Les jardins: Les Dossiers d'Universalis
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À propos de ce livre électronique
Ce dossier emprunte à l’Encyclopaedia Universalis 22 articles consacrés aux multiples aspects (techniques, botaniques, esthétiques, sociaux) de cette activité millénaire et à quelques-uns de ceux qui, tels André Le Nôtre, Roberto Burle Marx ou Pascal Cribier, ont modelé et fait évoluer notre représentation de cette « utopie concrète » qu’est l’art des jardins.
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Avis sur Les jardins
1 notation1 avis
- Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Apr 10, 2023 Une belle découverte qui relate l'histoire du jardin. Une vue d'ensemble qui donne le goût d'approfondir ses connaissances pour chacune des époques.
Aperçu du livre
Les jardins - Encyclopaedia Universalis
Universalis, une gamme complète de resssources numériques pour la recherche documentaire et l’enseignement.
ISBN : 9782341002691
© Encyclopædia Universalis France, 2019. Tous droits réservés.
Photo de couverture : © Kaspars Grinvalds/Shutterstock
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JARDINS
« Le jardin est l’une de ces formes qui transitent à travers l’histoire car il est, littéralement, une inscription, aussi précise qu’un dessin magique, que trace le travail du sol à la surface du globe terrestre, héritant de toute la tradition des corps à corps avec la terre rebelle pour l’amadouer, la féconder, l’asservir peut-être. Chaque jardin implanté et cultivé décrit les limites d’un territoire défini, d’un domaine réservé et clos dans lequel, et par lequel, l’esprit a réussi à comprendre et à dominer les lois de l’univers ». Cette définition de la paysagiste Isabelle Auricoste rappelle la portée anthropologique universelle du jardin, qui sublime les savoir-faire d’origine agricole pour modeler la matière même du monde.
L’engouement pour les jardins ne relève pas d’une mode passagère. Il a succédé, en France comme dans d’autres pays, à un long temps d’éclipse entre l’après-guerre et les années 1970. Ce renouveau d’intérêt résulte aussi bien du rejet d’un urbanisme déshumanisé, de l’affirmation de la conscience écologique ou encore de l’avènement de la civilisation des loisirs. À cette demande sociale croissante de « vert patrimoine » (Françoise Dubost), les responsables publics ont commencé à répondre en ébauchant des politiques en faveur de l’environnement, de la qualité du cadre de vie et, depuis les années 1980, du paysage. La volonté de sauvegarder des espaces menacés a par ailleurs permis de saisir la nécessité de mieux connaître et faire reconnaître les jardins. Ce processus s’est symboliquement cristallisé dans l’élaboration de la Charte de Florence, rédigée en 1981 par un groupe d’experts de l’Icomos (Conseil international des monuments et des sites), qui définit les principes d’intervention spécifiques à de tels « monuments vivants ».
Ce mouvement s’est accompagné d’un foisonnement d’initiatives en matière de recherche, notamment issues de certaines institutions telles que la Dumbarton Oaks Research Library and Collection à Washington, à l’origine d’une série de rencontres depuis 1971, ou l’Archivio Italiano dell’Arte dei Giardini, fondé en 1972 à San Quirico d’Orcia en Toscane. La prolifération des colloques comme la multiplication des revues scientifiques ont encouragé l’émergence d’un champ d’étude nouveau. Un corpus s’est donc peu à peu constitué, dont on ne soupçonnait pas l’étendue et la richesse. Dans les années 1980 par exemple, les lieux à partir desquels s’élaborait l’historiographie des jardins ne se comptaient en France que par dizaines dans chaque département. Lancée en 1982, l’opération de pré-inventaire des jardins « d’intérêt historique, botanique et paysager » a permis de repérer, à la date de 2002, plus de dix mille parcs et jardins sur l’ensemble du territoire, dont la moitié sont considérés comme particulièrement remarquables. En Grande-Bretagne, les études ont révélé une densité similaire à l’échelle des comtés.
