées dans les capes, le flux et le reflux où tintaient les armes, l’haleine glaciale des lames qui sifflaient près des cervelles, les râles, les prières, les supplications… Et le meneur qui stimulait sa bande, gueulant pour exciter ses tueurs. Le massacre ondulait entre les maisons et le groupe d’ivrognes qui s’acharnaient encore sur les formes pantelantes, les innocents.

    À cet instant, elle ne put retenir les vomissures qui la submergeaient et se précipita, malgré sa pesanteur, vers la rivière souillée.

    Après s’être libérée, elle rechercha d’éventuelles blessures et n’en trouva aucune. Pourtant, une sensation de brûlure la parcourut… N’était-ce qu’une impression ?

    Le temps se mit à la pluie.

    Elle s’abattait sur les cadavres comme pour les laver de leur salissure et sur le visage à la renverse d’Ida. C’était un poisson qui ouvrait et fermait la bouche pour essayer de boire cette eau providentielle, cette eau qui désaltérerait son gosier asséché.

    « Les gouttes dont on humecte les lèvres d’un mourant », pensa-t-elle en savourant cette fraîcheur.

    Elle avait la tête lourde et ses pensées ressemblaient aux ombres fugitives du délire.

    Elle se souvenait… De tout… Du sabbat célébré dans la clairière dès les premiers coups de minuit, du cercle de pierre à l’intérieur duquel on l’avait contrainte à accepter la semence d’un homme scélérat masqué et grimé en représentation du dieu Cornu¹.

    Elle se souvenait des participantes envoûtées, flambeaux en mains, tournoyants sur elles-mêmes dans un état proche de la transe, exécutant des danses lascives les unes contre les autres, nues comme au premier matin du monde.

    La baronne Bérangère de Montembert en était l’instigatrice, la maîtresse de ces fêtes nocturnes, véritables bacchanales de plaisir non partagé.

    Elle ressentait le pénis bifide à l’intérieur de ses entrailles ; ce phallus factice en corne froid, dur et douloureux.

    Les paroles de la tortionnaire résonnaient encore dans ses tympans alors que les chouettes ululaient, que la lune filait comme un navire entre les nuages opaques du ciel de saphir, que les arbres se balançaient doucement au-dessus de la cascade rugissante et qu’au loin, les aboiements des chiens se faisaient entendre.

    Elle voyait encore trop distinctement celle qui provoqua ce tumulte et aurait voulu l’oublier, elle et ses prophéties incompréhensibles.

    « De Pan riant, baisant

    et nimbant de lumières tous les démons,

    jusqu’au Diable en personne,

    l’Homme en noir,

    conjuré par les convoitises des Chrétiens…

    Ah ! Un bouc avec qui danser !

    Ah ! Un cercle de sorcières !

    Ô dieu au front cornu,

    Reviens.

    Ô licorne captive,

    Viens nous délivrer

    De nos ténèbres volontaires !

    Viens embrocher le soleil de tes attributs pointus ;

    Et une fois encore

    Répandre la lumière

    Dans la caverne, le crâne, l’arc pelvien… »

    Ida crispa violemment ses doigts sur son ventre sentant la délivrance prochaine.

    Sa seule envie était de fuir ces lieux, d’être au calme pour donner la vie et surtout se libérer d’une entrave qu’elle n’avait pas désirée.

    Des contractions régulières, rapprochées la tiraillèrent sans relâche et la poche des eaux se rompit. Un liquide transparent et chaud s’écoula entre ses cuisses, ruisselant jusqu’à ses chevilles.

    Elle réussit tant bien que mal à atteindre la mystérieuse pierre de la Mal-Gardée que les grands hêtres séculiers, aux troncs biscornus, tarabiscotés, protégeaient de leurs feuillages.

    Elle s’adossa à la roche en oubliant, un instant, les secrètes croyances colportées depuis des générations. Celles-ci même qui avaient alimenté ses frayeurs jadis.

    Sans répit et bien que l’épuisement arrivait à son paroxysme, Ida rassembla toute son énergie pour pousser. Elle releva à mi-cuisse ses jupes déjà salies.

    Accroupie, la jeune fille transpirait l’explosion de l’angoisse tant ses tissus étaient tendus.

    Elle inspira longuement cramponnant jusque dans ses mâchoires sa violente douleur qui montait, redescendait, puis retint son souffle et poussa de nouveau jusqu’à ce qu’elle ait besoin de reprendre sa respiration.

    Après ses efforts expulsifs répétés, Ida s’attendait à voir poindre la tête de son enfançon mais la surprise fut de taille…

    Un œuf marbré, veiné de bleu tomba sur la mousse humide, mêlé de glaires visqueuses, de sang souillé. Son ovale était aussi gros que trois poings.

