Ce livre revisite quelques théories, anciennes ou plus récentes (Nancy, Agamben, Tiqqun,...), que... more Ce livre revisite quelques théories, anciennes ou plus récentes (Nancy, Agamben, Tiqqun,...), quelques pratiques (historiques, artistiques, créatives) de communauté et finit par poser la question des conditions de possibilité d'une communauté francophone
On pourra définir l'effet grotesque comme ce vertige particulier qui s'empare du récepteur et le ... more On pourra définir l'effet grotesque comme ce vertige particulier qui s'empare du récepteur et le déstabilise –au moins provisoirement– par l'intrusion d'éléments (images, codes linguistiques, éléments habituellement antagonistes et exclusifs les uns des autres, etc.) qui perturbent sa perception normale et les conditions habituelles du sens.
Pourquoi la question de la Communauté, celle de ce qui nous relie au reste de l'humanité, persist... more Pourquoi la question de la Communauté, celle de ce qui nous relie au reste de l'humanité, persiste-t-elle et se fait-elle si lancinante lorsque l'on s'est replié, comme l'individu occidental contemporain loin de toute réalité de vie en commun? Pourquoi les arts, l'art du récit en particulier, mais aussi la danse ou le poème nous font-ils sentir plus intensément que nous appartenons bien à cette Communauté? C'est qu'à travers les arts, et par-delà les hommes, la Communauté se dit et prend forme. Seulement devons-nous y être encore sensible.
Le grotesque est un effet et non un fait. Partant de ce constat, cette étude se présente comme un... more Le grotesque est un effet et non un fait. Partant de ce constat, cette étude se présente comme un essai d'interprétation de cette expérience existentielle que serait le grotesque avant d'être une catégorie esthétique. Rémi Astruc propose de voir dans le grotesque un mécanisme anthropologique fondamental que les sociétés mettent en place pour penser l'altérité et le changement. Le grotesque en art serait ainsi le moyen d'exposer une éthique dans la modernité, indissociable d'une esthétique.
Quand la municipalité de Meudon inaugurera-t-elle le square Louis-Ferdinand-Céline sur les hauteu... more Quand la municipalité de Meudon inaugurera-t-elle le square Louis-Ferdinand-Céline sur les hauteurs de sa commune ? Si cette question est provocatrice, c’est parce qu’elle met l’accent sur une impossibilité étonnante. Il est bien évident aujourd’hui en effet que cette inauguration n’est pas de l’ordre du possible, quand bien même cet auteur est considéré comme l’un des plus grands romanciers français du XXe siècle, sans doute le plus grand avec Proust. « L’affaire » du cinquantenaire raté, dernier épisode en date de ce feuilleton tragi-comique, nous permet d’éclairer cette impossible patrimonialisation de tout ce qui touche à l’écrivain. Elle nous servira en particulier à passer en revue les divers arguments qui ont été avancés. Cela nous permettra de tirer quelques enseignements précieux sur ce « patrimoine » dont on écarte Céline et aussi sur la littérature dans ses rapports conflictuels à l’espace public.
Voix et images de la diversité: que peut la littérature?, 2013
La fiction a-t-elle vraiment en elle-même le pouvoir de déjouer les stéréotypes ?
Dans ce texte, ... more La fiction a-t-elle vraiment en elle-même le pouvoir de déjouer les stéréotypes ? Dans ce texte, je me concentrerai essentiellement sur le cas des stéréotypes « raciaux », et principalement ceux qui opposent Blancs et Noirs, en France et aux États-Unis. Mon propos s’organisera en trois temps. Je commencerai par évoquer les raisons pour lesquelles je ne suis pas très optimiste quant à l’action correctrice de la littérature en général sur la bêtise des préjugés. J’évoquerai ensuite en quoi réside essentiellement selon moi la puissance des stéréotypes. Enfin je tâcherai d’envisager quel pourrait être le pouvoir de la fiction (et de l’art en général) pour les contrer. La vraie question, la seule en effet qui mérite qu’on s’y arrête me semble être celle des moyens réels à la disposition des écrivains et des créateurs, parfois contre la fiction elle-même (du moins contre certaines formes de fiction).
