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Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdines, 26, 2011 Christian Chevillot Dr de l’Université de Bordeaux III, Chercheur associé CReAA 6566 du CNRS, Université de Rennes I Villa «Biberonna» - Chemin de Saint-Saturnin F - 24650 CHANCELADE Courriel : C.CHEVILLOT@wanadoo.fr et Morgane Dachary l INRAP Grand Sud-Ouest Un site du début er du I Â ge du Fer à Villazette (Creysse - Dordogne) ´ 29 Résumé : Le site de Villazette, commune de Creysse, est situé sur la basse terrasse supérieure de la rive droite de la Dordogne, au pied du talus qui sépare le système des moyenne et basse terrasses. Il a d’abord fait l’objet de fouilles dirigées par E. Boëda qui ont porté sur la séquence pléistocène et les niveaux d’occupation du Paléolithique. La reprise des fouilles par M. Dachary a permis de compléter l’étude de la séquence holocène. C’est dans ces niveaux qu’il a été trouvé une occupation protohistorique qui a d’abord été interprétée comme Néolithique ou de l’Âge du Bronze. Le mobilier mis à ma disposition pour étude par M. Dachary a au contraire permis d’identifier une séquence bien caractéristique de la phase ancienne du Ier Âge du Fer (Ha C). Summary: The site Villazette, common Creysse, is located on the low terrace above the right bank of the Dordogne, at the foot of the embankment that separates the system of medium and low terraces. He first made the subject of excavations directed by E. Boëda that have examined the sequence of Pleistocene and Palaeolithic occupation levels. The resumption of excavations by Morgane Dachary allowed to complete the study of the Holocene sequence. It is in these levels it was found that a protohistoric occupation was initially interpreted as Neolithic or Bronze Age. The furniture available to me for study by Morgane Dachary has instead identified a sequence very characteristic of the early phase of the first Iron Age (Ha C). Resumen: El sitio Villazette, Creysse común, se encuentra en la terraza baja por encima de la orilla derecha del Dordoña, en el pie del talud que separa el sistema de terrazas medias y bajas. La primera vez que haya sido objeto de excavaciones dirigida por E. Boëda que han examinado la secuencia del Pleistoceno y los niveles de ocupación del Paleolítico. La reanudación de las excavaciones por el M. Dachary permitido para completar el estudio de la secuencia del Holoceno. Es en estos niveles se encontró que una ocupación protohistórica fue interpretado inicialmente como Neolítico o la Edad del Bronce. El mobiliario a mi disposición para su estudio por el M. Dachary en cambio, ha identificado una secuencia muy característico de la fase inicial de la primera Edad del Hierro (Ha C). Zusammenfassung: Die Website Villazette, gemeinsame Creysse, basiert auf dem niedrigen Terrasse über dem rechten Ufer der Dordogne gelegen, am Fuße der Böschung, die das System der mittleren und niedrigen Terrassen trennt. Er machte zuerst den Gegenstand der Ausgrabungen von E. gerichtet Boëda, die die Abfolge von pleistozänen und Paläolithikum Besetzung Ebenen untersucht haben. Die Wiederaufnahme der Ausgrabungen von M. Dachary erlaubt, das Studium des Holozän-Sequenz zu vervollständigen. Es ist in diesen Ebenen wurde festgestellt, dass eine frühgeschichtliche Besatzung wurde zunächst als neolithische oder bronzezeitliche interpretiert. Die Möbel stehen mir für die Studie von M. Dachary hat stattdessen eine Folge sehr charakteristisch für die frühe Phase der ersten Eisenzeit (Ha C) identifiziert. Association pour le Développement de la Recherche Archéologique et Historique en Périgord I - HISTORIQUE : naturelle est actuellement adoucie par des éboulements très riches en silex venus du plateau calcaire qui le surplombe. Il est distant d’environ 300 m du lit majeur de la Dordogne, installé à quelques dizaines de mètres du talus et sur les vestiges de la basse terrasse. Il occupe la basse terrasse supérieure de la Dordogne, à quelques dizaines de mètres du pied du talus qui sépare le système des