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Phares du Languedoc-Roussillon, éclairer la mer, signaler la terre.

Des feux allumés dans des fortifications ou sur les plages ont longtemps été l’unique secours des navigateurs. En 1825, un vaste programme pour l’éclairage du littoral français est lancé, facilité par l’invention de la lentille de Fresnel. Aujourd'hui, le devenir des phares, que l’aide électronique à la navigation a rendu moins utiles, est devenu un objet d'inquiétude qui justifie l'intérêt public pour leur protection, car ils ont une place majeure dans l’imaginaire collectif. Une campagne de protection nationale des phares a été lancée par le Ministère de la Culture et de la Communication. En Languedoc-Roussillon, sont protégés au titre des monuments historiques : le vieux phare et le phare de l’Espiguette au Grau-du-Roi (Gard), le phare du Mont Saint-Clair à Sète (Hérault), l’ancien phare Mont Saint-Loup, le feu du fort Brescou à Agde (Hérault), le feu du fort Fanal, le feu métallique du môle et le phare du Cap Béar à Port-Vendres (Pyrénées-Orientales). Parmi ces phares, seuls deux sont éteints. Le feu du môle Saint-Louis à Sète et le phare du Cap Leucate (Aude) bien que non protégés monuments historiques sont présentés ici en raison de leur intérêt patrimonial.

PA Ministère de la R Culture et de la Communication T IM O IN E pr oté gé Phares du Languedoc-Roussillon Eclairer la mer / signaler la terre monuments historiques et objets d’art du Languedoc-Roussillon D I R E C T I ON R É G I ON A L E D E S A F FA I R E S C U LT U R E L L E S Auteurs Yvon Comte [Y.C.] Chargé d’études documentaires principal CRMH, DRAC Languedoc-Roussillon Michèle François [M.F.] Chargée d’études documentaires CRMH, DRAC Languedoc-Roussillon Phares du Languedoc-Roussillon « Eclairer la mer / signaler la terre » Page précédente : Port-Vendres, phare du Cap Béar : spirale de l’escalier avec les murs recouverts d’opaline. « Le seul luxe permis dans un phare consiste dans la beauté des matériaux et la perfection de leur mise en œuvre. Tout vain décor doit être proscrit » Quinette de Rochemont directeur des Phares et Balises, 1905. PATRIMOINE protégé « Mais de mille regards ou perides ou vagues, Son œil mobile mêle aux éclairs de périls L’eau riante, et la danse inidèle des vagues. » Paul Valéry « La Naissance de Vénus », Album de vers anciens, 1933. Inscription igurant sur le socle du phare du môle Saint-Louis à Sète. L’inscription ou le classement au titre des monuments historiques coïncident trop souvent avec la désaffectation du bâtiment : la perte de sens (et d’utilité) provoque une déshérence que seuls l’intérêt pour l’art et l’histoire et la passion de citoyens, souvent organisés et militants, parviennent, in fine, à neutraliser. Ce mécanisme a été maintes fois vériié, qu’il s’agisse de bâtiments civils, religieux ou militaires. Les phares y font partiellement exception. Grande-Motte, créée par l’architecte et urbaniste Jean Balladur, le Cap d’Agde conçu par Jean Lecouteur ou Gruissan par Raymond Gleize et Pierre Hartané, sont de remarquables témoignages de l’art de construire au 20e siècle et, à ce titre, ont reçu du ministère de la culture le label « Patrimoine du XXe siècle ». La Grande-Motte a d’ailleurs fait l’objet d’un ouvrage de cette collection, dédiée à la mise en valeur du patrimoine languedocien. Originellement œuvre d’ingénieurs, la ceinture de phares des 5 700 km de côtes françaises a été décidée par l’Etat, pour compléter la quinzaine d’ouvrages des 17e et 18e siècle déjà construits, à la faveur d’une conjonction entre le progrès technique – notamment la mise au point par Augustin Fresnel (1788-1827) d’un système d’optique révolutionnaire ampliiant les signaux lumineux – et le développement du commerce maritime. Achevés à l’orée du siècle précédent, les phares de cette ceinture ont eu à subir, outre ceux du temps, les assauts de la dernière guerre qui ont entraîné d’importantes reconstructions. Mais, progressivement, le développement de l’automatisation et surtout les facilités offertes par la géo-localisation électronique ont fait perdre leur fonction première à ces ouvrages d’art. Pourtant, le caractère exceptionnel de ces constructions, dans des conditions souvent très dificiles, a, tôt, justiié les premières mesures d’une protection aujourd’hui étendue à près de 80 édiices. Ainsi, la patrimonialisation des phares n’est pas contradictoire avec leur maintien en activité, bien au contraire ; et, longtemps encore souhaitons-le, leur lumière révèlera tant le génie des hommes qu’elle permettra aux marins et aux amoureux de nos côtes d’y trouver une nécessaire stabilité alors que le paysage littoral a subi, depuis un demi-siècle, un bouleversement que tous s’efforcent aujourd’hui à maîtriser. En Languedoc-Roussillon, la mer a souvent été vécue comme une menace : celle des incursions sarrasines, mauresques puis, notamment, anglaises au 18e siècle. D’où la multiplication de fortiications relativement légères (excepté sur la côte rocheuse du Roussillon) qui n’ont laissé que peu de monuments importants. Ces forts et redoutes ont également fait l’objet de plusieurs campagnes de protection au titre des monuments historiques. La situation régionale est certes bien différente de la bretonne ! Il n’y a pas en Languedoc-Roussillon, de culture maritime vivace, à l’exception notable des ports de Sète et Port-Vendres. La tradition de la pêche hauturière n’y est en rien comparable aux autres littoraux et la navigation au long cours y est limitée, jusqu’à l’arrivée du traic commercial avec l’Afrique du Nord. Mais la présence de la mer a pourtant façonné de nombreux aspects de notre patrimoine, notamment immatériel, dont les regards croisés de l’ethnologue et de l’historien ont rendu compte (voir, dans la même collection, Du négafol à la barraca, le patrimoine maritime en Languedoc-Roussillon). Certes, le Languedoc-Roussillon est, aujourd’hui, le symbole du développement du tourisme de masse avec ses stations balnéaires arrachées à la lagune inhospitalière et aux étangs infestés par les moustiques par le volontarisme inancier et politique de la mission interministérielle d’aménagement touristique du littoral du Languedoc-Roussillon dite « Mission Racine ». Mais l’élan impulsé voici une cinquantaine d’années n’a pas pour autant négligé la qualité architecturale : plusieurs de ces stations « historiques », telle la 4 Phares du Languedoc-Roussillon - Préface Cette publication, qui complètera le grand ouvrage sur les phares protégés en cours de réalisation aux Editions du patrimoine, intervient au terme d’une campagne nationale de protection des phares au titre des monuments historiques, initiée conjointement par les ministères de la culture et de la communication d’une part, de l’écologie, du développement durable et de l’énergie d’autre part. Le patrimoine parfois négligé ou méconnu dont elle révèle la richesse est, à n’en pas douter, l’une des composantes de la riche identité du Languedoc-Roussillon. Alain Daguerre de Hureaux Directeur régional des affaires culturelles Préface - Phares du Languedoc-Roussillon 5 Le môle Saint-Louis à Sète avec le phare du 18e siècle dans son fortin « à Cette 12 juillet 1827 », dessin aquarellé par J.-M. Amelin (Médiathèque centrale d’agglomération Emile Zola, Montpellier). Phares de Méditerranée Le 9 septembre 1825, la Commission des Phares, conduite par le contre-amiral de Rossel (1765-1829), présente son rapport sur un « Système pour éclairer les côtes de France ». Ce travail ambitieux envisage la construction d’une cinquantaine de phares et d’une quarantaine de feux de port chargés de sécuriser les abords des rivages français. Chaque phare doit avoir une grande portée et posséder un code lumineux différent pour interagir avec son voisin. Ce programme fondateur reprend les différents plans de signalisation envisagés sous l’Ancien Régime et l’invention de l’ingénieur et physicien Augustin Fresnel (1788-1827) : les lentilles à échelon. Ces imposants appareils optiques concentrent les rayons lumineux pour augmenter leur puissance et leur portée. Il est maintenant possible de concevoir une ceinture lumineuse tout le long des 5 700 km des côtes françaises. Le projet semble a priori pharaonique, car il demande la construction d’une trentaine de tours de 20 à 50 m de hauteur, le réaménagement d’une dizaine d’enceintes existantes, la fabri- Page de titre du rapport de Rossel cation de près d’une centaine d’appareils optiques complexes. de 1825. Il sera pourtant réalisé en moins de trente ans. Il sert encore aujourd’hui de base à la signalisation maritime française. La plupart des bâtiments construits à cette époque est encore visible aujourd’hui sur nos côtes atlantiques ou méditerranéennes. Premiers phares Phare du Cap Béar, lentille de Fresnel. 6 Avant la Restauration, la France ne dispose que d’une signalisation maritime embryonnaire : une quinzaine de phares à peine s’échelonnent sur le littoral. Certains ont été érigés pour marquer les ports de la marine royale comme les Baleines (1682) et Chassiron (1685) en Charente ou Saint-Mathieu (1692) et le Stiff (1700) en Finistère. D’autres ont été construits pour servir au commerce marchand comme Cap Fréhel (1702) en Côtes-d’Armor, La Hève ou l’Ailly en Seine-Maritime (1775), Barleur en Manche (1775). Enin, Cordouan en Gironde (1611), « phare des rois », signale l’entrée de l’estuaire vers Bordeaux. Avant-propos - Phares du Languedoc-Roussillon 7 Lanterne du phare Saint-Loup d’Agde, papier imprimé et colorié. (Musée agathois Jules Baudou). En Méditerranée, on ne compte alors que celui de l’îlot Planier (Bouches-du-Rhône), au large de Marseille, reconstruit en 1771-1774. La tour de 15 m de hauteur et de 6 m de diamètre est érigée sur un platier rocheux aride, brûlé par le soleil et décapé par le mistral. Deux gardiens y vivent dans un inconfort total pendant un mois avant d’être relevés. Le phare a été équipé de 14 lampes à huile placées au foyer de rélecteurs en cuivre argenté. Le combustible est un mélange d’huile de colza et de spermacéti (blanc de baleine). A Port-Vendres (Pyrénées-Orientales), la redoute construite par Vauban a été modiiée pour abriter un fanal – une tour de 20 m de hauteur – abritant 11 lampions. Le feu porte à 4 lieues de distance (15 km). A Cette (Sète, Hérault), la tour carrée de 18 m, construite vers 1720 sur le môle principal, est équipée d’une lanterne contenant 24 lampions à huile. L’édiice se dresse pendant plus de 200 ans sur le port sétois avant d’être dynamité par les Allemands à la in de la Seconde Guerre mondiale. Quelques havres sont repérés par de simples feux d’entrée : Martigues avec celui du fort de Bouc, Villefranche (Alpes-Maritimes) et la Ciotat (Bouches-du-Rhône) avec un signal sur le môle. en moyenne. Trois types de signaux distincts y sont installés : Phare du Mont Saint-Loup : façade des feux ixes et tournants de huit ou seize lentilles qui présen- ouest avec son enceinte à meurtent des éclats différents plus ou moins rapides. Ils sont distri- trières. bués de telle manière qu’il y ait toujours un feu ixe placé entre un feu tournant pour éviter toute méprise. Le phare devient alors un élément de repérage et d’orientation pour les marins qui peuvent déinir approximativement où ils se trouvent en fonction de la nature du signal lumineux. Premiers chantiers La signalisation maritime est, depuis 1792, une mission régalienne de l’Etat qui en est promoteur et garant. En tant que symbole politique de l’égalité de tous, le programme de la Commission des Phares prend alors la forme d’une chaîne lumineuse, matérielle, organisée et hiérarchisée, répartie uniformément sur tout le littoral. C’est ici la carte ou la géographie des côtes qui déinit l’emplacement des grands phares (leur espacement, leur puissance, leur position, leur hauteur) et non l’histoire locale ou l’analyse des naufrages. En Méditerranée, les édiices sont établis toutes les seize à dix-huit lieues Le programme est rapidement mis en œuvre sur les côtes métropolitaines. Dans le Nord, le fanal de Dunkerque est le premier à être modiié en 1825. En Manche, la tour de Granville (1828) est construite sur les plans d’Augustin Fresnel. Le premier phare du Pilier s’allume en 1829. Pendant une vingtaine d’années, deux à six phares sont construits chaque année. La Méditerranée est aussi concernée : Le Planier et le Graudu-Roi s’allument dès 1829, le premier phare provisoire de Faraman en Camargue en 1830, le Cap Béarn et le Mont d’Agde en 1836, Porquerolles, le Titan, à Camarat, et la Garoupe en 1937. La Corse est équipée à partir de l’année 1844 avec les phares de Punta-Revellata, des Sanguinaires, de Pertusato et de la Chiappe puis la Giraglia en 1848. Les fanaux existants munis de rélecteurs de Port-Vendres et de Cette sont conservés. Différentes fortiications sont réutilisées comme le fort de Brescou qui reçoit une tourelle en 1836, celui de Port de Bouc en 1843. Plusieurs ports sont aménagés, comme La Ciotat, Marseille, Cassis. Entre 1825 et 1855, dix-neuf phares d’atterrissage (sur les soixante construits en France) et dixsept feux de port sont implantés en Méditerranée. Après 1855, la signalisation de proximité se concentre sur les ports de Corse, Antibes, Port-Vendres, Saint-Tropez ou le Frioul. 8 Avant-propos - Phares du Languedoc-Roussillon Un projet révolutionnaire Phares du Languedoc-Roussillon - Avant-propos 9 Types et modèles Les phares installés en Méditerranée possèdent les mêmes types architecturaux que ceux des côtes Atlantique ou de la mer du Nord. Il n’y a pas de particularismes locaux. Le phare de Faraman (1840) est ainsi le jumeau de ceux de Penmarc’h (1835) ou de l’Ile de Batz (1836) en Finistère. Le phare de Vallauris (1909) ressemble étrangement à celui de Roscoff (Finistère-1884). Les maisons-phares de Cap Cépet (1851), du Grand Ribeau (1851), de Cap Couronne (1867) rappellent les édiices de la Roque (Seine-Maritime,1838), de Ploumenac’h (Finistère-1860) ou des Poulains à Belle-Ile (Morbihan-1868). Les doublons sont nombreux. Les phares du Mont d’Agde (1836), de Camarat (1837), de Porquerolles (1837), du Titan (1837), de Punta-Revellata (1844), des Sanguinaires (1844), de Pertusato (1844) et de la Chiappa (1845) sont tous conçus sur un soubassement carré surmonté d’une tour également carrée. La standardisation des architectures permet une meilleure maîtrise des dépenses. Il existe pourtant quelques exceptions notables : - le phare de Cap Ferrat-Villefranche semble directement inspiré des « palazzi » italiens. Il faut dire qu’il a été construit Phare de la Giraglia, à côté de la par les ingénieurs de Piémont-Sardaigne, vers 1828, alors que tour génoise, à la pointe du Cap la ville était encore rattachée au royaume. Le logement sur Corse. deux niveaux, avec entrée monumentale, est toujours entouré de vastes jardins en terrasses plantés d’essences méditerranéennes rares. - le phare du Grau-du-Roi, construit en 1829, semble lui aussi s’inspirer des bâtiments méridionaux aux tuiles romaines et aux façades à oculus. Sa lanterne est surmontée d’un dôme en cuivre repoussé caractéristique des premiers phares comme Eddystone (Angleterre, 1759) ou le Four du Croisic (Loire-Atlantique, 1821). C’est en étudiant les parties communes ou les logements que l’on distingue quelques spéciicités. Le besoin en eau demandait la construction de citernes imposantes sous les 10 Phares du Languedoc-Roussillon - Avant-propos bâtiments. Les cours sont alors agrandies, dallées, munies Phares du Grau-du-Roi, du Cap de rigoles pour permettre le captage des eaux pluviales Béar et du Cap Leucate. comme au Cap Camarat (1837) ou aux Sanguinaires (1844). Le phare d’Aguay (1884) est l’un des rares à posséder un toit en terrasse qui servait à la récupération des eaux. Au Titan (1837), l’accès est tellement compliqué qu’il a nécessité la construction d’une corniche maçonnée et creusée à lanc de falaise pour assurer l’acheminement des matériaux à partir de la cale d’embarquement. Au phare du mont d’Agde (1836), un vent lancinant pousse les ingénieurs à enserrer l’édiice dans une enceinte munie de meurtrières qui lui donne un air de fortin retranché. Au phare de Faraman, ce sont les moustiques qui gâchent la vie des gardiens. L’isolement est complet dans ce désert horizontal de sel. Un réseau complet Après 1855, la signalisation des côtes méditerranéennes est déjà en place. Elle sera complétée par la construction d’une