The grotesque is an effet, not a fact. On this basis, this essay tries to present an interpretati... more The grotesque is an effet, not a fact. On this basis, this essay tries to present an interpretation of the existential experience that is the grotesque before ever being an aesthetic category. By reading 19th and 20th century major novels through the " estrangement " effect on the reader and by putting them in relation with other similar cultural expressions of the past, this essay identifies the grotesque as a crucial anthropological device, which might be universal, that societies use to think alterity (therefore identities) and change. This leads to a new understanding of the aesthetic notion of the grotesque aswell as a new understanding of its role in present cultures.-Detailed structure of the essay: First is underlined the strange status of the category of " grotesque " in aesthetic theory today and specially within the literary field: it operates more or less as a deceptive or anti-cognitive concept to name what rational thinking does not manage to comprehend and, more broadly, what does not belong to Knowledge. If, in its current use, it designates what is ludicrous or morally unacceptable, Rémi Astruc shows that the floating meanings of the scholarly term come from the peculiar history of the word itself which escaped the pictural sphere to become of common use in literary criticism. These problematic meanings are then deconstructed throughout the essay by means of the analysis of novels, whose strange effect on the reader seems very similar and that therefore can be thought of as a modern form of grotesque. The originality of the approach lies much in its refusal to consider the grotesque as an aesthetic phenomenon but rather as something more general whose aesthetic outcome is only one among its many other forms of expression. Therefore an anthropological study is necessary, which allows to overcome the unsatisfiying present definition of the grotesque. In the first chapter, " looking for the grotesque " , R. Astruc presents the major ambiguities of the notion as it is commonly used nowadays by critics. There are mostly three: the difficulty to enclose the grotesque into a genre (comic or tragic), the difficulty to find valid criteria of identification in the texts (either thematic, linguistic or stylistic ones), the difficulty to determine the kind of representation of reality it conveys (realistic, fantastic or ludic). The solution in order to overcome these difficulties is to acknowledge indetermination itself as a positive mark of the category (and not of the helplessness of the critic!): ambiguity and imperfection are then operative notions allowing to acutely describe what goes on in the texts. The grotesque can therefore be properly identified as " the place where the impossible finds an actual occurrence " [in French: " une impossibilité réalisée " ], which explains how difficult it is to apprehend it in rational terms. But another important characteristic of the grotesque is its dimension of alterity: it alters the present world and transports the reader/beholder into another world. As a global phenomenon, it alters the perception of the reader, shifting his moral axis.
Pourquoi la question de la Communauté, celle de ce qui nous relie au reste de l’humanité, persist... more Pourquoi la question de la Communauté, celle de ce qui nous relie au reste de l’humanité, persiste-t-elle et se fait même si lancinante lorsque l’on s’est replié, comme l’individu occidental contemporain, loin de toute réalité de vie en commun ? Pourquoi les arts, l’art du récit en particulier (conte, roman ou film) mais aussi la danse ou le poème, nous font-ils sentir plus intensément que nous appartenons bien à cette Communauté ? C’est qu’à travers les arts, et par-delà les hommes, la Communauté se dit et prend forme. Seulement devons-nous pouvoir y être encore sensible. Post-scriptum : Jean-Luc Nancy https://communautedeschercheurssurlacommunaute.wordpress.com
Revue du MAUSS/Revue du MAUSS semestrielle, Jan 5, 2024
Quelle organisation politique désirez-vous pour Auroville ?-Il me vient une définition amusante :... more Quelle organisation politique désirez-vous pour Auroville ?-Il me vient une définition amusante : une anarchie divine. Mais le monde ne comprendra pas. Il faut que les hommes prennent conscience de leur être psychique, et spontanément s'organisent sans règles et sans lois fixes, c'est l'idéal.