moyennes et des basses terrasses (Sellami, 2000, p. 31). Les ruisselle- Le site de plein air de Villazette, commune de Creysse, a été découvert en 1992 sur la rive droite de la Dordogne. Il a d’abord été fouillé par E. Boëda et son équipe, dont la recherche visait à explorer principalement la séquence Pléistocène et les niveaux d’occupations paléolithiques. Il a été étudié dans sa totalité géo-archéologique dans le cadre d’une thèse (Sellami, 1999). Æ Figure 1 - Plan de situation du site de Villazette à Creysse. (D’ap. Géoportail, IGN). ments de surface provenant du haut du talus ont provoqué à cet endroit des accumulations sédimentaires importantes qui ont donc naturellement favorisé la conservation du gisement. La reprise de la fouille par l’un de nous (MD) a permis de compléter l’étude de la séquence Holocène et d’en rechercher les éventuelles occupations qui avaient déjà été mises en évidence par les investigations menées par E. Boëda. 2. Le contexte stratigraphique : La stratigraphie globale du site se compose de trois complexes sédimentaires organisés du bas vers le haut : le complexe limono-argileux, le complexe argilo-sableux et le complexe sableux. Les deux premiers englobent les formations du Pléistocène supérieur et les niveaux du Paléolithique supérieur alors que le troisième comporte essentiellement les forma- II - LE SITE ET SA STRATIGRAPHIE : 1. Contexte géomorphologique et dynamique du site : Il occupe une zone dominée par une falaise d’une trentaine de mètres de haut dont la pente 30 Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdines, 26, 2011 Coupe 6 Courbure naturelle du sol Surface fouillée Coupes 1 et 2 Coupe relevée en 1995 Figure 2 - Vue générale du site de Villazette à Creysse. Vue vers le talus en direction du nord. (Cliché E. Cayre). Niveau de circulation avant la reprise des fouilles Surface du décapage Figure 3 - Villazette à Creysse. Décapage de la couche «H2». (Cliché M. Dachary). 31 Association pour le Développement de la Recherche Archéologique et Historique en Périgord Figure 4 - Villazette à Creysse. Coupe de E 104-105. (Relevés de R. Khedhaier et M. Dachary, juillet 2000). Figure 5 - Villazette à Creysse. Coupe de J-K 105. Le grisé le plus sombre matérialise les prélèvements sédimentaires réalisés par F. Sellami. (Relevés de A. Frydman et M. Dachary, juillet 2000). 32 Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdines, 26, 2011 Figure 6 - Villazette à Creysse. Silex taillés du niveau C0. 33 Association pour le Développement de la Recherche Archéologique et Historique en Périgord Figure 7 - Villazette à Creysse. Silex taillés du niveau C0. 34 Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdines, 26, 2011 tions de l’Holocène contenant les silex et céramiques qui font l’objet de cette étude (Sellami, 2000, p. 31). La campagne de fouille de l’année 2000 n’a exploré que la partie supérieure de cette dernière séquence stratigraphique. De ce fait cela n’a pas permis de mettre en évidence la présence de véritables niveaux d’occupations de ce qui au départ a été qualifié de «niveaux néolithiques», en fait datant des débuts de l’Âge du Fer (Ha C/Ha Ancien). Pour l’étude micromorphologique de cette séquence nous renvoyons aux travaux de F. Sellami (2000, p. 3140). • une occupation humaine parfaitement conservée dans le secteur ouest, en partie perturbée, • une occupation unique dans le secteur ouest et deux occupations successives et perturbées dans le secteur est (Néolithique/Chalcolithique? et Âge du Fer), • une occupation récente repérée à la fouille dans certaines zones et pas dans d’autres (structure évidente, densité du matériel...). Par ailleurs, les relevés stratigraphiques généraux montrent que les niveaux archéologiques : • ne sont pas tous visibles sur les coupes, • qu’ils s’étendent sur une partie seulement du gisement et que seule une fouille extensive permetterait d’en repérer les limites, • qu’ils sont affectés d’une pendage plus ou moins prononcé. 