Troubles bipolaires
de l’adolescent et
de l’adulte
DR. A. HABIBECHE
MAITRE ASSISTANT EN PSYCHIATRE, EHS FRANTZ FANON DE BLIDA
I. INTRODUCTION
Le trouble bipolaire est une pathologie fréquente avec une prévalence estimée dans
la population générale de 1 à 4 %.
Son début est précoce entre 15 et 25 ans avec un sex-ratio de 1.
s'agit d'un trouble de l'humeur qui alterne des phases d'expansions de l'humeur avec
une augmentation de l'énergie et des activités (manie ou hypomanie), et des
fléchissements de l'humeur ou de l'intérêt ou du plaisir (dépression), avec des
intervalles libres plus ou moins longs.
Anciennement nommé psychose maniaco-dépressive, le trouble bipolaire est parfois
accompagné ou non par des symptômes psychotiques au cours des épisodes
thymiques.
En l'absence de prise en charge adaptée, le trouble bipolaire est marqué par une
mortalité par suicide élevée (15 %), et par une prévalence vie entière de tentatives
de suicide de 50 %.
Astuce
Pensez à évaluer le risque suicidaire (cf. item n°
348) pour toute question se rapportant à un trouble
bipolaire. Ce risque existe à plusieurs phases de la
maladie, bien sûr lors des phases dépressives, mais
également lors des épisodes à caractéristiques mixtes.
Il. CLINIQUE ET CRITÈRES
DIAGNOSTIQUES D'UN
ÉPISODE THYMIQUE
BIPOLAIRE
A. Sémiologie des épisodes
thymiques
La clinique du trouble bipolaire est marquée par l'alternance :
de phases aiguës où les épisodes peuvent être :
Maniaques
Hypomaniaques
Dépressifs caractérisés
et de phases dites inter-critiques ou phases d'euthymie.
Les éléments de sémiologie psychiatrique pour :
un épisode dépressif caractérisé « bipolaire » sont les mêmes que
pour le trouble dépressif caractérisé (voir item n° 64).
un épisode maniaque ou hypomaniaque sont présentés dans le
Tableau 1.
Tableau 1. Sémiologie psychiatrique
d'un épisode maniaque ou
hypomaniaque
Symptôme majeur
• Il s'agit d'un sentiment d'euphorie expansive avec augmentation de l'estime de
soi voir idées mégalomaniaques mais peut être dominé par l'irritabilité ou la
colère
Elle s'associe à :
• une labilité thymique avec alternances de phases d'anxiété, de colère, de
pleurs, d'élxaltation de l'humeur. L'individu peut passer brutalement du rire aux
larmes.
• une hyperesthésie affective (hyper-réactivité émotionnelle)
• une hypersyntonie (« en résonance » avec les personnes et éléments)
• un ludisme (devinettes, jeux de mots)
• une hypermimie
HUMEUR EXALTÉE
• une désinhibition instinctuelle marquée par un relâchement des censures
ou EUPHORIQUE
morales et sociales (ex : excitation érotique, familiarité, insultes., la recherche de
plaisir..), cela se traduit par des comportements excessifs , impulsifs, ou
socialement inappropriés.
IDÉES DÉLIRANTES
• Certaines formes de manie associent des manifestations psychotiques
congruentes ou non à l'humeur.
• Les mécanismes sont souvent interprétatifs, intuitifs ou imaginatifs.
Symptôme majeur
• Se définit par un intérêt ou un plaisir accru dans toutes les activités
• S'évalue en fonction du degré habituel d'intérêt et d'hédonie du sujet
HYPER EDON
• S'observe dans tous les domaines (vie affective et socioprofessionnelle)
et engendre un engagement excessif dans des activités agréables.
Excitation psychomotrice où s'associe une hyperactivité psychique à une
hyperactivité motrice
• Sur le plan psychique, on retrouve tachypsychie avec : une fuite des
TROUBLES idées, une logorrhée, une pensée diffluente (« coq à l'âne »)
PSYCHOMOTEUR • Sur le plan moteur, on retrouve une hyperactivité désordonnée avec
S agitation, une déshinibition comportementale (achats inconsidérés,
hypersexualité, multiples projets orientés vers un but), une absence de
fatigabilité. La présentation est débraillée.