Faire de la littérature un partage, à travers la mise en commun d’un sens qui n’émerge qu’à la fa... more Faire de la littérature un partage, à travers la mise en commun d’un sens qui n’émerge qu’à la faveur de cette discussion critique et solitaire qu’est la lecture, revient à adresser un pied de nez magistral à toutes les entreprises de privatisation qui déchirent et morcellent notre monde. C’est un ultime démenti à tous ceux qui font de l’ensemble des sphères intime et sociale des objets quantifiables, convertibles et échangeables sur des marchés sans cesse plus vastes. Reconnaître à la littérature, comme nous le proposons ici, guidés en cela par la lecture de Leonora Miano, Zakes Mda et Antoine Volodine, ce pouvoir d’être un commun, à travers la Communauté qui s’institue dans le geste même de sa réception, c’est comprendre que la ressource à partir de laquelle cette dernière se dresse est, par essence, inappropriable.
M’appuyant sur les travaux de Jean-Luc Nancy (La communauté désœuvrée), Maurice Blanchot (La comm... more M’appuyant sur les travaux de Jean-Luc Nancy (La communauté désœuvrée), Maurice Blanchot (La communauté inavouable) et G. Agamben (La communauté qui vient, Théorie de la singularité quelconque), j’analyse les formes que prennent en littérature, de Dostoïevski à Beckett en passant par Joyce, Walser et Kafka, l’articulation d’une recherche de la singularité absolue et les formes d’une communauté retrouvée bien qu’infiniment paradoxale. C’est le grotesque fantoche que représente l’Homme du souterrain de Dostoïevski qui me semble ouvrir une page nouvelle en littérature, celle de l’individualisme radical, page poursuivie par des figures de la singularité que sont l’Henry des Tropiques d’Henry Miller, l’Oscar du Tambour de G. Grass, le Mickey Sabbath de Philip Roth par exemple. Or une des formes les plus marquantes de la singularité, qu’empruntent d’ailleurs plusieurs des récits des auteurs cités, est le comique, qui est un moyen d’affirmer le détachement suprême par rapport au groupe mai...
Ce livre revisite quelques théories, anciennes ou plus récentes (Nancy, Agamben, Tiqqun,...), que... more Ce livre revisite quelques théories, anciennes ou plus récentes (Nancy, Agamben, Tiqqun,...), quelques pratiques (historiques, artistiques, créatives) de communauté et finit par poser la question des conditions de possibilité d'une communauté francophone
On pourra définir l'effet grotesque comme ce vertige particulier qui s'empare du récepteur et le ... more On pourra définir l'effet grotesque comme ce vertige particulier qui s'empare du récepteur et le déstabilise –au moins provisoirement– par l'intrusion d'éléments (images, codes linguistiques, éléments habituellement antagonistes et exclusifs les uns des autres, etc.) qui perturbent sa perception normale et les conditions habituelles du sens.
Pourquoi la question de la Communauté, celle de ce qui nous relie au reste de l'humanité, persist... more Pourquoi la question de la Communauté, celle de ce qui nous relie au reste de l'humanité, persiste-t-elle et se fait-elle si lancinante lorsque l'on s'est replié, comme l'individu occidental contemporain loin de toute réalité de vie en commun? Pourquoi les arts, l'art du récit en particulier, mais aussi la danse ou le poème nous font-ils sentir plus intensément que nous appartenons bien à cette Communauté? C'est qu'à travers les arts, et par-delà les hommes, la Communauté se dit et prend forme. Seulement devons-nous y être encore sensible.