3. Les niveaux archéologiques : L’étude des sédiments et la fouille ont mis en évidence l’important remaniement des couches holocènes qui ne peuvent donc pas livrer de structures anthropiques en place malgré la présence de nombreux artéfacts. Ainsi, nous avons constaté l’état fortement errodé et émoussé des tessons de céramiques, ce qui confirme ces observations. III - LE MOBILIER LITHIQUE : Le niveau C0, daté de l’Holocène, a livré une abondante série lithique associée au mobilier céramique. D’abord attribué à une phase Néolithique/Bronze (Dachary, 2000, p. 4), ce niveau appartient en fait a un horizon du 1er Âge du Fer. Toutefois, il n’est pas à exclure une courte occupation Néolithique qui a été remaniée par celle de l’Âge du Fer. En effet, si aucun tesson dans le lot que nous avons examiné n’est attribuable au Néolithique, il n’en est pas de même pour la série lithique où plusieurs objets peuvent être plus anciens que la phase de l’Âge du Fer (fig. 6 et 7). 4. Le matériel archéologique : Les objets présentés ici viennent de l’horizon C0 du secteur ouest du site, où a été repérée une zone rubéfiée (trace de foyer?) (Dachary, 2000, p. 26). L’homogénéité et la densité du matériel ont permis d’interpréter ce secteur comme le vestige d’une occupation unique, ce qui est confirmé par l’étude de la céramique, très homogène. Les datations indiqueraient deux occupations successives et plusieurs hypothèses peuvent donc être envisagées : Figure 8 - Villazette à Creysse. Céramiques du Ha C du niveau C0. 35 Association pour le Développement de la Recherche Archéologique et Historique en Périgord La quasi-totalité du silex est d’origine bergeracoise, mais on note la présence de silex noir du Santonien ou Cénomanien (fig. 6 n° 5 et 8) ou de silex blond translucide (fig. 7 n° 7). Parmi les outils, on remarque la présence d’un gros perçoir aménagé sur un gros éclat paléolithique (fig. 6 n° 1), un petit perçoir sur éclat court (fig. 6 n° 3), plusieurs lames plates et bien venues, retouchées ou non (fig. 6 n° 2, 4, 6, 7 - fig. 7 n° 1, 4, 5 et 6), d’un grattoir sur bout de lame (fig. 6 n° 8), d’éclats retouchés (fig. 7 n° 2, 3 et 7). Le seul outil vraiment identifiable est un triangle caratéristique de l’Épipaléolithique (fig. 6 n° 5). Cette série, constituée de nombreux éclats et de très peu d’outils, nous paraît être un réemploi secondaire par les occupants de l’Âge du Fer. Il ne s’agit pas d’un cas unique, et qui bien sûr pose la question de la poursuite de l’utilisation du silex à cette période. En effet, non loin de là, lors des travaux d’aménagement de la voie de contournement de Bergerac, deux fosses du 1er Âge du Fer ont été fouillées au lieu-dit “Le Therme” sur cette commune (Riuné-Lacabe et Colin, 2003, p. 20) et qui elles aussi ont livré une importante série lithique, où, comme à Villazette se mêlent des pièces du Paléolithique et plus récentes. Autre site périgourdin, ayant également livré une abondante série lithique dans un contexte des débuts du 1er Âge du Fer, les fosses de Pourtem à Montanceix dans la moyenne vallée de l’Isle (Chevillot et Moissat, 1989, p. 56-58). Et dans une des fosses, il faut noter la présence de nucléi avec remontage des éclats qui en sont issus. Ceci montre qu’à cette période, on pouvait encore tailler le silex, même si les techniques de base n’étaient plus maîtrisées... (Chevillot et Moissat, 1989, p. 58). Cela a été confirmé à nouveau par la découverte de silex taillés dans une fosse du 1er Âge du Fer de la ZAE de Grand-Font à Saint-Laurent-sur-Manoire (Migeon et al., 2010, p. 58-59, fig. 13). Comme le soulignent Anne Colin et Sylvie Riuné-Lacabe : on peut s’interroger sur la qualité «résiduelle» de ce type de mobilier dans un contexte de l’Âge du Fer (Riuné-Lacabe et Colin, 2003, p. 20). humide, ont le plus souvent altéré les surfaces, et nous avons donc un mobilier en mauvais état. De ce fait il est difficile de pousser plus avant l’étude des pâtes et surtout des traitements de surface. D’une manière très classique, il se distingue deux séries, l’une en céramique fine, bien cuite, aux traitements de surface soignés et une