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L'Antiquité, un bilan à construire...

2012, MARCHESI (H.), SCHWALLER (M.) coord. — Bilan de la recherche archéologique depuis 1995. Languedoc-Roussillon. Montpellier, Direction régionale des Affaires Culturelles Languedoc-Roussillon, 2012, p. 91-125.

BILAN DE LA DIRECTION RÉGIONALE DES AFFAIRES CULTURELLES R E C H E R C H E L A N G U E D O C - R O U S S I L L O N ARCHEOLOGIQUE SERVICE RÉGIONAL DE L’ARCHÉOLOGIE DEPUIS 1995 DIRECTION RÉGIONALE DES AFFAIRES CULTURELLES LANGUEDOC-ROUSSILLON SERvICE RÉGIONAL DE L’ARChÉOLOGIE BILAN DE LA RECHERCHE ARCHEOLOGIQUE DEPUIS 1995 MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION DIRECTION GÉNÉRALE DES PATRIMOINES SERVICE DU PATRIMOINE Sous-Direction de l’Archéologie 2012 DIRECTION RÉGIONALE DES AFFAIRES CULTURELLES SERVICE RÉGIONAL DE L’ARCHÉOLOGIE 5, rue de la Salle l’Evêque CS 49020 34967 Montpellier cedex 2 Tél. 04 67 02 32 71 / Fax. 04 67 02 35 20 Dans cet ouvrage, les avis exprimés n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs Coordination : Henri Marchesi, Martine Schwaller Cartographie : Iouri Bermond Service régional de l’Archéologie En couverture : Ambrussum (Villetelle, Hérault, l’oppidum et le quartier bas en rive droite du Vidourle. (Cliché : Christian Hussy, SRA PACA) 1ère de couverture : Montpellier, Pila-Saint-Gély, grotte dépotoir : 1640-1660. Terre engobée et vernissée (Cliché L A3M : ) 4e de couverture : clichés en cascade : - Habitat du Néolithique final de Trèbes, Le Mourral, Aude (Cliché : Jean Vaquer CNRS) - Vue générale de la Caune de l’Arago à Tautavel (Pyrénées-Orientales (cliché : CERP de Tautavel) - Vue générale des îlots d’habitation protohistoriques de Lattara, Lattes, Hérault (Cliché : UFRAL) - Vue aérienne de la basilique funéraire de Maguelone VIe-VIIIe s., Villeneuve les Maguelone, Hérault (Cliché : Loïc Damelet CCJ)) Imprimerie : ATELIER 6 34980 Saint-Clément-de-Rivière tél. 04 67 63 52 00 ISSN 1240 - 8549 © 2012 MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION 2 LANGUEDOC-ROUSSILLON BILAN DE LA RECHERCHE ARCHEOLOGIQUE Sommaire DEPUIS 1995 Quel bilan de la recherche archéologique ? .............................................................. 4 Du Paléolithique au Mésolithique .............. 14 Quinze ans de recherche sur le Néolithique ..................................................... 28 La Protohistoire ......................................................... 59 L’Antiquité ...................................................................... 91 Le Moyen Age .......................................................... 126 Architectures de terre crue et techniques constructives ........................ 176 3 L’Antiquité Un bilan à construire…. Iouri Bermond, Sophie Féret, Benoît Ode, Thierry Odiot, Dominique Orssaud, Christophe Pellecuer, Gérald Sachot Service régional de l’Archéologie La présente contribution, comme l’indique le sous-titre, n’est en rien le bilan scientifique que nous avions espéré. À notre initiative, en novembre 2009, une réunion rassemblait une quinzaine de chercheurs1 et devait jeter les bases d’un projet collectif ambitieux qui devait aboutir à la rédaction d’une centaine de pages. Deux années se sont écoulées et il est manifeste que nous n’avons pu su ou nous n’avons pas pu mobiliser les énergies et conduire jusqu’au bout cette initiative. Alors que d’autres bilans, pour d’autres périodes, arrivaient à terme et que la nécessité de publier s’imposait, il a été décidé, pour l’Antiquité, de présenter un panorama préliminaire de la recherche languedocienne, qui n’engagera que les seuls agents du Service régional de l’archéologie. Notre souhait n’est pas de rompre avec l’idée d’une réflexion collective, mais de proposer les premiers matériaux pour un bilan qui reste à construire. On rappellera qu’un travail préparatoire a été réalisé par Sophie Féret, conservatrice du patrimoine, lors de son stage de spécialité à Montpellier en 2009. Notre collègue a mis en place une base de données à partir du dépouillement des Bilans Scientifiques Régionaux pour 1995-2005. Comme cela avait été suggéré lors de la réunion de Lattes déjà évoquée, l’indexation a été étendue à 2006-2009, portant à quinze années la période traitée dans le cadre de ce bilan. Bien évidemment, la Carte Archéologique Nationale et sa base Patriarche ont été largement sollicitées pour compléter cette approche et proposer des cartes suggestives. Le résultat pourra surprendre par son caractère hétérogène, car les textes proposés ne visent pas toujours les mêmes objectifs, hésitant entre le bilan des pratiques, que les agents du Service régional de l’Archéologie sont peut-être les mieux à même de documenter et d’évaluer, et le bilan des acquis, que la communauté des chercheurs pourra amender et compléter. Une première partie s’attachera à présenter les traits dominants des recherches de terrain sur la période gallo-romaine. Elle sera suivie de quatre parties thématiques, inspirées du plan de travail mis en place lors de la réunion de Lattes. La plupart de ces contributions ne sont que des ébauches, demandant tout à la fois l’indulgence du lecteur et de poursuivre grâce à de multiples et autres compétences la construction de ce bilan. 1. LA PÉRIODE ANTIQUE ET L’ARCHÉOLOGIE RÉGIONALE : CHIFFRES ET TENDANCES Le lent déclin de la pratique des prospections Ces quinzaines années de référence ont vu une profonde mutation dans nos approches de la période antique, qui est facilement perceptible dans l’évolution du profil annuel des opérations de terrain. Au milieu des années quatre-vingt-dix, la part des campagnes de prospections pédestres, dans la lancée de la décennie écoulée et des résultats engrangés, est encore très élevée, comme le montrent les chiffres globaux d’activité régionale (fig. 1). Ce dynamisme est le reflet du fort investissement de terrain des chercheurs travaillant sur l’époque romaine. Ils ont pour la plupart consacré beaucoup d’énergie à des inventaires diachroniques à des échelles de quelques centaines de kilomètres carrés. Ce mouvement va de pair avec le développement des techniques de prospections fines. On pense aux méthodes de pointage au réel des artefacts de type « Rapatel »2 ou aux tests de ramassage par unité de surface. Jusqu’en 2000, la publication de synthèses micro-régionales, sous des formes très variées, de l’essai d’analyse spatiale aux volumes plus factuels de la Carte Archéologique de la Gaule (Archaeomedes 1998, Mauné 1998, Lugand, Bermond dir. 2001, Nuninger 2002…), clôt en quelque sorte un temps de la recherche languedocienne. Elle trouvait ses origines dans la politique de formation mise en place par Pierre-Yves Genty, au nom du Service régional de l’archéologie, vingt ans auparavant. La dernière décennie est marquée par un contexte de désaffection de la méthode, sinon de critiques de ses capacités de résolution. Il est significatif que l’archéologie préventive Etaient présents à cette réunion Guy Barruol, Valérie Bel, Iouri Bermond, Loïc Buffat, Alain Chartrain, Sophie Féret, Jean-Luc Fiches, Cécile Jung, Benoît Ode, Thierry Odiot, Michel Passelac, Christophe Pellecuer, Gérald Sachot, Corinne Sanchez, Patrick Thollard. Que les collègues qui ont bien voulu répondre à notre invitation en soient remerciés et veuillent ne pas trop nous en vouloir de cette sollicitation qui n’a pas eu les suites attendues. 2 Nom usuel d’une méthode de prospection pédestre, conçue par Pierre-Yves Genty au début des années quatre-vingt-dix et adoptée par les chercheurs languedociens. 1 91 missions de Michel Passelac, ou dans le Gard, avec celles de Louis Monguillan ou de Gérard Chouquer. Si ces données collectées pour l’établissement de la Carte Archéologique Nationale ne sont pas directement consultables par les chercheurs, ces informations et la documentation conservées au Service régional de l’archéologie ont été largement mises à disposition des différents auteurs de la Carte Archéologique de la Gaule. Cette collection autorise un accès facile à un bilan actualisé des connaissances à l’échelle d’un département ou d’une de ses subdivisions. L’état d’avancement pour le Languedoc-Roussillon est très satisfaisant, puisque, depuis la parution en 1996 du volume consacré à Nîmes (30/1)3, ce sont dix volumes qui rendent compte du patrimoine régional de l’Antiquité. Pour disposer d’une couverture enfin exhaustive à une échéance d’une vingtaine d’années Figure 1 — La pratique des prospections thématiques et diachroniques en Languedoc-Roussillon après le premier volume gardois, il reste (nombre d’opérations autorisées)– source Patriarche Ministère de la Culture et de la Communication (I. Bermond DAO). à mettre en chantier un à deux volumes pour la partie orientale du département de l’Hérault, Béziers et son arrondissement. ne laisse plus de place dans ses protocoles de détection des sites à la prospection. Cependant, c’est dans le domaine de Distributions régionales, les témoins de la romanisation la recherche que l’on entrevoit une continuité de la pratique de ces techniques, avec une affirmation des prospections à C’est du Rhône au Narbonnais, sur une profondeur d’une caractère thématique. Pour l’Antiquité, les campagnes de cinquantaine de kilomètres depuis le littoral, que l’on révision des sites de villas de la cité de Nîmes sont un bon trouve l’essentiel des informations recensées formant exemple de cette évolution de tendance, avec des opérations une concentration révélatrice tout autant de l’intensité de de terrain sélectives quant aux périodes et aux sites traités l’aménagement de ces terroirs de plaine durant l’Antiquité (Buffat 2011). Les prospections diachroniques connaissent elles aussi un regain d’intérêt. La pratique de terrain que de la polarisation de la recherche moderne autour des s’accompagne de nouvelles préoccupations techniques, avec grands centres urbains régionaux (fig. 3). Après une solution le recours à des méthodes d’enregistrement utilisant le GPS de continuité à la hauteur des Corbières, une concentration ou, de nouvelles capacités d’analyse grâce à des systèmes secondaire peut être individualisée dans la plaine du d’informations géographiques. Il est trop tôt cependant Roussillon, confirmant ainsi le potentiel de la bande côtière pour savoir si les frémissements constatés permettront une vers le sud. La forte attraction du couloir audois attire en nouvelle expression durable de ces études territoriales pour direction de l’ouest ce phénomène de fortes densités autour la période considérée, peut-être grâce un renouvellement de Carcassonne mais aussi de Limoux. On retrouve une générationnel, mais sans le rôle moteur joué auparavant par même image en Lozère, à l’ouest de Mende, entre Tarn et le Service régional de l’archéologie. Lot. L’occupation des sols à l’époque antique : état des lieux La carte des « entités archéologiques » datées de l’époque romaine (fig. 2), avec un effectif d’environ 10 000 EA, témoigne, même en l’absence des conclusions d’une approche statistique, de la contribution déterminante des prospections pédestres dans notre vision actuelle de l’occupation des sols à l’échelle régionale. La prospection aérienne, à cause des modes culturaux mais aussi en l’absence d’une réelle tradition de recherche, n’a quant à elle qu’un rôle secondaire en Languedoc-Roussillon, sinon de façon plutôt symbolique aux marges de son territoire comme en Lauragais, avec les 92 A côté de ces zones privilégiées pour les témoins de la présence romaine, un autre faciès régional, avec l’arrièrepays languedocien, les reliefs pyrénéens et la plupart des espaces lozériens, est caractérisé par une chute, plutôt brutale, du nombre des occurrences d’occupation. Les difficultés des conditions d’exploitation des sols dans des Un volume en 1989 a traité du département de la Lozère. Il s’agissait d’une initiative isolée, liée à l’exploitation d’un mémoire de thèse. Une reprise de la documentation lozérienne est en cours et doit donner lieu à une nouvelle publication. 