[Actes du XIVe colloque du Comité international de paléographie latine, Enghien-les-Bains, 19-20 septembre 2003],
Archiv für Diplomatik, 50, 2004, p. 417-465.
Les «gothiques documentaires»:
un carrefour dans l’histoire de l’écriture latine
Marc H. Smith
École nationale des chartes, Paris.
«Quand donc enfin, au lieu de piétiner dans l’écriture livresque, les paléographes voudrontils étudier avec autant de persévérance l’écriture des chartes*1?» On aura peut-être reconnu ce
quousque tandem, inspiré à Charles Higounet par l’événement que nous fêtons aujourd’hui, le
colloque de 1953 sur la Nomenclature des écritures livresques. On pourrait occuper une grande
partie de ce rapport à citer les constats semblables exprimés depuis cinquante ans et plus, que
ce soit sous la forme du reproche exaspéré, du regret fataliste, de l’observation indifférente ou,
plus rarement, de la déclaration programmatique. Selon l’image récurrente chez plusieurs
paléographes allemands, les écritures de la fin du Moyen Age, et particulièrement les
documentaires, sont restées l’enfant mal aimé de la famille, celui que la paléographie traite en
marâtre, stiefmütterlich2. Cette antienne sans cesse répétée laisse deviner d’emblée les
difficultés que l’on rencontrera à vouloir dessiner cinquante ans de progrès de la recherche.
[418]
1. Aperçu préliminaire
1.1. Définitions
Traçons d’abord les limites de notre propos — et que Jean Mallon nous pardonne de
commencer encore une fois par nous partager la tunique sans couture3. Qu’entendons-nous par
écritures gothiques documentaires?
Le mot «gothique» est encore moins justifié ici que pour les variétés employées dans les
livres. Il s’agit d’écritures qui se sont développées à la même époque, dans la même
civilisation, mais pour d’autres usages et selon d’autres voies, en sorte qu’elles ne répondent
que partiellement aux caractères structurels qui définissent habituellement l’écriture gothique
(comme les règles de Meyer et de Zamponi4). Elles se conforment encore moins nettement aux
critères par lesquels on a voulu la rapprocher du style ou même de la forma mentis du temps: la
verticalité, la brisure, une structure fractionnée faite d’éléments minimaux en antithèse5. Les
écritures documentaires répondent même à des tendances inverses, qui les poussent à limiter
toujours plus les levers de plume. Ce phénomène, la «cursivité», est lié à une accélération du
geste graphique dont il est inutile de rappeler ici le contexte historique. Il faut seulement
répéter que les écritures documentaires et livresques de la fin du Moyen Age, cursives ou non,
ne sauraient être considérées, contrairement à l’illusion des contemporains eux-mêmes, comme
deux faces d’une même écriture, mais bien comme deux filons devenus essentiellement
* Les références abrégées renvoient à la bibliographie méthodique en appendice, avec indication des
subdivisions de celle-ci.
1
C. HIGOUNET, compte rendu de Nomenclature [3.7] in: Annales du Midi 67 (1955) p. 292, cité par
STIENNON, L’écriture diplomatique [2.6.3] p. 17.
2
Par exemple HEINEMEYER, Studien [2.1.1] p. 54; FOERSTER, Abriß [2.1.1] p. 196 appelle même Stiefkind
toute l’écriture gothique.
3
En dernier lieu, MALLON, Qu’est-ce que la paléographie? [3.1].
4
Pour mémoire, S. ZAMPONI, Elisione e sovrapposizione nella «littera textualis», in: Scrittura e civiltà 12
(1988) p. 135-176.
5
Surtout FICHTENAU, Mensch und Schrift [3.1] p. 186 sqq.; MARICHAL, L’écriture latine [3.1] p. 233-243.
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 2
indépendants6 — en dépit même des échanges toujours possibles, et du fait que l’écriture
livresque subsistera encore longtemps dans certains documents, tandis que la documentaire, en
retour, envahira bientôt les livres. Admettons donc, provisoirement, l’utilité d’en traiter
séparément.
Donc: où commencer? Quand et comment a eu lieu la dissociation? Globalement, le filon
documentaire de la fin du Moyen Age est issu des minuscules diplomatiques et/ou notariales,
qui au XIIe siècle n’étaient plus qu’un travestissement plus ou moins élaboré de la minuscule
des livres, et qui suivaient [419] donc la même pente vers la gothicisation. Cette évolution
commune, inévitable à partir du moment où l’écriture des scriptoria avait constitué le seul
modèle, l’écriture «normale» de la chrétienté latine, devait finir par éclater: l’évolution des
livres vers l’écriture gothique, avec les contraintes imposées à son ductus, avec ses formes
progressivement adaptées à des modes spécifiques de lecture, de production, de mise en page,
allait à l’encontre des besoins de la «pratique», variés et non moins spécifiques. La différence
entre livres et documents n’avait affecté jusque-là que la superstructure de l’écriture au sens
littéral, les excroissances ornementales; désormais, au-delà des différences croissantes de
morphologie et de style, elle va toucher les structures mêmes.
Indiquer un commencement, c’est donc chercher à fixer l’origine presque insensible d’un
phénomène voué à prendre une ampleur croissante dans la très longue durée — puisque le
XXIe siècle sera peut-être le premier à le voir décroître. Les premières traces d’un mode
nouveau d’écriture apparaissent à des dates fort différentes à travers l’Europe, entre le début du
XIIe siècle et le XIIIe avancé. A défaut d’une limite chronologique unique, il s’agira donc ici de
l’ensemble des écritures documentaires de l’époque dite gothique, au fur et à mesure qu’elles
se sont différenciées de la minuscule diplomatique à base caroline. Pour ne pas multiplier les
périphrases ou les synonymes incertains, je les appellerai de manière générale, quoique peu
satisfaisante, les gothiques documentaires.
Quant à la borne finale, il ne devrait y avoir aucune raison de nous limiter au Moyen Age: ni
le retour des humanistes à la littera antiqua ni l’imprimerie n’ont mis fin au développement des
cursives gothiques. Celles-ci poursuivent leur carrière en Italie même, rhabillées à la dernière
mode, jusque dans la cursive «italique»; dans d’autres pays, elles subissent une hybridation
progressive. En France, avec la «ronde», plus encore en Angleterre, avec les special set hands7,
et dans la chancellerie pontificale8, avec la bollatica, quelques élaborations calligraphiques
prolongeront jusqu’aux XIXe et XXe siècles des canons gothiques parfois caricaturaux. En
Allemagne, c’est une évolution sans aucune solution de continuité, jusqu’à la suppression
paradoxale de la deutsche Schrift par Hitler9. Je renonce malgré moi à traiter de ces
développements modernes, en partie pour faire [420] court mais aussi parce que, dans un
inventaire de l’activité de recherche, on pourrait seulement constater que les écritures les plus
tardives ont été les plus ignorées10.
1.2. Une synthèse pionnière: Cencetti
Un bilan paléographique du dernier demi-siècle se justifie non seulement par l’anniversaire
de la fondation du CIPL mais peut-être plus encore par la parution en 1954 du traité
fondamental de Giorgio Cencetti. Modestement intitulé Lineamenti di storia della scrittura
latina, et conçu comme un simple manuel universitaire, on sait qu’il est devenu au fil de
6
CENCETTI, Paleografia latina [2.4.1] p. 133; CASAMASSIMA, Tradizione [3.4] p. 17.
Voir notamment HECTOR, The handwriting [2.7].
8
FRENZ, Littera sancti Petri [2.4.5].
9
P. RÜCK, Die Sprache der Schrift. Zur Geschichte des Frakturverbots von 1941, in: Homo scribens (1993)
p. 231-272, rééd. in: ID., Fachgebiet Historische Hilfswissenschaften [3.1] p. 141-158.
10
On trouvera cependant les références principales dans la bibliographie, sections [2.1.3] et [2.6.2].
7
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 3
l’écriture la synthèse la plus ambitieuse et la plus complète à ce jour de toute l’écriture latine11.
Un nouveau bilan aujourd’hui, c’est donc la comparaison avec l’état des connaissances et des
problèmes réuni par Cencetti; comparaison facilitée entre autres par la réédition de son livre en
1997 avec un ample supplément bibliographique12.
Dans le domaine documentaire, la référence à Cencetti est d’autant plus indispensable qu’il
s’y est avancé en pionnier: le premier, et à ce jour le dernier, il a tenté en plus de trente pages
un tableau européen du renouveau des écritures documentaires à l’époque gothique, sans
compter leurs prolongements modernes. Par comparaison, le manuel de Giulio Battelli, réédité
peu avant et encore récemment13, consacrait à la «minuscule gothique cursive» deux pages de
texte et quatre petites illustrations. Cencetti était bien conscient des limites de son coup d’essai:
il ne pouvait s’appuyer que sur de rares manuels nationaux, essentiellement pratiques, la
plupart vieux de quelques dizaines d’années14.
Il a donc procédé par observation directe des fac-similés à sa disposition: pour l’Europe en
général et l’Allemagne en particulier, l’inépuisable recueil de Steffens15; pour l’Italie, outre les
originaux et les travaux spéciaux sur la chancellerie pontificale, le recueil de Federici16; pour la
France les planches [421] des manuels de Prou et de Boüard17; pour l’Angleterre, l’énorme
collection formée par la Palaeographical Society et la New Palaeographical Society18; pour
l’Espagne, García et Millares19. Pour réunir la totalité de la documentation existante à cette
date, il lui aurait suffi d’ajouter quelques travaux et recueils nationaux ou locaux d’importance
inégale; on notera surtout l’absence des premières recherches d’István Hajnal, autre pionnier
des gothiques documentaires; la publication de ses Schriftproben à Budapest en 1943 avait peu
favorisé leur diffusion20.
Cencetti a dessiné des lignes d’ensemble claires, à l’aide des concepts historicistes qui sont
sa propre contribution à l’avancement des théories paléographiques: à l’intérieur de l’écriture
caroline, devenue progressivement l’écriture «normale» ou «usuelle» de son temps, se
manifestent à nouveau, à partir du milieu du XIIe siècle, les tendances divergentes, immanentes
dans toute écriture mais provisoirement latentes, réprimées, entre cursivité et calligraphie: elles
aboutiront d’une part à la stylisation gothique et d’autre part aux nouvelles écritures cursives et
diplomatiques, dont le chaos s’organisera bientôt en variétés nationales. Cencetti décèle ici, à
juste titre, un «moment d’une importance primordiale». Dans le détail, il procède
inévitablement par description analytique; sans doute les proportions du tableau sont faussées
par le nombre limité des recueils utilisés, par leur conception hétérogène, par leur fréquente
préférence pour la production formalisée des chancelleries au détriment des filons plus libres;
mais il constitue le premier essai sérieux de comparaison à grande échelle et sur une longue
durée, avec une attention nouvelle aux influences réciproques, par exemple à la diffusion
internationale de la «bâtarde» issue de la chancellerie française. Cencetti est aussi le premier à
souligner l’intérêt de l’écriture spéciale des marchands italiens, la mercantesca, et à y déceler
la marque d’un enseignement professionnel.
Personne n’a encore fait mieux, sur ce sujet comme sur bien d’autres. Le CIPL, qui
encourage les entreprises éditoriales d’intérêt commun, ferait œuvre pie en promouvant la
11
CENCETTI, Lineamenti [2.4.1] p. 222-254.
En même temps que la traduction italienne avec mise à jour de BOYLE, Medieval Latin palaeography [1].
13
BATTELLI, Lezioni [2.4.1] (éd. de 1939) p. 230-234.
14
Encore n’avait-il peut-être pas à Bologne tous les livres utiles, et il ne paraît pas avoir utilisé les rares
études plus précises déjà parues sur les documents anglais ou allemands.
15
STEFFENS, Lateinische Paläographie [2.1.1].
16
FEDERICI, La scrittura [2.4.1]
17
PROU, Manuel [2.6.1]; BOÜARD, Manuel [2.6.1].
18
Facsimiles [2.7].
19
GARCÍA VILLADA, Paleografía española [2.5.1]; MILLARES CARLO, Tratado [2.5.1].
20
HAJNAL, Vergleichende Schriftproben [2.2].
12
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 4
traduction de ce monument d’intelligence historique, encore trop peu fréquenté hors d’Italie
(en y ajoutant, mieux encore, un CD-Rom des innombrables fac-similés qu’il cite mais sans
pouvoir les reproduire). [422]
1.3. Dispersion des approches
Depuis Cencetti, le matériau et les études se sont multipliés. D’abord, avec la banalisation de
l’édition photographique, de nombreux nouveaux recueils de fac-similés ont paru, toujours
limités à un cadre national ou régional, mais d’autant plus utiles pour dresser une géographie
générale. Désormais, cette production est brutalement démultipliée par la numérisation, qui
permet déjà de consulter en ligne des dizaines de milliers de documents; mais nous n’en
faisons encore presque aucun usage scientifique. La paléographie du Moyen Age tardif était
déjà impuissante à s’orienter dans la masse des archives, et réclamait des fac-similés.
Désormais nous allons nous trouver submergés par les fac-similés eux mêmes, faute d’outils
techniques, mais aussi faute de critères théoriques efficaces. La tradition vénérable du
minutieux artisanat paléographique se retourne contre nous21.
Le bilan est difficile à synthétiser: peu de grands axes visibles, encore moins de programmes
communs comme il y en a pour les livres ou pour les chartes latines plus anciennes. La
recherche a procédé à la fois dans le cadre trop commode des frontières nationales et selon des
angles d’approche dispersés, qui ne font souvent que croiser l’histoire de l’écriture.
Quant aux limites géographiques: matériellement, les chartes et les registres ont moins
voyagé que les livres. Et l’horizon de recherche des historiens, à la différence des philologues,
reste marqué par la conception qui a fait de la nation le sujet même de l’histoire ou en tout cas
son cadre habituel. Ainsi se forment des bulles bibliographiques étanches qui n’éclatent que
rarement: même sur des sujets d’intérêt commun, comme les mécanismes d’évolution des
formes cursives, les interlocuteurs potentiels ont construit des modèles parallèles ou
contradictoires en continuant de s’ignorer. La recherche n’a pas atteint en quantité la masse
critique qui permettrait d’instaurer un dialogue autour de pôles reconnus. La chronologie et la
géographie générales des écritures n’ont fait l’objet d’aucun travail comparable à ceux qui ont
porté sur la naissance et la diffusion de la minuscule caroline ou même de la gothique
livresque. Ainsi nous sommes sans réponse à la question cruciale posée par Hajnal dès 1943 de
la naissance étrangement unitaire, d’un bout à l’autre de l’Europe, des nouvelles écritures aux
XIIe-XIIIe siècles. De même à la question inverse: comment est-on finalement revenu de l’unité
à un nouveau particularisme, correspondant à de nouveaux découpages politiques et
linguistiques? Les efforts de synthèse se sont limités aux passages obligés des manuels, là
encore dans [423] un cadre national et selon un mode d’exposition sommairement typologique
et descriptif.
1.4. Paléographie et diplomatique
Dans le partage académique des tâches, les écritures documentaires ont été laissées aux
archivistes et aux diplomatistes, qui se soucient d’enseigner le déchiffrement, de trouver des
critères de datation, de localisation et d’authenticité, et beaucoup moins de scruter les voies
mystérieuses de la morphogenèse. Le divorce entre la diplomatique et l’histoire de l’écriture,
déjà amorcé à la fin du XIXe siècle au profit d’une philologie conquérante, a été consommé
depuis cinquante ans avec l’essor de la codicologie22. C’en est au point que les historiens,
quand ils demandent à la diplomatique de leur dater les documents, en oublieraient de
l’interroger sur la forme des lettres23.
21
SMITH, Numérisation et paléographie [3.3].
P. RÜCK, La diplomatique [1].
23
Dating undated medieval charters, éd. M. GERVERS (2000).
