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bulletin de psychologie / tome 63 (5) / 509 / septembre-octobre 2010
Adaptation et validation française de l’échelle
de perspective temporelle « Consideration of future
consequences » (CFC)
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Pour la psychologie sociale, l’étude des
comportements socio-complexes dans les sphères
sensibles du terrain social constitue un enjeu
central. Dans les domaines de la santé et de l’environnement, notamment, de nombreuses conduites
ont une dimension que nous qualifions d’anticipatoire, dans la mesure où leur mise en place dans le
présent implique une prise en compte du futur.
Après avoir défini le concept de perspective temporelle future, nous présenterons, dans cet article, la
considération pour les conséquences futures et
l’échelle de mesure associée à ce construit. Nous
insisterons, ensuite, sur les raisons du choix de
présenter ce construit psychologique dans le cadre
de la littérature francophone et nous proposerons
une version validée en français de l’échelle. Nous
discuterons enfin l’intérêt du construit, mesuré par
l’échelle Consideration of future consequences –
CFC (Strathman, Gleicher, Boninger, Edwards,
1994), dans le domaine de l’écocitoyenneté.
LA PERSPECTIVE TEMPORELLE FUTURE
Les rapports qu’entretiennent les individus avec
le temps sont souvent mesurés au travers du
concept de perspective temporelle, définie par
Lewin (1942, p. 48) comme « la totalité des points
de vue d’un individu à un moment donné sur son
futur psychologique et sur son passé psychologique ». Élément essentiel de structuration du
champ psychologique, la perspective temporelle
fait l’objet d’une élaboration active de la part des
individus et des groupes (Nuttin, 1979) et participe
à la construction psychologique et sociale de la
* Laboratoire de psychologie sociale, Université de
Provence, 29 Avenue Robert Schuman 13621 Aixen-Provence Cedex 1.
<demarque_christophe@yahoo.fr>
** Inserm U-379, Marseille, France.
*** Centre hospitalier universitaire de la Timone,
Service d’oncologie médicale.
réalité. De plus, elle joue un rôle déterminant dans
le processus d’édification du comportement. En
effet, d’après Zimbardo et Boyd (1999), le passé et
le futur psychologiques influencent, en permanence, la forme du comportement présent, par
l’intermédiaire de la remémoration d’expériences
vécues dans le passé ou bien d’anticipations,
d’attentes, de buts tournés vers le futur. La perspective temporelle peut donc fournir un cadre
explicatif à l’étude des comportements des
individus.
De nombreuses études, menées depuis quelques
années en psychologie sociale (Karniol, Ross,
1996 ; Strathman, Gleicher et coll., 1994 ;
Zimbardo, Boyd, 1999 ; Strathman, Joireman,
2005), s’intéressent plus particulièrement à la perspective temporelle future et au rôle de l’expérience
du temps futur dans la formation des comportements. Ces études ont, notamment, pu montrer que
les individus orientés vers le futur sont plus à même
de percevoir le lien qui unit leurs comportements
présents aux conséquences futures de ces comportements. Ils auraient tendance à se focaliser sur les
buts à atteindre et parviendraient, mieux que les
autres, à instrumentaliser leurs comportements, afin
d’atteindre les objectifs qu’ils se sont fixés, quitte
à renoncer aux plaisirs immédiats, à différer les
satisfactions. Ils seraient plus motivés à atteindre
ces objectifs et percevraient mieux les conséquences que peuvent avoir leurs comportements
dans ce cadre. Ce supposé trait de personnalité a,
par exemple, été mis en lien avec un plus fort investissement scolaire (accompagné de meilleures
résultats), ainsi qu’avec l’évitement des pratiques
à risque dans le domaine de la santé.
Mais la perspective temporelle ne doit pas être
considérée uniquement sous un angle personnaliste.
En effet, on ne saurait ignorer le caractère contextuellement régulé de ce construit psychologique, dont
le développement, chez l’individu, repose, notamment, sur l’apprentissage social (Trommsdorff,
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DEMARQUE Christophe*
APOSTOLIDIS Thémis*, **
CHAGNARD Aurélie*
DANY Lionel*, ***
351
bulletin de psychologie
1983). Dans une perspective lewinienne, on peut
supposer que le rapport au temps est, entre autres, le
fruit des rapports qu’entretiennent les individus avec
leur trajectoire (événements de vie, comme la
maladie) et avec leur environnement, ainsi que de
situations de participation sociale et de leurs insertions sociales (classe sociale, capital culturel, voir
Fieulaine, 2006). De nombreux travaux (pour une
revue, voir Thiébaut, 1998) montrent, par exemple,
une moindre orientation vers le futur dans les classes
sociales défavorisées. Ainsi, si la conception personnaliste considère, le plus souvent, la perspective
temporelle comme un trait personnel stable et transsituationnel, Lewin (1942) a fait l’hypothèse d’un
construit largement dépendant du contexte social,
dans lequel évolue l’individu, au travers, notamment,
de ses réflexions sur le rétrécissement de la perspective temporelle future dans une situation de crise
comme le chômage. Cette hypothèse de Lewin invite
à considérer les dynamiques situationnelles et
sociales en jeu dans l’expérience du temps
psychologique.