dizaine de phares entre 1860 et 1905 pour accompagner l’évolution des chenaux de navigation (Espiguette, 1869, Mont Saint-Clair, 1903), éviter toute méprise entre les feux (Gacholle, 1884, Beauduc, 1903) ou suivre l’accroissement du transport maritime (Cap Couronne, 1867). A terme, la Méditerranée possèdera cent quatorze feux dont trente qualiiés de phares (pour six cent cinquante neuf établissements relevés en France). Francis Dreyer Historien des techniques Avant-propos - Phares du Languedoc-Roussillon 11 Installation de la lanterne du Cap Leucate en 1951. (Archives du service des Phares et Balises). La difficulté des chantiers Même si la côte n’est pas battue par les vagues comme en Bretagne, construire un phare en Languedoc est une entreprise dificile, longue et coûteuse. Les demandes de dédommagements faites par les entrepreneurs des phares du Grau-du-Roi et de l’Espiguette l’attestent, ils se sont lancés dans ces chantiers prestigieux avec ardeur et désir de gloire sans doute, mais les conditions géographiques et climatiques leur ont causé bien des soucis. S’il a fallu 14 ans en mer d’Iroise pour construire le célèbre phare d’Ar-Men, il a fallu presque 4 ans pour celui de l’Espiguette, perdu dans les sables et les marécages. La société BBT : fournisseur officiel Créée en 1862 par Frédéric Barbier et Stanislas Fenestre, la société devient Barbier Bénard Turenne au début du 20e siècle. L’entreprise, d’abord spécialisée dans la fabrication d’optiques pour phares, produit aussi les mécanismes de rotation à poids et sur cuve à mercure associés à ses lentilles de Fresnel. Très rapidement, elle est la première entreprise mondiale pour la construction des phares et diversiie ses fabrications : tours métalliques, bouées, sirènes de brume… La construction La méthode est toujours la même : un ingénieur local des Ponts et Chaussées dépendant du préfet de département, dessine les plans qui sont revus puis validés par le directeur du service des Phares et Balises, ensuite cet ingénieur suit la construction de la partie strictement architecturale. La partie technique, l’éclairage proprement dit, est pris en charge par le service central à Paris, qui fournit et monte en régie échelles métalliques, appareil et lanterne. Ses fournisseurs sont toujours parisiens, communs aux différents phares français, ce sont les entreprises Henry-Lepaute, Sautter, puis Barbier et Fenestre devenu Barbier Bénard Turenne (BBT). Un conducteur du service central vient sur place pour la pose des lanternes et des appareils d’éclairage et assure l’allumage. L’alimentation en eau est assurée au moyen de vastes citernes souterraines, les écoulements sont prévus avec soin, dallés et pavés (à l’Espiguette). Au Cap Béar, la citerne est divisée en deux compartiments pour Les règles de construction l’eau potable des toitures sont la qualité, la sécurité et le souci des conditions de des logements et pour les vie des gardiens. La dificulté eaux pluviales provenant des plates-formes et du glacis. d’avoir des gardiensPlus récemment, l’eau était allumeurs consciencieux et iables est grande et à partir apportée chaque semaine par camion-citerne depuis de 1830, pour les attirer, le Port-Vendres. Les conditions soin apporté aux logements de vie des gardiens sont est manifeste. Ceux-ci sont étudiées de près, par prévus en toute proximité exemple, dans les logements mais bien séparés de la et bâtiments annexes, tour du phare, tandis que le magasin où sont conservées des circulations d’air sont établies sous les parquets. l’huile et les lampes Caves, bûchers, cabinet nécessaires à l’allumage d’aisance extérieur sont du feu, est bien séparé prévus. A Leucate, c’est des logements. la protection contre le vent qui est organisée. Au Cap Béar, très isolé, les logements prévus comptent deux chambres, une cuisine et un salon, alors que ceux du Grau-du-Roi, au siècle précédent, ne comptaient 12 Phares du Languedoc-Roussillon Phares du Languedoc-Roussillon que chambres et cuisine. Un bureau et des chambres de réserve ou de passage sont construits pour les ingénieurs des Ponts et Chaussées qui sont périodiquement amenés à visiter et contrôler les phares. 13 Surveiller la mer et signaler la côte Agde (Hérault), redoute et sémaphore abandonnés près du Mont Saint-Loup, dessin par J.-M. Amelin, 1823 (Médiathèque centrale d’agglomération Emile Zola, Montpellier). Le Méditerranéen considère depuis toujours la mer comme un danger à cause de la menace des incursions hostiles. De plus, la longue côte basse, qui s’étire entre le Cap Leucate et la Camargue, est délaissée à cause de l’enlisement des graus, ces passages entre mer et terre qui transforment la région en marécages insalubres, impropres à la navigation. Par l’observation plus ou moins organisée, comme les tours à signaux du royaume de Majorque en Roussillon, à partir de postes de surveillance stratégiques, de hauteurs ou de points défensifs, on s’attache à signaler les mouvements de navigation suspects pour prévenir la terre des risques de débarquement. Ce sont les nombreux aménagements de feux installés sur des tours Leucate (Aude), redoute de la Haute ou de simples podiums qui jouent ce rôle durant des siècles, pour prévenir les razzias des Sarrasins au Moyen Age ou des Franqui. Mauresques jusqu’à l’époque moderne. L’exemple de la fortiication de l’îlot rocheux de Brescou au large du Cap d’Agde contre une éventuelle menace protestante (soutenue par l’Espagne) à la in du 16e siècle, et renforcée au début du 17e siècle, en est un cas de igure inattendu. Cette fonction de défense se confond ensuite très vite avec une autre, diamétralement opposée, mais utilisant les mêmes moyens et les mêmes emplacements, la signalisation maritime comme aide à la navigation et à l’approche des côtes. A la frontière entre pays catalan et français, Leucate se protège, au 18e siècle, des dangers venant de la mer par la construction de plusieurs redoutes et batteries à la Franqui, dont l’une, communément appelée fanal, sert également pour les marins. L’étude des fanaux et des phares de la côte languedocienne doit tenir compte à la fois de ces deux rôles. La communication optique est opérée dans un sens mer-terre puis terre-mer, comme à Agde où le relais se fait, depuis le fort et le feu de Brescou, par la redoute du 18e siècle dite « tour des Anglais », jusqu’au premier sémaphore du sommet du Mont d’Agde. Ce dernier est complété, au début du 19e siècle, par le grand phare majeur d’atterrissage, seul point de référence alors entre Pyrénées et Provence. Plus tard encore, ce phare est transformé en sémaphore. 14 Phares du Languedoc-Roussillon Le fort Brescou par E. Bastide (19e s.), huile sur toile : on aperçoit le vieux phare sur le bastion ouest (Musée agathois Jules Baudou). Phares du Languedoc-Roussillon 15 Agde (Hérault), plan détaillé du fort Brescou pour un projet de travaux de 1898. Le phare est mentionné en rouge. On ignore souvent le réseau de défense et de communication établi à partir de 1740 par l’ingénieur militaire JacquesPhilippe Eléonore Mareschal (1689-1778) directeur des fortiications du Languedoc pour faire face à la menace anglaise apparue lors du débarquement de 1710. Appuyé sur la seule île du littoral, Brescou, et les deux monts d’Agde et de Sète, ce réseau est centré sur le point fort, enjeu majeur, que constitue alors le port de Sète : le fort Richelieu et sa défense avancée sur la corniche, le fort Saint-Pierre, pour protéger le port, lui-même gardé par le fort du môle SaintLouis. Ce système de défense fonctionnait en relais avec une ligne d’une douzaine de petits fortins édiiés plus tard en bord de mer. D’allure très médiévale, ils sont dotés de créneaux sur encorbellements et de meurtrières, conçus pour un petit groupe de guetteurs chargés d’alerter l’arrière-pays par des signaux. Ces fortins sont de petits édiices isolés de deux étages avec terrasse et tourelle à feux. L’alarme est donnée le jour par un système codé de drapeaux, précurseurs des sémaphores. Plusieurs ont disparu totalement ou sont en voie de disparition, comme la Vieille Nouvelle à Port-la-Nouvelle, ou sont dénaturés comme la redoute de Ballestras à Palavas. Plusieurs de ces redoutes ont été inscrites au titre des monuments historiques : dès 1939 comme celles du Mont Saint-Loup à Agde (dite « tour des Anglais ») et du Castellas sur le mince cordon littoral entre Sète et Marseillan. Celle du Grand-Travers à la Grande-Motte a été inscrite en 1996. 16 Phares du Languedoc-Roussillon Phares du Languedoc-Roussillon 17 Port-Vendres (Pyrénées-Orientales), fort Fanal : dans la fortiication, le fanal de 1700, le logement du gardien dans l’ancienne caserne et le poste allemand de 1940. Les phares : définition, chronologie, typologie et historique Il est important de déinir précisément ce que l’on entend ici sous le terme de « phare ». En effet, on confond trop souvent phare et simple « feu ». Le phare est une tour de signalisation maritime répondant à plusieurs critères dont le principal est le suivant : il a une fonction d’atterrissage (atterrage) ou de grande route, c’est-à-dire guider les navires qui croisent encore loin des côtes. Pour cela, il doit avoir une portée d’au moins 20 milles nautiques (270 km) qui ne peut être obtenue que par une certaine hauteur de la focale au-dessus du niveau de la mer, ce qui signiie que la lanterne est placée à 15 m minimum du sol (la tour est moins élevée lorsqu’elle est établie sur un relief). De plus, il doit être habitable, ce qui nécessite un logement pour le ou les gardiens et des magasins. Les simples feux, eux, ne sont que des balisages d’entrée de port ou de chenaux. Les phares sont classés à l’origine selon leur rôle et leur portée : « 1er ordre » (60 km) : phare de pleine mer, guide la phase d’approche de la côte ; « 2nd ordre » (40 km) : phare ou feu indiquant les chenaux d’accès ; « 3e ordre » (28 km) : phare ou feu balisant l’entrée des ports. Différents types de constructions correspondent aux quatre grandes périodes de réalisation des phares : - Sous l’Ancien Régime, l’éclairage est lié aux places fortes maritimes, avec des implantations ponctuelles. La signalisation se borne généralement à allumer des feux dans une fortiication : c’est par exemple le cas du fort fanal de PortLe Grau-du-Roi, phare de l’Espiguette. Vendres et du premier feu du fort Brescou à Agde. - Dès la in du 18e siècle, on se préoccupe de l’éclairage systématique des côtes de France. Le 19e siècle est marqué par la création, en 1811, de la Commission des phares. Elle est composée de marins, savants, militaires, scientiiques et cartographes et initie cette approche globale et cohérente propre à la France, à la différence de l’Angleterre où seuls les endroits dangereux sont signalés. Grâce à l’évolution de la cartographie maritime, 18 Phares du Languedoc-Roussillon on peut envisager un réseau complet de relais lumineux évitant Feu du môle, Port-Vendres. toute zone d’ombre pour les navigateurs. Ce grand programme, véritable chaîne lumineuse continue, est mis en place à partir du rapport de Rossel en 1825, qui prévoit la construction d’une cinquantaine de phares et d’une quarantaine de petits feux de port. Cela est rendu possible par les progrès dans la technique de l’optique, notamment grâce à la lentille d’Augustin Fresnel, innovation utilisée dès 1823 à Cordouan. Le service des Phares et Balises est alors autonome et puissant avec son équipe d’ingénieurs des Ponts et Chaussées et compte jusqu’à six cents gardiens. Léonce Reynaud, directeur du service, est auteur d’un traité d’architecture ; son style, adapté à cette technique, s’impose alors jusqu’en 1880 pour de nombreux phares à terre : en Languedoc-Roussillon, ce sont les phares du Mont d’Agde, le premier phare du Cap Béarn et ceux du Grau-du-Roi. - Vers 1900, sont construits les derniers phares de prestige et en 1903, l’ensemble du plan d’éclairage des côtes est terminé. La in du 19e siècle et la première moitié du 20e siècle (18801940) constituent une période de consolidation de cette longue et vaste entreprise de signalisation, bénéiciant des avancées techniques de l’éclairage (on passe de la lampe à huile au pétrole puis à l’électricité) : des phares monumentaux sont ajoutés ou viennent en remplacer de plus anciens comme au Mont Saint-Clair à Sète et au Cap Béar à Port-Vendres. - Enin, après la Seconde Guerre mondiale, s’ouvre une phase de reconstruction (cent soixante-dix édiices détruits en France lors de la retraite allemande doivent être reconstruits). Ceux-ci sont coniés à des architectes et non plus aux ingénieurs du service. C’est à cette période que sont élevés ceux du Cap Leucate et du môle Saint-Louis à Sète. Phares du Languedoc-Roussillon 19 Lentille à échelons, optique du Cap Leucate. xxx Optique du feu du fort Brescou. Page suivante : Optique du phare du Mont Saint-Clair. Evolution des techniques des foyers lumineux De l’Antiquité au 19e siècle, les combustibles sont le bois, le charbon, l’huile. A partir de 1839, l’huile végétale de colza est obligatoire, remplacée vers 1875 par l’huile minérale de pétrole. Sont ensuite utilisés les gaz d’éclairage, acétylène, vapeur de pétrole puis l’électricité et le gaz butane. Aujourd’hui, les énergies solaire et éolienne sont également mises à contribution. Optique de Fresnel Pour augmenter la portée de la lumière, dès le 18e siècle, à Cordouan (au large de l’estuaire de la Gironde) des rélecteurs paraboliques (miroirs sphériques en cuivre) sont ajoutés dans la lanterne. Au début du 19e siècle, l’optique mise au point par Augustin Fresnel révolutionne l’éclairage. Sa lentille à échelons permet de multiplier la puissance de la lumière. Une autre innovation consiste à jouer de la rotation du système d’éclairage. Chaque phare est alors caractérisé par le rythme de ses éclats : à la in du 18e siècle, on fait tourner les rélecteurs autour de la source lumineuse grâce à un mécanisme d’horlogerie à poids ; l’accélération de la rotation 20 est rendue possible par le dispositif d’optique lottant sur une cuve de mercure pour éliminer frottements et usure (en voie de suppression en raison de la nocivité de cette substance). L’optique de Fresnel évolue vers une réduction de la taille des appareils jusqu’en 1900 ; il reste peu de dispositifs d’origine. Phares du Languedoc-Roussillon Phares du Languedoc-Roussillon 21 La situation des phares aujourd’hui et la politique de protection au titre des monuments historiques Le réseau de phares français présente un intérêt historique, architectural et technique de premier plan au niveau international, pour sa diversité et son maillage géographique complet et précis. Cette vaste entreprise d’Etat couvre des réalités très différentes : outre les grands phares emblématiques, des dizaines d’édiices plus modestes mais aussi les feux, tourelles, amers ou bouées sont administrés par un service centralisé depuis le début du 19e siècle. La problématique de patrimonialisation des phares est apparue il y a une trentaine d’années, initiée par la revue Le Chasse-marée. L’engouement du grand public s’est développé grâce aux nombreux photographes qui ont révélé l’aspect monumental et spectaculaire des phares à travers le monde entier. Leur vision de terrien, et non plus celle du marin, en a transformé la perception, en en faisant un Phare de l’île Vierge (Finistère) support identitaire fort. Par ailleurs, l’aide à la navigation revêtu d’opaline comme celui du par satellite (GPS) modiie profondément le rôle du service des Phares et Balises, qui n’a plus les moyens d’entretenir Cap Béar. des bâtiments annexes désormais inoccupés et se consacre L’ancien phare du Grau-du-Roi, à la signalisation élémentaire. En effet, sur les 1800 équidevenu emblème de la ville. pements de signalisation maritime (phares, feux, tourelles, amers ou bouées) en France, un peu moins de 50 % sont des marques actives : les quelque 150 bâtiments de phares et « maisons-phares », ne représentent que 2 % du corpus total du balisage lumineux. Dans les années 2000, sous la pression des associations, chercheurs et historiens, les ministères chargés de l’équipement et de la culture lancent conjointement une mission d’inventaire des phares dont les notices sont consultables sur internet (base MERIMEE). Cette vision plus historique et technique a abouti à leur patrimonialisation alors qu’ils étaient largement méconnus et que, jusqu’alors, seuls quelques phares actifs étaient protégés. Pour assurer la conservation des monuments sélectionnés dans des conditions compatibles avec leur fonction première, la campagne 22 Phares du Languedoc-Roussillon Phares du Languedoc-Roussillon 23 Feu solaire de Cerbère, conçu par l’architecte Lucien Guerra en 1981. de protection au titre des monuments historiques a été réalisée sur plusieurs années. En 2013, 80 phares sont protégés au titre des monuments historiques en France : 38 classés et 40 inscrits. En Languedoc-Roussillon, certains phares étaient déjà inscrits car inclus dans des monuments protégés : le fort Brescou à Agde (Hérault) et le fort Fanal à Port-Vendres (Pyrénées-Orientales). La commission régionale du patrimoine et des sites (CRPS) du 14 juin 2011 a proposé l’inscription de l’ancien phare du Mont Saint-Loup à Agde (Hérault), du phare du Mont Saint-Clair à Sète (Hérault) et du feu métallique du môle à Port-Vendres (Pyrénées-Orientales). Dans un deuxième temps, après examen par la commission nationale des monuments historiques (CNMH) le 18 juin 2012, l’ancien phare du Grau-du-Roi et le phare de l’Espiguette au Grau-du-Roi (Gard) ainsi que celui du Cap Béar à Port-Vendres (Pyrénées-Orientales) ont été classés au titre des monuments historiques. Seuls ceux du Cap Leucate à Leucate (Aude) et du môle Saint-Louis à Sète (Hérault) n’ont pas été retenus. Le « Grenelle de la Mer » (2009) prévoit des actions de valorisation en coopération entre l’Etat, les associations et les collectivités. Plusieurs phares ont été, ou vont être, transférés au Conservatoire du littoral ain de les intégrer dans la gestion de sites naturels sensibles (caps, îles). Malgré leur obsolescence technique, les phares sont des repères majeurs qui continuent à signaler la terre aux marins et la mer aux terriens. Comme le rappelle en 2008 une circulaire conjointe des ministères chargés de l’équipement et de la culture, « le classement n’est que la première étape d’un processus de mise en valeur fédérant l’ensemble des acteurs concernés » : directions interrégionales de la mer, Conservatoire du littoral, communes et directions régionales des affaires culturelles. 