autre, en céramique grossière, moins bien cuite, et aux surfaces juste égalisées. Que ce soit la céramique fine ou la grossière, il s’agit d’un ensemble homogène dans la préparation des pâtes et les modes de cuisson. La céramique fine est réalisée dans une argile soigneusement préparée, probablement tamisée vu la petite taille du dégraissant (abondance de petites particules de mica) et souvent chamottée. Pour certains exemplaires, leur régularité indique probablement un tournassage ou l’usage d’un truscin et d’une tournette actionnée manuellement. La cuisson est plutôt de type réducteur avec de belles couleurs régulières allant du chamois foncé au noir. Malheureusement les engobes ont le plus souvent disparu. La céramique plus grossière est moins bien cuite, en cuisson de mode oxydant, contenant le gros éléments de dégraissants quartzeux, fréquemment apparents en surface. Par ailleurs les surfaces ont souvent été laissées brutes ou juste lissées sommairement. La vaisselle récoltée indique un ensemble de vases fonctionnels, avec une forte proportion de vases de stockage et une série de formes basses, ouvertes ou fermées, plutôt destinée à la préparation et la cuisson des aliments et à leur présentation (Chevillot, 2002). Nous avons volontairement privilégié dans cette note la fonction des céramiques plutôt qu’une étude typologique classique qui, à notre avis, ne tient pas compte de la réalité. Au cours de la période protohistorique, les céramiques ont une fonctionnalité dans la société, et dont il faut tenir compte. Ainsi, nous avons séparé les vases qui servaient à manger ou à la présentation des mets, ceux qui servaient à cuire et enfin ceux qui étaient destinés à conserver et stocker (Chevillot, 2002, p. 4050 - Michelon, 2006, p. 22-23). IV - LA CÉRAMIQUE. Étude typo-chronologique : A. Vaisselle de présentation et de préparation des aliments : L’abondante céramique recueillie est très homogène et appartient à une période relativement courte d’occupation du site, ce qui en fait son intérêt. Aucun tesson n’est attribuable à une autre période que le 1er Âge du Fer. Malheureusement, les conditions de conservation dans un milieu 1. Les assiettes tronconiques à lèvre à marli à facettes : Parmi les poteries destinées à la présentation et la consommation des aliments, on trouve l’équivalent de nos assiettes sous la forme d’écuelles tron- 36 Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdines, 26, 2011 Figure 9 - Villazette à Creysse. Céramiques du Ha C du niveau C0. 37 Association pour le Développement de la Recherche Archéologique et Historique en Périgord Figure 10 - Villazette à Creysse. Céramiques, bracelet et perle (?) du Ha C du niveau C0. 38 Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdines, 26, 2011 Figure 11 - Villazette à Creysse. Céramiques du Ha C du niveau C0. coniques. Curieusement, elles sont quasi inexistantes de cet ensemble. En effet nous trouvons seulement trois fragments de grandes assiettes à paroi rectiligne, à lèvre à marli à facettes (fig. 14 n° 4, 6 et 7). Deux ne présentent qu’un seul méplat et une deux méplats. Elles sont polies intérieurement et laissées brutes extérieurement. Aucun décor ou trace d’engobe coloré n’ont été observé. Il s’agit de formes bien représentées dans les niveaux du Bronze Final IIIb régional (Chevillot, 1989, p. 149-150) et qui peuvent perdurer dans les niveaux anciens du Ier Âge du Fer (Marchadier, 2005, p. 92-93). Toutefois il faut noter leur absence dans les fosses de Pourtem à Montanceix, où seul un des 44 exemplaires présente une lèvre individualisée, et encore avec une seule facette (Chevillot et Moissat, 1989, p. 50, fig. 4 et 5), ainsi qu’au Therme à Bergerac (Riuné-Lacabe et Colin, 2003, p. 14). Notons que les facettes des écuelles de Villazette ne sont pas aussi marquées que celles des niveaux du BF IIIb et ont le bord de la lèvre arrondie, signe d’une évolution chronologique. Parmi eux on remarque le col d’une écuelle en pâte brun-rougeâtre, enrobant un dégraissant de taille moyenne qui est souvent visible extérieurement (fig. 11 n° 2). La lèvre est épaissie à l’intérieur et présente une série très espacée, non pas de digitations, mais plutôt d’impressions profondes très espacées, réalisées avec un objet dur. Deux autres exemplaires de grande taille sont aussi à signaler (fig. 14 n° 9 et fig. 15 n° 6). 