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Notre étude de la perspective temporelle future,
se situe, notamment, dans le cadre de recherches
sur l’écocitoyenneté. Nous pensons, en effet, que
le facteur « temps psychologique » peut nous
éclairer sur la dynamique de ces comportements,
inscrits dans le futur et nécessitant une anticipation.
Nous avons choisi de nous centrer plus spécialement sur un aspect particulier de la perspective
future pour étudier les comportements écocitoyens : il s’agit du degré d’intérêt pour les conséquences futures, mesuré par l’échelle Consideration of future consequences – CFC (Strathman,
Gleicher et coll., 1994).
LA CONSIDÉRATION POUR LES
CONSÉQUENCES FUTURES
Il existe de nombreuses échelles standardisées
mesurant la perspective temporelle future, en particulier dans la littérature anglo-saxonne : Future
time perspective inventory (Heimberg, 1963),
Daltrey future time perspective scale (Daltrey,
1982), Future time orientation scale (Gjesme,
1979)... (pour une revue, voir Fieulaine, 2006). Ces
différentes échelles mesurent, généralement, la
perspective temporelle, en fonction de trois dimensions, plus ou moins articulées : l’extension temporelle, qui correspond à la profondeur passée ou
future, dans laquelle se projette l’individu ; l’orientation temporelle prédominante, c’est-à-dire le
registre temporel préférentiel (passé, présent ou
futur), dans lequel pense et agit l’individu et, enfin,
l’attitude temporelle, qui correspond à la valence
(positive ou négative) attribuée aux différents
registres, qui composent la perspective temporelle
(Apostolidis, Fieulaine, 2004). Strathman, Gleicher
et coll., (1994) se sont centrés plus spécifiquement
sur l’extension temporelle et, en particulier,
l’extension future, au travers du degré de considération pour les conséquences futures des comportements présents.
Ce construit et l’échelle de mesure qui lui est
associée permettraient de saisir un aspect particulier
de la temporalité dans laquelle se situent les individus : le degré de considération qu’ont les individus pour les conséquences potentielles à long
terme, opposé à court terme, de leurs actes en
général, ainsi que le degré auquel ils sont influencés
par ces conséquences potentielles pour agir.
L’échelle CFC, associée à ce construit, mesure donc
les différences inter-individuelles dans l’importance
accordée aux conséquences, à court terme et à long
terme, de leurs comportements. D’après ses auteurs,
le construit est unidimensionnel et bipolaire : il situe
les individus suivant un continuum, allant de la prise
en compte des conséquences immédiates des
comportements à la prise en compte de leurs conséquences à long terme ; il suppose donc que, plus les
individus accordent d’importance aux conséquences à long terme de leurs actes, moins ils en
accordent aux conséquences immédiates de ces
derniers, et vice-versa. D’une certaine façon,
l’échelle CFC mesure un construit motivationnel,
qui permettrait de saisir la tendance des individus à
se détacher du moment présent pour s’orienter vers
l’avenir, dans le but d’atteindre les objectifs désirés
(Strathman, Gleicher et coll., 1994). Centrée sur la
prise en compte des conséquences futures des
comportements, la CFC se situe, plus particulièrement, au niveau conatif, se rapprochant, par
exemple, de la dimension Pragmatic action for
future gain du Stanford time perspective inventory
(STPI) (Zimbardo, 1990). D’un autre côté, l’échelle
CFC peut être vue comme un complément à un autre
outil de référence dans le champ de la temporalité,
l’échelle Zimbardo time perspective inventory
(ZTPI) (Zimbardo, Boyd, 1999 ; Apostolidis, Fieulaine, 2004, pour la version française). En effet, alors
que la ZTPI mesure l’orientation et l’attitude temporelles, la CFC mesure plutôt une autre dimension de
l’expérience du temps, plus spécifiquement du
temps psychologique futur : l’extension temporelle,
puisque l’échelle mesure la profondeur à laquelle les
sujets parviennent à percevoir les conséquences de
leurs comportements dans le temps.
Concernant les liens entre ces deux construits,
Boyd et Zimbardo (2005) observent, par ailleurs,
des corrélations entre le degré de considération pour
les conséquences futures et les cinq dimensions qui
composent l’échelle ZTPI (Passé positif, Passé
négatif, Présent fataliste, Présent hédoniste, Futur).
Plus précisément, la CFC corrèle positivement et
très significativement avec la dimension Futur de la
ZTPI et négativement avec les dimensions Passé
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négatif, Présent hédoniste et Présent fataliste. Ces
derniers résultats donnent, ainsi, des indications sur
la validité, à la fois nomologique (validité interconcept) et divergente de l’outil. Les auteurs ont
également testé la validité nomologique de l’échelle
en étudiant ses liens avec d’autres mesures et,
notamment, une échelle évaluant la capacité à
reporter les gratifications (Ray, Najman, 1986). Les
résultats permettent de conclure que le construit
mesuré se distingue bien de construits relativement
proches, mais dissemblables.
