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Confessions de chimères: Nouvelles fantastiques
Confessions de chimères: Nouvelles fantastiques
Confessions de chimères: Nouvelles fantastiques
Livre électronique85 pages1 heure

Confessions de chimères: Nouvelles fantastiques

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À propos de ce livre électronique

"J'ai déjoué le sort, bien malgré moi. Je ne voulais ni de ce don ni de l'autre. Je suis donc affublé des deux, esclave de ma propre noirceur. Le caillou et la chaussure..."
Les personnages des Hurlements d'Automne lèvent le voile sur leurs mystérieux passés...
Ces trois récits vous immergent dans la Brume, à travers les témoignages d'un dragon en fuite, d'un peinombre amoureux et d'un veilleur aux prises avec un vampire hors-la-loi.
LangueFrançais
ÉditeurBooks on Demand
Date de sortie5 juin 2023
ISBN9782322474080
Confessions de chimères: Nouvelles fantastiques
Auteur

Laura Motin Grave

Laura Motin Grave : animale sauvage, pesant entre 58 et 65 kg pour une envergure de près d'1m80, indifféremment bipède ou quadrupède. On la trouve souvent dans les environnements forestiers ou, en milieu urbain, à proximité des tatamis. Son aire de répartition s'étend du Svalbard au Sahara, et de l'ouest de l'Europe jusqu'aux montagnes des Carpates. Elle apprécie la compagnie des loups, des corbeaux et des chats noirs, et passe une grande partie de son temps à écrire des récits fantastiques. Son régime alimentaire se compose essentiellement de légumes racines, de graines et de feuilles tendres ; les seules prédations avérées à ce jour sont quelques poissons de rivière et des bivalves. Sa curiosité la pousse à côtoyer les êtres humains, mais elle demeure généralement farouche. Il semblerait qu'on puisse l'approcher en l'appâtant avec du fromage ou du punk rock. Son camouflage élaboré lui confère toute sorte d'apparences : cavalière, ouvrière, dame de la cantine, graphiste, vendeuse, secrétaire de rédaction, employée de banque, libraire, photographe, serveuse, professeure de dessin... Pour l'identifier à coup sûr, l'observateur averti cherchera la morsure qui balafre son membre antérieur gauche.

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    Aperçu du livre

    Confessions de chimères - Laura Motin Grave

    Un parasite flamboyant

    ————————————

    Les montagnes bleues, 1828

    J’adore les montagnes. Figures majestueuses à l’apparence paisible, pourtant engendrées par de brûlants magmas… Elles me rassurent, m’étoffent. Comme le feraient des souvenirs d’enfance, probablement. J’aime encore être un volcan, parfois.

    Celle-ci est assez ancienne, le dos rond, habillée de forêt pratiquement jusqu’à son sommet. Nous nous connaissons. Sous mes pieds, je sens le granit, dur et rugueux, le lichen, la tendresse fraîche de la mousse humide. La pente dévale devant moi, épousant en courbes douces les caprices des pierres et des ruisseaux, puis serpente et remonte vers les nuages, couverte de prairies jaunies par le soleil et d’arbres dévêtus. Les sapins parsèment les étendues fauve, rouges et grises de tâches d’un vert profond. Ce n’est pas encore complètement l’hiver.

    Je goûte le vent avec cette petite bouche molle aux dents plates, cette peau fragile, ces poumons minuscules. On se sent bien nu, sans écailles, mais quel délice d’être percuté par les molécules de l’Originel, librement...

    Je ne suis pas supposé me trouver là.

    Quand cela se saura, car je ferai en sorte que cela se sache, j’aurai droit à des heures de remontrances cycloniques de la part de mes paires. J’en ricane d’avance… Aussi puissants que soient les autres Inexistants, je suis un dragon. Je n’ai que faire de leur colère. Je n’ai pas besoin d’être vivant, mourir ne signifie rien à mes yeux. Cela arrive, de temps en temps.