22
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 5
Alors que la production des chancelleries a été l’objet de travaux sans nombre, surtout chez
les diplomatistes de langue allemande et chez leurs voisins d’Europe centrale, le paléographe y
est constamment frustré. La paléographie, comme science auxiliaire d’une autre science
auxiliaire, s’est concentrée sur les caractères qui permettent de distinguer des mains, avec une
minutie souvent admirable, et même un sens subtil des variations individuelles et collectives24,
mais à travers des aspects tout extérieurs: la morphologie, le style et surtout les ornements.
Citons seulement cet aveu éloquent, dans une étude de 1969 sur la chancellerie de Bohême:
«On ne peut facilement distinguer les caractéristiques de cette écriture, parce que la plupart des
lettres sont toutes simples, sans ornement ni particularités»25. Les descriptions verbales,
éparpillées et souvent dépourvues d’illustrations26, ne sauraient inspirer aucune vue d’ensemble
des caractères propres à une chancellerie ou des échanges possibles. Dans un colloque
international tout récent (publié en 1999)27 sur l’influence européenne de la chancellerie
pontificale, la minuscule curiale, à nos yeux un aspect éclatant de cette influence, a été parmi
les questions les plus oubliées; et on peut dire que le [424] problème n’a guère été abordé de
front depuis 1924, date d’un article modeste mais pionnier du Belge Hubert Nélis28.
Si je procède d’abord à un bilan par zones géographiques plutôt que par grands axes de
recherche, ce n’est donc pas seulement par facilité: c’est ainsi que se présente la matière. Mais
il faudra revenir ensuite sur quelques grandes questions qui ont été abordées ou qui
mériteraient de l’être à l’avenir.
2. Bilan par régions géographiques
2.1 Pays germaniques
L’intérêt porté à l’écriture gothique varie considérablement selon les pays, en fonction de sa
postérité dans l’histoire de chacun. Je commencerai donc par les terres germaniques,
Allemagne, Autriche et Suisse, où ce filon est le plus nourri pour d’évidentes raisons
historiques, et grâce à une vigoureuse tradition d’étude des documents.
2.1.1. Écritures documentaires
Dans la littérature diplomatique, c’est la recherche germanique qui a consacré le plus grand
nombre de travaux aux aspects graphiques. A l’orée de la période qui nous intéresse, nous en
devons plusieurs à Walter Koch, notamment sur la chancellerie impériale du XIIe siècle. Parmi
une série d’études diplomatiques générales, il a consacré en 1979 un volume spécial aux
écritures de cette institution. La méthode y repose toujours sur l’examen individuel des mains,
mais aboutit aussi à des conclusions d’un intérêt plus large, sur les formes d’interaction entre
les différents notaires ou sur l’influence sensible, passagère ou durable, de leurs voyages en
Italie29. Ensuite, il faut surtout citer les travaux de Peter Rück, depuis son étude de la
chancellerie épiscopale de Bâle30; avec ses élèves de Marburg, il a renouvelé notre perception
de tous les aspects graphiques de la production diplomatique; en ce qui concerne l’écriture,
citons au moins Gudrun Bromm sur les litterae notabiliores. P. Rück a enfin organisé en 1989
24
Voir par exemple les considérations générales de BANSA, Studien zur Kanzlei [2.1] p. 107-108.
ŠEBÁNEK/DUŠKOVÁ, Urkundenwesen König Ottokars II. [2.2] p. 257.
26
Un exemple récent entre cent, les deux volumes monumentaux de H. E. MAYER, Die Kanzlei der
lateinischen Könige von Jerusalem (MGH Schriften 40, 1996).
27
Papsturkunde [2.1.1].
28
NÉLIS, De l’influence [2.6.3].
29
Voir surtout KOCH, Die Schrift [2.1.1] ainsi que, dans la même série, les études du même sur les années
1167-1174 et celles de R. M. HERKENRATH sur les années 1174-1190.
30
P. RÜCK, Die Urkunden der Bischöfe von Basel bis 1213 (1966).
25
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 6
un [425] colloque fondamental où ont été confrontées toutes les méthodes de description de
l’écriture, de la paléographie à l’expertise judiciaire et jusqu’à la psychographologie.
Sur la fin du Moyen Age, quelques travaux prometteurs avaient vu le jour dès les années
vingt et trente, sous la plume de Hans Genzsch et d’Alfred Hessel, à la recherche des origines
médiévales des caractères typographiques allemands (Fraktur), ou de Friedrich Uhlhorn, sur
l’évolution des majuscules. En 1946, Heinrich Fichtenau n’en constatait pas moins que le
domaine restait désert31. La première et dernière synthèse sur l’écriture des documents
allemands de 1140 à 1500 a été écrite par Walter Heinemeyer peu après, au cours des années
1950 et encore rééditée, mieux illustrée, en 1982. A un corpus régional (entre Rhin et Main)
puis local à mesure que la masse documentaire augmente, il applique une méthode résolument
positiviste: peu importe la Geistesgeschichte à la Fichtenau, remise à plus tard32, il s’agit de
s’assurer de la date des documents. Chacune de ses trois périodes est envisagée selon un
schéma analytique: les caractères généraux (format, interligne, chrismon, majuscules,
minuscules, etc.), puis une analyse morphologique lettre par lettre: majuscules, minuscules,
ligatures et abréviations. La grande finesse des observations, en particulier sur les ligatures,
permet au lecteur de voir changer le système graphique, mais cette vision d’ensemble reste
implicite, parce que Heinemeyer continue à raisonner en termes de morphologies plutôt que de
ductus, la naissance des cursives étant assimilée à un simple changement stylistique. Cette
grille de lecture l’amène à présenter pêle-mêle, en fonction d’une chronologie linéaire, des
formes saisies à des stades très différents de cursivité, donc de développement.
En 1963 a paru la 2e édition du manuel de paléographie de Hans Foerster, récapitulant les
travaux des trois décennies précédentes, notamment Hajnal, Genzsch et Heinemeyer. Mais,
malgré ses intérêts de diplomatiste et malgré le recueil de fac-similés de chartes qu’il a luimême produit, il consacre aux écritures documentaires trois à quatre fois moins d’espace
qu’aux gothiques livresques; et plutôt que comme une articulation essentielle de l’histoire de
l’écriture, il en présente la naissance simplement comme une «création issue d’écritures
livresques et diplomatiques dégénérées» par une accélération mal maîtrisée33.
Ces types d’interprétation, tendant à faire des cursives une écriture sans histoire, ont suscité
des réactions notables en Allemagne de l’Est. Ici, et [426] notamment à l’université de
Potsdam, en polémique avec les interprétations de la recherche bourgeoise, on a mené entre les
années cinquante et soixante-dix une série de travaux, synthétisés en 1978-1979 par Friedrich
Beck et Peter Langhof. Passé l’invocation liminaire de Marx et Engels, ces recherches visent à
donner aux écritures cursives une véritable dimension historique, sociale mais aussi
institutionnelle, qui éclaire leurs caractères en fonction de leurs usages, dans plusieurs
chancelleries princières et dans quelques villes de la Hanse, entre le XIIIe et le XVe siècle. P.
Langhof a mis en évidence l’influence combinée et alternée des écritures cursives et livresques
sur les chancelleries, qui forment ainsi un carrefour de l’évolution graphique. Dans la
diachronie, il a souligné le caractère anarchique et expérimental des écritures de la deuxième
moitié du XIIIe siècle, puis l’élaboration tâtonnante d’une nouvelle discipline. F. Beck, lui, a
étendu ensuite ses recherches aux cursives du XVIe siècle. Il a encore contribué en 1994 à un
manuel où il reprend l’histoire des gothiques documentaires dans le cadre d’une utile synthèse
didactique des écritures allemandes, des origines au XXe siècle; le contexte social reste ici un
peu extérieur au discours mais n’est pas oublié.
2.1.2. Extension des formes cursives aux livres
Le grand manuel de Bernhard Bischoff (1979) a été décevant sur les gothiques, par un effet
de sa préférence pour les époques antérieures. Mais surtout, il est représentatif des nombreuses
31
Lire son jugement sévère dans FICHTENAU, Mensch und Schrift [3.1] p. 204.
HEINEMEYER, Studien [2.1.1] p. 55.
33
FOERSTER, Abriß [2.1.1] p. 211.
32
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 7
études qui considèrent les cursives uniquement en fonction de leur adaptation aux livres. Le
chapitre commence même par ce paradoxe: «Le deuxième grand groupe d’écriture livresque à
l’époque gothique est la cursive»34.
Ce domaine d’entre-deux a été spécialement étudié en Allemagne et en Europe centrale. Il
faut passer plus vite, parce que nous sortons des documents, mais citons au moins les divers
travaux d’Otto Mazal, ainsi que ceux de Charlotte Ziegler sur les manuscrits de Zwettl en
Autriche ou de Thomas Frenz sur les manuscrits du Vocabularius Ex quo, fort éclairants sur la
variété des caractères régionaux. Cela contribue à la connaissance des gothiques
documentaires, quoique indirectement et sans procéder aux comparaisons qui devraient
s’imposer avec les documents eux-mêmes.
Ces jalons ont été repris en 1987 par Karin Schneider dans son beau travail sur les gothiques
allemandes de la fin du XIIe et du XIIIe siècle. Elle [427] aussi s’intéresse surtout aux livres,
mais elle présente par ailleurs l’évolution des formes documentaires des différentes régions,
d’après Heinemeyer et également d’après ses propres observations. Son approche est
descriptive et elle donne peu de fac-similés documentaires, mais c’est une contribution de
poids à une future étude d’ensemble. En 1999 elle a mis à profit ce travail dans son excellent
manuel pour philologues germanistes.
2.2. Europe centrale et orientale
Au-delà des pays germaniques, et en partie dans leur sillage historiographique, ceux
d’Europe centrale et orientale ont aussi produit et produisent en nombre croissant des travaux
sur leurs propres écritures gothiques, souvent proches des formes allemandes. Cet intérêt pour
les documents de la fin du Moyen Age se justifie particulièrement dans des régions ou
l’écriture s’est développée tardivement, en sorte que les chartae latinae antiquiores nationales
ne sont souvent guère antérieures à l’époque gothique35. Il faut regretter que l’obstacle
linguistique fasse en grande partie méconnaître la richesse de cette historiographie.
Après les travaux fondateurs publiés par Hajnal dans les années quarante et cinquante, et ses
hypothèses controversées sur la formation des professionnels de l’écriture, l’intérêt s’est
déplacé plus particulièrement, là aussi, vers le domaine aux confins des livres et des
documents. C’est notamment le cas de l’ancienne Tchécoslovaquie: il faut citer, sur les
bâtardes et l’humanistique, les travaux de Jiří Pražák, récemment disparu, et de Pavel Spunar.
On retrouve ici un apport spécifique, d’influence peut-être hajnalienne mais relayée par le
marxisme, attentif à l’interprétation des écritures dans leur contexte social36. Quant aux études
diplomatiques, elles ont au moins permis d’étendre le panorama des écritures connues, par
exemple aux intéressantes cursives de la chancellerie de Pologne, étudiée en 1961 par Maria
Biełińska et Irena Sułkowska.
Tous ces travaux sont repris depuis peu par de jeunes chercheurs, tchèques et slovaques
toujours, mais aussi hongrois ou polonais: au sein d’un réseau nouvellement formé, ils
s’attaquent avec énergie à des problèmes variés: une terminologie paléographique, l’écriture
documentaire [428] dans sa diversité régionale, et même les cursives modernes37. Hana
Pátková vient de publier les trois premiers fascicules de son corpus des écritures cursives de
Bohême par localités, commentés en tchèque et, Deo gratias, en latin. Un colloque tenu en
34
BISCHOFF Paläographie [2.1.2]; je cite d’après la trad. française, Paléographie de l’Antiquité romaine et du
Moyen Age occidental (1985), p. 154.
35
ADAMSKA The introduction [2.2].
36
Outre les travaux cités en appendice, pour un bilan plus large, voir SPUNAR., Lateinische Paläographie in
Mittel- und Osteuropa, in: Un secolo di paleografia e diplomatica [1] p. 211-218, et le colloque cité à la note
suivante.
37
Le colloque The history of written culture [2.2] contient un panorama des recherches tchèques par H.
PÁTKOVÁ, slovaques par J. ŠEDIVÝ, hongroises par L. VESZPRÉMY, polonaises par E. POTKOWSKI et russes par
L. KISELEVA et O. BLESKINA.
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 8
2003 a permis de présenter ses premiers résultats, montrant par exemple qu’on ne retrouve pas
dans les documents la connotation confessionnelle de l’opposition bâtarde/humanistique
avancée pour les livres par P. Spunar. Dans le même volume, Edit Madas étudie la chronologie
des cursives livresques hongroises, et Dalibor Havel l’écriture de la chancellerie de Bohême
autour de 1300, où il attribue un rôle déterminant au passage des clercs par l’école notariale de
Vyšehrad: c’est un élément de réponse nouveau aux questions posées par Hajnal38.
2.3. Russie (études russes sur l’Europe occidentale)
Par leur position géographique comme par leurs préoccupations d’histoire sociale, les
paléographes d’Europe centrale se sont trouvés au confluent des écoles allemande mais aussi
soviétique. Des travaux ambitieux ont été suscités en Russie dans les années 1970 par les
manuscrits et documents occidentaux, et surtout français, conservés en nombre à Leningrad.
Terminons ce coup d’œil à l’est par un livre qui y a été fort discuté mais qui à l’ouest doit se
contenter de figurer dans les bibliographies: celui de Ludmila Kiseleva sur la cursive gothique
des XIIIe-XVe siècles. Revendiquant les principes de Mallon, elle a tenté une ample synthèse
des écritures françaises, incluant l’étude de facteurs divers, techniques et sociaux. Par son sujet
et sa méthode, c’est un des rares liens possibles entre les deux extrémités de l’Europe, et j’y
reviendrai un peu plus loin.
Vladimir Malov, à la même époque, s’est occupé des cursives modernes françaises selon des
perspectives comparables. Quant à la période antérieure, on aimerait connaître la thèse de
Vladimir Mazhuga sur les écritures documentaires des VIIIe-XIIIe siècles, mais elle est
malheureusement restée inédite. Repassons maintenant à l’ouest. [429]
2.4. Italie
L’apport de l’école italienne est impossible à résumer. On le sait, elle compte parmi les plus
fécondes, par une attention constante à tous les types d’écriture, à leurs rapports réciproques et
à leur contexte social, ici encore sous impulsion marxiste, et dans un horizon chronologique
exceptionnellement large. Le panorama graphique inépuisable de l’Italie en fait un laboratoire
documentaire pour toute l’Europe. Parmi les études sectorielles, il faut se contenter de citer
trois ou quatre directions de recherche fructueuses.
— Le rapport entre livres et documents a donné lieu depuis les années 1950, et surtout 1970,
à nombre d’études novatrices. Gianfranco Orlandelli, d’abord, sur la formation de la littera
Bononiensis au XIIe siècle: rare et précieuse illustration du rôle joué dès cette époque par les
formes documentaires comme «tissu conjonctif» de la vie de l’écriture, selon sa propre
expression. Ettore Cau a commenté dans un sens comparable des manuscrits cisterciens des
XIIIe-XIVe siècles. Toujours entre livres et documents, les bâtardes toscanes, particulièrement
variées et moins connues que leurs cousines germaniques, ont fait l’objet en 1995 d’un article
d’orientation générale par Luciana Mosiici.
— Le même Orlandelli a surtout inauguré les études sur la mercantesca, écriture singulière,
caractéristique d’une situation socioculturelle unique en Europe. La recherche a été bien plus
tard reprise, par Luisa Miglio et Armando Petrucci, qui en ont illustré la genèse, au croisement
de carolines élémentaires et d’écritures notariales, et la discussion de ce phénomène complexe
n’est sans doute pas achevée. Nous sommes aussi spécialement favorisés en fac-similés dans ce
domaine, depuis les recueils de Federigo Melis (documents économiques) et d’Arrigo
Castellani (textes pratiques toscans).