Strathman et ses collaborateurs ont, initialement,
envisagé vingt-quatre items mais n’en ont finalement retenu que douze, sur la base d’analyses factorielles et de fidélité. Le degré de considération pour
les conséquences futures est donc mesuré par une
échelle composée de douze items (voir annexe).
Pour chacun des items, les sujets doivent indiquer
le degré auquel l’affirmation les caractérise sur une
échelle en 5 points, 1 correspondant à une affirmation « Pas du tout caractéristique » des sujets et 5
à une affirmation « Tout à fait caractéristique ». Le
score obtenu (de 12 à 60) est ensuite divisé par le
nombre d’items contenus dans l’échelle. Un score
élevé indique une forte tendance des sujets à se
focaliser sur les conséquences futures de leurs
actes, pour effectuer des choix comportementaux,
au détriment des conséquences immédiates.
La validité du construit mesuré par l’échelle,
ainsi que sa structure en un seul facteur, ont été
confirmées, lors de la validation princeps, par des
analyses factorielles exploratoires et confirmatoires, effectuées sur quatre échantillons différents
de sujets, tous étudiants américains (Strathman,
Gleicher et coll., 1994). La stabilité a également
été confirmée par l’utilisation de la méthode testretest. Les auteurs observent une corrélation de
0,76 (p < .001), après un délai de deux semaines
entre les deux passations et de 0,72 (p < .001),
après un délai de cinq semaines.
Si l’ensemble de ces recherches utilisent la
version princeps, validée par Strathman et ses
collaborateurs, il est à noter que Petrocelli (2003)
a remis en cause la solution princeps de la CFC.
D’une part, se fondant sur les résultats d’une
analyse factorielle exploratoire, effectuée sur un
échantillon important de sujets (n= 664), il met en
doute l’unidimensionnalité du construit, mettant en
évidence un modèle en deux facteurs. Dès lors, le
construit ne serait plus perçu comme unidimensionnel, les sujets se situant sur un continuum,
mais conçu comme saisissant deux dimensions
distinctes. Au niveau de l’échelle, on aurait, d’un
côté, les items relatifs aux conséquences à court
terme, dont le score est en principe inversé
(exemple : « Je n’agis que pour répondre à des
préoccupations immédiates »), à l’exception de
l’item 2 et, d’un autre côté, les items relatifs aux
353
conséquences à long terme (exemple : « J’envisage
comment pourraient être les choses dans le futur et
j’essaie de les influencer par mon comportement
quotidien »). Toutefois, cette répartition n’a finalement pas été retenue au terme de l’analyse confirmatoire des données. En revanche, si l’unidimensionnalité du construit est conservée, Petrocelli
(2003) propose une version plus courte de l’échelle,
en huit items (suppression des items 1, 6, 7 et 8),
qui semble plus stable pour mesurer le construit.
Joireman, Balliett, Sprott, Spangenberg et Schultz
(2008) ont, également, repris la distinction opérée
par Petrocelli (2003), retenant, pour leur part, cette
solution en deux facteurs et les douze items de
l’échelle. Sur la base d’une AFC (n = 986), ils
distinguent une dimension « CFC-immédiate »
(CFC-I) et une dimension « CFC-future » (CFC-F),
ces deux dimensions étant supposées indépendantes. Cependant, dans les deux études, réalisées
par ces auteurs afin de tester les liens entre CFC,
contrôle de soi et dépréciation de soi, ils observent
des coefficients alpha faibles pour la dimension
CFC-F (successivement 0,62 et 0,69). Les résultats
de la littérature sur la structure de l’échelle ne
permettent donc pas de trancher entre unidimensionnalité et bidimensionnalité. S’ajoute, en outre,
la question du nombre d’items optimal à retenir.
L’objectif de notre recherche est de valider une
version française de la Consideration of future
consequences de Strathman, Gleicher et coll.
(1994). Nous souhaitons, ainsi, apporter un élément
de réponse à la question de sa structure, d’une part,
du nombre optimal d’items, d’autre part, et, également, étudier sa validité nomologique et divergente
dans un contexte francophone. Nous discuterons,
en dernier lieu, son intérêt dans le domaine de
l’écocitoyenneté.
MÉTHODE ET PROCÉDURE
DE LA VALIDATION FRANCAISE
DE LA CFC
Dans le but d’établir la validité de structure et la
validité de construit de l’outil dans sa version française, nous avons procédé à la validation de cette
échelle, en suivant plusieurs étapes : traduction
comparée version–thème et mise en forme de
l’échelle en français, à partir de la version présentée
par Strathman, Gleicher et coll. (1994) ; pré-test
commenté de la version traduite et finalisation de
la version française ; administration auprès d’un
échantillon homogène de population d’étudiants et
procédure de passation test-retest. Par ailleurs, nous
avons mis en lien l’échelle avec d’autres mesures,
afin d’éprouver, à la fois, sa validité nomologique,
sa validité divergente et son utilité pratique.