Modifications de l'APPÉTIT ou du POIDS
• Augmentation de l'appétit (hyperphagie)
• Variations de poids, le plus souvent dans le sens d'une perte
avec amaigrissement
SYMPTOME TROUBLES DU SOMMEIL
SOMATIQUES
• Insomnies constantes sans fatigue
AUTRES
• Augmentation de la libido, aménorrhée, augmentation des
sécrétions (sudation, hypersalivation), tachycardie.
• Difficultés de concentration, déficit de l'attention avec
Symtptomes
distractibilité (liée à la tachypsychie) et hypermnésie
COGNITIFS
superficielle.
B. Critères diagnostiques des
épisodes thymiques
Les critères diagnostiques (selon la classification du DSM-5) pour :
un épisode dépressif caractérisé « bipolaire » sont les mêmes que
pour le trouble dépressif (voir item n° 64).
un épisode maniaque et hypomaniaque sont proches (Tableau
2). Les critères cliniques sont les mêmes, seuls la durée,
l'intensité des symptômes et le niveau du retentissement sur
le fonctionnement habituel du patient sont différents.
Astuce
Le diagnostic de trouble bipolaire doit toujours être recherché devant
un épisode dépressif caractérisé.
Tableau 2 : Critères diagnostiques
d'un épisode maniaque ou
hypomaniaque selon la classification du
DSM-5 ÉPISODE MANIQUE ÉPISODE HYPOMANIAQUE
• Période nettement délimitée, d'élévation de l'humeur ou d'humeur expansive ou
irritable.
• Au moins 3 des symptômes suivants doivent être présents (4 symptômes si
l'humeur est seulement irritable) :
• Augmentation de l'estime de soi ou idées de grandeur.
• Réduction du besoin de sommeil.
• Plus grande communicabilité que l'habitude ou le désir de parler constamment.
Critère
• Fuite des idées ou sensations subjectives que les pensées défilent.
cliniques
• Distractibilité (l'attention est trop facilement attirée par des stimuli extérieurs sans
importance ou insignifiants).
• Augmentation de l'activité orientée vers un but (social, professionnel, scolaire ou
sexuel) ou agitation psychomotrice.
• Engagement excessif dans les activités agréables mais à potentiel élevé de
conséquences dommageables (ex : achats inconsidérés, conduites sexuelles
inconséquentes ou investissements commerciaux déraisonnables).
• Au moins une semaine ou moins
Critère de
durée
si une hospitalisation est • Au moins 4 jours
nécessaire
• La perturbation de l'humeur
est suffisamment sévère pour
entraîner une altération
• La perturbation de l'humeur n'est
marquée du fonctionnement
pas suffisamment sévère pour
professionnel, des activités
entraîner une altération marquée
Critère de sociales, ou, des relations
sévèrité
du fonctionnement social ou
interpersonnelles, ou, pour
professionnel, ou pour nécessiter une
nécessiter l'hospitalisation afin
hospitalisation, et il n'y a pas de
de prévenir les conséquences
caractéristiques psychotiques.
dommageables pour le sujet ou
pour autrui ou bien, s'il existe des
caractéristiques psychotiques.
Critère • Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d'une
d’éliminati substance (donnant lieu à un abus, médicament) ou d'une affection médicale
on généralisée (hyperthyroïdie).
Astuce
+ Retenir comme principales différences entre l'épisode maniaque versus
l'épisode hypomaniaque :
la durée (minimum 7 jours versus 4 jours),
la sévérité (hospitalisation et existence possible de caractéristiques
psychotiques versus pas de nécessité d'hospitalisation et jamais de
caractéristique psychotique),
le retentissement sur le fonctionnement de l'individu (altération marquée
du fonctionnement versus pas d'altération marquée du fonctionnement).
+ Les symptômes psychotiques peuvent être présents à toutes les phases de
décompensation de la maladie.
