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Universités et pouvoir politique en Turquie .pdf

Cet article questionne les effets de l’autoritarisme du régime présidentiel de M. Erdogan sur les universités turques, la répression sur des enseignants, la disparition des conditions de libertés de penser et de transmettre indispensables au fonctionnement de l’enseignement supérieur. Il interroge également l’influence cruciale des savants juifs allemands qui, contraints de quitter leur établissement lors de la montée du nazisme sont venus enseigner à Istanbul et Ankara et contribué de manière décisive à la fondation de l’Université en Turquie University and Political Power in Turkey This article deals with the intensification of repression and the disappearance of freedom of speech, human rights in Turkish universities within Mr. Recep Tayyip Erdogan’s era. It also deals with the early structure of university in this country and the influence of German Jewish scholars during the 1930es and the foundation of the Turkish University

@ universit￉@et@pouvoir@politique@en@turquie nッイ。@s・ョゥ l。@d←」ッオカ・イエ・@シ@ᆱ@h←イッ、ッエ・@ᄏ@ aイエゥ」ャ・@、ゥウーッョゥ「ャ・@・ョ@ャゥァョ・@¢@ャG。、イ・ウウ・@Z MMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM ィエエーウZOOキキキN」。ゥイョNゥョヲッOイ・カオ・Mィ・イッ、ッエ・MRPQXMQMー。ァ・MWYNィエュ MMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) pッオイ@」ゥエ・イ@」・エ@。イエゥ」ャ・@Z MMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM nッイ。@s・ョゥL@ᆱ@uョゥカ・イウゥエ←@・エ@ーッオカッゥイ@ーッャゥエゥアオ・@・ョ@tオイアオゥ・@@ᄏL@h←イッ、ッエ・@RPQXOQ@Hnᄚ QVXIL@ーN@WYMXYN MMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMMM @ dゥウエイゥ「オエゥッョ@←ャ・」エイッョゥアオ・@c。ゥイョNゥョヲッ@ーッオイ@l。@d←」ッオカ・イエ・N ᄅ@l。@d←」ッオカ・イエ・N@tッオウ@、イッゥエウ@イ←ウ・イカ←ウ@ーッオイ@エッオウ@ー。ケウN l。@イ・ーイッ、オ」エゥッョ@ッオ@イ・ーイ←ウ・ョエ。エゥッョ@、・@」・エ@。イエゥ」ャ・L@ョッエ。ュュ・ョエ@ー。イ@ーィッエッ」ッーゥ・L@ョG・ウエ@。オエッイゥウ←・@アオ・@、。ョウ@ャ・ウ ャゥュゥエ・ウ@、・ウ@」ッョ、ゥエゥッョウ@ァ←ョ←イ。ャ・ウ@、Gオエゥャゥウ。エゥッョ@、オ@ウゥエ・@ッオL@ャ・@」。ウ@←」ィ←。ョエL@、・ウ@」ッョ、ゥエゥッョウ@ァ←ョ←イ。ャ・ウ@、・@ャ。 ャゥ」・ョ」・@ウッオウ」イゥエ・@ー。イ@カッエイ・@←エ。「ャゥウウ・ュ・ョエN@tッオエ・@。オエイ・@イ・ーイッ、オ」エゥッョ@ッオ@イ・ーイ←ウ・ョエ。エゥッョL@・ョ@エッオエ@ッオ@ー。イエゥ・L ウッオウ@アオ・ャアオ・@ヲッイュ・@・エ@、・@アオ・ャアオ・@ュ。ョゥ│イ・@アオ・@」・@ウッゥエL@・ウエ@ゥョエ・イ、ゥエ・@ウ。オヲ@。」」ッイ、@ーイ←。ャ。「ャ・@・エ@←」イゥエ@、・ ャG←、ゥエ・オイL@・ョ@、・ィッイウ@、・ウ@」。ウ@ーイ←カオウ@ー。イ@ャ。@ャ←ァゥウャ。エゥッョ@・ョ@カゥァオ・オイ@・ョ@fイ。ョ」・N@iャ@・ウエ@ーイ←」ゥウ←@アオ・@ウッョ@ウエッ」ォ。ァ・ 、。ョウ@オョ・@「。ウ・@、・@、ッョョ←・ウ@・ウエ@←ァ。ャ・ュ・ョエ@ゥョエ・イ、ゥエN Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte RPQXOQ@nᄚ@QVX@シ@ー。ァ・ウ@WY@¢@XY @ issn@PSSXMTXWx isbn@YWXRWPWQYXXYQ Nora Seni 1 En tant que représentant du gouvernement et avec la plus grande sincérité, je crois de tout cœur que les universités doivent être le nid de la raison critique et de la pensée libre. Personne n’a le droit de se sentir gêné dans un milieu où les idées peuvent être exprimées démocratiquement, de façon mesurée et respectable. Il faut que les idées les plus contradictoires puissent trouver leur place et être discutées librement dans toutes nos universités. Je ne dis pas cela seulement pour nos étudiants. Nos enseignants doivent pouvoir exprimer leurs façons de voir sans crainte ni angoisse. La critique, l’étude, la recherche, le questionnement, l’analyse sont les fondements de la liberté. Et la liberté est la condition première du développement de la pensée. [...] Nous sommes devant le devoir de former des générations aux idées libres, à la conscience libre, à la croyance libre. Nous sommes obligés d’y réussir. Tant que nous considérons nos différences comme une richesse nous serons capables d’accroître notre dynamisme, et mettre en mouvement notre potentiel. Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte L’insoutenable légèreté des engagements politiques Qui peut être l’auteur de ces propos dignes d’un dirigeant des plus éclairés, des plus respectueux des droits et des libertés et animé d’une vision très contemporaine de l’enseignement supérieur ? Un ministre de l’Éducation danois ? Un recteur d’université français ? Ce sont les mots de Recep Tayyip Erdogan, l’actuel président de Turquie, prononcés lors de son discours d’inauguration de l’année universitaire 2008-2009 à l’Université technique d’Istanbul (ITU). L’élargissement des libertés pour laquelle il plaide est un préalable à l’un de ses arguments électoraux : faire accepter au Conseil constitutionnel le droit pour les femmes de porter le foulard (türban) à l’université. Ses alliés dans ce combat sont une partie des 1. Professeure à l’Institut français de géopolitique, université Paris-8. 