38
H. PÁTKOVÁ, Die Entwicklung der Schrift der spätmittelalterlichen Stadtbücher in Norwestböhmen, ibid.
p. 180-188; E. MADAS, Die Entwicklung der Buchkursive in Ungarn im Spiegel der Predigthss. vom Ende des
13. bis zum Anfang des 16. Jh., ibid. p. 154-167; D. HAVEL, Entwicklungs- und Nomenklaturaspekte
böhmischer Urkundenschrift un die Wende des 13. und 14. Jh., ibid. 168-179 (voir aussi ID., Listinné písmo
[2.2]).
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 9
— La péninsule offre un champ d’observation spécialement fascinant par ses situations de
«polygraphisme absolu» (au sens d’A. Petrucci39), notamment dans le sud au XIIIe siècle. On y
observe d’autant mieux les comportements réciproques des types que la gothique y est une
écriture d’importation, au détriment de la bénéventine. Les études d’Alessandro Pratesi puis de
Fabio Troncarelli et Francesco Magistrale ont montré l’impact de la chancellerie des
conquérants normands, mais aussi la grande diversité, dans le temps, des situations locales,
reflets de réalités sociales et institutionnelles. Cette longue durée des changements a [430]
encore été illustrée par Maria Galante grâce à un document extraordinaire, un nécrologe de
Salerne ayant servi depuis le XIe jusqu’au XVIe siècle. A Rome, en revanche, Paolo Radiciotti
a montré la tradition de l’écriture curiale entièrement grignotée par les nouveautés carolinogothiques aux XIIe-XIIIe siècles, à la fois par le haut, à travers la chancellerie pontificale, et par
le bas, à travers la promotion des écritures les plus élémentaires.
— Enfin nous avons des travaux qui ont fait date sur les mécanismes structurels de l’écriture
cursive, surtout d’après les écritures notariales, par Giorgio Costamagna et plus récemment par
Emanuele Casamassima, dans un travail dont l’importance mérite qu’on passe outre son mode
d’exposition particulièrement ardu. Mais nous y reviendrons aussi. Tout dernièrement, les
écritures notariales florentines à l’époque de Dante ont aussi fait, sous la direction de Stefano
Zamponi, l’objet d’un important mémoire d’Irene Ceccherini, qui souligne cette fois
l’importance des changements de style à côté de ceux de la structure; on en espère la
publication.
Ces quelques aperçus devraient être bien sûr complétés par la lecture intégrale et répétée de
la regrettée revue Scrittura e civiltà, mais aussi par quelques synthèses d’étape: surtout la
Breve storia d’A. Petrucci, un manuel merveilleusement limpide et à jour de l’état des
questions (jusqu’en 1991).
Une fois n’est pas coutume, il y a cependant un domaine de l’écriture italienne qui a été
entièrement confié par défaut aux soins d’une école étrangère. On sait que l’essor de l’écriture
humanistique dans les livres a occupé depuis cinquante ans les chercheurs italiens ainsi que
d’autres, particulièrement anglo-saxons. Or, dans le domaine documentaire, la transition qui
s’opère au XVe siècle au détriment des formes gothiques n’a pas été abordée avant les années
1970; et, les archives en question ayant été laissés par les paléographes aux diplomatistes, il a
été traité exclusivement par des chercheurs allemands. La même observation vaut pour la
scrittura bollatica élaborée à l’époque moderne par la chancellerie pontificale et étudiée par
Th. Frenz.
Outre les études sur une époque ou un type d’écriture, il faudrait citer nombre de
contributions italiennes fondamentales aux perspectives les plus générales. La définition des
écritures normales et usuelles ou des tendances graphiques par G. Cencetti, les réflexions
multiformes d’A. Petrucci sur les niveaux et les fonctions de l’écriture, les travaux d’Attilio
Bartoli Langeli — études qualitatives de l’alphabétisme populaire —, trouvent [431]
particulièrement à s’appliquer dans le champ des écritures documentaires. Mais ils sont déjà
trop connus pour nous y attarder40.
2.5. Péninsule Ibérique
La réception des travaux italiens a contribué à renouveler les problématiques de la fort active
école espagnole. Ici les écritures documentaires nationales, y compris les plus tardives, ont
toujours joui d’un prestige particulier, depuis les admirables recueils gravés au XVIIIe siècle.
Cet intérêt précoce, revers de la médaille, semble avoir fixé le tableau dans une typologie et
une nomenclature établies dès 1758 (letra de albalaes, letra de privilegios, cortesana, etc.), et
dont on commence à se demander s’il ne serait pas temps de la réviser. Un des enjeux des
39
40
PETRUCCI, Funzione [3.1] p. 10, 21-22.
Voir la bibliographie, section [3.1].
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 10
dernières années a été l’effort pour intégrer dans le paysage les écritures non castillanes. Ces
dernières restent en effet dominantes, y compris dans le traité de référence d’Agustín Millares,
dont la dernière édition, posthume (1983), est devenue un énorme monument sans pour autant
renoncer à la tournure très analytique qu’il avait adoptée en 1929.
Nous avons quantité de nouveaux fac-similés, parfois commentés, et depuis trente ans des
recueils spéciaux pour l’Andalousie puis pour l’Aragon et la Catalogne, avec des introductions
utiles. Parmi les nombreux travaux du professeur Gimeno, on citera bien sûr son étude de
l’écriture gothique dans la région de Valence (1985). Enfin un séminaire publié en 1991 a posé
les jalons d’ultérieures études régionales pour l’Aragon, la Castille et la Galice, avec quelques
notes rapides sur les cursives en Navarre. On trouvera la plus récente synthèse dans le manuel
d’Ángel Riesco (1999), où on constate que l’ouverture à des problématiques nouvelles n’a pas
fini de balayer la typologie traditionnelle.
Un mot encore des travaux d’un Italien hispanisant, connaisseur de la chancellerie d’Aragon,
Francesco Cesare Casula. Les Catalans lui savent gré d’avoir rendu à la letra aragonesa son
nom historique de letra catalana. Il a aussi fait un petit livre assez curieux sur l’écriture
documentaire en Sardaigne41, où on lit avec intérêt comment l’île a utilisé tour à tour, à la fin
du Moyen Age, les écritures italiennes, françaises et catalanes, selon les situations politiques;
corrélation d’autant plus frappante que l’écriture catalane paraît moins «moderne» par sa date
de naissance et par sa forme (si je ne suis pas aveuglé par le nationalisme paléographique) que
l’écriture de chancellerie française qu’elle a remplacée.
[432] Quant au Portugal, outre divers recueils de fac-similés regroupant au total un très
abondant échantillon documentaire, à des degrés divers d’élaboration (les transcriptions du
recueil du P. da Costa, attendues depuis 1942, sont toujours imminentes), il a paru à ma
connaissance un seul manuel théorique moderne d’une certaine importance, celui d’Antonio
Cruz (1987), mais j’ai le regret de n’avoir pu encore me le procurer.
2.6/7. France, Belgique et Pays-Bas
Continuons par notre petit coin du continent, si on me permet un groupement un peu
arbitraire: France, Belgique et Pays-Bas. En réalité les frontières nationales et académiques,
qu’elles coïncident ou non avec les aires linguistiques, ont rarement été bousculées par la
recherche. On peut cependant dessiner, par commodité, au moins un axe transversal de travaux
sur l’écriture diplomatique aux XIIe et XIIIe siècles: trois thèses qui ont en commun des
méthodes voisines de la diplomatique telle que nous l’avons rencontrée dans le domaine
germanique, mais non pas tant de la synthèse de Heinemeyer que des études analytiques par
chancelleries.
D’abord la thèse bien connue de Jacques Stiennon sur le diocèse de Liège (1960). Elle
présente une ambition qu’on retrouvera dans son manuel de 1973: celle d’allier au service
d’une histoire culturelle les ressources de la sociologie, de la graphologie, voire déjà de la
neurophysiologie; programme difficile à tenir de bout en bout, et qui de fait tend à céder à une
étude extrêmement dense et documentée, mais finalement assez classique dans ses méthodes:
morphologie, identification de mains et de provenances. Le terme même de ductus, à une date
où les travaux de Mallon n’avaient pas achevé de renverser les concepts traditionnels, était
employé par J. Stiennon comme un simple synonyme de «style» («ductus diplomatique»). Le
résultat principal de sa thèse est d’avoir porté un coup fatal à la notion de Schriftprovinz, en
montrant tout ce que le diocèse de Liège partageait avec des régions plus éloignées, et ce qu’il
emprunta aux influences impériale puis pontificale42.
41
CASULA, Breve storia [2.4.3].
Il revient à quelques questions générales en conclusion avec une variation sur le parallèle entre écriture et
art gothique, une brève discussion des thèses de Hajnal et le développement du commerce comme moteur de la
cursivité selon Henri Pirenne.
42
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 11
La thèse de Françoise Gasparri sur l’écriture à la chancellerie de France au XIIe siècle
(1973), bien qu’elle s’en défende, aboutit aussi à des résultats qui concernent au premier chef
la diplomatique, puisque l’identification des mains lui a permis de montrer le recours aux
grandes abbayes parisiennes pour écrire les actes royaux. Plus récemment (1987), elle a repris
ce [433] corpus pour y déceler les premières traces de cursivité, reflet d’une écriture «usuelle»,
dès les années 1120, point chronologique très important pour l’évolution générale.
Enfin, en 1995, Jan Burgers a publié sa thèse consacrée à l’étude paléographique exhaustive
de toutes les chartes de Hollande et de Zélande au XIIIe siècle: travail considérable et fortement
structuré dans ses principes. Ici aussi, on peut juger un peu excessive la revendication d’une
méthode nouvelle: à côté de ses maîtres les diplomatistes néerlandais Walter Prevenier et Jaap
Kruisheer, l’auteur se réfère à Gilissen, à Mallon, à Hajnal (au détriment de quelques auteurs
plus récents et d’autres pays) mais aussi à l’expertise graphologique judiciaire; il dresse une
terminologie néerlandaise, ce qui est précieux dans la perspective d’un lexique international;
mais en somme il s’agit toujours de rendre plus exacte l’observation morphologique, et encore
une fois, pour distinguer d’abord les mains, puis les centres. Une synthèse en découle ensuite,
qui fait clairement ressortir des regroupements géographiques et des phases chronologiques. Le
tout fournit une matière finement préparée qui pourra se prêter aux comparaisons européennes.
En revanche, il sera toujours difficile d’extrapoler une méthode aussi analytique à des masses
plus importantes (l’effort ici est déjà herculéen), ce qui reste un enjeu crucial de la
paléographie tardo-médiévale, et de faire ressortir les mécanismes de l’évolution, alors même
que, de ce point de vue, le XIIIe siècle devrait être le laboratoire par excellence.
Au reste les travaux spéciaux restent peu nombreux. Dans quelques études de scriptoria ou
de chartriers on a pu mettre en rapport à l’occasion des documents avec des livres tracés par les
mêmes mains. Le récent album de l’Institut de recherche et d’histoire des textes sur la forme
graphique des manuscrits français du XIIIe siècle a un passage original sur l’influence de
l’écriture courante dans les textes vernaculaires43. Je voudrais surtout rappeler, parce qu’elle
pourrait échapper aux spécialistes de l’écriture, une rare conjonction entre philologie,
paléographie et méthodes quantitatives: la belle thèse d’Outi Merisalo (1988) sur les
documents de quatre villes du grand Poitou au XIIIe siècle, ou le calcul statistique permet de
dégager des vues pionnières sur les spécificités locales.
Pour l’essentiel, en France comme ailleurs, les écritures documentaires ont été abordées dans
l’enseignement pratique. Celui-ci s’est matérialisé sous forme de recueils pédagogiques
souvent publiés par les conservateurs d’archives, qui même sans ambitionner de renouveler
l’histoire de l’écriture, offrent à la recherche une documentation bienvenue. Les anciens PaysBas [434] (comme d’ailleurs la Suisse) présentent des ressources d’autant plus intéressantes
qu’elles permettent d’étudier l’adéquation croissante entre aires linguistiques ou langues (ce
qui est différent) et types graphiques. Le vieux Reusens est resté depuis un siècle sans rival en
quantité de matériau parmi les manuels francophones, mais les Néerlandais ont produit depuis
un demi-siècle au moins deux autres recueils notables, avec des introductions d’intérêt général
et une riche documentation en différentes langues: celui de J. L. Van der Gouw en 1963
(amplifié en 1978) et plus récemment le magnifique Album palaeographicum XVII
Provinciarum (1992).
C’est aussi dans le cadre de l’enseignement du déchiffrement aux futurs archivistes de
l’École des chartes qu’Emmanuel Poulle en est venu à se faire le continuateur des anciens
archivistes Mallon, Marichal, Perrat et Samaran pour les cursives françaises. Convertissant la
pratique en théorie, il a suivi de près les mécanismes d’évolution du ductus: d’abord dans un
recueil consacré aux mains endiablées des XVe-XVIIe siècles, puis dans plusieurs articles,
43
Album de manuscrits français [2.6.1] p. xxvi-xxx.
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 12
notamment sur les cursives sous Philippe Auguste, et plusieurs comptes rendus critiques. Cela
aussi, je me réserve d’y revenir plus bas.
2.8. Grande-Bretagne
Terminons notre tour par la Grande-Bretagne, sans pouvoir toutefois y annoncer de grandes
avancées. Sur les court hands anglaises il existe en effet depuis 1915 et 1927 deux recueils
commentés publiés par Johnson et Jenkinson, qui sont restés fondamentaux. C’est un état de la
science certes pré-mallonien, mais qui rend toujours d’excellents services, et qui a peut-être
freiné d’autant les recherches nouvelles. On peut tout de même y ajouter plusieurs recueils de
qualité, avec des introductions souvent excellentes: soit des albums pédagogiques (y compris
pour l’Écosse et le Pays de Galles); soit des recueils produits pour les besoins des
diplomatistes, en particulier quatre livres par Alan Bishop et Pierre Chaplais illustrant les
documents royaux du XIe au XVe siècle, d’autant plus essentiels que l’Angleterre a été précoce
tant dans les formes gothiques que dans les nouvelles écritures d’usage.
Quant aux cursives livresques anglaises, si particulières, marquées par l’empreinte durable
de l’ancienne tradition insulaire, elles ont fait l’objet des travaux admirablement méthodiques
de Malcolm Parkes: ses English cursive book hands font référence depuis 1969 pour la
typologie et l’évolution de cette famille. Plus récemment, M. Parkes a repris le sujet de la
cursivité en général, mais les premiers résultats, à ma connaissance, n’ont encore été divulgués
que sous forme orale. [435]
2.9. Scandinavie
Il manque sans doute bien des études dans ce tour d’Europe et même quelques pays, où l’on
ne rencontre guère que des albums pratiques. Les études scandinaves sont peu nombreuses,
difficiles à se procurer (et à lire), mais une au moins doit être rappelée: le grand article de Sam
Owen Jansson sur l’écriture cursive suédoise de 1160 à 1530, analysée lettre par lettre. Publié
en 1954 mais écrit avant la mort de l’auteur en 1939, il a une introduction fort brève mais
étonnamment clairvoyante et novatrice à plus d’un titre. D’une part Jansson se propose
d’utiliser l’étalon des écritures documentaires pour contribuer à la datation des livres: idée
d’une simplicité géniale, que personne n’a reprise depuis. D’autre part il désigne comme
fondamental le principe du ductus, en employant le mot dans le sens exact qui sera consacré
par Mallon. Même son étude des lettres individuelles, exceptionnellement, n’est pas dans le
simple ordre alphabétique, mais organisée selon la parenté des ductus. Quant à son traitement
des ligatures, il ne se limite pas aux couples ornés ct et st comme chez les diplomatistes, mais
s’étend aux conjonctions de Meyer. Voilà un pionnier insoupçonné, qui mériterait d’être mieux
connu.
