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[Actes du XIVe colloque du Comité international de paléographie latine, Enghien-les-Bains, 19-20 septembre 2003], Archiv für Diplomatik, 50, 2004, p. 417-465. Les «gothiques documentaires»: un carrefour dans l’histoire de l’écriture latine Marc H. Smith École nationale des chartes, Paris. «Quand donc enfin, au lieu de piétiner dans l’écriture livresque, les paléographes voudrontils étudier avec autant de persévérance l’écriture des chartes*1?» On aura peut-être reconnu ce quousque tandem, inspiré à Charles Higounet par l’événement que nous fêtons aujourd’hui, le colloque de 1953 sur la Nomenclature des écritures livresques. On pourrait occuper une grande partie de ce rapport à citer les constats semblables exprimés depuis cinquante ans et plus, que ce soit sous la forme du reproche exaspéré, du regret fataliste, de l’observation indifférente ou, plus rarement, de la déclaration programmatique. Selon l’image récurrente chez plusieurs paléographes allemands, les écritures de la fin du Moyen Age, et particulièrement les documentaires, sont restées l’enfant mal aimé de la famille, celui que la paléographie traite en marâtre, stiefmütterlich2. Cette antienne sans cesse répétée laisse deviner d’emblée les difficultés que l’on rencontrera à vouloir dessiner cinquante ans de progrès de la recherche. [418] 1. Aperçu préliminaire 1.1. Définitions Traçons d’abord les limites de notre propos — et que Jean Mallon nous pardonne de commencer encore une fois par nous partager la tunique sans couture3. Qu’entendons-nous par écritures gothiques documentaires? Le mot «gothique» est encore moins justifié ici que pour les variétés employées dans les livres. Il s’agit d’écritures qui se sont développées à la même époque, dans la même civilisation, mais pour d’autres usages et selon d’autres voies, en sorte qu’elles ne répondent que partiellement aux caractères structurels qui définissent habituellement l’écriture gothique (comme les règles de Meyer et de Zamponi4). Elles se conforment encore moins nettement aux critères par lesquels on a voulu la rapprocher du style ou même de la forma mentis du temps: la verticalité, la brisure, une structure fractionnée faite d’éléments minimaux en antithèse5. Les écritures documentaires répondent même à des tendances inverses, qui les poussent à limiter toujours plus les levers de plume. Ce phénomène, la «cursivité», est lié à une accélération du geste graphique dont il est inutile de rappeler ici le contexte historique. Il faut seulement répéter que les écritures documentaires et livresques de la fin du Moyen Age, cursives ou non, ne sauraient être considérées, contrairement à l’illusion des contemporains eux-mêmes, comme deux faces d’une même écriture, mais bien comme deux filons devenus essentiellement * Les références abrégées renvoient à la bibliographie méthodique en appendice, avec indication des subdivisions de celle-ci. 1 C. HIGOUNET, compte rendu de Nomenclature [3.7] in: Annales du Midi 67 (1955) p. 292, cité par STIENNON, L’écriture diplomatique [2.6.3] p. 17. 2 Par exemple HEINEMEYER, Studien [2.1.1] p. 54; FOERSTER, Abriß [2.1.1] p. 196 appelle même Stiefkind toute l’écriture gothique. 3 En dernier lieu, MALLON, Qu’est-ce que la paléographie? [3.1]. 4 Pour mémoire, S. ZAMPONI, Elisione e sovrapposizione nella «littera textualis», in: Scrittura e civiltà 12 (1988) p. 135-176. 5 Surtout FICHTENAU, Mensch und Schrift [3.1] p. 186 sqq.; MARICHAL, L’écriture latine [3.1] p. 233-243. M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 2 indépendants6 — en dépit même des échanges toujours possibles, et du fait que l’écriture livresque subsistera encore longtemps dans certains documents, tandis que la documentaire, en retour, envahira bientôt les livres. Admettons donc, provisoirement, l’utilité d’en traiter séparément. Donc: où commencer? Quand et comment a eu lieu la dissociation? Globalement, le filon documentaire de la fin du Moyen Age est issu des minuscules diplomatiques et/ou notariales, qui au XIIe siècle n’étaient plus qu’un travestissement plus ou moins élaboré de la minuscule des livres, et qui suivaient [419] donc la même pente vers la gothicisation. Cette évolution commune, inévitable à partir du moment où l’écriture des scriptoria avait constitué le seul modèle, l’écriture «normale» de la chrétienté latine, devait finir par éclater: l’évolution des livres vers l’écriture gothique, avec les contraintes imposées à son ductus, avec ses formes progressivement adaptées à des modes spécifiques de lecture, de production, de mise en page, allait à l’encontre des besoins de la «pratique», variés et non moins spécifiques. La différence entre livres et documents n’avait affecté jusque-là que la superstructure de l’écriture au sens littéral, les excroissances ornementales; désormais, au-delà des différences croissantes de morphologie et de style, elle va toucher les structures mêmes. Indiquer un commencement, c’est donc chercher à fixer l’origine presque insensible d’un phénomène voué à prendre une ampleur croissante dans la très longue durée — puisque le XXIe siècle sera peut-être le premier à le voir décroître. Les premières traces d’un mode nouveau d’écriture apparaissent à des dates fort différentes à travers l’Europe, entre le début du XIIe siècle et le XIIIe avancé. A défaut d’une limite chronologique unique, il s’agira donc ici de l’ensemble des écritures documentaires de l’époque dite gothique, au fur et à mesure qu’elles se sont différenciées de la minuscule diplomatique à base caroline. Pour ne pas multiplier les périphrases ou les synonymes incertains, je les appellerai de manière générale, quoique peu satisfaisante, les gothiques documentaires. Quant à la borne finale, il ne devrait y avoir aucune raison de nous limiter au Moyen Age: ni le retour des humanistes à la littera antiqua ni l’imprimerie n’ont mis fin au développement des cursives gothiques. Celles-ci poursuivent leur carrière en Italie même, rhabillées à la dernière mode, jusque dans la cursive «italique»; dans d’autres pays, elles subissent une hybridation progressive. En France, avec la «ronde», plus encore en Angleterre, avec les special set hands7, et dans la chancellerie pontificale8, avec la bollatica, quelques élaborations calligraphiques prolongeront jusqu’aux XIXe et XXe siècles des canons gothiques parfois caricaturaux. En Allemagne, c’est une évolution sans aucune solution de continuité, jusqu’à la suppression paradoxale de la deutsche Schrift par Hitler9. Je renonce malgré moi à traiter de ces développements modernes, en partie pour faire [420] court mais aussi parce que, dans un inventaire de l’activité de recherche, on pourrait seulement constater que les écritures les plus tardives ont été les plus ignorées10. 1.2. Une synthèse pionnière: Cencetti Un bilan paléographique du dernier demi-siècle se justifie non seulement par l’anniversaire de la fondation du CIPL mais peut-être plus encore par la parution en 1954 du traité fondamental de Giorgio Cencetti. Modestement intitulé Lineamenti di storia della scrittura latina, et conçu comme un simple manuel universitaire, on sait qu’il est devenu au fil de 6 CENCETTI, Paleografia latina [2.4.1] p. 133; CASAMASSIMA, Tradizione [3.4] p. 17. Voir notamment HECTOR, The handwriting [2.7]. 8 FRENZ, Littera sancti Petri [2.4.5]. 9 P. RÜCK, Die Sprache der Schrift. Zur Geschichte des Frakturverbots von 1941, in: Homo scribens (1993) p. 231-272, rééd. in: ID., Fachgebiet Historische Hilfswissenschaften [3.1] p. 141-158. 10 On trouvera cependant les références principales dans la bibliographie, sections [2.1.3] et [2.6.2]. 7 M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 3 l’écriture la synthèse la plus ambitieuse et la plus complète à ce jour de toute l’écriture latine11. Un nouveau bilan aujourd’hui, c’est donc la comparaison avec l’état des connaissances et des problèmes réuni par Cencetti; comparaison facilitée entre autres par la réédition de son livre en 1997 avec un ample supplément bibliographique12. Dans le domaine documentaire, la référence à Cencetti est d’autant plus indispensable qu’il s’y est avancé en pionnier: le premier, et à ce jour le dernier, il a tenté en plus de trente pages un tableau européen du renouveau des écritures documentaires à l’époque gothique, sans compter leurs prolongements modernes. Par comparaison, le manuel de Giulio Battelli, réédité peu avant et encore récemment13, consacrait à la «minuscule gothique cursive» deux pages de texte et quatre petites illustrations. Cencetti était bien conscient des limites de son coup d’essai: il ne pouvait s’appuyer que sur de rares manuels nationaux, essentiellement pratiques, la plupart vieux de quelques dizaines d’années14. Il a donc procédé par observation directe des fac-similés à sa disposition: pour l’Europe en général et l’Allemagne en particulier, l’inépuisable recueil de Steffens15; pour l’Italie, outre les originaux et les travaux spéciaux sur la chancellerie pontificale, le recueil de Federici16; pour la France les planches [421] des manuels de Prou et de Boüard17; pour l’Angleterre, l’énorme collection formée par la Palaeographical Society et la New Palaeographical Society18; pour l’Espagne, García et Millares19. Pour réunir la totalité de la documentation existante à cette date, il lui aurait suffi d’ajouter quelques travaux et recueils nationaux ou locaux d’importance inégale; on notera surtout l’absence des premières recherches d’István Hajnal, autre pionnier des gothiques documentaires; la publication de ses Schriftproben à Budapest en 1943 avait peu favorisé leur diffusion20. Cencetti a dessiné des lignes d’ensemble claires, à l’aide des concepts historicistes qui sont sa propre contribution à l’avancement des théories paléographiques: à l’intérieur de l’écriture caroline, devenue progressivement l’écriture «normale» ou «usuelle» de son temps, se manifestent à nouveau, à partir du milieu du XIIe siècle, les tendances divergentes, immanentes dans toute écriture mais provisoirement latentes, réprimées, entre cursivité et calligraphie: elles aboutiront d’une part à la stylisation gothique et d’autre part aux nouvelles écritures cursives et diplomatiques, dont le chaos s’organisera bientôt en variétés nationales. Cencetti décèle ici, à juste titre, un «moment d’une importance primordiale». Dans le détail, il procède inévitablement par description analytique; sans doute les proportions du tableau sont faussées par le nombre limité des recueils utilisés, par leur conception hétérogène, par leur fréquente préférence pour la production formalisée des chancelleries au détriment des filons plus libres; mais il constitue le premier essai sérieux de comparaison à grande échelle et sur une longue durée, avec une attention nouvelle aux influences réciproques, par exemple à la diffusion internationale de la «bâtarde» issue de la chancellerie française. Cencetti est aussi le premier à souligner l’intérêt de l’écriture spéciale des marchands italiens, la mercantesca, et à y déceler la marque d’un enseignement professionnel. Personne n’a encore fait mieux, sur ce sujet comme sur bien d’autres. Le CIPL, qui encourage les entreprises éditoriales d’intérêt commun, ferait œuvre pie en promouvant la 11 CENCETTI, Lineamenti [2.4.1] p. 222-254. En même temps que la traduction italienne avec mise à jour de BOYLE, Medieval Latin palaeography [1]. 