L’accumulation de cette masse d’informations a eu pour corollaire une perception de plus en plus aiguë du caractère protéiforme des jardins en tant qu’objets d’analyse. À une approche traditionnellement dépendante d’une histoire de l’art à dominante stylistique est venue se substituer un faisceau d’approches pluridisciplinaires, tentant de rendre compte du jardin dans toute son épaisseur culturelle et sociétale, sans perdre de vue la réalité concrète du terrain, d’appréhender en somme la complexité non pas simplement horticole, mais « hortésienne », pour forger un adjectif qualifiant le jardin dans sa dimension artistique. La Fontaine invite à ce néologisme, lui qui inventa à propos de Vaux-le-Vicomte une muse moderne du jardinage, la fée Hortésie, en lui accordant la même dignité qu’à ses compagnes, la peinture, la poésie et l’architecture. Ainsi, depuis la modestie du geste quotidien du jardinier jusqu’aux aspirations métaphysiques les plus élevées, la Gartenkultur, concept formulé par les spécialistes germanophones, renvoie par ses multiples enjeux à des grilles fertiles de déchiffrement du monde.
Hervé BRUNON
JARDINS DE L’ANTIQUITÉ AUX LUMIÈRES
Introduction
Étymologiquement, un jardin est un enclos, un endroit réservé par l’homme, où la nature (les plantes, les eaux, les animaux) est disposée de façon à servir au plaisir de l’homme. La nature dans sa totalité, et non, au moins en droit, une partie d’elle-même : le jardin a l’ambition d’être une image du monde ; il fait servir à ses fins la lumière du ciel, la fraîcheur de l’eau, la fécondité de la terre, les végétaux et les hôtes des forêts et des campagnes. Il est une mise en ordre du monde. Un jardin commence dès l’instant où une volonté humaine impose une fin immédiatement sensible aux « objets naturels », c’est-à-dire à ce qui naît, croît et meurt selon les lois de la nature. Une statue emprunte à celle-ci sa matière et sa forme (le marbre ou le bois, et aussi le modèle qu’elle représente, animal, homme ou plante), elle n’en possède pas la vie. La matière du jardin, au contraire, est libre, et sa spontanéité échappe aux lois de l’homme.
Pour cette raison, l’on peut dire que le jardin est une création opérée par l’homme à sa mesure. Il n’existe pas de jardin spontané. Et cela entraîne une sorte de contradiction entre une matière libre et des formes asservies. L’art des jardins sera une conciliation entre ces deux termes, et ses styles seront le résultat des solutions diverses apportées à cette conciliation. Tantôt la matière l’emportera sur la discipline formelle – on approchera alors du paysage spontané, sans l’atteindre jamais –, tantôt la discipline limitera étroitement les forces naturelles, le jardin tendra vers la stabilité quasi minérale de l’architecture, et l’on aura le paysage immobile des ifs taillés, des charmilles, des bassins géométriques.
Ces deux pôles de l’art des jardins, qui sont illustrés par l’opposition entre deux styles – le jardin dit (assez improprement) « à la française » et le jardin dit (non moins improprement) « à l’anglaise » –, se rencontrent, à peu de distance l’un de l’autre, à Versailles, de part et d’autre du Grand Canal, du Tapis vert aux Trianons. Ces deux styles partagent à peu près toute l’histoire des jardins, depuis ses origines les plus lointaines jusqu’à la révolution industrielle.
1. L’art des jardins avant Rome
L’existence des jardins suppose celle d’une agriculture déjà maîtresse de ses techniques, des hommes capables d’imposer à la nature une fécondité qui ne lui est pas toujours donnée. Il semble que le « jardin » soit né en Mésopotamie, plus de trois mille ans avant notre ère, lorsque l’acclimatation du palmier permit de ménager des zones de végétation. Là, il devenait possible de limiter l’évaporation, de maintenir une humidité à peu près constante, et, par conséquent, d’assurer la survie de plantes fragiles. Conformément à l’un des paradoxes constants de l’activité humaine, ces conquêtes techniques ne servirent pas d’abord, ni surtout, à la production de plantes destinées à la nourriture des hommes, mais au « luxe » et au plaisir, aux cultures gratuites des fleurs et des arbustes d’ornement. Mais ces cultures s’adressent moins aux humains qu’aux divinités. Le jardin, en ses origines, est inséparable du sacré. Or, le sacré implique le « gratuit », la fête, et les jardins sont et restent des enclos de fête.