Comme cette échelle a été initialement conçue et
validée en langue anglaise, nous l’avons fait
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bulletin de psychologie
bulletin de psychologie
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traduire, avant de la présenter aux sujets de notre
population d’étude. Nous avons soumis la version
originale de l’échelle à un spécialiste de langue
anglaise, qui a procédé à une première traduction de
tous les items, ainsi que de la consigne. Après cette
première traduction, nous avons fait opérer une
deuxième traduction, dans le sens inverse, par un
second traducteur. Ces deux traductions (anglaisfrançais, français-anglais) ont été confrontées, afin
d’assurer, à la fois, la fidélité à l’outil original et la
clarté des items de la version française (confrontation version-thème). Cette première version traduite
de l’échelle a fait l’objet d’un pré-test commenté,
auprès d’un échantillon de quinze personnes, dont
l’objectif était de tester la compréhension des items
et l’appréciation globale de l’échelle, ainsi que
l’opérationnalité de la consigne. Ce pré-test se révélant satisfaisant, nous avons finalisé la version de
l’échelle destinée à être soumise à validation. Nous
avons conservé l’ordre de présentation des items de
la version originale. Les sujets devaient répondre, à
chaque item de la CFC, à l’aide d’une échelle de
type Likert en cinq points, allant de (1) « Cette
proposition n’est pas du tout caractéristique de moi
ou ne s’applique pas du tout à moi » à (5) « Cette
proposition est tout à fait caractéristique de moi ou
s’applique tout à fait à moi ».
Les questionnaires ont été distribués à plusieurs
populations d’étudiants, inscrits à la Faculté de
lettres et sciences humaines d’Aix-en-Provence
(Université d’Aix-Marseille I). Plus précisément,
nous avons constitué quatre échantillons : l’échantillon 1 nous a principalement permis d’étudier la
validité de structure de la CFC. Il était constitué de
402 sujets, 249 femmes (61,9 %) et 156 hommes
(38,1 %) âgés, en moyenne, de 21,3 ans (σ = 2,78).
L’échantillon 2 (n = 19 ; mâge = 22,3 ; σ = 2,4) a été
utilisé, afin d’évaluer la fidélité test-retest de
l’échelle, alors que l’échantillon 3 (n = 50 ;
mâge = 21,7 ; σ = 3,3) a permis de statuer, à la fois,
sur la validité nomologique et sur la validité divergente de notre version. Enfin, l’échantillon 4
(n = 195 ; mâge = 21,5 ; σ = 3) a permis d’étudier la
validité prédictive de l’échelle, relativement aux
comportements écocitoyens.
RÉSULTATS
Étant donné la divergence des résultats issus de
la littérature (trois différentes configurations : deux
solutions à un facteur et une solution à deux
facteurs), nous avons réalisé, en premier lieu, une
analyse factorielle exploratoire.
Analyse factorielle exploratoire
Dans la mesure où ne nous présupposons pas
l’existence de facteurs indépendants, l’ensemble
des données recueillies a été soumis à une analyse
factorielle, selon la méthode des axes principaux
avec une rotation oblique promax (avec le logiciel
SPSS). L’indice d’adéquation de l’échantillon à la
factorisation est bon (KMO = 0,81). Si la solution
proposée spontanément met en évidence quatre
facteurs, l’étude des valeurs propres montre que,
seul, le premier facteur a une valeur propre très
supérieure à 1. De plus, la matrice factorielle
permet de constater que les saturations les plus
élevées sont observées dans le premier facteur pour
neuf des douze items de l’échelle (tableau 1). Si les
items 2 et 6 saturent plus fortement, respectivement
dans les facteurs 3 et 4, ces saturations sont proches
de celles observées dans le premier facteur. Enfin,
l’item 5 sature plus fortement dans le second
facteur, mais se retrouve isolé. L’examen de la
solution factorielle fait donc apparaître que tous les
items saturent de 0,40 à 0,68 dans le premier
facteur, à l’exception de l’item 6 (0,26) et de
l’item 5, qui saturent, de façon extrêmement faible
(0,06), sachant que les saturations vont de 0,30 à
0,72 dans la validation princeps. Ces résultats plaident, plutôt, pour l’adoption d’une solution en un
facteur, le premier facteur dégagé expliquant
28,54 % de la variance. Petrocelli (2003) observe,
quant à lui, une variance expliquée de 44,7 %, mais
avec une solution en deux facteurs, qu’il n’a finalement pas retenue au terme d’une analyse factorielle confirmatoire.
Analyse factorielle confirmatoire
Afin de statuer sur la validité de structure de la
version française de l’échelle, nous avons soumis
les données à une analyse factorielle confirmatoire,
en testant cinq hypothèses. La première repose sur
la structure proposée par Strathman et coll. (1994),
lors de la validation princeps, soit un facteur et
douze items. C’est, aujourd’hui, la solution de référence, adoptée dans la grande majorité des recherches qui utilisent la CFC (Joireman, Strathman,
Balliet, 2006). La seconde est fondée sur la version
courte de Petrocelli (2003), mentionnée précédemment, à un facteur et huit items (suppression des
items 1, 6, 7 et 8). Par ailleurs, au vu de la faiblesse
de la saturation de l’item 5, nous avons également
formulé l’hypothèse d’une version à un facteur,
mais avec seulement sept items (les huit items
retenus par Petrocelli moins l’item 5). La quatrième
hypothèse testée repose sur la solution proposée
par Joireman, Balliett et coll., (2008) en deux
facteurs. Enfin, la dernière se fonde sur les résultats
de l’analyse factorielle exploratoire de nos
données, soit un facteur et onze items (suppression
de l’item 5). Ces cinq solutions divergent, à la fois,
sur l’unidimensionnalité de l’échelle et sur le
nombre optimal d’items à retenir.
