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Le Juge Et Les Sorcières: Une Enquête Du 16ème Siècle
Le Juge Et Les Sorcières: Une Enquête Du 16ème Siècle
Le Juge Et Les Sorcières: Une Enquête Du 16ème Siècle
Livre électronique189 pages2 heures

Le Juge Et Les Sorcières: Une Enquête Du 16ème Siècle

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À propos de ce livre électronique

En l’an 1530, Paolo Grillandi, juge pontifical et président du tribunal séculier de Rome, enquête sur un homicide turbide et un enlèvement ignoble, parvenant, peu à peu, et non sans en payer un lourd tribut, à éclaircir d’obscures agissements de personnages excellents acquis au satanisme, à l’assassinat et à la sexualité la plus bestiale, et livrant finalement à la justice des auteurs, non pas d’un mais d’une longue série de délits, qu’il condamnera à être brûlés, selon la loi de l’époque ; mais bien que longue, dangereuse, et minée par les attentats à sa vie, c’est le chemin que le magistrat doit parcourir pour aboutir à la preuve. En même temps, de chasseur impitoyable de sorcières, il se convertit en homme perplexe et clément à la suite à certaines expériences et rencontres, en premier lieu celle du jeune et très culte évêque Micheli qui était parmi les quelques ecclésiastiques de cette époque à combattre le fanatisme au nom de l’adorable Raison divine. Dans ce climat de chasse aux sorcières que connut la Renaissance, entre de multiples coups de théâtre qui se multiplient jusqu’aux dernières pages de ce livre, le lecteur assistera, entre autre, à un duel d’épées avec le diable en personne, au sac de Rome, rencontrera des philosophes et des mages gnostiques, des esclaves, des brigands, des saints et des ensorcelés, tout cela dans une Italie désormais proche du Concile de Trente, différente de celle d’aujourd’hui, et pourtant, similaire. Il se trouve dans ce roman, historique mais aussi policier par certains aspects, de grandes figures passées à l’Histoire et des personnages historiques mineurs comme l’avocat Ponzinibio, adversaire des violences portées tant par l’Inquisition catholique que par les tribunaux religieux protestants et dont l’image annonce, avec beaucoup d’anticipation, les adversaires de la peine de mort tel Beccaria ; et des portraits royaux tel Balestrini, lui aussi ensorcelé, et le terrible inquisiteur dominicain Spina. Ce même protagoniste Grillandi est une figure historique, même si en réalité, il n’était qu’un avocat fanatique dénonciateur de sorcières, davantage qu’un juge pontifical. Parmi les personnages imaginaires, il y a Mora, jeune amante soumise au juge et qui cache des secrets horribles et tourmentés, figure de premier ordre, pour avoir livré elle-même au magistrat la solution de l’enquête. D’autres personnages sont issus de l’imagination, tels que l’énigmatique chevalier Rinaldi et le diabolique prince Biancacroce, figure de l’ombre et jamais au premier plan, telle une marionnette : une sorte de chef mafieux caché, doublé par Rinaldi qui, lui, agissait à découvert. L’évêque Micheli est, lui aussi, un personnage de fiction, même s’il préfigure d’autres prélats qui, eux, ont existés, comme Pole, Sadoleto et Morone qui, tous, furent accusés d’hérésie par l’Inquisition pour avoir prêché la charité évangélique contre les violences des inquisiteurs ; tout comme des personnages tels que le curé de Grottaferrata, du sicaire Trallo, de l’épéiste Fuentes Villata, du chef brigand et frère de Marietta, du juge Salati et du lieutenant Rissoni. Le roman se réfère à la mentalité du 16ème siècle, évidemment, car comme le savent bien les historiens, il faut regarder le passé en se libérant des façons de sentir contemporaines, pour éviter les anachronismes ; par exemple, la peine capitale est considérée de nos jours, comme une chose atroce, alors qu’au 16ème siècle et pour longtemps encore, elle était vue comme une punition et on pensait que la mort amnistiait l’assassin repenti de tous ses péchés, et l’envoyait tout droit au Paradis ; c’est ainsi que le personnage de l’évêque Micheli n’arrive pas, même en invoquant ses idéaux, à s’opposer aux condamnations à mort des assassins ; au contraire, il approuve la sanction du bûcher infligée aux membres du clan criminel satanique découvert et arrêté par le juge protagoniste Grillandi, vers la fin du roman. Note pour la traduction : L’œuvre originale en italien contient
LangueFrançais
ÉditeurTektime
Date de sortie23 févr. 2017
ISBN9788885356566
Le Juge Et Les Sorcières: Une Enquête Du 16ème Siècle
Auteur

