"La graisse reste dans les imaginaires contemporains un élément ambivalent, une substance phénoménologiquement dégoûtante de par son absence de forme, et dangereuse par sa capacité à déformer l’apparence. Des imaginaires dystopiques...
more"La graisse reste dans les imaginaires contemporains un élément ambivalent, une substance phénoménologiquement dégoûtante de par son absence de forme, et dangereuse par sa capacité à déformer l’apparence. Des imaginaires dystopiques s’associent à une graisse qui proliférerait irréversiblement. La graisse demeure une matière parasitaire. Reléguée au statut de « pourriture » et « déchet » organique, depuis l’Antiquité, la graisse fait l’objet d’acharnements techniques qui visent à la retirer du corps humain. Néanmoins, nous sommes confrontés aujourd’hui à la naissance de procédés qui revalorisent cet élément. La découverte de cellules-souches dans le tissu adipeux témoigne d’un tournant culturel qui fait de la graisse un « or lipidique » à stocker dans des biobanques. D’un côté fleurissent des collectifs de médécins visant à approfondir les particularités de cet élément et, notamment, ses applications thérapeutiques. De l’autre, les sciences humaines et sociales font émerger le courant interdisciplinaire des « fat studies ». Par la présente contribution, je propose de parcourir une histoire des techniques et des imaginaires liés à la graisse, qui mettra en relief les correspondances entre le développement des pratiques d’épuration et de recyclage de la graisse, ainsi que les revendications des mouvements sociaux « fat acceptance ».
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English abstract:
In contemporary imaginaries fat stills is an ambiguous element, a phenomenologically disgusting substance for its absence of form and dangerous in its capacity to modify the appearance. Some dystopic imaginaries show fat as something irreversibly proliferating. Fat is still considered as a parasitic matter. Since Antiquity fat has been the object of disparate techniques to remove it from the human body. Nevertheless, in the last few decades some procedures have arisen, which revalorise it. The discovery of stem cells inside fat tissue has perhaps introduced a cultural change. Human fat can now be considered as “lipidic gold” and stocked in some specialized biobanks. Presently both biological and social sciences are working hard on fat issues under the interdisciplinary branch of “fat studies”. One explores its therapeutic medical properties and the other is centered on the sociability of fat people and the cultural stakes related to it. In this present contribution I will show a history of the techniques and imaginaries linked to fat. This introduction will help to show some correspondence between the development of techniques of medical “recycling” of fat, with the social questions raised by the “fat acceptance” movements.