Afin de mettre à l’épreuve ces cinq hypothèses,
cinq modèles factoriels hypothétiques concurrents
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354
bulletin de psychologie
Facteur 1
Facteur 2
Facteur 3
Facteur 4
Moyenne
Écart-type
Variance
commune
Item no10
Item no3
Item no11
Item no4
Item no1
Item no9
Item no12
Item no8
Item no7
Item no5
Item no2
Item no6
0,68
0,60
0,60
0,56
0,50
0,50
0,48
0,46
0,40
0,06
0,43
0,27
– 0,14
0,27
0,05
0,29
0,01
– 0,25
0,15
– 0,32
– 0,36
0,28
0,13
0,05
– 0,35
– 0,07
– 0,11
0,01
0,32
– 0,10
0,17
0,18
0,07
– 0,03
0,44
0,05
0,26
– 0,11
– 0,16
– 0,21
– 0,01
– 0,25
0,19
0,08
– 0,10
0,00
0,12
0,32
3,72
3,37
3,36
3,32
3,47
3,51
3,15
3,63
3,62
2,60
3,11
2,88
1,02
1,13
1,22
1,13
1,04
1,12
0,98
0,95
1,02
1,13
1,17
1,15
0,66
0,54
0,53
0,56
0,59
0,55
0,54
0,51
0,50
0,43
0,68
0,74
% VE
VP
28,54
3,42
10,75
1,29
9,22
1,11
8,50
1,02
% VE : Pourcentage de variance expliquée
VP : Valeur Propre
Tableau 1. Analyse par méthode des axes principaux rotation promax.
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ont été testés en analyse factorielle confirmatoire.
Cette analyse consiste à étudier leurs ajustements
respectifs aux données. Les analyses ont été réalisées par l’estimation du maximum de vraisemblance (logiciel Lisrel 8.80). Plusieurs indices
statistiques ont été retenus pour évaluer les cinq
modèles : le Chi-2, avec les degrés de liberté, le
goodness-of-fit index (GFI), le comparative fit
index (CFI), le non-normed fit index (NNFI), le
root mean square of approximation (RMSEA) ainsi
que le standardized root mean square residual 1
(SRMSR) (Bentler, 1990 ; Browne, Cudeck, 1993 ;
Hu, Bentler, 1999 ; Lance, Vandenberg, 2002) 2.
L’analyse des indices obtenus (tableau 2) montre
que le modèle 3 présente de meilleurs indices
d’ajustement aux données que les autres modèles
(GFI = 0,97 ;
CFI = 0,95 ;
NNFI = 0,93 ;
1. Goodness of fit index = indice de la validité de
l’ajustement ; comparative fit index = indice comparatif
d’ajustement ; non-normed fit index = indice d’ajustement non-normé ; root mean square of approximation =
moyenne quadratique d’approximation ; standardized
root mean square residual = moyenne quadratique résiduelle (Ndlr).
2. Un Chi-2 qui n’est pas significatif (p > .05) indique
que modèle théorique et données empiriques coïncident.
Notons qu’une taille importante de l’échantillon
contribue à produire fréquemment un Chi-2 significatif
(p < .05), même si le modèle théorique est confirmé (voir
James, James, 1989). Les valeurs du GFI, CFI et NNFI
qui sont au-dessus de 0,90 indiquent une bonne harmonisation entre le modèle théorique et les données empiriques. Un indice RMSEA dont la valeur est inférieure à
0,05 indique une bonne harmonisation ; des valeurs entre
0,05 et 0,10 sont acceptables. Des valeurs inférieures à
0,05 pour l’indice SRMSR signalent un modèle théorique
adéquat.
RMSEA = 0,07 et SRMSR = 0,04). De plus, les
comparaisons aux quatre autres modèles par les
calculs de Chi-2 partiels indiquent des différences
significatives : ∆ χ23/1 (∆dl)= 149,33 (40), p < .05 ;
∆ χ23/2 (∆dl)= 14,33 (6), p < .05 ; ∆ χ23/4
(∆dl) = 218,38 (41), p < .05 et ∆ χ23/5
(σdl) = 117,61 (30), p < .05.
Malgré une certaine faiblesse de l’indice
RMSEA, ces résultats semblent confirmer la pertinence de la version courte proposée par Petrocelli
(2003), en particulier si l’on supprime l’item 5, le
modèle 3 présentant des indices légèrement plus
satisfaisants que le modèle 2. Cela s’explique,
notamment, par la très faible saturation de cet item
(0,11) 3. Bien qu’en faveur de l’abandon de cinq
items, ces résultats constituent un indice supplémentaire de la validité du construit unidimensionnel mesuré par la CFC, situant les individus
suivant un continuum. Cette conclusion est
renforcée par les résultats observés au sein du
modèle 5, qui teste une solution en deux facteurs,
mais présente des indices peu satisfaisants. Nous
avons, en outre, mis à l’épreuve notre version de
l’échelle avec l’échantillon 2. Nous avons procédé
à une nouvelle analyse par maximum de vraisemblance, dans laquelle nous avons utilisé une solution en un facteur regroupant nos sept items
(KMO = 0,78 ; Variance expliquée = 39,1 %). La
moyenne des sujets est de 3,33 (σ = 0,70).