13 BATTELLI, Lezioni [2.4.1] (éd. de 1939) p. 230-234. 14 Encore n’avait-il peut-être pas à Bologne tous les livres utiles, et il ne paraît pas avoir utilisé les rares études plus précises déjà parues sur les documents anglais ou allemands. 15 STEFFENS, Lateinische Paläographie [2.1.1]. 16 FEDERICI, La scrittura [2.4.1] 17 PROU, Manuel [2.6.1]; BOÜARD, Manuel [2.6.1]. 18 Facsimiles [2.7]. 19 GARCÍA VILLADA, Paleografía española [2.5.1]; MILLARES CARLO, Tratado [2.5.1]. 20 HAJNAL, Vergleichende Schriftproben [2.2]. 12 M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 4 traduction de ce monument d’intelligence historique, encore trop peu fréquenté hors d’Italie (en y ajoutant, mieux encore, un CD-Rom des innombrables fac-similés qu’il cite mais sans pouvoir les reproduire). [422] 1.3. Dispersion des approches Depuis Cencetti, le matériau et les études se sont multipliés. D’abord, avec la banalisation de l’édition photographique, de nombreux nouveaux recueils de fac-similés ont paru, toujours limités à un cadre national ou régional, mais d’autant plus utiles pour dresser une géographie générale. Désormais, cette production est brutalement démultipliée par la numérisation, qui permet déjà de consulter en ligne des dizaines de milliers de documents; mais nous n’en faisons encore presque aucun usage scientifique. La paléographie du Moyen Age tardif était déjà impuissante à s’orienter dans la masse des archives, et réclamait des fac-similés. Désormais nous allons nous trouver submergés par les fac-similés eux mêmes, faute d’outils techniques, mais aussi faute de critères théoriques efficaces. La tradition vénérable du minutieux artisanat paléographique se retourne contre nous21. Le bilan est difficile à synthétiser: peu de grands axes visibles, encore moins de programmes communs comme il y en a pour les livres ou pour les chartes latines plus anciennes. La recherche a procédé à la fois dans le cadre trop commode des frontières nationales et selon des angles d’approche dispersés, qui ne font souvent que croiser l’histoire de l’écriture. Quant aux limites géographiques: matériellement, les chartes et les registres ont moins voyagé que les livres. Et l’horizon de recherche des historiens, à la différence des philologues, reste marqué par la conception qui a fait de la nation le sujet même de l’histoire ou en tout cas son cadre habituel. Ainsi se forment des bulles bibliographiques étanches qui n’éclatent que rarement: même sur des sujets d’intérêt commun, comme les mécanismes d’évolution des formes cursives, les interlocuteurs potentiels ont construit des modèles parallèles ou contradictoires en continuant de s’ignorer. La recherche n’a pas atteint en quantité la masse critique qui permettrait d’instaurer un dialogue autour de pôles reconnus. La chronologie et la géographie générales des écritures n’ont fait l’objet d’aucun travail comparable à ceux qui ont porté sur la naissance et la diffusion de la minuscule caroline ou même de la gothique livresque. Ainsi nous sommes sans réponse à la question cruciale posée par Hajnal dès 1943 de la naissance étrangement unitaire, d’un bout à l’autre de l’Europe, des nouvelles écritures aux XIIe-XIIIe siècles. De même à la question inverse: comment est-on finalement revenu de l’unité à un nouveau particularisme, correspondant à de nouveaux découpages politiques et linguistiques? Les efforts de synthèse se sont limités aux passages obligés des manuels, là encore dans [423] un cadre national et selon un mode d’exposition sommairement typologique et descriptif. 1.4. Paléographie et diplomatique Dans le partage académique des tâches, les écritures documentaires ont été laissées aux archivistes et aux diplomatistes, qui se soucient d’enseigner le déchiffrement, de trouver des critères de datation, de localisation et d’authenticité, et beaucoup moins de scruter les voies mystérieuses de la morphogenèse. Le divorce entre la diplomatique et l’histoire de l’écriture, déjà amorcé à la fin du XIXe siècle au profit d’une philologie conquérante, a été consommé depuis cinquante ans avec l’essor de la codicologie22. C’en est au point que les historiens, quand ils demandent à la diplomatique de leur dater les documents, en oublieraient de l’interroger sur la forme des lettres23. 21 SMITH, Numérisation et paléographie [3.3]. P. RÜCK, La diplomatique [1]. 23 Dating undated medieval charters, éd. M. GERVERS (2000). 22 M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 5 Alors que la production des chancelleries a été l’objet de travaux sans nombre, surtout chez les diplomatistes de langue allemande et chez leurs voisins d’Europe centrale, le paléographe y est constamment frustré. La paléographie, comme science auxiliaire d’une autre science auxiliaire, s’est concentrée sur les caractères qui permettent de distinguer des mains, avec une minutie souvent admirable, et même un sens subtil des variations individuelles et collectives24, mais à travers des aspects tout extérieurs: la morphologie, le style et surtout les ornements. Citons seulement cet aveu éloquent, dans une étude de 1969 sur la chancellerie de Bohême: «On ne peut facilement distinguer les caractéristiques de cette écriture, parce que la plupart des lettres sont toutes simples, sans ornement ni particularités»25. Les descriptions verbales, éparpillées et souvent dépourvues d’illustrations26, ne sauraient inspirer aucune vue d’ensemble des caractères propres à une chancellerie ou des échanges possibles. Dans un colloque international tout récent (publié en 1999)27 sur l’influence européenne de la chancellerie pontificale, la minuscule curiale, à nos yeux un aspect éclatant de cette influence, a été parmi les questions les plus oubliées; et on peut dire que le [424] problème n’a guère été abordé de front depuis 1924, date d’un article modeste mais pionnier du Belge Hubert Nélis28. Si je procède d’abord à un bilan par zones géographiques plutôt que par grands axes de recherche, ce n’est donc pas seulement par facilité: c’est ainsi que se présente la matière. Mais il faudra revenir ensuite sur quelques grandes questions qui ont été abordées ou qui mériteraient de l’être à l’avenir. 2. Bilan par régions géographiques 2.1 Pays germaniques L’intérêt porté à l’écriture gothique varie considérablement selon les pays, en fonction de sa postérité dans l’histoire de chacun. Je commencerai donc par les terres germaniques, Allemagne, Autriche et Suisse, où ce filon est le plus nourri pour d’évidentes raisons historiques, et grâce à une vigoureuse tradition d’étude des documents. 2.1.1. Écritures documentaires Dans la littérature diplomatique, c’est la recherche germanique qui a consacré le plus grand nombre de travaux aux aspects graphiques. A l’orée de la période qui nous intéresse, nous en devons plusieurs à Walter Koch, notamment sur la chancellerie impériale du XIIe siècle. Parmi une série d’études diplomatiques générales, il a consacré en 1979 un volume spécial aux écritures de cette institution. La méthode y repose toujours sur l’examen individuel des mains, mais aboutit aussi à des conclusions d’un intérêt plus large, sur les formes d’interaction entre les différents notaires ou sur l’influence sensible, passagère ou durable, de leurs voyages en Italie29. Ensuite, il faut surtout citer les travaux de Peter Rück, depuis son étude de la chancellerie épiscopale de Bâle30; avec ses élèves de Marburg, il a renouvelé notre perception de tous les aspects graphiques de la production diplomatique; en ce qui concerne l’écriture, citons au moins Gudrun Bromm sur les litterae notabiliores. P. Rück a enfin organisé en 1989 24 Voir par exemple les considérations générales de BANSA, Studien zur Kanzlei [2.1] p. 107-108. ŠEBÁNEK/DUŠKOVÁ, Urkundenwesen König Ottokars II. [2.2] p. 257. 26 Un exemple récent entre cent, les deux volumes monumentaux de H. E. MAYER, Die Kanzlei der lateinischen Könige von Jerusalem (MGH Schriften 40, 1996). 27 Papsturkunde [2.1.1]. 28 NÉLIS, De l’influence [2.6.3]. 29 Voir surtout KOCH, Die Schrift [2.1.1] ainsi que, dans la même série, les études du même sur les années 1167-1174 et celles de R. M. HERKENRATH sur les années 1174-1190. 30 P. RÜCK, Die Urkunden der Bischöfe von Basel bis 1213 (1966). 