3. Interprétations et problèmes
Le tableau jusqu’ici peut paraître un peu sec. Il s’agissait de donner une idée claire de la
mosaïque des travaux, de son inégale répartition dans l’espace et dans le temps, des portions
qu’on voit se former et de celles qui manquent. Je ne voudrais pas non plus que mes
commentaires paraissent hostiles aux procédés analytiques: les travaux positifs sont souvent
plus durables que les théories audacieuses, et toute la matière nouvelle accumulée permet déjà
d’y voir plus clair qu’en 1953. Mais l’ampleur même de cette matière gagnerait à être
ordonnée, confrontée et interprétée: chacune des pièces bariolées que la recherche a mise au
jour ne pourra mieux se vérifier et se comprendre que le jour où l’on cherchera à les agencer en
un tableau d’ensemble.
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 13
3.1. Perspectives générales: chronologie et géographie44
Les études régionales et les fac-similés disponibles permettraient dès aujourd’hui d’aller plus
loin que Hajnal concernant au moins la diffusion [436] des types semblables dans les
chancelleries: apparaissent-ils vraiment en différents lieux à la même date aux XIIe-XIIIe
siècles? Heinemeyer, dans son introduction de 1982, indique plutôt l’inverse: décalages
chronologiques au XIIIe siècle entre l’ouest et l’est de l’Allemagne, simultanéité au XVe.
Comment donc distinguer des développements parallèles spontanés et le rayonnement
d’«influences»? Pour certains types diplomatiques prestigieux et plus clairement caractérisés,
on devine bien une contagion, mais il reste à la cartographier: ainsi pour la minuscule des
diplômes impériaux au XIIe siècle, la minuscule curiale au XIIIe et l’écriture de la chancellerie
française au XIVe siècle. La différenciation nationale à la fin du Moyen Age offre un chantier
encore plus difficile sans doute, où les écritures institutionnelles pèseront de tout leur poids.
Au-dessous de la famille des écritures les plus solennelles, il faut apprécier les degrés
inégaux de formalité si l’on veut comprendre, à la manière de Mallon, les échanges internes au
système. Heinemeyer, ayant tout réduit à une chronologie uniforme, restait perplexe face à
certaines variétés dont les précédents cursifs sont pourtant manifestes45. On voit bien, dès la fin
du XIIe siècle, que les écritures diplomatiques les plus formelles remplacent peu à peu leurs
ornements arbitraires, derniers méconnaissables avatars du diplôme mérovingien, par de
nouvelles stylisations qui imitent, à main posée, les caractères propres aux nouvelles écritures
courantes: typiquement, les ligatures (montantes) en boucle sur les hastes, imitées en
chancellerie par un tracé descendant — qu’adopteront à leur tour, au XIVe siècle, les bâtardes
livresques. La boucle est devenue «normale» au sens de Cencetti: un élément adventice, créé
pour la commodité de la main, est devenu structurel pour l’œil. Reste à en préciser la
chronologie et la géographie.
Dans le jeu des échanges, la notion vague d’influence devrait être précisée, peut-être revue
en termes de «réception» comme s’y emploient depuis des années les historiens de l’art ou de
la littérature. De même la dimension spatiale des phénomènes, où il reste à remplacer la notion
de Schriftprovinz, malmenée à juste titre chez J. Stiennon, par une construction sans doute plus
mouvante de centres, de périphéries, de réseaux46, avec leurs rythmes d’évolution différenciés.
Enfin, une articulation moins rigide de l’espace et du temps suppose des modèles d’explication
historique plus [437] complexes que l’immanence du Zeitgeist et du Volksgeist invoquée
jusqu’à Fichtenau et encore prégnante chez Marichal: une intégration de facteurs qui actualise
en quelque sorte la paléographie «intégrale» avant la lettre, jamais remplacée depuis un siècle,
de Wilhelm Wattenbach.
Notre boîte à outils s’est enrichie pour ce faire, depuis trente ans, de moyens inédits, tant
conceptuels que techniques, qui restent discutés, inégalement utiles et pratiqués en ordre
dispersé.
3.2. L’écriture et l’écrit
Les questions des paléographes ont recoupé celles d’autres spécialistes de l’écrit, sans que
les échanges, de part et d’autre, aient pleinement porté leurs fruits. Se sont ainsi développées,
au carrefour de l’histoire sociale, de l’anthropologie, de la diplomatique et de l’histoire
44
Pour ne pas alourdir les notes par des références bien connues, je n’entre pas dans le détail
bibliographique des débats les plus généraux, au-delà de ce qui concerne spécialement les gothiques
documentaires.
45
En revanche, DEROLEZ, The palaeography [3.7] se distingue par une attention constante à l’empreinte des
formes cursives dans les formalisations livresques.
46
Sur la dimension spatiale des phénomènes culturels, intéressantes perspectives dans FRAY, L’histoire de
l’art [3.1].
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 14
littéraire, les études sur la culture écrite, la literacy, la Schriftlichkeit, la communication au
Moyen Age. Mais un livre, un colloque après l’autre, traitant de l’écrit, ont oublié l’écriture.
D’autres spécialités extérieures à l’histoire, plus sensibles au fonctionnement des signes et à
leur matérialité, ont pu apporter des contributions théoriques originales. Le «savoir-voir» du
typographe, aussi négligé par nous que le savoir-faire du calligraphe, a nourri les incursions
toujours passionnantes du grand Stanley Morison dans l’histoire de l’écriture, y compris ce
qu’on peut décrire comme une sémiologie politique des écritures médiévales — où on regrette
d’autant plus l’absence des écritures diplomatiques. Une sémiologie plus explicite a été
invoquée par Albert d’Haenens et plus récemment par Elisa Ruiz. Et la sémiologie
«intégrationnelle» de Roy Harris, qui insiste aujourd’hui sur les logiques propres à l’écriture
contre sa réduction à une image du langage, tend les bras aux paléographes qui voudront en
tirer les conséquences.
Mais il n’y a guère qu’en Italie, dans les perspectives sociales déjà citées d’A. Petrucci et
d’A. Bartoli Langeli, ou à Marburg autour de P. Rück, que le croisement avec les méthodes
propres à la paléographie ait atteint une certaine ampleur. Partout ailleurs, notamment chez les
historiens français ou anglo-saxons, l’habitude du travail sur les sources imprimées contribue
de toute évidence à une résorption générale de l’écriture dans le texte, du signifiant dans le
signifié.
3.3. L’analyse des formes
L’analyse visuelle du signe, fondatrice de la paléographie, dispose aujourd’hui de moyens
autrement plus puissants que la description verbale [438] illustrée, mais il reste à mieux en tirer
parti. Ainsi le recours à la mesure chiffrée, en dépit de manifestes et de discussions remontant
déjà à trente ans. Saluons au passage les travaux de Léon Gilissen, bien que difficiles à
transposer aux écritures courantes. Les expériences statistiques menées par Ezio Ornato, ses
amis et ses collègues, sur la mise en texte des livres gothiques, en revanche, ne demandent qu’à
être étendues à de larges corpus documentaires. Or dans ce domaine nous sommes au point
mort, et la thèse citée d’O. Merisalo sur les documents du Poitou reste une exception, qui
ressortit plutôt à la philologie (autrement plus sensible aux calculs de fréquence et à la
répartition spatiale des phénomènes). Du côté des diplomatistes, une étude statistique pionnière
comme celle de Th. Frenz (1976) sur trois siècles de diplômes pontificaux inclut tous leurs
caractères externes… sauf l’écriture.
Quant aux moyens techniques, la macrophotographie, également expérimentée depuis trente
ans, ne fait plus guère parler d’elle, alors même que (parce que?) elle est désormais à la portée
de tous. Sous sa forme numérique, elle ne peut que bouleverser les techniques de comparaison,
de mesure et de comptage. A l’inverse, les procédés de reconnaissance automatisée des formes,
quoique déjà efficaces sur les écritures posées, continuent d’être expérimentés par les
ingénieurs des postes et des banques sur les cursives mais sans progrès décisifs, parce que
l’ordinateur n’est pas un cerveau47.
Il faut enfin insister plus que jamais, dans l’analyse morphogénétique, sur l’étude des
données humaines telles que les invariants neurophysiologiques ou la psychologie de la
perception. Les mécanismes cérébraux, moteurs et visuels qui façonnent l’écriture sont étudiés
depuis des décennies. Déjà invoqués par J. Stiennon, ils nous sont désormais mieux connus
grâce aux efforts de Colette Sirat et de P. Rück48, mais on a rarement dépassé le stade de la
rencontre interdisciplinaire sans lendemain, alors même que la révolution des neurosciences et
des sciences cognitives se propage depuis un quart de siècle dans tout l’édifice des sciences
humaines. Ce sont de nouvelles voies qui s’ouvrent à nous, mais pour nous ramener, encore
une fois, à Mallon.
47
48
SMITH, Numérisation [3.3]; et, dans le présent colloque, la communication de M. PALMA.
L’écriture, éd. SIRAT/IRIGOIN/POULLE [3.3]; Methoden, éd. RÜCK [3.3].
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 15
3.4. Qu’est-ce que la cursivité?
Mallon a montré que l’essentiel était le geste. On a eu beau lui répondre que le ductus était
incertain et variable, que la macrophotographie avait [439] une vue plus perçante que la sienne,
que l’Épitomé ne pouvait dériver du De Bellis, cela n’a rien retiré à l’existence du ductus et à
ses effets déterminants: seule l’analyse dynamique permet d’ordonner la généalogie des
formes, y compris par des hypothèses sur les «chaînons manquants», comme Mallon l’a fait en
virtuose dans ses études épigraphiques.
Il faut reprendre en profondeur le problème de l’apparition de la cursivité comme moteur du
développement, après des siècles de gestes bridés et d’évolution ralentie. La notion même de
cursivité est souvent trop vague pour permettre une discussion profitable. Elle désigne tantôt
des formes particulières, tantôt un degré d’exécution d’une écriture quelconque: ce que la
nomenclature lieftinckienne traduit en distinguant l’adjectif currens du substantif cursiva49.
Dans les livres, le rapport génétique est coupé: une textualis currens n’a jamais donné
naissance à une cursiva textualis. Mais il se maintient en permanence dans les écritures
usuelles. La naissance des écritures spécifiquement documentaires, c’est le moment où une
habitude d’écriture currens a abouti à l’émergence d’une cursiva.
Peut-on tracer une limite entre une écriture cursive et une non cursive? Le calligraphe et
dessinateur de caractères néerlandais Gerrit Noordzij (un homme qui n’aime pas beaucoup les
paléographes) a donné une définition imparable: le propre de la cursivité n’est pas la vitesse,
c’est que l’instrument d’écriture peut être déplacé vers le haut; ou, comme l’a redit récemment
Peter Gumbert, poussé et non seulement tiré. Cela augmente le frottement, dit Noordzij; on
pourrait dire plus précisément: cela limite par intermittence le contrôle du scripteur, pour des
raisons à la fois matérielles, physiologiques et visuelles. Au total, le tracé poussé n’est guère
possible que pour un trait fin, avec relâchement de pression, donc en priorité pour les ligatures.
La réapparition de la cursivité au XIIe siècle se manifeste précisément par la multiplication
des ligatures: dans la terminologie de Gilissen, le ductus visible se rapproche du ductus
complet. Des travaux rares et dispersés en ont analysé les modalités. E. Poulle a distingué deux
types de ligatures: les unes de la tête d’une lettre au pied de la suivante, les autres de
«séquence». Les premières, externes, en partie préexistantes mais cachées dans la caroline, se
démasquent et se multiplient lorsque le geste s’accélère; les secondes, internes, sont propres à
la cursivité; et on réalise une écriture dite «liée» quand on enchaîne, en alternance, les deux
types50. E. Poulle a moins commenté la ligature qu’on pourrait appeler de pied en tête, sans
doute [440] parce qu’elle est moins déformante. En revanche elle a été particulièrement mise
en valeur par les Italiens. Costamagna a affirmé le principe d’une évolution séculaire de
l’écriture latine du mouvement «dextrogyre» vers le «sinistrogyre», donc vers la ligature de bas
en haut51. Casamassima a indiqué de même dans la ligature virgulariter et inferius le propre de
l’écriture moderne, et étudié l’enrichissement des variantes de ligature comme mutation du
système dans une perspective structuraliste52. Ses observations morphologiques se rapprochent
souvent de celles de Heinemeyer mais il leur donne une tout autre cohérence théorique.
Ces travaux très stimulants mériteraient une plus longue discussion53. Je noterai seulement
ce désaccord fondamental: les travaux italiens se sont concentrés sur les rapports entre lettres
voisines, en négligeant ce qui se passe à l’intérieur de chacune. Or un fait capital du XIIIe
siècle, montré par E. Poulle54, est que les ligatures externes se sont multipliées au détriment de
49
Voir les travaux de LIEFTINCK, GUMBERT et DEROLEZ [3.7].
POULLE, La cursive gothique [2.6.1].
51
Surtout dans COSTAMAGNA, Paleografia latina [3.4]; ID., Perché scriviamo cosí [3.4] chap. 7.
52
CASAMASSIMA, Tradizione [3.4].
53
MASTRUZZO, Ductus [3.4] en donne une très approfondie et stimulante.
54
POULLE, La cursive gothique [2.6.1] p. 464.
50
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 16
la cohérence interne, entraînant une désarticulation de la chaîne graphique. En réaction, en
France vers 1300, la chancellerie a adopté une écriture réformée, basée sur l’exécution liée de
la lettre individuelle: celle que nous appelons la mixte (même si ce terme un peu vague n’a
guère eu de fortune hors de l’École des chartes), et qui est à l’origine de la diffusion
européenne des écritures dites bâtardes55. J’en rapprocherais volontiers la formation de la
mercantesca, fort différente, mais dont les modes de ligature, à la même époque, mènent aussi
vers une exécution liée.
Le développement du nouveau système graphique a été étudié par Casamassima à partir
d’une seule catégorie de documents (ceux des notaires toscans) et comme un phénomène en
soi, mettant de côté la question du contexte et l’ensemble des paramètres extragraphiques.
Costamagna, lui, a soutenu une sorte de téléologie graphique millénaire justifiée par la
physiologie, et dont les cursives actuelles seraient le résultat plus ou moins inéluctable. Seul P.
Rück a esquissé en 1988 une approche globale des cursives médiévales dans leurs aspects
fonctionnels, techniques et visuels à la fois, qui attend d’être relayée.
La thèse de L. Kiseleva, en 1974, avait déjà envisagé à grande échelle, en appliquant Mallon
aux cursives des XIIIe-XVe siècles, les conditions [441] historiques et techniques56. Elle
reportait audacieusement jusqu’à des gloses du XIe siècle le développement de formes cursives
dans les livres, en postulant même que des tendances pareilles devaient se rencontrer dès les
IXe-Xe siècles dans l’écriture informelle, aujourd’hui perdue, sur tablettes de cire. Ce schéma
est certes affaibli par des erreurs propres à un livre de jeunesse, entre autres sur la datation des
gloses examinées, et il a d’ailleurs été contesté, l’argument des tablettes de cire apparaissant
comme une vaine spéculation57. L’idée des documents fantômes vaut pourtant qu’on s’y arrête.
3.5. Un chaînon manquant?
L’abondance des archives de la fin du Moyen Age peut donner l’illusion d’un panorama
graphique complet. Mais six cent quarante-cinq chartes (soit 6,45 petits textes par an) ne
sauraient faire un échantillon fidèle de tout ce qui a été écrit en Hollande et Zélande au XIIIe
siècle. Parce que les écrits conservés étaient destinés à la conservation: des documents
excessivement homogènes par leur nature et par leur mode de production. Or la disparition
presque complète des écrits plus éphémères, et il faut penser particulièrement aux tablettes de
cire, omniprésentes avant la généralisation du papier, n’annule pas leur rôle dans le système
graphique. Cette Atlantide des écritures quotidiennes perdues ne jette-t-elle pas un autre jour
sur les livres, les chartes et les registres qui nous restent? A l’opposé d’une paléographie
science du visible ou même du mesurable, la conjecture ouvre ici un gouffre insondable, mais
dont l’hypothèse même pourrait modifier l’équilibre de notre perception.