3. Par souci d’économie, nous ne présentons pas les
résultats détaillés de tous les modèles testés, mais il est
à noter que l’item 5 sature faiblement, quel que soit le
modèle considéré. Ce résultat s’explique, peut-être, par
la formulation même de l’item.
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355
bulletin de psychologie
Indices considérés
Modèle 1
Modèle 2
Modèle 3
Modèle 4
Modèle 5
12 items
1 facteur
8 items
1 facteur
7 items
1 facteur
12 items
2 facteurs
11 items
1 facteur
Hypothèse issue Hypothèse issue Hypothèse issue Hypothèse issue
de la validation
des travaux de
des travaux de
des travaux de
princeps
Petrocelli (2003) Petrocelli (2003)
Joireman et al.
(Strathman et al.,
(avec exclusion de
(2008)
1994)
l’item 5)
Convergence
(nombre d’itérations)
6
5
5
Hypothèse issue
de l’ACP sur
l’échantillon
français (avec
exclusion
de l’item 5)
8
16
χ2 (DL)
r197,58 (54)
62,58 (20)
48,25 (14)
266,63 (55)
165,86 (44)
P (χ2)
< 0,001
< 0,001
< 0,001
< 0,001
< 0,001
GFI
0,92
0,96
0,97
0,90
0,93
CFI
0,90
0,95
0,95
0,84
0,91
NNFI
0,88
0,92
0,93
0,81
0,89
RMSEA
0,08
0,07
0,07
0,09
0,08
SRMSR
0,07
0,05
0,04
0,14
0,07
Comparaison modèles 3 et 1 ∆ χ23/1 (∆dl) = 149,33 (40), p<.05
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Comparaison modèles 3 et 2 ∆ χ23/2 (∆dl) = 14,33 (6), p<.05
Comparaison modèles 3 et 4 ∆ χ23/4 (∆dl) = 218,38 (41), p<.05
Comparaison modèles 3 et 5 ∆ χ23/5 (∆dl) = 117,61 (30), p<.05
Tableau 2. Indices d’ajustement obtenus lors des analyses factorielles confirmatoires pour les cinq modèles testés.
Caractéristiques des items retenus
Afin d’étudier la distribution des réponses de
notre population sur les items retenus au terme de
l’AFC, nous avons examiné plusieurs indices :
moyenne, écart-type, asymétrie et aplatissement au
sein de l’échantillon 1. D’autre part, le pouvoir
discriminant des items a été mesuré par la corrélation item-test (rit). Nos résultats (tableau 3) permettent de conclure à une sensibilité acceptable des
items retenus. De plus, les résultats relatifs à la
consistance interne de la CFC nous donnent un
coefficient alpha de Cronbach satisfaisant, égal à
0,74. On observe, d’ailleurs, le même coefficient
avec l’échantillon 2.
Test-retest
La fidélité test-retest a été établie avec l’échantillon 2. Les deux passations se sont déroulées à
deux semaines d’intervalle. L’indice de corrélation
test-retest, pour la version en sept items, est de 0,81
(p < .001) et de 0,67 (p < .01), pour la version en
douze items. Cette procédure nous permet de
conclure à une stabilité temporelle satisfaisante de
la version française validée.
Validité nomologique et divergente
Nous avons étudié les liens entre la CFC et les
cinq dimensions de la ZTPI, comme l’ont fait Boyd
et Zimbardo (2005), afin d’éprouver, à la fois, la
validité nomologique de la CFC (lien avec la
dimension Futur de la ZTPI) et sa validité divergente (liens avec les quatre autres dimensions).
Nous avons, ainsi, étudié les corrélations entre la
CFC et la ZTPI, au sein de l’échantillon 3. La CFC
corrèle positivement avec la dimension Futur
(r(48) = 0,60, p < .001) et négativement, mais
faiblement, avec les dimensions Présent hédoniste
(tendanciellement, r(48) = – 0,24, p < .10) et avec
la dimension Présent fataliste (r(48) = – 0,32,
p < .05). Plus les sujets ont un score faible à la
CFC, plus ils ont une conception fataliste et résignée du présent. Ces résultats vont dans le même
sens que ceux observés par Boyd et Zimbardo
(2005), précédemment décrits, et permettent de
conclure à une validité divergente suffisante de la
CFC.
