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Cours IV Tolérance Immunitaire Et Auto Immunité

Ce document traite de la tolérance immunitaire et de l'auto-immunité. Il définit ces concepts et décrit les mécanismes de tolérance centrale et périphérique, notamment la sélection positive et négative dans le thymus ainsi que l'anergie, l'apoptose et l'ignorance en périphérie.

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Cours IV Tolérance Immunitaire Et Auto Immunité

Ce document traite de la tolérance immunitaire et de l'auto-immunité. Il définit ces concepts et décrit les mécanismes de tolérance centrale et périphérique, notamment la sélection positive et négative dans le thymus ainsi que l'anergie, l'apoptose et l'ignorance en périphérie.

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Mme Bedjou Fatiha

Université de Bejaia
Faculté des Sciences de la Nature et de la Vie

TOLERANCE IMMUNITAIRE ET AUTO IMMUNITE

Normalement le système immunitaire ne réagit pas contre les propres constituants de


l’organisme. Il existe cependant des circonstances où la sollicitation anormale du système
immunitaire, ou un dérèglement primitif des organes lymphoïdes (par hypo ou
hyperfonctionnement) peuvent avoir de graves conséquences cliniques.

L’auto immunité compte parmi ces conséquences. Elle est définie par l’immunisation d’un
individu contre ses propres antigènes.

Tous les individus possèdent des auto antigènes présents en permanence sur les différentes
cellules de l’organisme, des lymphocytes T auto réactifs et des auto anticorps qui
reconnaissent les auto antigènes, or la plupart des individus ne développent pas de maladies
auto immunes.

Pour qu’une maladie auto immune se déclenche il faut une rupture de la tolérance
immunitaire qui peut être due à une prédisposition génétique ou à des facteurs extérieurs.

Les maladies auto immunes intéressent les immunologistes mais leur physiopathologie reste
mal connue. La compréhension des phénomènes d’auto immunité est un enjeu majeur dans
ces maladies.

Définition du concept d’auto immunité :

La tolérance est la capacité du système immunitaire (SI) à ne pas s’activer vis-à-vis des
antigènes du soi (auto antigènes). Ceci est fondamental pour éviter les réactions d’auto
immunité.

Ces réactions d’auto immunité peuvent, néanmoins survenir dans certains cas, on dit qu’il y’a
rupture des mécanismes de tolérance, ce qui conduit à l’activation pathologique du système
immunitaire vis-à-vis des auto antigènes et à l’apparition des maladies auto immunes (MAI),
se traduisant par des destructions tissulaires.

Le type de MAI dépend de la nature de l’auto antigène ou des auto antigènes reconnus par le
SI :

Spécifique d’organe (ex : le diabète de type I, insulinodépendant, lié à une destruction des
cellules béta pancréatiques productrices d’insuline)

Systémique (ex : le lupus érythémateux disséminé où l’on a une reconnaissance de la


chromatine et une maladie diffuse)

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I) Mécanismes de tolérance :

Il y a plusieurs points de contrôle indépendants et successifs (checkpoints). Nous allons


distinguer les mécanismes de

Tolérance centrale (dans le thymus pour les lymphocytes T (LT) ou la moelle osseuse pour les
lymphocytes B (LB))

Tolérance périphérique (dans la circulation générale ou les organes lymphoïdes secondaires)

1) Tolérance centrale :

Le thymus est l’organe de maturation des lymphocytes T. Il joue un rôle fondamental dans
l’induction de la tolérance au soi en permettant la destruction intra thymique des lymphocytes
T auto réactifs (sélection négative) et la maturation des lymphocytes T régulateurs et des
lymphocytes effecteurs responsables de l’élimination du non soi (sélection positive). Des
anomalies de la sélection thymique de ces deux types de lymphocytes sont responsables de la
survenue de MAI.

a) Sélection positive des lymphocytes T effecteurs :

La sélection positive repose sur l’interaction du TCR (T Cell Receptor) avec le CMH des
cellules épithéliales du cortex thymique. Seuls les thymocytes dont le TCR reconnaissant les
molécules du CMH du soi reçoivent un signal de survie et poursuivent leur maturation. Cette
première étape se déroule dans la zone corticale du thymus, où le précurseur va devenir une
cellule double positive (CD4+, CD8+), puis simple positive (CD4+ ou CD8+). Ces cellules
simple positive sont capables de reconnaitre un peptide présenté par des molécules
d’histocompatibilité du soi, exprimées sur les cellules stromales du thymus.