25 M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 6 un [425] colloque fondamental où ont été confrontées toutes les méthodes de description de l’écriture, de la paléographie à l’expertise judiciaire et jusqu’à la psychographologie. Sur la fin du Moyen Age, quelques travaux prometteurs avaient vu le jour dès les années vingt et trente, sous la plume de Hans Genzsch et d’Alfred Hessel, à la recherche des origines médiévales des caractères typographiques allemands (Fraktur), ou de Friedrich Uhlhorn, sur l’évolution des majuscules. En 1946, Heinrich Fichtenau n’en constatait pas moins que le domaine restait désert31. La première et dernière synthèse sur l’écriture des documents allemands de 1140 à 1500 a été écrite par Walter Heinemeyer peu après, au cours des années 1950 et encore rééditée, mieux illustrée, en 1982. A un corpus régional (entre Rhin et Main) puis local à mesure que la masse documentaire augmente, il applique une méthode résolument positiviste: peu importe la Geistesgeschichte à la Fichtenau, remise à plus tard32, il s’agit de s’assurer de la date des documents. Chacune de ses trois périodes est envisagée selon un schéma analytique: les caractères généraux (format, interligne, chrismon, majuscules, minuscules, etc.), puis une analyse morphologique lettre par lettre: majuscules, minuscules, ligatures et abréviations. La grande finesse des observations, en particulier sur les ligatures, permet au lecteur de voir changer le système graphique, mais cette vision d’ensemble reste implicite, parce que Heinemeyer continue à raisonner en termes de morphologies plutôt que de ductus, la naissance des cursives étant assimilée à un simple changement stylistique. Cette grille de lecture l’amène à présenter pêle-mêle, en fonction d’une chronologie linéaire, des formes saisies à des stades très différents de cursivité, donc de développement. En 1963 a paru la 2e édition du manuel de paléographie de Hans Foerster, récapitulant les travaux des trois décennies précédentes, notamment Hajnal, Genzsch et Heinemeyer. Mais, malgré ses intérêts de diplomatiste et malgré le recueil de fac-similés de chartes qu’il a luimême produit, il consacre aux écritures documentaires trois à quatre fois moins d’espace qu’aux gothiques livresques; et plutôt que comme une articulation essentielle de l’histoire de l’écriture, il en présente la naissance simplement comme une «création issue d’écritures livresques et diplomatiques dégénérées» par une accélération mal maîtrisée33. Ces types d’interprétation, tendant à faire des cursives une écriture sans histoire, ont suscité des réactions notables en Allemagne de l’Est. Ici, et [426] notamment à l’université de Potsdam, en polémique avec les interprétations de la recherche bourgeoise, on a mené entre les années cinquante et soixante-dix une série de travaux, synthétisés en 1978-1979 par Friedrich Beck et Peter Langhof. Passé l’invocation liminaire de Marx et Engels, ces recherches visent à donner aux écritures cursives une véritable dimension historique, sociale mais aussi institutionnelle, qui éclaire leurs caractères en fonction de leurs usages, dans plusieurs chancelleries princières et dans quelques villes de la Hanse, entre le XIIIe et le XVe siècle. P. Langhof a mis en évidence l’influence combinée et alternée des écritures cursives et livresques sur les chancelleries, qui forment ainsi un carrefour de l’évolution graphique. Dans la diachronie, il a souligné le caractère anarchique et expérimental des écritures de la deuxième moitié du XIIIe siècle, puis l’élaboration tâtonnante d’une nouvelle discipline. F. Beck, lui, a étendu ensuite ses recherches aux cursives du XVIe siècle. Il a encore contribué en 1994 à un manuel où il reprend l’histoire des gothiques documentaires dans le cadre d’une utile synthèse didactique des écritures allemandes, des origines au XXe siècle; le contexte social reste ici un peu extérieur au discours mais n’est pas oublié. 2.1.2. Extension des formes cursives aux livres Le grand manuel de Bernhard Bischoff (1979) a été décevant sur les gothiques, par un effet de sa préférence pour les époques antérieures. Mais surtout, il est représentatif des nombreuses 31 Lire son jugement sévère dans FICHTENAU, Mensch und Schrift [3.1] p. 204. HEINEMEYER, Studien [2.1.1] p. 55. 33 FOERSTER, Abriß [2.1.1] p. 211. 32 M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 7 études qui considèrent les cursives uniquement en fonction de leur adaptation aux livres. Le chapitre commence même par ce paradoxe: «Le deuxième grand groupe d’écriture livresque à l’époque gothique est la cursive»34. Ce domaine d’entre-deux a été spécialement étudié en Allemagne et en Europe centrale. Il faut passer plus vite, parce que nous sortons des documents, mais citons au moins les divers travaux d’Otto Mazal, ainsi que ceux de Charlotte Ziegler sur les manuscrits de Zwettl en Autriche ou de Thomas Frenz sur les manuscrits du Vocabularius Ex quo, fort éclairants sur la variété des caractères régionaux. Cela contribue à la connaissance des gothiques documentaires, quoique indirectement et sans procéder aux comparaisons qui devraient s’imposer avec les documents eux-mêmes. Ces jalons ont été repris en 1987 par Karin Schneider dans son beau travail sur les gothiques allemandes de la fin du XIIe et du XIIIe siècle. Elle [427] aussi s’intéresse surtout aux livres, mais elle présente par ailleurs l’évolution des formes documentaires des différentes régions, d’après Heinemeyer et également d’après ses propres observations. Son approche est descriptive et elle donne peu de fac-similés documentaires, mais c’est une contribution de poids à une future étude d’ensemble. En 1999 elle a mis à profit ce travail dans son excellent manuel pour philologues germanistes. 2.2. Europe centrale et orientale Au-delà des pays germaniques, et en partie dans leur sillage historiographique, ceux d’Europe centrale et orientale ont aussi produit et produisent en nombre croissant des travaux sur leurs propres écritures gothiques, souvent proches des formes allemandes. Cet intérêt pour les documents de la fin du Moyen Age se justifie particulièrement dans des régions ou l’écriture s’est développée tardivement, en sorte que les chartae latinae antiquiores nationales ne sont souvent guère antérieures à l’époque gothique35. Il faut regretter que l’obstacle linguistique fasse en grande partie méconnaître la richesse de cette historiographie. Après les travaux fondateurs publiés par Hajnal dans les années quarante et cinquante, et ses hypothèses controversées sur la formation des professionnels de l’écriture, l’intérêt s’est déplacé plus particulièrement, là aussi, vers le domaine aux confins des livres et des documents. C’est notamment le cas de l’ancienne Tchécoslovaquie: il faut citer, sur les bâtardes et l’humanistique, les travaux de Jiří Pražák, récemment disparu, et de Pavel Spunar. On retrouve ici un apport spécifique, d’influence peut-être hajnalienne mais relayée par le marxisme, attentif à l’interprétation des écritures dans leur contexte social36. Quant aux études diplomatiques, elles ont au moins permis d’étendre le panorama des écritures connues, par exemple aux intéressantes cursives de la chancellerie de Pologne, étudiée en 1961 par Maria Biełińska et Irena Sułkowska. Tous ces travaux sont repris depuis peu par de jeunes chercheurs, tchèques et slovaques toujours, mais aussi hongrois ou polonais: au sein d’un réseau nouvellement formé, ils s’attaquent avec énergie à des problèmes variés: une terminologie paléographique, l’écriture documentaire [428] dans sa diversité régionale, et même les cursives modernes37. Hana Pátková vient de publier les trois premiers fascicules de son corpus des écritures cursives de Bohême par localités, commentés en tchèque et, Deo gratias, en latin. Un colloque tenu en 34 BISCHOFF Paläographie [2.1.2]; je cite d’après la trad. française, Paléographie de l’Antiquité romaine et du Moyen Age occidental (1985), p. 154. 35 ADAMSKA The introduction [2.2]. 36 Outre les travaux cités en appendice, pour un bilan plus large, voir SPUNAR., Lateinische Paläographie in Mittel- und Osteuropa, in: Un secolo di paleografia e diplomatica [1] p. 211-218, et le colloque cité à la note suivante. 37 Le colloque The history of written culture [2.2] contient un panorama des recherches tchèques par H. PÁTKOVÁ, slovaques par J. ŠEDIVÝ, hongroises par L. VESZPRÉMY, polonaises par E. POTKOWSKI et russes par L. KISELEVA et O. BLESKINA. M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 8 2003 a permis de présenter ses premiers résultats, montrant par exemple qu’on ne retrouve pas dans les documents la connotation confessionnelle de l’opposition bâtarde/humanistique avancée pour les livres par P. Spunar. Dans le même volume, Edit Madas étudie la chronologie des cursives livresques hongroises, et Dalibor Havel l’écriture de la chancellerie de Bohême autour de 1300, où il attribue un rôle déterminant au passage des clercs par l’école notariale de Vyšehrad: c’est un élément de réponse nouveau aux questions posées par Hajnal38. 2.3. Russie (études russes sur l’Europe occidentale) Par leur position géographique comme par leurs préoccupations d’histoire sociale, les paléographes d’Europe centrale se sont trouvés au confluent des écoles allemande mais aussi soviétique. Des travaux ambitieux ont été suscités en Russie dans les années 1970 par les manuscrits et documents occidentaux, et surtout français, conservés en nombre à Leningrad. Terminons ce coup d’œil à l’est par un livre qui y a été fort discuté mais qui à l’ouest doit se contenter de figurer dans les bibliographies: celui de Ludmila Kiseleva sur la cursive gothique des XIIIe-XVe siècles. Revendiquant les principes de Mallon, elle a tenté une ample synthèse des écritures françaises, incluant l’étude de facteurs divers, techniques et sociaux. Par son sujet et sa méthode, c’est un des rares liens possibles entre les deux extrémités de l’Europe, et j’y reviendrai un peu plus loin. Vladimir Malov, à la même époque, s’est occupé des cursives modernes françaises selon des perspectives comparables. Quant à la période antérieure, on aimerait connaître la thèse de Vladimir Mazhuga sur les écritures documentaires des VIIIe-XIIIe siècles, mais elle est malheureusement restée inédite. Repassons maintenant à l’ouest. [429] 2.4. Italie L’apport de l’école italienne est impossible à résumer. On le sait, elle compte parmi les plus fécondes, par une attention constante à tous les types d’écriture, à leurs rapports réciproques et à leur contexte social, ici encore sous impulsion marxiste, et dans un horizon chronologique exceptionnellement large. Le panorama graphique inépuisable de l’Italie en fait un laboratoire documentaire pour toute l’Europe. Parmi les études sectorielles, il faut se contenter de citer trois ou quatre directions de recherche fructueuses. — Le rapport entre livres et documents a donné lieu depuis les années 1950, et surtout 1970, à nombre d’études novatrices. Gianfranco Orlandelli, d’abord, sur la formation de la littera Bononiensis au XIIe siècle: rare et précieuse illustration du rôle joué dès cette époque par les formes documentaires comme «tissu conjonctif» de la vie de l’écriture, selon sa propre expression. Ettore Cau a commenté dans un sens comparable des manuscrits cisterciens des XIIIe-XIVe siècles. Toujours entre livres et documents, les bâtardes toscanes, particulièrement variées et moins connues que leurs cousines germaniques, ont fait l’objet en 1995 d’un article d’orientation générale par Luciana Mosiici. — Le même Orlandelli a surtout inauguré les études sur la mercantesca, écriture singulière, caractéristique d’une situation socioculturelle unique en Europe. La recherche a été bien plus tard reprise, par Luisa Miglio et Armando Petrucci, qui en ont illustré la genèse, au croisement de carolines élémentaires et d’écritures notariales, et la discussion de ce phénomène complexe n’est sans doute pas achevée. Nous sommes aussi spécialement favorisés en fac-similés dans ce domaine, depuis les recueils de Federigo Melis (documents économiques) et d’Arrigo Castellani (textes pratiques toscans). 