3 Figure 2 – Le Languedoc-Roussillon gallo-romain : carte des entités archéologiques recensées dans la base Patriarche, Ministère de la Culture et de la Communication (I. Bermond DAO). secteurs moins favorables est certainement une réalité, mais le déterminisme naturel ne suffit pas pour expliquer de telles disparités avec la plaine. L’inégalité de l’investissement scientifique peut être aussi considérée comme une des principales raisons de ce contraste. Cependant, peut être avancée, au moins à titre d’hypothèse d’interprétation, l’idée d’un développement différentiel de ces zones qui occupent une position marginale par rapport à l’armature urbaine des chefs-lieux de cité, mais aussi des agglomérations secondaires. Les différences d’investissement sont sensibles entre plaine et arrière-pays, dans un territoire ayant valeur de laboratoire pour ces questions comme celui de la cité de Nîmes. Enfin d’autres stratégies de mise en valeur, adaptées à des milieux différents mais éloignées des formes plus courantes d’exploitation du sol propres à la période romaine, sont encore mal perçues et doivent être envisagées autour de certains chefs-lieux comme Javols ou Lodève ou pour les reliefs pyrénéens (autour de l’enclave Llivia, l’antique Ivlia Libica). De la prospection à la fouille Dans l’intervalle 1995-2009, environ 1 500 « entités archéologiques » datées de l’ époque gallo-romaine ont été enregistrées (source Patriarche, mars 2012) à l’issue d’opérations de terrain autorisées, qu’elles relèvent du domaine préventif ou programmé, de l’étape d’évaluation à la réalisation d’une fouille exhaustive (fig. 4). Au-delà des disparités sur le statut administratif de ces interventions, un tel chiffre correspond à une masse d’informations jusqu’ici inégalée. Même si beaucoup reste à faire pour traiter ces données, la recherche languedocienne a aujourd’hui 93 Figure 3 – Villas et exploitations rurales : réalité de l’occupation des sols ou polarisation de la recherche autour des grands centres urbains actuels ? – source Patriarche Ministère de la Culture et de la Communication (I. Bermond DAO). la possibilité de progresser en construisant des corpus plus riches que par le passé et en ouvrant ses réflexions à des analyses d’ordre quantitatif. Cette documentation a cependant ses limites, comme en témoigne la répartition géographique des opérations de terrain. Elles restent cantonnées pour l’essentiel dans les plaines et ces basses vallées fluviales intensément parcourues par la prospection pédestre et délaissent une fois encore les reliefs, renforçant ainsi la césure entre une bande littorale investie et un arrière-pays marginalisé. Même dans les espaces de plaine, la distribution de ces opérations n’est pas régulière et plusieurs concentrations apparaissent autour des principaux centres urbains. Les densités démographiques et l’économie du Languedoc moderne imposent une telle répartition, mais le nombre des fouilles peut se conjuguer aussi dans quelques secteurs avec une véritable politique de recherche 94 (Lauragais, plaine du Roussillon, Bassin de Thau, Lunellois ou Nîmois…). Cette logique de pôles est atténuée par la forte contribution des opérations d’infrastructures linéaires, qui, du TGV Méditerranée au Gazoduc-Artère du Midi ou à l’autoroute A75 pour les plus importantes, forment des traits d’union entre des zones archéologiques privilégiées, bien visibles sur la carte. Les blancs de l’activité de terrain sont eux aussi bien discernables, moins sensible peut-être dans la partie orientale de la région pour laquelle des efforts de densification sont encore à faire. A l’ouest, entre Montpellier et Narbonne, au-delà vers Carcassonne ou Perpignan, de vastes espaces restent à investir. L’Antiquité, sa place dans la recherche languedocienne Alors que la Protohistoire a occupé une place privilégiée Figure 4 – Répartition des entités archéologiques attribuables à la période de l’Antiquité, issues d’opérations de terrain réalisées entre 1995 et 2009 – source Patriarche Ministère de la Culture et de la Communication (I. Bermond DAO). pour les chercheurs de la deuxième moitié du XXe s., avec l’émergence d’une « école » languedocienne, les travaux sur l’époque romaine n’étaient guère, par comparaison, qu’une sorte de bruit de fond dans l’activité régionale. Il est d’ailleurs significatif que la période tardo-républicaine ait longtemps été considérée comme du domaine de compétence des protohistoriens, les sites de référence étant pour la plupart des agglomérations d’origine indigène. Aujourd’hui, l’Antiquité bénéficie d’un intérêt croissant et le déséquilibre perceptible antérieurement paraît en grande partie résorbé. Le nombre élevé des opérations relatives à cette tranche chronologique est l’une des manifestations les plus évidentes de cette évolution. D’autres paramètres, dans le cadre d’un bilan plus ambitieux, pourraient être sollicités, comme le nombre de chercheurs oeuvrant sur l’époque romaine ou le nombre de publications parues. C’est certainement dans les années quatre-vingt-dix que les choses ont changé sur le terrain et de façon durable. En 1991, sur un effectif de 149 opérations de fouilles, dans le sens le plus large, seulement 26 d’entre elles, soit 17% de l’effectif total, concernent l’époque romaine. A partir de l’année suivante et jusqu’en 2008, pendant plus de quinze ans, la part des opérations touchant l’Antiquité va osciller à un haut niveau, entre 30 et 40 % (fig. 5). On observe en 2009 un tassement en terme de proportion, autour de 26%, et le nombre des opérations retrouve un niveau comparable à celui du début des années quatre-vingt-dix. Le recul n’est pas suffisant pour savoir si l’archéologie régionale rentre ici dans un nouveau cycle, moins favorable à la fouille des sites archéologiques de l’Antiquité. 95 dernières décennies. La principale critique de cette conclusion porterait sur la proportion très élevée des interventions de diagnostics, qui ne dépasseraient pas le stade de la simple évaluation, en regard des fouilles ayant pour objet d’être exhaustives (fig. 8). En effet, le nombre de fouilles, terme pris au sens strict, reste comparable avec les chiffres de l’archéologie programmée, avec 10 à 20 opérations annuelles. Le débat sur la valeur scientifique du diagnostic est loin d’être clos, il est vrai que beaucoup de ces évaluations ne mettent en évidence que des Figure 5 – Part des opérations de terrain intéressant la période de l’Antiquité en Languedoc-Roussillon aménagements agraires, fosses (S. Féret et Ch. Pellecuer DAO). de plantations ou fosses, dont la datation se résume à la seule attribution à l’Antiquité. La Archéologie de programme, archéologie préventive pratique régionale montre cependant que le diagnostic peut être assimilé à une réelle opération de fouille, productrice de Il semblait déterminant d’apprécier la contribution données nouvelles, lorsqu’il est pratiqué dans des fenêtres respective des deux principales expressions de l’archéologie territoriales investies dans la durée au rythme des opérations de terrain pour mieux cerner les caractères de la recherche d’aménagement successives. régionale dans le domaine de l’Antiquité. La comparaison des deux graphiques « opérations programmées » (fig. 6) et Il reste utile de commenter un peu plus dans le détail la « opérations préventives » (fig. 7) construits selon les mêmes figure qui envisage entre 1995 et 2009 le nombre respectif principes est éclairante. Pour l’archéologie de programme, la d’opérations de diagnostic/évaluation et de fouilles. Jusqu’en part de la recherche développée sur des sites gallo-romains 1999, le profil est celui d’un quasi-équilibre de tendances entre évolue avec une relative constance autour de 20 %, avec les deux catégories d’opérations, avec l’idée caricaturale des variations positives jusqu’à 35%, soit 10 à 20 opérations qu’à chaque campagne de sondage suivrait ou presque une annuelles. L’image est bien différente pour l’archéologie fouille. L’inversion de tendance, au bénéfice des diagnostics, préventive, avec une part de l’ordre de 40 % pour les quinze se manifeste contre toute attente à partir de 2000 et non pas années de référence, soit 40 à 70 opérations annuelles. Il faut d’ailleurs signaler que les modifications législatives de 2001-2003 n’ont en rien modifié la tendance, ce haut niveau étant atteint depuis le début des années quatre-vingt-dix. Peut-être plus que pour d’autres périodes, les études sur l’époque romaine doivent une part de leur renouvellement à l’activité croissante de l’archéologie de sauvetage puis préventive. L’impact de cette recherche « appliquée », par opposition à une recherche « fondamentale » que serait l’archéologie de programme, apparaîtrait avec plus de force encore si l’on prenait en considération les surfaces traitées, qui n’ont cessé Figure 6 – Part des opérations programmées intéressant la période de l’Antiquité en LanguedocRoussillon (S. Féret et Ch. Pellecuer DAO). de progresser durant les deux 96 Figure 7 – Part des opérations préventives intéressant la période de l’Antiquité en LanguedocRoussillon (S. Féret et Ch. Pellecuer DAO). rapide durant ces quinze années de référence. A la fin des années quatre-vingt-dix, la pratique de l’archéologie de sauvetage est prépondérante pour l’étude des sites gallo-romains et justifie l’idée d’un renouvellement des problématiques régionales. Avec le tournant du siècle, le difficile démarrage de l’archéologie préventive, qui ne permet en définitive que peu de fouilles, est compensé contre toute attente par le développement des fouilles programmées touchant de plus en plus des sites antiques. Les courbes de tendances, en fin de période, se rejoignent à un haut niveau, augurant certainement d’une meilleure complémentarité, pour la prochaine décennie, entre ces deux domaines majeurs de l’archéologie languedocienne 2. LA VILLE ET LA CITÉ À l’issue de ces quinze années de recherches de terrain, notre connaissance de l’armature urbaine régionale a singulièrement progressé, comme le montre toute une génération d’ouvrages de synthèse sur les principaux chefs-lieux de cité et sur les agglomérations secondaires (sur l’état des lieux dans la base Patriarche, (fig. 10) qui viennent remplacer les références consacrées, parfois depuis le XIXe s. Nous pensons aux volumes de la Carte Archéologique Figure 8 – L’archéologie préventive entre 1995 et 2009, avec l’évolution du nombre d’interventions de la Gaule consacrés à Nîmes d’évaluation (sondages et diagnostics) et de fouille (S. Féret et Ch. Pellecuer DAO). et Narbonne, aux publications monographiques de sites ou de quartiers pour ces deux villes, ainsi qu’aux travaux élaborés en 2001, avec le nouveau cadre réglementaire. Le niveau dans le cadre de projets collectifs de recherche (PCR). d’étiage est atteint en 2003, avec seulement 2 opérations de fouilles préventives pour l’époque romaine pour toute On peut s’interroger sur un certain manque de lisibilité de la région Languedoc-Roussillon, contre 42 diagnostics. cette dynamique de recherche en Languedoc-Roussillon. Depuis cette date, on assiste à un progressif rééquilibrage Peut-être, une part d’explication de cette faiblesse réside dans de tendances, certainement lié à une meilleure stratégie de le déploiement durant la même période d’une archéologie prescriptions toutes périodes confondues. rurale, qui s’imposait concurremment comme vecteur principal d’activité et dont les résultats se sont multipliés en Les rapports entre archéologie de programme et préventive touchant des surfaces de plus en plus impressionnantes. peuvent être résumés en utilisant les seules opérations de fouilles, entendues comme l’exploration exhaustive d’un site C’est en 2002 que paraît l’ouvrage sur les agglomérations (fig. 9). Cette mise en perspective témoigne d’une évolution gallo-romaines en Languedoc-Roussillon (Fiches dir. 2002). 