Simon Girond

Cette étude analyse l’organisation religieuse d’une cité de Gaule centrale, celle des Bituriges Cubes, entre le IIe s. av. n. è. et le IVe s. de n. è. Les vestiges des sanctuaires ainsi que les documents épigraphiques et iconographiques relatifs aux cultes constituent les seules traces matérielles des paysages religieux anciens. Toutefois, l’espace envisagé offre une matière abondante (issue des fouilles anciennes et récentes ou des prospections aériennes)  que nous avons amendée en réalisant des recherches de terrain.
Après avoir présenté l’historiographie de la recherche, l’analyse progresse en trois étapes. La perspective est, d’abord, monographique et typologique : les objets de l’enquête sont étudiés et mis en série selon leurs caractères intrinsèques. Puis, le regard est étendu pour déceler comment ces éléments s’imbriquent avec les autres structures de l’organisation humaine de l’espace. Pour ce faire, leur répartition a notamment été analysée en ayant recours à un Système d’Information Géographique. Enfin, l’espace est confronté au temps pour suivre l’évolution du paysage religieux au cours de la période envisagée. Dans ce cadre, les conséquences de l’intégration à l’Empire romain sont une question centrale. Poser cette problématique à l’échelle d’une cité revient nécessairement à s’interroger sur les spécificités de cette société par rapport au modèle culturel auquel elle s’est intégrée. L’analyse a permis d’observer les stratégies déployées par les Bituriges Cubes pour s’accommoder des pratiques, du langage religieux et des formes d’organisation des cultes promus par Rome, mais aussi de scruter leur attitude à l’égard de leurs traditions religieuses.

"The article examines the relationships between places of worship and the organisation of ancient cities. Taking the example of the Biturige civitas, and based on field studies, we investigate the establishment of sanctuaries in ancient settlement aeras. We then assess the role of the "large sanctuaries" in the process of territorialisation.
Nous nous intéressons dans le cadre de cet article aux rapports entre les lieux de culte et l'organisation de la cité antique. A travers l'exemple de la cité biturige et à l'appui de nos recherches sur le terrain, nous étudions l'implantation des sanctuaires au sein des réseaux de peuplement antique. Puis, nous évaluons le rôle des "grands sanctuaires" dans le processus de territorialisation de l'espace"

Le territoire biturige a été l’objet de nombreuses recherches archéologiques qui ont permis notamment de mettre en évidence la présence d’une centaine de sites cultuels antiques certains ou hypothétiques. Parmi eux, une vingtaine présente des traces d’une occupation d’époque gauloise. Nous avons mené, dans le cadre d’une thèse, des recherches de terrain (prospections, photo-interprétation) qui nous ont permis d’amender nos connaissances sur l’organisation spatiale, l’architecture, la chronologie et le contexte d’implantation de nombreux lieux de culte de ce territoire. Ces données permettent de mettre en lumière l’organisation du paysage religieux du territoire biturige et son évolution. Dans cette communication, il s’agira d’étudier les principales dynamiques religieuses qui l’animent (permanence, mutation, adoption), à partir du IIe s. av. n. è. et durant l’époque romaine. Comme ailleurs, elles révèlent une histoire qui est propre à ce territoire, puisqu’elles mêlent des réalités et identités locales ou régionales et des tendances globales, à l’échelle de la koïnè culturelle celtique, puis de l’Empire romain. Nous évaluerons, en outre, la place de ces processus dans l’évolution de l’organisation du territoire et dans celle de la société qui l’occupe et l’administre.