38 H. PÁTKOVÁ, Die Entwicklung der Schrift der spätmittelalterlichen Stadtbücher in Norwestböhmen, ibid. p. 180-188; E. MADAS, Die Entwicklung der Buchkursive in Ungarn im Spiegel der Predigthss. vom Ende des 13. bis zum Anfang des 16. Jh., ibid. p. 154-167; D. HAVEL, Entwicklungs- und Nomenklaturaspekte böhmischer Urkundenschrift un die Wende des 13. und 14. Jh., ibid. 168-179 (voir aussi ID., Listinné písmo [2.2]). M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 9 — La péninsule offre un champ d’observation spécialement fascinant par ses situations de «polygraphisme absolu» (au sens d’A. Petrucci39), notamment dans le sud au XIIIe siècle. On y observe d’autant mieux les comportements réciproques des types que la gothique y est une écriture d’importation, au détriment de la bénéventine. Les études d’Alessandro Pratesi puis de Fabio Troncarelli et Francesco Magistrale ont montré l’impact de la chancellerie des conquérants normands, mais aussi la grande diversité, dans le temps, des situations locales, reflets de réalités sociales et institutionnelles. Cette longue durée des changements a [430] encore été illustrée par Maria Galante grâce à un document extraordinaire, un nécrologe de Salerne ayant servi depuis le XIe jusqu’au XVIe siècle. A Rome, en revanche, Paolo Radiciotti a montré la tradition de l’écriture curiale entièrement grignotée par les nouveautés carolinogothiques aux XIIe-XIIIe siècles, à la fois par le haut, à travers la chancellerie pontificale, et par le bas, à travers la promotion des écritures les plus élémentaires. — Enfin nous avons des travaux qui ont fait date sur les mécanismes structurels de l’écriture cursive, surtout d’après les écritures notariales, par Giorgio Costamagna et plus récemment par Emanuele Casamassima, dans un travail dont l’importance mérite qu’on passe outre son mode d’exposition particulièrement ardu. Mais nous y reviendrons aussi. Tout dernièrement, les écritures notariales florentines à l’époque de Dante ont aussi fait, sous la direction de Stefano Zamponi, l’objet d’un important mémoire d’Irene Ceccherini, qui souligne cette fois l’importance des changements de style à côté de ceux de la structure; on en espère la publication. Ces quelques aperçus devraient être bien sûr complétés par la lecture intégrale et répétée de la regrettée revue Scrittura e civiltà, mais aussi par quelques synthèses d’étape: surtout la Breve storia d’A. Petrucci, un manuel merveilleusement limpide et à jour de l’état des questions (jusqu’en 1991). Une fois n’est pas coutume, il y a cependant un domaine de l’écriture italienne qui a été entièrement confié par défaut aux soins d’une école étrangère. On sait que l’essor de l’écriture humanistique dans les livres a occupé depuis cinquante ans les chercheurs italiens ainsi que d’autres, particulièrement anglo-saxons. Or, dans le domaine documentaire, la transition qui s’opère au XVe siècle au détriment des formes gothiques n’a pas été abordée avant les années 1970; et, les archives en question ayant été laissés par les paléographes aux diplomatistes, il a été traité exclusivement par des chercheurs allemands. La même observation vaut pour la scrittura bollatica élaborée à l’époque moderne par la chancellerie pontificale et étudiée par Th. Frenz. Outre les études sur une époque ou un type d’écriture, il faudrait citer nombre de contributions italiennes fondamentales aux perspectives les plus générales. La définition des écritures normales et usuelles ou des tendances graphiques par G. Cencetti, les réflexions multiformes d’A. Petrucci sur les niveaux et les fonctions de l’écriture, les travaux d’Attilio Bartoli Langeli — études qualitatives de l’alphabétisme populaire —, trouvent [431] particulièrement à s’appliquer dans le champ des écritures documentaires. Mais ils sont déjà trop connus pour nous y attarder40. 2.5. Péninsule Ibérique La réception des travaux italiens a contribué à renouveler les problématiques de la fort active école espagnole. Ici les écritures documentaires nationales, y compris les plus tardives, ont toujours joui d’un prestige particulier, depuis les admirables recueils gravés au XVIIIe siècle. Cet intérêt précoce, revers de la médaille, semble avoir fixé le tableau dans une typologie et une nomenclature établies dès 1758 (letra de albalaes, letra de privilegios, cortesana, etc.), et dont on commence à se demander s’il ne serait pas temps de la réviser. Un des enjeux des 39 40 PETRUCCI, Funzione [3.1] p. 10, 21-22. Voir la bibliographie, section [3.1]. M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 10 dernières années a été l’effort pour intégrer dans le paysage les écritures non castillanes. Ces dernières restent en effet dominantes, y compris dans le traité de référence d’Agustín Millares, dont la dernière édition, posthume (1983), est devenue un énorme monument sans pour autant renoncer à la tournure très analytique qu’il avait adoptée en 1929. Nous avons quantité de nouveaux fac-similés, parfois commentés, et depuis trente ans des recueils spéciaux pour l’Andalousie puis pour l’Aragon et la Catalogne, avec des introductions utiles. Parmi les nombreux travaux du professeur Gimeno, on citera bien sûr son étude de l’écriture gothique dans la région de Valence (1985). Enfin un séminaire publié en 1991 a posé les jalons d’ultérieures études régionales pour l’Aragon, la Castille et la Galice, avec quelques notes rapides sur les cursives en Navarre. On trouvera la plus récente synthèse dans le manuel d’Ángel Riesco (1999), où on constate que l’ouverture à des problématiques nouvelles n’a pas fini de balayer la typologie traditionnelle. Un mot encore des travaux d’un Italien hispanisant, connaisseur de la chancellerie d’Aragon, Francesco Cesare Casula. Les Catalans lui savent gré d’avoir rendu à la letra aragonesa son nom historique de letra catalana. Il a aussi fait un petit livre assez curieux sur l’écriture documentaire en Sardaigne41, où on lit avec intérêt comment l’île a utilisé tour à tour, à la fin du Moyen Age, les écritures italiennes, françaises et catalanes, selon les situations politiques; corrélation d’autant plus frappante que l’écriture catalane paraît moins «moderne» par sa date de naissance et par sa forme (si je ne suis pas aveuglé par le nationalisme paléographique) que l’écriture de chancellerie française qu’elle a remplacée. [432] Quant au Portugal, outre divers recueils de fac-similés regroupant au total un très abondant échantillon documentaire, à des degrés divers d’élaboration (les transcriptions du recueil du P. da Costa, attendues depuis 1942, sont toujours imminentes), il a paru à ma connaissance un seul manuel théorique moderne d’une certaine importance, celui d’Antonio Cruz (1987), mais j’ai le regret de n’avoir pu encore me le procurer. 2.6/7. France, Belgique et Pays-Bas Continuons par notre petit coin du continent, si on me permet un groupement un peu arbitraire: France, Belgique et Pays-Bas. En réalité les frontières nationales et académiques, qu’elles coïncident ou non avec les aires linguistiques, ont rarement été bousculées par la recherche. On peut cependant dessiner, par commodité, au moins un axe transversal de travaux sur l’écriture diplomatique aux XIIe et XIIIe siècles: trois thèses qui ont en commun des méthodes voisines de la diplomatique telle que nous l’avons rencontrée dans le domaine germanique, mais non pas tant de la synthèse de Heinemeyer que des études analytiques par chancelleries. D’abord la thèse bien connue de Jacques Stiennon sur le diocèse de Liège (1960). Elle présente une ambition qu’on retrouvera dans son manuel de 1973: celle d’allier au service d’une histoire culturelle les ressources de la sociologie, de la graphologie, voire déjà de la neurophysiologie; programme difficile à tenir de bout en bout, et qui de fait tend à céder à une étude extrêmement dense et documentée, mais finalement assez classique dans ses méthodes: morphologie, identification de mains et de provenances. Le terme même de ductus, à une date où les travaux de Mallon n’avaient pas achevé de renverser les concepts traditionnels, était employé par J. Stiennon comme un simple synonyme de «style» («ductus diplomatique»). Le résultat principal de sa thèse est d’avoir porté un coup fatal à la notion de Schriftprovinz, en montrant tout ce que le diocèse de Liège partageait avec des régions plus éloignées, et ce qu’il emprunta aux influences impériale puis pontificale42. 41 CASULA, Breve storia [2.4.3]. Il revient à quelques questions générales en conclusion avec une variation sur le parallèle entre écriture et art gothique, une brève discussion des thèses de Hajnal et le développement du commerce comme moteur de la cursivité selon Henri Pirenne. 42 M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 11 La thèse de Françoise Gasparri sur l’écriture à la chancellerie de France au XIIe siècle (1973), bien qu’elle s’en défende, aboutit aussi à des résultats qui concernent au premier chef la diplomatique, puisque l’identification des mains lui a permis de montrer le recours aux grandes abbayes parisiennes pour écrire les actes royaux. Plus récemment (1987), elle a repris ce [433] corpus pour y déceler les premières traces de cursivité, reflet d’une écriture «usuelle», dès les années 1120, point chronologique très important pour l’évolution générale. Enfin, en 1995, Jan Burgers a publié sa thèse consacrée à l’étude paléographique exhaustive de toutes les chartes de Hollande et de Zélande au XIIIe siècle: travail considérable et fortement structuré dans ses principes. Ici aussi, on peut juger un peu excessive la revendication d’une méthode nouvelle: à côté de ses maîtres les diplomatistes néerlandais Walter Prevenier et Jaap Kruisheer, l’auteur se réfère à Gilissen, à Mallon, à Hajnal (au détriment de quelques auteurs plus récents et d’autres pays) mais aussi à l’expertise graphologique judiciaire; il dresse une terminologie néerlandaise, ce qui est précieux dans la perspective d’un lexique international; mais en somme il s’agit toujours de rendre plus exacte l’observation morphologique, et encore une fois, pour distinguer d’abord les mains, puis les centres. Une synthèse en découle ensuite, qui fait clairement ressortir des regroupements géographiques et des phases chronologiques. Le tout fournit une matière