24 Phares du Languedoc-Roussillon Service des Phares et Balises Ce service est actuellement rattaché à la direction des affaires maritimes et aux directions interrégionales de la mer (DIRM) au sein du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Le LanguedocRoussillon est rattaché à la DIRM Méditerranée dont le siège se trouve à Marseille, avec une antenne à Sète. L’évolution technologique des nouveaux moyens de positionnement électronique a bouleversé son rôle dans les dispositifs d’aide à la navigation ; par ailleurs, l’automatisation a conduit à la disparition totale du gardiennage. En Languedoc-Roussillon, dès 1998, un inventaire des équipements maritimes et portuaires a été réalisé dans une optique ethnologique. Il s’appuie sur des enquêtes de terrain, destinées à repérer les éléments maritimes et portuaires du littoral languedocien devant être sauvegardés (lieux traditionnels d’habitat, grues, phares…), les pratiques (prud’homies, lieux de raccommodage des ilets…) et les lieux d’exploitation (salins, Phares du Languedoc-Roussillon 25 ateliers de charpenterie de marine…). De nombreux équipements ont déjà disparu dès la in des années soixante mais d’autres, en voie de disparition, sont encore présents dans la mémoire de ses anciens acteurs. Notices sur les phares* du Languedoc-Roussillon (par ordre géographique d’ouest en est, selon le plan de la Commission des phares de 1825, puis par ordre chronologique) 9 8 10 7 Pyrénées-Orientales 1 5 Port-Vendres, feu du fort Fanal Port-Vendres, phare du Cap Béar 3 Port-Vendres, feu métallique du môle 28 32 38 2 6 Aude 4 Leucate, phare du Cap Leucate 40 Hérault Agde, ancien phare puis feu du fort Brescou Agde, ancien phare du Mont Saint-Loup 7 Sète, ancien phare puis feu du môle Saint-Louis 8 Sète, phare du Mont Saint-Clair 42 46 50 52 5 4 6 Gard 9 10 1 2 Grau-du-Roi, ancien phare du Grau Grau-du-Roi, phare de l’Espiguette 58 62 3 * Les phares ne sont pas ouverts au public. classé inscrit non protégé Carte des premiers phares, rapport de 1825. 26 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 27 Port-Vendres Pyrénées-Orientales Feu du fort Fanal Un document rare, conservé aux archives départementales des Pyrénées-Orientales, dresse un inventaire du phare le 25 octobre 1830 par l’ingénieur ordinaire J. Brue : Vue du fort depuis la redoute Béar. Si la permanence des fortiications sur la côte rocheuse du Roussillon est dictée par la topographie, à Port-Vendres, le fanal existait bien avant la construction d’une fortiication. Cette redoute du Fanal fait partie des ouvrages réalisés par Vauban entre 1673 et 1700 pour assurer la défense de la côte. Elle possède dans son enceinte une tour munie d’un feu, aujourd’hui signal lumineux d’entrée de port. En 1776-1777, à la suite d’observations des capitaines de bateaux, le comte de Mailly décide de réparer le vieux fanal. La lanterne est conservée, quelques châssis de bois sont garnis de verre de Bohème et onze réverbères, qui consomment chacun deux onces d’huile, sont installés. Le vitrage de l’ancien fanal est demandé par les Dominicains de Collioure pour réparer leur église. En 1829, Becquey, directeur du service des Phares, informé du mauvais état de la lanterne et l’appareil, demande au préfet de faire les réparations urgentes en attendant l’installation d’un nouveau phare au Cap Béarn, ajournant ainsi le renouvellement de l’appareil du fanal. 28 « Le phare est situé au nord de l’entrée du port dans un petit fort où il n’existe pas de local pour l’habitation d’un gardien allumeur, ni de magasins pour les objets nécessaires à l’entretien de la lanterne et de l’éclairage. La lanterne est portée par un prisme de maçonnerie en mortier de chaux et sable enveloppant un escalier en vis auquel on arrive par un escalier extérieur en bois peint à l’huile. La base du prisme est un carré de 3 m 25 cm de côté, couronné par des pierres de taille en saillie de 48 cm portant une balustrade en fer de 1 m de hauteur qui forme une galerie à l’entour de la lanterne. Deux contreforts ayant une base de 2 m 50 assurent la stabilité du prisme dont la hauteur depuis le sol jusqu’au niveau de la galerie est de 18 m 35. L’escalier en vis a un diamètre de 1 m 75 dont 25 cm pour le noyau. Il est composé de marches d’une seule pièce en pierre basaltique d’Agde et s’élève jusqu’à 17 m 70 au-dessus du sol. … La galerie porte un octogone en maçonnerie de 1 m 5 cm de coté et 1 m 22 cm de hauteur ... On arrive au plancher de la lanterne à l’aide d’une échelle ordinaire formée de 6 échellons (sic). La lanterne repose sur l’entourage intérieur de la galerie et sur 8 poteaux encastrés dans les angles intérieurs de la maçonnerie … La hauteur totale de la lanterne est de 3 m 53… La lanterne est octogonale, chacun de ses côtés de 83 cm de largeur est formé d’un châssis vitré ferré sur des montants dormants portant 12 carreaux en verre double de 32 cm de hauteur sur 30 de largeur, un de ces châssis peut être ouvert et permet ainsi de descendre dans la galerie à l’aide de 2 marches. La couverture de la lanterne en Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon La tour du fanal, côté sud. Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 29 forme de dôme hexagonal est en tôle peinte à l’extérieur, elle pose sur des fermes circulaires en fer au droit des angles et sur 4 cercles horizontaux qui font l’office de pannes. La lanterne est maintenue par 4 arcs-boutans en fer… Le fanal est supporté par une tige en fer scellée d’une part dans le noyau de l’escalier en vis et maintenue dans son extrémité supérieure au niveau de la naissance du dôme par des traverses en fer ; la tige en fer porte 4 cercles espacés verticalement entre eux de 35 cm au-dessus du plancher de la lanterne, ils ont ensemble 11 réverbères à mèches plates garnies de réflecteurs en fer blanc et de cheminées aboutissant toutes vers une couverture conique en tôle. Les égouts des réverbères sont reçus dans un réservoir semi circulaire en cuivre suspendu au cercle inférieur du fanal. » En 1830, l’éclairage se fait toujours à l’huile d’olive. Le dépôt d’huile est situé loin du phare, chez le délégué de l’entreprise d’éclairage Jarlier dont un domestique fait ofice de gardien allumeur ! Il est demandé aux nouveaux entrepreneurs de l’éclairage des côtes de la Méditerranée, Pelais ils et Lieutaud, d’employer de l’huile de colza, de trouver un gardien, de le loger dans un local muni d’un magasin et de remplacer les rélecteurs en fer blanc plat par des rélecteurs paraboliques en plaques de cuivre argentées (matériau d’origine). En 1841, les becs à mèche plate sont remplacés par un appareil à feu ixe. En 1859, comme les militaires souhaitent déplacer le fanal pour établir une batterie, le ministère des travaux publics écrit au préfet : « La Commission des phares a considéré que la tour du fanal est un précieux amer de jour, que ce fanal sert de feu d’atterage dans les circonstances A gauche, dessin signé de l’ingénieur Figaret, 1813. Dans la tour, une cavité est creusée pour faire coulisser le poids moteur, qui faisait tourner l’appareil d’éclairage. L’optique actuelle. malheureusement trop fréquentes où le phare du Cap Béar est masqué par la brume et qu’il ne pourrait plus remplir ce double office si la hauteur au-dessus du niveau de la mer était réduite ainsi que le proposent les services de l’artillerie et du génie, d’où résulterait un très grave préjudice pour les intérêts de la navigation. La commission a en conséquence été d’avis qu’il y avait lieu d’étudier une disposition de batterie qui permette le maintien du fanal dans sa position actuelle et que dans le cas où il serait reconnu que les intérêts de la défense exigent impérieusement le déplacement, cette opération devrait être subordonnée à la construction de la citadelle de la Mirande ou d’un amer équivalent et à la translation du phare du Cap Béar en un point où il se trouverait à l’abri des brumes ». En 1855, l’aménagement d’un logement pour le gardien est réalisé. Technique Lorsque le 1er août 1884 la signalisation de l’entrée du port de Port-Vendres est modiiée par la construction du feu métallique sur le môle, le feu ixe du Fanal est transformé en appareil à feu clignotant de Henry-Lepaute ils. C’est aujourd’hui un feu vert tribord d’entrée de port. Propriétaire Etat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, DIRM Méditerranée. Protection Inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 6 juin 1933 : la redoute du fort Fanal avec son phare en totalité. [M.F.] 30 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 31 Pyrénées-Orientales Port-Vendres Phare du Cap Béar Un premier phare fut allumé le 1er mai 1836, installé sur le Mont dit alors Béarn à 800 m au sud-est de Port-Vendres à l’intérieur du fort. Le foyer, qui se trouvait à une altitude trop élevée, était souvent masqué par la brume. Les navigateurs se plaignaient de son ineficacité et du danger qu’il leur faisait courir. Après avoir étudié diverses modiications et devant la dificulté d’entretenir un phare dans une enceinte militaire, le service central décide de construire un nouveau phare à la pointe du cap. L’ancien est éteint en 1905, lors de l’allumage de l’actuel. L’emplacement, plus en avant sur la pointe du cap, est déterminé dès 1901, mais il faut au préalable construire un chemin d’accès, réalisé en 1902. Le 2 août 1902, la décision ministérielle est prise : le nouveau phare d’une portée de 29 milles, dont le foyer doit se trouver à 79 m audessus de la mer, sera une tour carrée au bas de laquelle on ménagera une plate-forme pour les bâtiments des gardiens et les magasins. C’est Marcel Garau, ingénieur ordinaire des Ponts à Perpignan, qui dessine les plans, sous la direction de Georges de Joly du service central puis du directeur des Phares et Balises, Quinette de Rochemont lui-même, qui suit les travaux de près, corrigeant, expliquant, conseillant l’ingénieur de Perpignan. Cap Béar est en effet une des grandes réalisations du service en ce début du 20e siècle, un des derniers phares monumentaux dans le style du 19e (comme celui de Sète construit au même moment). Les matériaux, le soin apporté à leur mise en œuvre, les prouesses techniques témoignent de la maîtrise et de la puissance du corps des ingénieurs des Ponts. On emploie des matériaux solides et riches : granit, marbre, opaline, chêne. L’habillage de l’intérieur de la tour en carreaux d’opaline a été expérimenté aux phares d’Ailly (Seine-Maritime), d’Eckmull (Finistère) en 1897, de l’île Vierge (Finistère) en 1900, de la Coubre (Charente-Maritime) en 1905. Ce revêtement permet le ruissellement de la condensation et doit résoudre les problèmes d’humidité inhérents à la situation physique des phares. Joly pousse donc Garau à envisager la même solution à Béar. La fourniture et la pose de l’opaline sont assurées par la Compagnie de Saint-Gobain. Le 15 octobre 1905, le phare est allumé, mais les travaux ne sont pas terminés et le retard est attribué à l’entrepreneur Bringer. Le 14 novembre 1905, restent à poser les lambris des deux chambres, la rampe d’escalier et des iltres de la citerne pour l’approvisionnement en eau des logements. « Le revêtement en opaline est terminé à l’exception d’une vingtaine de plaques qui se sont brisées en cours de route. Celles que la Société de Saint-Gobain va envoyer pour les remplacer seront posées en même temps que le plafond. ». En juin 1906, les travaux sont achevés. En 1931, un radiophare de brume est installé en ixant des câbles entre le magasin du phare et le soubassement de la lanterne. L’électriication Photographie de 1906 (Archives Nationales). 32 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 33 date de 1946. En 1950, on reconstruit le radiophare, le bâtiment des machines, un logement pour le personnel de passage, le portail et le mur de clôture. Au Cap Béar, la création de deux plates-formes permet d’isoler de la tour les logements et les annexes, situés en contrebas. Ici, les gardiens doivent monter l’escalier du glacis avant celui du phare. Mais nous sommes loin des 300 marches de certains phares bretons ! La tour, haute de 27 m, est pyramidale à section carrée. Son soubassement monumental en pierre de taille est construit en granit de Roquefort (Aude), le fût en moellons roses et les chaînes d’angle en granit. Comme à Sète ou à l’Espiguette, la partie supérieure forme un encorbellement : de faux mâchicoulis supportent une balustrade en pierre de taille. La particularité de l’édiice réside dans son fût circulaire totalement recouvert de carreaux d’opaline jusqu’au plafond sous la chambre de veille. L’atmosphère marine que l’on y ressent est accentuée par les relets incertains de la lumière sur les parois bleu ciel. Le sol du vestibule est recouvert d’une mosaïque, fournie par la maison Fourcade Abblard de Perpignan, ornée d’une étoile, d’une frise de grecques et d’un cartouche marquant le seuil de la date de construction « 1905 ». L’escalier à vide central s’élève en spirale contre la paroi de la tour, avec ses marches en marbre incarnat de Villefranche-de-Conlent et sa rampe en laiton. La chambre de service avait reçu un « revêtement en chêne à grand cadre » sur toute la hauteur et un parquet de chêne à point de Hongrie. Elle est éclairée par des lucarneaux. Un escalier en bois permet d’accéder à la chambre de l’appareil, où se trouve la cuve à mercure portée par 3 colonnes qui fait tourner l’optique. Un escalier métallique donne accès au niveau de la lanterne. La tourelle est construite en maçonnerie de granit, le couronnement et la plinthe sont en pierre de taille. La partie métallique s’élève de 4,50 m au-dessus de ce couronnement, elle y est encastrée par douze montants verticaux descendant jusqu’au plancher (constitué de poutrelles IPN, supportant l’optique). C’est une lanterne de la maison Barbier Bénard et Turenne de 3 m de diamètre. Son vitrage cylindrique comporte 3 niveaux de carreaux. Elle est terminée par une coupole à boule et décorée de gueules de lions en jets d’eau, selon le modèle très en vogue dans la deuxième moitié du 19e siècle, comme au Mont Saint-Clair. Plan, coupe et élévation (Archives du service des Phares et Balises). Détails de la marqueterie de la chambre de veille (Archives du service des Phares et Balises). Opaline et marbre rose. 34 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 35 xxxmontage de