Guido Pagliarino

Guido Pagliarino è laureato in Economia e Commercio all’Università di Torino con una tesi di ricerca storica pubblicata a cura dell’Istituto di Storia Economica e Sociale. Di particolare interesse durante i suoi studi erano state la medesima disciplina e la Storia delle dottrine economiche e sociali, sotto le guide dei compianti professori Carlo Cipolla e Mario Abrate. Negli anni, insieme ad altri interessi culturali, è continuato quello storico e Pagliarino ha pubblicato diversi saggi su pensiero e storia cristiani. È autore inoltre di romanzi e versi. Per la sua opera edita fin al 1996, nel 1997 gli è stato assegnato il "Premio della Cultura della Presidenza del Consiglio dei Ministri". Trascurando i volumi più antichi, l'autore ha pubblicato negli anni 2000 i seguenti libri, in parte scritti nel decennio precedente: a) Editi dalla 0111 Edizioni: Il mostro a tre braccia e I satanassi di Torino, due romanzi brevi, 2009 (FUORI CATALOGO © GUIDO PAGLIARINO) ISBN 978-88-6307-195-5 - Svolte nel tempo, 2011 (FUORI CATALOGO © GUIDO PAGLIARINO) (PRIMO ASSOLUTO sezione "Narrativa edita" al Premio Creativa VI Edizione : http://www.edizionicreativa.it/content/cms/db/pages/54/risultati%20premio%20creativa.pdf ) libro: ISBN 978-88-6307-350-8 e-book: ISBN 978-88-6578-039-8 b) Editi da GDS Edizioni: - Vittorio il barbuto, romanzo breve, 2010 ISBN 9788896961537 - Creazione ed Evoluzione, saggio, 2011 (FUORI CATALOGO © GUIDO PAGLIARINO) (MENZIONE SPECIALE DELLA GIURIA al "Premio Nazionale di Arti Letterarie 2010, sezione inedito": http://www.pagliarino.com/images/premio_10_arti_letter_500x364.JPG ) Edito, FINALISTA premiato con diploma al "Concorso Mario Pannunzio 2011": ( http://www.pagliarino.com/premio3_Pannunzio_finalista_2011.htm ) Edito FINALISTA premiato con medaglia e diploma al "Premio Marchesato di Ceva 2014" ( http://www.pagliarino.com/premio_Marchesato_Ceva_finalista_2014.htm ) libro: ISBN 97888896961759 e-book: ISBN 978-88-96961-82-7 - Il terrore privato, il terrore politico, romanzo, 2012 (FUORI CATALOGO © GUIDO PAGLIARINO) (ROMANZO 2° CLASSIFICATO al Premio internazionale Marguerite Yourcenar 2013 Punctum Literary Agency.eu : http://www.pagliarino.com/images/Premio_Yourcenar_Pagliarino_tra_i_5_finalisti.jpg ) libro ISBN 978-88-97587-62-0 e-book ISBN 978-88-97587-71-2 - Sindòn la misteriosa Sindone di Torino, saggio, 2013 (© Editrice GDS) (("Menzione d'onore della Giuria" al "Premio Nazionale di Arti Letterarie Città di Torino" - X Edizione: http://www.pagliarino.com/Sindon_segnalazione_pr_Arti_letter.htm ) libro ISBN 978-88-67820-55-9 e-book ISBN 978-88-67820-88-7 c) Editi dalla Prospettivaeditrice: - La vita eterna; sull’immortalità tra Dio e l’uomo, 2002 (FUORI CATALOGO © GUIDO PAGLIARINO) (PRIMO ASSOLUTO AL "PREMIO CITTA' DI TORINO 2003": http://www.pagliarino.com/premio2003_c_torino.htm ) ISBN 88-7418-106-X - Gesú, nato nel 6 ‘a.C.’ crocifisso nel 30, 2003 (FUORI CATALOGO © GUIDO PAGLIARINO) ( Segnalazione di Merito al "PREMIO PER LA PACE 2004" del Centro Studi Cultura e Società : http://www.pagliarino.com/premio_pace-2004_gesu'.htm ) ISBN 88-7418-072-1 - Cristianesimo e Gnosticismo; 2000 anni di sfida, 2003 (FUORI CATALOGO © GUIDO PAGLIARINO) Secondo Premio Saggistica al Concorso "Città di Salò" 2005 : http://www.pagliarino.com/premio_salo'_2005.htm ) ISBN 88-7418-177-9 - Il giudice e le streghe, romanzo, 2006 (FUORI CATALOGO © GUIDO PAGLIARINO) (Targa e diploma - Menzione d'onore al "Premio Letterario Nazionale Di Benedetto 2009" :http://www.pagliarino.com/prem_De_Bened-09.htm ) ISBN 978-88-7418-359-3 - Le indagini di Giovanni Marco cittadino romano, romanzo, 2007 (FUORI CATALOGO © GUIDO PAGLIARINO) (Premio Speciale della Critica al Premio Letterario Nazionale "Alfonso Di Benedetto" 2008 : http://www.pagliarino.com/premio-A-Di-Benedetto-2008_indag-Giov-Marc.htm Premiato al Premio "Aldo Cappelli - Romanzo storico" - Concorso Nazionale Letterario GARCIA LORCA : http://www.pagliarino.com/pr_g_lorca-2_capelli_giov_marco.htm ) ISBN 978-88-7418-343-7