finement préparée qui pourra se prêter aux comparaisons européennes. En revanche, il sera toujours difficile d’extrapoler une méthode aussi analytique à des masses plus importantes (l’effort ici est déjà herculéen), ce qui reste un enjeu crucial de la paléographie tardo-médiévale, et de faire ressortir les mécanismes de l’évolution, alors même que, de ce point de vue, le XIIIe siècle devrait être le laboratoire par excellence. Au reste les travaux spéciaux restent peu nombreux. Dans quelques études de scriptoria ou de chartriers on a pu mettre en rapport à l’occasion des documents avec des livres tracés par les mêmes mains. Le récent album de l’Institut de recherche et d’histoire des textes sur la forme graphique des manuscrits français du XIIIe siècle a un passage original sur l’influence de l’écriture courante dans les textes vernaculaires43. Je voudrais surtout rappeler, parce qu’elle pourrait échapper aux spécialistes de l’écriture, une rare conjonction entre philologie, paléographie et méthodes quantitatives: la belle thèse d’Outi Merisalo (1988) sur les documents de quatre villes du grand Poitou au XIIIe siècle, ou le calcul statistique permet de dégager des vues pionnières sur les spécificités locales. Pour l’essentiel, en France comme ailleurs, les écritures documentaires ont été abordées dans l’enseignement pratique. Celui-ci s’est matérialisé sous forme de recueils pédagogiques souvent publiés par les conservateurs d’archives, qui même sans ambitionner de renouveler l’histoire de l’écriture, offrent à la recherche une documentation bienvenue. Les anciens PaysBas [434] (comme d’ailleurs la Suisse) présentent des ressources d’autant plus intéressantes qu’elles permettent d’étudier l’adéquation croissante entre aires linguistiques ou langues (ce qui est différent) et types graphiques. Le vieux Reusens est resté depuis un siècle sans rival en quantité de matériau parmi les manuels francophones, mais les Néerlandais ont produit depuis un demi-siècle au moins deux autres recueils notables, avec des introductions d’intérêt général et une riche documentation en différentes langues: celui de J. L. Van der Gouw en 1963 (amplifié en 1978) et plus récemment le magnifique Album palaeographicum XVII Provinciarum (1992). C’est aussi dans le cadre de l’enseignement du déchiffrement aux futurs archivistes de l’École des chartes qu’Emmanuel Poulle en est venu à se faire le continuateur des anciens archivistes Mallon, Marichal, Perrat et Samaran pour les cursives françaises. Convertissant la pratique en théorie, il a suivi de près les mécanismes d’évolution du ductus: d’abord dans un recueil consacré aux mains endiablées des XVe-XVIIe siècles, puis dans plusieurs articles, 43 Album de manuscrits français [2.6.1] p. xxvi-xxx. M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 12 notamment sur les cursives sous Philippe Auguste, et plusieurs comptes rendus critiques. Cela aussi, je me réserve d’y revenir plus bas. 2.8. Grande-Bretagne Terminons notre tour par la Grande-Bretagne, sans pouvoir toutefois y annoncer de grandes avancées. Sur les court hands anglaises il existe en effet depuis 1915 et 1927 deux recueils commentés publiés par Johnson et Jenkinson, qui sont restés fondamentaux. C’est un état de la science certes pré-mallonien, mais qui rend toujours d’excellents services, et qui a peut-être freiné d’autant les recherches nouvelles. On peut tout de même y ajouter plusieurs recueils de qualité, avec des introductions souvent excellentes: soit des albums pédagogiques (y compris pour l’Écosse et le Pays de Galles); soit des recueils produits pour les besoins des diplomatistes, en particulier quatre livres par Alan Bishop et Pierre Chaplais illustrant les documents royaux du XIe au XVe siècle, d’autant plus essentiels que l’Angleterre a été précoce tant dans les formes gothiques que dans les nouvelles écritures d’usage. Quant aux cursives livresques anglaises, si particulières, marquées par l’empreinte durable de l’ancienne tradition insulaire, elles ont fait l’objet des travaux admirablement méthodiques de Malcolm Parkes: ses English cursive book hands font référence depuis 1969 pour la typologie et l’évolution de cette famille. Plus récemment, M. Parkes a repris le sujet de la cursivité en général, mais les premiers résultats, à ma connaissance, n’ont encore été divulgués que sous forme orale. [435] 2.9. Scandinavie Il manque sans doute bien des études dans ce tour d’Europe et même quelques pays, où l’on ne rencontre guère que des albums pratiques. Les études scandinaves sont peu nombreuses, difficiles à se procurer (et à lire), mais une au moins doit être rappelée: le grand article de Sam Owen Jansson sur l’écriture cursive suédoise de 1160 à 1530, analysée lettre par lettre. Publié en 1954 mais écrit avant la mort de l’auteur en 1939, il a une introduction fort brève mais étonnamment clairvoyante et novatrice à plus d’un titre. D’une part Jansson se propose d’utiliser l’étalon des écritures documentaires pour contribuer à la datation des livres: idée d’une simplicité géniale, que personne n’a reprise depuis. D’autre part il désigne comme fondamental le principe du ductus, en employant le mot dans le sens exact qui sera consacré par Mallon. Même son étude des lettres individuelles, exceptionnellement, n’est pas dans le simple ordre alphabétique, mais organisée selon la parenté des ductus. Quant à son traitement des ligatures, il ne se limite pas aux couples ornés ct et st comme chez les diplomatistes, mais s’étend aux conjonctions de Meyer. Voilà un pionnier insoupçonné, qui mériterait d’être mieux connu. 3. Interprétations et problèmes Le tableau jusqu’ici peut paraître un peu sec. Il s’agissait de donner une idée claire de la mosaïque des travaux, de son inégale répartition dans l’espace et dans le temps, des portions qu’on voit se former et de celles qui manquent. Je ne voudrais pas non plus que mes commentaires paraissent hostiles aux procédés analytiques: les travaux positifs sont souvent plus durables que les théories audacieuses, et toute la matière nouvelle accumulée permet déjà d’y voir plus clair qu’en 1953. Mais l’ampleur même de cette matière gagnerait à être ordonnée, confrontée et interprétée: chacune des pièces bariolées que la recherche a mise au jour ne pourra mieux se vérifier et se comprendre que le jour où l’on cherchera à les agencer en un tableau d’ensemble. M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 13 3.1. Perspectives générales: chronologie et géographie44 Les études régionales et les fac-similés disponibles permettraient dès aujourd’hui d’aller plus loin que Hajnal concernant au moins la diffusion [436] des types semblables dans les chancelleries: apparaissent-ils vraiment en différents lieux à la même date aux XIIe-XIIIe siècles? Heinemeyer, dans son introduction de 1982, indique plutôt l’inverse: décalages chronologiques au XIIIe siècle entre l’ouest et l’est de l’Allemagne, simultanéité au XVe. Comment donc distinguer des développements parallèles spontanés et le rayonnement d’«influences»? Pour certains types diplomatiques prestigieux et plus clairement caractérisés, on devine bien une contagion, mais il reste à la cartographier: ainsi pour la minuscule des diplômes impériaux au XIIe siècle, la minuscule curiale au XIIIe et l’écriture de la chancellerie française au XIVe siècle. La différenciation nationale à la fin du Moyen Age offre un chantier encore plus difficile sans doute, où les écritures institutionnelles pèseront de tout leur poids. Au-dessous de la famille des écritures les plus solennelles, il faut apprécier les degrés inégaux de formalité si l’on veut comprendre, à la manière de Mallon, les échanges internes au système. Heinemeyer, ayant tout réduit à une chronologie uniforme, restait perplexe face à certaines variétés dont les précédents cursifs sont pourtant manifestes45. On voit bien, dès la fin du XIIe siècle, que les écritures diplomatiques les plus formelles remplacent peu à peu leurs ornements arbitraires, derniers méconnaissables avatars du diplôme mérovingien, par de nouvelles stylisations qui imitent, à main posée, les caractères propres aux nouvelles écritures courantes: typiquement, les ligatures (montantes) en boucle sur les hastes, imitées en chancellerie par un tracé descendant — qu’adopteront à leur tour, au XIVe siècle, les bâtardes livresques. La boucle est devenue «normale» au sens de Cencetti: un élément adventice, créé pour la commodité de la main, est devenu structurel pour l’œil. Reste à en préciser la chronologie et la géographie. Dans le jeu des échanges, la notion vague d’influence devrait être précisée, peut-être revue en termes de «réception» comme s’y emploient depuis des années les historiens de l’art ou de la littérature. De même la dimension spatiale des phénomènes, où il reste à remplacer la notion de Schriftprovinz, malmenée à juste titre chez J. Stiennon, par une construction sans doute plus mouvante de centres, de périphéries, de réseaux46, avec leurs rythmes d’évolution différenciés. Enfin, une articulation moins rigide de l’espace et du temps suppose des modèles d’explication historique plus [437] complexes que l’immanence du Zeitgeist et du Volksgeist invoquée jusqu’à Fichtenau et encore prégnante chez Marichal: une intégration de facteurs qui actualise en quelque sorte la paléographie «intégrale» avant la lettre, jamais remplacée depuis un siècle, de Wilhelm Wattenbach. Notre boîte à outils s’est enrichie pour ce faire, depuis trente ans, de moyens inédits, tant conceptuels que techniques, qui restent discutés, inégalement utiles et pratiqués en ordre dispersé. 3.2. L’écriture et l’écrit Les questions des paléographes ont recoupé celles d’autres spécialistes de l’écrit, sans que les échanges, de part et d’autre, aient pleinement porté leurs fruits. Se sont ainsi développées, au carrefour de l’histoire sociale, de l’anthropologie, de la diplomatique et de l’histoire 44 Pour ne pas alourdir les notes par des références bien connues, je n’entre pas dans le détail bibliographique des débats les plus généraux, au-delà de ce qui concerne spécialement les gothiques documentaires. 45 En revanche, DEROLEZ, The palaeography [3.7] se distingue par une attention constante à l’empreinte des formes cursives dans les formalisations livresques. 