b) Sélection négative des lymphocytes T auto réactifs :

Les cellules ayant commencé leur maturation dans la zone corticale vont gagner, par la
suite la zone médullaire puis y poursuivre leur maturation. Au cours de cette étape on aura
élimination des cellules auto réactives qui vont mourir par apoptose. La sélection négative
permet d’éliminer les cellules T présentant une très forte affinité pour les antigènes du soi.
Elle repose sur l’interaction du TCR avec le complexe CMH-peptide (du soi), présenté par les
CPA de la zone médullaire du thymus. Il s’agit du principal mécanisme de tolérance centrale.

Cette tolérance centrale nécessite l’expression thymique des antigènes du soi (les antigènes
d’expression ubiquitaire et les antigènes spécifiques d’organes) ou l’entrée de ces antigènes
par le sang ou la lymphe. La majorité des auto antigènes sont exprimés dans le thymus. Ceux
qui y sont présents à concentration élevée, induisant ainsi une sélection négative, sont : les
antigènes appartenant aux protéines plasmatiques, aux protéines cellulaires courantes
ubiquitaires, aux protéines spécifiques de tissus.

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On peut se demander comment des protéines qui ne s’expriment que dans un organe
spécifique en périphérie vont pouvoir être vues dans le thymus. C’est grâce à une protéine qui
s’appelle AIRE (Auto Immune Regulator), qui est un facteur de transcription exprimé dans le
thymus, particulièrement dans les cellules stromales épithéliales de la médullaire thymique
(où se fait la sélection négative). Ce facteur contrôle l’expression d’antigènes qui
normalement sont fortement exprimés dans certains organes. Le gène AIRE codant pour la
protéine AIRE est localisé sur le chromosome 21q22.

Ce mécanisme majeur de tolérance centrale évite, en principe, le passage de LT auto réactifs


en périphérie, mais ce mécanisme ne marche pas parfaitement, en effet certains lymphocytes
T auto réactifs se retrouvent en périphérie où d’autres mécanismes les empêchent d’être
fonctionnels.

Le gène Foxp3 est localisé sur le chromosome X et code pour un facteur de transcription qui a
un rôle dans l’orientation et le développement thymique des lymphocytes T régulateurs
(Treg). Ce rôle a été mis en évidence par l’étude d’un modèle de souris dites Scurfy souffrant
de pathologies auto immunes.

Chez l’homme et la souris seuls les lymphocytes Treg CD4+, CD25+ expriment Foxp3 aussi
bien dans le thymus que dans le sang périphérique. L’expression de Foxp3 constitue donc un
marqueur spécifique de ces cellules.

c) Tolérance centrale des lymphocytes B :

La tolérance centrale des lymphocytes B se fait dans la moelle osseuse et on peut donc avoir,
comme pour les LT, une étape de sélection négative où les LB portant un BCR (B Cell
Receptor) spécifique d’un auto antigène, pour lequel ils ont une très bonne affinité, vont être
éliminés. Il existe également une étape qu’on appelle « le receptor editing » : des
recombinaisons génétiques vont modifier le BCR et le conduire à changer de spécificité si, au
départ le récepteur était spécifique d’un auto antigène.

2) Tolérance périphérique :

-Tolérance périphérique des LT :

Des LT auto réactifs spécifiques de certains antigènes du soi sont présents en permanence
chez tous les individus sains. L’absence d’auto immunité chez ces individus est due à
l’existence d’un système de tolérance périphérique qui inclue différents mécanismes, nous
allons citer les quatre plus importants.

a) L’anergie

Au niveau cellulaire le terme anergie définit l’inaptitude d’une cellule immunitaire à induire
une réponse contre sa cible. L’anergie peut être un obstacle pour une réponse immunitaire
contre un antigène étranger. Néanmoins, quand il s’agit d’un auto antigène, ce mécanisme
permet d’éviter des réactions auto immunes.