3. Les bols : Cette forme assez simple, connue tout au long du Ier Âge du Fer, est ici peu représentée. Notons un seul exemplaire à profil arrondi et ouverture convergente qui a une lèvre équarrie (fig. 9 n° 2) qui rappelle des récipients du Bronze Final III. 4. Les gobelets : Cette série est fort bien illustrée à Villazette. Ce type de vase ouvert, très aplati et à lèvre individualisée, est de petite taille ou de taille moyenne. Ils sont toujours réalisés dans des pâtes bien épurées aux parois polies et bien régulières. La lèvre est courte, arrondie ou amincie et nettement déjetée (fig. 8 n° 2 - fig. 10 n° 1 à 8) et aucun vase ne porte de décor. Curieusement, ils sont peu représentés dans les fosses du Therme toutes proches (Riuné- 2. Les écuelles à parois convexes : Généralement il s’agit de récipients plus grossiers que ceux de la série précédente, plutôt destinés à la préparation et la présentation des aliments, voire au stockage. 39 Association pour le Développement de la Recherche Archéologique et Historique en Périgord Figure 12 - Villazette à Creysse. Céramique de stockage du Ha C du niveau C0. B. Vases pour la cuisson et le stockage : Lacabe et Colin, 2003, fig. 11 n° 1 et 2). Par contre dans les fosses de Pourtem, les gobelets surbaissés sont fréquents, mais plus évasés et souvent décorés d’une large cannelure (Chevillot et Moissat, 1989, fig. 11). 1. Les pots et jarres ovoïdes : Ils sont bien représentés par d’abondants fragments – souvent de taille importante – de panse ou du fond (fig. 12 à 16). Les pots sont de taille moyenne et les jarres de grandes dimensions. La plupart d’entre eux sont ornés du classique cordon digité ou impressionné (fig. 12 - fig. 13 - fig. 14 n° 1 - fig. 8 - fig. 9 - fig. 10 n° 1 et 2), et plusieurs lèvres sont festonnées (fig. 14 n° 2, 3, 5). Établir une classification précise serait difficile à réaliser en raison de la fragmentation de ces vases. Toutefois, il est possible de distinguer une forme ventrue, avec une panse plus ou moins ovoïde et profonde, avec un col souvent bien individualisé ou dans le prolongement de la paroi. Celui-ci peut-être plus ou moins haut, vertical ou divergent (fig. 14 n° 2, 3 et 5 - fig. 12 - fig. 13 n° 5 et 6). Comme nous l’avons déjà souligné, plusieurs lèvres sont festonnées (fig. 14 n° 2, 3 et 5). Les cordons digités, majoritairement uniques, sont placés à la jonction col/panse ou sur le haut de la panse (fig. 14 n° 1 - fig. 12 - fig. 13 et fig. 15 n° 1 et 2). Un haut de panse est orné de deux cordons (fig. 15 n° 1) et un autre d’un cordon lisse souligné par des digitations (fig. 15 n° 2). Les fonds sont plats, épais, souvent avec un bourrelet externe (fig. 15 n° 4 et 9 - fig. 16). Ces récipients à profil convexe et ouverture resserée existent déjà dans les ensembles de la fin de l’Âge du Bronze du Centre-Ouest (Chevillot, 1989 - Marchadier, 2005, p. 104) et ils sont très fréquents sur les sites d’habitat du Ier Âge du Fer. En Périgord ils sont abondants à Pourtem (Chevillot et Moissat, 1989, p. 56, fig. 12), au Therme à Bergerac (Riuné-Lacabe et Colin, 2003, fig. 11 à 13), dans la fosse 1 de Grand-Font à Saint-Laurent- 5. Les jattes : Ce sont des récipients à panse concave, fond plat et dont la lèvre se trouve dans le prolongement de la panse. Elles sont peu représentées dans cette série. 