46 Sur la dimension spatiale des phénomènes culturels, intéressantes perspectives dans FRAY, L’histoire de l’art [3.1]. M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 14 littéraire, les études sur la culture écrite, la literacy, la Schriftlichkeit, la communication au Moyen Age. Mais un livre, un colloque après l’autre, traitant de l’écrit, ont oublié l’écriture. D’autres spécialités extérieures à l’histoire, plus sensibles au fonctionnement des signes et à leur matérialité, ont pu apporter des contributions théoriques originales. Le «savoir-voir» du typographe, aussi négligé par nous que le savoir-faire du calligraphe, a nourri les incursions toujours passionnantes du grand Stanley Morison dans l’histoire de l’écriture, y compris ce qu’on peut décrire comme une sémiologie politique des écritures médiévales — où on regrette d’autant plus l’absence des écritures diplomatiques. Une sémiologie plus explicite a été invoquée par Albert d’Haenens et plus récemment par Elisa Ruiz. Et la sémiologie «intégrationnelle» de Roy Harris, qui insiste aujourd’hui sur les logiques propres à l’écriture contre sa réduction à une image du langage, tend les bras aux paléographes qui voudront en tirer les conséquences. Mais il n’y a guère qu’en Italie, dans les perspectives sociales déjà citées d’A. Petrucci et d’A. Bartoli Langeli, ou à Marburg autour de P. Rück, que le croisement avec les méthodes propres à la paléographie ait atteint une certaine ampleur. Partout ailleurs, notamment chez les historiens français ou anglo-saxons, l’habitude du travail sur les sources imprimées contribue de toute évidence à une résorption générale de l’écriture dans le texte, du signifiant dans le signifié. 3.3. L’analyse des formes L’analyse visuelle du signe, fondatrice de la paléographie, dispose aujourd’hui de moyens autrement plus puissants que la description verbale [438] illustrée, mais il reste à mieux en tirer parti. Ainsi le recours à la mesure chiffrée, en dépit de manifestes et de discussions remontant déjà à trente ans. Saluons au passage les travaux de Léon Gilissen, bien que difficiles à transposer aux écritures courantes. Les expériences statistiques menées par Ezio Ornato, ses amis et ses collègues, sur la mise en texte des livres gothiques, en revanche, ne demandent qu’à être étendues à de larges corpus documentaires. Or dans ce domaine nous sommes au point mort, et la thèse citée d’O. Merisalo sur les documents du Poitou reste une exception, qui ressortit plutôt à la philologie (autrement plus sensible aux calculs de fréquence et à la répartition spatiale des phénomènes). Du côté des diplomatistes, une étude statistique pionnière comme celle de Th. Frenz (1976) sur trois siècles de diplômes pontificaux inclut tous leurs caractères externes… sauf l’écriture. Quant aux moyens techniques, la macrophotographie, également expérimentée depuis trente ans, ne fait plus guère parler d’elle, alors même que (parce que?) elle est désormais à la portée de tous. Sous sa forme numérique, elle ne peut que bouleverser les techniques de comparaison, de mesure et de comptage. A l’inverse, les procédés de reconnaissance automatisée des formes, quoique déjà efficaces sur les écritures posées, continuent d’être expérimentés par les ingénieurs des postes et des banques sur les cursives mais sans progrès décisifs, parce que l’ordinateur n’est pas un cerveau47. Il faut enfin insister plus que jamais, dans l’analyse morphogénétique, sur l’étude des données humaines telles que les invariants neurophysiologiques ou la psychologie de la perception. Les mécanismes cérébraux, moteurs et visuels qui façonnent l’écriture sont étudiés depuis des décennies. Déjà invoqués par J. Stiennon, ils nous sont désormais mieux connus grâce aux efforts de Colette Sirat et de P. Rück48, mais on a rarement dépassé le stade de la rencontre interdisciplinaire sans lendemain, alors même que la révolution des neurosciences et des sciences cognitives se propage depuis un quart de siècle dans tout l’édifice des sciences humaines. Ce sont de nouvelles voies qui s’ouvrent à nous, mais pour nous ramener, encore une fois, à Mallon. 47 48 SMITH, Numérisation [3.3]; et, dans le présent colloque, la communication de M. PALMA. L’écriture, éd. SIRAT/IRIGOIN/POULLE [3.3]; Methoden, éd. RÜCK [3.3]. M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 15 3.4. Qu’est-ce que la cursivité? Mallon a montré que l’essentiel était le geste. On a eu beau lui répondre que le ductus était incertain et variable, que la macrophotographie avait [439] une vue plus perçante que la sienne, que l’Épitomé ne pouvait dériver du De Bellis, cela n’a rien retiré à l’existence du ductus et à ses effets déterminants: seule l’analyse dynamique permet d’ordonner la généalogie des formes, y compris par des hypothèses sur les «chaînons manquants», comme Mallon l’a fait en virtuose dans ses études épigraphiques. Il faut reprendre en profondeur le problème de l’apparition de la cursivité comme moteur du développement, après des siècles de gestes bridés et d’évolution ralentie. La notion même de cursivité est souvent trop vague pour permettre une discussion profitable. Elle désigne tantôt des formes particulières, tantôt un degré d’exécution d’une écriture quelconque: ce que la nomenclature lieftinckienne traduit en distinguant l’adjectif currens du substantif cursiva49. Dans les livres, le rapport génétique est coupé: une textualis currens n’a jamais donné naissance à une cursiva textualis. Mais il se maintient en permanence dans les écritures usuelles. La naissance des écritures spécifiquement documentaires, c’est le moment où une habitude d’écriture currens a abouti à l’émergence d’une cursiva. Peut-on tracer une limite entre une écriture cursive et une non cursive? Le calligraphe et dessinateur de caractères néerlandais Gerrit Noordzij (un homme qui n’aime pas beaucoup les paléographes) a donné une définition imparable: le propre de la cursivité n’est pas la vitesse, c’est que l’instrument d’écriture peut être déplacé vers le haut; ou, comme l’a redit récemment Peter Gumbert, poussé et non seulement tiré. Cela augmente le frottement, dit Noordzij; on pourrait dire plus précisément: cela limite par intermittence le contrôle du scripteur, pour des raisons à la fois matérielles, physiologiques et visuelles. Au total, le tracé poussé n’est guère possible que pour un trait fin, avec relâchement de pression, donc en priorité pour les ligatures. La réapparition de la cursivité au XIIe siècle se manifeste précisément par la multiplication des ligatures: dans la terminologie de Gilissen, le ductus visible se rapproche du ductus complet. Des travaux rares et dispersés en ont analysé les modalités. E. Poulle a distingué deux types de ligatures: les unes de la tête d’une lettre au pied de la suivante, les autres de «séquence». Les premières, externes, en partie préexistantes mais cachées dans la caroline, se démasquent et se multiplient lorsque le geste s’accélère; les secondes, internes, sont propres à la cursivité; et on réalise une écriture dite «liée» quand on enchaîne, en alternance, les deux types50. E. Poulle a moins commenté la ligature qu’on pourrait appeler de pied en tête, sans doute [440] parce qu’elle est moins déformante. En revanche elle a été particulièrement mise en valeur par les Italiens. Costamagna a affirmé le principe d’une évolution séculaire de l’écriture latine du mouvement «dextrogyre» vers le «sinistrogyre», donc vers la ligature de bas en haut51. Casamassima a indiqué de même dans la ligature virgulariter et inferius le propre de l’écriture moderne, et étudié l’enrichissement des variantes de ligature comme mutation du système dans une perspective structuraliste52. Ses observations morphologiques se rapprochent souvent de celles de Heinemeyer mais il leur donne une tout autre cohérence théorique. Ces travaux très stimulants mériteraient une plus longue discussion53. Je noterai seulement ce désaccord fondamental: les travaux italiens se sont concentrés sur les rapports entre lettres voisines, en négligeant ce qui se passe à l’intérieur de chacune. Or un fait capital du XIIIe siècle, montré par E. Poulle54, est que les ligatures externes se sont multipliées au détriment de 49 Voir les travaux de LIEFTINCK, GUMBERT et DEROLEZ [3.7]. POULLE, La cursive gothique [2.6.1]. 51 Surtout dans COSTAMAGNA, Paleografia latina [3.4]; ID., Perché scriviamo cosí [3.4] chap. 7. 52 CASAMASSIMA, Tradizione [3.4]. 53 MASTRUZZO, Ductus [3.4] en donne une très approfondie et stimulante. 54 POULLE, La cursive gothique [2.6.1] p. 464. 50 M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 16 la cohérence interne, entraînant une désarticulation de la chaîne graphique. En réaction, en France vers 1300, la chancellerie a adopté une écriture réformée, basée sur l’exécution liée de la lettre individuelle: celle que nous appelons la mixte (même si ce terme un peu vague n’a guère eu de fortune hors de l’École des chartes), et qui est à l’origine de la diffusion européenne des écritures dites bâtardes55. J’en rapprocherais volontiers la formation de la mercantesca, fort différente, mais dont les modes de ligature, à la même époque, mènent aussi vers une exécution liée. Le développement du nouveau système graphique a été étudié par Casamassima à partir d’une seule catégorie de documents (ceux des notaires toscans) et comme un phénomène en soi, mettant de côté la question du contexte et l’ensemble des paramètres extragraphiques. Costamagna, lui, a soutenu une sorte de téléologie graphique millénaire justifiée par la physiologie, et dont les cursives actuelles seraient le résultat plus ou moins inéluctable. Seul P. Rück a esquissé en 1988 une approche globale des cursives médiévales dans leurs aspects fonctionnels, techniques et visuels à la fois, qui attend d’être relayée. La thèse de L. Kiseleva, en 1974, avait déjà envisagé à grande échelle, en appliquant Mallon aux cursives des XIIIe-XVe siècles, les conditions [441] historiques et techniques56. Elle reportait audacieusement jusqu’à des gloses du XIe siècle le développement de formes cursives dans les livres, en postulant même que des tendances pareilles devaient se rencontrer dès les IXe-Xe siècles dans l’écriture informelle, aujourd’hui perdue, sur tablettes de cire. Ce schéma est certes affaibli par des erreurs propres à un livre de jeunesse, entre autres sur la datation des gloses examinées, et il a d’ailleurs été contesté, l’argument des tablettes de cire apparaissant comme une vaine spéculation57. L’idée des documents fantômes vaut pourtant qu’on s’y arrête. 