Le grotesque est un effet et non un fait. Partant de ce constat, cette étude se présente comme un... more Le grotesque est un effet et non un fait. Partant de ce constat, cette étude se présente comme un essai d'interprétation de cette expérience existentielle que serait le grotesque avant d'être une catégorie esthétique. Rémi Astruc propose de voir dans le grotesque un mécanisme anthropologique fondamental que les sociétés mettent en place pour penser l'altérité et le changement. Le grotesque en art serait ainsi le moyen d'exposer une éthique dans la modernité, indissociable d'une esthétique.
Quand la municipalité de Meudon inaugurera-t-elle le square Louis-Ferdinand-Céline sur les hauteu... more Quand la municipalité de Meudon inaugurera-t-elle le square Louis-Ferdinand-Céline sur les hauteurs de sa commune ? Si cette question est provocatrice, c’est parce qu’elle met l’accent sur une impossibilité étonnante. Il est bien évident aujourd’hui en effet que cette inauguration n’est pas de l’ordre du possible, quand bien même cet auteur est considéré comme l’un des plus grands romanciers français du XXe siècle, sans doute le plus grand avec Proust. « L’affaire » du cinquantenaire raté, dernier épisode en date de ce feuilleton tragi-comique, nous permet d’éclairer cette impossible patrimonialisation de tout ce qui touche à l’écrivain. Elle nous servira en particulier à passer en revue les divers arguments qui ont été avancés. Cela nous permettra de tirer quelques enseignements précieux sur ce « patrimoine » dont on écarte Céline et aussi sur la littérature dans ses rapports conflictuels à l’espace public.
Voix et images de la diversité: que peut la littérature?, 2013
La fiction a-t-elle vraiment en elle-même le pouvoir de déjouer les stéréotypes ?
Dans ce texte, ... more La fiction a-t-elle vraiment en elle-même le pouvoir de déjouer les stéréotypes ? Dans ce texte, je me concentrerai essentiellement sur le cas des stéréotypes « raciaux », et principalement ceux qui opposent Blancs et Noirs, en France et aux États-Unis. Mon propos s’organisera en trois temps. Je commencerai par évoquer les raisons pour lesquelles je ne suis pas très optimiste quant à l’action correctrice de la littérature en général sur la bêtise des préjugés. J’évoquerai ensuite en quoi réside essentiellement selon moi la puissance des stéréotypes. Enfin je tâcherai d’envisager quel pourrait être le pouvoir de la fiction (et de l’art en général) pour les contrer. La vraie question, la seule en effet qui mérite qu’on s’y arrête me semble être celle des moyens réels à la disposition des écrivains et des créateurs, parfois contre la fiction elle-même (du moins contre certaines formes de fiction).
The grotesque is an effet, not a fact. On this basis, this essay tries to present an interpretati... more The grotesque is an effet, not a fact. On this basis, this essay tries to present an interpretation of the existential experience that is the grotesque before ever being an aesthetic category. By reading 19th and 20th century major novels through the " estrangement " effect on the reader and by putting them in relation with other similar cultural expressions of the past, this essay identifies the grotesque as a crucial anthropological device, which might be universal, that societies use to think alterity (therefore identities) and change. This leads to a new understanding of the aesthetic notion of the grotesque aswell as a new understanding of its role in present cultures.-Detailed structure of the essay: First is underlined the strange status of the category of " grotesque " in aesthetic theory today and specially within the literary field: it operates more or less as a deceptive or anti-cognitive concept to name what rational thinking does not manage to comprehend and, more broadly, what does not belong to Knowledge. If, in its current use, it designates what is ludicrous or morally unacceptable, Rémi Astruc shows that the floating meanings of the scholarly term come from the peculiar history of the word itself which escaped the pictural sphere to become of common use in literary criticism. These problematic meanings are then deconstructed throughout the essay by means of the analysis of novels, whose strange effect on the reader seems very similar and that therefore can be thought of as a modern form of grotesque. The originality of the approach lies much in its refusal to consider the grotesque as an aesthetic phenomenon but rather as something more general whose aesthetic outcome is only one among its many other forms of expression. Therefore an anthropological study is necessary, which allows to overcome the unsatisfiying present definition of the grotesque. In the first chapter, " looking for the grotesque " , R. Astruc presents the major ambiguities of the notion as it is commonly used nowadays by critics. There are mostly three: the difficulty to enclose the grotesque into a genre (comic or tragic), the difficulty to find valid criteria of identification in the texts (either thematic, linguistic or stylistic ones), the difficulty to determine the kind of representation of reality it conveys (realistic, fantastic or ludic). The solution in order to overcome these difficulties is to acknowledge indetermination itself as a positive mark of the category (and not of the helplessness of the critic!): ambiguity and imperfection are then operative notions allowing to acutely describe what goes on in the texts. The grotesque can therefore be properly identified as " the place where the impossible finds an actual occurrence " [in French: " une impossibilité réalisée " ], which explains how difficult it is to apprehend it in rational terms. But another important characteristic of the grotesque is its dimension of alterity: it alters the present world and transports the reader/beholder into another world. As a global phenomenon, it alters the perception of the reader, shifting his moral axis.