97 Figure 9 – Archéologie préventive et programmée en Languedoc-Roussillon, nombre d’opérations de fouilles : de l’inversion de tendances à la convergence. (S. Féret et Ch. Pellecuer DAO). Figure 10 – Carte des agglomérations secondaires recensées dans la base Patriarche, Ministère de la Culture et de la Communication (I. Bermond DAO). 98 son territoire, des origines à l’époque moderne (1993-1995) et Lodève et son territoire du IIe âge du Fer à la fin du Moyen Âge (1997-2003). Dans une configuration bien différente, il faudrait évidemment associer à cette politique régionale le dossier de Javols, pour lequel nous proposons un développement ci-dessous. A côté de ce premier groupe, les capitales de cité de premier plan connaissent durant la période de référence des situations contrastées. Pour Béziers, seulement dix opérations ont intéressé la période romaine, et des résultats limités ne permettent pas encore d’avancées significatives pour l’histoire de la ville. On signalera que le Service archéologique municipal a été agréé dans le domaine de l’archéologie préventive en 2005, offrant de nouvelles perspectives d’activité à l’équipe constituée à partir de l’expérience de la mission archéologique créée en 1997. Plus de 75 % des opérations urbaines de la région Languedoc-Roussillon ont été réalisées à Narbonne et à Nîmes. Il est en outre intéressant de constater que la répartition en nombre entre les deux villes est équilibrée. Ce résultat peut surprendre, la capitale des Arécomiques apparaissant comme d’avantage favorisée par l’archéologie préventive régionale. Cette conclusion d’ordre quantitatif nous conduit à proposer quelques éléments de comparaison, afin de mieux comprendre ici et là les forces et les faiblesses d’une pratique. Ces premières réflexions demandent à être développées dans un cadre collectif. Cet effort peut s’avérer indispensable pour l’avenir, à un moment où l’ouverture à la concurrence dans le domaine du préventif, l’effort des institutions et collectivités consenti pour le patrimoine de Narbonne peut modifier les équilibres mis en place depuis le milieu des années quatre-vingt-dix. Cette somme qui propose un bilan actualisé de connaissances sur soixante et onze sites est le produit d’un PCR actif entre 1993 et 1999. Ce programme a permis de regrouper sous la forme de notices une documentation, parfois éparse, en mettant en évidence une hiérarchie entre ces agglomérations, leur succession dans le temps et leurs fonctions spécifiques. Si l’on exclut quelques cas, la plupart des sites ainsi traités relève de la catégorie des agglomérations secondaires, dont l’existence de plusieurs d’entre elles et le maillage serré qu’elles forment n’avaient pas été perçus par la recherche régionale. Les programmes de fouilles sur des sites de ce type, plutôt nombreux, constituent un trait marquant de l’archéologie languedocienne, bien perceptible pour la période 1995-2009. Plusieurs de ces chantiers ont un rôle structurant dans la durée, ayant valeur d’exemplarité et permettant la formation des étudiants, comme à Saint-Sauveur à Lattes, au quartier d’Ambrussum à Villetelle, au Castellas à Murvielles-Montpellier, aux Terriers à Villevieille ou au Roc de Pampelune à Argelliers. L’archéologie préventive permet d’ouvrir ou de compléter certains dossiers, comme à Bram, Peyre-Plantade (Clermont-l’Hérault), Balaruc-les-Bains ou Milhaud (fig. 11). À partir d’un corpus de 125 opérations pour la période 1995-2009, il est possible de mieux cerner l’archéologie des chefs-lieux de cité (fig. 12). Peu ou pas d’opérations de terrain ont touché Carcassonne et Lodève. L’archéologie préventive n’est guère efficiente dans des centres urbains figés pour des raisons patrimoniales ou économiques. Dans les deux cas, des projets collectifs ont été initiés de façon volontariste pour tenter de dresser un bilan et d’engager une dynamique de recherche, avec les PCR Carcassonne et Dept 11 30 34 66 Commune BRAM MONTFERRAND VILLEVIEILLE LAUDUN BRIGNON ALES ALLEGRE-LES-FUMADES GAUJAC SAINT-GILLES MILHAUD LATTES VILLETELLE ARGELLIERS MURVIEL LES MONTPELLIER AGDE BALARUC-LE-VIEUX BALARUC-LES-BAINS CLERMONT-L'HERAULT DIO ET VALQUIERES ESPONDEILHAN MAGALAS MEZE SAINT-BAUZILLE-DE-MONTMEL ARGELES-SUR-MER ELNE 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 4 1 2 1 1 2 1 1 1 1 1 2 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 2 1 1 1 2 1 1 1 1 1 1 1 1 1 2 Figure 11 – Les agglomérations secondaires ayant fait l’objet de fouilles entre 1995 et 2009 : Opérations inscrites dans la durée et interventions opportunistes. (S. Féret et Ch. Pellecuer DAO). 99 que son implantation, autour du changement d’ère, était probablement liée à la voie de Lyon à Toulouse. Une fugace occupation des IIe et Ier s. avant notre ère a bien été repérée, mais c’est sous le règne d’Auguste que l’on peut lire les premiers signes d’urbanisation. Un siècle après, le site couvre environ 40 hectares, organisé selon un réseau orthonormé, du moins en son centre installé au fond d’une petite vallée encaissée. Les sondages menés à l’extérieur de la ville proprement dite ont servi à repérer deux zones funéraires, trois carrières, un atelier de tuilier, ainsi qu’une décharge. Ceux qui ont été menés sur les piémonts ont livré des zones d’habitat, dont certaines occupées durant plus de cinq siècles. Le coeur du site a livré des domus, des thermes, un théâtre et un centre monumental, avec un forum. L’urbanisme est marqué par un lourd investissement public dès la fin du Ier s. av. J.-C. : terrassements, détournement et endiguement de la rivière, dense réseau d’égouts et caniveaux. Au IIIe s., les nouvelles constructions se font rares et le site semble peu à peu péricliter, puis abandonner le centre du vallon, qui est de plus en plus souvent inondé, pour se rétracter en piémont, sous les hameaux actuels. Une probable église paléochrétienne, associée à des sépultures y est mise au jour en 1996. Néanmoins, à la fin de l’Antiquité, le site est toujours chef-lieu de cité et devient siège de l’évêché, avant que celui-ci s’installe à Mende entre le Ve et VIIIe s. 2.1. Javols-Anderitum, la redécouverte d’une « capitale éphémère » Hors Narbonnaise, mais dans la région Languedoc-Roussillon, le site de Javols (Lozère) a fait l’objet de recherches de sondages et de fouilles chaque année de 1995 jusqu’à 2010. Le site, qui correspond à la capitale de cité des Gabales, était connu depuis le XVIIe s., mais était relativement mal appréhendé malgré les nombreuses fouilles réalisées au cours des XIXe et XXe s. A la suite des fouilles menées par l’abbé Peyre, puis par Raffaella Pierobon, le Service régional de l’archéologie a été à l’initiative d’un programme de recherche dont l’objet était l’évaluation globale du site. Ce programme, mené par Alain Ferdière et Benoît Ode de 1996 à 2004, et complété ensuite par une fouille programmée menée par Alain Trintignac, a consisté à reprendre l’ensemble de la documentation antérieure et à réaliser sondages et fouilles sur 47 secteurs du site afin d’évaluer son organisation, son étendue, sa chronologie et son insertion dans le paysage (Ferdière et al. 2009, Trintignac et al. 2011). Le site dont l’occupation aujourd’hui ne correspond qu’à un modeste village ne montre aucun vestige antique apparent, à l’exception de ceux qui ont été mis au jour lors des fouilles. Les recherches ont permis de mettre en évidence 8 % Béziers 2 % Carcassonne 13 % Javols 39 % Nîmes 1 % Lodève 37 % Narbonne Total 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 BEZIERS CARCASSONNE JAVOLS LODEVE NARBONNE NIMES Total 10 2 1 17 1 6 47 3 49 125 10 2 2 1 1 1 1 2 2 1 2 2 4 4 4 9 3 4 10 5 3 11 3 4 12 1 2 1 4 1 1 1 1 1 2 1 1 2 1 1 3 3 4 9 1 4 7 3 3 8 3 9 14 2 3 6 7 2 12 5 1 1 3 4 Figure 12 – Nombres d’opérations archéologiques menées dans les chefs-lieux de cités : le poids de l’archéologie urbaine à Nîmes et à Narbonne. (S. Féret et Ch. Pellecuer DAO). 100 2.2. Nîmes, l’expérience de l’archéologie urbaine 2.2.1. Nîmes, un investissement dans la durée (1960-1994) C’est certainement dans les années soixante que l’on doit placer les premières initiatives en réaction à une érosion incontrôlée du patrimoine nîmois, qui conduira en ce début de siècle à une archéologie préventive de haut niveau. Au cours de cette période initiale, le rôle du musée archéologique, en la personne de Victor Lassalle, a été déterminant dans le suivi des travaux urbains. Les premiers dossiers sur les domus nîmoise ou sur l’organisation funéraire aux abords de la voie Domitienne ont pu être ainsi constitués. Dans le même temps, une enquête d’ampleur était engagée sur l’enceinte augustéenne dont les résultats ont été publiés dans un supplément à la revue Gallia (Varène 1992). Il n’est pas inutile de rappeler que ces travaux fondateurs ont servi en 1989 à protéger au titre des monuments historiques l’enceinte en totalité. On retiendra la dimension symbolique de cet ouvrage qui permet de définir l’assiette de la ville antique, objet de l’enquête archéologique. Pourtant, la situation dans une ville qui se modernise durant les trente glorieuses est loin d’être maîtrisée, comme le montre le bilan peu favorable établi pour le colloque d’archéologie urbaine, à Tours en 1980 (Genty 1980). Dès les années soixante et dix, les efforts conjugués du musée archéologique et de ce qui était la « Direction des antiquités historiques » permettent d’esquisser les premières expériences d’archéologie de sauvetage. La parution d’articles relatant ces chantiers réalisés souvent dans l’urgence fonde sur des bases scientifiques cette nouvelle pratique. Dès le milieu des années quatre-vingt, les chantiers nîmois ne seront plus dirigés, à quelques exceptions près, que par des archéologues contractuels. L’un des tout premiers est conduit à l’emplacement du futur Carré d’Art, face à la Maison Carrée. Si l’idée d’un service municipal a fait long feu malgré les pressantes invites de la Direction régionale des affaires culturelles, un chargé de mission pour l’archéologie est recruté sur statut associatif. Marc Célié dirigera dans un premier temps plusieurs fouilles et non des moindres, comme sur la piste de l’Amphithéâtre ou bien place de la Maison Carrée. Son rôle et son statut professionnel évolueront, vers une gestion scientifique et technique des interventions de fouilles, et plus généralement vers une coordination de la recherche nîmoise. L’orée des années quatre-vingt-dix marque un temps de mutation, avec l’affirmation d’une archéologie urbaine qu’exprime le chantier exceptionnel de Villa Roma, couvrant près de six mille mètres carrés aux abords du Temple de Diane. Cependant, de nouvelles préoccupations se font jour à propos des terres de la plaine du Vistre, en périphérie de la ville, qui voit la réalisation de nouveaux quartiers commerciaux. L’archéologie nîmoise dorénavant sera présente dans ces zones d’aménagement en devenir, d’abord à la recherche du suburbium de la ville antique, puis dans une perspective élargie d’étude territoriale couvrant une très longue période, de la fin des temps paléolithiques à l’époque moderne. Pour répondre à ces nouvelles problématiques où interviennent des questions d’occupation des sols, d’archéologie agraire ou paléoenvironnementales, un projet collectif de recherche sera mis en place par les acteurs de la recherche locale et sera constamment soutenu par la Direction régionale des affaires culturelles. 