6. Les jattes carénées : Les jattes carénées par contre sont présentes à Villazette. Elles ont une carène nettement marquée, plus ou moins haute, évasée, qui se termine par une lèvre amincie (fig. 8 n° 1 et 4 - fig. 9 n° 1). Comme on le voit leur taille peut être variable et elles ne sont pas décorées. Un seul exemplaire, plus profond, à carène courte est orné d’une ligne d’impressions digitées sur la carène (fig. 11 n° 1). Mais dans ce cas, il s’agit d’un vase réalisé dans une pâte grossière, à l’aspect très différent des modèles précédents. Il faut noter leur absence à Pourtem, ce qui indique probablement une antériorité pour ce site par rapport à Villazette (Chevillot et Moissat, 1989, p. 52-54 - Milcent, 2004, p. 38-39, fig. 17). Par contre elles sont signalées dans les fosses du Therme à Bergerac (Riuné-Lacabe et Colin, 2003, fig. 14 n° 40 à 45) avec plusieurs exemplaires. Ce type de forme ouverte, plus ou moins profonde, deviendra un marqueur sûr pour les phases moyenne et récente du 1er Âge du Fer du CentreOuest et Sud-Ouest de la France, où de nombreux exemplaires seront ornés de décors géométriques peints, qu’ils soient graphités ou réalisés avec des engobes de couleur ocre plus ou moins foncé ou rouge. 40 Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdines, 26, 2011 Figure 13 - Villazette à Creysse. Céramiques de stockage du Ha C du niveau C0. 41 Association pour le Développement de la Recherche Archéologique et Historique en Périgord sur-Manoire (Migeon et al., 2010, fig. 8) ou encore dans la fosse de Borie-Porte à Trélissac, dans un contexte légèrement plus ancien (Chevillot et Gineste, 2011). On les retrouve en Limousin, à Chalucet (Chevillot, 1984, pl. 19), sur de nombreux sites d’Aunis et de Saintonge (Marchadier, 2005, p. 104105) et du Lot-et-Garonne (Dautant et al., 1980). finale. Enfin, comme au Therme, à Pourtem ou encore à Borie-Porte il faut remarquer l’absence de céramique à décor peint au graphite ou de vases à pieds creux hauts, autant d’éléments plus récents, postérieurs au Ha C. D’après les comparaisons élargies qu’il est possible de faire avec le Centre-Ouest notamment (Milcent, 2004, p. 38-41 - Marchadier, 2005, p. 129-137), Pourtem se placerait à une phase 1 du 1er Âge du Fer (-800 à -725 = Ha C ancien) qui se caractérise par une permanence des formes héritées du BF IIIb. Pour Villazette, l’occupation se situerait à une phase 2, dans le VIIe s. av. J.-C. (Ha C récent = -725 à -625/600), ce que confirme l’absence de gobelets du type «bulbe d’oignon» et d’écuelles tronconiques à lèvre à marli à facettes et la multiplication des lèvres festonnées. Le site du Therme semble également se placer dans cette fourchette chronologique. C. Objets divers en céramique : 1. Bracelet : Deux fragments jointifs d’un bracelet en terre cuite, d’un diamètre de 9 cm environ, ont une section triangulaire (fig. 10 n° 9). Habituellement la section est plutôt ellipsoïdale ou circulaire. Il est en très mauvais état de conservation. Ce type de bracelet en terre cuite, rarement décoré, est fréquent sur les sites d’habitat du Bronze Final III et du Ier Âge du Fer régionaux (Gomez, 1980, fig. 62 à 68 - Chevillot, 1981, p. 89, pl. 30 n° 1 à 16 et pl. 15 n° 13 à 16 - Chevillot, 1984, p. 12, pl. 10 n° 11 à 13 - Chevillot, 1989, p. 168, pl. 332 362). VI - CONCLUSION : Pour une fois, nous avons enfin à Villazette un niveau d’habitat en place, mais qui hélas n’a pas été fouillé totalement. Ce qui est bien regrettable car, comme le soulignaient avec pertinence S. Riuné-Lacabe et A. Colin en 2003 (p. 21) : ...quand on se met en quête de sites de références (pour le 1er Âge du Fer) dans le département de la Dordogne, on est rapidement tenus de faire le constat d’un vrai «désert», le seul parallèle possible étant le site de Pourtem (commune de Montrem). Fouillé à la fin des années 80, celui-ci est lui aussi marqué par la seule présence de deux fosses... datées de l’extrême fin du Bronze et du début de l’Âge du Fer. Toutefois, cette remarque est à nuancer, car il ne faut pas oublier les sites à vocation funéraire, en particulier les nécropoles tumulaires de la région de Coursac ou de la frontière entre Limousin et Périgord, de Milhac-de-Nontron à Lanouaille (groupe Glandon-Rochechouart), qui ont livré du matériel céramique et métallique souvent de grande qualité (Chevillot, 1976a - Chevillot, 1979 Chevillot, 1992 - Harielle, 1998 - Mohen, 1980, etc.), il est vrai pour les phases moyenne et finale du 1 er Âge du Fer (VII e-V e siècles av. J.