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L’anergie est due à l’absence de présentation d’un auto antigène car lorsqu’un LT auto réactif
rencontre une CPA présentant un auto peptide en même temps qu’une molécule de CMH, il
ne sera pas activé du fait que la CPA n’exprime pas de molécules de co stimulation, il s’agit
en effet de CPA immatures.

En cas de présentation de l’auto antigène par les CPA aux LT auto réactifs, ces derniers
peuvent devenir anergiques suite à l’interaction avec des molécules de co stimulation
inhibitrices exprimées par la cellule Treg, telles que PDL-1/2 ou CTLA-4.

b) L’apoptose :

Après disparition du stimulus antigénique (lors d’une réponse contre un antigène étranger) les
lymphocytes T meurent le plus souvent par apoptose, par un mécanisme impliquant la liaison
du récepteur de mort Fas à son ligand Fas-L. Ces deux molécules sont co exprimées par les
lymphocytes T qui meurent alors par un mécanisme de suicide cellulaire. Ce mécanisme de
suicide qui suit une réponse immunitaire évite l’emballement du système immunitaire c'est-à-
dire la prolifération continue des lymphocytes T pouvant aboutir à la formation de LT auto
réactifs suite à des mutations au niveau du TCR. En cas de mutations de Fas ou de Fas-L les
LT ne peuvent plus se suicider et continuent à proliférer, induisant une MAI.

c) L’ignorance :

Ce mécanisme concerne des LT spécifiques d’auto antigènes qui ne peuvent pas être vus en
périphérie puisqu’en situation normale ils ne sont pas accessibles aux LT. Ces LT, en
périphérie, sont dans la circulation ou les organes lymphoïdes et ne vont jamais rencontrer les
antigènes soit :

Parce que ces antigènes sont exprimés dans des sites immunitaires privilégiés qui ne sont pas
accessibles à la circulation périphérique (ex : la chambre antérieure de l’œil, le cerveau, les
testicules, le placenta).

Parce que l’antigène est présent en concentration trop faible, insuffisante pour activer les LT
auto réactifs (ex : certains antigènes du myocarde).

Parce qu’il s’agit d’épitopes situés dans les replis des molécules protéiques (épitopes
cryptiques).

d) Les lymphocytes T régulateurs :

Les LT reg appartiennent plus au pool de LTCD4+ que des LTCD8+. Ils représentent environ
3% des LT CD8+ et 10% des LT CD4+. L’activité régulatrice de beaucoup de LT reg
s’exerce de manière paracrine en freinant, via la sécrétion de diverses cytokines, ou par
contact direct, les capacités de présentation de l’antigène de cellules professionnelles (CPA
conventionnelles). D’autres Treg ont pour cible les LT auto réactifs eux-mêmes. Cette
dernière variété de Treg exerce une activité cytotoxique vis-à-vis des LT auto réactifs.

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Cellule T régulatrice

Sécrétion de cytokines (Tel que IL10, TGFβ), et/ou contact cellule-cellule

CPA Cellule T auto réactive

-Diminution de l’expression de CMH -Diminution de la sécrétion de cytokines


-Augmentation de la sécrétion d’IL10 -Augmentation de l’expression du TGFβ R
-Diminution de la sécrétion de cytokines -Diminution de la prolifération
Proinflammatoires -Induction de l’anergie ou de l’apoptose
- Conversion en un phénotype régulateur

Mécanismes potentiels de l’action des cellules T régulatrices

L’activité suppressive des Treg passe essentiellement par un mécanisme de contact cellulaire,
qui fait intervenir CTLA-4, mais aussi par la sécrétion de cytokines inhibitrices telles que
TGFβ, et IL10. Ces Treg pourraient inhiber la surexpression par les CPA de molécules de co
stimulation nécessaires à l’activation des T effecteurs auto réactifs. La forte affinité de leur
TCR et l’expression de nombreuses molécules accessoires d’adhésion et de co stimulation
(CD25, CD54, CTLA-4) leur permet d’être activés en présence d’une concentration
d’antigène plus faible que celle stimulant les T effecteurs.