2.2.2. Une archéologie urbaine, la pratique récente (1995-2009) La ville et l’archéologie de programme Avant d’aborder les principaux traits de l’archéologie préventive, on fera un sort à la question de l’archéologie de programme. Même si l’idée de conjuguer l’une et l’autre a pu être avancée, il faut bien admettre que peu de projets de chantier indépendant de tout aménagement urbain ont été menés dans cette ville et il s’agit souvent d’initiatives répondant à des objectifs bien définis, mais de courte durée. Dans la perspective d’un travail de thèse sur l’eau à Nîmes (Veyrac 2006), un projet de prospection sur l’aqueduc de Valz, ouvrage rétrograde qui trouverait son origine dans la ville a été entrepris ainsi qu’une opération sur le Castellum. Les recherches d’ampleur menées sur l’aqueduc alimentant la ville depuis la source d’Uzès (Fabre et al. 2000), ont motivé la réalisation de sondages dans le fort Vauban, à l’intérieur de l’enceinte romaine, mais ce sont plutôt des opérations préventives qui permettent de préciser le tracé dans les faubourgs de la ville antique. L’enceinte dite augustéenne a fait l’objet, rue de Combret, d’un sondage qui a abouti au dégagement d’une tour jusque-là inconnue, la tour Bertrand. Une autre étude autorisée a porté sur l’enceinte tardive qui défend l’amphithéâtre, à la hauteur de l’actuel palais de justice. On ne cherchera pas, en revanche d’opérations programmées sur le tissu urbain, maisons ou rues, aucune opportunité foncière n’aurait permis un tel projet. Plus généralement, il serait faux de penser que la recherche nîmoise échappe de fait à la programmation régionale. On retrouve ainsi ceux qui font l’archéologie de cette ville dans des entreprises collectives, des projets collectifs de recherche, l’un, PCR Atlas des villes de Gaule méridionale (Jean Guyon, puis Marc Heijmans dir.), à l’échelle de la Narbonnaise, et l’autre, PCR Espace rural et occupation du sol de la région nîmoise, de la Préhistoire à l’époque moderne (Laurent Sauvage, puis Jean Yves Breuil dir.), pour coordonner la recherche locale, en particulier dans les grandes surfaces explorées au sud de la ville. Monuments et mise en valeur de vestiges Durant la période retenue, notre connaissance des grands monuments nîmois a pu être complétée, sinon renouvelée grâce à des interventions archéologiques. Ces interventions accompagnent à chaque fois des campagnes de restauration à l’initiative de la Conservation régionale des monuments 101 historiques. Il en sera ainsi pour l’intérieur du temple de Diane en 1996 et 1997 ; c’est dans les années quatre-vingt que l’amphithéâtre a fait l’objet de nouvelles fouilles. Depuis 2005, avec la requalification du parvis et le lancement des travaux de restauration, le monument est réinvesti par une équipe de l’INRAP et les observations devraient pouvoir être collectées au rythme des travées traitées. L’organisation du forum est mieux connue depuis le début des années quatre-vingt-dix, avec le nouveau dessin de la place entourant la Maison Carrée, qui a justifié la réalisation d’une fouille d’ampleur. La restauration intégrale du temple, avec l’installation d’échafaudages sur les quatre faces du monument, a permis à une équipe de l’UMR 5140 Archéologie des Sociétés Méditerranéennes, Lattes-Montpellier, en quelques années de rassembler des observations inédites sur l’édifice, le seul édifice nîmois qui ait déjà bénéficié d’une monographie architecturale, sous la plume de Robert Amy et Pierre Gros en 1979. La présence de ces monuments insignes, qui attirent un très large public, ne semble pas avoir favorisé des initiatives de présentation de vestiges issus de fouilles récentes. La plupart de ces édifices publics ont été dégagés et mis en valeur anciennement et la ville vit, du point de vue du tourisme patrimonial, sur ces investissements du passé. Depuis le développement récent de l’archéologie, peu de vestiges ont échappé à la destruction après étude ou au réinfouissement. Révélateur est le cas du bâtiment à portique, daté du premier quart du Ier s. avant notre ère, découvert aux abords des jardins de la Fontaine, lors du chantier Villa Roma en 1991. Cet édifice public de type hellénistique, un des plus anciens éléments connus de la parure monumentale de la ville, n’a pu faire l’objet d’un projet de présentation. Il est conservé en sous-sol d’un immeuble, dans un volume remblayé. Depuis les années soixante, quelques tronçons de l’enceinte augustéenne ont été laissés à l’air libre à la suite de fouilles en quelques points (cité Barbes, clinique SaintJoseph, rue des Tilleuls en sous-sol d’un bâtiment…), plus ou moins accessibles pour le public. Très récemment, la tour « Bertrand » a été dégagée, consolidée et intégrée dans l’aménagement d’un jardin privé à la suite d’une opération archéologique. La tour de la place des Arènes, visible depuis la fouille de 1973-1974, a été au centre de nombreux échanges entre la DRAC et la ville de Nîmes, qui souhaitait le remblaiement de ces vestiges. Lors de la requalification de la place et à la suite des fouilles réalisées en 2005, l’option retenue a été celle d’un marquage au sol qui évoque la totalité du parcours de la courtine et des trois ouvrages présents sur la place. A été privilégiée la continuité sur un long linéaire d’un tracé enfin complet, solution satisfaisante du point de vue scientifique mais mise en oeuvre sous une forme qui n’est pas immédiatement perceptible pour le profane. On a préféré cela à la présentation d’une sorte de vestige-échantillon, isolé sur cette vaste place mais évocateur pour tous. D’autres interrogations, de la part de citoyens comme de chercheurs, ont émergé lors des fouilles de grande ampleur, à Villa Roma ou bien dans l’emprise du parking Jean-Jaurès. L’archéologie de sauvetage ou préventive a permis enfin de voir des quartiers de la ville antique sur plusieurs milliers de mètres carrés. À chaque fois, ce sont des chantiers déterminants 102 pour la compréhension de l’histoire de la ville, mais cette réponse ne suffit pas toujours pour ceux qui s’émeuvent de la disparition irrémédiable de ces pans remarquables de patrimoine antique. La maîtrise des dossiers d’urbanisme Trente après le constat alarmant fait lors du colloque de Tours, l’archéologie a trouvé sa place dans les pratiques de la construction et de l’aménagement urbain comme dans la plupart des villes de France. Grâce à la progressive clarification du cadre réglementaire, l’instruction des demandes d’autorisations d’urbanisme a pris un caractère systématique. Aujourd’hui, sur un effectif de quelque 700 dossiers annuels pour l’ensemble du territoire communal nîmois, seule une cinquantaine d’entre eux, soit 7 %, font l’objet d’une instruction détaillée. Une dizaine donneront lieu à l’établissement d’une prescription de diagnostic, soit 1 à 2 % de l’effectif initial. Un calcul basé non plus sur l’effectif mais sur l’emprise foncière donnerait certainement une image différente en terme d’exhaustivité, le nombre des « petits » permis étant toujours élevé. Selon les années, la moitié tout au plus de ces prescriptions concerne l’assiette de la ville romaine intra muros. On est encore loin de toucher à la réalité de terrain, lorsque l’on sait que plusieurs de ces projets d’urbanisme vont être abandonnés ou bien vont rencontrer des difficultés administratives, synonymes de retard ou de dépôt d’une nouvelle demande. L’archéologie préventive dans le cadre urbain est nécessairement opportuniste et fragile, dépendante de quelques projets d’ampleur, seulement quelques opérations localisées dans un secteur sensible, mais aussi des rythmes économiques et sociaux qui vont favoriser ou tout au contraire réduire le nombre de ces projets. La consommation des surfaces archéologiques On s’accorde à reconnaître un progrès de nos connaissances sur la ville antique de Nîmes grâce au développement de l’archéologie au cours de ces dernières décennies. Martial Monteil estimait dans sa synthèse de 1999 que seulement 5 à 6 % des 220 hectares de la ville du Haut Empire avaient pu être fouillés (Monteil 1999, 375). Il prenait en compte tous les travaux de terrain conduits entre 1965 et mars 1996. Nous reprendrons à notre compte l’estimation des surfaces investies à l’intérieur de l’enceinte à partir de 1995, soit un chevauchement limité à une année avec ce premier bilan réalisé dans un cadre universitaire. Entre 1995 et 2009, ce sont environ 4 hectares cumulés qui ont fait l’objet d’une opération de diagnostic. Seulement la moitié de cette superficie (1,9 ha) a été exploitée au-delà de ce stade d’évaluation, dans le cadre de fouilles, la moitié restante correspond pour l’essentiel à des terrains exempts de vestiges ou dont l’intérêt ne justifiait pas pour le Service régional de l’archéologie une intervention plus exhaustive. La recherche de solutions techniques de fondation n’a concerné qu’une emprise d’environ 0,25 ha soit 12 % des surfaces seulement sondées. Durant ces quinze années productives à bien des égards, les efforts de la recherche nîmoise ont porté sur 0,8 % (fouilles exclusivement) à 1,9% (diagnostics inclus) de l’assiette intra muros de 220 hectares ; de 1,4 à 3,3 % de la surface urbanisée dans l’Antiquité, que l’on estime à 130 hectares. Pour accorder l’ensemble des chiffres à notre disposition, on peut conclure que nos connaissances sur le tissu urbain antique sont basées sur un échantillon de surface inférieur à 10 % de l’emprise ceinte par le rempart (fig. 13). C’est à cette même conclusion que parvient J.-Y. Breuil, dans une synthèse récente, en proposant 7,7 % de la surface enclose évaluée et 1,6 % fouillée (Breuil 2011). Cet échantillon est en outre inégalement réparti, comme on le verra plus loin, avec un plus grand nombre d’interventions de fouilles dans la moitié ouest de la ville que dans le secteur oriental, quasi inaccessible aujourd’hui. Celui-ci correspond à l’écusson médiéval, dont le bâti est sanctuarisé par la protection patrimoniale « secteur sauvegardé ». 2.2.3. Grands chantiers et progrès de la recherche de terrain On laissera à d’autres formes de réflexion collective, comme le projet de volume nîmois de la collection des Atlas des villes de Gaule méridionale, le soin d’établir les acquis majeurs de Figure 13 – Carte des opérations archéologiques à Nîmes depuis le début des années soixante (d’après Monteil et Houix complété et source Patriarche, I. Bermond DAO). 