-C. = Ha D1-2). De plus, depuis la publication des fosses du Therme, il a été découvert de nouveaux sites du 1er Âge du Fer en Dordogne, en particulier suite à des diagnostics ou fouilles menés par l’INRAP qui ma confié le mobilier pour étude : 2. Perle? : Une petite pièce en terre cuite, à section ronde et aux bords aplatis et creux (fig. 10 n° 9), pourrait être une perle dont la perforation ébauchée n’a pas été terminée. 3. Rondelle découpée : Un tesson de vase grossier, a été retaillé et ses bords polis irrégulièrement (fig. 9 n° 4). C’est un type d’objet assez fréquent sur les sites du BF IIIb en Périgord (Chevillot, 1981, p. 90-91). V - COMPARAISONS CHRONOLOGIE : La céramique recueillie à Villazette représente un ensemble très homogène, comme c’est le cas à Pourtem (Chevillot et Moissat, 1989) ou à BoriePorte à Trélissac (Chevillot et Gineste, 2011), contrairement au Therme qui contient divers éléments de l’Âge du Bronze ancien et moyen (RiunéLacabe et Colin, 2003, p. 21). À Villazette, la présence de rares assiettes tronconiques, aux lèvres moins marquées qu’au BF IIIb, nous ramène à la phase ancienne du 1er Âge du Fer. Et on note l’apparition des jattes à carène haute, mais évasées, et pas droites et courtes comme elles apparaîtront aux phases moyenne et 42 Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdines, 26, 2011 Figure 14 - Villazette à Creysse. Céramiques du Ha C du niveau C0. 43 Association pour le Développement de la Recherche Archéologique et Historique en Périgord Figure 15 - Villazette à Creysse. Céramiques du Ha C du niveau C0. 44 Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdines, 26, 2011 Figure 16 - Villazette à Creysse. Céramiques de stockage du Ha C du niveau C0. 45 Association pour le Développement de la Recherche Archéologique et Historique en Périgord CHEVILLOT C. (1992) : Le tumulus du 1er Âge du Fer du «Bos-du-Fourg» à Coursac (Dordogne) Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdine, t. 7, 1992, p. 4168, 22 fig. CHEVILLOT C. (2000) : Données sur l’économie végétale et animale au cours de la protohistoire en Périgord. Agriculture, élevage, et alimentation du Néolithique aux Gaulois, Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdine, t. 15, 2000, p. 27-60, 22 fig. CHEVILLOT C. (2002) : Manger et boire au Néolithique et aux Âges des métaux en Périgord (6000 à 52 av. J.-C.). Céramique et comportements alimentaires, Congrès de la Féd. Hist. du Sud-Ouest, Brantôme, mai 2001, Du bien manger et du bien vivre à travers les âges et les terroirs, p. 25-73, 6 fig. CHEVILLOT C. et GINESTE M.-C. (2011) : Fosses du début du Premier Âge du fer à “Borie-Porte” (Trélissac. Dordogne), Documents d’Archéologie et d’Histoire Périgourdine, 26, 2011, p. 45-66, 19 fig. CHEVILLOT C. et MOISSAT J.-C. (1981) : L’éperon barré de Puy-de-Pont, commune de Neuvic : approche archéologique, BSHAP, t. 108, 3, 1981, p. 226-254, 15 fig. CHEVILLOT C. et MOISSAT H. et J.-C. 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Mais encore une fois, il y a été trouvé et fouillé deux fosses sans relation visible avec un habitat. Pourtant la zone a ici été entièrement décapée. Les données actuelles, même peu nombreuses, du 1er Âge du Fer en Périgord, mettent en évidence trois étapes comprises entre le Ha B2-3 (BF IIIb) et La Tène A récente. La phase 1 correspond au Ha C avec une phase ancienne et une récente, la phase 2 au Ha D1-2 et la phase 3 au Ha D3/LT A ancienne de la chronologie allemande. Et comme à Pourtem, les formes et les décors trouvent d’étroites correspondances avec le mobilier auvergnat et pourraient appartenir à ce que P.-Y Milcent qualifie de groupe céramique du Massif Central (Milcent, 2004, p. 39). C’est dans cette direction que la recherche mérite d’être envisagée car les céramiques graphitées postérieures pourraient attester d’une persistance de ce groupe au moins jusqu’au LT A (Roulière-Lambert, 1986). BIBLIOGRAPHIE BOËDA E., HENRY S. et MARTINEAU R. 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