    Ida s’épouvanta et retint un cri d’effroi qui, rompant son cœur, haletait l’expiration de la délivrance.

    L’épouvante la saisit toute entière et son cœur battait à tout rompre.

    Une malédiction ! Ce ne pouvait être qu’une malédiction causée par les perversités démoniaques de la baronne. Oui, une vengeance du Très-Haut.

    Mais, la pauvre moniale qu’elle était n’avait rien voulu de tout cela… Elle avait été contrainte de se plier aux exigences de « la grande dame ».

    Dès lors, elle n’eut qu’une idée : fuir et oublier.

    Il fallait faire vite…

    Saisie d’une folle panique, abandonnant toute prudence, toute logique, elle prit son élan et fonça vers le couvent qui représentait le salut avant son trépas…

    Alors s’éleva sur la clairière un son étrange, bizarrement déformé par le souffle du vent, et qui fendait le silence éternel du lieu.

    C’était le cri d’un enfant… Un enfant qui avait brisé la coquille qui le protégeait du monde extérieur, l’appel au secours de la fillette en devenir…

    L’énorme pierre coulissa et un vieillard en sortit à la hâte.

    Il était revêtu d’un froc de moine serré à la taille par une cordelette assez lâche.

    Ses pieds nus étaient chaussés de sandales usées et ses traits disparaissaient sous une abondante barbe en cascade.

    Il s’approcha timidement vers le nouveau-né.

    Après une longue et méticuleuse inspection du petit être, attendri autant par sa chétiveté que par l’épaisse toison blonde qui couvrait sa fontanelle, il le prit dans ses bras et retourna dans sa crypte rocheuse et la pierre se referma…

    La pluie avait cessé de tomber et dans le lointain, les derniers grondements de l’orage allaient en s’amenuisant. Les nuages menaçants qui encombraient le ciel disparurent peu à peu, chassés par le souffle puissant qui balayait les vallons…


    1. Divinité symbolisant la vie depuis les premières expériences religieuses des hommes.

    CHAPITRE PREMIER

    Une dizaine d’années plus tard…

    J’avais survécu grâce à la protection du vieux Siméon. Il m’avait entouré de tant de soins, élevée comme sa propre fille.

    Dès ma naissance, j’étais tombée en langueur, dépérissais et me portais très mal. Et cet affaiblissement était accompagné d’une réaction singulière. Je ne pouvais absolument pas supporter la lumière du jour. Même le plus petit rayon me donnait des convulsions terribles ; je hurlais, me débattais avec une violence inouïe, suffoquais, étouffais.

    Mon sauveur était patient et me prodiguait des médications dont lui seul avait les secrets. Il s’était, voilà bien des années, hâté de rejoindre la forêt où il profita du don de la nature, exécrant la foule. Je n’en savais guère davantage. S’était-il sauvé pour se repentir ?

    Je m’affaiblissais toujours épuisée par les crises et en définitive, la mort semblait être mon cruel dessein.

    Il n’en fut pas ainsi.

    La mort ne voulut pas de moi, le Diable qui avaient tenté de me happer aussi.

    Siméon ne s’affolait pas et conjura le mauvais sort donc j’avais été victime.

    Un matin, grâce aux plantes, aux cataplasmes, aux rituels et aux prières, je fus sauvée des ténèbres. La lune ne déversait plus ses sanglots… J’étais une miraculée.

    Cachée à l’abri du dehors, je demeurais ici dans ce refuge de pierre que nul ne pouvait connaître.

    Il fallait cependant être très prudent et ne pas éveiller les soupçons. Nous possédions des couvres-feu et le crépuscule paraissait le plus propice aux échanges avec la nature. Mon maître, qui prenait presque la place d’un père, et moi-même vivions de notre cueillette de baies, champignons, racines, des collets que nous posions. Parfois, d’un peu de vol, mais Dieu nous protégeait, nous ne causions aucun mal, aucun tort à quiconque.

    Mon équilibre était là.

    Chaque jour, ainsi qu’il le faisait depuis longtemps, Siméon m’instruisait, à l’ombre d’un châtaignier, sous la pierre de la connaissance, protectrice, puissante et gravée des signes que nous lui apposions ou près de la rivière qui sourdait du sol, dans cette île de silence et de sylves, ce labyrinthe végétal qui s’étendait sur tout le massif.

    Je m’asseyais toujours à ses pieds et nous écoutions tout son savoir.

    Outre la connaissance des non-initiés, des animaux, du visible et de l’invisible, il m’enseignait le latin, le grec et nombres de langues usitées ou non. Il professait l’écriture, le savoir des étoiles, la géographie de contrées éloignées et même le maniement du bâton, de la lutte à main nue.