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    Aperçu du livre

    Le Juge Et Les Sorcières - Guido Pagliarino

    Table des matières

    Préface de l’auteur aux deux premières éditions

    Guido Pagliarino, Le juge et les sorcières (Une enquête du 16ème siècle), Roman historique

    Postface de l’auteur à la troisième édition

    Préface de l’auteur aux deux premières éditions

    Ce roman se situe à une époque d’hystéries religieuses, de chasse aux sorcières et de femmes-objet, même si l’amour du prochain était au centre des préceptes chrétiens et que le Nouveau Testament clamait que « il n’y a pas l’homme et la femme, car tous sont égaux dans le Seigneur ».

    Il s’agit toutefois d’une œuvre de fiction. Je me suis efforcé de m’immerger dans la mentalité du 16ème siècle car, comme le savent bien les historiens, il faut regarder le passé en se libérant des façons de sentir contemporaines, pour éviter les anachronismes. À titre d’exemple, la peine capitale est considérée de nos jours, comme une atrocité, alors qu’au 16ème elle était vue comme une punition normale et on pensait que la mort amnistiait l’assassin repenti de tous ses péchés, et l’envoyait tout droit au Paradis. Comme nous le verrons, la torture était combattue bien avant l’arrivée de Beccaria.

    Il y a des personnages imaginaires et d’autres réels. Le protagoniste est une figure historique, dont le traité contre la sorcellerie fit la renommée. On sait que c’était un avocat. Il ne semble pas qu’il fût juge pontifical comme je l’imagine. Je le décris comme un homme privé d’autodérision. Par contre, en ce qui me concerne, j’ai voulu introduire de l’ironie et de la fantaisie involontaires dans certains de ses comportements, descriptions et considérations. L’avocat Ponzinibio et le terrible dominicain Spina sont eux-aussi des personnages réels, outre, naturellement, les autres grandes figures historiques de l’œuvre. Même Balestrini, l’ensorcelé, a véritablement vécu, même s’il vivait dans le Piémont et non dans le Latium : un cas qu’aujourd’hui on associerait à de la mythomanie et de la schizophrénie avec des penchants suicidaires. Le jeune évêque Micheli est, par contre, un personnage de fiction, même s’il préfigure d’autres prélats qui furent accusés d’hérésie pour avoir prêché la charité évangélique, les cardinaux Pole, Sadoleto et Moronte. Sont aussi inventés, outre des personnages de second ordre comme Mora, le chevalier Rinaldi, le prince de Biancacroce. J’ai gardé ce dernier toujours en arrière-plan, prêt à surgir.

    L’idée du roman m’était venue après que j’aie fait des recherches sur la chasse aux sorcières dans le but de comprendre, pour le moins, les raisons historico-sociales de tant de barbaries à l’apogée de la Renaissance. Tout ce que je découvris se retrouve résumé dans les considérations de l’avocat Ponzinibio, de l’évêque Micheli, du chevalier Rinaldi et, à partir d’un certain point de l’œuvre, de celles du protagoniste.

    Guido Pagliarino

    Guido Pagliarino

    Le Juge et les Sorcières

    (Une Enquête du XVIème Siècle)

    Roman historique

    (traduit de l’Italien par Giovanni Pantano)

    Chapitre I