Pourquoi la question de la Communauté, celle de ce qui nous relie au reste de l’humanité, persist... more Pourquoi la question de la Communauté, celle de ce qui nous relie au reste de l’humanité, persiste-t-elle et se fait même si lancinante lorsque l’on s’est replié, comme l’individu occidental contemporain, loin de toute réalité de vie en commun ? Pourquoi les arts, l’art du récit en particulier (conte, roman ou film) mais aussi la danse ou le poème, nous font-ils sentir plus intensément que nous appartenons bien à cette Communauté ? C’est qu’à travers les arts, et par-delà les hommes, la Communauté se dit et prend forme. Seulement devons-nous pouvoir y être encore sensible. Post-scriptum : Jean-Luc Nancy https://communautedeschercheurssurlacommunaute.wordpress.com
Revue du MAUSS/Revue du MAUSS semestrielle, Jan 5, 2024
Quelle organisation politique désirez-vous pour Auroville ?-Il me vient une définition amusante :... more Quelle organisation politique désirez-vous pour Auroville ?-Il me vient une définition amusante : une anarchie divine. Mais le monde ne comprendra pas. Il faut que les hommes prennent conscience de leur être psychique, et spontanément s'organisent sans règles et sans lois fixes, c'est l'idéal.
Faire de la littérature un partage, à travers la mise en commun d’un sens qui n’émerge qu’à la fa... more Faire de la littérature un partage, à travers la mise en commun d’un sens qui n’émerge qu’à la faveur de cette discussion critique et solitaire qu’est la lecture, revient à adresser un pied de nez magistral à toutes les entreprises de privatisation qui déchirent et morcellent notre monde. C’est un ultime démenti à tous ceux qui font de l’ensemble des sphères intime et sociale des objets quantifiables, convertibles et échangeables sur des marchés sans cesse plus vastes. Reconnaître à la littérature, comme nous le proposons ici, guidés en cela par la lecture de Leonora Miano, Zakes Mda et Antoine Volodine, ce pouvoir d’être un commun, à travers la Communauté qui s’institue dans le geste même de sa réception, c’est comprendre que la ressource à partir de laquelle cette dernière se dresse est, par essence, inappropriable.
M’appuyant sur les travaux de Jean-Luc Nancy (La communauté désœuvrée), Maurice Blanchot (La comm... more M’appuyant sur les travaux de Jean-Luc Nancy (La communauté désœuvrée), Maurice Blanchot (La communauté inavouable) et G. Agamben (La communauté qui vient, Théorie de la singularité quelconque), j’analyse les formes que prennent en littérature, de Dostoïevski à Beckett en passant par Joyce, Walser et Kafka, l’articulation d’une recherche de la singularité absolue et les formes d’une communauté retrouvée bien qu’infiniment paradoxale. C’est le grotesque fantoche que représente l’Homme du souterrain de Dostoïevski qui me semble ouvrir une page nouvelle en littérature, celle de l’individualisme radical, page poursuivie par des figures de la singularité que sont l’Henry des Tropiques d’Henry Miller, l’Oscar du Tambour de G. Grass, le Mickey Sabbath de Philip Roth par exemple. Or une des formes les plus marquantes de la singularité, qu’empruntent d’ailleurs plusieurs des récits des auteurs cités, est le comique, qui est un moyen d’affirmer le détachement suprême par rapport au groupe mai...
