La décolonisation de l’Algérie
L’Algérie divisée en 3 départements (Oran, Alger, Constantine) n’est pas une colonie au sens
juridique mais les 9 millions d’Algériens n’ont pas les mêmes droits que le million
d’Européens. Même si l’ordonnance de 1944 abolit le code de l’Indigénat, les droits civiques
ne sont accordés qu’à une élite algérienne.
Les origines du nationalisme Algérien
Pour comprendre comment est né le nationalisme algérien, il faut plonger au cœur du
système colonial français, un système fondé sur l’inégalité de ses administrés. À tous les
échelons politiques et administratifs, la participation indigène est limitée, sans réel partage du
pouvoir. La minorité européenne fournit la quasi-totalité des cadres supérieurs et techniciens.
La société musulmane essentiellement rurale souffre de la dégradation de leurs conditions de
vie.
À la fin de la Première Guerre mondiale et face à l’horreur des combats dans lesquels de
milliers d’arabo-berbères ont été mobilisés, de nombreuses revendications commencent à
émerger : égalité des droits et des salaires, représentation politique, et avant tout la
citoyenneté.
Plusieurs hommes politiques musulmans connaissent une ascension et deux grands courants
s’opposent :
- D’un côté, un courant assimilationniste représenté par Ferhat Abbas qui promeut la
lutte pour l’égalité et l’intégration à la France
- de l’autre côté, un courant nationaliste représenté par Messali Hadj souhaite une
indépendance totale, et la langue arabe comme langue nationale.
Messali Hadj est un ancien militaire passé par le parti communiste avant de fonder en 1926
l’Étoile Nord-Africaine (ENA), premier parti indépendantiste algérien.
Dans les années 1930, les revendications de la part de ces représentants s’amplifient et le
gouvernement du Front populaire, nouvellement élu présente le projet Blum-Violette. Ce
projet vise à étendre aux Algériens musulmans un accès aux fonctions politiques locales et la
participation d’une fraction de 20 000 musulmans aux élections législatives. Cependant, ce
projet déclenchera une très forte réaction des Européens et est rapidement abandonné.
L’influence de Messali Hadj grandit et celui qui réclamait bien plus que le projet Blum-
Violette voit son parti dissous en 1937. Il crée quelques semaines plus tard le Parti du Peuple
Algérien (PPA) qui sera lui aussi dissous en septembre 1939.
L’Algérie pendant la Seconde guerre mondiale
En 1943 est publié le « Manifeste du peuple algérien » de Ferhat Abbas évoquant une nation
algérienne. Ce dernier ne croit plus aux idéaux d’égalité qu’il défendait et revendique l’idée
d’une indépendance de l’Algérie. Ce manifeste sera rejeté par le Régime de Vichy mais dans
son discours prononcé en Décembre 1943 à Constantine, le général De Gaule, conscient du
malaise algérien annonce des réformes sur le statut de ce pays. Celles-ci sont jugées
insuffisantes et Abbas crée en 1944 l’association des amis du Manifeste et de la liberté. Son
but est de revendiquer une République algérienne autonome.
Dès le 8 mai 1945, jour de la libération du joug nazi en Europe, les manifestations pour
l’indépendance algérienne à Sétif dégénèrent : des troubles dans toute la région avoisinante se
soldant par des massacres d’Européens. Cette insurrection sera fortement réprimée aboutissant
à plusieurs milliers de morts musulmans et à l’internement des chefs nationalistes dont
Messali Hadj.
Ces événements symbolisent un point de rupture et marquent la mobilisation de milliers
d'Algériens pour le nationalisme et l'indépendance.
L’un des acteurs de cette répression, le général Duval eut ces mots très forts : « Je vous ai
donné la paix pour dix ans ; si la France ne fait rien, tout recommencera en pire et
probablement de façon irrémédiable. ».
Cette prédiction se réalise dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre 1954 avec une série
d’attentats, œuvre d’un groupe de militants indépendantistes, le Front de Libération Nationale
(FLN).
Les pouvoirs publics français condamnent le « terrorisme » de ces « hors-la-loi ». François
Mitterrand, ministre de l’Intérieur, est catégorique: “L’Algérie c’est la France et la France ne
reconnaîtra pas chez elle d’autre autorité que la sienne".
Il semble hors de question d’abandonner un territoire rattaché à la France depuis 130 ans. La
découverte du pétrole, la nécessité d’utiliser l’immensité saharienne pour le début
d’expériences nucléaires ou spatiales vinrent s’ajouter à ces motifs.
L’Algérie s'installa donc dans la guerre opposant un millier de maquisards à une armée
française forte de 80 000 hommes.
Suite à l'adoption des pouvoirs spéciaux le 12 mars 1956, le président du Conseil Guy Mollet
amplifie la répression en faisant appel au contingent et aux réservistes. Les effectifs de
l'armée montent à plus de 400 000 hommes durant l'été 1956.
Affaibli militairement, le FLN porte alors la cause algérienne sur la scène diplomatique
internationale. La France est mise au ban de l’ONU pour sa politique de répression, les pays
arabes se solidarisant de la cause du FLN surtout après l’incident de Sakhiet Sidi-Youssef
(des avions français bombardant des troupes du FLN réfugiées dans un village tunisien).
Après une réaction armée intransigeante, le retour du général de Gaulle aux affaires infléchit
la politique française.
La solution gaulliste
Investi des pleins pouvoirs par l’Assemblée nationale, le 3 juin 1958, son premier voyage de
l’autre côté de la Méditerranée revêt donc une importance capitale. Dans le célèbre discours
où il s’écrie : « Je vous ai compris », il reconnaît solennellement l’égalité des droits des
musulmans et des Français.
La guerre se poursuit pourtant, inexorablement, affaiblissant considérablement la France sur
le plan international, alors que de Gaulle souhaitait lui redonner une place de premier plan
parmi les grandes puissances. Ce danger paraît encore plus manifeste au moment où un
rapprochement s’esquisse entre l’Est et l’Ouest. Les Américains redoutent de voir les
dirigeants du FLN se tourner vers l’Est, l’ensemble du monde arabe constituant un enjeu
précieux. Ils ne veulent être gênés ni dans leurs relations diplomatiques, ni dans leurs
ambitions économiques, par une France déstabilisant l’Afrique.
C’est au cours de l’été 1959 que le Général de Gaulle amorce un tournant capital : « l’ère de
l’administration par les Européens est révolue ». La rupture est définitivement consommée
entre les ultras d’Algérie. Les barricades qui se dressent dans Alger en janvier 1960 s’élèvent-
elles comme un défi à son pouvoir.
De Gaulle assume, la métropole faisant bloc autour de lui et l’armée ne basculant pas dans le
camp des insurgés malgré les vœux des colonels activistes. Il réaffirme sa volonté de ne pas
changer de politique : « l’autodétermination est la seule politique qui soit digne de la
France… la seule issue possible ».
Le mythe de l’Algérie française est bien mort; politique que de Gaulle fait ratifier par
référendum le 8 janvier 1961 (75% de « oui »).
Ce résultat permet l’ouverture de négociations avec le FLN, malgré l’opposition violente
d’une partie de l’armée (putsch des Généraux du 21 au 26 avril 1961) et conduit
aux accords d’Evian du 8 avril 1962, qui organisent l’indépendance de l’Algérie.