Syndrome de Guillain-Barré
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Neuro-réanimation
Syndrome de Guillain-Barré
Guillain Barré syndrome
SUMMARY
Guillain Barré syndrome (GBS) is the leading cause of acute extensive paralysis in industrialized
countries since the disappearance of polio. Its diagnosis remains essentially clinical. It is a
progressive disease that can lead the patient to respiratory failure and intensive care. An
accurate and repeated neurological examination will most often confirm the diagnosis, judge
the progression of the disease and therefore its potential severity, to consider the first therapeutic
measures. Complementary examinations are essentially useful for ruling out another cause, in
particular meningoradiculitis by lumbar puncture and spinal cord damage by MRI. An essential
point is the identification of patients at risk of developing acute respiratory failure. The other
therapeutic aspect is the choice between plasma exchanges and intravenous immunoglobulins.
© 2021 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
https://doi.org/10.1016/j.praneu.2021.03.004
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mais le risque augmente avec le temps (de 20 % tous les proposés (Tableau 1) [8]. Récemment, des critères dits de
10 ans). Le sexe ratio est en défaveur des hommes avec un « BRIGHTON » ont été proposés. Ces critères à visée rétro-
risque relatif de 1,78 [1]. On retrouve à l'anamnèse un anté- spective ont été mis au point dans le contexte de la vaccination
cédent récent d'infection digestive (gastro-entérite aiguë), res- anti H1N1 DE 2009-2010. Ils comprennent 4 niveaux de cer-
piratoire ou un syndrome grippal dans plus de 60 % des cas. titude diagnostic allant de 1 (le plus haut) à 4 (le plus faible) [9].
Les principaux agents prodromiques incriminés sont Campy-
lobacter jejuni, Mycoplasme pneumoniae, Haemophilus Évolution
influenzae, Cytomegalovirus, Eptein-Barr virus, ou virus de
l'immunodéficience humaine [2]. Phase d'extension
Un lien avec une vaccination a également été évoqué suite
à « l'épidémie » de SGB en 1976 suite à la campagne de Elle dure par définition moins de 4 semaines. Le tableau
vaccination contre la grippe porcine. La campagne de vacci- clinique débute habituellement par des troubles sensitifs à type
nation contre la grippe H1N1 de 2009 a également été asso- de paresthésies ou dysesthésies des extrémités. Des dou-
ciée à une augmentation de nombre de cas de SGB, mais très leurs lombaires sont classiques. S'y associe un déficit moteur,
minime (< 1 cas excédentaire par million de dose) [3]. Le lien bilatéral et symétrique, flasque avec aréfléxie. Le déficit est
entre SGB et les autres vaccins n'a jamais été mis en évidence d'évolution ascendante, prédomine en proximal et peut être de
[4]. Dans notre expérience, les GBS post vaccinaux sont rare gravité variable : risque d'évolution vers une tétraplégie, une
et en général associés à une cause infectieuse. diplégie faciale, une atteinte des nerfs phréniques avec insuf-
fisance respiratoire restrictive aiguë [4,10].
Des formes atypiques sont possibles : forme descendante,
évolution suraiguë en moins de 24 heures, conservation des
PHYSIOPHATHOLOGIE réflexes ostéo-tendineux voire hyperréflexie [10].
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À noter que l'intubation retardée est un facteur de risque de Maladie veineuse thrombo-embolique
pneumopathie précoce acquise sous ventilation mécanique,
L'immobilisation prolongée et les traitements par immunoglo-
secondaire à des troubles de la déglutition [14].
bulines polyvalentes majorent le risque de thromboses vei-
neuses profondes et/ou d'embolie pulmonaire. L'incidence
chez les patients en réanimation est respectivement de 9 et
Dysautonomie 7 % [16].
L'atteinte du système nerveux autonome se retrouve dans
plus de 70 % des cas. Elle est responsable de troubles du Atteintes neuro-musculaire acquise en
rythme cardiaque, d'une labilité tensionnelle (hypo- et hyper- réanimation (ANMAR)
tension), de rétention urinaire, d'ileus fonctionnel, de troubles Comme chez tous patients de réanimation, les patients pré-
vasomoteurs et d'un SIADH. La dysautonomie peut être sentant un SGB sont susceptibles de développer une ANMAR.
sévère, avec de possibles épisodes de bradycardie La sévérité des lésions est corrélée au nombre de dysfonc-
extrême, notamment lors des aspirations. Les troubles du tions d'organe. Les ANMAR représentant un facteur de risque
rythme cardiaque expliqueraient 5 % des décès au cours de mortalité et de sevrage ventilatoire prolongé, elles doivent
du SGB [4]. être dépistées quotidiennement. Dans le contexte du SGB, le
diagnostic est difficile, le tableau clinique étant relativement
proche, associant un déficit moteur périphérique, flasque et
Douleurs une aréflexie. La réalisation d'un ENMG retrouvant une poly-
neuropathie axonale ou une biopsie musculaire révélant une
Les douleurs ont été retrouvées chez près de 2/3 des patients, dénervation et une atrophie des fibres musculaires peut être
elles sont souvent un signe prodromique de la maladie. Il s'agit utile [17].