    L’état gazeux offre d’innombrables nuances, mais tout est décomposé. Le minéral se montre riche, mais passif. La révolution des eucaryotes nous a ouvert tant de possibles… Nous sommes de piètres inventeurs, il faut l’admettre. Le génie perceptif de la vie nous a attirés, transformant les ondulations contemplatives en un délicieux ballet de décisions, façonnant des individualités. D’errances fongiques en guérillas végétales j’ai suivi les variations alambiquées, passionnantes et retorses qui gravitent autour de mon élément fétiche… Et puis, il y a les bêtes, si immédiates et fugaces, si modelées par leurs sens… elles en deviennent de véritables poèmes.

    Il faut du temps pour acquérir une enveloppe stable, apprendre à agencer les ingrédients correctement, construire les bonnes cellules… tout ceci peut prendre des millénaires. Nous ne produisons pas cet effort au hasard. Les adopter nous limite aussi beaucoup, mais comment y renoncer ? Comme l’eau fait scintiller la lumière en arc-en-ciel, chaque forme offre un nouveau prisme à travers lequel découvrir les chatoiements du monde.

    Je me suis nommé Carbon, en hommage au premier élément dont j’ai goûté la saveur, celui qui a donné une direction à ma curiosité. Il a fait de moi qui je suis.

    Un parasite atomique particulièrement doué avec les incarnations biologiques et le feu.

    Les Hommes nous ont représentés sous les traits de lézards géants dotés d’ailes, de serpents gigantesques, de fauves recouverts d’écailles… Il est vrai que nous sommes nombreux à apprécier ces corps reptiliens, confortables et efficaces, sensibles, mais calmes. Et remarquables.

    C’est qu’ils ont parcouru le monde suffisamment longtemps pour que même les plus frileux d’entre nous tentent d’en imiter la constitution, au moins partiellement… Les dinosaures étaient beaucoup plus inspirants que les humains. Qui aurait parié sur ces primates à grande gueule, avec leur visage fantomatique et leur sexe géant ? Personne, voyons !

    Et en un claquement de langue, ils ont tout changé…

    Il m’a fallu près de mille ans, mais j’y suis enfin parvenu. Je me suis fabriqué un corps fragile de bipède. Le tabou ultime. Je l’ai fait par défi, mais je ne m’attendais pas à ce qui vient de se passer, en revanche… Mère Magie et Père Chaos ont toujours été délicieusement imprévisibles. À l’instant où j’ai eu modelé tous les éléments bruts de la bonne façon et limité mon influence à ces seules cellules… l’Outremonde m’a recraché.

    Je me retrouve là, grelottant, à contempler l’Originel, pour la première fois depuis… depuis trop longtemps à mon goût. L’air a changé. Il s’était chargé de CO2. Ce qu’il transporte ne vient ni des plantes qui m’entourent, assez semblables à celles que j’ai pu fréquenter, ni d’une éruption ou d’un incendie. Je sais reconnaître ces parfums, non, c’est autre chose. Une combustion massive de matière végétale dégradée, d’une pierre sombre que j’affectionne tout particulièrement…

    Partout brûle du charbon.

    Que fabriquent les Hommes, encore ? Je suis certain qu’il s’agit d’eux. Ils ont toujours aimé jouer avec le feu, en dépit de leur vulnérabilité. La stupéfaction fait place à la curiosité, peu à peu, accélérant le métabolisme que je viens de mettre en marche, faisant battre avec fougue le cœur que j’ai façonné. J’aspire un peu plus d’air, me laisse porter par cette soif.

    Je me souviens et je découvre, simultanément. Comment avons-nous pu nous passer de ces sensations ? J’avais oublié à quel point les contraintes de ce monde le rendent riche et savoureux. Cela fait près de trois mille ans que nous avons déserté la Terre pour protéger la magie de l’humanité. Cette décision m’appartient, comme à tous les Inexistants, et je ne la regrette pas. Cependant, je ne peux souffrir de me figer dans ces limites. Les dragons n’ont pas besoin de l’Originel, nous n’avons plus le droit d’y pénétrer. Plus le droit, hein ? Le concept d’autorisation ne fait pas partie des inventions qui excitent mon intérêt. Je n’ai pas l’intention de briser mon serment, trop de vies en dépendent. Je me contente de contourner la règle. Oui, je relance le jeu.

    Maintenant que je suis là, un sentiment d’euphorie m’envahit.

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