Les réponses des Français à l'enquête sur leurs relations avec le passé montrent un intérêt pour le passé moindre que dans d'autres pays avec des variations notables selon l'âge, le genre, les revenus, les statuts maritaux. Une analyse...
moreLes réponses des Français à l'enquête sur leurs relations avec le passé montrent un intérêt pour le passé moindre que dans d'autres pays avec des variations notables selon l'âge, le genre, les revenus, les statuts maritaux. Une analyse territorialisée et contextualisée éclaire ces résultats. L'histoire perçue comme complexe, conflictuelle et discontinue s'organise par un ensemble de repères politiques permettant de donner sens à l'évolution du monde. Ils constituent aussi des ressources réinterprétées pour saisir le présent. Le jugement critique sur la transmission du passé, l'acceptation d'une lecture plurielle de celui-ci et l'approche d'abord individuelle semblent désormais orienter la conscience historique. Biographie Françoise Lantheaume, enseignante-chercheuse à l'université de Lyon, a soutenu une thèse de sociologie du curriculum sur l'enseignement de l'histoire de la colonisation et de la décolonisation en France des années 1930 à la fin du XXè siècle. Elle dirige le laboratoire Éducation, Cultures, Politiques à Lyon2 et enseigne à l'Institut des sciences et pratiques d'éducation et de formation (ISPEF). Ses travaux portent sur la construction du curriculum à travers l'étude de l'enseignement de questions controversées en histoire et sur le travail enseignant. Depuis 2011, elle dirige une recherche internationale sur les récits de l'histoire de leur pays par les élèves. L'enquête d'opinion réalisée à l'initiative de l'Association d'études canadiennes dans quatre pays (Etats-Unis, Canada, Royaume-Uni, France) donne une idée du rapport à leur passé 1 des différents peuples, non pas sous l'angle de leurs connaissances, mais à partir de l'importance que les enquêtés lui accordent et de l'usage qu'ils en font. L'enquête permet d'aborder la réception des informations, des savoirs à propos du passé. En France, elle a concerné 1001 personnes. Les résultats présentés dans cet article sont les plus saillants. Ils situent les Français à la fois de façon proche des autres pays et, pour certains points, dans un rapport singulier au passé. En France, un lien moins fort avec le passé Un étonnement surgit à la lecture des résultats de l'ensemble de l'enquête 2 : malgré une forte exposition à l'enseignement de l'histoire pendant toute leur scolarité, une mobilisation quasi quotidienne de références historiques dans les discours publics et des diffusions massives de livres d'histoire, de romans, de films à caractère historique, les Français ont tendance à accorder moins d'importance au lien avec leur passé que les autres pays. En France, 65 % des répondants (70% ou plus pour les autres pays) estiment qu'il faut maintenir un lien fort ou très fort avec le passé en tant qu'il est source de « leçons » ou d'« inspiration » pour leur vie actuelle tandis que 34% déclarent 1 1 L'ambivalence entre « passé » et « histoire », les biais qu'elle peut entraîner ne sera pas abordée dans ce texte. 2 Réalisée en 2011 par Leger Marketing pour l'Association des études canadiennes.