79 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Université et pouvoir politique en Turquie 2. Intervention au colloque Recompositions politique en Turquie, 5 décembre 2017, Institut français de géopolitique, université Paris-8. 3. Plus de 1 000 établissements scolaires privés ont été fermés au même motif et leurs 24 000 employés mis au chômage. 80 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte libéraux, des intellectuels et des journalistes à l’avant-garde de la gauche. Si son discours a tout pour plaire à ces couches de la société, il n’en va pas de même pour le système judiciaire. En effet, l’été de la même année, son parti échappait de justesse à une procédure de fermeture pour non-constitutionnalité. C’est à partir de cette date que le processus nommé « coup d’État au ralenti » (slow motion coup) par le journaliste Yavuz Baydar 2 commence son travail de déconstruction des institutions étatiques, qui se prolonge jusqu’à aujourd’hui. Ces efforts pour rallier les intellectuels de gauche seront d’ailleurs récompensés car une bonne partie de ces lettrés s’exprimera favorablement lors du référendum de 2010, autorisant le changement de Constitution dont le premier effet sera de soumettre le pouvoir judiciaire à l’exécutif. En janvier 2016, c’est ce même personnage devenu président de la République et dont le parti (AKP) dirige les destinées de la Turquie depuis 2002 qui instaure une répression sévère et durable des « universitaires pour la paix ». Ceux-ci venaient de signer une pétition demandant l’arrêt des violences d’État dans le Sud-Est anatolien. Erdogan éructa contre les pétitionnaires : « Nous faisons face à la traîtrise de pseudo-intellectuels payés pour la plupart par l’État. Eh, vous, brouillons d’intellectuels ! Vous êtes obscurs et ignorants. » Cette accusation de traîtrise à la nation peut transformer en Turquie n’importe quel honnête homme en paria. Une fois lancée, elle fonctionne comme une autorisation, sinon de tuer, de librement persécuter jusqu’à ce que mort civile s’ensuive. Un chef mafieux connu pour ses accointances avec le gouvernement mettra immédiatement à profit cette vulnérabilité, affichant son zèle à servir le président et déclarant en direction des signataires : « Nous ferons couler à flots votre sang et nous nous doucherons avec [sic]. » Affichant le slogan « Nous ne serons pas complices de ces crimes », la pétition diffusée au début du mois de janvier 2016 et immédiatement criminalisée par le chef de l’État rassemblait 1 128 signatures d’enseignants dont quelque 300 universitaires étrangers. À ces premiers signataires s’adjoint par la suite un nouveau millier. Tous demandent à l’État turc de ramener le dialogue pour que cessent les combats opposant les forces armées de l’État turc et les combattants du PKK, suite à leur tentative ratée de déclenchement d’une guérilla urbaine dans les villes à majorité kurde. Parmi toutes les oppositions qui se seront exprimées en Turquie depuis janvier 2016 et à l’exception des 34 000 agents de l’État soupçonnés de liens avec Gülen 3 expulsés de la fonction publique, c’est sur ces pétitionnaires que continue de se focaliser la passion vindicative de R. T. Erdogan. Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. HÉRODOTE Que s’est-il passé, au cours des huit années séparant ces deux déclarations, qui permet de comprendre les changements de ton et de politique vis-à-vis des professeurs de l’enseignement supérieur ? Un observateur attentif de la vie politique en Turquie peut constater que cette transformation s’accompagne d’assauts incessants des gouvernements AKP successifs contre la « raison » comme fondement de la pensée scientifique, au profit des croyances et contre les libertés publiques. Ici s’impose un retour sur l’histoire tumultueuse de l’université en Turquie. Fondation : zoom sur l’influence allemande Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Historiographie des universités en République turque. Une périodisation faite de ruptures violentes Selon les historiens turcs, le vocable « université » est prononcé pour la première fois en Turquie en 1933, lors du réaménagement administratif et scientifique de l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur existant alors, les Darülfünun, littéralement « maisons des sciences ». Ils rangent l’institution née de ce réaménagement parmi les universités de type humboldtien [Tekeli, 2003]. Ainsi les opposent-ils aux établissements français voulus par Napoléon à partir de 1806 et dédiés à la formation des élites. Ils mettent en avant les missions de « production de savoirs scientifiques et d’enseignement gratuit et universel » [Arap, 2010, p. 5] de l’université de masse, conception qu’ils attribuent au fondateur de l’université allemande, Wilhelm von Humboldt. Cette refondation correspond bien entendu au projet de la jeune République de Turquie de s’ériger, sur les ruines de l’Empire ottoman, en nation contemporaine du monde occidental. Les vocables de « faculté », de « recteur » font leur entrée dans le lexique de l’enseignement supérieur à ce moment-là. Cette transformation advient à la suite d’un rapport commandé en 1932 par le gouvernement turc à un pédagogue genevois, Albert Malche, sur l’état du Darülfünun d’Istanbul. Le rapport sévère de Malche préconisait un remaniement complet de l’Université arguant de publications insuffisantes, d’une formation médiocre en langues étrangères, et d’une formation scientifique inadaptée. Dans son agenda de réforme Malche envisageait une Université cosmopolite avec des professeurs venus de « Berlin, Leipzig, Paris ou Chicago ». [...] Chargé de mission de recrutement d’ensemble, il reçut une réponse favorable essentiellement de la part de professeurs allemands ou germanophones [Apter, 2006, p. 40]. Ainsi s’installent à Istanbul et Ankara plus d’une centaine de professeurs allemands, principalement des Juifs pour lesquels l’université de leur pays est 81 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte UNIVERSITÉ ET POUVOIR POLITIQUE EN TURQUIE 82 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte devenue inhospitalière. Ils contribuent à fonder l’Université de Turquie. Hans Reichenbach, éminent spécialiste de la philosophie de l’esprit, arrive à Istanbul dès 1933. Gerhard Kessler installe l’enseignement de l’économie avec Franz Neumark à l’université d’Istanbul et Paul Hindemith fonde le conservatoire d’État à Ankara entre 1935 et 1937 avec Carl Ebert. Ils y attireront Béla Bartók qui les rejoindra en 1936. Le philosophe Ernst von Aster, l’orientaliste Clemens Bosch, les juristes Andreas Schwartz et Ernst Hirsch, le pédagogue Wilhelm Peters, le géologue Wilhelm Salomon-Calvi, le botaniste Hans Bremer viennent enseigner et fonder les départements correspondant à leur discipline dans ces circonstances. Les victimes allemandes du nazisme à qui on avait confisqué les emplois en Allemagne et en Autriche satisfont la politique de la jeune République turque pressée de s’occidentaliser en « réformant » l’Université (parfois aux dépens de ceux qui étaient déjà en poste). Ils sont constitutifs de l’ADN de l’Université turque. La diffusion de leurs savoirs et de leurs méthodes scientifiques et pédagogiques structure de façon pérenne les fondements de l’enseignement supérieur en Turquie. C’est à Leo Spitzer, styliste, philologue et théoricien de la littérature, installé à Istanbul entre 1933 et 1936, que l’on doit la création de l’actuel département de langue et littérature françaises de la faculté de lettres de l’université d’Istanbul. À l’instigation de Spitzer, Erich Auerbach, son collègue à l’université de Marburg, licencié de son poste en 1935, le rejoint à Istanbul en 1936. Il y reste jusqu’en 1947. C’est lors de son séjour à Istanbul qu’il écrira Mimesis et Introduction à la philologie romane, ouvrages majeurs, propagateurs d’un humanisme critique. Spitzer et Auerbach fondent, durant leur séjour à Istanbul, la littérature comparée en tant que discipline. Tout en percevant et expérimentant leur condition stambouliote de façons très différentes, les deux philologues convergent dans l’élaboration d’une méthode qui permet d’inclure des travaux de ces langues non européennes dans la comparaison littéraire. En quoi l’exil et Istanbul ont-ils été des conditions de cette ouverture méthodologique ? « Malheureusement il n’y avait presque pas de livres », écrit Leo Spitzer dans sa correspondance en évoquant les conditions de travail lors de son séjour à Istanbul. Auerbach éprouve aussi le « manque de bibliothèque raisonnable ». Tous deux perçoivent la ville un peu comme un désert en ressources intellectuelles. Auerbach