3.5. Un chaînon manquant? L’abondance des archives de la fin du Moyen Age peut donner l’illusion d’un panorama graphique complet. Mais six cent quarante-cinq chartes (soit 6,45 petits textes par an) ne sauraient faire un échantillon fidèle de tout ce qui a été écrit en Hollande et Zélande au XIIIe siècle. Parce que les écrits conservés étaient destinés à la conservation: des documents excessivement homogènes par leur nature et par leur mode de production. Or la disparition presque complète des écrits plus éphémères, et il faut penser particulièrement aux tablettes de cire, omniprésentes avant la généralisation du papier, n’annule pas leur rôle dans le système graphique. Cette Atlantide des écritures quotidiennes perdues ne jette-t-elle pas un autre jour sur les livres, les chartes et les registres qui nous restent? A l’opposé d’une paléographie science du visible ou même du mesurable, la conjecture ouvre ici un gouffre insondable, mais dont l’hypothèse même pourrait modifier l’équilibre de notre perception. Ainsi il paraît vraisemblable que la cursivité s’insinue dans les actes à mesure que la quantité d’écriture augmente, non pas tant mécaniquement, parce que le clerc, surchargé de travail, ne pourrait faire autrement, mais parce que, plus l’écriture devient banale, plus l’autorité des modèles se perd58: l’exigence se relâche, le geste se rapproche des habitudes du clerc, nous révélant la manière dont il écrirait pour lui-même. La diplomatique aurait sans doute son mot à dire sur la question: si les parchemins anglais montrent des marques de cursivité nombreuses et particulièrement précoces, dès la première moitié du XIIe siècle59, est-ce parce que la cursivité 55 ID., Compte rendu de Stiennon [3.4] p. 617-619; ID., Les faux [2.6.1]. KISELEVA, Goticeskiy kursiv [2.3]. 57 Le débat est récapitulé et la chronologie remise dans sa juste perspective par SPUNAR, Zum aufkommen [2.2]. Celui-ci rappelle que Pražák estimait, à l’opposé, la cursive gothique de Bohême directement issue de la textualis, parce qu’elle n’apparaît dans les livres qu’au milieu du XIVe siècle. Cette fois, c’était séparer abusivement les livres et les documents, et surtout juger l’évolution locale sans tenir compte des apports extérieurs. 58 CARDONA, Antropologia [3.2.1] p. 208. 59 Comme l’a déjà noté POULLE, La cursive gothique [2.6.1] p. 464. 56 M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 17 [442] serait plus répandue dans ce pays, ou simplement parce que nous avons gardé ces documents de forme modeste, particuliers à l’Angleterre, que sont les writs? La collecte des écritures de professionnels négligents et de non-professionnels, dont on conserve tout de même de nombreux exemples, paraît indispensable pour les XIIe et XIIIe siècles60. Les «habitudes», ce sont les réflexes de l’œil et de la main, d’autant plus actifs que le geste est plus rapide, plus soumis à son rythme propre et aux caractéristiques des supports et des instruments. Or si les réflexes acquis dans certaines situations dominantes continuent à jouer dans d’autres, les formes soignées pour durer ne peuvent-elles aussi nous dire quelque chose de celles qui ont disparu? Dans quel rapport se trouve l’écriture des parchemins voués à la conservation avec les formes plus éphémères tracées sur des rognures aussitôt jetées, dans la cire, et enfin sur papier? A ce stade des hypothèses, on ne peut qu’être frappé par une coïncidence: la réorganisation de la chaîne graphique par les ligatures, entre le XIIIe et le XIVe siècle, accompagne les progrès décisifs du papier et le déclin parallèle des tablettes. Peut-on exclure que la disparition accélérée d’un support millénaire ait causé une inflexion dans les positions de la main, dans ses mouvements et, au bout du compte, dans les normes visuelles de l’écriture? Cette coïncidence présente même des ressemblances troublantes avec la mutation de la cursive romaine au IIIe siècle, à un moment où les tablettes traditionnelles semblent avoir un temps régressé face au papyrus. Ce n’est pas le lieu ici d’approfondir cette question particulière61, mais je voudrais avoir suggéré l’ampleur des friches qui restent à explorer avant de construire une histoire de l’écriture dans les siècles où elle s’est le plus répandue. 3.6. Les logiques du système graphique L’interprétation historique de la morphologie ne saurait se contenter d’aligner les variétés de chaque lettre. La réalité de l’évolution, c’est l’interaction de ces formes entre elles, et non pas lettre par lettre, mais à l’intérieur d’une chaîne. L’écriture est un système, à la fois moteur et visuel, dont il nous appartient de reconstruire non seulement la diachronie mais les [443] logiques successives62. L’alphabet est un répertoire fini, structuré et évolutif de signes, euxmêmes composés à partir d’un répertoire fini, structuré et évolutif d’éléments géométriques indivisibles, ou plutôt de gestes élémentaires. Ainsi, pour rendre compte de l’histoire de chaque lettre, c’est tout le devenir de l’alphabet latin qu’il faudrait d’abord relire comme un kaléidoscope d’assimilations et de dissimilations, capable de mener les signes les plus dissemblables jusqu’à la gémellité63 et inversement, selon les dates, les lieux et les types. Les lettres ne vivent cependant pas dans l’alphabet, mais sur la page. L’écriture latine a évolué de la transcription des sons à la représentation des mots (sans parler d’unités de sens plus large), les deux niveaux restant imbriqués dans l’écriture comme dans la lecture, par la collaboration de zones différentes du cerveau. La graphématique64, telle qu’elle a été développée par la linguistique et adoptée par la philologie, décrit le rapport des signes écrits au langage, voire la logique interne (présente ou historique) de leur combinatoire, en faisant toutefois abstraction de la variation de leurs formes individuelles; donc la «substance graphique» au détriment de la «forme expressive»65. On serait tenté d’ajouter: comme si les textes avaient toujours été imprimés. Sauf que la typographie elle-même n’est pas neutre, elle 60 Ces scripteurs qui ont pu écrire plus ou moins régulièrement et même acquérir une certaine rapidité sans viser à la maîtrise formelle des professionnels, jouent un rôle vital dans le devenir de l’écriture et ne doivent pas être confondus avec les «semi-lettrés», que seuls ont étudiés Petrucci et son école, et dont la production, archaïque, pauvre, reste en marge de l’évolution. 61 Voir maintenant SMITH, De la cire au papyrus [3.5]. 62 C’est le projet de CASAMASSIMA, Tradizione [3.4]. 63 Par exemple, à la fin du Moyen Age, B/V ou O/R. 64 Excellente discussion dans une perspective paléographique chez MASTRUZZO, Ductus [3.4] p. 413-424. 65 Selon l’opposition chère à COSTAMAGNA (voir surtout les premières pages de Paleografia latina [3.4]). M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 18 n’est transparente que pour ses contemporains, et la forme expressive est précisément le domaine des typographes. Ceux-ci ont élaboré une tout autre approche du «graphe» et du «graphème», proprement visuelle, déclinée selon une grammaire stylistique mais fondée d’abord sur les critères de la «lisibilité», théorisés de longue date, et dont le répertoire des signes déjà mentionné n’est qu’un aspect66. Il revient aux paléographes de croiser ces axes complémentaires, centrés sur la lecture, avec la question de l’écriture comme production matérielle des signes, et avec la dimension historique. Je ne connais guère que Jean Irigoin qui ait tenté cette approche structurelle, pour l’alphabet grec. Dans l’écriture latine, la demi-onciale, première formalisation d’un système minuscule, «quadrilinéaire», avait établi un jalon décisif de la lisibilité, auquel la minuscule caroline était revenue. Les cursives du XIIIe siècle, elles, bousculent la norme au profit du mot graphique, précédemment [444] défini par la simple segmentation de la chaîne67. C’est alors une phase d’expérimentation intense des morphologies et de la répartition des allographes. Les lettres sont-elles plus distinctes si l’on prolonge les i? les m? les n? Si l’on élargit les t, les r ou les c? On finit par s’apercevoir que là n’est pas la question: pour l’œil comme pour la main, la solution la plus économique est dans la globalité du mot. On fera donc plonger et i et m et n, mais en finale. D’autres lettres, comme a ou s, seront pareillement différenciées selon leur position. L’intérieur du mot retourne en revanche à son homogénéité rythmique. Le perfectionnement des systèmes abréviatifs va dans le même sens. Tout ceci, parfaitement au point dans les normes de la chancellerie pontificale dès avant le milieu du XIIIe siècle68, n’est pas adopté en France avant 1300. Puis le mot, devenu un pour la main, avec un début et une fin, étend encore des traits d’attaque et de fuite, griffe le blanc alentour comme la cursive romaine s’était aventurée dans l’interligne. L’œil, en fin de compte, ne lit même plus un ruban hérissé et segmenté, mais plutôt une succession de formes qui ont un haut, un bas, une gauche et une droite. Il nous faudra continuer à creuser ce paradoxe: les cursives médiévales, réputées si difficiles à lire, révèlent à l’œil accoutumé des repères bien plus structurés que dans beaucoup d’écritures actuelles, un souci constant de sauvegarder la lisibilité en dépit de la vitesse, y compris en tirant de la vitesse même diverses marques visuelles distinctives69. 3.7. Typologie et nomenclature Ordonner dans un cadre commun la vie foisonnante des formes: voilà enfin une des plus grandes difficultés pratiques et théoriques à laquelle nous soyons confrontés. Si les praticiens du catalogage continuent à s’interroger sur les normes à suivre70, Peter Gumbert et maintenant Albert [445] Derolez ont bien montré l’enjeu de la typologie et de la nomenclature, fût-ce dans un cadre aussi rigide que celui de Lieftinck: quoi que l’on pense de sa réalité historique, c’est 66 Voir parmi bien d’autres SPENCER, The visible word [3.6]. Comme l’a dit RÜCK, Ligatur und Isolierung [3.4]. Je me concentre ici sur la forme des lettres au détriment de ce qui concerne la ponctuation ou le blanc entre les mots (en dernier lieu SAENGER, Space [3.6]), ainsi que les aspects linguistiques de la segmentation (voir par exemple, pour le français, les travaux d’ANDRIEUX-REIX et MONSONEGO). 68 Explicitement dans le recueil d’instructions commenté par G. TESSIER, Note sur un manuel à l’usage d’un officier de la cour pontificale (XIIIe siècle), in: Études d’histoire du droit canonique dédiées à G. Le Bras 1 (1965) p. 357-371. 