- Tolérance périphérique des LB :

Les mécanismes de tolérance périphériques des LB impliquent également des phénomènes


d’anergie dans lesquels les LB auto réactifs ne vont pas s’activer s’il n y a pas de LT voisins
pour les activer car ces derniers sont inhibés par les Treg.

II) Perturbation des fonctions thymiques et auto immunité : rupture de la tolérance


centrale

1) Physiopathologies impliquant le gène Foxp3 et AIRE :

La présence de cellules inhibant la réponse immunitaire est connue depuis plusieurs


décennies. Initialement appelées T suppresseurs, ils sont actuellement nommés LT
régulateurs. Les premières démonstrations de l’existence de ces cellules reposent sur les
expériences de thymectomie néonatale, qui réalisée à 48h ou 72h après la naissance, entraine
la disparition des cellules suppressives favorisant l’apparition de MAI. L’injection de cellules
suppressives à des souris thymectomisées, 48h après leur naissance, évite l’installation des
MAI. Les LT régulateurs sont caractérisés par un facteur de transcription qui s’appelle Foxp3.
Leur rôle est mis en évidence par une maladie génétique rare liée à une mutation de ce
facteur. Les LTreg dont le Foxp3 est muté ne sont plus capables d’exprimer leur fonction
immuno-régulatrice. Ceci conduit à un syndrome auto immun qu’on appelle le syndrome
IPEX (Immune dysregulation polyendocrinopathy enteropathy X linked syndrome).

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La protéine AIRE est impliquée dans la sélection négative des LT auto réactifs. Chez des
souris déficientes en gène AIRE les lymphocytes T auto réactifs échappent à la sélection
négative ce qui engendre des MAI.

L’implication de la protéine AIRE dans la production de lymphocytes T régulateurs CD4+,


CD25+ a également été évoquée puisque le déficit en AIRE et en lymphocytes T régulateurs
provoquent des manifestations auto immunes proches.

Des mutations de ce gène AIRE peuvent le rendre non fonctionnel et ainsi empêcher
l’expression thymique des antigènes périphériques. Ceci va entrainer un défaut de sélection
négative des lymphocytes T auto réactifs spécifiques de ces antigènes et par conséquent des
MAI.

2) Autres causes de défaut de sélection négative :

Les causes d’échappement des thymocytes auto réactifs à la sélection négative peuvent être de
plusieurs natures. Elles ont été particulièrement explorées dans le cadre du diabète et de la
sclérose en plaque.

a) Faible niveau d’expression de l’auto antigène :

Il est totalement admis que, chez l’homme la majorité des auto antigènes y compris des
antigènes spécifiques d’organes sont exprimés dans le thymus. L’expression diminuée de ces
antigènes prédispose au développement de l’auto immunité par altération de la sélection
négative, favorisant le passage des lymphocytes auto réactifs en périphérie. On observe ainsi
des corrélations entre le niveau d’expression des auto antigènes dans le thymus et la
susceptibilité aux pathologies auto immunes.

b) Défaut de présentation de l’auto antigène :

Ce défaut de présentation peut être du à la faible affinité du TCR pour les complexes CMH-
peptide, lors de la sélection négative qui fait intervenir une interaction entre LT auto réactif et
CPA. La liaison faible du CMH avec le peptide induit un complexe instable et très faiblement
exprimé à la surface de la CPA ce qui empêche l’élimination des LT auto réactifs.

Ce défaut de présentation de l’auto antigène peut être du à un défaut d’apprêtement de cet


auto antigène, étape indispensable pour une présentation efficace, puisque l’apprêtement
permet de scinder l’antigène en plusieurs peptides qui seront présentés accompagnés d’une
molécule de CMH au LT.

c) Défaut d’apoptose des LT auto réactifs :

L’apoptose des LT auto réactifs est à la base de la sélection négative. Une anomalie dans cette
sélection peut être associée à un défaut de facteurs apoptotiques. TRAIL (Tumor necrosis
factor Related Apoptosis Inducing Ligand) est une cytokine appartenant à la famille des TNF
(Tumor Necrosis Factor) mais qui, contrairement à FASL et au TNF, n’induit l’apoptose que
dans les thymocytes, les cellules neurales et les hépatocytes. TRAIL intervient dans la

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sélection négative thymique. Une étude à montré que les souris déficientes en TRAIL ont une
susceptibilité accrue aux MAI.