Validité prédictive
Afin de tester la validité prédictive de la version
validée, nous avons également construit un questionnaire, mettant en lien l’extension temporelle
future et les comportements écocitoyens. Ce choix
nous a paru justifié au vu de la nature même des
comportements écocitoyens, dans la mesure où les
préoccupations relatives à la protection de l’environnement sont fortement marquées par la
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356
bulletin de psychologie
357
Items
Moyenne
Écart-type
Corrélation
item-test
Asymétrie
Aplatissement
2
2,88
1,15
0,29
– 0,28
– 0,81
3
3,37
1,13
0,54
– 0,27
– 0,92
4
3,32
1,13
0,48
– 0,12
– 0,91
9
3,51
1,12
0,38
– 0,42
– 0,71
10
3,72
1,02
0,52
– 0,48
– 0,43
11
3,36
1,22
0,55
– 0,28
– 0,79
12
3,15
0,98
0,42
0,15
– 0,37
Tableau 3. Caractéristiques descriptives des items du modèle retenu au terme de l’analyse factorielle confirmatoire.
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La considération pour les conséquences futures
des comportements a été mesurée avec la version
française de l’échelle précédemment décrite. Les
comportements écocitoyens ont été mesurés à
partir d’un indicateur en 17 items, sélectionnés sur
la base de leur utilisation dans la littérature et
renvoyant à trois types de comportements différents (économies d’eau et d’énergie, recyclage,
militantisme et recherche d’informations). Les
sujets devaient indiquer à quelle fréquence ils
réalisaient chacun de ces comportements sur une
échelle de type Likert en 4 points (de 1 = jamais
à 4 = toujours). Le questionnaire a été administré
auprès de l’échantillon 4.
En outre, les résultats de l’analyse d’homogénéité relative à l’indicateur de comportements
écocitoyens donnent un coefficient alpha égal à
0,82. Une matrice de corrélation a été calculée, afin
d’apprécier les liens entre la CFC et les comportements écocitoyens. Nous observons des corrélations positives, mais faibles, entre CFC et comportements rapportés (r(193) = 0,20, p < .01). Plus
précisément, ces corrélations sont tendancielles
entre la CFC et les comportements d’économies
d’énergie (r(192) = 0,12, p = .10), ainsi qu’entre la
CFC et les comportements de recyclage
(r(193) = 0,12, p < .10). Elles sont, en revanche,
très significatives entre la CFC et les comportements de militantisme et de recherche d’informations (r(191) = 0,19, p < .01). Ces résultats sont
conformes à la littérature, où l’on observe, le plus
souvent, des corrélations positives, mais assez
faibles, entre 0,15 et 0,30. Cette faiblesse
s’explique, notamment, par la multitude de facteurs
explicatifs et le poids des variables contextuelles
contribuant à la mise en place de ces comportements (Stern, 2005).
DISCUSSION
Les résultats de notre procédure de validation
apportent, d’abord, des éléments de réponse aux
questions posées dans la littérature quant à la
structure du construit mesuré par la CFC. En effet,
l’ensemble des indices recueillis, lors des analyses
confirmatoires de nos données, indiquent qu’une
solution factorielle à un facteur semble la plus
appropriée, à partir de nos données. Nous supposons donc, comme c’est le cas dans la grande
majorité des recherches, que la CFC permet bien
de placer les sujets sur un continuum et non sur
deux dimensions distinctes. Le principe d’une
unidimensionnalité de l’échelle et le postulat théorique initial qui le sous-tend sont confortés par nos
résultats.
D’un autre côté, le nombre d’items diffère par
rapport à la solution princeps. Ces résultats vont
dans le sens des observations de Petrocelli (2003),
puisque nous retrouvons la même structure que lui,
à l’exception de la suppression de l’item 5. La
suppression de cinq items s’explique, peut-être, par
le caractère redondant de certains items, souvent
relevé par les sujets, lors de la passation. De plus,
cette solution présente une consistance interne
satisfaisante (α = 0,74). En outre, la qualité des
indices recueillis confirme globalement la validité
de l’échelle en langue française. En effet, au-delà
de sa structure, la version française présente une
bonne stabilité, comme en témoignent les résultats
de notre passation test-retest, même si la petite
taille de l’échantillon (n = 19) invite à considérer
avec prudence ce résultat. En revanche, cette limite
n’affecte pas la comparaison entre les versions à
sept et douze items, qui semble confirmer la supériorité psychométrique de la version à sept items.
De plus, la version française présente une validité
nomologique, une validité divergente, ainsi qu’une
validité prédictive satisfaisantes, nos résultats étant
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prédominance du registre temporel futur. D’un
autre côté, de nombreux travaux ont montré que la
CFC semble influencer les attitudes et les comportements dans le domaine de l’environnement (pour
une revue, voir Joireman, 2005). Nous avons, donc,
tenté de répliquer ces résultats, en étudiant les liens
entre CFC et comportements écocitoyens dans le
contexte français.
bulletin de psychologie
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proches de ceux observés en langue anglaise. Notre
procédure permet, ainsi, de disposer, en français,
d’un nouvel instrument, utile pour mener des
recherches dans des domaines divers, incluant la
perspective temporelle future et se centrant, plus
précisément, sur l’extension temporelle.