confesse pourtant l’avantage qu’il a tiré de l’absence de bibliothèque spécialisée : « Si j’avais pu essayer de m’informer sur tout ce qui a été écrit sur tant de sujets, je n’aurais peut-être pas pu écrire » [Konuk, 2014, p. 94]. De cette phrase naît un débat sur le rôle de l’exil, de l’éloignement des références connues, de la « distance critique » comme éléments favorables à l’élargissement de la littérature comparée vers des langues non européennes. On doit ce débat principalement à Edward Said qui a montré dans des articles au fort retentissement la relation entre l’exil et la pratique de la critique littéraire. Il suggère que Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. HÉRODOTE Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Mimesis d’Auerbach « doit précisément sa réalisation aux circonstances de l’exil oriental, non occidental, et à la perte de la patrie qu’il impliquait » [Konuk, 2014, p. 94]. Quant à Spitzer, il apprend le turc bien que son séjour ne dure que trois ans. Il se sert de cet apprentissage pour y expérimenter ses méthodes comparatistes et publier un texte, « Apprendre le turc » (« Türkçeyi ögrenirken »), dans le périodique Varlik. La plainte qu’ils expriment tous deux quant aux ressources limitées en bibliothèques et en échanges avec leurs collègues européens lettrés suscite donc un double débat : contester la représentation d’Istanbul en « désert intellectuel » sert d’occasion à énumérer et révéler les ressources non négligeables de la ville, autant en matière de bibliothèques 4 [Konuk, 2014] que du point de vue de l’environnement européen et lettré. Une communauté artistique, intellectuelle et politique était établie à Istanbul lorsque ces érudits s’y sont installés. Le mythologue Georges Dumézil y travaillait depuis 1925 pour préparer la politique d’alphabétisation voulue par Atatürk et mise en route en 1928. Gerhard Kessler, socialiste allemand en exil, aidait à la fondation du syndicat turc des travailleurs et Léon Trotski y avait trouvé refuge entre 1931 et 1933. Cet afflux se prolongera jusqu’après la Seconde Guerre mondiale. James Baldwin et les linguistes structuralistes Émile Benveniste et Algirdas Julien Greimas ont aussi travaillé à Istanbul dans les années 1950. Selon Emily Apter, professeure de littérature comparée à Princeton, Michel de Certeau et Louis Marin dirent avoir inventé la sémiotique lorsqu’ils se retrouvèrent à Istanbul dans ces mêmes années. Apter qualifie la ville de « véritable aimant pour la diaspora, la migration et la fusion culturelle » [Apter, 2006, p. 39]. Elle explique la popularité d’Istanbul par le fait que, pour bien des Autrichiens et des Allemands, cette ville, c’était l’Europe même. Ainsi se trouvera contredite l’idée qu’un ouvrage tel que Mimesis ait pu naître des seuls savoirs engrangés par Auerbach, telle Minerve de la tête de Jupiter : C’est la rencontre instable de la politique turque de la langue et de l’humanisme philologique européen qui a produit les conditions de l’invention de la littérature comparée comme discipline globale, au moins à ses débuts [Apter, 2006]. 4. Auerbach a pu utiliser les ressources de la bibliothèque des dominicains de l’église SaintPierre-et-Paul de Galata où il a trouvé une patrologie latine complète, c’est-à-dire mille ans d’œuvres théologiques, historiques et littéraires. Autrement, Kader Konuk [2016] énumère les ressources insoupçonnées d’Istanbul dont celles de l’historien de la littérature Mehmet Fuat Köprülü qui a rassemblé 16 000 volumes concernant l’étude de la langue, de la littérature et de l’histoire turques. La première année de la réforme universitaire laïque, 20 000 ouvrages furent achetés pour la bibliothèque universitaire qui possédait ainsi 132 000 livres. À cela s’ajoutent les musées de la ville qui abritent des pièces des époques grecque, romaine et byzantine. 