III) Mécanismes hypothétiques de déclenchement de l’auto-immunité : Rupture de la


tolérance périphérique
Dès 1897, Paul Ehrlich postulait que toute anomalie dans les mécanismes de tolérance
immunitaire pouvait altérer la reconnaissance du soi et du non soi et déclencher l'apparition
d'une réaction immunitaire contre un ou plusieurs des constituants de l'organisme, entraînant
son auto-destruction. Il venait de définir la pathologie auto-immune (concept d’ « horror
autotoxicus »). L'approche fondamentale des mécanismes intervenant dans l'auto-immunité a
été largement facilitée par l’utilisation et la mise au point de modèles expérimentaux animaux.
Si les mécanismes immunologiques mis en jeu au cours de l'auto-immunité sont aujourd'hui
mieux connus, les causes du déclenchement de la réaction auto-immune demeurent en
revanche énigmatiques.
1) Activation des cellules auto-réactives ignorantes
a) Auto-antigènes séquestrés :
Un certain nombre d’antigènes sont ignorés du système immunitaire car leur localisation
anatomique ne les met pas en contact avec des cellules immuno-compétentes (ignorance
immunitaire) ; c’est le cas, par exemple, des antigènes du cristallin et des spermatozoïdes.
Leur passage dans le sang au cours d’un traumatisme peut être à l’origine de l’activation de
lymphocytes B et T. Ainsi, un traumatisme à l’un des deux yeux conduit à la libération de
protéines antigéniques intra-oculaires. Les antigènes libérés diffusent par voie lymphatique
jusqu’au ganglion afférent et sont pris en charge par les cellules présentatrices d’antigènes qui
activent les lymphocytes T spécifiques d’antigènes oculaires. Les propriétés migratoires des
lymphocytes T activés leur confèrent la capacité de migrer vers l’œil malade mais aussi vers
l’œil sain et d’induire une ophtalmie sympathique.
b) Antigènes cryptiques :
Normalement, seuls quelques fragments peptidiques issus de l’apprêtement d’un antigène sont
présentés par les molécules de CMH. Les cellules lymphoïdes ne sont tolérantes qu’à ces
épitopes présentés par les molécules de CMH. D’autres épitopes, appelés épitopes cryptiques,
sont ignorés du système immunitaire, non en raison de leur localisation histologique ou
anatomique, mais à cause de leur localisation au sein de la molécule antigénique. Ces épitopes
présents au sein des auto-antigènes, mais vis-à-vis desquels les cellules lymphoïdes n’ont pas
acquis de tolérance, peuvent susciter une réaction auto-immune si, à l’occasion d’une réaction
inflammatoire, ils se trouvent présentés par les molécules du CMH. C’est le cas, par exemple,

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de certains peptides cryptiques de la protéine basique de la myéline dans la sclérose en
plaques.
2) Activation des cellules auto-réactives anergiques
a) Le mimétisme moléculaire
La théorie du mimétisme moléculaire repose sur le fait que certains antigènes, d’un agent
infectieux viral ou bactérien, peuvent partager des épitopes communs avec des antigènes du
soi. Ainsi, certaines infections virales sont parfois associées au déclenchement ou à
l’exacerbation de maladies auto-immunes. Il est vraisemblable que, dans ces cas, l'agent
infectieux présente simultanément des épitopes identiques à ceux d’auto-antigènes de
l'organisme infecté, et des épitopes qui lui sont propres. Ces derniers entraînent une réponse
immunitaire vigoureuse car les lymphocytes T spécifiques d’antigènes du microorganisme ne
sont pas tolérants. La réponse immunitaire qui se développe favorise la présentation des
déterminants auto-antigéniques dans un contexte propice à la levée de l’anergie des
lymphocytes T auto-réactifs (expression de molécules de co-stimulation par la cellule
présentatrice d’antigène, production de cytokines par les lymphocytes T auxiliaires
spécifiques d’épitopes xénogéniques). Parmi les exemples de mimétisme moléculaire, on peut
citer l’auto-antigène GAD impliqué dans le diabète auto-immun qui partage un épitope
commun avec le virus Coxsackie ou les classiques cardiopathies (valvulopathies) faisant suite
aux angines streptococciques.
b) Activation des cellules présentatrices d’antigènes :
Certaines maladies auto-immunes peuvent être induites expérimentalement en immunisant un
animal par l’auto-antigène émulsionné en adjuvant complet de Freund. Cet adjuvant favorise
la présentation de l’auto-antigène en augmentant sa phagocytose par les cellules présentatrices
d’antigènes. La présence, au sein de l’adjuvant, de mycobactéries tuées stimule les récepteurs
Toll-like favorisant l’activation des cellules présentatrices d’antigènes et leur maturation. Ces
dernières produisent alors des cytokines proinflammatoires et des niveaux élevés de
molécules de co-stimulation. Ce phénomène conduit à la levée de l’anergie des lymphocytes
T spécifiques de l’auto-antigène et à l’apparition des stigmates cliniques d’auto-immunité. En
pathologie humaine, l’interféron (IFN), utilisé notamment dans le traitement de l’hépatite C,
peut favoriser l’activation des cellules dendritiques et in fine des lymphocytes T auto-réactifs
induisant l’émergence de maladies auto-immunes, en particulier de thyroïdite (2 à 10% des
patients traités avec de l’IFN).
c) Rôle d’une stimulation polyclonale non spécifique :

