À propos de ce livre électronique
La sorcellerie est dans tous les esprits. Une délégation d’inquisiteurs arrive à Salem et les arrestations commencent. À la fois intimidées et impressionnées par leur domestique, qu’elles soupçonnent d’être une sorcière, Abigail et Betty se découvrent elles-mêmes des pouvoirs magiques qu’elles peinent à contrôler.
Tituba prendra les deux jeunes filles sous son aile et leur enseignera
les rudiments de la magie. Bientôt, d’autres femmes à Salem apprennent qu’elles ont aussi le « souffle des sorcières », ce qui
enflamme l’inquiétude générale dans le village et fait se multiplier les condamnations pour sorcellerie.
Millie Sydenier
Millie Sydenier écrit depuis toujours. En 2009, après trois années d'études en Lettres Modernes, elle décide de vivre pleinement de son écriture et de réaliser un rêve d’enfant…vivre au Canada. Elle est retournée depuis dans son pays natal, mais garde un merveilleux souvenir de son passage à Montréal !
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Avis sur les SORCIERES DE SALEM
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Aperçu du livre
les SORCIERES DE SALEM - Millie Sydenier
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales
du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Sydenier, Millie, 1986-
Les sorcières de Salem
Édition originale : [Sainte-Angèle-de-Monnoir, Québec] :Éditeurs réunis, 2009-2011.
L’ouvrage complet comprendra 6 volumes.
Sommaire : tome 1. Le souffle des sorcières.
Pour les jeunes.
ISBN 978-2-89431-525-5 (vol. 1)
I. Sydenier, Millie, 1986- . Souffle des sorcières. II. Titre.
PZ23.S9685So 2017 j843’.92 C2017-940254-4
© 2017 Les éditions JCL
Les éditions JCL bénéficient du soutien financier de la SODEC
et du Programme de crédit d’impôt du gouvernement du Québec.
Nous remercions le Conseil des Arts du Canada
de l’aide accordée à notre programme de publication.
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Imprimé au Canada
Dépôt légal : 2017
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Bibliothèque nationale du Canada
Bibliothèque nationale de France
75658.png75880.pngAvertissement
Les faits relatés dans ce livre ne sont pas rapportés par l’Histoire. La plupart des personnages du livre ont bel et bien existé sans que je puisse leur prêter les actions que je narre. Au xviie siècle, il s’est produit à Salem des événements dramatiques dont je me suis inspirée pour créer cette série. Mais qui sait ? peut-être que l’Histoire telle que nous la connaissons cache en son sein des éléments que nous ne sommes pas en droit de connaître…
M.S.
1
Le soleil pointait déjà à travers les carreaux des fenêtres des chambres. Passant par les lourds rideaux de velours rouge, il donnait aux pièces une ambiance chaude et accueillante. Dans chacun des grands lits en bois sombre émergeait des volumineuses couvertures une tête brune ou noire. Les deux jeunes filles étaient profondément endormies, encore bienheureuses dans la chaleur de leurs draps de soie, le visage enfoui dans les oreillers de plumes d’oie. Sept heures venaient de sonner, et bientôt la femme de chambre viendrait les réveiller. La journée promettait d’être belle et on entendait déjà les oiseaux pépier gaiement dans la fraîcheur matinale. L’automne s’était installé il y a quelques jours et le temps était doux, un peu frais parfois, mais tellement agréable.
Sans frapper à la porte, Cathy entra dans la première chambre. Se penchant sur le lit, elle murmura :
— Miss Betty, il est l’heure. Le petit-déjeuner est servi et il fait si beau dehors. Levez-vous vite !
Betty grommela quelques mots que Cathy ne comprit pas et celle-ci, haussant les épaules, alla ouvrir les grands rideaux. Le soleil s’en donna à cœur joie et illumina le moindre recoin de la chambre. Un petit rayon caressa même le nez de Betty, la forçant à tourner la tête. Cathy se rendit dans la chambre attenante et murmura les mêmes paroles à Abigail. La réaction de la jeune fille fut quelque peu différente de celle de sa cousine. Après un grognement enjoué et plusieurs étirements, elle se redressa entre les draps. Abigail était si belle avec son sourire rose, ses fossettes et son nez en trompette. Ses yeux avaient une lueur espiègle mais il y flottait une certaine retenue et son âme de rêveuse perçait à travers ses iris. Elle regarda par la grande fenêtre. Le temps était délicieux, les arbres aux couleurs mordorées du jardin frémissaient tranquillement sous une légère brise qui faisait danser les feuilles. Descendant de son lit, elle ouvrit grand les battants et huma intensément l’air automnal.