    En l’an de grâce 1517, moi, Paolo Grillandi, jeune juriste de vingt-six ans, je fus nommé juge au barreau du Tribunal de Rome. J’y commençai mon apprentissage auprès du Juge Général Astolfo Rinaldi, des pratiques des procès contre les criminels, tous, mais surtout les suppôts du mal qu’on appelle démons.

    Bien avant mon entrée en magistrature, du temps où Innocent VIII, promulgua, en 1484, la bulle Summis Desiderantes déclarant la guerre au malins et malines en en précisant les critères pour les identifier, de très nombreux procès en sorcellerie avaient été instruits, comme jamais auparavant. Sa Sainteté avait compris que le nombre de personnes concernées avait fortement augmenté, des hommes mais surtout des femmes, qui pratiquaient la magie et avait ainsi déclaré « qu’il était absolument nécessaire d’être impitoyable et sans indulgence à leurs égards ». L’issue n’avait pas été heureuse et se traduit par de nombreuses condamnations pour ensorcellement, l’emprisonnement et le bûcher pour les envoûtés.

    Le Marteau des Sorcières, que les doctes dominicains Sprenger et Kramer rédigèrent en 1486, à la demande d’Innocent VIII, et qui nous avait été, et était encore, d’une aide irremplaçable, prévoyait chaque situation et instruisait comment punir les malins. Malheureusement et malgré les succès, le diable s’était montré plus déterminé, de sorte que le nombre de sorciers et sorcières avait continué d’augmenter, et semblait même croître avec celui des procès. Du moins, c’était mon opinion. En effet, la majorité des inculpés avouaient sous la torture ; même qu’une accusée, cette Elvira que je ne pourrai jamais oublier, avait capitulé devant moi en l’absence de toute menace. Elle nous avait été livrée avec la simple requête formelle d’obtenir sa grâce. Nous savions très bien qu’il valait mieux ne pas en tenir compte, sans risquer d’être, nous-mêmes, soumis au jugement : il ne s’agissait de rien de plus que de choisir la peine, une fois les aveux obtenus.  La femme avait été dénoncée pour avoir ensorcelé un certain Remo Brunacci, un habitant de Grottaferrata, comme elle. Le témoignage du curé de paroisse avait été précieux, de sorte qu’hormis la victime, il n’avait pas été nécessaire d’interroger d’autres administrés : Brunacci s’était vu soustraire le membre viril par un tour de magie par la sorcière et s’en était confié à l’archiprêtre. Celui-ci lui avait alors demandé qu’on dénouât sa braguette et vérifia lui-même ; de fait, comme il en témoigna par la suite, le membre avait disparu. Il avait alors convié le fidèle à faire pénitence : jeûner et boire de l’eau bénite, et prier le Ciel de restaurer l’objet volé. Afin qu’il pût mieux se concentrer sur sa prière, il avait enfermé le pénitent dans une petite pièce vide du presbytère, après lui avoir donné un seau de cette eau, où il resta un jour et une nuit. Quand, finalement, il le libéra, le curé l’examina à nouveau et le membre viril  était à nouveau apparu, à la grande joie et l’émerveillement de Remo qui, à peine congédié, avait conté son histoire à tout le village. L’Inquisition avait donc reçu une lettre anonyme, suivie d’une autre, officielle, de l’archiprêtre.