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Si, dans les deux mécanismes précédents, la levée de l’anergie est liée au renforcement des
capacités de présentation des auto-antigènes aboutissant à l’activation des lymphocytes auto-
réactifs, on peut aussi induire expérimentalement l’apparition d’autoanticorps, et même de
manifestations cliniques d’auto-immunité, par une stimulation polyclonale non spécifique des
lymphocytes B. Cette activation polyclonale peut, si elle est suffisante, conduire à la levée de
l’anergie de cellules potentiellement auto-réactives.
d) Défaut de délétion des cellules auto-réactives :
Plusieurs études ont montré que le couple Fas/FasL est impliqué dans la délétion périphérique
des clones T auto-réactifs et dans la délétion des lymphocytes T activés par un antigène
exogène. Les mutations des gènes Fas et FasL des souris MRL lpr et glp sont associées à un
phénotype auto-immun ave
c levée de l’anergie des lymphocytes B autoimmuns qui se caractérise par un syndrome de
type lupique.
e) Défaut des cellules régulatrices :
Des déficits dans le nombre ou dans les fonctions des lymphocytes régulateurs ont été prouvés
au cours de maladies auto-immunes. L’élimination de lymphocytes T régulateurs CD4+,
CD25+, FoxP3+, ou la thymectomie trois jours après la naissance (empêchant leur
développement) entraîne chez les animaux le développement de nombreuses manifestations
auto-immunes : diabète insulino-dépendant, thyroïdite, gastrite. Chez ces animaux, l’injection
de cellules régulatrices CD4+, CD25+, FoxP3+ inhibe la réaction auto-immune. L’existence
de déficits en lymphocytes B régulateurs a aussi été démontrée.
IV) Les mécanismes lésionnels des effecteurs auto-immuns
1) Les auto-anticorps : des facteurs lésionnels majeurs
Dans un certain nombre de maladies auto-immunes (mais pas toutes car l’auto-anticorps peut
être seulement un marqueur), l’effet lésionnel des auto-anticorps sur le tissu cible est
prépondérant. Le caractère pathogène des auto-anticorps est prouvé par la capacité de
transférer la maladie, chez l’animal par le sérum des porteurs de maladies auto-immunes, ou
dans l’espèce humaine de la mère au foetus par le transfert trans placentaire des autoanticorps
IgG de la mère. Ainsi, la myasthénie, l’hyperthyroïdie, le pemphigus (Le pemphigus
vulgaire est une maladie auto-immune rare, potentiellement mortelle, caractérisée par
des bulles intraépidermiques et des érosions étendues sur une peau et des muqueuses
apparemment saines) peuvent-ils être induits chez la souris par le transfert d’IgG isolées à
partir du sérum de malades. Il existe quatre principaux mécanismes par lesquels les auto-
anticorps induisent des lésions cellulaires ou tissulaires.