— Cathy, as-tu vu ce temps magnifique ? Quelle belle journée !
Abigail passa la porte attenante à la chambre de Betty et sauta sur le lit de sa cousine.
— Allez ! Lève-toi ! Tu ne veux pas aller courir dehors ? C’est notre journée de repos. Oncle Samuel nous laisse tranquilles aujourd’hui ! Nous avons toute la journée pour nous amuser !
— J’aimerais mieux commencer mes journées de repos par dormir un peu. Pourquoi avons-nous besoin de nous lever si tôt ? C’est tellement inhumain.
— Mais pour profiter de la journée, évidemment ! Allez, viens avec moi ! Allons prendre notre petit-déjeuner, ensuite nous irons jouer dehors ! »
Et Abigail sortit précipitamment de la chambre de sa cousine, ses longs cheveux bruns et bouclés voletant sur ses gracieuses épaules à la peau blanche. Dévalant le grand escalier qui menait au rez-de-chaussée sans jeter un coup d’œil aux portraits d’ancêtres qu’elle avait vus cent fois, elle entendit Betty se lever. Elle courut jusqu’à la cuisine d’où s’échappaient d’alléchantes odeurs et souhaita le bonjour à tous les domestiques qui s’y affairaient.
— Bonjour, miss Abigail. Avez-vous bien dormi ? demanda la cuisinière, une grosse dame joufflue à l’air frais et rose.
— Oh oui, très bien, miss Salinger, comme un bébé. Comme toujours d’ailleurs, ajouta la jeune fille, malicieuse. Qu’est-ce que cela sent bon ! Que nous préparez-vous ?
— Ttt ! C’est une surprise, miss, pour le souper. Et vous ne le saurez pas avant, ni ne goûterez à quoi que ce soit, dit-elle en donnant un coup de cuillère sur la main d’Abigail qui s’était approchée d’une grosse marmite et se préparait à y plonger un doigt. Filez prendre votre petit-déjeuner et courez vous amuser ! »
Riant, Abigail obéit avec plaisir à miss Salinger. Quoi que la cuisinière prépare, ce sera un régal !
Elle retrouva Betty attablée dans la salle à manger. La pièce avait quelque chose d’austère avec toutes ces grandes bibliothèques vitrées qui laissaient apparaître les tranches de livres anciens et précieux, ces icônes christiques et ces tapisseries guerrières. L’âtre en pierre de l’immense cheminée, noir de suie, faisait penser à une bouche dévorante et les tapis qui recouvraient le sol n’égayaient en rien la morose pièce. L’immense table en chêne avait été dressée à un seul bout, et on aurait pu y ajouter une trentaine de convives sans que ceux-ci soient serrés. Le pain était chaud et embaumait la pièce. Les fameuses confitures de miss Salinger leur mirent l’eau à la bouche. Les deux filles mangèrent avec appétit sans parler puis, ayant terminé leur repas, elles se regardèrent et posèrent la même question :
— Qu’allons-nous faire ?
Elles éclatèrent de rire et décidèrent finalement d’aller se promener à travers les champs afin d’atteindre la forêt de Belwack. C’était leur endroit préféré. Le bois de Kyron était tout aussi beau mais un peu plus éloigné. Peut-être s’y rendraient-elles dans l’après-midi.
Elles sortirent sous le soleil éclatant, écoutèrent un instant les oiseaux. Tout en admirant les couleurs fauves de l’automne, elles se dirigèrent vers les hautes herbes parfumées qui bordaient l’arrière de leur demeure. Bras dessus, bras dessous, les deux cousines bavardaient comme des sœurs, de tout et de rien, appréciant le plaisir d’être ensemble encore aujourd’hui. Abigail était arrivée chez Betty Parris il y a quatre ans, lorsque ses parents, d’humbles tenanciers d’épicerie dans un village près de la Nouvelle-Amsterdam, avaient été cambriolés puis froidement assassinés. Fille unique, Abigail s’était retrouvée orpheline. Le révérend Samuel Parris, frère aîné de la mère d’Abigail, avait décidé de la recueillir pour que sa fille, Betty, ait une présence féminine. Sa mère était décédée à sa naissance. De plus, les deux enfants avaient le même âge. De leurs retrouvailles était née une amitié sans faille ; le désespoir les avait jetées dans les bras l’une de l’autre et rien ne les avait jamais séparées.
