Courbet

Lorsqu’il s’agit de portraiturer Gustave Courbet en peintre politique, trois ressources – au moins et sans souci d’exhaustivité – sont généralement convoquées. En premier lieu la Commune, en second lieu, la glose et les opérations de politisation de Pierre-Joseph Proudhon, en troisième lieu, l’objet de la peinture, soit « le peuple ».
Ces trois indexations d’un Courbet politique – l’événement révélateur, le dévoilement philoso-phique et la perméabilité ontologique – ont en commun de distribuer la source du politique entre l’intériorité des tableaux et leur extériorité, un net avantage étant donné à la seconde: le temps hors de la peinture, la vérité du tableau hors du peintre, la politique par l’objet représenté.
Loin d’une triple extériorité – par pli du temps, l’inconscient du peintre ou l’objet e sa peinture –, des gestes de requalification et les agencements conséquents, des déplacements de frontieres sont, à notre sens, lisibles dans la peinture de Courbet.  Ce texte entend faire travailler cette hypothese à propos de deux questions, celle du genre et de l’autochtonie d’une part, des formes de l’art de l’autre.

An abandoned rock quarry is a ruined, emptied landscape. Although bearing witness to strenuous work, as a subject of representation it cannot summon the sort of national pride invested in fertile agricultural landscapes, industrious windmills and aqueducts; quarried land is an intervention better off forgotten. When depleted, it is typically abandoned; its remaining void remaining then fills with refuse and run off waters that “rise into ruin,” breeding miasma and social panic. Open quarries on the edge of Paris (whose material had built the city) became embarrassing eyesores and were often filled in and tidied up. The best known case is the wildly spectacular Buttes-Chaumont park, landscaped for the 1867 Universal Exposition to hide the former lime quarries, squatters’ camps and waste dumping grounds.

Robert Smithson, in his infamous essay “A Tour of the Monuments of Passaic” [Artforum, 1967] suggests that the notion of what constitutes a “monument” is constructed by the spectator who alone determines its cultural value. This paper proposes to read paintings of quarries in the Paris region and in Provence that Van Gogh and Cézanne repeatedly painted through Smithson’s notion of the “entropic ruin”.

Throughout the nineteenth century, from the Isle-de-France to the arid plains of Provence, the French landscape was quarried to build cities, towns and roads. Vincent Van Gogh and Paul Cézanne were not the first French artists to represent abandoned quarries, but both painters exercised remarkable formal violence in the signature brushwork of their quarry paintings that effectively trashed the expectations of the Historical Landscape as formulated by academic theoretician Pierre-Henri Valenciennes in the early nineteenth century. Valenciennes had influentially promoted a mode of classical landscape whose status was elevated above other landscapes (in the hierarchy of genres) because of the inclusion of small-scale mythological narratives and the quotation of Greco-Roman ruins. Rather than ruined architecture, Van Gogh and Cézanne dwell on the feral remains of capitalist exploitation of natural resources: damaged nature fallen to ruin. Theirs was not, therefore, an entirely escapist construction of nature as the pristine, prelapsarian other to urban modernity but rather an engagement with the awkward, ugly remains of modern exploitation.

Análisis histórico-artístico de una de las obras cumbres del realismo, su importancia ideológica y el papel de Courbet en el nuevo arte del siglo XIX.

Historical-artistic analysis of one of the masterpieces of realism, its ideological importance and the role of Courbet in the new art of the 19th century.

De L’Atelier du peintre à Passe-Montagne. Allers-retours.
Noël Barbe, anthropologue, Institut interdisciplinaire d’anthropologie du contemporain (EHESS, CNRS)

« Pour peindre un paysage, il faut le connaître. Moi je connais mon pays, je le peins » écrit l’un. « C’est en tournant qu’on connaît son propre pays » dit l’autre. Comme un ou des avec. Gustave Courbet évidemment peintre de L’Atelier et Jean-François Stévenin (1944-2021) autodidacte du cinéma, réalisateur du film Passe-Montagne en 1978 dont il est aussi l’un des deux acteurs principaux, avec un inhabituel Jacques Villeret. Le film a pu être vu comme un « OVNI », une « curiosité », tout à la fois un à-côté du cinéma et la mise à l’épreuve de sa grammaire, tant dans les choix de tournage que de montage. Parfois parenté est faite avec le début de Délivrance (1972) de John Boorman, quand s’opère une rencontre entre les habitants d’un village et ceux qui vont descendre la rivière. A différentes reprises, Stévenin reviendra sur le tournage. De même son monteur Yann Dodet qui, dans Le point de vue du lapin. Le roman de Passe-Montagne, un peu moins de quarante ans après, écrit sur les lieux de tournage du film en dialogue avec Stévenin venu là travailler un scénario, dans une maison achetée à un acteur local de Passe-montagne et dans une proximité avec la neige, élément de celui-ci.
Le point de départ de cette proposition de communication repose sur l’intuition, surgie à la mort du cinéaste durant cet été 2021, qu’il serait possible de mettre en relation, au prisme de la question de l’atelier, ce que certains peut-être jugeront incomparables, au motif des différences de supports d’inscription ou d’époque. Et ce sans sombrer dans le registre de l’attachement culturel pétainiste au lieu, de l’ordre du « il est d’ici » parfois énoncé à propos de Courbet ou du « cinéaste jurassien » s’agissant de Stévenin à l’occasion de sa mort.
A considérer le film de celui-ci comme la figuration de ce qui s’est vécu pendant une tentative antérieure d’écriture de son scénario dans le Grandvaux, et le tableau de Courbet comme celle du travail du peintre, il s’agira de les saisir comme des systèmes discursifs par lesquels s’énoncent les configurations relationnelles que sont les espaces de création filmique et picturale. Soit ce qui va avec « un type qui fait une œuvre » (Dodet) dans des rapports posés comme nécessaires : habiter pratiquement un lieu et entretenir des relations avec ses habitants, s’affecter par cela, faire s’interpénétrer des formes de vie et l’œuvre, être à la fois hors et dans le cadre. Comme les grammaires hétérotopiques d’un atelier.