classiquement de douleurs neurogènes, à type de paresthé-
sies, dysesthésies, prédominant au niveau des extrémités et
des lombes, et sévères (ENS > 8/10). Ces douleurs sont cor- Autres manifestations
rélées à la sévérité du déficit moteur et peuvent persister Le SGB peut être associé à une fatigue importante qui peut
pendant plusieurs semaines ou années [15]. persister plusieurs mois après la récupération motrice [5]. Par
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importante. Des effets secondaires plus graves peuvent être d'une atteinte faciale et/ou bulbaire étaient des facteurs pré-
observés : choc anaphylactique chez les patients présentant dictifs de ventilation [24].
un déficit en IgA, méningites aseptiques, insuffisance rénale Les facteurs prédictifs de ventilation mécanique et les critères
aiguë organique, événements thrombo-emboliques, hypona- d'intubation sont rappelés dans le Tableau 3.
trémie/pseudohyponatrémie, éruption cutanée ou anémie Le sevrage peut être débuté quand la CV est > 7 ml/kg et
hémolytique [21]. l'extubation envisageable si elle est > 15 ml/kg. Il doit se faire
L'association des 2 traitements n'est pas plus efficace que progressivement, en réalisant des épreuves sur pièce en T de
l'une des 2 méthodes seule [21]. Une deuxième cure d'IgIV a durée de plus en plus longue. La réussite d'une épreuve
été proposée chez les patients les plus sévères n'ayant pas de 12 heures, avec une normalité des gaz du sang au décours
répondu à la première cure mais sans que les essais théra- sont préconisées avant une extubation [13].
peutiques n'aient actuellement pu le confirmer [22]. Les corti- En cas de déficit prolongé, une trachéotomie peut être pro-
coïdes n'ont pas montré de preuve d'efficacité. posée en attendant la récupération. Un délai de 3 semaines de
ventilation mécanique est proposé avant de recourir à cette
option.
La présence de symptômes bulbaires avec notamment des
Traitements symptomatiques troubles de déglutition impose la pose d'une sonde naso-
Vingt cinq à 30 % des patients nécessitent une ventilation gastrique permettant l'alimentation entérale et l'administration
mécanique suite à une insuffisance respiratoire aiguë ou des des traitements. Cependant, elle ne prévient pas les micro-
troubles de la déglutition. La problématique principale va être inhalations et les risques de pneumopathies associées [14].
de reconnaître les patients à risque de défaillance respiratoire Les douleurs neurogènes doivent être prises en charge par
et ensuite de reconnaître quand appliquer la ventilation méca- des antalgiques spécifiques comme les antiépileptiques [7].
nique La VNI n'est pas indiquée chez ce type de patients Il ne faut cependant pas négliger les douleurs liées l'immobi-
présentant des troubles de la déglutition, une diminution rapide lisation qui sont prises en charge par les antalgiques classi-
de la capacité vitale, un épuisement respiratoire et une dysau- ques (pallier I à III) et les AINS [10].
tonomie [13]. Les facteurs de risque de ventilation mécanique Une anticoagulation préventive par HNF et HBPM ou des bas
sont : la sévérité clinique, l'atteinte bulbaire, les infections de compression pneumatique intermittente doivent rapide-
à CMV et les atteintes hépatiques [23]. D'autres études ont ment être instaurés et maintenus jusqu'à la reprise de la
montré que la sévérité du déficit moteur, (MRC sumscore) ; les marche ou au minimum 3 mois en cas de persistance d'une
délais entre l'admission et le début des signes, et l'existence immobilité [10].
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PRONOSTIC
Malgré une prise en charge intensive, la mortalité du SGB est RÉFÉRENCES
de 10 %. Les principales causes de décès sont respiratoires
(détresse respiratoire aiguë, pneumopathie, EP). Les facteurs [1] Sejvar JJ, Baughman AL, Wise M, Morgan OW. Population
de risque de mortalité sont : l'âge, la sévérité de la maladie au incidence of Guillain-Barré syndrome: a systematic review and
nadir, la nécessité de recourir à la ventilation mécanique et meta-analysis. Neuroepidemiology 2011;36:123–33.
l'hyponatrémie [4]. Le risque de séquelles est augmenté dans [2] Hadden RD, Karch H, Hartung HP, Zielasek J, Weissbrich B,
les formes motrices pures, les formes axonales et celles liées Schubert J, et al. Preceding infections, immune factors, and
à une infection à C. jejuni [2]. outcome in Guillain-Barré syndrome. Neurology 2001;56:758–65.
Le pronostic moteur global est très bon, mais près de 30 % des [3] Wise ME, Viray M, Sejvar JJ, Lewis P, Baughman AL,
patients gardent des séquelles à long terme (douleurs, Connor W, et al. Guillain-Barre syndrome during the
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