La pensée du cliché est indissociable d’un geste critique, qui en fait l’envers de l’originalité : ressassés, usés, signes de paresse intellectuelle, les clichés désignent dans la langue la puissance du commun. Au-delà d’une condamnation...
moreLa pensée du cliché est indissociable d’un geste critique, qui en fait l’envers de l’originalité : ressassés, usés, signes de paresse intellectuelle, les clichés désignent dans la langue la puissance du commun. Au-delà d’une condamnation expéditive, qui génère elle-même ses propres clichés (des clichés il faut toujours se défaire), nous proposons ici d’analyser en détail les raisons de la critique, en prêtant une attention particulière aux apports de deux théoriciens du style, Antoine Albalat et Rémy de Gourmont. Ces deux auteurs ont participé à la condamnation du cliché de manière constructive, fournissant listes, éclairages linguistiques, mais aussi une « philosophie du cliché » (R. de Gourmont) qui met en regard les automatismes de la mémoire et la qualité particulière des images portées par les clichés. La confrontation de leurs analyses permet de renouveler la problématique du cliché et de penser l’efficacité et l’évolution particulière de ces images, que l’on présente d’ordinaire comme figées.
The thought of the cliché is inseparable from a critical gesture, which makes it the opposite of originality: outdated, worn out, signs of intellectual laziness, the clichés designate in the language the power of the common. Beyond an expeditious condemnation, which itself generates its own clichés (clichés must always be discarded), we propose here to analyze in detail the reasons for the criticism, paying particular attention to the contributions of two theorists of the style, Antoine Albalat and Rémy de Gourmont. These two authors participated in the condemnation of the cliché in a constructive way, providing lists, linguistic insights, but also a "philosophy of the cliché" (R. de Gourmont) that compares the automatisms of memory and the particular quality of the images carried by the clichés. The confrontation of their analyses renew the problem of the cliché and put light on the particular evolution of these images, which are usually presented as fixed.