l’appareil Le D’août à octobre 1905, Huet, le monteur dépêché par le service central pour l’installation de l’appareil d’éclairage, informe Paris : « le soubassement de l’appareil est en place depuis le 31 juillet. Le montage de la lanterne a été commencé le lendemain mais nous avons eu cette semaine 3 journées de vent violent qui ont empêché d’avancer le travail. Je me suis mis d’accord avec M. Garau sur le parcours à faire suivre aux ils des sonneries d’appel des gardiens ; je vais sauf contre-ordre commander directement à M. Esquerré qui les livrera au Dépôt, les sonneries, ils, etc. nécessaires pour cette communication électrique. Je porterai la dépense sur mon carnet et je transmettrai la facture à M. l’ingénieur. (Pour l’Ailly les fournitures de même nature ont été prises en charge par le service central) » désireux de bien faire ; je crois qu’il pourra assurer le service dans de bonnes conditions. » de rotation mais ils ne sont pas assez avancés pour que je puisse proposer une date pour l’allumage. L’opaline est arrivée à pied d’œuvre. » 28 août 1905 « La lanterne est achevée et le montage de l’optique est commencé. Le menuisier chargé de préparer les menuiseries de la chambre de la lanterne et de la chambre de service m’a prévenu qu’il ne les posera qu’à la in de septembre, il doit au contraire poser prochainement les croisées de la tour. L’opaline doit arriver ces jours-ci en gare de Port-Vendres. » 20 septembre 1905 « Les essais de rotation ayant donné de bons résultats j’ai écrit à M. Garau pour lui demander s’il verrait un inconvénient à ce que le phare soit mis en route le 15 octobre, le délai lui paraît un peu court… Les travaux de menuiserie et de pose de l’opaline ne seront pas terminés et pourront causer une certaine gêne ; il sera surtout dificile de mettre la machine et l’appareil à l’abri de la poussière mais je crois 7 septembre 1905 qu’avec des précautions le « Le montage est terminé phare pourra fonctionner sauf la mise en place du pendant l’exécution de ces mercure et du poids moteur. Les essais de l’incandescence travaux. » sont commencés. La pose des menuiseries de la tour n’étant pas commencée j’ai dû pour mettre les appareils à l’abri de la poussière et du vent, faire faire un plancher provisoire dans la chambre de 14 août 1905 « Le montage de la lanterne la lanterne, avec des planches est poussé aussi activement provenant des caisses d’emballage, et fermer par que possible mais le vent une trappe la pénétration de nous oblige souvent à abandonner le travail ; depuis l’escalier dans cette chambre. L’opaline n’est pas encore le 3 août nous perdons arrivée à Port-Vendres. » plus d’un jour sur deux ! Il reste à poser les fuseaux, 16 septembre 1905 le piédouche etc. et les glaces. Le futur chef gardien « Le montage est terminé. J’ai commencé les essais est intelligent ; il est très 36 Phares du Languedoc-Roussillon Notices sur les phares Un talus fait le lien entre la plate-forme supérieure, où se trouve le phare, et la plate-forme inférieure où sont construits les bâtiments annexes. Un escalier droit est situé dans l’axe de la maison des gardiens et de la porte du phare. Le service de l’ancien phare du Cap Béar étant assuré par 3 gardiens (Raynal, Badie, Fajal), le projet comportait donc 3 logements. Finalement, seuls deux sont construits dans un long bâtiment en rez-de-chaussée, aux façades enduites, avec chaînages d’angle et encadrement de baies en pierre de taille. Le même traitement soigné est donné au bureau des gardiens, où sont aujourd’hui installés machines informatiques (DGPS) et accumulateurs, et au magasin, devenu salle des machines puis radiophare. [M.F.] Technique D’une portée de 30 milles, le phare du Cap Béar est équipé d’une lentille à 3 panneaux créant 3 éclats blancs successifs toutes les 15 secondes. Elle est mue par sa cuve à mercure d’origine. Le brûleur à vapeur de pétrole, mis en place à l’origine, fut remplacé par un brûleur à acétylène puis par une lampe incandescente électrique. Pendant l’Occupation, en 1944, le phare est électriié grâce à un groupe électrogène, puis en 1947 l’électricité est amenée de Port-Vendres par une ligne de 3,2 km. Les lampes de 6 000 watts ont été remplacées par des ampoules halogènes de 1 000 w. En 2004, le remplacement complet de l’armoire de commande, des batteries, des moteurs de rotation et des groupes électrogènes a permis la mise en service d’une ampoule de 400 w. Propriétaire Etat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, DIRM Méditerranée. Protection Classé au titre des monuments historiques par arrêté du 9 octobre 2012 : le phare en totalité, les logements et les bâtiments techniques (façades et toitures), le mur de clôture, le sol de la cour ainsi que le terrain d’assiette. Cuve à mercure. Lentille. Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 37 Pyrénées-Orientales Port-Vendres Feu métallique du môle du port L’entrée du port de Port-Vendres a toujours été dificile. Plusieurs feux y sont installés. Le plus ancien est celui de la redoute du Fanal, dans la fortiication de Vauban construite vers 1700. Vers 1880, à la demande de la compagnie générale transatlantique dont les paquebots venant d’Algérie font leur entrée de nuit et trouvent la passe mal signalée, le service des Phares décide de modiier les différents feux et d’en installer un nouveau sur le musoir du môle. Pour éviter les conséquences d’un tassement à prévoir dans les fondations du môle, établies simplement sur des blocs artiiciels, le phare doit être le plus léger possible. Le mode de construction en maçonnerie est donc écarté au proit de l’utilisation du fer. Il existe alors des phares métalliques entièrement assemblés à Paris, transportés en pièces détachées, puis remontés comme le phare Amédée en Nouvelle-Calédonie, haut de 45 m présenté à l’Exposition universelle de Londres en 1862, ou le phare breton des Roches-Douvres à l’Exposition universelle de Paris de 1867. Ici, le parti est différent, les ingénieurs des Ponts et Chaussées décident d’élever le feu et la chambre de veille au sommet d’une charpente métallique : il s’agit d’une tourelle assez légère et non d’un phare monumental. Le plan général de construction est dressé le 27 juillet 1881 par l’ingénieur ordinaire local F. Cutzach, vériié par l’ingénieur en chef Parlier. Mais c’est Léon Bourdelles, ingénieur en chef de l’inspection des Phares et Balises à Paris qui propose neuf planches de dessins, signées le 15 mai 1882, présentant un projet très proche de ce qui sera exécuté 3 ans plus tard. La tourelle métallique était prévue sur plan carré reposant sur quatre piliers, alors qu’elle a été construite sur plan hexagonal à six piliers. Dans un premier temps, la maison 38 Barbier et Fenestre, rue Curial à Paris, doit fournir uniquement un appareil de 0,375 m de diamètre à feu ixe et une lanterne circulaire de 1,60 m de diamètre avec soubassement en fer pour 5 673, 92 francs (paiement approuvé par le ministre des Travaux publics le 10 septembre 1884, transmis à l’ingénieur en chef Lucas le 6 octobre 1884). Puis en mars 1885, l’ensemble de la construction du feu avec la tourelle métallique devant supporter la lanterne est adjugé à Barbier et Fenestre. L’intérêt de ce petit feu métallique réside dans sa rareté en France, puisque seul subsiste le phare en mer de Walde, près de Calais, mais qui est constitué de montants inclinés entretoisés et est éteint depuis 2001. Installé au bout de la jetée, haut de 16,30 m, ce feu métallique est posé sur un massif de maçonnerie de 3 m de haut, de forme hexagonale en pierre de taille et remplissage de petits moellons. La tourelle est constituée de six piliers en fonte soutenant une partie pleine où se trouve la chambre de veille, à laquelle on accède par un escalier en colimaçon ixé par d’épais colliers en fer sur un axe central montant de fond jusqu’à la chambre. Les marches de cet escalier, ajourées et repliables, sont conçues pour être escamotables en cas de forte tempête. Un article de La Science illustrée, en 1890 explique que « les contremarches sont en fonte évidée et mobiles autour du noyau, elles reposent chacune sur quatre tenons qui permettent de les faire pivoter sans que le poids des contremarches supérieures fasse un obstacle au mouvement. Les marches et la rampe sont démontables. Le gardien du phare peut les enlever rapidement et orienter les contremarches suivant la direction des lames prévues. » Malheureusement, cette précaution ayant disparu, en décembre 2008, les Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Dessin de l’ingénieur Bourdelles (Archives Nationales). Tourelle dépourvue de son escalier central. vagues ont projeté des rochers avec une telle force que l’escalier s’est littéralement vrillé et déchiqueté. Une nacelle est désormais nécessaire pour réaliser l’entretien, l’escalier enlevé jusqu’à ses derniers vestiges laisse un ventre vide au centre de l’édicule. Une marche conservée dans le fort Fanal grâce à la vigilance de J.-L. Conte, technicien de la DIRM, permettra sans doute d’envisager une restauration à l’identique. La chambre de service hexagonale, à parois intérieures métalliques, sol et plafond en bois, est vide, à l’exception de l’armoire électronique ixée au centre. Une fenêtre l’éclaire au sud ; un escalier intérieur permet l’accès à l’appareil sous la coupole métallique. La lanterne est entourée d’une galerie extérieure à garde-corps. Technique Le 1er avril 1885, un feu ixe rouge Barbier est installé, remplacé le 1er novembre 1906 par un appareil Luchaire, de mêmes caractéristiques : feu permanent à 3 occultations rouges, d’une portée de 11 milles. Après la tempête de 2008, il est modernisé par le passage au solaire. Propriétaire Etat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, DIRM Méditerranée, gestion par le Conseil général des Pyrénées-Orientales. Protection Inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 12 octobre 2011 : en totalité. [M.F.] Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 39 Aude Leucate Phare du Cap Leucate Longtemps, entre le Mont d’Agde et le Cap Béar, le seul guide lumineux pour les navires venant de Marseille est le feu de La Nouvelle, près de Narbonne. Sa portée et sa puissance insufisantes nécessitent son transfert qui est envisagé dès 1888 au sommet de la falaise du Cap Leucate. L’approbation ministérielle de la création d’un phare de 1er ordre au Cap Leucate date du 11 mars 1889, mais il faut attendre la destruction du feu de la jetée de La Nouvelle par les Allemands lors de leur départ pour que le transfert soit décidé le 4 septembre 1945. Le 26 avril 1946, la commune cède à l‘Etat un terrain de 30 m par 20 sur le plateau de Leucate. Le 29 mai 1946, le service central des Phares et Balises établit un programme destiné à l’architecte, mentionnant de construire « en moellons ordinaires sans dépenses proprement architecturales importantes ». Comme tous les phares de la Reconstruction, c’est en effet 40 un phare d’architecte construit par Henri Gibert (1895-1951), installé à Narbonne et associé à Georges Legendre. Cet architecte a construit les caves coopératives de Luc-surOrbieu (1933), Argeliers (1933), Narbonne (1935), Montredon (1939), Cuxac (1936), Gruissan (1947) et des demeures privées dont un bel immeuble à mosaïque au 27 bd Général-de-Gaulle à Narbonne, ainsi que le monument aux morts de Fabrezan (1927) et le monument commémoratif au Dr Ferroul à Narbonne en 1933. Son projet est daté du 26 juillet 1848. La construction a débuté en 1949. A la suite d’une erreur de calcul de la cote de nivellement du terrain naturel, pour que le plan focal soit bien à 66 m au-dessus de la mer, le service des Phares et Balises décide la surélévation de la tour de 5 m (sur projet du 4 février 1949). La pose de la lanterne a lieu en février 1951, le phare est mis en service en 1951. Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Composé classiquement d’une tour et de bâtiments annexes, ce phare offre une masse assez compacte destinée à résister au vent violent qui sévit 300 jours par an. Une tour pyramidale haute de 19 m 40 est construite en moellons avec chaînes d’angles en pierres de taille de Lapalme. A l’intérieur se trouve un escalier hélicoïdal en béton, à marches préfabriquées en ciment armé. C’est le noyau de l’escalier qui porte une plate-forme en béton sur laquelle est posée la lanterne. Des consoles en pierre de taille supportent une rambarde métallique. Au pied de la tour, un bureau hexagonal est placé en avancée, en façade. La porte d’entrée et les fenêtres sont au sud. Les bâtiments annexes sont groupés au pied de la tour : magasin, salle des machines, salle d’accumulateurs. Ils sont couverts de charpentes en béton. Légèrement à l’écart, le logement du gardien est conçu pour cinq personnes, pourvu d’un impluvium et d’un réservoir, car, comme à l’Espiguette en 1869 ou à Cap Béar en 1905, il n’y a pas d’eau à l’emplacement choisi pour le phare. Il est, par contre, équipé de dépendances : buanderie, bûcher, cellier et poulailler. Les bâtiments sont disposés de façon à créer des espaces protégés du vent pour le confort du gardien. L’ensemble est très homogène et caractéristique de l’architecture des années 1950, malgré la touche néo-médiévale de la partie haute de la tour. Situé dans le site inscrit du Cap Leucate et le parc naturel régional de la Narbonnaise, le phare bénéicie d’un emplacement exceptionnel le long d’un sentier de randonnée très fréquenté en bordure de falaise. Technique La lanterne métallique rouge à vitrage cylindrique et l’optique Sautter-Harlé d’origine sont toujours en place. Le feu est tournant, à deux panneaux en forme de V. Il émet deux éclats réguliers blancs toutes les dix secondes. Sa focale est de 0,25 m, sa portée de 20 milles. Propriétaire Etat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, DIRM Méditerranée. [M.F.] Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Escalier de la tour. 41 Hérault Agde Ancien phare du fort Brescou Le site de l’antique ville d’Agde, l’Agathé grecque, point névralgique des communications de toute cette région, se trouve au bord du leuve Hérault en retrait dans les terres. L’avancée volcanique du Cap se prolonge en mer par l’îlot rocheux basaltique de Brescou. Sur tout ce littoral lagunaire languedocien, c’est le seul point stratégique en mer fortiiable. Dans le dernier quart du 16e siècle, le Maréchal Guillaume de Joyeuse, lieutenant général du Languedoc, établit là un point fort contre la menace protestante. Au début du 17e siècle, Henri Ier de Montmorency renforce ce dispositif mais, en 1632, après l’exécution d’Henri II de Montmorency, Richelieu donne l’ordre de raser le fortin. Cette destruction n’est apparemment que partielle car, en 1634, dans le cadre d’un vaste projet de port (non réalisé), sa jonction avec la terre par une longue jetée avait été envisagée. Le rôle de Brescou comme véritable signalisation maritime n’apparaît qu’à partir du 18e siècle, avec l’ingénieur militaire Mareschal qui en fait un point fort dans le réseau de contrôle des côtes, échelonné de l’Aude jusqu’au Gard, pour surveiller la mer après le débarquement anglais de 1710. Brescou communiquait avec les redoutes relais : notamment la tour dite « des Anglais » sur le Mont Saint-Loup. II s’agit alors d’une simple plate-forme installée sur le bastion sud-est pour allumer un foyer. Au 19e siècle, le programme d’éclairage des côtes de France ne prévoit, entre le Roussillon et la Camargue, pour tout le Languedoc, qu’un seul phare de 1er ordre. Il est installé sur le secteur d’Agde. Balthazar Jordan, dans son Histoire de la ville d’Agde écrit « Le rocher même de la Lauze, caché dans l’eau à l’est et à 1200 m du fort Brescou pourrait offrir un emplacement convenable pour élever 42 un phare ». En 1826, le rapport des Ponts et Chaussées indique qu’on doit établir à Brescou ou sur la « butte d’Agde » un phare tournant à huit lentilles de 1er ordre. Le choix se porte en fait sur le Mont SaintLoup où le grand phare est édiié en 1836, étroitement associé à celui de Brescou qui devient un simple feu ixe et mis en service simultanément en 1836. Il est amélioré en 1860 (10 m de haut et 10 milles de portée). Le bâtiment actuel est reconstruit en 1900 par l’entreprise de travaux publics Auguste Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Aujourd’hui, la tourelle du vieux phare a perdu son couronnement. Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 43 Le dernier gardien de Brescou Du premier feu du 19e siècle, il subsiste une simple tourelle cylindre tronconique, en maçonnerie de basalte (à l’origine d’une hauteur de 18 m pour une portée de 3 lieues ou 9 milles) qui a perdu son couronnement en galerie encorbellée. Sur la terrasse circulaire de la grosse tour sud, vraisemblablement vestige du fort primitif, la tour cylindrique actuelle, peinte en blanc, est couronnée d’une galerie en encorbellement avec sa lanterne peinte en rouge. Elle mesure une douzaine de mètres de hauteur (22 m au-dessus de l’eau). [Y.C.] Technique Les deux tours : ancien phare en basalte et actuel au second plan. Tarnaud d’Agde avec Jules Aroles comme ingénieur ordinaire et Pierre Elie Guibal pour ingénieur en chef (mise en service le 1er mars 1901). Le fort, utilisé comme prison d’Etat, dépend de l’armée puis devient civil à partir de 1889. Il est désaffecté, à l’exception du feu toujours utilisé par le service des Phares et Balises. Les rochers volcaniques de Brescou, partie émergée de dangereux hauts-fonds, forment un petit îlot de 0,5 ha à quelques encablures au large du Cap d’Agde, à 3 milles marins de l’embouchure du leuve Hérault. 44 Le feu est blanc émettant des éclats rouges toutes les 5 secondes pour une portée de 13 milles pour le secteur blanc et 10 milles pour le rouge. En 1970, un aérogénérateur est mis en service : le feu devient à deux éclats toutes les 6 secondes, secteurs blanc et rouge. Comme toutes les lanternes avec leur équipement technique, celle-ci est coniée à une entreprise nationale (une plaque mentionne « Barbier et Ménard, constructeurs, Paris »). Propriétaire Commune. Protection Inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 10/05/1996 : le fort, y compris son phare. Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 1958, Julien Ricard prend naturellement sa succession car il connaît le métier, ayant exercé déjà comme auxiliaire durant les vacances de son prédécesseur. Il s’installe alors sur l’île avec sa femme Jeannine dans la maison du gardien durant presque deux ans. Leurs deux ils, Alain et Robert, sont coniés aux grands-parents tantôt à Marseillan, tantôt à Clermont-l’Hérault. La maison est grande mais spartiate : « trois chambres, deux cuisines, un poêle à charbon pour chauffer le tout en hiver, mais pas de douche. Le toit de la maison récupérait l’eau qui était entreposée dans la citerne et il y avait toujours le puits… Il y avait une pompe qui assurait l’approvisionnement en eau courante. Une fois par semaine A cette époque, le phare fonctionne à l’électricité fournie on allait au ravitaillement en par trois groupes électrogènes barque et on ramenait les vivres, des légumes, du pain et des batteries de secours mais surtout des biscottes automatiques. Néanmoins, parce qu’elles se conservent il faut encore qu’un homme reste sur place pour remonter plus longtemps ». Deux poules fournissent les œufs. Julien le mécanisme à la manivelle comme une pendule car c’est pêche aussi pour améliorer un poids suspendu qui assure l’ordinaire des repas : le mouvement de l’installation. langoustes (nombreuses à C’est un phare blanc côté mer l’époque), loups, muges, etc. Il n’y a que peu de distractions : et rouge côté terre. Le travail la radio pour correspondre du gardien consiste, outre avec Sète, parfois, durant l’été les vériications de l’engin, quelques touristes venant du à remplir les réservoirs des groupes et surtout à veiller sur Grau d’Agde ou la famille qui vient passer quelques jours. l’ampoule. Lorsque l’ancien « Le plus dur, c’était l’hiver, gardien, Jean Hirailles, il nous est arrivé de rester part pour le Grau d’Agde en Julien Ricard est patron pêcheur depuis 1941. En 1954, il s’établit au cap d’Agde, alors lieu isolé où habitent seulement cinq familles, sur la falaise au-dessus de la Plagette dans la « maison du passeur ». Il amène au gardien du phare, qui communique avec lui par mouvements de drapeaux, tout ce qui lui est nécessaire, le plus souvent les bidons de 50 litres de pétrole qu’il doit, après les avoir descendus du haut de la Plagette, mis dans la barque et débarqués sur l’îlot, faire rouler jusqu’au pied de la tour. « Il y avait heureusement un treuil à côté de l’embarcadère de Brescou qui aidait à remonter la barque sur des rails ain de pouvoir transvaser… ». Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 45 bloqués toute une semaine, mais je n’ai jamais langui… » déclare Jeannine. Au bout de deux années, le progrès arrive avec l’éclairage au gaz. La famille se réunit à nouveau dans la « maison du passeur » mais Julien reste le gardien du phare, car si le gaz est un progrès, il ne règle pas tout. Il faut être présent lors de la livraison du gaz par le bateauciterne de Marseille, toujours entretenir la machinerie et surtout surveiller l’allumage depuis la côte. « Il sufisait qu’un papillon entre dans la lanterne pour faire sauter le manchon d’éclairage ». Dans ce cas, et par n’importe quel temps, Julien prend son bateau et rejoint Brescou pour réparer. Ce « sacerdoce » dure jusqu’en 1989, lorsqu’il prend sa retraite au moment de l’automatisation complète du phare. Entre temps, avec ses enfants, il est retourné à son premier métier, passeur, mais, cette fois, de touristes. C’est en effet avec sa famille qu’il crée la première compagnie de bateaux de promenade avec le « Jacqueline », bateau qui emmenait, depuis le Cap d’Agde, ses trente-cinq passagers à la découverte de Brescou. D’après un article de Laurent Gheysens, service communication de la ville d’Agde, publié dans le journal de la ville d’Agde, n° 39. Hérault Agde Ancien phare du Mont Saint-Loup Ce site stratégique, constitué par l’embouchure du leuve côtier Hérault, est protégé depuis le 16e siècle par le fort et signalé par le feu de l’îlot Brescou ; le système de signalisation et de fortiication est complété, au 18e siècle, par un fanal en retrait de la côte, sur le cône basaltique du Mont Saint-Loup (tour inscrite au titre des monuments historiques). Ce complexe fortiié d’Agde est un des maillons du programme de surveillance des côtes établi par l’ingénieur Mareschal. Dans le programme de Rossel de 1825, instituant le réseau cohérent d’ensemble des 49 phares, figurent deux grands projets pour le Languedoc-Roussillon : le « Cap Béarn » (Cap Béar à Port-Vendres, reconstruit en 1905) et la « butte » ou le « mont » d’Agde, qui est le seul des deux subsistant de cette époque, bâtis sur le même modèle. Ils font partie des dix premiers grands phares d’atterrissage de 1er ordre de France. Décidée en 1829, la construction débute en 1832 avec un premier bâtiment, initialement implanté plus à l’ouest de l’ancien ermitage, et la tour en 1834, sous la direction de l’ingénieur Lemoyne, de Sète. Sur place, le conducteur des travaux se nomme Nègre ; il travaille avec l’entreprise adjudicataire Alexandre Armand ils et l’entrepreneur Corone pour la fourniture de la pierre de la carrière Notre-Dame. La mise en service a lieu le 1er mai 1836 comme l’indique la date portée au fronton. Lors de la mise en service du phare du Mont Saint-Clair à Sète en 1903, le phare du Mont Saint-Loup est transformé par la marine nationale en sémaphore (un premier sémaphore avait déjà été ajouté dans l’enceinte sud-ouest dès 1860 et un électro-sémaphore nouveau est adossé à l’extérieur de l’enceinte en contrebas, au sud). Désarmé, utilisé par les Affaires Maritimes à partir de 1970, rénové en 1988, il est fermé en 2000. Toujours propriété de la Marine, le lieu est utilisé par le service des Phares et Balises et par la police municipale. En retrait de la côte, le cône basaltique du Mont Saint-Loup domine de ses 115 m la plaine agathoise et l’embouchure de l’Hérault au niveau de l’actuelle cité balnéaire du Cap d’Agde. Alentour, le Conservatoire du littoral contrôle d’importantes zones humides autour de la réserve naturelle du Bagnas. Le phare du Mont Saint-Loup est un témoin du modèle des premiers grands phares de Méditerranée (comme Cap Camarat à Ramatuelle, Porquerolles et les phares corses ajoutés plus tard au programme initial ; c’était également le plan du premier phare du Cap Béar, disparu). 46 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Elévation et coupe (Archives Nationales) : noter la citerne en sous-sol. Carte postale, années 1900 : la lanterne domine encore la tour. Porte d’entrée avec la date de 1836 gravée dans le basalte du linteau. Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 47 salle des machines (la lanterne jadis équipée d’une lentille de Fresnel a disparu). Les coupoles plates appareillées séparant les niveaux de la tour sont traversées par une étroite vis d’escalier. L’architecture, d’une remarquable qualité de mise en œuvre, en est simple, fonctionnelle et solide avec des murs épais, talutés et des structures soulignées en pierre de taille de basalte (corniche, corbeaux, parapet, chaînages et arêtes des voûtes). [Y.C.] Technique A l’origine, le feu est tournant de minute en minute, alors équipé d’une lentille de Fresnel (disparue) ; sa portée était de 27 milles. Propriétaire Etat, marine nationale. Protection Inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 12 octobre 2011 : en totalité. Cette maison-phare est entourée d’une enceinte munie de fausses meurtrières, rappelant l’architecture fortiiée des redoutes militaires, qui cache en son centre la tour carrée massive, car élevée de seulement 14 m par rapport au sol mais dressée sur une hauteur dégagée, culminant à 126 m au-dessus du niveau de la mer. Le sous-sol abrite une citerne ; le rez-de-chaussée se divise symétriquement en huit salles, avec cuisine et réfectoire, voûtées sur croisées d’arêtes. Le hall ouvre sur un escalier menant à l’étage de la salle de veille, surmontée de la 48 Intérieur du hall central, chaînage en basalte. Tour carrée centrale : au-dessus, la cage en verre du dernier sémaphore (abandonné). Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 49 Hérault Sète Ancien phare, feu du môle Saint-Louis La ville de Sète est créée en 1666 à l’initiative de Colbert. Paul Riquet cherche un débouché sur la Méditerranée pour le Canal du Midi et Louis XIV a besoin d’établir une rade pour les galères royales et un port d’exportation des produits du Languedoc. Le Chevalier de Clerville identiie le Cap de Sète comme le site le plus approprié. Les travaux du port commencent par le môle SaintLouis avec les premiers enrochements : la jetée de 650 m protège l’entrée du vieux port, ferme le côté sud-ouest du nouveau bassin et un large chenal mène à l’étang de Thau. Une tour fanal ronde est élevée dès 1684 selon le projet de 1673 des ingénieurs Delafeuille et Morgues. Le môle, mal conçu, doit être reconstruit, surmonté d’un bastion avec batterie de canons. Cette première tour est rasée en 1690 puis reconstruite selon un projet d’Antoine Niquet, ingénieur du Roi : elle s’élève de 7 toises (environ 14 m) et est munie de lampes à huile logées dans une petite lanterne en métal. Vers 1720, une nouvelle tour, carrée, de 18 m de haut, est établie dans l’enceinte du fort : elle est accompagnée d’un corps de garde avec un magasin à poudre. Elle est remplacée par une autre tour carrée plus haute, en retrait, à l’angle de l’ancien corps de garde, dégageant la batterie à l’avant (subsistance d’un pont-levis) : la construction rustique en gros moellons de pierre de taille traverse les siècles ; elle est restaurée plusieurs fois, surélevée à 25 m. Le phare de 1771 est le premier en France à être équipé avec une haute lanterne vitrée comme un réverbère, abritant une lampe à huile, à rélecteurs en cuivre argenté, par la compagnie TourvilleSangrain (24 rélecteurs sur 3 rangs), qui obtient à cette époque la concession de tous les phares. En 1830, un phare à feu ixe de 25 m de hauteur, portant à 12 milles, est installé à l’extrémité orientale sur le musoir du môle. En 1861, une nouvelle tour est bâtie sur un projet de 1859, sur le modèle de Léonce Reynaud : elle est cylindrique, en pierre de taille de Cassis de 30 m de hauteur, exceptionnelle en France pour un tel feu, surélevée de huit marches sur une vaste esplanade circulaire. Elle est de style néo-classique avec un portail à fronton triangulaire (avec maison de gardien sur la jetée). La puissance de son feu est augmentée par une nouvelle lentille de Fresnel. Cette dernière tour est détruite le 19 août 1944 par fait de guerre. Un feu provisoire est mis en place dès 1945 mais sa reconstruction à l’identique dure de 1946 à 1948, à partir des fondations demeurées intactes en partant de la 3e assise (les autres bâtiments sont démolis). Le feu fonctionne dès 1949. Les auteurs en sont Favier, architecte, Deyme, ingénieur en chef, Molo ingénieur subdivisionnaire, R. G. de Loubresse, ingénieur d’arrondissement, avec pour entrepreneurs Guinet et Mazza Ricardo (exploitant des carrières de basalte de Saint-Thibéry mais qui va prospecter pour le matériau dans l’Isère, aux carrières de calcaire de Montalieu). Il s’agit aujourd’hui d’un simple feu d’entrée de port, circulaire et légèrement tronconique, la tour en pierre de taille mesure 6,50 m de diamètre à sa base et 4,75 m à son sommet qui culmine à 33,5 m (35,85 m au-dessus de la mer avec une focale à 29,8 m). Elle comprend une chambre de service et une chambre pour les appareils, plus la lanterne, desservies par un escalier hélicoïdal de quatre-vingt-quatorze marches avec rampe en ferronnerie de bronze et laiton (des établissements E. Borderel et Robert à Paris) poursuivie par une échelle de fonte. La galerie extérieure de 1 m de large avec balustrade est soutenue sur un encorbellement. L’ensemble, y compris l’escalier, est en pierre. La porte à l’ouest et le perron de huit marches sont idèlement copiés sur l’ancien phare néo-classique ; la tour est éclairée par quatorze fenêtres dont dix pour le fût et quatre pour la chambre à lambris de chêne. A l’étage, le plafond est en coupole plate en bois ; la salle de veille présente un plancher à lattes rayonnantes. [Y.C.] Entrée monumentale avec porte à fronton néoclassique daté 1948. Technique La première optique de 1861 est un feu ixe blanc puis, en 1902, le feu devient à 3 occultations toutes les 18 secondes ; la focale de 0,50 m est à secteur blanc et rouge ; en 1933, le feu passe à 3 occultations toutes les 15 secondes ; en 1948-49, le feu est à 4 éclats groupés normaux toutes les 12 secondes ; la lanterne rouge répond au standard Sautter-Harlé. L’optique est en verre taillé de focale 0,25 m sur support à entretoises métalliques. La portée est de 11 à 15 milles. Le combustible est successivement l’huile végétale (1861), puis minérale (vers 1875) avant de passer à la vapeur pétrole en 1908. En 1770, pour éviter que le vent n’éteigne les lammes des lampes à huile, une lanterne vitrée est ajoutée à la manière d’un réverbère. L’électriication date de 1933. Propriétaire Etat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, DIRM Méditerranée. Escalier avec rampe en ferronnerie. 50 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 51 Hérault Sète Phare du Mont Saint-Clair à l’ouest du port, dans l’alignement du môle Saint-Louis et du feu de l’épi oriental du briselames. Il faut attendre 1898 pour que le projet prenne forme et les années 1899 et 1900 pour que la décision de construire soit effectivement validée. Ce n’est qu’au début du 20e siècle que le phare Saint-Clair de 1er ordre remplace celui du Mont Saint-Loup d’Agde. Situé à mi-hauteur sur le lanc méridional du Mont Saint-Clair, en arrière du port de pêche et de commerce, juste à l’ouest de la citadelle Richelieu, au-dessus du cimetière marin, ce phare est l’œuvre de l’ingénieur ordinaire Abel Le port de Sète n’a été longtemps signalé que par le phare d’entrée de port du fort du môle Saint-Louis. En effet, ce secteur du littoral dépendait du grand phare principal d’atterrissage du Mont Saint-Loup d’Agde. En 1832, l’éclairage de Sète se limite à deux « réverbères » sur le Mont Saint-Clair et, en 1838, à deux fanaux complétant l’amer du fort Richelieu. Pourtant, le besoin se fait sentir dans la deuxième moitié du 19e siècle d’établir ici un phare d’atterrissage pour guider les navires, non seulement vers le port qui devient alors d’une importance majeure, mais encore pour tout ce littoral lagunaire de l’Hérault où seule émerge cette quasi-île au milieu de l’étang de Thau. Dès 1853, puis en 1878, paraissent les décrets décidant ce nouvel équipement La tour et ses bâtiments annexes sur la colline du Mont Saint-Clair. Coupe de la lanterne abritant la lentille et son mécanisme (Archives du service des Phares et Balises). Sommet de la tour avec la lanterne sur son couronnement à encorbellement. 