Leurs légers souliers de cuir à boucle ne faisaient aucun bruit sur le chemin parsemé de gravillons et d’herbe sèche. Le vent soulevait leurs robes légères, bleue pour l’une, jaune pour l’autre, agrémentées de dentelles, d’une collerette et de petits nœuds de soie. Aucune des deux jeunes filles n’avait pris la peine de se munir de son ombrelle ou de son chapeau. Leurs socquettes blanches étaient déjà noires de terre. Les cheveux d’Abigail cascadaient gracieusement. Les traits des cousines étaient fins et, si on ne connaissait pas leur tragique histoire, on aurait pu les prendre pour des sœurs. Pourtant, Betty avait déjà les traits d’une femme. Ses longs cheveux noirs retenus négligemment par un chignon dont s’échappaient des dizaines de mèches, son nez fin, ses yeux verts pailletés d’or et son sourire déluré lui avaient déjà donné une cour de prétendants parmi la jeunesse de Salem. Du haut de leur quatorze ans, les deux jeunes filles étaient étrangement fascinantes pour tous les habitants du village.
Elles atteignirent la forêt encore silencieuse et pénétrèrent sous le couvert des grands arbres. Hêtres, frênes, chênes, bouleaux, marronniers… Tous étaient si beaux. Abigail ne se lassait jamais de les contempler tandis que Betty préférait les escalader. Elles se mirent à jouer et se poursuivirent en se cachant derrière les troncs centenaires des arbres qui fendaient les cieux. Le sol craquait sous leurs pas. Une épaisse couche de feuilles mortes et de mousse spongieuse s’était déposée et la forêt était si dense que les rayons du soleil avaient bien du mal à percer la futaie.
— Et si nous ramassions des châtaignes pour les faire griller ce soir sur le feu ? Je suis sûre que papa serait content ! s’exclama Betty.
— Nous n’avons pas emmené de panier. Dans quoi les mettrons-nous ?
— Eh bien… dans les poches de nos robes ! Après tout, ce n’est pas si grave si nous les salissons.
Elles entreprirent donc leur chasse aux châtaignes. Lorsqu’elles furent fatiguées de parcourir le sol à quatre pattes et que leurs poches débordèrent de bogues piquantes, elles s’allongèrent à l’orée du bois pour admirer le ciel. De légères écharpes de nuages flottaient dans l’air ; elles s’amusèrent à y voir des personnages.
Lorsque le soleil eut atteint son zénith, elles décidèrent de rentrer chez elles pour déposer les châtaignes puis de repartir se promener. Elles sortirent donc gaiement de la forêt, sautillant entre les herbes. Elles épièrent une fourmilière ainsi qu’un joli oiseau rouge qui ramassait des brindilles, sûrement pour construire son nid.
Avant qu’elles atteignent la rivière qui bruissait tranquillement sous les saules qui bordaient son lit, une voix retentit derrière elles. Abigail et Betty se retournèrent d’un même geste et poussèrent un soupir d’exaspération.
— Abigail, Betty, attendez-moi ! cria la voix stridente.
Ann Putnam… Cette peste d’Ann Putnam ! Celle-ci s’approcha, une ridicule ombrelle à la main, ses cheveux blonds parfaitement retenus par des rubans et des barrettes. Elle marchait d’un air guindé, le menton levé vers le ciel, les pieds en canard comme si le sol en dessous d’elle n’était pas digne de la porter.
— Bonjour, mesdemoiselles, dit-elle, l’air hautain et la bouche pincée. Oh ! Comme vos robes sont sales ! s’exclama-t-elle en jetant un regard de dédain aux deux jeunes filles.
Ann Putnam, la fille d’Astor Putnam, l’homme le plus influent du village. Le révérend Parris avait mis en garde ses filles : « Je sais parfaitement que vous n’aimez pas la jeune Ann. Mais son père est le plus grand bienfaiteur de l’église et c’est grâce à sa famille que nous vivons dans cette splendide maison. Alors je compte sur vous pour être aimables avec Ann même si cela doit vous coûter. »
— Savez-vous où je suis allée hier ? demanda Ann.
— Non, grommela Betty.
— Mais à Boston, voyons ! Ah ! Père m’y a emmenée pour que je m’achète de nouvelles robes. Voyez… N’est-elle pas magnifique ? ajouta-t-elle en tournoyant sur elle-même.