Les spécifications d'un épisode thymique (formes
cliniques) sont nombreuses et doivent toujours être
précisées :
1. avec caractéristiques mixtes (si épisode maniaque,
hypomaniaque ou dépressif) : il réunit soit l'ensemble des
critères pour un épisode maniaque ou hypomaniaque
avec la présence d'au moins 3 symptômes dépressifs, soit
l'ensemble des critères pour un épisode dépressif
caractérisé avec la présence d'au moins 3 symptômes
maniaques/hypomaniaques ; et cela la plupart des jours
au cours de l'épisode (Tableau 3).
Tableau 3. Critères diagnostiques des épisodes à
caractéristiques mixtes selon la classification du
DSM-5.
Épisode maniaque ou hypomaniaque avec Épisode dépressif avec caractéristiques mixtes
caractéristiques mixtes
• Présence des critères complets pour un épisode • Présence des critères complets pour un épisode
maniaque ou hypomaniaque. dépressif caractérisé.
Au moins 3 des symptômes suivants : • Au moins 3 des symptômes suivants :
• Dysphorie ou humeur dépressive au premier • Humeur élevée ou expansive.
plan, signalée par la personne ou observée par les • Augmentation de l'estime de soi ou idées de
autres. grandeur.
• Diminution de l'intérêt ou du plaisir pour • Plus grande communicabilité que d'habitude
toutes ou presque toutes les activités (signalée par ou désir de parler constamment.
la personne ou observée par les autres). • Fuite des idées ou sensations subjectives que les
Ralentissement psychomoteur presque tous les pensées défilent.
jours. • Augmentation de l'énergie ou de l'activité
• Fatigue ou perte d'énergie. Sentiment de orientée vers un but (social, professionnel, scolaire
dévalorisation ou de culpabilité excessive ou ou sexuel).
inappropriée. • Engagement augmenté ou excessif dans des
• Pensées de mort récurrentes, idées suicidaires activités à potentiel élevé de conséquences
récurrentes sans plan précis ou tentative de dommageables (par exemple achats inconsidérés,
suicide ou plan précis pour se suicider. conduites sexuelles inconséquentes...).
• Réduction du besoin de sommeil.
2. avec caractéristiques psychotiques (si épisode
maniaque ou dépressif) : des idées délirantes ou des
hallucinations ont été présentes à un moment de
l'évolution de l'épisode. Elles peuvent être :
Congruents à l'humeur, si le contenu des idées délirantes et
les hallucinations concordent avec la thématique de l'épisode
(par exemple, délire de grandeur ou de pouvoirs surnaturels en
cas d'épisode maniaque, ou délire de ruine ou de culpabilité en
cas d'épisode dépressif caractérisé),
Non-congruents à l'humeur, si le contenu des idées
délirantes et les hallucinations ne concordent pas avec la
thématique de l'épisode.
3. avec détresse anxieuse (si épisode maniaque,
hypomaniaque ou dépressif) : des symptômes
anxieux ont été présents pendant la plupart des jours au
cours de l'épisode (tel que sentiment d'énervement ou
de tension, sentiment d'agitation inhabituel, difficultés
de concentration dues à des soucis, peur que quelque
chose d'horrible ne survienne, sentiment d'une possible
perte de contrôle de soi).
4. avec caractéristiques catatoniques (si épisode
maniaque ou dépressif) : des symptômes
catatoniques ont été présents pendant la plus grande
partie de l'épisode (cf. item n° 61).
5. avec caractéristiques mélancoliques (si
épisode dépressif) (cf. item n° 64, Trouble
dépressif)
6. avec caractéristiques atypiques (si
épisode dépressif) (cf. item n° 64, Trouble
dépressif)
7. avec début lors du péri-partum (si épisode
maniaque, hypomaniaque ou dépressif) :
cette spécification peut s'appliquer chez la femme
si le début des symptômes thymiques survient
pendant la grossesse ou dans les 4 semaines
III. LE TROUBLE BIPOLAIRE
A. Classification et définitions
Il existe plusieurs types de troubles bipolaires :
Le trouble bipolaire de type I : il se définit par la présence d'au
moins un épisode maniaque ou épisode à caractéristiques mixtes
(avec ou sans antécédent d'épisode dépressif caractérisé).