83 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte UNIVERSITÉ ET POUVOIR POLITIQUE EN TURQUIE un exemple de translatio globale encore pertinent dans la mesure où il a dessiné les départements de littérature comparée de l’après-guerre. [...] la littérature comparée garde encore trace aujourd’hui de cette ville où elle a trouvé ses formes disciplinaires – une ville où les frontières Est-Ouest étaient culturellement floues [Apter, 2006, p. 45]. Spitzer a pu forger un paradigme universel d’études, les translatio studii, en s’émancipant des dichotomies Est-Ouest, en découvrant le turc, en apprenant à aimer une langue non romane et en organisant un séminaire dans lequel le turc prend toute sa place aux côtés des langues européennes. Bien que la conception allemande de la structure universitaire, des méthodes de la production et de la transmission des savoirs ait été dominante pendant plusieurs décennies et reste encore perceptible de nos jours, la trace spécifique de ces savants allemands est insuffisamment répertoriée et faiblement inscrite dans leur singularité au sein de l’historiographie de l’Université en Turquie. On évoque cet épisode non comme un moment fondateur de l’enseignement supérieur mais pour satisfaire à la politique mémorielle officielle qui communique sur une Turquie qui a sauvé les Juifs européens du nazisme pendant la Seconde Guerre mondiale. Présenter cet afflux de savants juifs allemands venus à Istanbul et Ankara, avant même la déclaration du conflit, pour travailler à la fondation d’une université comme un geste de sauvetage sert à mettre en scène des vertus d’hospitalité et de pluralisme 84 Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Spitzer enseignait plusieurs langues à la fois à des amphithéâtres de centaines d’étudiants à l’aide de traducteurs. Quant à son séminaire qui réunissait, souvent chez lui, un peu plus d’une dizaine d’étudiants très assidus, il a servi de laboratoire pour l’élaboration d’un cursus d’études littéraires et philologiques appliquées aux langues et aux cultures non européennes. Son jeune assistant turc Sabahattin Eyüboğlu qui faisait partie du comité de rédaction de la revue Varlik a joué un rôle crucial en adaptant les méthodes de Spitzer à l’analyse des contes, des récits et des poèmes en langue vernaculaire turque. Eyüboğlu s’affirme comme une figure majeure de la littérature postérieure à la Seconde Guerre mondiale en Turquie. Dans le cadre de ce séminaire cosmopolite, auquel participaient les collaboratrices de Spitzer Rosemarie Burkart et Eva Buck, sont formés les éminents philologues turcs de la génération suivante. Assidue à ce séminaire, Azra Erhat se spécialise dans la méthodologie et dans l’art du langage, et consacre sa carrière à la traduction des classiques grecs et latins pour le projet, financé par l’État, d’une bibliothèque moderne. Cette bibliothèque devait servir à établir des fondations culturelles non islamiques et anti-ottomanes sur lesquelles le nationalisme laïc allait pouvoir être construit. Suheyla Sabri et, bien entendu, Sabahattin Eyüboğlu développent une prédilection pour la linguistique et la morphologie générique. Ce séminaire offre, toujours selon Emily Apter, Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte HÉRODOTE Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte qui contredisent la capacité de la Turquie à commettre un génocide. Se servir de cette tolérance intéressée pour écarter l’accusation du génocide des Arméniens est une stratégie officielle que la Turquie a mise en place à partir des années 1990. Un autre élément contribue à la minimisation relative de cet épisode fondateur : la rapidité et sans doute la brutalité avec lesquelles ces réformes voulues par Atatürk se sont imposées. Avec l’adoption de l’alphabet latin par exemple, toute une fraction de la société instruite avec les lettres arabes se retrouva, du jour au lendemain, en situation d’illettrisme. Les universitaires allemands ont participé, parfois malgré eux, à l’occidentalisation à marche forcée non seulement de l’enseignement mais de la société entière. Certains ont même qualifié les conséquences de ce transfert massif des références européennes, notamment dans la philologie et la littérature, comme une autocolonisation. Turquie, la nouvelle Grèce ? Ainsi, ce sont bien les principes européens de l’enseignement supérieur qui sont inscrits dans le logiciel fondateur de l’Université turque avec, outre l’influence allemande et jusqu’aux années 1950, une forte influence linguistique de la France. En effet c’est vers la France qu’était orientée l’aspiration moderniste de l’Empire ottoman tout au long du XIXe siècle. Le lycée public francophone Galatasaray, ex-École impériale (Mekteb-i Sultanî) est créé en 1868 pour former les cadres de l’État aptes à mettre en œuvre le