52 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 53 Herrmann supervisé par Pierre Marie Elie Guibal comme ingénieur en chef, tous deux installés dans l’Hérault. L’entreprise Massol réalise d’abord les fondations puis, après le décès de ce dernier, la poursuite du chantier est attribuée à Paul Troglia. Les travaux durent trois ans : la lanterne est montée en avril 1902 et la mise en service date du 23 avril 1903. Le phare du môle Saint-Louis est alors modiié. La tour d’une hauteur de 23 m culmine à 92,70 m au-dessus du niveau de la mer (la focale est à 18,90 m). Elle est de type octogonal isolée, légèrement pyramidale, en maçonnerie de pierre de taille, y compris son soubassement, avec chaînes d’angle. L’encorbellement de la plate-forme est sur consoles assemblées par des arcs supportant une balustrade à dés ajourés (murette maçonnée en pierre) formant galerie en forme de chemin de ronde. L’épaisseur moyenne des murs est de 0,90 m réalisée par deux rangées de pierres posées en parement intérieur et extérieur. La lanterne est une cage de verre abritant le dispositif d’éclairage : la structure métallique, d’un diamètre de 4 m, est décorée de mules de lions et de feuilles d’acanthe, couverte d’une coupole en cuivre avec boule et piédouche ; le vitrage cylindrique est sur 3 niveaux. A l’arrière du phare, plusieurs bâtiments abritent le logement des 3 gardiens et des salles techniques. Plus loin, se trouvent les garages, le puits, le jardin, le terrain, le tout entouré d’une clôture à grille sur murette. [Y.C.] Détail de la couverture de la lanterne : mule de lion. Détail des moulures du socle de la tour. 54 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 55 Technique Phare d’atterrissage de 1er ordre, il possède une optique avec lentille de Fresnel à quatre faces de 2 m de hauteur, l’une des plus récentes de ce modèle et des plus importantes de France pour un phare à terre. L’optique est tournante sur bac à bain de mercure et alimentée à l’origine par le procédé de vapeur de pétrole puis, à partir de 1938, par deux moteurs électriques. Le caractère de son signal est un feu à un éclat blanc toutes les 5 secondes. Le phare signale l’entrée du port de Sète en alignement avec le môle Saint-Louis. La lampe de 1000 w est équipée d’un changeur de lampe pour une portée de 29 milles. Propriétaire Etat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, DIRM Méditerranée. Protection Intérieur de la cage de verre de la lanterne : on aperçoit les pentes du Mont Saint-Clair et le cordon littoral vers Agde. Inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 12 octobre 2011, en totalité, y compris les aménagements annexes. Espace intérieur de la lentille monumentale. 56 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 57 Gard Le Grau-du-Roi Ancien phare du grau d’Aigues-Mortes 1879. Il est donc appelé « phare d’AiguesMortes » dans les documents d’archives, et « vieux phare » par les habitants du Grau. Situé en ville à l’extrémité du canal de Beaucaire à Aigues-Mortes, destiné à remplacer le feu allumé depuis le 13e siècle sur la tour de Constance, il fonctionne pendant quarante ans avant d’être remplacé à son tour par celui de l’Espiguette. Vendu par l’Etat à la commune en 2005, il sert toujours d’amer aux navigateurs et fait partie du paysage architectural du port et de la ville. Il est exceptionnel que ce phare et sa lanterne, sans usage depuis 140 ans, nous soient parvenus. Le Grau-du-Roi possède deux phares. En effet, la côte s’est déformée et comblée au point que le premier, situé à l’entrée du chenal d’AiguesMortes, trop lointain et trop bas, est rapidement ineficace et que le service central des Phares et Balises décide de le remplacer par un phare plus visible à la pointe de l’Espiguette. Le vieux phare du Grau-du Roi, en activité de 1829 à 1869, est le phare du port d’AiguesMortes, la commune du Grau-du-Roi n’ayant été détachée de celle d’Aigues-Mortes qu’en 58 Dès 1820, au moment où le tout nouveau service des Phares se forme à Paris et répond aux sollicitations des armateurs, c’est la préfecture du Gard qui prend l’initiative de faire construire un phare. Pour répondre aux plaintes des navigateurs sur le mauvais éclairage du port d’Aigues-Mortes, le préfet sollicite François Stanislas Victor Grangent, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées du Gard. En 1825, l’affaire se concrétise : le plan dressé par l’ingénieur ordinaire Pierre Courant et validé par Grangent, est modiié et approuvé par le directeur général des Ponts et Chaussées Becquey, le 25 février 1825. L’adjudication a lieu le 29 novembre 1825 au proit d’un entrepreneur nîmois, Michel Astier pour 30 700 francs. Les travaux, lents et dificiles, durent 3 ans. L’appareil d’éclairage est installé le 29 novembre 1828, le phare allumé le 1er mars 1829. En 1829, Astier se plaint d’un surcoût important du fait que la taille des pierres, non connue au moment de l’adjudication, a entraîné de grandes dificultés : le maniement des blocs a exigé plus d’ouvriers que prévu, le transport l’a obligé à construire un char à 4 roues qui a par ailleurs endommagé les routes de Saint-Laurent-d’Aigouze, qu’il a dû réparer à la demande Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon du maire. Il compare la qualité de la taille exécutée à celle des pierres utilisées au même moment pour la construction des fontaines de l’Esplanade et de la place de la Couronne de Nîmes. Il se plaint aussi « des maladies qui ont régné dans le pays pendant toute la durée des travaux » l’obligeant « pour empêcher que le chantier devenu semblable à un hôpital ne demeura totalement désert à augmenter exorbitamment le prix des journées pour y attirer de nouveaux ouvriers ». Des ajustements se font en cours de chantier entre ingénieurs locaux et service central : ainsi l’ingénieur Courant n’avait pas prévu le creusement d’une goulotte pour le passage du contrepoids dans l’épaisseur de la tour. Le 18 août 1928, Grangent insiste pour recevoir de Paris la colonne en fonte avec ses accessoires et des instructions pour la mettre en place avant la construction de la voûte de la chambre de service : plutôt que de monter la colonne extérieurement, il faut construire la voûte en perçant à la clef un trou cylindrique de 0,20 m : « Le pavé au-dessus de la voûte en brique de la chambre de service sera établi à 3,17 m en contrebas au-dessous de la deuxième entretoise de la lanterne, vous pourrez disposer votre appareil en conséquence. Les cercles intérieurs des 3 barres de fer verticales formant le support de la clef de la voûte en brique laisseront dans leur milieu un vide circulaire de 0,18. » Cette construction prestigieuse a attiré les curieux avant même la in du chantier. Aussi, l’ingénieur des Ponts et Chaussées a dû soumettre l’accès à une autorisation oficielle : « aux capitaines de navires, aux savants et aux étrangers de distinction …refusée formellement aux désœuvrés ou curieux soit de la ville d’Aiguesmortes ou des environs, afin de prévenir la rupture des carreaux de la lanterne et le dérangement de l’appareil très compliqué de cet éclairage. » Dessin de 1829 (Archives Nationales). Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 59 a demandé qu’elle comprenne un étage supplémentaire. Le diamètre de la tour est de 4 m, elle est occupée par un escalier en vis en pierre, de 2 m 20 de diamètre, à noyau plein, donnant accès à la chambre de l’appareil. La lanterne a été faite à Paris et fournie avec l’optique, elle est coiffée d’un toit en forme de dôme. Si les vitres sont cassées aujourd’hui, elle conserve sa structure métallique scellée dans la maçonnerie. Depuis la lanterne, on accède à une plate-forme circulaire extérieure de 4 m 50 de diamètre, entourée d’un garde-corps métallique. Coupe de la lanterne par Charles Dombres, 1852 (Archives Nationales). En 1831, le marché de la construction de la couverture en cuivre rouge de la lanterne est attribué. En 1853, sur un projet de Charles Dombres, le logement des gardiens est agrandi par la construction, à l’arrière, de la maison d’enceinte, d’une citerne et de deux cuisines entre le mur ouest et le mur de soutènement des dunes (sur la plage actuelle). En 1854, le service central des Phares projette de remplacer la lanterne de 1828 par une autre en bronze avec têtes de lion, modèle fréquent (à Sète et Port-Vendres) ; cependant en 1860, si l’on renouvelle l’appareil optique, fourni par Henry Lepaute, on ne change pas la lanterne qui est toujours en place aujourd’hui. Une fois désarmé, le phare continue à abriter les familles de gardiens dont les conditions de vie à la pointe de l’Espiguette étaient particulièrement dificiles en hiver. En 1946, le service des Phares et Balises accède à la demande de la mairie d’utiliser les dépendances de l’ancien phare 60 pour abriter le canot de sauvetage et à celle du syndic des gens de mer pour la concession de la cour sud pour établir une fosse à carburant. Aujourd’hui, le phare n’est plus occupé et la ville, propriétaire, a le projet d’en faire un lieu ouvert au public. Le phare est composé d’une tour construite à l’intérieur d’un bâtiment comportant logement et magasin. La tour cylindrique s’élève au centre d’un soubassement massif. Ce soubassement, appelé « maison d’enceinte », est constitué d’un rez-de-chaussée saillant de 3 m 40, dont les quatre façades forment un pignon triangulaire. L’ensemble est construit en grand appareil de pierre de taille de Roquemaillère (carrière située à Nîmes). Les oculi, percés ultérieurement (ils ne sont pas portés sur les dessins de 1825), ont entraîné des désordres dans la maçonnerie, en particulier sur la façade sur le quai. Les toitures sont à deux pentes reliées par des noues, en tuiles canal. La hauteur de l’ouvrage est de 19 m. La tour est éclairée par quatre fenêtres. Dans le projet de Courant, son élévation n’en comptait que 3, mais le service des Phares Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Propriétaire Commune. Protection Classé au titre des monuments historiques par arrêté du 9 octobre 2012 : la tour en totalité, les façades et les toitures du soubassement carré, le terrain d’assiette à l’exclusion des agrandissements des logements situés à l’ouest et des constructions situées dans les deux cours. Le soubassement d’inspiration néo-classique avec ses frontons triangulaires absolument symétriques et la tour qui s’élève au-dessus, sommée d’une lanterne à l’anglaise, confèrent à ce phare une élégance Ancien Régime, qui le rapproche davantage des constructions néo-classiques que des modèles mis en place sur le plan national par le service central des Phares. Nîmes, toute proche, connaît au début du 19e siècle une importante activité architecturale revisitant l’Antiquité. Grangent, ingénieur des Ponts, qui a publié avec Durand une Description des monuments antiques de Nîmes en 1819, est à la fois aménageur de quais, routes et canaux (Beaucaire, Aigues-Mortes) et acteur du néoclassicisme gardois avec la construction du palais de Justice de Durand, le dégagement de la Maison Carrée et du Temple de Diane. Le programme technique du phare est traité avec un soin esthétique dans la composition et la mise en œuvre de la pierre de taille, qui témoigne de la vitalité de la culture antique de la région, qui cèdera tardivement devant l’éclectisme historiciste général. [M.F.] Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 61 Gard Le Grau-du-Roi Phare de l’Espiguette Isolé, à la pointe de l’Espiguette, en petite Camargue, le phare de l’Espiguette est construit pour remplacer celui de l’entrée du grau d’Aigues-Mortes. En effet, en 40 ans, l’ensablement très important du golfe d’Aigues-Mortes a rendu ineficace le phare placé à l’entrée du port. La commission des phares du 14 avril 1860 prescrit l’établissement d’un phare de 3e ordre à la pointe de l’Espiguette. Le 16 mai 1860, une note est envoyée sur les dispositions à adopter avec « à titre de document une feuille de dessin qui représente un phare de 3e ordre récemment construit à la pointe de Grave et dont les dispositions paraissent très convenables sous tous rapports ». C’est l’ingénieur ordinaire des Ponts et Chaussées à Nîmes, Charles Lenthéric, qui établit un premier projet le 21 août 1861, approuvé par le préfet le 15 juin 1865. L’adjudication a lieu le 13 juillet 1865, la dépense prévue, 133 000 francs, n’est pas imputée sur le crédit spécial des phares mais prise par décret. L’entrepreneur est Charles Dupuy d’Aigues-Mortes, qui s’était déjà proposé 40 ans plus tôt pour construire le premier phare du Grau. Les conditions du chantier sont extrêmement dificiles et les déboires de Dupuy font l’objet de nombreux documents conservés aux archives. Il s’était engagé à établir un chemin de fer de 8 km sur la plage pour l’acheminement des matériaux, mais l’ensablement ou l’inondation selon les saisons en ont rendu la réalisation impossible. Finalement, il fait venir les matériaux par bateau, des gabarres tirées par des chevaux. Pendant ce temps, le service est obligé de commander une embarcation (une yole « le Tamaris ») à Toulon pour assurer la surveillance des travaux. Comme cela a été le cas au vieux phare, des modiications du projet sont apportées en cours de chantier. Début 1866, la hauteur de la tour doit être 62 augmentée de 4 m 32 ; en février 1867, alors que le parement intérieur de la tour devait être recouvert de deux couches de peinture à l’huile, il est décidé de piquer les moellons à la boucharde ine : « le smillage ordinaire des parements vus des moellons circulaires pour l’intérieur de la tour transformés et convertis en parements vus de petite pierre de taille de choix, par assises bien réglées, avec arêtes vives, ciselures polies au ciseau et bouchardés très fin ». Le 4 août 1868, l’ingénieur Lenthéric signale que « des maladies occasionnées par l’excessive chaleur et surtout par le manque d’eau douce sur la pointe de l’Espiguette ont complètement désorganisé le chantier du phare pendant la majeure partie de la campagne actuelle ». 25 ouvriers sont nécessaires dont 12 tailleurs de pierre. En octobre 1868, le bâtiment est prêt à recevoir les éléments proprement liés à l’éclairage, qui arrivent de Paris : les échelles métalliques sont fournies par Rigolet, les menuiseries de la chambre de veille par Alaine, le revêtement en marbre et dallage de la chambre de la lanterne par Duchesne. Les travaux sont terminés in 1868, le phare allumé le 1er janvier 1869. Dupuy fait appel à l’administration pour dédommagements à la suite des dificultés du chantier, faisant imprimer une brochure de 166 pages Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Photographies prises par Charles Lenthéric pendant les travaux et à leur achèvement (Ecole Nationale des Ponts et Chaussées). Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 63 pour sa défense contre l’Etat en 1878. Bien qu’il afirme être ruiné par la construction de cet édiice qui a demandé un travail considérable, il n’obtient qu’une faible indemnité. Par ailleurs, « la situation spéciale du phare de l’Espiguette qui n’est relié par aucun chemin à la voirie vicinale et est séparé du village du Grau-duRoi par une plage mobile et fréquemment submergée de plus de 6 km d’étendue » ne facilite pas le service des gardiens : en 1891, le gardien Achille Labrousse demande une indemnité pour loger ses enfants au Grau-du-Roi pendant la période scolaire hivernale car l’accès est le plus souvent impossible. Dès 1872, le service s’inquiète de l’ensablement qui nuit à l’optique, abîme les maçonneries de la tour et envahit la cour et les logements. La construction d’une dune de défense est préconisée : palissade et plantation de tamaris devant faire barrage au vent au nord du phare. Les conditions de l’entretien du phare sont particulièrement dificiles : dès 1885, les toitures des logements sont à refaire. Pourtant, la grandeur de l’entreprise et la réussite technique et esthétique de la construction sont manifestes : en 1882, pour la reconstruction du sémaphore voisin, la commission chargée d’en déterminer l’emplacement estime que placé au nord-est du phare « en ce qui concerne l’effet architectural, situé à 90 m du phare, le sémaphore ne pourrait nuire à l’effet de ce bel édifice ». En 1907, le progrès entraîne la transformation de l’éclairage : en vertu de la décision ministérielle du 19 février 1906, on installe un appareil à éclats groupés par 3 avec brûleur à incandescence par la vapeur de pétrole du fournisseur oficiel parisien Barbier Bénard et Turenne. Le vitrage polygonal de la lanterne est remplacé par un vitrage circulaire avec pièces en bronze. Le 30 avril 1912, un incendie dans la lanterne dû à un défaut d’entretien du gardien Palanque endommage l’optique : réparée par Barbier Besnard et Turenne les constructeurs, elle n’est remontée que le 13 janvier 1913. Toujours en 1912, est installé le téléphone dans le phare pour faciliter l’alerte en cas de naufrage en mer. Entre 1876 et 1883, des travaux sont engagés pour lutter contre l’ensablement en créant une dune artiicielle. En 1924, l’ensablement étant toujours préoccupant, un rapport est demandé à Max Nègre, inspecteur des eaux et forêts connu pour le reboisement des Cévennes, qui constate que la dune ixée par la plantation de gourbets, oliviers de bohème, blanquettes et tamaris, continue de s’élever (de 10 m depuis 1872). Il propose la création de dunes entre le Coupe de la tour, une citerne est située sous les logements (Archives départementales du Gard). 