Le trouble bipolaire de type II : il se définit par la présence ou
un antécédent d'au moins un épisode hypomaniaque ET la présence
ou un antécédent d'au moins un épisode dépressif caractérisé.
Le trouble cyclothymique : forme atténuée de trouble bipolaire
de type II, il se définit par une alternance de nombreuses périodes
d'hypomanie ne répondant pas aux critères d'un épisode maniaque
et nombreuses périodes dépressives ne remplissant pas les critères
d'un épisode dépressif majeur pendant une période d'au moins
deux ans.
Astuce
Un épisode maniaque suffit à poser le
diagnostic de trouble bipolaire de type I. Les
patients souffrant de trouble bipolaire de type
II ne présentent jamais d'épisode maniaque.
Les spécifications évolutives du trouble bipolaire doivent
également être précisées :
1. avec cycles rapides (s'applique au trouble bipolaire I et
II) : au cours des 12 derniers mois le patient a présenté
au moins 4 épisodes thymiques (maniaque,
hypomaniaque ou dépressif).
B. Diagnostics différentiels
Il est nécessaire de discuter principalement des autres troubles de
l'humeur, des psychoses chroniques (notamment en cas de
symptômes délirants associés à l'épisode thymique) et de
rechercher une pathologie organique ou une cause iatrogène.
Troubles de l'humeur : trouble dépressif récurrent (ou trouble
unipolaire), épisode dépressif caractérisé réactionnel
Psychoses chroniques : trouble schizoaffectif, schizophrénie,
troubles délirants
Troubles de la personnalité (notamment personnalité borderline
ou état limite)
Pathologies organiques :
causesneurologiques : toutes les lésions cérébrales (tumorales,
neuro-dégéneratives, inflammatoires, ischémiques...).
causes endocriniennes : en 1er lieu les dysfonctionnements
thyroïdiens (hyper et hypothyroïdies), maladie de Cushing
causes
générales : maladies de systèmes, maladies infectieuses,
hémopathies...
Causes iatrogènes ou toxiques : retenir notamment les
corticoïdes, les hormones thyroïdiennes, les antidépresseurs,
l'interféron alpha ainsi que la prise de toxiques comme le cannabis,
la cocaïne, les opiacés, l'ecstasy...).
Ces 2 derniers groupes de diagnostics
différentiels peuvent correspondre aux
diagnostics suivant (selon la classification du
DSM-5)
trouble de l'humeur dû à une autre affection
médicale,
trouble
de l'humeur induit par une substance/un
médicament.
En conséquence, le bilan somatique
(et pré-thérapeutique) devra être
complet lors
d'un épisode thymique :
Examen clinique complet (avec pression artérielle, pouls,
température, fréquence respiratoire)
Bilan biologique : NFS, ionogramme sanguin, glycémie à jeun,
créatinémie, bilan hépatique (ygt, ASAT, ALAT), TSHus, I3HCG
(si femme en âge de procréer)
Scanner cérébral avec injection
ECG
EEG
C. Comorbidités psychiatriques et
somatiques
Les comorbidités psychiatriques ou somatiques sont fréquentes dans le trouble bipolaire.
Comorbidités addictives (60 %) : principalement les abus d'alcool et l'acoolodé-
pendance mais aussi la prise de drogues (cannabis, cocaïne...).
Comorbidités anxieuses (20 %) : trouble anxieux tel que trouble panique, trouble
anxieux généralisé, trouble obsessionnels compulsifs, phobie sociale, agoraphobie,
état de stress post-traumatique.
L'hyperactivité avec déficit de l'attention.
Les troubles de conduites alimentaires.
Les troubles de personnalité (notamment le trouble de la personnalité borderline
ou état limite).
Comorbidités somatiques : les patients souffrant d'un trouble bipolaire ont un
risque plus élevé (x 2-3) de pathologies somatiques que la population générale
(affections cardiovasculaires, diabète, obésité, pathologies cancéreuses...)
IV. ÉVOLUTION -
COMPLICATIONS - PRONOSTIC
A. Évolution
Non traité, le trouble bipolaire évolue avec une aggravation
de la maladie marquée par des épisodes thymiques de plus
en plus sévères et fréquents.