Cela ne doit pas nous amener à négliger le fait
qu’une part importante de la variance des réponses
à la CFC reste inexpliquée. Ce résultat doit nous
pousser à améliorer la capacité explicative de
l’échelle à l’avenir, notamment, par un réexamen
du contenu de certains items. De plus, nous avons
constitué un échantillon composé exclusivement
d’étudiants. Si ce choix présente des avantages et
peut se justifier pour une première opération de
validation, il ne permet pas de généraliser nos
résultats ni de statuer sur la validité externe des
résultats. Il nous semble important d’étudier, à
l’avenir, des populations plus larges et diversifiées. Ceci permettrait, notamment, d’étudier, de
façon plus approfondie, l’effet des variables sociodémographiques sur la mise en place des comportements écocitoyens. C’est également ce que
préconise Petrocelli (2003), rappelant que toutes
les recherches, qui ont étudié la structure factorielle de la CFC, ont été menées sur des échantillons d’étudiants.
Au-delà de ces limites, il nous semble, cependant, que l’utilisation de la CFC ouvre des perspectives intéressantes de recherche dans le champ
de la temporalité. Nous intéressant plus particulièrement aux problématiques environnementales, le
choix de cet outil nous a semblé justifié, au regard
de la particularité des comportements, qui ont un
impact sur l’environnement, caractérisés, notamment, par la nature différée de cet impact et nous
avons vu que, selon la temporalité dans laquelle ils
se situent, les individus n’auraient pas la même
perception de l’intérêt qu’ils peuvent trouver à se
comporter de manière respectueuse vis-à-vis de
l’environnement. De ce point de vue, l’extension
temporelle future nous apparaît comme une notion
particulièrement pertinente.
Notons, d’un autre côté, que la temporalité, dans
laquelle se situent les individus, est, elle-même,
modulée par certains facteurs situationnels, dont le
contexte social. Par exemple, il semblerait qu’il
existe une valorisation de l’anticipation, de la planification, dont les outils de mesure sont, eux-mêmes,
empreints (voir, par exemple, les items de la dimension Futur de la ZTPI). Cette influence socionormative et la façon dont elle peut moduler l’extension temporelle future des individus devront être
étudiées, à l’avenir, de façon plus précise.
Dans ce sens, il nous semble qu’une des possibilités de recherche futures réside dans l’analyse
approfondie du statut du construit mesuré par la
CFC. En effet, si le degré de considération pour les
conséquences futures est généralement conçu
comme une disposition individuelle relativement
stable, il serait intéressant d’explorer dans quelles
situations et sous quelles conditions cette variable
peut être sensible au contexte. Si la CFC est généralement étudiée d’un point de vue personnaliste,
il nous semble intéressant de développer des
travaux dans une perspective plus psychosociale,
qui considère les dynamiques situationnelles et
sociales en jeu dans la formation et l’actualisation
de la perspective temporelle future. Dans cet esprit,
il pourrait être pertinent d’étudier si cette disposition peut être modifiée en fonction de certains
contextes. Ainsi, si les individus, ayant un score
élevé à la CFC, s’engagent davantage dans des
comportements de protection de l’environnement,
il pourrait, par exemple, être intéressant
d’augmenter l’engagement dans une activité
contraignante dans le présent, mais qui apporte des
bénéfices futurs, en sensibilisant les gens à la relation entre comportements présents et bénéfices
futurs (Hall, Fong, 2003). Autrement dit, un enjeu
majeur réside dans le fait de savoir s’il est possible
de rendre les gens davantage sensibles aux conséquences à long terme de leurs comportements de
façon durable. Des recherches dans le domaine de
l’éducation à l’environnement pourraient être
menées dans ce sens.
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359
360
bulletin de psychologie
ANNEXE
Traduction française des 12 items de la CFC (Strathman et al., 1994).
1. J’envisage comment pourraient être les choses dans le futur et j’essaie de les influencer par mon
comportement quotidien.
2. Souvent, j’adopte un comportement particulier pour atteindre des objectifs qui ne se réaliseront peutêtre pas avant des années.
3. Je n’agis que pour répondre à des préoccupations immédiates, en pensant que le futur s’arrangera
de lui-même.
4. Mon comportement n’est influencé que par les conséquences immédiates de mes actes (dans les
jours ou semaines qui suivent).
5. Mon confort est un facteur important dans les décisions que je prends ou dans les actions que je
réalise.
6. Je suis prêt(e) à sacrifier mon bonheur ou mon bien-être immédiats afin d’atteindre des objectifs futurs.
8. Je pense qu’il vaut mieux adopter un comportement dont les conséquences lointaines seront bénéfiques, plutôt qu’un comportement entraînant des conséquences immédiates moins bénéfiques.
9. Je ne tiens généralement pas compte des mises en garde contre d’éventuels problèmes futurs car je
pense que ces problèmes seront résolus avant d’avoir atteint un niveau critique.
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10. Je pense qu’il n’est généralement pas nécessaire de faire des sacrifices dans le présent puisque je
peux m’occuper des conséquences futures plus tard.
11. Je n’agis que pour répondre à des préoccupations immédiates, en pensant que je m’occuperai plus
tard des problèmes qui surviendront éventuellement dans l’avenir.
12. Puisque mes actions quotidiennes ont des résultats précis, elles sont plus importantes pour moi
qu’un comportement ayant des conséquences lointaines.
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7. Je pense qu’il est important de prendre au sérieux les mises en garde contre les conséquences
négatives de mes actes, même si ces conséquences négatives n’interviendront pas avant plusieurs
années.