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a) Induction d’une cytolyse de la cellule cible :
Cette cytolyse peut être réalisée par l’activation du complément. Au cours des anémies
hémolytiques les anticorps anti-Ig fixés à la surface des érythrocytes activent la voie classique
du complément ce qui aboutit à la formation du complexe d’attaque membranaire qui forme
des pores dans la membrane du globule rouge et induit la lyse cellulaire. La cytolyse peut
aussi faire intervenir des cellules monocytaires/macrophagiques. Ces dernières peuvent fixer
par leurs récepteurs du fragment Fc des IgG (Fc R) les cellules cibles recouvertes des auto-
anticorps spécifiques d’un antigène qu’elles expriment, les phagocyter et enfin les détruire. La
phagocytose des plaquettes par les macrophages au cours des thrombopénies auto-immunes
illustre ce mécanisme. Enfin, le mécanisme de cytotoxicité cellulaire dépendante des anticorps
(ADCC) peut aussi être mis en jeu. Cette cytotoxicité est exercée par des cellules
mononucléées en particulier les cellules NK (‘‘natural killer’’). Elles s’activent via
l’interaction entre leurs Fc R et les autoanticorps recouvrant les cellules-cibles et libèrent des
granules lysosomiaux, contenant de la perforine et des granzymes (sérines-estérases), qui
induisent la mort de la cellule cible. Ce mécanisme interviendrait dans la destruction des
cardiocytes au cours des myocardites.
b) Modification de la fonctionnalité de l'antigène cible.
Certains auto- anticorps ont la capacité de se lier à des récepteurs membranaires et d’en
modifier l’expression ou les fonctions biologiques. Dans la myasthénie, les anticorps dirigés
contre le récepteur à l’acétylcholine en fournissent l’illustration. Des cultures de lignées de
cellules musculaires exprimant le récepteur à l’acétylcholine réalisées en présence de sérum
de malades atteints de myasthénie ont montré que le pontage des récepteurs par les
autoanticorps s’accompagne de leur internalisation et d’une augmentation de leur dégradation.
Un second mode d’action de ces auto-anticorps pourrait être le blocage par encombrement
stérique de la liaison de l’acétylcholine à son récepteur. Ces modifications entraînent le défaut
de transmission du signal synaptique qui caractérise la maladie.
Au contraire, dans la maladie de Basedow, les auto-anticorps anti-récepteurs de la TSH
(Thyroid Stimulating Hormone) sont capables d’activer ces récepteurs et ainsi d’induire une
hyperthyroïdie avec sécrétion accrue d’hormones thyroïdiennes.
D’autres auto-anticorps sont dirigés contre des antigènes solubles dont les fonctions sont
alors perturbées : c’est le cas des anticorps anti-facteur intrinsèque ou anti-insuline.
c) Formation de complexes immuns.
Les complexes antigène-anticorps peuvent se former dans la circulation puis se déposer au
niveau des tissus (rôle de l’endothélium vasculaire avec des zones filtres critiques comme les