En ce début de XXIe siècle, la réapparition dans un certain nombre d’œuvres d’art aux États-Unis ... more En ce début de XXIe siècle, la réapparition dans un certain nombre d’œuvres d’art aux États-Unis comme en France de stéréotypes et de caricatures de nature initialement racistes envers l’homme noir (le présentant comme pur objet de spectacle pour le divertissement des Blancs) a de quoi surprendre. Que peut signifier la réutilisation par des artistes contemporains de ces images dégradantes remontant au temps de la traite et de l’esclavage, que l’on aurait pu croire définitivement abandonnées o..
Pourquoi la question de la Communauté, celle de ce qui nous relie au reste de l’humanité, persist... more Pourquoi la question de la Communauté, celle de ce qui nous relie au reste de l’humanité, persiste-t-elle et se fait même si lancinante lorsque l’on s’est replié, comme l’individu occidental contemporain, loin de toute réalité de vie en commun ? Pourquoi les arts, l’art du récit en particulier (conte, roman ou film) mais aussi la danse ou le poème, nous font-ils sentir plus intensément que nous appartenons bien à cette Communauté ? C’est qu’à travers les arts, et par-delà les hommes, la Communauté se dit et prend forme. Seulement devons-nous pouvoir y être encore sensible. Post-scriptum : Jean-Luc Nancy https://communautedeschercheurssurlacommunaute.wordpress.com
Paris et Cergy, les 15, 16 et 17 septembre 2016. On peut dire après-coup —sur le moment, peu s'en... more Paris et Cergy, les 15, 16 et 17 septembre 2016. On peut dire après-coup —sur le moment, peu s'en sont aperçu— que dans le monde intellectuel finalement assez atone de la fin du XXe siècle, la publication de deux numéros d'une revue éphémère, Tiqqun 1 et Tiqqun 2, aura constitué un événement1. Les textes de cette oeuvre collective ont en effet revigoré la critique sociale et la pensée politique radicale, ce qui en a fait réfléchir —ou affolé— plus d'un. Quelques années plus tard, cette exhortation originale à penser le présent et l'avenir a trouvé un prolongement dans le Comité invisible, organe lui-même collectif et anonyme, dont les écrits connurent quant à eux assez rapidement une large diffusion, nationale et internationale (notamment à la suite de l'exposition médiatico-judiciaire dont furent victimes leurs supposés auteurs) : L'insurrection qui vient (2007) puis A nos amis (2014). Ces textes, dans leur diversité, tiennent tout à la fois du manifeste virulent et du pamphlet rafraîchissant, recourant volontiers à la satire et à l'outrance. C'est ce qui explique sans doute la puissance de fascination qu'ils exercent toujours et peut-être pour longtemps encore. Mais dressant dans le même temps un constat sans appel du présent et proposant des pistes d'action pour l'avenir, ce sont aussi des tentatives d'une exigence intellectuelle rare pour penser l'époque et ses possibles — celle du règne de la marchandise-spectacle —, avec les outils intellectuels à notre disposition (spectacle, biopouvoir, formes-de-vie, vie nue, etc.), sans s'interdire de forger à leur tour des concepts nouveaux quand ils paraissaient nécessaires (Bloom, Jeune-Fille, etc.). Un des enjeux primordiaux de ces publications, en parallèle avec la préparation de l'insurrection, est de penser les conditions de possibilités contemporaines de la communauté (« notre seule affaire est le communisme », peut-on lire en Postface à l'édition italienne de Théorie du Bloom, 20042). Par l'analyse des décombres affectives laissées par la société individualiste capitaliste occidentale et désormais mondialisée, il s'est agi de réconcilier mobilisation, théorie, poésie, et