69 C’est particulièrement vrai de la cursive «mixte» française (surtout pour les nasales finales plongeantes). Or au XVIe siècle la «lettera francese» est encore réputée dynamique et déformable entre toutes. Mieux encore, on la déforme à la fois pour aller vite et pour la rendre plus lisible selon G. B. PALATINO, Libro… nel quale s’insegna a scriver ogni sorte lettera (1540) fol. Diiii,, in O. OGG, Three classics of Italian calligraphy (1953) p. 177. 70 La question est remise à plat en dernier lieu par OVERGAAUW, Die Nomenklatur [3.7]. 67 M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 19 un instrument commode, heuristique et didactique, pour dépasser la simple constatation, admirative ou désespérée, de l’inépuisable diversité des productions humaines71. Les gothiques documentaires n’ont pas connu leur Lieftinck Elles ont connu Hajnal, dont les Schriftproben distinguaient déjà une trentaine de types successifs aux XIIe et XIIIe siècles selon des critères assez hétérogènes. Elles ont connu Franco Bartoloni, qui a proposé en 1955 une nomenclature riche, basée en trop grande partie sur des coordonnées extragraphiques, du type «semicursive notariale siennoise de type précarolin du XIe siècle». Elles ont connu surtout beaucoup d’habitudes variables et incohérentes: Bartoloni a eu raison de les dénoncer, mais rien n’a changé. Les tautologies extragraphiques y restent intimement mêlées: il est trop facile de caractériser les écritures de notaires comme notariales, et celles des chancelleries comme chancelleresques72. Même la typologie la plus élémentaire des diplomatistes paraît discutable. Ainsi la division entre minuscule et cursive, que Bartoloni consentait à garder, alors que minuscule ne saurait s’opposer formellement qu’à majuscule. Les diplomatistes appellent «minuscules» les minuscules non cursives, et «cursives» les minuscules cursives. On perpétue ainsi une confusion entre la morphologie et le mode d’exécution, dont la différenciation est justement l’acquis majeur de la nomenclature de Lieftinck. Au XIIIe siècle, dans une même chancellerie, on peut varier considérablement le degré de cursivité d’un même type parfaitement distinct, y compris en ralentissant un type conçu spécialement pour une exécution cursive, comme il en existe désormais. Il est d’autant plus difficile dans ces conditions de distinguer les mains. Avant de dresser une quelconque typologie, et de pouvoir en tirer une chronogéographie, ne serait-ce qu’entre les chancelleries, il y a donc des questions de fond et de méthode sur la notion même de type. Quel est le degré d’élasticité d’un type? Où est la limite entre deux types? Quelles peuvent être la variation d’une main dans le cours du temps et sa variabilité à un moment donné73? Quelle devrait être la finesse de la grille que [446] nous cherchons? Elle est probablement plus serrée que pour les livres, tant les écritures documentaires connaissent de variétés, locales ou non. L’idée, mise au point par J. P. Gumbert d’après Lieftinck, d’identifier des types en fonction de la fréquence des allographes de trois lettres diacritiques (a, s, l), a inspiré à Joachim Spiegel, en 1992, une méthode semblable pour formaliser le changement des écritures diplomatiques allemandes vers le milieu du XIVe siècle, déjà signalé par Heinemeyer (et qui correspond de fait à l’adoption de la «mixte»). Il a ainsi réparti dans un espace tridimensionnel la fréquence des allographes opposés de trois autres lettres choisies par lui, a, g et m, d’après son étude de cinq mille actes des comtes palatins du Rhin. La corrélation s’est révélée probante. Mais on voit bien que, pour chaque type, chaque époque, chaque question à poser, les indices (pas nécessairement réductibles à trois) devraient être différents, choisis sur mesure: aucune clef n’ouvrira toutes les portes. On peut imaginer une méthode moins empirique. Ce serait le recensement de la plus large sélection possible de caractéristiques potentiellement significatives (non seulement des formes de lettres individuelles), pour déterminer statistiquement, par analyse factorielle, lesquels sont vraiment pertinentes, en mesurant d’une part la répartition des mains en général, d’autre part des taux de corrélation entre les caractéristiques recensées. La lourdeur du traitement préalable exige qu’on l’expérimente d’abord sur des échantillons restreints, de quelques dizaines ou centaines de mains. Mais les résultats pourraient déjà indiquer si la notion même de type peut 71 Invoquée contre Lieftinck, on le sait, par CENCETTI, Lineamenti [2.4.1] p. 479. Je laisse ici cette discussion, pour la reprendre dans mon compte rendu de DEROLEZ, The paleaography, in: Scriptorium, à paraître prochainement. 72 Voir par exemple MAZZOLENI, Esempi [2.4.1]. 73 On a vu que KOCH, Die Schrift [2.1.1] fournit des éléments utiles. PARISSE, Un scribe [2.6.1] va jusqu’à dater des chartes à quelques années près sur la base d’une évolution individuelle supposée linéaire. M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 20 être maintenue (ce qu’il faut espérer): des corrélations imprévues pourraient mettre en lumière des critères de groupement typologique qui échappent à première vue à l’observateur moderne74. 3.8. Enseignement de l’écriture Les instructions et modèles des maîtres de la fin du Moyen Age peuvent aussi aider à réfléchir, depuis que Herrad Spilling a donné une interprétation cohérente de leur nomenclature, et bien qu’ils se limitent essentiellement au XVe siècle, au domaine germanique et à quelques types, dont certains déjà bien démodés. A travers ces documents, dont de nouveaux exemples sont signalés de temps en temps, nous en revenons ainsi toujours à la question de Hajnal: où et comment apprend-on à écrire? [447] Quelle est la part du modèle, et quelle est la marge de liberté du scripteur? Quel rôle les maîtres comme ceux que nous connaissons jouent-ils vraiment, avec leurs modèles plus ou moins partagés, face aux institutions qui développent leurs propres types et les enseignent aux clercs qu’ils recrutent75, ou face aux écoles des marchands et à l’apprentissage que ceux-ci reçoivent aussi bien «sur le tas»? Les études sur l’enseignement de l’écriture, professionnelle ou non, restent remarquablement peu nombreuses, et la documentation elle-même étrangement fuyante. C’est encore une question où nous sommes presque plus avancés pour l’Antiquité que pour le Moyen Age, et nous aimerions avoir un travail comparable à la récente thèse de Raffaella Cribiore, qui éclaire la terminologie et la typologie des écritures d’après plus de quatre cents exercices scolaires de l’Égypte gréco-romaine. Conclusion Comment conclure? Ce serait bien prématuré, tant est grande la disproportion entre la quantité des documents disponibles, l’ampleur des questions ouvertes et l’état de la bibliographie, certes riche en qualités mais embryonnaire et entravée par le cloisonnement national et documentaire. Nous avons seulement effleuré l’histoire des gothiques diplomatiques et cursives, un carrefour historique de l’écriture latine, un chantier formidable où expérimenter et approfondir l’ensemble des hypothèses et des procédés de la paléographie. Les écritures de l’Antiquité et du haut Moyen Age ont stimulé depuis trois siècles, par leur aspect énigmatique et grâce à leur rareté même, des réflexions multiples concernant aussi bien les mécanismes matériels que les paramètres historiques qui agissent sur les formes. La masse des documents des XIIe-XVe siècles (et pourquoi nous arrêter là?) doit permettre d’éprouver nos méthodes à une échelle plus proche de la réalité, autrement dit de penser la complexité dans des termes à sa mesure plutôt que de vouloir la contraindre dans des schémas a priori. Il reste à faire des efforts nouveaux d’imagination, mais aussi à importer des concepts et des procédés existants, qui permettent des traitements de série efficaces, en particulier par des formalisations chiffrées: ce ne sera pas renier la vocation ni les principes de la paléographie, mais bien confirmer leur validité et leur vivacité au sein des disciplines, plus nombreuses que jamais, qui ont pour ambition d’expliquer l’écriture. 74 Un tel projet est à l’étude, par Olivier Guyotjeannin et moi-même, sur les caractères diplomatiques et paléographiques des procurations et excuses pour l’assemblée convoquée à Paris pour la croisade en 1317, conservées dans le Trésor des chartes (Archives nationales, J 443-444). 75 Pour un état plus détaillé de ces questions, je renvoie à SMITH, Pour une préhistoire [3.1]. M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 21 [448] BIBLIOGRAPHIE On trouvera ici un recensement méthodoque et chronologique des principaux travaux des années 1953-2003, augmenté de quelques études de référence plus anciennes et de plusieurs qui ne concernent pas strictement les gothiques documentaires. Le plan suit les grandes lignes du rapport ci-dessus, pour permettre une vue synthétique de la production. Les titres cités ici sont repris en note sous forme abrégée. Pour des références plus détaillées, on peut se reporter à la bibliographie de paléographie publiée en ligne par l’École des chartes: <theleme.enc.sorbonne.fr>. 1.Quelques jalons historiographiques POST G., A general report. Suggestions for future studies in late mediaeval and Renaissance palaeography, in: X Congresso internazionale di scienze storiche. Relazioni 1 (1955) p. 407-422. ROSS B., Latin palaeography in the later Middle Ages. Some recent contributions, in: Medievalia et humanistica N. S. 2 (1971) p. 153-163. 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Écritures diplomatiques STEFFENS F., Lateinische Paläographie (21909, réimpr. 1929, 1964); trad. française, Paléographie latine (1910, 2 1929, réimpr. 1982). [449] HESSEL A., Von der Schrift zum Druck, in: Zs. des Deutschen Vereins für Buchwesen und Schrifttum 6 (1923) p. 89-105. UHLHORN F., Die Großbuchstaben der sogenannten gotischen Schrift, mit besonderer Berücksichtigung der hildesheimer Stadtschreiber (1924). FOERSTER H., Abriß der lateinischen Paläographie (1949, 21963, réimpr. 1981). GENZSCH H. A., Kalligraphische Stilmerkmale in der Schrift der luxemburgisch-habsburgischen Reichskanzlei, in: MÖIG 45 (1931) p. 205-214. HESSEL A., Die Schrift der Reichskanzlei seit dem Interregnum und die Entstehung der Fraktur, in: Nachrichten Göttingen. Fachgr. 2: Mittlere und neuere Geschichte N. S. 2/3 (1937) p. 43-59. FICHTENAU H., Die Lehrbücher Maximilians I. und die Anfänge der Frakturschrift (1961). STURM H., Unsere Schrift. Einführung in die Entwicklung ihrer Stilformen (21961). 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