64 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Sol du vestibule. Etude du revêtement en marbre de la chambre de la lanterne (Archives Nationales). Escalier à rampe en fer forgé avec main courante en noyer. Grau et le phare et leur ixation et boisement par semis à la volée de graines de pins maritimes. D’après lui, seul Charles Flahaut, professeur à l’Université, peut préparer ce travail de boisement. En 1926, ces travaux sont exécutés. L’ensablement continue cependant et le phare, construit à 150 m du rivage, se situe maintenant à 1500 m de la mer. Pendant la Seconde Guerre mondiale, 30 soldats et 2 sous-oficiers allemands sont installés dans les locaux disponibles du phare, les gardiens conservant leur logement. En août 1944, les Allemands procèdent au démontage complet de la lanterne et des appareils, emportant le paratonnerre, la coupole avec ses cinq boules d’aération, les gueules de lions d’écoulement des eaux et les 30 entretoises en laiton. Mais grâce au gardien, l’optique, évacuée du phare en temps utile, est restée intacte. En 1946 pour le rétablissement déinitif du phare, une nouvelle lanterne est installée. Le phare est électriié en 1964 et automatisé en 1975. Le phare est composé d’un ensemble de bâtiments protégé par un mur d’enceinte : la tour et le magasin encadrés par les logements des gardiens, et un bâtiment en appentis au sudest qui délimite une cour. Haute de 27 m, la tour pyramidale à base carrée est construite en maçonnerie de pierre apparente (moellons smillés ou rustiques de Frontignan) avec chaînes d’angle en pierre de taille. La base de la tour a un caractère très majestueux : haute de 2 m 25, composée d’un socle et de moulures elle s’avance fortement en saillie par rapport à l’élévation. Un escalier extérieur en pierre de Roquemaillère donne accès à un vestibule, 3 marches permettent de descendre dans le magasin situé en prolongement de celui-ci. L’attention est portée sur le sol orné de l’étoile du service des Phares et Balises, dessinée par la bichromie des dalles de marbre. Sur la droite, s’élève l’escalier de la tour, construit en pierre de Barutel et remarquablement appareillé. Il était recouvert, à l’origine, d’un « tapis chemin » de 45 m de long. Les murs sont en pierre taillée en assises bien réglées. En haut de l’escalier, on accède à la chambre de veille par une première échelle de meunier en fonte. La chambre de veille repose sur une voûte en pierre de taille avec une calotte sphérique de 3 m de diamètre, Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 65 couverte d’une voûte percée en son centre pour accueillir l’appareil d’éclairage. Dans cette chambre, où le gardien s’installe la nuit, une échancrure est aménagée dans la paroi ouest pour un lit. Une deuxième échelle de meunier métallique permet de monter à la chambre de la lanterne. La partie supérieure de la tour est traitée en encorbellement, dans le goût néomédiéval, avec un entablement composé de 20 consoles, surmontées d’une frise plate formant des petits arcs. La terrasse est entourée d’un garde-corps en pierre de taille de 90 cm de haut, décoré aux angles de motifs en pomme de pin. La lanterne cylindrique primitive, élevée sur une murette maçonnée, de 2 m 40 de diamètre, était à 10 pans à 2 niveaux de vitrage. Elle a été remplacée en 1907 par un vitrage circulaire avec pièces de bronze, emportées par les Allemands en 1944. De part et d’autre de la tour, se trouvent les logements pour deux gardiens. Chacun comprend deux chambres et une cuisine, donnant sur la cour. Celle-ci, fermée par un mur haut de 3 m 85 et par un bâtiment rectangulaire parallèle à l’édiice principal, est dotée d’un puits central et d’un pavage très soigné en moellons taillés, organisé à 4 pans se déversant vers des oriices d’évacuation alimentant la citerne souterraine par des conduites en poterie. Cette citerne recouverte de carreaux vernissés se trouve sous le magasin et sur toute la largeur du bâtiment, légèrement en avant des logements. L’ensemble des bâtiments est orné d’une corniche moulurée en pierre de taille de Frontignan. Technique D’une portée de 24 milles, le phare est actuellement équipé d’une optique BBT et d’une cuve Sautter Harlé. Son feu est tournant à 3 éclats blancs groupés toutes les 12 secondes. En 1932, le haut du phare est peint en noir pour améliorer sa visibilité de jour. Propriétaire Etat, Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, DIRM Méditerranée. Protection [M.F.] La cour, derrière le puits, l’entrée du magasin. A l’intérieur de l’optique : l’ampoule et le manchon d’éclairage. 66 Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon Classé au titre des monuments historiques par arrêté du 9 octobre 2012 : la tour (en totalité), logements et bâtiments annexes (façades et toitures), murs de clôture, cour avec pavage et puits, et terrain d’assiette. Notices sur les phares du Languedoc-Roussillon 67 La vie d’un gardien de phare au début du 19e siècle Instruction pour le service des gardiens du phare du Grau d’Aigues-Mortes établie en 1834 observera d’enlever les anciennes huiles avant d’en mettre de nouvelles. Les huiles à employer sont celles de pieds de bœuf. Les axes et pivots de la machine de rotation doivent être souvent visités et huilés. L’on doit apporter la même attention dans ceux des poulies de moulage. La rainure en bois sous la Quand les tâches sont trop machine de rotation doit être invétérées pour disparaître bien savonnée. par l’effet d’un simple linge, l’on y passera un peu d’esprit L’on ne doit pas oublier le matin, aussitôt l’extinction du de vin ou d’essence de feu, de garnir intérieurement térébenthine. Ces lentilles la lanterne de ses rideaux. et ces miroirs doivent être nettoyés tous les mois avec le La lampe qui éclaire rouge d’Angleterre. A cet effet l’appareil et d’après le système de Carcel est à deux on délaie le rouge dans de l’eau bien propre et puis avec mèches concentriques : un pinceau lexible on l’étend elle doit être placée bien au légèrement sur la surface du centre de l’appareil et à 20 millimètres en contrebas du verre ; quand il commence plan horizontal passant par à sécher l’on frotte la pièce le milieu des lentilles. avec une pièce de peau de chamois ; et enin l’on termine Les lignes indiquant ce niveau ont été tracées, il sufit de l’opération en frottant toutes tendre 2 icelles formant un les pièces avec une autre peau de chamois parfaitement diamètre dont la rencontre donne le centre du bec : centre séchée d’avance. que l’on obtient au moyen des écrous et contre écrous du pied. Les vitres de la lanterne La lampe étant mue par un doivent être tenues dans un mouvement d’horlogerie, état de propreté complet et les axes et pivots de ce surtout après les pluies. mécanisme devront, comme Les axes des galets doivent ceux de la machine de être graissés très souvent rotation, être soigneusement ainsi que les cercles sur nettoyés et huilés. lesquels ils frottent. On « Les glaces courbes et les lentilles ixes et mobiles étant invariablement posées par le conducteur des Ponts et Chaussées ne doivent pas être déplacées. Ces lentilles et ces miroirs doivent êtres époussetés et nettoyés avec des linges propres et presque neufs tous les jours. 68 Les soupapes et valvules changées au besoin. Les mèches devront être soigneusement mouchées et les conduits d’air bien nettoyés. Après l’extinction du feu, la cheminée doit être enveloppée parfaitement dans un linge bien sec et on doit avoir la précaution, quand elle est froide, de la bien essuyer, et observer dans toutes ces opérations de n’employer que des linges dépourvus d’humidité. Les huiles qui ont servi doivent être vidées dans un vase particulier, et on les laisse reposer pendant 12 heures ; puis on les jette sur le iltre en réservant le dépôt pour les lampes de nuit disposées pour les allées et venues des gardiens. L’on observera de nettoyer tous les 4 jours le tuyau aspirateur de la lampe, ainsi que le seau. La lampe hors de service doit être munie de son couvercle. Pour le meilleur effet possible la lampe doit monter, non en activité, 2 livres d’huile à l’heure. La hauteur du coude de la cheminée ayant une inluence sensible sur la lamme, la hauteur de 6 ou 7 cm audessus du niveau du bec a été observée la meilleure. Phares du Languedoc-Roussillon La mèche en activité doit dépasser le niveau du bec de 7 mm. Les mèches une fois montées, on ne doit pas y toucher de la nuit ; l’obturateur seul doit vers les dernières heures de la nuit, faire activer la lamme. Dans le cas où son action est nulle, il faut alors moucher. Il doit toujours se trouver dans le phare et à proximité des gardiens, une lampe toute prête avec de l’huile ainsi qu’une cheminée de rechange. Une veilleuse doit être constamment allumée dans le soubassement. La lampe d’allumage doit toujours être prête au besoin. La grande machine de rotation doit être réglée pour faire faire à l’appareil tournant 5 révolutions par heure. Au lever du soleil, la lanterne doit être garnie de ses rideaux. La lampe de l’appareil sera changée tous les 8 jours, et remplacée par une de celles de rechange. Service de jour Le gardien de service pour le jour devra commencer par vider les huiles de la lampe qui a servi la nuit, et les remplacer par des huiles neuves ou iltrées. Moucher les mèches et s’assurer s’il y en a encore en sufisance pour la nuit, nettoyer la lampe avec les linges disposés exprès et ne laisser aucune ordure qui pourrait nuire au jeu des pompes. S’assurer si les conduits d’air du bec sont propres . La lampe ainsi nettoyée doit être recouverte jusqu’au soir. La cheminée parfaitement nettoyée et munie de son obturateur doit être enveloppée dans un linge et se placer à proximité de la lampe. Le gardien de service époussettera les lentilles et les miroirs avec un plumeau disposé pour cet usage. Ces miroirs et lentilles seront ensuite essuyés avec un linge bien propre et ne laissant pas de ilandres. Si quelques tâches sont trop invétérées l’on emploiera l’esprit de vin ou l’essence de térébenthine pour les enlever. Les vitraux de la lanterne doivent enduite être nettoyés. La table de service, la galerie de service et la chambre du soubassement ainsi que les escaliers doivent être balayés tous les jours. Il devra ensuite préparer les lampes d’allumage ainsi que le veilleuse. Ces opérations terminées, la trappe du soubassement Phares du Languedoc-Roussillon 69 devra être fermée ainsi que la porte d’entrée de la tour dont la clef restera dans la chambre du chef gardien. Service de nuit La lampe devra être allumée en toute saison une demiheure avant le coucher du soleil et éteinte à son lever. Le gardien aura toujours à sa proximité une veilleuse allumée toute la nuit ; et sa lampe d’allumage ainsi que les objets nécessaires pour moucher prêts au besoin. Une cheminée et une lampe seront à sa disposition en cas d’accident. Il devra rester dans la chambre du soubassement pendant le 1er quart jusqu’à ce que sa lampe soit bien en combustion ; après quoi il peut redescendre en bas, ayant toujours le soin de monter d’heure en heure pendant le 1er quart et plus souvent pendant le dernier. En cas d’accidents majeurs pendant la nuit, qui demanderaient une réparation laissant le phare dans l’obscurité pendant une heure ou plus, le gardien de quart les notera ainsi que l’heure à laquelle ils auront eu lieu. Dans des cas semblables, les gardiens doivent se porter un mutuel secours pour y parer promptement. » Témoignage sur l’évolution du métier de gardien de phare Laurent Simons, ancien contrôleur, technicien supérieur du développement durable, DIRM MED/DSM/SPB/Ouest Méditerranée/Sète « Depuis l’Antiquité, les phares éclairent les côtes de France et du monde. Il y a toujours eu des gardiens pour veiller et entretenir cette lumière dans la nuit. Elle était l’exemple même du service gratuit et collectif de la solidarité d’hommes qui veillent sur d’autres hommes totalement inconnus. Dans les années 1990 les phares s’automatisent, s’équipent d’ordinateurs, de calculateurs, de panneaux solaires, les lampes sont remplacées par des diodes. Ils sont à la pointe de l’innovation scientiique et technique. Les métiers aussi ont évolué : les gardiens ont été débarqués pour devenir électromécaniciens de phares et de nos jours contrôleurs des phares et balises, désormais techniciens supérieurs. Ils sont regroupés dans des centres d’exploitations et d’interventions (CEI) disséminés le long des côtes françaises. Ces agents ont en charge un certain nombre d’établissements de signalisation maritime (ESM) dont ils assurent la maintenance préventive et curative sur terre comme sur mer. Leurs missions principales consistent à visiter chaque ESM au moins deux fois par an, à contrôler la partie active (batteries, lampes, panneaux solaires) mais également la partie passive (génie civil, peinture, marque de jour). Certains de ces établissements sont équipés de balises de télécontrôle qui permettent à distance d’avoir un état général des feux, ce qui aide souvent à anticiper les pannes. Ils effectuent aussi les modernisations et le dépannage. Sur ce dernier point, ils assurent un service d’astreinte et sont en veille 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Ils diffusent les avis urgents aux navigateurs et interviennent dès que possible. Ils ont en charge et remplissent plusieurs bases de données dont ALADIN (Administration littorale des aides et des informations nautiques) et pour terminer, ils assurent le suivi et la gestion du patrimoine des Phares et Balises. Les tâches n’ont cessé d’évoluer avec le temps et la signalisation maritime est un élément majeur et indissociable de la sécurité maritime. Elle est complémentaire des nouvelles technologies telles que le GPS permettant à tous les marins du monde de naviguer en toute sécurité. » Vue depuis la galerie du feu du Fort Brescou, équipé de panneaux solaires. Balise au large du Cap d’Agde : opération d’entretien. Feu de la pointe des Onglous, balisant le débouché du Canal du Midi dans l’étang de Thau, Marseillan. Phares du Languedoc-Roussillon 71 Notices biographiques Beautemps-Beaupré Charles François (1766-1854) Ingénieur hydrographe et cartographe, membre de l’Académie des sciences et du Bureau des longitudes, « père » de l’hydrographie moderne, chargé du levé des côtes et de la reconnaissance du littoral français, membre de la commission des phares dès 1826, il aide à positionner au mieux les ouvrages. Son buste igure dans les phares importants à côté de celui de Fresnel. Becquey de Beaupré François Louis Marie (1760-1849) Homme politique et haut fonctionnaire français, il est directeur des Ponts et Chaussées et des Mines de 1817 à 1830. Il met en application le « Plan Becquey » et donne une vive impulsion aux travaux de navigation intérieure et à l’exécution des canaux. Charles X, transformant la Direction des Ponts et Chaussées en ministère à part entière, le nomme Ministre d’Etat. Fresnel Augustin Jean (1788-1827) En 1809, ingénieur aux Ponts et Chaussées, il travaille sur les interférences lumineuses. En 1819, il est nommé à la commission des Phares et Balises. Il est considéré comme le fondateur de l’optique moderne (théorie ondulatoire de la lumière). Il invente la lentille à échelons, révolutionnant ainsi la signalisation maritime : une lentille de taille sufisante étant impossible à fabriquer, il la découpe en plusieurs échelons assemblés. Ce système combine la rélexion et la réfraction de la lumière. Le premier appareil lenticulaire est installé en 1823 à Cordouan. En 1825, pour mieux différencier les signaux émis par les phares, il crée le feu ixe varié par des éclats. A sa mort en 1827, son frère Léonor poursuit son œuvre. Reynaud Léonce (1803-1880) Architecte et ingénieur, directeur de l’Ecole des Ponts et Chaussées, inspecteur général des phares, directeur du service des Phares et Balises de 1846 à 1878, il supervise la construction de nombreux phares français. Rossel Elisabeth Paul Edouard de (1765-1829) Astronome et contre-amiral, membre de l’Académie des sciences en 1811, nommé au Bureau des longitudes, puis directeur du dépôt de la Marine, il est l’auteur du fameux rapport de la commission des Phares de 1825. 