train des réformes des Tanzimat. Formant des générations d’élites occidentalisées au service de l’État, le rôle du lycée Galatasaray et l’influence linguistique majeure du français, renforcés par la création d’écoles françaises privées par des congrégations (Saint-Joseph, Saint-Benoît, Notre-Dame de Sion et d’autres) survivent à la structuration des universités selon les conceptions allemandes. À partir des années 1950, l’inclination traditionnelle des élites turques vers les langues européennes, français ou allemand, pour l’éducation le cédera à l’attractivité des États-Unis, renforcée par le choix des gouvernements turcs de l’après-Seconde Guerre mondiale de se faire accompagner de conseillers américains dans leur politique de création d’universités nouvelles. Universités au gré des coups d’État militaires Dans un discours prononcé en 1937, un an avant sa mort, Atatürk distinguait trois régions culturelles en Turquie pour l’éducation supérieure, l’Occident, l’Orient et le Centre. Pour l’Occident il préconisait l’approfondissement des réformes initiées par l’université d’Istanbul et le renforcement de cette dernière. Pour le Centre, une université moderne devait être créée à Ankara. Et, pour l’Orient, il insistait pour qu’un programme de fondation d’écoles de tous degrés et d’une grande université moderne construite sur les plus belles rives du lac Van fût mis en œuvre sans tarder [Apter, 2010, p. 12]. Quatre universités fondées en Anatolie entre 1950 et 1960 témoignent de l’ambition de doter les régions 85 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte UNIVERSITÉ ET POUVOIR POLITIQUE EN TURQUIE 86 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte d’établissements d’enseignement supérieur. Mais il faut attendre 1982 pour voir la création d’une université à l’est, près de Van. La loi des universités de 1946, achevant la refondation de 1933, instaure l’autonomie des universités et les définit comme des « groupements d’unités d’enseignement supérieur et de recherche ». L’influence des États-Unis se traduit par la création d’universités « entreprenantes » (girisimci) et leur corollaire, l’université de masse. Guidée par des conseillers venus de l’autre côté de l’Atlantique, la politique de l’enseignement supérieur privilégie désormais les créations d’universités régionales et leur gestion managériale. La doctrine de cette époque vise à limiter le rôle de l’État à l’attribution de ressources financières, à contrôler l’extension de la liberté d’expression et à la réprimer à l’occasion. L’histoire des universités en Turquie s’écrit à travers une périodisation que scandent les coups d’État et les inflexions qu’ils imposent aux universités [Apter, 2010]. Après le coup d’État de 1960 et le licenciement de cent cinquante enseignants, une nouvelle loi inscrit l’autonomie des universités dans la Constitution et assure l’indépendance administrative et scientifique des universités. Les libertés régresseront avec le coup d’État de 1971 qui impose de se tourner vers les « valeurs nationales ». À partir de cette date, priorité sera aussi donnée à la déconcentration des universités dans les grandes villes de l’Ouest vers les régions. Les dix universités nouvelles fondées entre 1973 et 1978 seront toutes bâties dans des villes de province. Le coup d’État de 1980 et la création un an plus tard du Haut Conseil des universités, le YÖK (Yükseköğretim Kurulu), instrument de contrôle des établissements d’enseignement supérieur par l’État, induiront une répression sans précédent dans l’Université turque. En comparaison avec ceux de 1960 et 1971, le coup d’État militaire de 1980 fut d’une très grande ampleur. En deux ans 650 000 personnes furent arrêtées, 250 900 inculpées, 50 exécutées, 30 000 exilées de force. Les changements les plus profonds imposés par les militaires ciblèrent l’Université. L’état de siège en vigueur jusqu’en 1983 permit que fussent chassés de leurs postes quelque 4 000 enseignants dont 1 100 universitaires, principalement de gauche, exclus grâce aux pouvoirs du YÖK. La répression que fait subir Erdogan aux universitaires d’aujourd’hui surprend d’autant moins qu’elle rappelle ces précédents. Ici une parenthèse s’impose : ce passé traumatisant explique-t-il qu’on a parfois l’impression que les élites attendent qu’échoue tout seul le « coup d’État au ralenti » qu’exécute le pouvoir actuel ? Les classes moyennes laïques semblent quelque peu tétanisées par l’évolution politique. Ce que tous semblent négliger c’est qu’à la différence des autres coups d’État celui d’Erdogan est civil, se déroule dans la durée et est en train de changer les fondements mêmes de la culture et de l’État, notamment en érodant le principe de laïcité. La Turquie pourrait être méconnaissable dans une dizaine d’années lorsque les diplômés des écoles d’imam et de prédicateur (imam hatip) seront encore plus nombreux à contester Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. HÉRODOTE UNIVERSITÉ ET POUVOIR POLITIQUE EN TURQUIE Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. Divorce tardif entre Erdogan et les intellectuels laïcs En 2008, au moment où Erdogan présente sa conception de l’université idéale, les effets de la politique dite de « zéro problèmes avec les voisins » visant à reconquérir l’influence – principalement économique – ottomane dans le monde arabomusulman ne sont pas encore perceptibles. Le président français Nicolas Sarkozy et la chancelière Angela Merkel viennent seulement de tester les éléments de langage qu’ils prononcent en synchronie pendant la durée de leur mandat, signifiant leur opposition véhémente et brouillonne à l’intégration de la Turquie dans l’UE. L’opération « Plomb durci » de Tsahal sur Gaza (fin décembre 2008) n’a pas encore eu lieu, Erdogan n’est pas encore l’héroïque défenseur du monde arabe contre Israël et on est encore loin de la crise syrienne. C’est la brutalité avec laquelle le mouvement Gezi sera réprimé en 2013, mais surtout la flambée de violence de l’été et de l’automne 2015 qui rompent, tardivement mais définitivement, l’illusoire entente entre les intellectuels et Erdogan. La pétition des universitaires pour la paix est diffusée le 11 janvier 2016 pour s’opposer aux violences d’État dans les villes à majorité kurde (Şirnak, Cizre, Diyarbakır) et faire cesser privations et cruautés envers les civils. Le harcèlement des 1 128 pétitionnaires continue de s’intensifier tandis que cet article est en cours de rédaction, et que se sont ouverts, le 5 décembre 2017, les procès en assises qui leur sont intentés. À ce jour, 467 signataires ont été contraints de quitter l’Université, dont 380 par un décret-loi qui les laisse sans possibilité de travail ou d’exil à l’étranger. Des 505 universitaires qui n’ont pas été exclus, 112 sont en instance d’expulsion et 108 sont suspendus. Les persécutions des signataires arrivent par vagues successives. Pendant la première de ces vagues, des présidents d’université zélés ont immédiatement licencié leurs signataires ou les ont mis en examen administratif. Dans un deuxième temps, au printemps 2016, les mises en examen administratives se sont judiciarisées et à partir de la tentative ratée de coup d’État de juillet 2016 et de l’instauration de l’état d’urgence, les signataires, même ceux qui étaient déjà licenciés ou démissionnaires, ont été exclus à vie de la fonction publique, leur passeport invalidé et leurs droits sociaux (retraite, chômage, etc.) suspendus. Ils furent ainsi condamnés à une « mort civile ». Les revues scientifiques subventionnées par 87 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte la culture de ceux issus des écoles laïques. En 2015 leur nombre approchait le million. « En 2016-2017 on comptait environ 1,4 million d’élèves, soit près d’un huitième des effectifs totaux, inscrits dans 4 100 établissements imam hatip » [Cheviron, 2017]. Avec les modifications apportées au système du secondaire après le coup d’État raté de 2016, leur augmentation devrait être exponentielle. 5. Le Parisien, 21 octobre 2016. 