Ainsi il paraît vraisemblable que la cursivité s’insinue dans les actes à mesure que la quantité
d’écriture augmente, non pas tant mécaniquement, parce que le clerc, surchargé de travail, ne
pourrait faire autrement, mais parce que, plus l’écriture devient banale, plus l’autorité des
modèles se perd58: l’exigence se relâche, le geste se rapproche des habitudes du clerc, nous
révélant la manière dont il écrirait pour lui-même. La diplomatique aurait sans doute son mot à
dire sur la question: si les parchemins anglais montrent des marques de cursivité nombreuses et
particulièrement précoces, dès la première moitié du XIIe siècle59, est-ce parce que la cursivité
55
ID., Compte rendu de Stiennon [3.4] p. 617-619; ID., Les faux [2.6.1].
KISELEVA, Goticeskiy kursiv [2.3].
57
Le débat est récapitulé et la chronologie remise dans sa juste perspective par SPUNAR, Zum aufkommen
[2.2]. Celui-ci rappelle que Pražák estimait, à l’opposé, la cursive gothique de Bohême directement issue de la
textualis, parce qu’elle n’apparaît dans les livres qu’au milieu du XIVe siècle. Cette fois, c’était séparer
abusivement les livres et les documents, et surtout juger l’évolution locale sans tenir compte des apports
extérieurs.
58
CARDONA, Antropologia [3.2.1] p. 208.
59
Comme l’a déjà noté POULLE, La cursive gothique [2.6.1] p. 464.
56
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 17
[442] serait plus répandue dans ce pays, ou simplement parce que nous avons gardé ces
documents de forme modeste, particuliers à l’Angleterre, que sont les writs? La collecte des
écritures de professionnels négligents et de non-professionnels, dont on conserve tout de même
de nombreux exemples, paraît indispensable pour les XIIe et XIIIe siècles60.
Les «habitudes», ce sont les réflexes de l’œil et de la main, d’autant plus actifs que le geste
est plus rapide, plus soumis à son rythme propre et aux caractéristiques des supports et des
instruments. Or si les réflexes acquis dans certaines situations dominantes continuent à jouer
dans d’autres, les formes soignées pour durer ne peuvent-elles aussi nous dire quelque chose de
celles qui ont disparu? Dans quel rapport se trouve l’écriture des parchemins voués à la
conservation avec les formes plus éphémères tracées sur des rognures aussitôt jetées, dans la
cire, et enfin sur papier?
A ce stade des hypothèses, on ne peut qu’être frappé par une coïncidence: la réorganisation
de la chaîne graphique par les ligatures, entre le XIIIe et le XIVe siècle, accompagne les progrès
décisifs du papier et le déclin parallèle des tablettes. Peut-on exclure que la disparition
accélérée d’un support millénaire ait causé une inflexion dans les positions de la main, dans ses
mouvements et, au bout du compte, dans les normes visuelles de l’écriture? Cette coïncidence
présente même des ressemblances troublantes avec la mutation de la cursive romaine au IIIe
siècle, à un moment où les tablettes traditionnelles semblent avoir un temps régressé face au
papyrus. Ce n’est pas le lieu ici d’approfondir cette question particulière61, mais je voudrais
avoir suggéré l’ampleur des friches qui restent à explorer avant de construire une histoire de
l’écriture dans les siècles où elle s’est le plus répandue.
3.6. Les logiques du système graphique
L’interprétation historique de la morphologie ne saurait se contenter d’aligner les variétés de
chaque lettre. La réalité de l’évolution, c’est l’interaction de ces formes entre elles, et non pas
lettre par lettre, mais à l’intérieur d’une chaîne. L’écriture est un système, à la fois moteur et
visuel, dont il nous appartient de reconstruire non seulement la diachronie mais les [443]
logiques successives62. L’alphabet est un répertoire fini, structuré et évolutif de signes, euxmêmes composés à partir d’un répertoire fini, structuré et évolutif d’éléments géométriques
indivisibles, ou plutôt de gestes élémentaires. Ainsi, pour rendre compte de l’histoire de chaque
lettre, c’est tout le devenir de l’alphabet latin qu’il faudrait d’abord relire comme un
kaléidoscope d’assimilations et de dissimilations, capable de mener les signes les plus
dissemblables jusqu’à la gémellité63 et inversement, selon les dates, les lieux et les types.
Les lettres ne vivent cependant pas dans l’alphabet, mais sur la page. L’écriture latine a
évolué de la transcription des sons à la représentation des mots (sans parler d’unités de sens
plus large), les deux niveaux restant imbriqués dans l’écriture comme dans la lecture, par la
collaboration de zones différentes du cerveau. La graphématique64, telle qu’elle a été
développée par la linguistique et adoptée par la philologie, décrit le rapport des signes écrits au
langage, voire la logique interne (présente ou historique) de leur combinatoire, en faisant
toutefois abstraction de la variation de leurs formes individuelles; donc la «substance
graphique» au détriment de la «forme expressive»65. On serait tenté d’ajouter: comme si les
textes avaient toujours été imprimés. Sauf que la typographie elle-même n’est pas neutre, elle
60
Ces scripteurs qui ont pu écrire plus ou moins régulièrement et même acquérir une certaine rapidité sans
viser à la maîtrise formelle des professionnels, jouent un rôle vital dans le devenir de l’écriture et ne doivent
pas être confondus avec les «semi-lettrés», que seuls ont étudiés Petrucci et son école, et dont la production,
archaïque, pauvre, reste en marge de l’évolution.
61
Voir maintenant SMITH, De la cire au papyrus [3.5].
62
C’est le projet de CASAMASSIMA, Tradizione [3.4].
63
Par exemple, à la fin du Moyen Age, B/V ou O/R.
64
Excellente discussion dans une perspective paléographique chez MASTRUZZO, Ductus [3.4] p. 413-424.
65
Selon l’opposition chère à COSTAMAGNA (voir surtout les premières pages de Paleografia latina [3.4]).
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 18
n’est transparente que pour ses contemporains, et la forme expressive est précisément le
domaine des typographes. Ceux-ci ont élaboré une tout autre approche du «graphe» et du
«graphème», proprement visuelle, déclinée selon une grammaire stylistique mais fondée
d’abord sur les critères de la «lisibilité», théorisés de longue date, et dont le répertoire des
signes déjà mentionné n’est qu’un aspect66. Il revient aux paléographes de croiser ces axes
complémentaires, centrés sur la lecture, avec la question de l’écriture comme production
matérielle des signes, et avec la dimension historique. Je ne connais guère que Jean Irigoin qui
ait tenté cette approche structurelle, pour l’alphabet grec.
Dans l’écriture latine, la demi-onciale, première formalisation d’un système minuscule,
«quadrilinéaire», avait établi un jalon décisif de la lisibilité, auquel la minuscule caroline était
revenue. Les cursives du XIIIe siècle, elles, bousculent la norme au profit du mot graphique,
précédemment [444] défini par la simple segmentation de la chaîne67. C’est alors une phase
d’expérimentation intense des morphologies et de la répartition des allographes. Les lettres
sont-elles plus distinctes si l’on prolonge les i? les m? les n? Si l’on élargit les t, les r ou les c?
On finit par s’apercevoir que là n’est pas la question: pour l’œil comme pour la main, la
solution la plus économique est dans la globalité du mot. On fera donc plonger et i et m et n,
mais en finale. D’autres lettres, comme a ou s, seront pareillement différenciées selon leur
position. L’intérieur du mot retourne en revanche à son homogénéité rythmique. Le
perfectionnement des systèmes abréviatifs va dans le même sens. Tout ceci, parfaitement au
point dans les normes de la chancellerie pontificale dès avant le milieu du XIIIe siècle68, n’est
pas adopté en France avant 1300. Puis le mot, devenu un pour la main, avec un début et une
fin, étend encore des traits d’attaque et de fuite, griffe le blanc alentour comme la cursive
romaine s’était aventurée dans l’interligne. L’œil, en fin de compte, ne lit même plus un ruban
hérissé et segmenté, mais plutôt une succession de formes qui ont un haut, un bas, une gauche
et une droite.
Il nous faudra continuer à creuser ce paradoxe: les cursives médiévales, réputées si difficiles
à lire, révèlent à l’œil accoutumé des repères bien plus structurés que dans beaucoup
d’écritures actuelles, un souci constant de sauvegarder la lisibilité en dépit de la vitesse, y
compris en tirant de la vitesse même diverses marques visuelles distinctives69.
3.7. Typologie et nomenclature
Ordonner dans un cadre commun la vie foisonnante des formes: voilà enfin une des plus
grandes difficultés pratiques et théoriques à laquelle nous soyons confrontés. Si les praticiens
du catalogage continuent à s’interroger sur les normes à suivre70, Peter Gumbert et maintenant
Albert [445] Derolez ont bien montré l’enjeu de la typologie et de la nomenclature, fût-ce dans
un cadre aussi rigide que celui de Lieftinck: quoi que l’on pense de sa réalité historique, c’est
66
Voir parmi bien d’autres SPENCER, The visible word [3.6].
Comme l’a dit RÜCK, Ligatur und Isolierung [3.4]. Je me concentre ici sur la forme des lettres au
détriment de ce qui concerne la ponctuation ou le blanc entre les mots (en dernier lieu SAENGER, Space [3.6]),
ainsi que les aspects linguistiques de la segmentation (voir par exemple, pour le français, les travaux
d’ANDRIEUX-REIX et MONSONEGO).
68
Explicitement dans le recueil d’instructions commenté par G. TESSIER, Note sur un manuel à l’usage d’un
officier de la cour pontificale (XIIIe siècle), in: Études d’histoire du droit canonique dédiées à G. Le Bras 1
(1965) p. 357-371.
69
C’est particulièrement vrai de la cursive «mixte» française (surtout pour les nasales finales plongeantes).
Or au XVIe siècle la «lettera francese» est encore réputée dynamique et déformable entre toutes. Mieux encore,
on la déforme à la fois pour aller vite et pour la rendre plus lisible selon G. B. PALATINO, Libro… nel quale
s’insegna a scriver ogni sorte lettera (1540) fol. Diiii,, in O. OGG, Three classics of Italian calligraphy (1953)
p. 177.
70
La question est remise à plat en dernier lieu par OVERGAAUW, Die Nomenklatur [3.7].
67
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 19
un instrument commode, heuristique et didactique, pour dépasser la simple constatation,
admirative ou désespérée, de l’inépuisable diversité des productions humaines71.
Les gothiques documentaires n’ont pas connu leur Lieftinck Elles ont connu Hajnal, dont les
Schriftproben distinguaient déjà une trentaine de types successifs aux XIIe et XIIIe siècles selon
des critères assez hétérogènes. Elles ont connu Franco Bartoloni, qui a proposé en 1955 une
nomenclature riche, basée en trop grande partie sur des coordonnées extragraphiques, du type
«semicursive notariale siennoise de type précarolin du XIe siècle». Elles ont connu surtout
beaucoup d’habitudes variables et incohérentes: Bartoloni a eu raison de les dénoncer, mais
rien n’a changé. Les tautologies extragraphiques y restent intimement mêlées: il est trop facile
de caractériser les écritures de notaires comme notariales, et celles des chancelleries comme
chancelleresques72.
Même la typologie la plus élémentaire des diplomatistes paraît discutable. Ainsi la division
entre minuscule et cursive, que Bartoloni consentait à garder, alors que minuscule ne saurait
s’opposer formellement qu’à majuscule. Les diplomatistes appellent «minuscules» les
minuscules non cursives, et «cursives» les minuscules cursives. On perpétue ainsi une
confusion entre la morphologie et le mode d’exécution, dont la différenciation est justement
l’acquis majeur de la nomenclature de Lieftinck. Au XIIIe siècle, dans une même chancellerie,
on peut varier considérablement le degré de cursivité d’un même type parfaitement distinct, y
compris en ralentissant un type conçu spécialement pour une exécution cursive, comme il en
existe désormais. Il est d’autant plus difficile dans ces conditions de distinguer les mains.
Avant de dresser une quelconque typologie, et de pouvoir en tirer une chronogéographie, ne
serait-ce qu’entre les chancelleries, il y a donc des questions de fond et de méthode sur la
notion même de type. Quel est le degré d’élasticité d’un type? Où est la limite entre deux
types? Quelles peuvent être la variation d’une main dans le cours du temps et sa variabilité à un
moment donné73? Quelle devrait être la finesse de la grille que [446] nous cherchons? Elle est
probablement plus serrée que pour les livres, tant les écritures documentaires connaissent de
variétés, locales ou non.
L’idée, mise au point par J. P. Gumbert d’après Lieftinck, d’identifier des types en fonction
de la fréquence des allographes de trois lettres diacritiques (a, s, l), a inspiré à Joachim Spiegel,
en 1992, une méthode semblable pour formaliser le changement des écritures diplomatiques
allemandes vers le milieu du XIVe siècle, déjà signalé par Heinemeyer (et qui correspond de
fait à l’adoption de la «mixte»). Il a ainsi réparti dans un espace tridimensionnel la fréquence
des allographes opposés de trois autres lettres choisies par lui, a, g et m, d’après son étude de
cinq mille actes des comtes palatins du Rhin. La corrélation s’est révélée probante. Mais on
voit bien que, pour chaque type, chaque époque, chaque question à poser, les indices (pas
nécessairement réductibles à trois) devraient être différents, choisis sur mesure: aucune clef
n’ouvrira toutes les portes.
On peut imaginer une méthode moins empirique. Ce serait le recensement de la plus large
sélection possible de caractéristiques potentiellement significatives (non seulement des formes
de lettres individuelles), pour déterminer statistiquement, par analyse factorielle, lesquels sont
vraiment pertinentes, en mesurant d’une part la répartition des mains en général, d’autre part
des taux de corrélation entre les caractéristiques recensées. La lourdeur du traitement préalable
exige qu’on l’expérimente d’abord sur des échantillons restreints, de quelques dizaines ou
centaines de mains. Mais les résultats pourraient déjà indiquer si la notion même de type peut
71
Invoquée contre Lieftinck, on le sait, par CENCETTI, Lineamenti [2.4.1] p. 479. Je laisse ici cette
discussion, pour la reprendre dans mon compte rendu de DEROLEZ, The paleaography, in: Scriptorium, à
paraître prochainement.
72
Voir par exemple MAZZOLENI, Esempi [2.4.1].
73
On a vu que KOCH, Die Schrift [2.1.1] fournit des éléments utiles. PARISSE, Un scribe [2.6.1] va jusqu’à
dater des chartes à quelques années près sur la base d’une évolution individuelle supposée linéaire.
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 20
être maintenue (ce qu’il faut espérer): des corrélations imprévues pourraient mettre en lumière
des critères de groupement typologique qui échappent à première vue à l’observateur
moderne74.
3.8. Enseignement de l’écriture
Les instructions et modèles des maîtres de la fin du Moyen Age peuvent aussi aider à
réfléchir, depuis que Herrad Spilling a donné une interprétation cohérente de leur
nomenclature, et bien qu’ils se limitent essentiellement au XVe siècle, au domaine germanique
et à quelques types, dont certains déjà bien démodés. A travers ces documents, dont de
nouveaux exemples sont signalés de temps en temps, nous en revenons ainsi toujours à la
question de Hajnal: où et comment apprend-on à écrire?
[447] Quelle est la part du modèle, et quelle est la marge de liberté du scripteur? Quel rôle
les maîtres comme ceux que nous connaissons jouent-ils vraiment, avec leurs modèles plus ou
moins partagés, face aux institutions qui développent leurs propres types et les enseignent aux
clercs qu’ils recrutent75, ou face aux écoles des marchands et à l’apprentissage que ceux-ci
reçoivent aussi bien «sur le tas»? Les études sur l’enseignement de l’écriture, professionnelle
ou non, restent remarquablement peu nombreuses, et la documentation elle-même étrangement
fuyante. C’est encore une question où nous sommes presque plus avancés pour l’Antiquité que
pour le Moyen Age, et nous aimerions avoir un travail comparable à la récente thèse de
Raffaella Cribiore, qui éclaire la terminologie et la typologie des écritures d’après plus de
quatre cents exercices scolaires de l’Égypte gréco-romaine.