72 Ingénieurs ayant travaillé sur les phares du Languedoc-Roussillon Aroles Jules Jacques (1864) Ingénieur ordinaire, actif jusqu’en 1926, pour le phare du fort Brescou. Bourdelles Léon (1836-1899) Ingénieur polytechnicien, puis ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, construction du phare des grands cardinaux entre 1877 et 1879, directeur du service des Phares et Balises de 1893 à 1899, il a dessiné le feu métallique de Port-Vendres. Courant Pierre (1790-1838) Elève à l’ecole polytechnique en 1809, à l’école des Ponts et Chaussées en 1811, en poste à Aubenas de 1817 à 1819, à Chateaugontier (Mayenne) en 1820, ingénieur ordinaire des Ponts et Chaussées à Nîmes de 1822 à 1826, ingénieur de 1re classe à Rouen de 1827 à 1833, a dessiné le phare du Grau-du-Roi. Garau Marcel (1871-1939) Elève ingénieur des Ponts et Chaussées en 1893, ingénieur ordinaire en 1897 du chemin de fer de l’Aude, ingénieur en chef de la construction des lignes nouvelles à la Compagnie du Midi, il a construit le phare du Cap Béar. Grangent Victor (1768-1843) Elève de l’école des Ponts et Chaussées de Montpellier en 1783, sous-ingénieur de la province du Languedoc en 1786, ingénieur ordinaire dans l’Aude, le Gers, puis dans le Gard en 1795, ingénieur en chef puis directeur des Ponts et Chaussées du Gard de 1827 à 1832. Il a travaillé avec Charles-Etienne Durand sur de nombreux projets nîmois. Il dirige les travaux du canal de Beaucaire à Aigues-Mortes, de ponts sur l’Hérault, le Gardon et le Rhône, de digues, d’amélioration du port d’Aigues-Mortes. Il a construit le premier phare du Grau-du-Roi. Joly Georges de (1864-1919) Lentheric Charles Pierre Marie (1837-1914) Ingénieur polytechnicien, ingénieur des Ponts et Chaussées, il réalise la jetée de l’île de Groix, Port Navalo, la machinerie du phare de Belle-Ile. Nommé oficier d’académie en 1895 pour ses œuvres architecturales, il entre au service des Phares et Balises, se consacre à la construction de phares (Ouistreham, Ile Vierge) et participe à la mise en place de machines motrices pour les phares électriques (Calais, GrisNez), il intervient pour le Cap Béar. Elève de l’école polytechnique à 19 ans, ingénieur des Ponts et Chaussées en 1862, il est envoyé à Nîmes où il étudie plus spécialement le littoral de la Méditerranée. Il construit le phare de l’Espiguette, est nommé ingénieur en chef de 2e classe en 1880 et attaché aux travaux du Canal du Rhône à Sète. Il a publié de nombreux ouvrages dont Les villes mortes du Golfe de Lyon, paru en 1876, réédité 8 fois jusqu’à 1910. Bustes de Augustin Fresnel et de Charles Beautemps-Beaupré (objets mobiliers inscrits au titre des monuments historiques) à l’intérieur de la tour du phare Saint-Clair. Guibal Pierre Marie Elie (1854-1914) Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées en 1876 à Montpellier, il a construit le phare du Mont Saint-Clair à Sète. Herrmann Abel (1865-1941) Ingénieur polytechnicien, puis ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, installé à Sète, mort à Paris en 1941, il a construit le phare du Mont Saint-Clair à Sète. 73 Bibliographie et sources Fresnel (Augustin), Mémoire sur un nouveau système d’éclairage des phares lu à l’Académie des sciences, le 29 juillet 1822. Paris : Imprimerie royale, 1822. Fresnel (Léonor), L. Sautter et Cie, constructeurs de phares lenticulaires... Instruction donnée par l’administration des phares de France, pour le service des phares lenticulaires. Belleville : imprimerie de Galban, 1853. Reynaud (Léonce), Mémoire sur l’éclairage et le balisage des côtes de France. Paris : Imprimerie impériale, 1864. Ministère des travaux publics. Ponts et chaussées. Phares et balises, Etat de l’éclairage des côtes de France. Paris : Imp. Nationale, publications annuelles. Allard (Émile), Les Phares, histoire, construction, éclairage. Paris : J. Rothschild, 1889 Fichou (Jean-Christophe), Le Henaff (Noël), Mevel (Xavier), Phares : histoire du balisage et de l’éclairage des côtes de France. Douarnenez, Chasse-marée-ArMen, 1999. Guigueno (Vincent), Au service des phares : la signalisation maritime en France XIXe-XXe siècles, préf. Antoine Picon, Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2001. Guigueno (Vincent), Les phares : Gardiens des côtes de France, Découvertes Gallimard, 2012. Dreyer (Francis), Les phares : pour un programme de protection des phares en France, Monumental, 2003, p. 48-53. Dreyer (Francis), « Phares en péril ? Vers un programme de valorisation », dans Chasse-Marée, mai 2004, n° 169, p. 33-41. Dreyer (Francis), Fichou (Jean-Christophe), Desachy (Margot) collab., L’histoire de tous les phares de France. Rennes, éd. Ouest-France, 2005. Dossier Patrimoine maritime, Monumental, 2003, pp. 7-93. Laulhère-Vigneau (Catherine) dir., Phares de Méditerranée, Grenoble, Chasse-marée, col. Mer, histoire et traditions, 2009. Jourdan (Blandine), Giraud (Marie-Odile), « La protection des phares au titre des monuments historiques », / Lettre d’information des patrimoines, DRAC PACA/, n° 11, mai 2013, consulté sur http://www. infos-patrimoinespaca.org/, le 03/07/2013 A paraître Les phares protégés monuments historiques en France, éditions du patrimoine, 2013 Internet http://www.cordouan.culture.fr http://www.culture.gouv.fr/documentation/memoire/VISITES/phares/ phares-frame.htm http://www.developpement-durable.gouv.fr/Quel-role-pour-lesphares-aujourd.html http://www.affaires-maritimes.mediterranee.equipement.gouv.fr/ladirm-mediterranee-r11.html Sur le Languedoc-Roussillon Comte (Yvon), « Sète, les forts », dans Le guide du patrimoine Languedoc-Roussillon, Paris, Hachette, 1996, pp.534-535. Faucherre (Nicolas), « Les bastions de la mer », dans Etudes rurales n°133-134 1994, pp. 77-86. 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Sur le phare du Fort Fanal Archives nationales F/14/17525, F/14/20206 Archives départementales des Pyrénées-Orientales 11Sp5, C1159 Médiathèque du patrimoine 2003/017/0008/247 74 75 Chèle (Annick), Port-Vendres à l’époque moderne, mémoire de maîtrise UPV, 1986 Sur les phares du môle Saint-Louis et du Mont Saint-Clair (Sète) Ayats (Alain), Louis XIV et les Pyrénées catalanes : de 1659 à 1681, frontière politique et frontières militaires, Canet, Trabucaire, 2002. Archives du service des Phares et Balises Ouest Méditerranée, Centre de Sète, en cours de traitement aux Archives départementales de l’Hérault. Faucherre (Nicolas) (sous la direction de), La route des fortifications en Méditerranée, Paris, 2007, collection « Les Etoiles de Vauban ». Sur le vieux phare du Grau-du-Roi Archives départementales du Gard 4S 7 Sur le phare du Cap Béar (Port-Vendres) Archives nationales F/14/20204, F/14/20205, F/14/17525 : Plan, F/14/18370/40 et 41 : photographie. Sur le phare du feu du môle (Port-Vendres) Archives nationales F/14/20206 La Science illustrée, n° 26, 20 avril 1890. Bernadac (Bernard), « Un phare unique au monde », dans Des navires et des hommes, revue de l’Association Port-Vendres des Paquebots, n°4, 2010, p. 146-150. Guigueno (Vincent), Vattier (Valérie), Lumière de Paris et de NouvelleCalédonie : le phare Amédée , Nouméa : Musée de l’histoire maritime de Nouvelle-Calédonie, 2010. Archives nationales F/14/17514, F/14/20215, LH/609/45 Sur le phare de l’Espiguette (Grau-du-Roi) Archives départementales du Gard 4S8a et 4S8b Archives nationales F/14/17514, F/14/20214, F/14/20215 sur Lenthéric : Archives nationales F/14/11576, L1590035 Lentheric (Charles), Littoral d’Aiguesmortes : Le phare de l’Espiguette. Nîmes : imprimerie J. Roumieux et C., 1872, 8 p. Dupuy (Charles), Instance du sieur Charles Dupuy d’Aiguesmortes entrepreneur de la construction du phare de l’Espiguette contre l’Etat [texte imprimé], Nîmes : Clavel, 1878. Sur le phare du Cap Leucate (Leucate) Eppe (Guillaume), Les forts côtiers de Leucate au XVIIIe siècle. Histoire et archéologie sur le Chemin des Forts, AVL Diffusion, Montpellier, 2012. Archives départementales de l’Aude 2756 W 293 Archives nationales F/14/20209 Sur les phares de Brescou et du Mont-Saint-Loup (Agde) Jordan (Balthazar), Histoire de la ville d’Agde, Montpellier, imprimerie Isidore Tournel, 1824. Archives départementales de l’Hérault 4S 4-13, 4S 10 Archives nationales F/14/2265 et F/14/11513 Sarret de Coussergues (Germaine de) Une prison d’état en Languedoc au milieu du 18e siècle, Le Fort de Brescou en Languedoc. Presses continentales, 1949 ; éd. de La Grande Revue, 1997. 76 77 Glossaire Amer : repère ixe dans le paysage pour la navigation maritime (clocher, tour,…). Attérage, atterrage ou atterrissage : approche des côtes. Les phares de grand atterrissage marquent les tournants des routes de navigation. Les phares et feux d’atterrissage secondaire ou de jalonnement des côtes précisent le tracé d’une route très fréquentée. Les phares et feux d’entrée de port balisent les estuaires et les ports. Chambre de veille : pièce située sous la lanterne, consacrée à la permanence du gardien durant la période d’activité de la lampe, avant l’automatisation. Feux : autres installations de signalisation maritime ne remplissant pas les critères nécessaires pour être qualiiés de phares. Lanterne : partie sommitale vitrée installée sur une plate-forme, qui abrite le système optique et l’éclairage dans une coupole ou un dôme. Lentille : masse circulaire bombée en verre, permettant de concentrer la lumière (en remplacement des miroirs utilisés précédemment). La lentille simple n’est pas assez lumineuse et elle est trop lourde car de trop grand diamètre. Augustin Fresnel invente un lentille découpée en échelons, ensemble de sections annulaires concentriques, en réduisant le volume de verre nécessaire : au lieu d’une épaisseur bombée unie, on obtient une surface discontinue mais globalement plus plate et plus légère, constituée de plusieurs segments de lentilles annulaires de même courbure, séparés les uns des autres. Mille marin international : unité de mesure de distance utilisée en navigation maritime et aérienne (1 852 m). Tour à signaux : tours de surveillance des côtes à relais optiques par feux, souvent aménagées en tours de signalisation (tour-fanal) puis parfois en sémaphores. Tour-fanal : tour à signal maritime muni d’une torchère ou d’un foyer. Salle des machines ou de l’appareil : pièce abritant le mécanisme originel mû par un système de contrepoids assurant la rotation de la lentille autour de l’ampoule ou plus anciennement de la lampe à pétrole, remplacé par un moteur électrique. Sémaphore : au début du 19e siècle, poste de guet côtier à système de signalisation optique mécanique puis, dans la deuxième moitié du siècle, relais de communication télégraphique (aujourd’hui poste de surveillance maritime). Optique : dispositif d’éclairage pivotant constitué de lentilles et mécanismes permettant de concentrer et de diffuser la lumière. Redoute : petit réduit fortiié désignant les tours de guet et tours-fanal de défense du littoral languedocien. 78 79 Image d’Epinal, Pellerin, in 19e s.1918 : maquette papier fort à découper (30 x 23,2 cm) « Sémaphores et phare d’Agde ». Ouvrage publié par la Direction Crédits photographiques régionale des affaires culturelles Tous les clichés photographiques sont de Yvon Comte et Michèle François, Conservation régionale des monuments historiques, Direction régionale des affaires culturelles Languedoc-Roussillon, à l’exception des pages suivantes, avec l’autorisation des auteurs : p. 5 et 14 : Médiathèque centrale d’agglomération Emile Zola, Montpellier. p. 8 et 15 : Laurent Uroz, ville d’Agde. p. 10 : Aurélie Harnequaux, STAP de l’Hérault. p. 19 et 25 g Jean-Louis Conte, DIRM Méditerranée. p. 22 : Josette Clier, CRMH, DRAC LR. p. 43 et 47 : cartes postales anciennes, collection du journal « Hérault tribune ». p. 63 : Charles Lenthéric. (DRAC) du Languedoc-Roussillon Conservation régionale des monuments historiques (CRMH) 5, rue de la Salle l’Evêque - CS 49020 34967 Montpellier Cedex 2 Tél. 04 67 02 32 00 / Fax 04 67 02 32 04 Directeur de la publication Alain Daguerre de Hureaux, directeur régional des affaires culturelles Rédacteur en chef Delphine Christophe, conservateur régional des monuments historiques Coordination éditoriale Jackie Estimbre, chargée de la valorisation du patrimoine, CRMH Diffusion publicationspat.drac-lr@culture.gouv.fr Tél. 04 67 02 32 61 Conception graphique et réalisation Charlotte Devanz Photogravure et impression Impact imprimerie Achevé d’imprimer Août 2013 Dépôt légal Septembre 2013 ISBN n° 978-2-11-138375-3 Remerciements tout particulièrement à Claude Roblin de la DIRM Méditerrannée, et pour leur disponibilité et aide précieuse à André Grémillet, Laurent Simons et Jean-Louis Conte des Phares et Balises Ouest Méditerranée, Centre de Balisage de Sète, à Francis Dreyer, qui a bien voulu contribuer à cet ouvrage par un avant-propos sur les phares de la Méditerranée, Vincent Guigueno, Frantz Schoenstein, Olivier Poisson, Olivier Liardet, Josette Clier, Fabienne Tuset, Jean-Louis Vayssettes (Direction régionale des affaires culturelles Languedoc-Roussillon), Samuel Villevielle (Conseil général Pyrénées-Orientales), Magali Rieu, Annick Chèle (Archives départementales des Pyrénées-Orientales), Adrien Aitanti (Archives départementales de l’Aude), l’Association Port-Vendres des Paquebots, Sophie Banny, Olivier Chambon, Laurent Gheysens, ville d’Agde, Didier Denestebe, journal Hérault Tribune, Catherine Masteau (Ecole des Ponts ParisTech) Créée par la direction régionale des affaires culturelles du Languedoc-Roussillon (conservation régionale des monuments historiques), la collection « Duo » propose au public de découvrir des chantiers de restauration du patrimoine monumental et mobilier, des édiices labellisés « Patrimoine du XXe siècle » ou encore des immeubles et objets d’art protégés au titre des monuments historiques, dans l’ensemble de la région. Phares du Languedoc-Roussillon Eclairer la mer / signaler la terre Des feux allumés dans des fortiications ou sur les plages ont longtemps été l’unique secours des navigateurs. En 1825, un vaste programme pour l’éclairage du littoral français est lancé, facilité par l’invention de la lentille de Fresnel. Aujourd’hui, le devenir des phares, que l’aide électronique à la navigation a rendu moins utiles, est devenu un objet d’inquiétude qui justiie l’intérêt public pour leur protection, car ils ont une place majeure dans l’imaginaire collectif. Une campagne de protection nationale des phares a été lancée par le Ministère de la Culture et de la Communication. En Languedoc-Roussillon, six phares ont été protégés au titre des monuments historiques, parmi lesquels trois en activité : l’Espiguette au Graudu-Roi (Gard), le Mont Saint-Clair à Sète (Hérault) et le Cap Béar à Port-Vendres (Pyrénées-Orientales). Les feux situés dans les anciens forts de Brescou à Agde et Fanal à Port-Vendres et l’exceptionnel feu métallique du môle de Port-Vendres sont aussi protégés, ainsi que deux phares éteints : le vieux phare du Graudu-Roi et celui du Mont Saint-Loup à Agde (Hérault). Le feu du môle Saint-Louis à Sète et le phare du Cap Leucate (Aude) bien que non protégés monuments historiques sont présentés ici en raison de leur intérêt patrimonial. Traditionnellement gérés par le Service des phares et balises de la direction interrégionale de la mer (DIRM Méditerranée), ces édiices ne sont pas ouverts au public. Direction régionale des affaires culturelles du Languedoc-Roussillon (DRAC-L.-R.) ISBN : 978-2-11-138375-3 Diffusion gratuite - NE PEUT êTRE VENDU