103 ces dernières décennies d’intense travail de terrain pour notre connaissance de l’agglomération. On brossera ici un rapide tour d’horizon des progrès réalisés, en utilisant le découpage topographique employé par Martial Monteil, dans sa synthèse sur l’urbanisme nîmois (Monteil 1999). Nouvelles données sur l’enceinte augustéenne Depuis l’ouvrage monographique de P. Varène (1992) qui permettait de fixer environ 25 % du tracé global de l’enceinte, quatre opérations ont été réalisées entre 1992 et 1996 sur le monument linéaire de quelque six kilomètres. La décennie qui suit, jusqu’en 2009, a permis de compléter ce dossier à l’occasion de diagnostics (rue du cirque romain, parking Jean Jaurès). Des découvertes majeures ont été faites dans le cadre d’un sondage (tour « Bertrand », rue de Combret) mais surtout sur la place des Arènes (fouilles Arènes-EsplanadeFeuchères), avec la découverte d’une « porte des eaux », passage en barbacanes dans la courtine. Le service régional a suivi plusieurs demandes de permis de construire, en particulier pour des propriétés privées du Mont Cavalier, qui ont débouché sur des solutions techniques sans intervention de sondage. intensément occupé jusqu’à nos jours. En contrepoint, malgré la modestie des emprises de fouilles, représentant moins de mille mètres carrés, l’exploration conduite place du Chapitre (2005), à l’ombre de la cathédrale, a apporté une inattendue séquence stratigraphique pour l’Antiquité tardive et le haut Moyen Âge. On rappellera enfin les fouilles liées au projet Arenes-Esplanade-Feuchères, qui, en 2005, ont porté sur plus de 4 000 m2, sur la place des Arènes. Mais, il s’agit d’un espace urbain de transition, largement ouvert avec la destruction des constructions médiévales et modernes, lors de la mise en valeur du monument à partir du XVIIIe s. Le Centre-Ouest Ce secteur qui est le résultat du développement de la ville depuis le début de l’époque moderne, articulé autour du cours neuf devenu avenue Jean-Jaurès, a concentré 37 opérations archéologiques jusqu’en 1996. De cette date à 2009, 6 nouvelles opérations de fouilles confirment une poursuite d’activité liée à la continuité de l’intérêt des aménageurs publics et privés pour ces quartiers. La surface cumulée des fouilles est de l’ordre de 1 hectare, soit la moitié de ce qui a pu être fouillé dans la ville intra muros de l’époque romaine pendant ces quinze dernières années. Les collines et l’amorce du piémont Ce vaste théâtre topographique, qui se développe dans la partie septentrionale de la ville a fait l’objet de 23 opérations de terrain entre 1960 et 1996. Ces fouilles ont révélé des quartiers fortement urbanisés, parfois dès l’époque républicaine, et qui connaissent une désertion précoce, durant le Haut Empire. Ce secteur a plus particulièrement polarisé l’activité archéologique dans les deux dernières décennies de cette période, de grandes propriétés sur les versants du Mont Cavalier devenant l’enjeu majeur de la promotion immobilière locale. Par contraste, depuis le début des années deux mille, peu de projets ont touché ces quartiers, le dernier d’importance a concerné la rénovation du collège Révolution, avec 600 m2 de fouille (2000). Dans un autre secteur jusque-là en sommeil, au nord du boulevard Gambetta, entre la colline de la Lampèze et le Mont-Duplan, une opportunité d’intervention, suite à la création d’un tronçon de rue, a permis de dégager, sur plus de 2 000 m2 ce qui est certainement une des plus grandes domus connues à ce jour à Nîmes, dotée d’un vaste jardin (fouilles Clerisseau 4 et 5, 2008). L’exceptionnelle opération du parking Jean-Jaurès, en 20062007 (fig. 14) a permis de saisir, sur 6 500 m2, le passage de la proche campagne de l’époque protohistorique et républicaine à un quartier de la ville alto-impériale, lorsque ces terres se retrouvent inscrites à l’intérieur de la nouvelle enceinte. Ce processus avait été déjà appréhendé, sur moins de 2 000 m2, lors de la fouille de la résidence Le Florian (1998) (Monteil et al. 1999). Un autre apport de la fenêtre offerte par le projet de parking est de redonner le détail de la trame des rues et de la diversité des maisons urbaines, dont le niveau de luxe varie à l’intérieur même des îlots mais aussi avec le temps. Des observations du même ordre ont pu être faites en divers points, sur des surfaces bien plus limitées (5, rue de l’Oratoire, Rue Porte de France, rue Godin, rue Benoît Malon…). L’écusson médiéval Dans cette surface d’une trentaine d’hectares cernée aujourd’hui par des avenues, ce sont 13 opérations archéologiques qui sont recensées jusqu’en 1996. Au-delà de cette date, la recherche nîmoise doit se contenter de fenêtres d’observations des plus réduites. Rue Corcomaire, à côté de la Porte d’Auguste, les sondages de diagnostic ont livré, à quelques dizaines de centimètres sous le sol actuel, quelques données sur une domus du Haut Empire (2004), confirmant la faible dilatation des horizons archéologiques pour le premier millénaire de notre ère dans ce secteur 104 Figure 14 – Un grand chantier nîmois : les fouilles préalables à la construction du parking Jean-Jaurès (2006) (Ch. Pellecuer). Un autre projet de parking, place d’Assas, près de la Maison Carrée, a permis de compléter l’enquête entreprise depuis les années quatre-vingt sur la topographie du centre civique (2003, fouille de 990 m2). La proche campagne Le développement tant quantitatif que qualitatif des interventions en périphérie de la ville demande de nouvelles approches, différentes de ce qui avait pu être fait dans la synthèse sur Nîmes antique paru en 1998. Les notions de périurbain, de suburbium, peuvent être aujourd’hui envisagées à partir d’une documentation répartie sur une distance de plusieurs kilomètres depuis la muraille de la ville. Pour la période retenue pour ce bilan, la question des nécropoles, des zones funéraires (Bel et al. 2007) peut cependant être évoquée, comme un point commun avec le travail fondateur de Martial Monteil. Le tracé de la voie Domitienne aux abords de la ville fait l’objet d’une attention particulière. La branche qui vient de l’ouest n’a pas livré de nouvelles concentrations de sépultures gallo-romaines, mais on localise dans l’actuelle rue du Puech du Teil (1995) un monument associé à la voie, un arc monumental. L’occupation funéraire de la branche à l’est de ville, en Direction de Beaucaire, est mieux connue, depuis les abords de la porte d’Auguste (ZAC des Carmes 3, 1997) et tout le long de ce tronçon rectiligne, jusqu’à l’actuel boulevard périphérique (Le silo, route de Beaucaire 1995, 54 route de Beaucaire 2008). Au sud de la ville, une voie antique qui vient rejoindre la voie Domitienne à la hauteur de la porte dite du Cadereau, a attiré des enclos funéraires le long de son tracé. L’un d’eux, fouillée sur 450 m2 au 78, avenue Jean-Jaurès (2003), sert de point de départ à un ouvrage de synthèse à paraître, sous la direction de Valérie Bel, sur cette nécropole urbaine jusque là mal perçue. 2. 3. Narbonne, acquis et difficultés de l’archéologie dans la capitale provinciale 2.3.1. Histoire de la recherche 1960-1994 C’est le volume 12 de la collection de la Carte archéologique de la Gaule romaine (Forma Orbis Romani), paru en 1959 et consacré à l’Aude, qui offre un premier état des lieux sur les découvertes effectuées à Narbonne sous la plume d’Albert Grenier. Celui-ci a bénéficié de la collaboration de Philippe Héléna, conservateur du musée archéologique et auteur de l’ouvrage sur « les origines de Narbonne ». Dès 1954-1955, Louis Poncin et Max Guy réalisent des sondages à la Nautique et associent leurs découvertes à de probables installations portuaires. Dans les années soixante, Yves Solier, chercheur au CNRS qui jouera aussi le rôle de conservateur auprès du musée archéologique de la ville, s’investit dans des interventions de terrain, à l’occasion de travaux d’édilité ou de construction, qui permettent des observations partielles sur des domus et leurs mosaïques (rues Suffren et Jacquart, Beranger et Chanzy…). Il intervient dans le secteur de l’amphithéâtre (1963-1964), secteur qui avait été exploré au XIXe s. et surtout malmené en 1950 lors de la construction d’une ensemble HLM. Il poursuit l’exploration des galeries de l’horreum (19671968), qui est classé au titre des monuments historiques depuis 1961. Au nord-est de la ville en 1966, rue Garibaldi, lors de la pose d’une conduite de gaz, sont découvertes trois salles formant la partie en sous-sol d’un ouvrage antique de nature indéterminée. La décennie suivante voit la tenue d’un important colloque en 1972 sur Montlaurès et les origines de Narbonne, qui marque un renouveau d’intérêt de la part de la communauté scientifique et dont les actes sont publiés en 1973 par la Fédération Historique du Languedoc méditerranéen et du Roussillon. Cette période voit aussi la création du Groupe de recherches archéologiques du Narbonnais (GRAN), le principal acteur de la recherche locale jusqu’au développement de l’archéologie préventive. De nouvelles données sont collectées à la suite de travaux urbains : en 1978, à l’angle sud-est de la place Bistan, un sauvetage urgent conduit par Yves Solier permet « une première stratigraphie de la ville ». Les premiers sondages sont entrepris en 1974 au Clos de la Lombarde, en préalable à la réalisation d’un projet de construction publique. Des interventions sont réalisées par André Bouscaras lors de dragages à Port la Nautique. La grande affaire, d’un point de vue archéologique, durant les années quatre-vingt, reste le chantier de fouille du Clos de la Lombarde, qui est devenu propriété du ministère de la Culture. Une recherche programmée, menée pour l’essentiel dans un cadre associatif grâce à Raymond et Maryse Sabrié, permet d’offrir une vision exceptionnellement détaillée sur un quartier de la ville, avec une entreprise qui a conduit à l’étude exhaustive d’un îlot urbain. Dès 1991, une importante exposition sur les peintures murales de ce site est présentée à Narbonne, à Nîmes en 1992 et au musée du Luxembourg à Paris en 1993. En 1995, trois salles dédiées aux découvertes du Clos de la Lombarde sont aménagées au musée de Narbonne. La politique de suivi des chantiers en ville est toujours à l’ordre du jour, avec une certaine amplification sous la forme d’interventions d’urgence. Ainsi, les séries céramiques les plus précoces connues à ce jour, déterminantes pour la compréhension des origines de Narbonne sont recueillies lors du chantier de la future Gendarmerie (1981). La même année, 9 rue Descartes, entre le Clos de la Lombarde et l’amphithéâtre, est mis au jour un pavement d’opus sectile. En 1984, rue Cuvier, dans l’emprise de la ville tardive, est établie une séquence d’occupation, sur environ six mètres de puissance sédimentaire, débutant à l’époque républicaine. Une nouvelle structure associative, qui démontrera rapidement son dynamisme est créée en 1989, l’Association Narbonnaise de Travaux et d’Etudes Archéologiques Subaquatiques (ANTEAS), de Jean-Marie Falguéra. Elle intervient par exemple sur le site inondé du boulevard Malard, après la découverte de nombreux fragments d’amphores lors de la pose d’une canalisation et reconnaîtra à la cote 0 NGF un lit d’amphores emboîtées, 105 datable du Ier s. avant notre ère. Ces initiatives bénévoles contrastent avec l’absence d’opérations de sauvetage négociées par la Direction des Antiquités. Il faut attendre le début des années quatre-vingt-dix pour voir les premiers chantiers d’évaluation qui sont confiés à des archéologues contractuels, à la Nautique (1990), puis à SaintLoup (1991), à l’emplacement du Théâtre sur les rives de la Robine. Ce diagnostic donne lieu à la première publication liée à une opération de ce type menée à Narbonne, dans un numéro de la revue Archéologie en Languedoc (1992). Dans le quartier du Bourg, l’extension du centre hospitalier, à côté de l’église Saint-Paul, justifie la réalisation de deux campagnes de fouilles en 1992, sur une surface de 1 000 m2. En 1994, l’archéologie de sauvetage trouve sa place dans le suivi des chantiers de la ville, avec une évaluation Boulevard de 1848, une surveillance de travaux rue Calas et une intervention à l’angle des rues Baudin et Louis Blanc. Elle permet d’observer sur une surface de 200 m2, réduite par la présence de caves, des vestiges de constructions, dont les plus anciens sont d’époque républicaine, jusqu’à une profondeur de 7,5 m. Boulevard Frédéric-Mistral (1994), sur 400 m2, une autre de ces opérations de sauvetage a conduit au dégagement de l’église Saint-Félix, dont le premier état est daté du milieu du Ve s. L’association ANTEAS se charge de la fouille d’un puits antique, boulevard De Lattre de Tassigny et le chantier programmé du Clos de la Lombarde se poursuit. 