La rapidité du diagnostic et l'instauration précoce du
traitement vont conditionner le pronostic.
Le trouble bipolaire peut évoluer vers une forme à cycle
rapide (> 4 épisodes/an) qui est facilitée par l'utilisation des
antidépresseurs.
On observe une bonne stabilité diagnostique pour les troubles
bipolaires I et II. En revanche, le trouble cyclothymique
évolue plus souvent vers un trouble bipolaire I ou II.
B. Complications
Elles sont principalement représentées par le risque de suicide et
de désinsertion socio-professionnelle.
Les autres complications sont :
Les rechutes thymiques,
les comorbidités psychiatriques,
les comorbidités somatiques,
les causes iatrogènes liées à la prise en charge médicamenteuse
notamment,
les actes médico-légaux.
C. Pronostic
Les facteurs de mauvais pronostic d'un trouble bipolaire sont les
suivants :
+ Âge de début de la maladie précoce (< 18 ans)
+ Niveau socio-économique bas
+ Antécédents familiaux de troubles de l'humeur
+ Antécédents familiaux psychiatriques (agrégation familiale significative
des symptômes psychotiques)
+ Nombre élevé d'épisodes thymiques
+ Épisodes d'intensité sévère ou avec caractéristiques psychotiques
+ Persistance de symptômes résiduels thymiques entre les épisodes
(phase inter-critique)
+ Présence d'une comorbidité psychiatrique
+ Retard diagnostique, initiation d'un traitement non adapté (ex :
Les caractéristiques mixtes représentent
un facteur de mauvais pronostic de
l'épisode. En effet, de tels épisodes sont
associés à un risque suicidaire plus
élevé, et à un risque de consommation
de substances psychoactives plus
important.
V. LES MODALITÉS DE PRISE
EN CHARGE
A. Ambulatoire ou
hospitalisation ?
Les indications d'hospitalisation pour un épisode dépressif
caractérisé bipolaire sont les mêmes que pour un trouble
dépressif caractérisé (gravité de la dépression, risque
suicidaire, contexte familial et de soutien). Lors d'un épisode
maniaque l'hospitalisation sera toujours nécessaire (urgence
médicale). À l'inverse, un épisode hypomaniaque pourra être
traité en ambulatoire du fait d'une intensité moindre des
symptômes.
En cas de prise en charge ambulatoire, des consultations
rapprochées et régulières doivent être organisées pour
réévaluer régulièrement l'état clinique et le risque suicidaire.
En cas d'hospitalisation, les modalités de
prévention et de surveillance du risque suicidaire
doivent être définies :
Retrait des affaires personnelles ou non,
Isolement thérapeutique,
Surveillance infirmière.
Les répercussions somatiques de l'épisode
thymique doivent être évaluées : par exemple :
refus alimentaire prolongé, risque de
complications de décubitus.
B. Traitement médicamenteux
(cf. items 72 et 326)
Quel que soit le type d'épisode, un traitement thymorégulateur sera
nécessaire (lithium, anticonvulsivant ou antipsychotique de seconde
génération ; cf. items 72 et 326).
Un bilan pré-thérapeutique viendra compléter le bilan somatique
initial ((3hCG chez la femme en âge de procréer !) et la recherche de
consommations de toxiques.
Une contraception efficace doit être prescrite chez la femme en
âge de procréer. Les traitements thymorégulateurs sont en effet pour
la plupart, contre indiqués pendant la grossesse. Dans l'idéal, la
grossesse doit pouvoir être programmée, et faire l'objet d'un suivi plus
rapproché et multidisciplinaire (collaboration rapprochée entre le
psychiatre et le gynécologue obstétricien).
Selon le type d'épisode :
épisode maniaque ou hypomaniaque : thymorégulateur
(ex : lithium ou dival-proate) ; si présence de symptômes
psychotiques ajout d'un antipsychotique de seconde
génération (ex : olanzapine)
épisode dépressif bipolaire : le plus souvent association
d'un thymorégulateur avec un antidépresseur (type IRS)
ou monothérapie par quétiapine (antipsychotique de
seconde génération ; seule molécule ayant l'AMM dans
cette indication).