    J’avais une si grande soif d’apprendre et Siméon le comprenait bien. À plusieurs reprises et providentiellement, je fus rescapée des eaux tortueuses et donc d’une noyade certaine, de la chute mortelle d’un arbre. Jamais aucune séquelle ni contusion ne m’avaient affectées.

    – Tu as toujours été ma petite, pourtant, il me faudra te quitter tôt ou tard, tu le sais bien… (Me voyant faire la moue, il reprenait en lissant sa longue barbe poivre et sel), je ne te quitterai pas pour autant, nous serons toujours liés, il en est ainsi, fais-moi confiance…

    Oui, j’étais bien ici, je me sentais chez-moi, ici et nulle part.

    Souvent, happée par un souffle insaisissable, un fluide venu d’ailleurs, je m’abandonnais, discrètement, dans de longues promenades. L’écrin des collines verdoyantes savait me calmer, les parfums qui montaient de la terre mouillée, de la sève des résineux me revigoraient.

    Sans but précis, je montais lentement la rampe qui menait aux vestiges de nos ancêtres… Les Éduens, m’avait enseigné Siméon… C’était ici que Vercingétorix avait été porté à la tête des armées gauloises… Une capitale devenue alors un haut-lieu pour les sièges : Bibracte. Il devait s’y passer des choses suffisamment troublantes, puisqu’il m’était défendu de m’y rendre à certaines périodes, lors de quartiers de lune bien précis, au changement de solstice. Docile, j’obéissais, or, plus je grandissais et plus ma curiosité s’aiguisait. L’envie de braver l’interdit me dévorait… Il me faudrait, tôt ou tard, percer ce mystère.

    Le soleil était souvent pâle et timide, or, il éclairait suffisamment la plate-forme rocailleuse de l’oppidum où s’entassaient les ruines ancestrales. Celles-ci donnaient encore une prodigieuse idée d’audace et de force ; des pans de murailles isolées dont la durée relevait du miracle émergeaient des broussailles ; ça et là, d’anciennes habitations s’accrochaient à la roche, image de naguère, quand les vallées surveillaient l’ennemi romain à l’horizon. Peut-être les légions de cet illustre Jules César ?

    J’aimais ce cadre devenu, à présent, si familier ainsi que ses hêtres tortueux et centenaires qui plongeaient leurs racines dans le temps. Ils savaient créer une atmosphère fantasmagorique.

    Parfois, il m’arrivait d’entendre chuchoter de douces mélopées dans les ramures…

    « Tu, tu, tu, tu… »

    Était-ce des messagers de promesses ?

    La chanson du vent dans les feuillages m’apportaient des mots à même de me guider et ma vision s’aiguisait en empruntant des chemins plus intuitifs.

    Des indices fugaces me cernaient, pendus à des branches bourgeonnantes, à des rameaux ou délicatement cachés dans la nervure d’un organe végétal.

    Mes sens aux abois écoutaient le devin révéler ce que le murmure des feuilles lui avait soufflé.

    N’était-ce pas le véritable bonheur tant convoité ?

    CHAPITRE II

    Je me dressai sur la paillasse et essuyai mes larmes d’un revers de main.

    La vision de ce rapace que j’avais toujours vu en songe me hantait.

    Il tournoyait toujours dans les airs avant de fondre sur moi, me faire prisonnière de ses serres et me dépecer.

    Ce cauchemar était toujours le même…

    Les pas de Siméon résonnèrent sur la pierre froide.

    – Ah, mon enfant ! Encore ce rêve ? murmura-t-il en caressant mon front mouillé de sueur.

    Rouvrant les yeux, je vis le Poupa, comme je le nommais, accroupi à mon chevet, une bougie dans sa main sèche et noueuse. La chandelle l’éclairait d’une lumière blafarde, ses cheveux blancs striés de fil d’argent formaient un halo autour de son visage anguleux et ridé. Il paraissait très frêle dans sa robe usée.

    – J’ai prié pour qu’il ne vienne plus hanter ton sommeil, Flore… Et pourtant, le grand livre de la vie en décide toujours autrement.

    Je reniflai et tentai d’apaiser mes dernières craintes.

    Le vieil homme caressa une boucle blonde et emmêlée qui retombait sur ma tempe et laissa glisser ses doigts sur mon visage.

    – Là, là, c’est fini, fit-il d’une voix apaisante.

    – Je suis désolée de t’avoir encore réveillé, je ne voulais pas…

    – Ce n’est rien, coupa-t-il. Maintenant, dis-moi, pour quelle raison, à ton avis, as-tu encore eu ces visions ?

    Je ne répondis pas.

    – Tu te tais… La réserve est une grande

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