2.3.2. La pratique récente de l’archéologie urbaine à Narbonne C’est donc bien à partir du milieu des années quatre-vingtdix, que le service régional de l’archéologie prend la mesure du retard de l’archéologie urbaine à Narbonne, en regard de l’intérêt majeur de l’étude de cette ville et de l’évolution des pratiques d’intervention au niveau national. Trois zones majeures de sensibilité archéologique peuvent être définies, avec l’emprise de l’agglomération antique, les secteurs de la Nautique et de Montlaurès. Des agents du service régional de l’archéologie réaliseront quelques interventions d’évaluation (Pierre-Arnaud de Labriffe en 1999, Dominique Orssaud et Guy Pouzolles en 2001). La période considérée voit se constituer une nouvelle génération de chercheurs, avec de nombreux responsables d’opération de l’AFAN, puis de l’INRAP, parmi lesquels Olivier Ginouvez ou plus récemment Véronique Canut. Dominique Moulis, qui est intervenu dans le cadre de nombreux sauvetages menés par le GRAN, est engagé par le Service Culture de la Ville et conduit à son tour de nombreuses opérations dans la ville. Eric Dellong qui est l’auteur du volume sur la ville de la collection de la Carte Archéologique de la Gaule et d’une thèse en 2006 (Dellong 2006) a tenté de mettre en place un SIG concernant la commune de Narbonne. Pour sa part, Corinne Sanchez qui a participé à de nombreux chantiers narbonnais, travaille un temps au Service Culture de la ville (1998-2000), avant de mener à bien une thèse remarquée sur la période républicaine à Narbonne et sur le processus de romanisation (Lyon 2003). Aujourd’hui 106 chercheur au CNRS, elle anime un important programme sur le système portuaire de la capitale provinciale. Entre 1980 et 1994, lorsque la pratique est plus celle d’un suivi des chantiers et d’interventions dans l’urgence, on recense treize opérations autorisées, qui ont apporté des résultats intéressant la ville antique. Entre 1995 et 2009, ce sont cinquante-trois opérations qui ont lieu en relation avec des projets urbains, dont douze fouilles. Ces différentes opérations urbaines représentent environ une surface de 1,5 ha pour une ville évaluée à 136 ha lors de son extension maximale, étendue à 400 avec les nécropoles et à 17,5 ha pour sa superficie réduite (Sanchez et al. 2011 : 213) (fig. 15). On peut noter que trois chantiers représentent les deux tiers des surfaces étudiées, avec la fouille programmée du Clos de la Lombarde (3 500 m2), les chantiers préventifs de la Médiathèque (1 532 m2), en 2001, et du quai d’Alsace (5438 m2), en 2008. Ces chiffres indiquent tout à la fois les progrès de l’archéologie préventive, avec des emprises jamais atteintes jusque-là, mais aussi la contribution significative de l’archéologie de programme à notre connaissance de la ville. Il est intéressant de constater que cette caractéristique de la recherche locale, conjuguant ces deux champs de l’archéologie, semble être pérenne. Même si le chantier du Clos de la Lombarde n’est plus actif aujourd’hui, l’achèvement des publications et la réflexion sur l’aménagement du site étant maintenant les priorités (en dernier lieu, Sabrié 2011), un autre projet d’ampleur a pris le relais sur le thème du système portuaire. Peut-être plus que pour tout autre ville, la question de la géographie antique est déterminante pour l’étude de Narbonne, pour confronter l’histoire de la colonie aux évolutions de l’Aude et du littoral lagunaire. Les travaux de Paul Ambert, dans les années quatre-vingt-dix (en dernier lieu, Ambert 2000) intéressent directement la topographie urbaine, insistant sur le caractère en grande partie artificiel du cours de la Robine, en l’absence d’un paléochenal würmien, un canal qu’il faudrait mettre en relation avec la création de la colonie ou la présence à proximité immédiate de l’agglomération d’un plan d’eau, qui perdure durant toute l’Antiquité (fig. 16). 2.3.3. Les chantiers archéologiques dans la ville (1995-2009) Au cœur de la ville, la « cité » Comme pour la plupart des centres urbains anciens, ce secteur ne connaît que peu de transformations. Depuis 1995, on recense seulement trois opérations, dont l’importance n’est pas à négliger. Elles ont permis d’établir des stratigraphies inédites ainsi que des relevés précis concernant le centre public de l’agglomération. Ces opérations participent d’une dynamique de recherche mise en place par R. Sabrié et le GRAN. Figure 15 – Carte des opérations archéologiques à Narbonne d’après les données de la base Patriarche, Ministère de la Culture et de la Communication (G. Sachot et I. Bermond DAO). En 1997, des travaux de réseaux sur la place de l’Hôtel de ville ont permis d’observer le grand collecteur et les différents niveaux de roulement, datés jusqu’au Ve s., de la voie Domitienne, qui est aussi un axe viaire majeur de la ville. La même année, une nouvelle intervention sur l’horreum a vu la réalisation de deux sondages et de compléments de relevés, dont un repositionnement du monument sur le fond cadastral. En 2003, un autre sondage, place Bistan, a concerné l’emprise du forum. Hors les tentatives de restitution de l’enceinte dite « tardive » publiées dans le volume narbonnais de la Carte Archéologique de la Gaule (Moulis in Dellong 2002, 140 et sq.) les récents travaux de terrain, comme en 2003 et 2006 (rue du Capitole, avenue Maréchal Foch et boulevard du général de Gaulle) n’ont pas permis de préciser le tracé et la datation de l’ouvrage. 107 Quartiers nord et est Ces secteurs de la ville romaine sont urbanisés à partir de l’époque augustéenne. On trouve au nord le chantier du Clos de la Lombarde, fenêtre de fouille exceptionnelle et fil continu de la recherche sur la ville antique pendant plusieurs décennies. C’est aussi dans ces quartiers que l’on recense le plus grand nombre d’opérations d’archéologie préventive, avec une quinzaine de chantiers depuis 1995. L’essentiel correspond cependant à des diagnostics et il n’y a encore que peu de fouilles. Les projets immobiliers sont de faible ampleur, 600 à 800 m2 pour les plus importants. Dans de nombreux cas, des solutions techniques, demandant des remblaiements et le respect de cotes de terrassement, ont été retenues par le service régional de l’archéologie comme alternative à la fouille. des bains (rue Kennedy), avec un dispositif d’hypocauste et la reconnaissance d’un apodyterium. Les vestiges de l’amphithéâtre ont été découverts dans le quartier est au début du XIXe s. et dont un plan a été levé en 1839, ont été observées successivement en deux points proches. Une intervention en 2002, motivée par le projet d’agrandissement d’une maison d’association, a confirmé l’exactitude du plan ancien et permis de réaliser un positionnement sur le fond cadastral actuel. En 2003, une construction individuelle a nécessité une opération de diagnostic grâce à laquelle le bon état de conservation des vestiges du monument a pu être vérifié et des éléments de datation apportés pour placer l’édification du monument dans le dernier quart du Ier s. de notre ère. Quartiers occidentaux Ces travaux de terrain confirment la vocation résidentielle de ces quartiers. Des sols luxueux ont été découverts en plusieurs points. À la hauteur de la rue Jacquard, sur une longueur d’environ 50 m, des pièces d’habitation aux sols de mosaïque et d’opus sectile sont en relation avec une galerie entourant un jardin. On peut évoquer d’autres aménagements de confort, comme un bassin (rue de Catalogne), ou même Ce secteur de la ville, placé dans la boucle de la Robine, n’a guère été investi par la recherche archéologique depuis le XIXe s., même si l’on a signalé de multiples découvertes lors de la construction de la Gare et d’aménagements réalisés plus récemment. Pour la période retenue dans le cadre de ce bilan, il n’y a encore que peu d’interventions (21 quai Figure 16 – Vue de Narbonne, le site de la ville antique : on distingue en premier plan, jouxtant le cimetière le chantier archéologique du Clos de la Lombarde et à l’arrière plan, le coude formé par le tracé du canal de la Robine (M. Olive, Laboratoire d’Arts Graphiques, DRAC PACA). 108 d’Alsace, rue Lamartine, rue des Passerelles…). Elles sont cependant déterminantes pour l’approche de ce quartier que l’on découvre si particulier et l’on y trouve les plus importantes surfaces de fouilles ouvertes dans la ville. Le chantier archéologique lié au projet de construction de la Médiathèque (1999-2000), entre les boulevards Frédéric Mistral et Léon Augé, à l’est du quartier offre l’image d’un urbanisme encore résidentiel. Sur une emprise de 1 000 m2, les premières traces d’occupation reconnues remontent au début du Ier s. avant notre ère, sous la forme de fossés et de drains. On observe par la suite un découpage de l’espace à l’aide d’alignements d’amphores placées verticalement, et à l’époque augustéenne, l’évolution rapide de l’occupation du secteur, avec une voie et les aménagements à caractère luxueux de trois grandes domus. Grâce à une intervention sur plus de 5 000 m2, au 19/20 quai d’Alsace (2008), en bordure de la Robine, une vocation artisanale et commerciale peut être attribuée à ce quartier. L’occupation débute à l’époque augustéenne avec les premières voiries. Des bâtiments sont construits à partir du milieu du Ier s. ; les cellules de taille identique d’un grand édifice sont interprétées comme des boutiques. La présence de canalisations et de bassins est certainement à mettre en relation avec des activités artisanales (tanneries ?). Les nécropoles de la ville Les opérations les plus récentes sont localisées à la sortie nord de la ville, à proximité du tracé de la voie Domitienne. Elles ont porté sur les marges de la nécropole reconnue de part et d’autre du boulevard de 1848 (Résidence Roca 2008, rue Francis de Pressensé 2009…). Plusieurs de ces opérations n’ont pas livré de sépultures, cette absence de découvertes est loin d’être dépourvue de signification. Elle est peutêtre liée à l’organisation même de la zone funéraire, qui se présenterait sous la forme de groupes distincts de sépultures et non comme une vaste nécropole continue. Le quartier médiéval du Bourg, au sud du canal de la Robine, recouvre la nécropole méridionale de la ville, au carrefour de la voie Domitienne et de la voie d’Aquitaine. L’opération la plus importante, sur 1 600 m2, dans l’emprise de l’HôtelDieu (centre hospitalier général, 1996), a livré, pour la phase de l’Antiquité, quelques incinérations, dont l’une est datée plus précisément de la seconde moitié du Ier s. de notre ère. Ont été reconnues les fondations d’un mausolée circulaire et d’un bâtiment à trois pièces. « le grand port de toutes les Gaules » Depuis le début du XXe s., les recherches sur