Conclusion
Comment conclure? Ce serait bien prématuré, tant est grande la disproportion entre la
quantité des documents disponibles, l’ampleur des questions ouvertes et l’état de la
bibliographie, certes riche en qualités mais embryonnaire et entravée par le cloisonnement
national et documentaire. Nous avons seulement effleuré l’histoire des gothiques diplomatiques
et cursives, un carrefour historique de l’écriture latine, un chantier formidable où expérimenter
et approfondir l’ensemble des hypothèses et des procédés de la paléographie. Les écritures de
l’Antiquité et du haut Moyen Age ont stimulé depuis trois siècles, par leur aspect énigmatique
et grâce à leur rareté même, des réflexions multiples concernant aussi bien les mécanismes
matériels que les paramètres historiques qui agissent sur les formes. La masse des documents
des XIIe-XVe siècles (et pourquoi nous arrêter là?) doit permettre d’éprouver nos méthodes à
une échelle plus proche de la réalité, autrement dit de penser la complexité dans des termes à sa
mesure plutôt que de vouloir la contraindre dans des schémas a priori. Il reste à faire des
efforts nouveaux d’imagination, mais aussi à importer des concepts et des procédés existants,
qui permettent des traitements de série efficaces, en particulier par des formalisations chiffrées:
ce ne sera pas renier la vocation ni les principes de la paléographie, mais bien confirmer leur
validité et leur vivacité au sein des disciplines, plus nombreuses que jamais, qui ont pour
ambition d’expliquer l’écriture.
74
Un tel projet est à l’étude, par Olivier Guyotjeannin et moi-même, sur les caractères diplomatiques et
paléographiques des procurations et excuses pour l’assemblée convoquée à Paris pour la croisade en 1317,
conservées dans le Trésor des chartes (Archives nationales, J 443-444).
75
Pour un état plus détaillé de ces questions, je renvoie à SMITH, Pour une préhistoire [3.1].
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 21
[448]
BIBLIOGRAPHIE
On trouvera ici un recensement méthodoque et chronologique des principaux travaux des années 1953-2003,
augmenté de quelques études de référence plus anciennes et de plusieurs qui ne concernent pas strictement les
gothiques documentaires. Le plan suit les grandes lignes du rapport ci-dessus, pour permettre une vue synthétique
de la production. Les titres cités ici sont repris en note sous forme abrégée. Pour des références plus détaillées, on
peut se reporter à la bibliographie de paléographie publiée en ligne par l’École des chartes:
<theleme.enc.sorbonne.fr>.
1.Quelques jalons historiographiques
POST G., A general report. Suggestions for future studies in late mediaeval and Renaissance palaeography, in: X
Congresso internazionale di scienze storiche. Relazioni 1 (1955) p. 407-422.
ROSS B., Latin palaeography in the later Middle Ages. Some recent contributions, in: Medievalia et humanistica
N. S. 2 (1971) p. 153-163.
LÜLFING H., Neuere Literatur zur Schriftgeschichte des späten Mittelalters und der Renaissance, in: Gutenberg
Jahrbuch 48 (1973) p. 15-36.
BOYLE L. E., Medieval Latin palaeography. A bibliographical introduction (1984); trad. italienne augm., collab. F.
TRONCARELLI, Paleografia latina medievale. Introduzione bibliografica (1999).
Un secolo di paleografia e diplomatica, 1887-1986. Per il centenario dell’Istituto di paleografia dell’Università di
Roma, éd. A. PETRUCCI/A. PRATESI (1988).
RÜCK P., La diplomatique face à la codicologie triomphante, in: Gazette du livre médiéval 17 (1990) p. 1-7, rééd.
in: ID., Fachgebiet Historische Hilfswissenschaften (2000) [3.1] p. 169-171
2. Bilan par régions géographiques
N. B.: L’origine des chercheurs correspondant le plus souvent aux régions étudiées, le classement suivi ici est
un compromis entre ces deux critères.
2.1. Pays germaniques
2.1.1. Écritures diplomatiques
STEFFENS F., Lateinische Paläographie (21909, réimpr. 1929, 1964); trad. française, Paléographie latine (1910,
2
1929, réimpr. 1982).
[449]
HESSEL A., Von der Schrift zum Druck, in: Zs. des Deutschen Vereins für Buchwesen und Schrifttum 6 (1923)
p. 89-105.
UHLHORN F., Die Großbuchstaben der sogenannten gotischen Schrift, mit besonderer Berücksichtigung der
hildesheimer Stadtschreiber (1924).
FOERSTER H., Abriß der lateinischen Paläographie (1949, 21963, réimpr. 1981).
GENZSCH H. A., Kalligraphische Stilmerkmale in der Schrift der luxemburgisch-habsburgischen Reichskanzlei,
in: MÖIG 45 (1931) p. 205-214.
HESSEL A., Die Schrift der Reichskanzlei seit dem Interregnum und die Entstehung der Fraktur, in: Nachrichten
Göttingen. Fachgr. 2: Mittlere und neuere Geschichte N. S. 2/3 (1937) p. 43-59.
FICHTENAU H., Die Lehrbücher Maximilians I. und die Anfänge der Frakturschrift (1961).
STURM H., Unsere Schrift. Einführung in die Entwicklung ihrer Stilformen (21961).
HEINEMEYER W., Studien zur Geschichte der gotischen Urkundenschrift (AfD Beiheft 4, 1962, 21982); extrait de:
AfD 1 (1955) p. 330-381; 2 (1956) p. 250-323; 5-6 (1959-1960) p. 308-429.
BANSA H., Studien zur Kanzlei Kaiser Ludwigs des Bayern vom Tag der Wahl bis zur Rückkehr aus Italien, 13141329 (1968).
KOCH W., Die Reichskanzlei in den Jahren 1167 bis 1174. Eine diplomatisch-paläographische Untersuchung
(Österreichische Akademie der Wissenschaften, phil.-hist. Kl., Denkschriften 115, 1973).
BECK F., Zur Herausbildung der gotischen Kursive im Gebiet der deutschen Ostexpansion, in: Jahrbuch für
Geschichte des Feudalismus 2 (1978) p. 101-118.
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 22
LANGHOF P., Triebkräfte und Entwicklungstendenzen der gotischen kursiven Urkundenschriften im Gebiet der
deutschen Ostexpansion im Spätmittelalter. Eine paläographisch-kanzleigeschichtliche Untersuchung, in:
Jahrbuch für Geschichte des Feudalismus 3 (1979) p. 87-109.
KOCH W., Die Schrift der Reichskanzlei im 12. Jh. (1125-1190). Untersuchungen zur Diplomatik der
Kaiserurkunde (Österreichische Akademie der Wissenschaften, phil.-hist. Kl., Denkschriften 134, 1979).
KOCH W., Zu Sprache, Stil und Arbeitstechnik in den Diplomen Friedrich Barbarossas, in: MIÖG 88 (1980) p. 3669.
GUTZWILLER H., Die Entwicklung der Schrift vom 12. bis ins 19. Jh. (Veröffentlichungen des Solothurner
Staatsarchives 8, 1981).
BECK F., Schrift, in: Die archivalischen Quellen. Eine Einführung in ihre Benutzung, éd. F. BECK/E. HENNING
(1994) p. 163-206.
BROMM G., Die Entwicklung der Großbuchstaben im Kontext hochmittelalterlicher Papsturkunden (Elementa
diplomatica 3, 1995).
[450]
KOCH W., Paläographische Bemerkungen zum Komplex der österreichischen Freiheitsbriefe, in: Festschrift
Walter Jaroschka zum 65. Geburtstag, éd. A. LIESS/H. RUMSCHÖTTEL/B. UHL (AZ 80, 1997) p. 228-252.
Papsturkunde und europäisches Urkundenwesen. Studien zu ihrer formalen und rechtlichen Kohärenz vom 11. bis
15. Jh., éd. P. HERDE/H. JAKOBS (AfD Beiheft 7, 1999).
ERTL Th., Studien zum Kanzlei- und Urkundenwesen Kaiser Heinrichs IV. (Forschungen zur Geschichte des
Mittelalters 4, 2002).
2.1.2. Extension des formes cursives aux livres
MAZAL O., Buchkunst der Gotik (Buchkunst im Wandel der Zeiten 1, 1975).
ZIEGLER Ch., Aspekte zur böhmischen und österreichischen Paläographie des 15. Jh. anhand von Beispielen des
Bestandes der Stiftsbibl. Zwettl, in: Codices manuscripti 4 (1978).
BISCHOFF B., Paläographie des römischen Altertums und des abendländischen Mittelalters (Grundlagen der
Germanistik 24, 1979, 21986); trad. française (1985); trad. anglaise (1990, réimpr. 1997, 2001); trad. italienne
(1992).
FRENZ Th., Gotische Gebrauchschriften des 15. Jh. Untersuchungen zur Schrift lateinisch-deutscher Glossare am
Beispiel des Vocabularius Ex quo, in: Codices manuscripti 7 (1981) p. 14-30.
SCHNEIDER K., Gotische Schriften in deutscher Sprache 1: Vom späten 12. Jh. bis um 1300 (1987).
MAZAL O., Beobachtungen zu österreichischen Buchschriften des 14. Jh., in: Codices manuscripti 16 (1992) p. 139.
SCHNEIDER K., Paläographie und Handschriftenkunde für Germanisten. Eine Einführung (1999).
MAZAL O., Beobachtungen zu österreichischen Buchschriften des 14. Jh., in: Scriptorium 54 (2000) p. 40-63.
2.1.3. Cursives gothiques modernes
GÓRSKI K., Neografia gotycka. Podrecznik pìsma neogotyckiego XVI-XX vekov [Néographie gothique. Manuel
de l’écriture néogothique des XVIe-XXe siècles] (1960, 21978); résumé, ID., Studies on neo-gothic script, in:
Acta Poloniae historica 9 (1963).
STURM, Unsere Schrift (1961) [2.1.1].
DÜLFER K./KORN H.-E., Schrifttafeln zur deutschen Paläographie des 16.-20 Jh. (Veröffentlichungen der
Archivschule Marburg 2, 1966, 102000).
[451]
TERZYNSKA T., Zum Schreibgebrauch in der herzoglichen Kanzlei Johann Friedrichs des Mittleren (1552-1565),
in: Studia Germanica Posnaniensia 3 (1974) p. 69-81.
GLADT K., Deutsche Schriftfibel. Anleitung zur Lektüre der Kurrentschrift des 17.-20. Jh. (1976).
BECK F., Zur Herausbildung der deutschen Schreibschrift, insbesondere ihrer kursive Formen, im Bereich
ostdeutscher Territorialstaaten im 16. Jh., in: Jahrbuch für Geschichte des Feudalismus 7 (1983) p. 265-286.
BECK F., Persönliche Schriften im Umfeld der frühbürgerlichen Revolution in Deutschland. Die Handschrift
Luthers, Müntzers, Zwinglis und Melanchthons, ein paläographischer Vergleich, in: Jahrbuch für Geschichte
des Feudalismus 13 (1989) p. 89-131.
BECK F., Die «Deutsche Schrift». Medium in fünf Jh. deutscher Geschichte, in: AfD 37 (1991) p. 453-479.
GUTZWILLER H., Die Entwicklung der Schrift in der Neuzeit, in: AfD 38 (1992) p. 381-488.
TACENKO, Zur Geschichte der deutsche[n] Kursive (1992) [2.3].
BECK, Schrift (1994) [2.1.1].
ECKARDT H. W./STÜBER G./TRUMPP Th., «Thun kund und zu wissen jedermänniglich.» Paläographie,
archivalische Textsorten, Aktenkunde (Archivhefte 32, 1999).
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 23
2.2. Europe centrale et orientale
HAJNAL I., Vergleichende Schriftproben zur Entwicklung und Verbreitung der Schrift im 12.-13. Jh. (1943).
HAJNAL I., L’enseignement de l’écriture aux universités médiévales (1954, 21959).
SPUNAR P., Genese české bastardy a její vztah k českým prvotiskům [La genèse de la bâtarde et son rapport avec
les incunables en Bohême], in: Listy filológické 78/3 (1955) p. 34-51.
SPUNAR P., L’évolution et la fonction de la bâtarde en Bohême, in: Studia żródłoznawcze. Commentationes 6
(1961) p. 1-19.
BIEŁIŃSKA M., Kancelaria Władysława Łokietka w latach 1296-1299 [La chancellerie de Ladislas le Bref dans les
années 1296-1299, in: Studia żródłoznawcze. Commentationes 6 (1961) p. 21-80.
SUŁKOWSKA I, Księgi polskiei kancelarii koronnej w drugiej polowie XV wieku [Les registres de la chancellerie
de Pologne (Metrica Regni) du XVe siècle], in: Studia żródłoznawcze. Commentationes 6 (1961) p. 81-101.
[452]
ŠEBÁNEK J, Základy pomocných věd historických 1: Latinská paleografie [Principes des sciences auxiliaires de
l’histoire 1: Paléographie latine] (1962).
ŠEBÁNEK J./DUŠKOVÁ S., Das Urkundenwesen König Ottokars II. von Böhmen, in: AfD 14 (1968) p. 302-422; 15
(1969) p. 251-427.
PRAŽÁK J., Latinské písmo v českých zemích od 11. do 16. století [L’écriture latine en Bohême, XIe-XVIe siècle],
in: Archivní časopis 20 (1970).
GIEYSZTOR A. Zaryzs dziejów pisma lacinskiego [Précis d’histoire de l’écriture latine] (1973).
PRAŽÁK J., Počatky knižni kursívy v Čechách [Débuts de la cursive livresque en Bohême], in: Studie o rukopisech
18 (1979) p. 115-143.
PRAŽÁK J., Puvod česke bastardy [Les origines de la bâtarde de Bohême], in: Studie o rukopisech 20 (1981) p. 93118.
MARSINA R., Vývoj listinného písma v stredoveku na Slovensku [Développement de l’écriture diplomatique au
Moyen Age en Slovaquie], in: Slovenská archivistika 26/1 (1991) p. 21-35.
Stand, Aufgaben und Perspektiven territorialer Urkundenbücher im östlichen Mitteleuropa, éd. W. IRGANG/N.
KERSKEN (1998).
ADAMSKA A., The introduction of writing in Central Europe (Poland, Hungary and Bohemia), in: New approaches
(1999) [3.3] p. 165-190.
SPUNAR P., Zum Aufkommen der gotischen Kursive in Mitteleuropa, in: Scriptorium 54 (2000) p. 14-19.
VEZPRÉMY L., On the border of book and charter palaeography, in: Dating undated medieval charters, éd.
M. GERVERS (2000) p. 193-206.
HAVEL D., Listinné písmo v káncelaři Václava II. (1283-1305) a Václava III. (1305-1306) 2: Typologie písma
[L’écriture diplomatique à la chancellerie de Venceslas II et Venceslas III 2: Typologie de l’écriture], in:
Sborník prací Filozofické fakulty brněnské univerzity C 48 (2001) p. 37-65.
[PÁTKOVÁ H., Cvičení z pozdně středověké paleografie [Exercices de paléographie du Moyen Âge tardif] (2001).]
Album pozdně středověkého písma 1 = Album scripturae medii aevi posterioris 1: H. PÁTKOVÁ, Severni Čechy =
Bohemia septentrionalis (2002-).
The history of written culture in the «Carpatho-Danubian» region, éd. H. PÁTKOVÁ/P. SPUNAR/J. ŠEDIVÝ (Latin
Paleography Network 1, 2003).
2.3. Russie (études sur l’Europe occidentale)
KISELEVA L. I., Gotičeskiy kursiv XIII-XV vv. [La gothique cursive du XIIIe au XVe siècle] (1974); résumé
français in: Scriptorium 30 (1976) p. 182.
[453]
MALOV V. N., Proishozhdenie sovremennogo pis’ma… [Les origines de l’écriture moderne. Paléographie des
documents français de la fin du XVe au XVIIIe siècle] (thèse dactyl. Moscou 1975).