Abigail et Betty avouèrent qu’elle était splendide. Les manches courtes et le col rond étaient en dentelle et la toilette était d’une belle couleur saphir. Le tissu brillait sous le soleil et un fin ruban d’un bleu plus clair ceignait la taille de la jeune fille.
— Qu’avez-vous donc fait pour vous salir de la sorte ? Betty, ton père ne serait sans doute pas content d’apprendre que sa fille court les bois comme une vulgaire fille de paysan !
Ulcérée, Betty lui répondit d’une voix doucereuse :
— Au contraire, mon père pense qu’il nous faut découvrir la campagne et apprendre que tout ne nous est pas dû dans la vie. Il dit que cela fera de nous des femmes bonnes, honnêtes et généreuses. Peut-être que ton père aurait dû faire de même pour toi !
Abigail sentit l’ambiance se figer. Désireuse de maintenir une entente cordiale, elle demanda à Ann :
— Nous venons de ramasser des châtaignes et nous nous rendions les déposer à la maison. Veux-tu nous accompagner ?
Après une hésitation travaillée, Ann accepta. Toutes trois se mirent en route et Abigail et Betty endurèrent le babillage d’Ann.
— Vous savez, à Boston, personne ne savait que je venais d’un village perdu dans la campagne. Tous pensaient que j’étais une femme du monde. J’ai rencontré beaucoup de gens. La duchesse de Willancourt, le comte de Seray et même la comtesse Alice de Lawson. Celle-ci m’a trouvée tellement charmante ! s’exclama-t-elle dans un rire de gorge parfaitement insupportable. Mais excusez-moi, il est parfaitement impoli de parler de personnes que vous ne connaissez pas et que vous ne rencontrerez sûrement jamais, ajouta-t-elle, dédaigneuse et méprisante.
Elles étaient arrivées devant la maison des Parris et la grande grille en fer forgé était ouverte. Un petit chemin de galets blancs serpentait jusqu’à la lourde porte en bois de l’entrée. La maison était en pierre grise et les colonnes du porche rendaient un bel effet. Des fleurs décoraient toutes les fenêtres des étages. C’était la passion de la défunte femme du révérend et celui-ci, lorsque son épouse était décédée, lui avait promis de s’en occuper toujours. Il avait tenu parole et la maison des Parris était la plus fleurie du village.
— Veux-tu entrer, Ann ? demanda poliment Abigail. Nous pourrions t’offrir un verre de lait ou de thé glacé peut-être ?
— Oh non ! Il est absolument hors de question que j’entre ! Je vous attends ici. Ne traînez pas !
Abigail entraîna Betty à sa suite avant que celle-ci ne fasse quelque chose qu’elles regretteraient toutes les deux.
— Moi, madame, je suis une femme du monde. La comtesse de machin et le duc de truc… Gnagnagna ! Oh ! Je ne la supporte plus ! Quelle horrible peste ! Quelle affreuse sorcière !
— Allez, Betty, un effort ! Pour ton père ! Tu sais, la méchanceté devrait être excusée quand elle vient de la bêtise !
Éclatant d’un grand rire, elles se rendirent à la cuisine pour y déposer leur butin. Au passage, elles chipèrent un morceau de pain. Elles retrouvèrent Ann à l’endroit où elles l’avaient laissée.
— Nous comptions retourner à la forêt de Belwack ou peut-être ramasser des champignons au bois de Kyron. Est-ce que cela te tenterait ?
— Bien sûr que non ! Je ne veux pas ressembler à une souillon ! Allons nous asseoir et bavardons !
— Avec plaisir, soupirèrent les deux filles.
Elles s’installèrent au soleil sur un coin d’herbe plat. Ann sortit de son sac une petite couverture qu’elle étendit soigneusement sur le sol avant de s’asseoir dessus avec une grâce exagérée. Elle ne la partagea pas avec Abigail et Betty qui s’étendirent dans l’herbe.
— Savez-vous ce qu’on raconte en ville ? demanda Ann.
— La comtesse de chose a découvert la lecture ? ricana Betty.
— Comme tu es insolente ! Non ! On dit que des sorcières auraient été découvertes dans les villages alentour.
Étonnées par le fait qu’Ann parle de quelqu’un d’autre qu’elle-même et intéressées par ce sujet palpitant, les deux filles se redressèrent et accordèrent toute leur attention à Ann.
— On dit que des choses étranges arrivent dans les villages. Des nouveau-nés meurent, des bêtes aussi. Il paraît que des troupeaux entiers sont décimés. Un homme a même vu sa maison brûler