le port de Narbonne sont influencées par la théorie des avants-ports, liés à la ville par le fleuve Aude, évoluant dans le temps en fonction des transformations du cours d’eau et de son embouchure. Les recherches de la période 1995-2009 ont confirmé le rôle de débarcadère du site dit de Port la Nautique , au nord de l’étang de Bages et de Sigean. L’abondance et la diversité des mobiliers, en particulier les amphores, permettaient d’envisager jusque-là cette interprétation. Elle a été heureusement vérifiée grâce aux découvertes d’installations portuaires réalisées lors des fouilles subaquatiques de l’équipe d’ANTEAS entre 1998 et 2004, dans le secteur du quai de la Société Marseillaise de Crédit. À partir de 2005, est engagé un projet collectif de recherche sur la topographie portuaire de Narbonne, sous la direction de Corinne Sanchez et de Marie-Pierre Jézégou. Il donne lieu au cours des premières années à la mise en place d’un SIG (Julien Cavero), à des prospections de divers types dans les étangs de Bages et de Mateilles, dans les secteurs de Port la Nautique, de Mandirac et du Castellou, qui débouchent sur des sondages en 2008 et 2009. Au moment de la rédaction du présent bilan, ce projet collectif, avec la réalisation d’opérations de terrain d’envergure, répond aux ambitions affichées initialement de renouveler une problématique dont les grandes lignes n’avaient guère été modifiées depuis un siècle. L’existence d’un port fluvial est une question qui a été débattue, mais sans conclusion définitive faute de données de terrain probantes. Dans les années quatre-vingt-dix, après les observations faites en aval de l’agglomération, dans le secteur de Saint-Loup, où un mur de berge et des accumulations d’amphores ont été découvertes, l’hypothèse d’un site de débarquement a été envisagée. Les entrepôts fouillés le long du quai d’Alsace, dans la boucle de la Robine, peuvent signaler un autre point de rupture de charge. Cette interprétation a été aussi discutée pour le site du boulevard Malard (2005), où un grand nombre d’amphores, estimé à plus de deux mille, sont couchées en lit sur une vaste étendue pour servir au drainage d’une zone humide. 3. CAMPAGNES ET PRODUCTIONS AGRICOLES L’approche du monde rural antique durant ces 15 dernières années a radicalement changé d’échelle. On est passé des grands réseaux structurants de la centuriation, des expériences mêlant prospections et constructions théoriques (programme européen Archaeomedes), des synthèses inter-régionales pour privilégier à nouveau les études micro-régionales. La multiplicité des opérations d’archéologie préventive avec son volume d’informations, souvent discontinues, complexifie leur analyse. Dans ce contexte, seules trois des cités régionales ont un territoire connu pour lesquelles des équipes structurées collationnent les données et permettent de tisser du lien entre ville et campagne. Deux approches apparemment antinomiques ont permis d’accéder à des données fiables, géoréférencées et suffisamment nombreuses pour sortir de l’anecdotique. Sur le territoire de Nîmes, c’est sans doute la liaison directe entre les prescripteurs et les équipes de terrain qui ont permis une approche raisonnée des opérations. Les prescriptions de diagnostics sont sous tendues par une démarche scientifique et elles sont directement analysées grâce à un PCR qui intègre les données dans une réflexion globale. Un facteur décisif, est la stabilité des chercheurs regroupés dans ce PCR, qui permet un travail de fond dans la durée. Plus au sud-ouest, ce sont les cités de Béziers et de Lodève 109 qui ont connu un regain d’intérêt à travers les dossiers sur l’habitat rural et les pratiques agricoles. La qualité des équipes chargées du dossier de l’A75, l’importance des opérations, tant de diagnostic que de fouille, ont permis ici encore de renouveler les approches du territoire. Dans ce cas, c’est le riche héritage des données de prospection qui a dirigé les choix des secteurs objet de l’enquête de terrain. Ils se sont avérés pertinents tout en amenant des données inédites sur l’environnement proche des établissements et en précisant leur fonction. 3.1. Formes de l’habitat rural dispersé En préambule, il faut évoquer les trois numéros des « Formes de l’habitat rural en Gaule Narbonnaise » (HARUR), publiés en 1993, 1994 et 1996 sous la coordination de Christophe Pellecuer. Que de chemin parcouru depuis, il suffit de revisiter les fiches publiées concernant le Languedoc-Roussillon. Les seuls plans de ferme ou de villa, alors suffisamment dégagés, sont encore peu nombreux et concernent les premières grandes fouilles préventives : l’autoroute entre Nîmes et Arles pour le site du Gouffre des Bouchers à Nîmes en 1987, Saint-André-de-Codols, toujours à Nîmes en 1995, le Petit Clos à Perpignan et enfin, simplement signalée en introduction d’un des volumes, la villa de la Domergue à Sauvian, partiellement fouillée en 1994. Une des rares fouilles programmées portant sur une villa, qui constitue une des références sur le sujet s’interrompt en 1997. Aux Près-Bas à Loupian, a pu être étudiée l’occupation d’un centre domanial du Ier s. avant J.-C. au VIe s. après J.-C., à partir de l’évolution de la pars urbana et de la partie vinicole, avec différentes phases d’aménagement du chai. Ce dossier a été rapidement inscrit dans une réflexion sur l’occupation des sols au niveau local et micro-régional, en s’appuyant sur les données de nombreuses campagnes de prospections et localement avec l’engagement de fouilles sur les sites les plus proches de la villa, comme l’édifice paléochrétien et médiéval de Sainte-Cécile (1987-1991), et l’implantation littorale du Bourbou (1995-1999, 2007), l’atelier de potier du domaine, point d’exportation de la production et lieu d’habitat durant l’Antiquité tardive. La réflexion a aussi été menée sur les capacités de production vinicole de la villa en comparaison avec la production d’amphores de l’atelier des rives de l’étang de Thau (Pellecuer 2000). Des progrès considérables ont été accomplis pour la connaissance de l’habitat rural. Si la fouille programmée se donne le temps de la réflexion, elle a gagné ces dernières années en efficacité. L’utilisation de la mécanisation pour réaliser de vastes décapages lui apporte un nouvel espace d’analyse. La fouille de la villa de Saint-Bézard, à Aspiran, est une claire illustration de cette démarche. Le champ de la réflexion s’est étendu, avec l’insertion de la villa ou de l’exploitation agricole dans son environnement proche : chemin de desserte, parcelles de vignes ou vergers voisins, nécropole familiale… Durant la période considérée, l’enrichissement des corpus sur l’habitat rural dispersé est indéniable. Les grands projets 110 d’infrastructures linéaires tels le TGV Méditerranée dans le Gard (1995-1996), les travaux du Gazoduc/Artère du Midi (1996-1997), l’autoroute A75/A750 dans la vallée de l’Hérault et le Bitterois (1999-2009), ont tous apporté leur contribution. De nombreux chantiers de fouille produisent des plans inédits qui constituent l’apport majeur de cette intense activité. Cependant, la viticulture contemporaine et les caractéristiques parfois excessives du climat de type méditerranéen ne sont pas des facteurs favorables à la conservation des vestiges et peuvent contribuer à amoindrir l’intérêt de cette documentation. Un nombre important d’établissements agricoles fouillés est décrit comme pauvres en équipements ou aménagements, du fait de l’absence des niveaux de fonctionnement. Ces lacunes sont aussi un frein inévitable à l’analyse diachronique de l’évolution de ces établissements. D’autres n’ont fait l’objet que d’un dégagement partiel, l’intervention se limitant dans les meilleurs des cas à la fouille de quelques pièces ou de séquences stratigraphiques bien conservées et bien documentées. Ces études menées en divers points de la région ont permis de mettre en évidence quelques tendances fortes d’une évolution des établissements ruraux, dont on peut rappeler les grandes lignes. Aux IIe-Ier s. avant J.-C., on identifie des fermes à enclos fossoyés, considérées comme de tradition indigène. Elles sont composées de constructions sur poteaux, aménagées en matériaux périssables, associées à des structures fossoyées. Dans le courant du Ier s. avant J.-C., on note l’apparition de constructions en dur, avec parfois du mortier, des cuves, du tuileau dans des aires géographiques particulières, comme dans l’Agathois, ou à la périphérie de Narbonne. Les habitats aux structures plus fugaces perdurent par ailleurs. Cette phase précoce est souvent difficile à appréhender sur les établissements à longue durée d’occupation. Seule, la présence « résiduelle » de mobilier céramique ou monétaire signale souvent cet état initial. Le deuxième temps dans cette évolution est celui de la période augustéenne, où le mode de construction en dur se généralise. C’est à partir du milieu du Ier s. après J.-C., qu’une nouvelle étape d’investissement touche la pars rustica qui est dotée de chais de vaste superficie, de pressoirs puissants... et aussi la pars urbana avec la création de balnéaires. C’est à la fin du IIe s. et dans le courant du IIIe s. qu’une première vague d’abandon est attestée. Ce sont plutôt les petits établissements qui sont concernés, mais certains types de villas peuvent connaître le même sort. Enfin, durant l’Antiquité tardive, les établissements ruraux connaissent des destins variés. Malgré la disparition des horizons supérieurs de la stratigraphie dans les labours modernes, la pérennité de l’occupation jusqu’au Ve s., voire au VIe s., est un phénomène maintenant bien appréhendé, même s’il est parfois difficile de conclure sur la nature de cette occupation. Enfin de nombreux sites, appartenant de façon quasi exclusive à la classe des grands domaines de type villa, se maintiennent jusqu’au Moyen Âge, parfois en se transformant en pôle de peuplement. 3.2. Diversité des établissements ruraux, quelques exemples récents Dans l’Aude A Montredon-des-Corbières, en 2000, le site de Sainte Croix a fait l’objet d’un sauvetage qui a mis en évidence la présence d’une ferme de la fin du second âge du Fer et d’un établissement rural actif du Ier au IVe s. après J.-C. A Narbonne, en 2007 le diagnostic de la Coupe 3 a permis de reconnaître un habitat républicain et du Haut Empire associé à des fossés de parcellaire et des fosses de plantation. En 2009, à Carcassonne, lors d’une intervention sur le site de Lo Badarel 2, un réseau de fossés, dont certains linéaments forment un enclos, permet de reconnaître une ferme gauloise répondant à un type bien attesté dans le département depuis les travaux de prospection aérienne de Michel Passelac. Le mobilier permet de dater cet établissement entre la fin du IIe s. et le début du Ier s. avant notre ère. Un grand domaine agricole occupé entre la fin du Ier s. avant J.C. et le IVe s. après J.-C. a pu être identifié malgré un très fort arasement des structures. Il est cerné par un mur de clôture et une voie passe à proximité pour rejoindre la voie d’Aquitaine. Signalons en particulier la mise au jour d’un mausolée monumental. Toujours dans l’Aude, à l’est de Narbonne, commune de Vinassan, la fouille préventive de l’établissement agricole de la Grangette a permis de retracer l’évolution de cette ferme organisée autour d’une cour, créée au IIe s. avant J.-C., contemporaine peu ou prou de la fondation de la colonie, et qui sera occupée jusqu’au IIe s. de notre ère. Dans le Gard A Nîmes, en 2002, les installations des IIe-Ier s. avant J.