Doser le thymorégulateur pour faciliter l'adaptation posologique (possible avec
le lithium et les anticonvulsivants). Ex : TERALITHE LP 400 mg, lithiémie à J4, 12
heures après la dernière prise, objectif = 0.8 à 1.2 mM. La posologie doit être
adaptée à l'efficacité et à la tolérance.
L'efficacité du traitement de l'épisode est retardée et nécessitera 2 à 3
semaines. Des traitements symptomatiques pourront être nécessaires :
traitement anxiolytique ou sédatif : par benzodiazépine (ex : OXAZEPAM),
neuroleptique (ex : CYAMEMAZINE) ou anti-histaminique (ex : HYDROXY-
ZINE) de préférence per os (si agitation et refus : en IM)
traitement hypnotique (ex : ZOLPIDEM) peut être nécessaire en cas
d'insomnies importantes. La durée de prescription ne doit pas durer plus de
quatre semaines.
traitement d'une comorbidité addictive : mise en place d'un sevrage en
alcool avec prévention du Delirium Tremens (hydratation, benzodiazépine,
vitamine B1)
Une surveillance clinique et biologique de l'efficacité (amélioration des
symptômes thymiques, critique des idées délirantes, amendement des idées
suicidaires), de la tolérance (poids, PA, FC, T°, virage de l'humeur, signes de
surdosage, dosages plasmatiques) et de l'observance du traitement instauré
sera nécessaire.
Une surveillance médicale rapprochée est nécessaire afin de prévenir la
survenue de comorbidités organiques, dont certaines peuvent être au moins
en partie liées au traitement, ou à des addictions comorbides.
La durée du traitement est peu consensuelle. Le traitement médicamenteux
sera diminué progressivement jusqu'à la dose minimale efficace, dès que le
patient parvient en phase de stabilisation. Le maintien d'un traitement
préventif sera le plus souvent à vie.
Astuce
Les traitements thymorégulateurs sont le
traitement de fond de la maladie bipolaire. Le
recours aux antidépresseurs doit être limité au
maximum, ce n'est pas le traitement de la
maladie bipolaire. Les antidépresseurs, s'ils sont
utilisés, ne doivent jamais l'être en
monothérapie, sans être associés à un
thymorégulateur.
C. Les traitements non
médicamenteux
La psychothérapie de soutien est toujours nécessaire.
Le recours à une psychothérapie structurée, peut être indiqué au
cas par cas, et dépendra de l'état clinique du patient (non
réalisable pour un patient en phase maniaque).
En fonction du choix du malade, et de l'orientation du
thérapeute, différentes psychothérapies peuvent être
proposées :
Thérapie Cognitivo-Comportementale (TCC)
Ou, Psychanalyse ou Thérapie d'inspiration psychanalytique
Ou, Thérapie familiale
Ou, Thérapie interpersonnelle.
Laparticipation à des groupes de psychoéducation
centrés sur le trouble bipolaire est également indiquée.
La remédiation cognitive et les stratégies de
réhabilitation peuvent être proposées lors de prise en
charge au long cours.
Des mesures sociales sont souvent nécessaires : arrêt
de travail principalement mais aussi mesure de
protections des biens notamment en cas d'épisode
maniaque (sauvegarde de justice), demande de
prise en charge à 100 % (en ALD).
L'essentiel de la question
Le trouble bipolaire est une pathologie fréquente mais
associée à un retard diagnostique important.
Les critères diagnostiques d'un épisode dépressif caractérisé
bipolaire sont les mêmes que pour un trouble dépressif
caractérisé. L'épisode maniaque se différencie de l'épisode
hypomaniaque par ses critères de durée, son intensité
symptomatique, son retentissement fonctionnel et la
nécessité d'une hospitalisation.
Les comorbidités les plus fréquentes sont les addictions
(alcool, cannabis), les troubles anxieux et les comorbidités
somatiques.
La prise en charge d'un trouble bipolaire est centrée sur
l'utilisation des thymorégulateurs.