ROMANOVA V. L., Rukopisnaja kniga i gotičeskoe pismo vo Francii v. XIII-XIV vv. [Livres manuscrits et écriture
gothique en France, XIIIe-XIVe siècles] (1975).
MAZHUGA V. I., Pocherk v latinskom pis’me konza VIII-serediny IX v. [Dynamique de l’écriture latine, fin du
VIIIe-milieu du XIIIe siecle] (thèse dactyl. Leningrad 1979).
TACENKO T. N., Zur Geschichte der deutsche[n] Kursive im 16. Jh. Bemerkungen zur Entwicklung dieser Schrift
anhand von Dokumenten einer Sammlung aus St. Petersburg, in: AfD 38 (1992) p. 356-380.
2.4. Italie
2.4.1. Généralités
FEDERICI V, La scrittura delle cancellerie italiane dal secolo XII al XVII (1934, réimpr. 1964).
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 24
BATTELLI G., Lezioni di paleografia (1936, 31949, 41999).
CENCETTI G., Lineamenti di storia della scrittura latina (1954, 21997).
PETRUCCI A., Il protocollo notarile di Coluccio Salutati, 1372-1373 (1963).
CENCETTI G., Compendio di paleografia latina per le scuole universitarie e archivistiche (1966); réed.: Paleografia
latina (1978, réimpr. 1997).
NATALE A. R., Il museo diplomatico dell’Archivio di Stato di Milano 1 (1971).
MAZZOLENI J., Esempi di scritture cancelleresche, curiali e minuscole (1972).
MARICHAL R., La scrittura, in: Storia d’Italia 5/2: I documenti, éd. R. ROMANO/C. VIVANTI (1973) p. 1265-1317.
CAU E., Codici cistercensi di Rivalta Scrivia (sec. XIII-XIV), in: Ricerche medievali 10-12 (1975-1977) p. 19-29.
FRENZ Th., Papsturkunden des Mittelalters und der Neuzeit (1986); trad. italienne (1989).
PETRUCCI A., Storia e geografia delle culture scritte (dal secolo XI al secolo XVIII), in: Letteratura italiana. Storia
e geografia 2/2: L’età moderna, éd. A. ASOR ROSA (1988) p. 1193-1292.
Civiltà comunale. Libro, scrittura, documento. Atti del convegno, Genova, 1988 (Atti della Società ligure di storia
patria 103, 1989).
PETRUCCI A., Breve storia della scrittura latina (1989, 21992).
TIEPOLO M. F./SCARPA P./MIGLIARDI O’RIORDAN G., Esempi di scritture dei secoli XII-XVIII. Tipologie di
documenti dei secoli IX-XVI (1991).
[454]
PETRUCCI A., La lettera missiva nell’Europa medievale. Tecniche e materiali (programma per un progetto di
ricerca), in: Gazette du livre médiéval 25 (1994) p. 30-31.
PETRUCCI A., Du brouillon à l’original. La lettre au Moyen Age, in: Genesis 9 (1996) p. 67-72.
Libro, scrittura, documento della civiltà monastica e conventuale nel basso medioevo (secoli XIII-XV). Atti del
convegno di studio, Fermo, 1997, éd. G. AVARUCCI/R. M. BORRACCINI VERDUCCI/G. BORRI (1999).
2.4.2. Recueils individuels d’études
COSTAMAGNA G., Studi di paleografia e di diplomatica (1972).
PRATESI A., Frustula palaeographica. Raccolta di saggi di paleografia dal 1946 al 1991 (Biblioteca di «Scrittura e
civiltà» 4, 1992).
CENCETTI G., Scritti di paleografia, éd. G. NICOLAJ (1993, 21995).
ORLANDELLI G., Scritti da «Paleografia e diplomatica», éd. R. FERRARA/G. FEO (1994).
2.4.3. Les écritures gothiques en situation de «polygraphisme»
MAZZOLENI J., Esempi di scritture cancelleresche, curiali e minuscole (1972).
CASULA F. C., Breve storia della scrittura in Sardegna. La «documentaria» nell’epoca aragonese (1978).
GALANTE M., Un necrologio e le sue scritture. Salerno sec. XI-XVI, in: Scrittura e civiltà 13 (1989) p. 49-328.
RADICIOTTI P., La curiale romana nuova. Parabola discendente di una scrittura, in: Archivio della Società romana
di storia patria 92 (1989) p. 39-113; Addenda et emendanda, ibid. 120 (1997) p. 45-64.
Civiltà del Mezzogiorno d’Italia. Libro, scrittura, documento in età normanno-sveva. Atti del convegno
dell’AIPD, Napoli-Badia di Cava dei Tirreni, 1991, éd. F. D’ORIA (1994).
MAGISTRALE F., Cultura grafica e circolazione libraria a Bari in età medievale (1997).
MAGISTRALE F., La cancelleria dei principi di Taranto. Produzione documentaria e modelli organizzativi (gli anni
di Filippo I, 1293-1331), in: Documenti medievali greci e latini. Studi comparativi, Atti del seminario di
Erice, 1995, éd. G. DE GREGORIO/O. KRESTEN (1998) p. 87-109.
[455]
FRASCADORE A., La scomunica e la scrittura. Un’indagine sulla cultura grafica di notai, giudici e testimoni nella
Puglia del primo Trecento (Millennio medievale. Studi, 1999).
2.4.4. «Mercantesca»
SAPORI A., I libri di commercio dei Peruzzi (1934).
CENCETTI, Lineamenti (1954) [2.4.1].
ORLANDELLI G., Osservazioni sulla scrittura mercantesca nei secoli XIV e XV, in: Studi in onore di Riccardo
Filangieri 1 (1959) p. 445-460; réimpr. in: ID., Scritti da «Paleografia e diplomatica» (1994) [2.4.2] p. 145178.
MELIS F., Documenti per la storia economica dei secoli XIII-XVI (1972); E. CECCHI, Nota di paleografia
commerciale (per i secoli XIII-XVI), ibid. p. 561-575.
CASTELLANI A., La prosa italiana delle origini 1: Testi toscani di carattere pratico (1982).
MIGLIO L., L’altra metà della scrittura. Scrivere in volgare (all’origine delle corsive mercantili), in: Scrittura e
civiltà 10 (1986) p. 83-138.
MIGLIO L., Criteri di datazione per le corsive librarie italiane dei secoli XIII-XIV, ovvero riflessioni, osservazioni,
suggerimenti sulla lettera mercantesca, in: Scrittura e civiltà 18 (1994) p. 143-158.
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 25
MOSIICI L., Osservazioni in margine alle scritture del volgare. Le cosiddette bastarde italiane, in: Medioevo e
Rinascimento 9 (1995) p. 121-133.
PETRUCCI A., Fatti protomercanteschi, in: Scrittura e civiltà 25 (2001) p. 167-176.
2.4.5. Transition vers la cursive humanistique/Littera Sancti Petri
HERDE P., Die Schrift der florentiner Behörden in der Frührenaissance (ca. 1400-1460). Ein Beitrag zur Frage des
Übergangs von der gotischen zur humanistischen Schrift, in: AfD 17 (1971) p. 302-335.
FRENZ Th., Das Eindringen humanistischer Schriftformen in die Urkunden und Akten der päpstlichen Kurie im
15. Jh., in: AfD 19 (1973) p. 287-418, 20 (1974) p. 384-506.
FRENZ Th., «Littera Sancti Petri». Zur Schrift der neuzeitlichen Papsturkunden, in: AfD 24 (1978) p. 443-515.
RÜTH M., Aufkommen und Verbreitung der humanistischen Kanzleikursive in den kommunalen Behörden der
südlichen Toskana und Umbriens. Untersuchungen zu den Dokumentarschriften von Foligno, Perugia, Siena
und Arezzo im 15. Jh., in: AfD 36 (1990) p. 221-370; 37 (1991) p. 307-452.
[456]
ZIMMERHACKL H., Das Eindringen humanisticher Schriftformen in die Dokumentarschrift der kommunalen
Behörden der Emilia Romagna im 15. Jh., in: AfD 45 (1999) p. 119-333.
ZIMMERHACKL H., Dokumentation der humanistischen Schriftentwicklung in den kommunalen Behörden von
Bologna, Modena und Reggio im 15. Jh., in: AfD 46 (2000) p. 325-544.
2.5. Péninsule Ibérique
2.5.1 Espagne
TERREROS Y PANDO E., Paleografía española (1758).
GARCÍA VILLADA Z., Paleografía española, precedida de una introducción sobre la paleografía latina (1923).
MILLARES CARLO A. Tratado de paleografía española (1929, 31983).
PONS I GURI J. M., Característiques paleogràfiques dels llibres notarials catalans fins el 1351, in: VII Congreso de
historia de la Corona de Aragón 3 (1964) p. 225-248.
ARRIBAS ARRANZ F., Paleografía documental hispánica (1965).
CASULA F. C., Alcune note sulla «letra aragonesa» nel secolo XIV, in: Annali della Facoltà di lettere, filosofia e
magistero dell’Università di Cagliari 30 (1967) p. 1-30.
MATEU IBARS J., Paleografía de Andalucía oriental. Album (1973-1977).
D’ARIENZO L., Alcune considerazioni sul passaggio dalla scrittura gotica all’umanistica nella produzione
documentaria catalana dei secoli XIV e XV, in: [F. C. CASULA, L. D’ARIENZO], Studi di paleografia e
diplomatica (1974) p. 199-226.
MARÍN MARTÍNEZ T./RUIZ ASENCIO J. M., Paleografía y diplomática (1978, 51991-1992).
CASULA F. C., Observaciones paleográficas y diplomáticas sobre la cancillería de Jaime I el Conquistador, in: X
Congreso de historia de la corona de Aragón 3 (1980) p. 435-451.
MATEU IBARS J./MATEU IBARS Ma. D., Colectánea paleográfica de la Corona de Aragón, siglos IX-XVIII (19801991).
CARBONELL BORIA M. J., Notas para el estudio de la escritura usual en Tortosa (primera mitad del siglo XIV), in:
Saitabi 30 (1981) p. 37-46.
GIMENO BLAY F. M., La escritura gótica en el país valenciano después de la Conquista del siglo XIII (1985).
UDINA I MARTORELL F./ESCARTÍN I SÁNCHEZ E., Documents cabdals de la història de Catalunya (1985-1987).
[457]
GIMENO BLAY F. M./TRENCHS ODENA J., La paleografía y la diplomatica en España, in: Hispania 50 (1990)
p. 459-472.
Escritura y cultura en la edad media, in: Anuario de estudios medievales 21 (1991) p. 309-604.
ARNALL I JUAN M. J./PONS I GURI J. M., L’escriptura a les terres gironines, segles IX-XVIII (1993).
RIESCO TERRERO A., Introducción a la paleografía y la diplomática general (1999).
2.5.2. Portugal
COSTA A. de J. da, Álbum de paleografia e diplomática portuguesas 1 (1942, 61997).
NUNES E. B., Álbum de paleografia portuguesa 1 (1969).
DIAS J. J. A./ MARQUES A. H. de O./RODRIGUES T. F., Álbum de paleografia (1987).
CRUZ A., Paleografia portuguesa. Ensaio de manual (1987).
MARQUES J., A influência das bulas papais na documentação medieval portuguesa, in: Revista da Faculdade de
Letras [Porto]. Serie de Historia 2e s. 13 (1996) p. 25-44.
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 26
2.6. France, Belgique et Pays-Bas
2.6.1. France: écritures documentaires médiévales
PROU M., Manuel de paléographie (41924).
BOÜARD A. de, Manuel de diplomatique française et pontificale (1929-1952).
MARICHAL R., Registrum autographum priorum collegii Sorbonae. Codex Paris. Nat. lat. 5494 A (Umbrae
codicum occidentalium 3, 1960).
GASPARRI F., L’écriture des actes de Louis VI, Louis VII et Philippe Auguste (1973).
Testaments provençaux du Moyen Age. Documents paléographiques, éd. A. RAMIÈRE DE FORTANIER (1979).
POULLE E., La cursive gothique à la chancellerie de Philippe Auguste, in: La France de Philippe Auguste. Le
temps des mutations. Actes du colloque international organisé par le CNRS, Paris, 1980, éd. R.-H. BAUTIER
(1982) p. 455-467.
POULLE E., Les faux de Robert d’Artois et l’histoire de l’écriture, in: Clio et son regard. Mélanges d’histoire, d’art
et d’archéologie offerts à Jacques Stiennon, éd. R. LEJEUNE/J. DECKERS (1982) p. 519-534.
[458]
PARISSE M., Un scribe champenois du XIIe siècle et l’évolution de son écriture, in: AfD 29 (1983) p. 229-241.
GASPARRI F., L’écriture usuelle, reflet d’un enseignement et signification historique, in: Médiévales 13 (1987)
p. 143-157; rééd. abrégée, Les écritures usuelles et leur signification historique. L’exemple de la chancellerie
française au XIIe siècle, in: VIII Colóquio del Comité internacional de paleografía latina. Actas (MadridToledo, 1987), éd. M. C. DÍAZ Y DÍAZ (1990) p. 71-75.
MERISALO O., La langue et les scribes. Étude sur les documents en langue vulgaire de La Rochelle, Loudon,
Châtellerault et Mirebeau au XIIIe siècle (Commentationes humanarum litterarum 87, 1988).
MILLET H./POULLE E., Le vote de la soustraction d’obédience en 1398 1 (1988).
GASPARRI F., Introduction à l’histoire de l’écriture (1994).
Recueil de paléographie normande, éd. L. LE ROC’H MORGÈRE (1995).
[Documents du XVe siècle des Archives de la Manche. Catalogue de l’exposition (1998).]
Album de manuscrits français du XIIIe siècle. Mise en page et mise en texte (IRHT, 2001).
2.6.2. France: cursives modernes
SAMARAN Ch., Note pour servir au déchiffrement de la cursive gothique de la fin du XVe à la fin du XVIIe siècle,
in: Le Moyen Age 2e s. 24 (1922) p. 95-106.
POULLE E., Paléographie des écritures cursives en France du XVe au XVIIe siècle (1966).
SAMARAN Ch., Cursives françaises des XVe, XVIe et XVIIe siècles, in: Journal des savants (1967) p. 123-153.
AUDISIO G./BONNOT-RAMBAUD I., Lire le français d’hier. Manuel de paléographie moderne, XVe-XVIIIe siècle
(1991, 32001).
2.6.3. Belgique et Pays-Bas
REUSENS E. H. J., Éléments de paléographie (1899, réimpr. 1963).
NÉLIS H., De l’influence de la minuscule romaine sur l’écriture au XIIe et XIIIe siècle en Belgique, in: Bulletin de
l’Institut historique belge de Rome 3 (1924) p. 5-30.
STIENNON J., L’écriture diplomatique dans le diocèse de Liège du XIe au milieu du XIIIe siècle. Reflet d’une
civilisation (1960).
GOUW J. L. van der, Oud schrift (Archivistica 3, 1963, 21978).
STIENNON J, Paléographie du Moyen Age, collab. G. HASENOHR (1973, 31999).
[HORSMAN P. J./POELSTRA Th. J./SIGMOND J. P., Schriftspiegel. Nederlandse paleografische teksten van de 13de
tot de 18de eeuw (1984).]
[459]
DEKKER C./BAETENS R./MAARSCHALKERWEERD-DECHAMPS S., Album palaeographicum XVII Provinciarum
(1992).
BURGERS J. W. J., De paleografie van de documentaire bronnen in Holland en Zeeland in de dertiende eeuw
(Schrift en schriftdragers in de Nederlanden in de Middeleeuwen 1, 1995).
2.7. Grande-Bretagne
PALAEOGRAPHICAL SOCIETY/NEW PALAEOGRAPHICAL SOCIETY, Facsimiles of manuscripts and inscriptions
(1873-1932).
JOHNSON Ch./JENKINSON H., English court hand AD 1060 to 1500 (1915, réimpr. 1967).