    A cette époque je supportais de telles dénonciations avec une indignation partagée. Même ma famille avait été soumise aux torts extrêmes d’une stryge. A neuf ans, une fois avoir appris à lire, écrire et compter, j’étais déjà dans l’atelier de mon père, maître cordonnier, tandis que ma mère, qui toute sa vie avait été un exemple de santé, avait été brusquement prise d’une fièvre maligne et mourut. J’étais fils unique, bien que les miens eussent souhaité une nombreuse progéniture à vouer à l’art familial. Combien de fois ma mère n’avait-elle pas répété à mon père, en pleurant, que ce devait être la sage-femme qui l’avait aidée durant l’accouchement, à l’en empêcher : elle s’était disputée avec elle, peu de mois après ma naissance, pour une question de lingettes dégoulinantes ; cette femme devait donc l’avoir envoûtée : il est du domaine public que les guérisseuses et les sages-femmes sont des sorcières suspectes pour le seul fait de leur art ; le même Marteau des Sorcières fait allusion à ces femmes comme des malines en puissance. Craignant une vengeance dont j’eusse été moi-même l’objet, mes parents n’en parlaient qu’entre eux.  Malheureusement, un soir, les deux garçons d’atelier étant à table avec nous comme à l’habitude (le couvert faisant partie de leur salaire), mon géniteur avait bu pas mal et était en proie à une profonde tristesse. Il ne tint plus sa langue et révéla le secret. L’un des deux devait l’avoir raconté à son tour, sinon les deux. C’est ainsi que, deux jours plus tard, ma mère se trouva nez à nez avec la sage-femme, sur le seuil de sa maison, qui telle une vipère, lui avait soufflé qu’une femme comme elle, qui allait tout raconter, ne méritait que les malheurs. Un mois plus tard, frappée par le sortilège de cette dégoûtante sorcière, ma mère était défunte. Mon père, envahi par le deuil et le remords d’avoir provoqué la riposte de cette jeteuse de sorts, s’était empressé de rosser les garçons, même si cela n’eût pas changé le destin de sa femme adorée et comme si la boisson n’avait pas été la première cause de ce qui était arrivé. Ce fut gonflé de haine et de courage, qu’aux funérailles, il dénonça la sage-femme publiquement ; le seul fait qu’elle n’était pas là, à prier la morte, suffisait pour l’accuser. Le curé en avait avisé l’Inquisition. Cependant la strige, que quelqu’un avait prévenue, on soupçonnait même que ce fût le diable en personne, s’était éclipsée à jamais et ne fut jamais punie. Jusqu’à ce moment, je ne faisais que pleurer et me taire. Une fois que je fus au courant de la fugue de l’assassin, j’explosai : « Je la retrouverai ! » avais-je crié à mon père. « Je la punirai par le feu, elle et toutes celles qui lui ressemblent ! » Je n’en démordais pas, et j’en avais tant dit pendant des jours et des semaines que mon père, lui aussi avide de justice, avait demandé conseil au curé. C’est ainsi qu’on m’orienta vers des études de juriste, alors que je continuais à travailler dans l’atelier Grillandi, autant que possible. C’est pour cela qu’à force de battre le fer, mon bras droit s’était fortement musclé et, avec le temps, était devenu presque deux fois plus gros que le gauche. Deux ans plus tard environ, mon père s’était remarié avec une veuve sans enfants. Après quelques mois à peine, l’épouse fut prise de violentes douleurs au ventre et mourut en quelques jours. Mon père s’était marié une troisième fois, avec une cousine. Il en eut une enfant, mais en venant au jour, on eut l’horreur de la découvrir bicéphale et, durant le terrible accouchement, aussi bien la mère que la fille décédèrent, la première irrémédiablement bouleversée par la tête fourchue du nouveau-né, la seconde pour n’avoir pu respirer. La sorcière continuait, de loin, de lancer des sorts à toutes les femmes de la famille. Notre haine pour elle s’en trouvait encore augmentée, pour autant que ce fût possible. Une fois arrivé au doctorat, comme c’était la coutume, mon père acheta ma charge de juge, par ses bons offices de prêtre et à grand renfort de dons qu’il distribua aux puissants. Il fit même un cadeau au curé. Mon père n’avait plus ni économie, ni argenterie, ni arme, de sorte que pour acquérir le matériau nécessaire à la fabrication de nouvelles épées, il avait dû solliciter un emprunt auprès d’une banque. Avec les années, j’aurai compensé son sacrifice en lui reversant un dixième de chacune de mes soldes.