prophétisme. Or sur quel commun ces écrits s'appuient-ils et quel commun construisent-ils ? Ainsi quelle nouveauté ces écrits représentent-ils par rapport à la pensée de la communauté telle qu'elle s'est forgée au XXe siècle chez Bataille, Blanchot, Nancy, Agamben, Negri, Esposito par exemple ? Comment les différents mouvements sociaux et les diverses expériences d'organisation ou de résistance collective de ces dix dernières années 1 Le contenu de ces numéros a été repris ensuite dans diverses publications autonomes: Premiers éléments pour une théorie de la Jeune-Fille, Introduction à la guerre civile, Théorie du Bloom, etc. ce qui a grandement contribué à leur diffusion et médiatisation 2 Le texte se poursuit ainsi : « Le communisme n'est pas une autre façon de distribuer les richesses, d'organiser la production, de gérer la société ; le communisme est une disposition éthique. Une disposition à se laisser affecter, au contact des êtres, par ce qui nous est commun. Une disposition à partager ce qui est commun. L'« autre état » de Musil s'en approche plus que l'URSS de Khrouchtchev. »
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Dans ce texte, je me concentrerai essentiellement sur le cas des stéréotypes « raciaux », et principalement ceux qui opposent Blancs et Noirs, en France et aux États-Unis. Mon propos s’organisera en trois temps. Je commencerai par évoquer les raisons pour lesquelles je ne suis pas très optimiste quant à l’action correctrice de la littérature en général sur la bêtise des préjugés. J’évoquerai ensuite en quoi réside essentiellement selon moi la puissance des stéréotypes. Enfin je tâcherai d’envisager quel pourrait être le pouvoir de la fiction (et de l’art en général) pour les contrer. La vraie question, la seule en effet qui mérite qu’on s’y arrête me semble être celle des moyens réels à la disposition des écrivains et des créateurs, parfois contre la fiction elle-même (du moins contre certaines formes de fiction).
Pourquoi les arts, l’art du récit en particulier (conte, roman ou film) mais aussi la danse ou le poème, nous font-ils sentir plus intensément que nous appartenons bien à cette Communauté ?
C’est qu’à travers les arts, et par-delà les hommes, la Communauté se dit et prend forme. Seulement devons-nous pouvoir y être encore sensible.
Post-scriptum : Jean-Luc Nancy
https://communautedeschercheurssurlacommunaute.wordpress.com
Dans ce texte, je me concentrerai essentiellement sur le cas des stéréotypes « raciaux », et principalement ceux qui opposent Blancs et Noirs, en France et aux États-Unis. Mon propos s’organisera en trois temps. Je commencerai par évoquer les raisons pour lesquelles je ne suis pas très optimiste quant à l’action correctrice de la littérature en général sur la bêtise des préjugés. J’évoquerai ensuite en quoi réside essentiellement selon moi la puissance des stéréotypes. Enfin je tâcherai d’envisager quel pourrait être le pouvoir de la fiction (et de l’art en général) pour les contrer. La vraie question, la seule en effet qui mérite qu’on s’y arrête me semble être celle des moyens réels à la disposition des écrivains et des créateurs, parfois contre la fiction elle-même (du moins contre certaines formes de fiction).
Pourquoi les arts, l’art du récit en particulier (conte, roman ou film) mais aussi la danse ou le poème, nous font-ils sentir plus intensément que nous appartenons bien à cette Communauté ?
C’est qu’à travers les arts, et par-delà les hommes, la Communauté se dit et prend forme. Seulement devons-nous pouvoir y être encore sensible.
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