88 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte l’État ont reçu l’ordre de se séparer de leurs membres « signataires » siégeant dans les comités de rédaction et de ne pas publier leurs articles. Une précision s’impose : ces « représailles » de l’État n’ont pas touché toutes les universités de la même façon. Elles ont épargné les établissements les plus prestigieux, d’Istanbul, Ankara ou Izmir, qui disposent de réseaux internationaux. Les présidents de ces universités ont « résisté » à la pression de mettre en examen leurs signataires. Ce fut le cas de l’université Mimar Sinan, de l’université du Bosphore et de l’université francophone de Galatasaray. Mais des défaillances sont vite apparues dans ces positions pour finalement laisser s’imposer la volonté, cette fois juridique, de l’État. Les signataires sont depuis fin 2017 accusés de propagande de terrorisme et risquent à ce titre entre un an et demi et sept ans de prison. Il est à noter que les premières comparutions concernent les enseignants (26) de l’université francophone Galatasaray et ceux de l’université d’Istanbul, la plus grande de cette mégapole. L’université de Galatasaray, navire amiral de la coopération académique franco-turque depuis sa fondation en 1992, est soutenue par un consortium d’universités françaises. Celles-ci ont reconduit leurs engagements et leur confiance à cet établissement à l’été 2017. Elles l’ont fait comme si de rien n’était, sachant pertinemment que désormais plus aucun établissement du supérieur n’est en position de jouir des libertés indispensables à la conduite de leur mission – produire et transmettre des savoirs – en Turquie. Le CNRS turc, le Tübitak, répercute depuis 2012 la remise en cause des théories de l’évolution par son ministère de tutelle, remise en cause actée en 2017 par la suppression de l’enseignement de ces théories dans le secondaire. « La Turquie serait ainsi, selon l’opposition, le deuxième pays au monde avec l’Arabie saoudite à éradiquer les thèses évolutionnistes de ses manuels scolaires » [Cheviron, 2017]. La décision en octobre 2016 de donner au président Erdogan le pouvoir de nommer les recteurs d’université jusqu’alors élus par leurs pairs, l’épisode du remplacement de la rectrice élue triomphalement à la tête de la prestigieuse université du Bosphore par le frère d’un député AKP qui n’avait pas même posé sa candidature lors de l’élection 5, la démission exigée de 1 577 doyens d’université, cet ensemble de nouveaux paramètres de l’enseignement supérieur ne témoigne-t-il pas du fait que, dorénavant, plus rien ne garantit les conditions d’autonomie, de liberté, et partant de compétences qui sont au fondement des pratiques universitaires ? S’il n’a été question ici que des pétitionnaires, c’est que ceux-ci n’ont bénéficié que de peu de soutien et d’engagement à leurs côtés de la part de leurs collègues non signataires. Quant à la France, elle s’est exprimée pour la première fois par la voix de son ambassadeur, Charles Fries, qui a assisté à la comparution des Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. HÉRODOTE UNIVERSITÉ ET POUVOIR POLITIQUE EN TURQUIE enseignants de Galatasaray le 5 décembre 2017, au palais de justice d’Istanbul. Il a déclaré à Mediapart : Bibliographie APTER E. (2006), « Translatio globale. L’invention de la littérature comparée, Istanbul 1933 », Littérature, no 144, p. 25-55. A RAP S. K. (2010), « Türkiye Yeni üniversitelere Kavusurken : Türkiye’de Yeni Üniversiteler ve Kurulus Geerekçeleri », Revue de la Faculté des sciences politiques de l’université d’Ankara, p. 1-29. CHEVIRON N. (2017), « Le système scolaire turc à l’épreuve d’une révolution conservatrice », Mediapart, 31 octobre. KONUK K. (2014), « Erich Auerbach à Istanbul. L’exil comme distance critique », Revue germanique internationale, no 19, p. 93-102. TEKELI I. (2003), « Dunya’da ve Türkiye’de Üniversite üzerine konsumanin Degisik Yollari », Toplum Bilim Dergisi, no 97, p. 123-143. Hérodote, n° 168, La Découverte, 1er trimestre 2018. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte La faiblesse des réactions à la répression dans les universités turques suscitées auprès des instances de l’UE semble exprimer que la Turquie est considérée une fois pour toutes comme incontournable par l’Europe et que son président ne sera guère contesté. On peut constater – et déplorer – que la priorité attribuée à la collaboration avec la Turquie pour la maîtrise des flux de réfugiés, la lutte contre le terrorisme et à la coopération économique a impliqué jusqu’à présent l’abandon à leur sort des intellectuels turcs, des universitaires et des journalistes opposants. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - seni nora - 78.192.1.62 - 14/06/2018 19h02. © La Découverte Je suis présent ici pour rappeler l’importance de la liberté académique, mais aussi pour marquer notre soutien au projet de Galatasaray. Ma présence ici sert à témoigner le soutien de la France à l’université et à ses enseignants.