JENKINSON H., The later court hands in England, from the 15th to the 17th century (1927, réimpr. 1969).
DENHOLM-YOUNG N., Handwriting in England and Wales (1954).
BISHOP T. A. M./CHAPLAIS P., Facsimiles of English royal writs to AD 1100 (1957).
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 27
HECTOR L. C., The handwriting of English documents (1958, 21966).
BISHOP T. A. M., Scriptores regis. Facsimiles to identify and illustrate the hands of royal scribes in original
charters of Henry I, Stephen, and Henry II (1961).
PARKES M. B., English cursive book hands 1250-1500 (1969, 21979).
CHAPLAIS P., English royal documents. King John-Henry VI, 1199-1461 (1971).
RYCRAFT A., English mediaeval handwriting (31973).
SIMPSON G. G., Scottish handwriting 1150-1650. An introduction to the reading of documents (1973, 21986).
CHAPLAIS P., English mediaeval diplomatic practice 2: Plates (1975).
PRESTON J. F./YEANDLE L., English handwriting 1400-1650. An introductory manual (1992, réimpr. 1999).
2.8. Scandinavie
JANSSON S. O., Latinska alfabetets utveckling i medeltida svensk brevskrift. De enskilda bokstävernes historia
[Développement de l’alphabet latin dans l’écriture documentaire suédoise du Moyen Age. Histoire des lettres
individuelles], in: Acta philologica Scandinavica 22 (1954) p. 81-147; sommaire in: Un secolo di paleografia
e diplomatica [1] p. 297-298.
[460]
3. Interprétations et problèmes
3.1. Perspectives générales
WATTENBACH W., Das Schriftwesen im Mittelalter (31896, réimpr. 1958).
FICHTENAU H., Mensch und Schrift im Mittelalter (1946).
CENCETTI G., Vecchi e nuovi orientamenti nello studio della paleografia latina, in: La Bibliofilia 50 (1948) p. 523; réed. in: ID., Scritti [2.4.2] p. 23-45.
MARICHAL R., L’écriture latine et la civilisation occidentale du Ier au XVIe siècle, in: L’écriture et la psychologie
des peuples, éd. M. COHEN/J. SAINTE FARE GARNOT (1963) p. 199-247.
PETRUCCI A., Funzione della scrittura e terminologia paleografica, in: Palaeographica, diplomatica et archivistica.
Studi in onore di Giulio Battelli 1 (1979) p. 3-30.
MALLON J., Qu’est-ce que la paléographie? in: Paläographie 1981. Colloquium des Comité international de
paléographie, München, 1981, éd. G. SILAGI (Münchener Beiträge zur Mediävistik und RenaissanceForschung 32, 1982) p. 47-52.
RÜCK P., Fachgebiet Historische Hilfswissenschaften. Ausgewählte Aufsätze, éd. E. EISENLOHR/P. WORM
(Elementa diplomatica 9, 2000).
SMITH M. H., Pour une préhistoire des écritures modernes, in: Gazette du livre médiéval 40 (2002) p. 1-13.
FRAY J.-L., L’histoire de l’art et l’histoire culturelle à la découverte de la dimension de l’espace. Quelques
réflexions à partir d’exemples récents (France et Allemagne), in: Les échanges culturels au Moyen Age.
XXXIIe congrès de la SHMES, Univ. du Littoral-Côte d’Opale, 2001 (2003) p. 303-312.
3.2. L’écriture et l’écrit
3.2.1. Écriture et société
BARTOLI LANGELI A., Ancora su paleografia e storia della scrittura. A proposito di un convegno perugino, in:
Scrittura e civiltà 2 (1978) p. 275-294.
CLANCHY M. T., From memory to written record. England 1066-1307 (1979, 21993, réimpr. 1999).
CARDONA G. R., Antropologia della scrittura (1981).
BARTOLI LANGELI A., Storia dell’alfabetismo e storia della scrittura. Questioni di metodo, in: Annali della Facoltà
di Lettere e Filosofia (Perugia) 2: Studi storico-antropologici 26 (1988-1989) p. 215-237.
[461]
MARTIN H.-J., Histoire et pouvoirs de l’écrit (1988, 21996).
Pragmatische Schriftlichkeit im Mittelalter. Erscheinungsformen und Entwicklungsstufen. Akten des
internationalen Kolloquiums, 1989, éd. H. KELLER/K. GRUBMÜLLER/N. STAUBACH (Münstersche MittelalterSchriften 65, 1992).
Pratiques de la culture écrite en France au XVe siècle. Actes du colloque international du CNRS, Paris, 1992, éd.
M. ORNATO/N. PONS (Textes et études du Moyen Age 2, 1995).
Pragmatic literacy, East and West 1200-1300. [17e Congrès international des sciences historiques, Madrid, 1990],
éd. R. BRITNELL (1997).
New approaches to medieval communication, éd. M. MOSTERT (Utrecht studies in medieval literacy 1, 1999).
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 28
Schriftlichkeit und Lebenspraxis im Mittelalter. Erfassen, Bewahren, Verändern. Akten des internationalen
Kolloquiums, 1995, éd. H. KELLER/C. MEIER/T. SCHARFF (Münstersche Mittelalter-Schriften 76, 1999).
Charters and the use of the written word in medieval society, éd. K. HEIDECKER (Utrecht studies in medieval
literacy 5, 2000).
Pragmatische Dimensionen mittelalterlicher Schriftkultur. Akten des internationalen Kolloquiums, 1999, éd. C.
MEIER et al. (Münstersche Mittelalter-Schriften 79, 2002).
Vom Nutzen des Schreibens. Soziales Gedächtnis, Herrschaft und Besitz im Mittelalter, éd. W. POHL/P. HEROLD
(Österreichische Akademie der Wissenschaften, phil.-hist. Kl., Denkschriften 306, 2002).
3.2.2. Quelques perspectives sémiologiques
MORISON S., Politics and script. Aspects of authority and freedom in the development of Graeco-Latin script from
the 6th cent. B.C. to the 20th cent. A.D. The Lyell Lectures, 1957, éd. N. BARKER (1972); réimpr. 2000.
D’HAENENS A., Pour une sémiologie paléographique et une histoire de l’écriture, in: Scriptorium 29 (1975)
p. 175-198.
RUIZ GARCÍA E., Hacia una semiología de la escritura (Biblioteca del libro 10, 1992).
HARRIS R., Rethinking writing (2000).
3.3. L’analyse des formes
FINK-ERRERA G., Contribution de la macrophotographie à la conception d’une paléographie générale, in: Bulletin
de la Société internationale pour l’étude de la philosophie médiévale 4 (1962) p. 100-118.
[462]
GILISSEN L., L’expertise des écritures médiévales (1973).
POULLE E., [Compte rendu de GILISSEN, L’expertise], in: BECh 132 (1974) p. 101-110.
Les techniques de laboratoire dans l’étude des manuscrits. [Colloque] CNRS, Paris, 1972 (1974).
GARAND M.-C./ETCHEVERRY F., Analyse d’écritures et macrophotographie. Les manuscrits originaux de Guibert
de Nogent, in: Codices manuscripti 4 (1975) p. 112-122.
FRENZ Th., Zur äußeren Form der Papsturkunden 1230-1530, in: AfD 22 (1976) p. 347-375.
BERGERON R./ORNATO E., La lisibilité dans les manuscrits et les imprimés à la fin du Moyen Age. Préliminaires
d’une recherche, in: Scrittura e civiltà 14 (1990) p. 151-198; rééd. in: La face cachée du livre médiéval.
L’histoire du livre vue par Ezio Ornato, ses amis et ses collègues (1997) p. 521-554.
L’écriture. Le cerveau, l’œil et la main. Actes du colloque international du CNRS, Paris, Collège de France, 1988,
éd. C. SIRAT/J. IRIGOIN/E. POULLE (Bibliologia 10, 1990).
CRETTEZ J.-P./LORETTE G., Reconnaissance de l’écriture manuscrite, in: Les techniques de l’ingénieur. H. Traité
d’informatique, ch. H 1358 (1998) p. 1-15.
Methoden der Schriftbeschreibung. [Colloque, Marburg, 1990], éd. P. RÜCK (Historische Hilfswissenschaften 4,
1999).
SMITH M. H., Numérisation et paléographie, in: La numérisation des manuscrits médiévaux. Actes de la journée
d’étude, Paris, 2000, éd. É. LALOU (Le médiéviste et l’ordinateur 40, 2001) p. 9-16.
<lemo.irht.cnrs.fr/40/mo40-03.htm>.
3.4. Qu’est-ce que la cursivité?
POULLE E., [Compte rendu de STIENNON, Paléographie], in: BECh 131 (1973) p. 612-620.
COSTAMAGNA G., Paleografia latina. Comunicazione e tecnica scrittoria, in: Introduzione allo studio della storia
(1970) p. 395-440; rééd. in: ID., Studi [2.4.2] p. 123-198.
KISELEVA, Goticeskiy kursiv (1974) [2.3].
POULLE, La cursive gothique (1982) [2.6.1].
NOORDZIJ G., The stroke of the pen. Fundamental aspects of western writing (1982).
COSTAMAGNA
G.,
Perché
scriviamo
cosí.
Invito
alla
paleografia
latina
(1987).
<archivi.beniculturali.it/Biblioteca/IndexCostamagna.html>
[463]
CASAMASSIMA E., Tradizione corsiva e tradizione libraria nella scrittura latina del medioevo (1988, réimpr. 1998).
RÜCK P., Ligatur und Isolierung. Bemerkungen zum kursiven Schreiben im Mittelalter, in: Aspekte von Schrift
und Schriftlichkeit, éd. J. BAURMANN/K. B. GÜNTHER/U. KNOOP (Germanistische Linguistik 93-94, 1988)
p. 111-139; réed. in: ID., Fachgebiet Historische Hilfswissenschaften (2000) [3.1] p. 97-111.
MASTRUZZO A., Ductus, corsività, storia della scrittura. Alcune considerazioni, in: Scrittura e civiltà 19 (1995)
p. 403-464.
GUMBERT J. P., The pen and its movement. Some general and less general remarks, in: Gazette du livre médiéval
40 (2002) p. 14-24.
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 29
3.5. Un chaînon manquant? Les tablettes de cire
PETRUCCI A., Le tavolette cerate fiorentine di casa Majorfi. Edizione, riproduzione e commento (Note e
discussioni erudite 10, 1965).
MOSER E./KÜHN H., Wachs als Beschreib- und Siegelstoff. Wachsschreibtafeln und ihre Verwendung, in: R.
BÜLL, Vom Wachs. Hoechster Beiträge zur Kenntnis der Wachse I/9 (1968, réimpr. 1977) p. 785-894.
GRASSMANN A., Das Wachstafel-Notizbuch des mittelalterlichen Menschen, in: Zur Lebensweise in der Stadt um
1200, éd. H. STEUER (Zs. für Archäologie des Mittelalters. Beiheft 4, 1986) p. 223-235.
LALOU É., Les tablettes de cire médiévales, in: BECh 147 (1989) p. 123-140.
Les tablettes à écrire de l’Antiquité à l’époque moderne. [Colloque, CNRS, Paris, 1990], éd. É. LALOU
(Bibliologia 12, 1992).
DEGNI P., Usi delle tavolette lignee e cerate nel mondo greco e romano (Ricerca papirologica 4, 1998).
LALOU É., Les comptes sur tablettes de cire de Jean Sarrazin, chambellan de saint Louis (Monumenta
palaeographica medii aevi. Series Gallica 4, 2003).
SMITH M. H., De la cire au papyrus, de la cire au papier. Deux mutations de l’écriture? in: Gazette du livre
médiéval 43 (2003) p. 1-13.
3.6. Logiques du système graphique
SPENCER H., The visible word. Problems of legibility (1968).
IRIGOIN J., De l’alpha à l’oméga. Quelques remarques sur l’évolution de l’écriture grecque, in: Scrittura e civiltà
10 (1986) p. 7-19.
IRIGOIN J., L’alphabet grec et son geste, des origines au IXe siècle après J.-C., in: L’écriture, éd.
SIRAT/POULLE/IRIGOIN (1990) [3.3] p. 299-305.
SAENGER P., Space between words. The origins of silent reading (1997).
[464]
ANDRIEUX-REIX N./MONSONEGO S., Écrire des phrases au Moyen Age. Matériaux et premières réflexions pour
une étude des segments graphiques observés dans des manuscrits français médiévaux, in: Romania 115
(1997) p. 289-336.
Segments graphiques du français. Pratiques et normalisations dans l’histoire, éd. N. ANDRIEUX-REIX/S.
MONSONEGO (Langue française 119, 1998).
3.7. Typologie et nomenclature
HAJNAL, Vergleichende Schriftproben (1943) [2.2].
LIEFTINCK G. I., Pour une nomenclature de l’écriture livresque de la période dite gothique, in: Nomenclature des
écritures livresques du IXe au XVIe siècle. Premier colloque international de paléographie latine, Paris, 1953
(1954) p. 15-34.
BARTOLONI F., Paleografia e critica testuale III: La nomenclatura delle scritture documentarie, in: Relazioni del X
Congresso internazionale di scienze storiche 1 (1955) p. 434-443.
GUMBERT J. P., Die utrechter Kartäuser und ihre Bücher im frühen 15. Jh. (1974).
GUMBERT J. P., Nomenklatur als Gradnetz. Ein Versuch an spätmittelalterlichen Schriftformen, in: Codices
manuscripti 1 (1975) p. 122-125.
GUMBERT J. P., A proposal for a Cartesian nomenclature, in: Essays presented to G. I. Lieftinck 4: Miniatures,
scripts, collections (Litterae textuales 4, 1976) p. 45-52.
BROWN M. P., A Guide to western historical scripts from Antiquity to 1600 (1990, réimpr. 1993, 1999).
SPIEGEL J., Vom Trecento I/II zum Typ A, B, C… Ein Versuch zu Terminologie und (computer-)graphischer
Darstellung der Urkundenschrift des 14. Jh., in: ZBLG 55 (1992) p. 65-76.
OVERGAAUW E., Die Nomenklatur der gotischen Schriftarten bei der Katalogisierung von spätmittelalterlichen
Hss., in: Codices manuscripti 17 (1994) p. 100-106.
DEROLEZ A., The palaeography of Gothic manuscript books from the 12th to the early 16th century (2003).
3.8. Enseignement de l’écriture
STEINBERG S. H., The medieval writing master, in: The Library 4e s. 22 (1941) p. 1-24.
STEINBERG S. H., A hand list of specimens of medieval writing masters, in: The Library 4e s. 23 (1942-1943)
p. 191-194.
[465]
HAJNAL, L’enseignement (1954) [2.2].
M. H. Smith, Les gothiques documentaires | 30
STEINMANN M., Ein mittelalterliches Schriftmusterblatt, in: AfD 21 (1975) p. 450-458.
SPILLING H., Schreibkünste des späten Mittelalters, in: Codices manuscripti 4 (1978) p. 97-117.
GASPARRI F., Note sur l’enseignement de l’écriture aux XVe-XVIe siècles. A propos d’un nouveau placard du
XVIe siècle découvert à la Bibl. nationale, in: Scrittura e civiltà 2 (1978) p. 245-261.
GASPARRI F., L’enseignement de l’écriture à la fin du Moyen Age. A propos du «Tractatus in omnem modum
scribendi», ms. 76 de Kremsmünster, in: Scrittura e civiltà 3 (1979) p. 243-265.
GASPARRI F., Enseignement et techniques de l’écriture du Moyen Age à la fin du XVIe siècle, in: Scrittura e
civiltà 7 (1983) p. 201-222.
GASPARRI F., L’écriture usuelle, reflet d’un enseignement et signification historique, in: Médiévales 13 (1987)
p. 143-157.
HOFFMANN F., Vzorník gotického písma z 15. století [Spécimen d’écriture gothique du XVe siècle], in: Studie o
rukopisech 31 (1995-1996) p. 27-34.
CRIBIORE R., Writing, teachers, and students in Graeco-Roman Egypt (American studies in papyrology, 36, 1996).