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glomérules ou le plexus choroïde). Parfois, l’antigène se dépose en premier lieu sur les tissus
avant d’être reconnu par les auto-anticorps circulants. Ces mécanismes de formation de dépôt
de complexes immuns in situ conduisent à l’activation du complément, à la libération des
anaphylatoxines C3a et C5a capables de recruter et d’activer les polynucléaires neutrophiles
qui participent aux lésions inflammatoires. Les glomérulonéphrites observées au cours du
lupus érythémateux systémique en constituent un bon modèle. Les auto-anticorps se fixent à
leurs cibles, notamment l’ADN libre et les constituants du nucléosome, insérés dans la
membrane basale des glomérules. L’altération de la membrane basale glomérulaire est due à
plusieurs mécanismes. Un mécanisme direct implique le dépôt et l’accumulation de
complexes immuns. Les anticorps et le complément modifient les propriétés électrostatiques
de la membrane basale, avec pour conséquence la fuite de protéines du sérum dans les urines
et la perte du pouvoir filtrant des glomérules. Un mécanisme indirect met en jeu le
recrutement de polynucléaires neutrophiles qui secrètent des enzymes digérant la membrane
basale.
2) Les effecteurs lymphocytaires T
Le diabète de type 1 et la sclérose en plaques représentent deux prototypes de maladies auto-
immunes provoquées par des lymphocytes T. Les modèles de diabète de type 1 spontané
(chez la souris NOD ou chez les rats BB) ont démontré que la destruction des cellules β,
caractéristique de la maladie humaine, est dépendante et assurée par les lymphocytes T, les
cellules T CD4+ et CD8+ étant toutes deux nécessaires. Le diabète de type 1 est caractérisé
chez l’homme par l’infiltration cellulaire des îlots pancréatiques (insulite). Le rôle
prépondérant des effecteurs T dans le développement de la maladie est démontré par son
transfert adoptif à l’aide de lymphocytes T. Des lymphocytes T purifiés à partir de la rate de
souris diabétiques peuvent en effet transférer le diabète à des souris receveuses syngéniques
non atteintes dépourvues de lymphocytes B et T, les souris NODSCID. L’induction du diabète
chez l’animal receveur n’est possible que si les deux populations T CD4+ et CD8+ sont
transférées et ne nécessite pas la présence de lymphocytes B, ni du donneur, ni du receveur.
Un mécanisme lésionnel provoqué par des lymphocytes T est également impliqué dans le
développement de la sclérose en plaques chez l’homme, et dans l’encéphalomyélite
autoimmune expérimentale qui reproduit cette maladie auto-immune chez la souris. Cette
affection peut également être induite passivement par le transfert de lymphocytes T CD4+
auto-réactifs à des animaux syngéniques.
Il est toutefois essentiel de rappeler que ces maladies s’accompagnent aussi de la production
d’auto-anticorps, par exemple d’anticorps anti-insuline ou anti-îlots de Langerhans au cours

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du diabète, anticorps anti-MOG au cours de la sclérose en plaques qui constituent de bons
marqueurs d’une réponse auto-immune spécifique et peuvent être utiles au diagnostic.
3) Composante inflammatoire des maladies auto-immunes
L’inflammation est une réponse des tissus vivants, vascularisés, à une agression. Elle
accompagne pratiquement toujours le processus auto-immun. C’est un phénomène dynamique
qui évolue sur un mode chronique au cours des maladies auto-immunes sans tendance à la
guérison spontanée. La première phase de l’inflammation, la phase aiguë vasculo-exsudative,
passe souvent inaperçue car elle est brève ou asymptomatique. Dans d’autres cas, elle se
traduit cliniquement par les quatre signes cliniques cardinaux de l’inflammation (douleur,
tumeur, rougeur, chaleur). C’est par exemple le cas des poussées actives de synovite au cours
de la polyarthrite rhumatoïde. A côté de la congestion active et de l’oedème inflammatoire, la
diapédèse leucocytaire est un phénomène majeur de cette phase puisqu’elle permet
l’accumulation des cellules immunitaires dans le ou les foyers lésionnels. Dans la plupart des
maladies auto-immunes, ces cellules s’organisent ensuite en un granulome inflammatoire avec
une prédominance de lymphocytes et de plasmocytes.
Ceci s’observe notamment dans les thyroïdites, les hépatites auto-immunes ou encore la
maladie coeliaque. Des tentatives de réparation tissulaire peuvent avoir lieu, souvent peu
efficaces et s’accompagnant de fibrose. De nombreux médiateurs chimiques interviennent à
tous les stades de l’inflammation: amines vaso-actives, monoxyde d’azote, médiateurs
lipidiques, protéases plasmatiques, protéines du système du complément, notamment C3a et
C5a, facteurs de croissance et cytokines. Les cytokines ont un intérêt particulier dans les
maladies auto-immunes car elles constituent depuis quelques années des cibles thérapeutiques
de première importance. Ainsi, le traitement de la polyarthrite rhumatoïde a été transformé par
l’introduction des molécules anti-TNF alpha.
Les explorations biologiques à effectuer dans le cadre du diagnostic des maladies
autoimmunes vont comprendre des explorations qui ne sont pas spécifiques de l’auto-
immunité mais vont apporter des données pouvant faire évoquer une anomalie auto-immune
et les explorations qui vont cibler plus spécifiquement la réaction immunitaire.

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