Le nom de Babylone a toujours évoqué les « jardins suspendus », c’est-à-dire établis sur des terrasses, selon une technique que certains archéologues ont pensé retrouver. Des plans superposés constituent autant de promenades, dont chacune est ombragée de palmiers ; le sol, rapporté, est formé de terre fertile, isolé par une feuille de plomb de la maçonnerie qui soutient la terrasse. L’eau, montée jusqu’à la terrasse supérieure par des chaînes sans fin, provenait de puits, toujours alimentés par la nappe issue du fleuve. Elle redescendait ensuite soit en s’infiltrant à travers le sol et en gagnant des conduites de drainage, soit en véritables ruisseaux et cascatelles, qui étaient l’un des charmes de ces cultures véritablement miraculeuses – ce que doit toujours être, et apparaître, un jardin, c’est-à-dire une nature merveilleusement féconde et belle –, une nature créée grâce au travail des hommes et à la bénédiction des dieux. Les jardins de Babylone sont en rapports évidents avec le culte de la déesse Ishtar, la Vénus babylonienne, divinité de l’Amour et de la Vie.
Au cours du IIe millénaire avant notre ère, l’Égypte, de son côté, découvrit les jardins. Ces jardins, comme toute l’agriculture de ce pays, peuvent être considérés comme un « don du Nil ». Il semble que les premiers jardins égyptiens furent des lieux de délices, où la culture des fruits l’emporta longtemps sur celle des plantes destinées à d’autres usages. Les jardins d’Égypte étaient d’abord des vergers et des vignes, dont les lignes perpendiculaires dessinaient un damier dans les mailles duquel se plaçaient tout naturellement des figuiers, des palmiers et des sycomores, dont l’ombre était fort appréciée. Pour entretenir cette végétation, en ce pays de plaine, il était nécessaire de construire un réseau de canaux qui convergeaient vers un bassin central, où vivaient librement, côte à côte, poissons, oiseaux aquatiques et plantes comme le papyrus, le lotus, les nénuphars, toute la faune et la flore que l’on rencontrait dans la campagne égyptienne, aux endroits où l’eau se rassemblait, une fois le Nil rentré dans son lit. Ainsi, de tels jardins réunissaient, et résumaient, en un espace enclos de murs, tous les agréments que la nature dispersait dans le reste du pays. Ces jardins sont des lieux où il fait bon vivre, réaliser pleinement sa « vocation humaine », où le bonheur est fait de reconnaissance aux dieux.
On peut considérer que, déjà, deux styles de jardins sont nés : le jardin en terrasses et le jardin de plaine – deux styles destinés à une grande fortune.
Le troisième pays des jardins est la Perse : les nombreuses plantes spontanées sur les plaines d’Anatolie avaient depuis longtemps séduit les rois de Babylone, qui s’étaient efforcés de les acclimater chez eux. Au temps où les rois de Perse dominaient l’Asie, ils avaient créé un art des jardins extrêmement original, qui ne semble rien devoir à celui de Babylone ni d’Égypte. Ces jardins, appelés paradis (le mot est perse), sont des parcs de chasse, qui tiennent de la forêt et du verger. Xénophon donne la description d’un paradis établi par Cyrus à Sardes, en Asie Mineure, au Ve siècle. Il consistait en grandes futaies, dont les arbres étaient soigneusement alignés ; à leur ombre s’étendait une pelouse, comme une prairie naturelle, entretenue par une irrigation abondante. En certains endroits s’ouvraient des clairières où étaient groupés des arbres fruitiers. Un peu partout des pavillons, tantôt sur le sol, tantôt