    On n’a plus jamais retrouvé l’assassin de ma mère ni de mes belles-mères, mais mon cœur exultait à chaque fois qu’une sorcière était arrêtée. Je me rappelle la fois où on nous avait amenés Elvira, je m’étais exclamé devant Astolfo Rinaldi : « Chaponner un honnête homme ! Ah ! Justice sera faite. » Le juge avait laissé démasquer un bref sourire, que j’avais interprété comme : « Oui, désormais c’est à nous de nous en occuper » ; et il avait prononcé le mot : « Boccace ». Je savais qu’il appréciait beaucoup le Décaméron, texte qui, alors, était en libre circulation jusqu’à ce que Paul IV introduisît l’Index des Livres Interdits, mais je ne connaissais pas encore cette œuvre et je n’avais pas compris ce que le juge avait sous-entendu, ni n’avais osé en demander l’explication, pour ne pas paraître inculte. Ma préférence allait aux œuvres austères et, surtout, à l’Enfer de Dante qui m’apparaissait presque comme le symbole de mon œuvre héroïque contre le malin et ceux qui s’étaient égarés dans sa « forêt sauvage ».

    Elvira avait été capturée et emprisonnée selon la pratique. Le chef des gendarmes, flanqué de deux gardes armés et d’un inquisiteur dominicain, avait frappé à sa porte. A peine ouverte, ils l’avaient bâillonnée sans même lui laisser le temps de parler, puis ligotée et conduite à Rome et là, elle fut emprisonnée et mise au pain et à l’eau dans une cellule de l’Inquisition, en attendant d’être jugée. Une fois la condamnation religieuse prononcée, elle nous avait été livrée pour être soumise au procès séculier, où étaient présents, outre Rinaldi et moi-même, l’inquisiteur et les deux témoins, Brunacci et le curé, que nous avions déjà interrogés. L’inculpée ne pouvait pas nous voir, par contre nous étions à même de la voir et lui parler par des ouvertures prévues. L’inculpée avait déjà été ligotée, nue, et de telle sorte à pouvoir atteindre, après quelques torsions, chaque partie de son corps. Sitôt qu’elle eût entendu ma voix et avant même que je la menaçai de la torturer, Elvira avait tout avoué. Je n’en fus pas surpris, nous savions qu’elle avait fait pareil face à l’Inquisition. Elle m’avait dit que c’était désormais depuis ses quatorze ans qu’elle était sorcière et, répondant à

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