-C., fouillées au Mas de Vignoles VII, comme celles étudiées à Magaille-Est, en 2004 répondent au modèle de la ferme en enclos, bien connu en France septentrionale, et dont des exemples ont déjà été signalés pour le département de l’Aude. On dispose de nouveaux plans de fermes du Haut Empire, toujours à Nîmes, comme ceux des exploitations agricoles du Mas de Mayan ou de Courbessac, qui ont été fouillées en 2001. En 2005 et 2007, les opérations archéologiques Besse II/1 et II/5 ont porté sur un établissement rural d’une certaine importance, occupée du Ier s. avant J.-C. au Ve s., qui a livré de nombreux aménagements hydrauliques près d’un chemin antique. Un aménagement lourdement fondé, dont les piliers sont formé de fûts de colonne en remploi, est interprété comme un grenier aérien. A Bernis, un vaste décapage, en 2009, a permis de mettre en évidence une ferme, au lieu-dit les Figuierasses, qui est construite en bordure d’une importante voie antique et qui s’organise autour d’une cour centrale surbaissée. Ce site vient enrichir le corpus de ce modèle d’établissement rural bien attesté dans la région nîmoise. En d’autres points du département, on peut signaler la fouille, en 1997, de l’établissement de la Roquette à Cavillargues (Gard), dont l’occupation perdure durant l’Antiquité tardive. A Beaucaire (Gard), au Mas des Tourelles, c’est principalement le secteur de l’atelier de potier qui a été fouillé durant les années 2000. Dans l’Hérault A l’est de Montpellier, à Mudaison, la fouille, en 2002, de l’exploitation agricole de Las Olivettas a permis de discerner, pour le Haut Empire, une organisation de la construction autour d’une cour excavée. Malgré le fort arasement des structures, une phase d’occupation durant les IV-Ve s. qui associe une nécropole de faible développement et un système de petits enclos a pu être identifiée. En 2007, dans le secteur du bassin de Thau, au nord de Sète, plusieurs opérations d’archéologie préventive sont venues compléter le dossier des domaines littoraux qui avait été abordé grâce à des fouilles programmées et des prospections. Ainsi, à Poussan, en 2007, la fouille de la villa de Roumèges a été l’occasion de mieux cerner l’étendue et la datation de ce site déjà inventorié. La villa se développe sur plusieurs niveaux de terrasses, cernée par un mur de clôture. Elle est desservie par un chemin, dont l’accès pouvait être fermé par un portail. On trouve de part et d’autre de ce chemin un vignoble clos. Un seul chai de dolia est avéré, un autre est proposé en l’état d’arasement des structures. Dans le cadre des opérations archéologiques liées à l’autoroute A75, entre Pézenas et Béziers, en descendant la vallée de l’Hérault, c’est la fouille du site de Montferrier à Tourbes, en 2007, qui a apporté le plus d’informations (fig. 17). Au changement d’ère, la première occupation est simplement signalée par un puits, des fosses-dépotoirs et des structures agraires. L’établissement rural se développe ensuite sur au moins 1000 m2, avec un petit balnéaire et divers témoignages de la production de vin. Au IIe s., succède un ensemble plus vaste comportant un chai et des thermes plus amples. Le chai est agrandi encore une fois pour contenir une cinquantaine de dolia à la fin du IIe s. Plus loin sur le tracé autoroutier, à Valros, l’exploitation vinicole du Renaussas présente plusieurs phases pour un cellier, avec pressoir et bassin, datées entre le Ier s. et le IIIe s. après J.-C. Au sud-ouest de Béziers, près de la voie Domitienne, en 2006, le diagnostic des Fangasses a livré les restes d’une villa occupée entre la fin du IIe s. avant J.-C. et le Ve s. Aménagée en terrasses et équipée d’un moulin, elle peut correspondre à un domaine aristocratique, si l’on tient compte des découvertes réalisées comme de la mosaïque, du porphyre ou des bijoux. Sur la même commune, en 2007, le diagnostic de Bastit a livré un établissement rural inédit du Haut Empire et un chemin à ornières inséré dans la trame du cadastre dit Béziers A ; Non loin, à Corneilhan, au lieu-dit Saint Sernin, c’est également la partie orientale d’une villa avec plusieurs bâtiments artisanaux du Haut Empire qui a été retrouvée. Elle est organisée autour d’une grande cour centrale qui a été fouillée et a livré une occupation durant l’Antiquité tardive. En 2008, l’opération préventive menée ZAC de la Courondelle à Béziers a porté sur la partie ouest du site de la 111 Figure 17 – Fouille d’un établissement rural du IIe s. de n.è. sur le tracé de l’A75, chantier de Mont Ferrier, commune de Tourbes (Michel COMPAN, Inrap, © M.R.W. Zeppeline Provence). fin de l’Antiquité mis au jour lors d’une première tranche de fouille. L’établissement a pu ainsi être observé sur 3000 m2 et présente une organisation à cour centrale. Créé à la fin du IVe s. ou au début Ve s. après J.-C., il est encore en activité au VIe s. En 2009, un autre diagnostic dans la même ZAC a permis d’identifier de façon partielle les vestiges de trois établissements à vocation viticole couvrant la période du IIe s. avant J.-C. jusqu’au VIe s. Toujours en Biterrois, commune de Sauvian, en 2008-2009, la fouille d’un petite exploitation viticole, au lieu-dit La Lesse-Espagnac, a permis de dégager la quasi-intégralité de l’emprise bâtie. Occupé du milieu du Ier s. avant J.-C. jusqu’au début du IIIe s., cet établissement possède un espace résidentiel avec une partie thermale et une partie productive composée de plusieurs celliers à dolia et cuves. La ferme est bordée de plantations arbustives au sud et de vigne à l’est. Cette exploitation est à faible distance de l’importante villa de la Domergue fouillée dans les années quatre-vingtdix. A Nissan-lez-Ensérune, au lieu-dit Les Neffes Hautes, un diagnostic a montré la présence d’un établissement des IVe-Ve s. après J.-C. A Saint-Thibéry (Hérault), au lieu-dit la Vière, une ferme occupée durant le Ier s. avant J.-C. et le Haut Empire a été repérée. A Puisserguier, en 1996, de la 112 villa de Moulin de Gasc, nous ne connaissons que sa longue chronologie d’occupation du IIe s. au VIe s., ainsi qu’une partie du balnéaire. A Montpellier, en 2003, un établissement rural, très arasé, a été découvert lors de l’opération Jardin de la Lironde, tranche 2. Cette exploitation, où l’eau semble jouer un rôle important, du fait de l’existence probable d’une source, ne paraît occupée que pendant le Haut Empire. 3.2. Les équipements viticoles Dans le dossier sur la viticulture méridionale publié dans la revue Gallia de 2001, une carte des principales installations de production viticole fouillées en Languedoc-Roussillon présente 12 références (Brun, Laubenheimer ed. 2001 : 92). Il est difficile aujourd’hui d’établir une liste exhaustive tant l’archéologie préventive, et de façon plus ponctuelle l’archéologie programmée, ont permis d’enrichir cet inventaire. Une grande part des fermes, villae ou même certains habitats agglomérés, en particulier dans la vallée de l’Hérault, est dotée d’équipement vinicoles : cuves à cupules, pressoir, chais. Ceci dans tous les départements de la région, hormis la Lozère. D’une cité à l’autre Dans la cité de Lodève, l’échantillonnage par la fouille de fermes, de villas, d’habitats agglomérés plus ou moins importants, montre que les unités de productions vinicoles se retrouvent dans tous ces contextes (Pomarèdes 2008). Sans reprendre exhaustivement les sites présentés, la fouille de l’agglomération secondaire de Peyre-Plantade, à Clermontl’Hérault montre la présence de vignoble dès la seconde moitié du Ier s. avant J.-C. C’est après le changement d’ère que se développe le quartier oriental « des agriculteurs », pour ne pas dire « des viticulteurs » tant le nombre d’unités vinicoles (cuves et chais) est important, de part et d’autre de la voie principale. D’autres unités sont aussi présentes en périphérie de l’agglomération. Toujours à Clermont-l’Hérault, on retrouve, en 2004 dans la fouille de la Madeleine II, un petit groupement d’au moins six exploitations agricoles, le long d’une voie, essentiellement des Ier-IIe s. après J.-C., avec pour chacune des cuves, des pressoirs et des celliers. A l’Estagnol, un établissement antique est installé lui aussi de part et d’autre d’une voie majeure. Un important bâtiment avec trois pressoirs à levier, une série de cuves, de pressoirs et de chais existe dès le Haut Empire. Il est abandonné durant le IIe s. et réoccupé aux Ve et VIe s. L ‘exceptionnel état de conservation des vestiges a permis d’observer la margelle des cuves à décantation et reconstituer la circulation du moût depuis le pressoirs vers la cuve à travers une petite conduite en plomb. Dans la cité de Béziers, avec la villa de Vareilles, à Paulhan (Hérault), fouillée sur le tracé de l’A75, la production viticole est représentée par une série de chais de près de 350 dolia, entre le Ier et le IIIe s. après J.-C. C’est l’une des plus importantes villa viticole du sud de la Gaule, qualifiée de « villa pinardière ». A Nissan-lez-Ensérune (Hérault), dans la villa des Farguettes, en 1995, une partie d’un chai et la pièce de pressurage ont été identifiées. Ces derniers sont utilisés durant le Ve s. après J.-C. et l’occupation se maintient au cours des deux siècles suivants. En 1996, lors des opérations du Gazoduc-Artère du Midi, la partie équipement vinicole de l’exploitation agricole des Jurières Basses à Puissalicon (Hérault) a pu être dégagée. Elle se compose de trois cuves et d’un radier de pressoir ainsi que d’’un cellier à dolia. Une phase de l’Antiquité tardive a aussi été identifiée sur le site. A partir de 2005, la fouille de la villa de Saint-Bézard à Aspiran (Hérault) est un des rares dossiers de fouille programmée encore actif sur cette thématique. Le plan de la villa comme celui de l’atelier de potiers voisin montrent tout à la fois une évolution sur le long terme et la diversité des pratiques agricoles et artisanales. Dans la cité de Nîmes, en façade rhodanienne, sur le tracé TGV en 1996, la fouille de la villa de la Ramière, à Roquemaure (Gard) a permis de mettre en évidence une longue occupation depuis le Haut Empire jusqu’à l’Antiquité tardive. Autour de l’établissement, des fosses de plantations arboricoles régulièrement disposées permettent de reconnaître un vaste verger. Dans l’ouest de la cité, en 2008, à Montbazin (Hérault) l’exploitation agricole de La Reille, bien que très arasée, apporte des éléments de compréhension sur la partie productive de la villa, avec la présence de deux cuves et des restructurations des différents celliers qui se signalent par une superposition de dolia dans un même espace. Cette activité vinicole est attestée du milieu du Ier s. à la fin du IIe s., voire jusqu’au début du siècle suivant. Cuve et dolium C’est essentiellement sur ces deux éléments, cuve à cupule de décantation et dolium, que l’on s’appuie pour définir l’activité vinicole d’un établissement. Ce sont des éléments objectifs, que l’on peut reconnaître même quand l’arasement des vestiges a fait disparaître les sols de l’exploitation rurale. Dans l’Hérault, en 1997, sur une des opérations du tramway de Montpellier, à St-Côme et Damien, trois cuves à cupule et quelques dolia signalent la présence d’un établissement agricole du Haut-Empire. A Agde, plusieurs exploitations rurales occupées de la période républicaine au Haut Empire se signalent par des fonds de cuves : trois sont associées à un bloc de jumelle de pressoir sur le site du Bagnas/Saint-Michel (1999), cinq sont dénombrées sur celui des Barettes (2001). A Saint-Pargoire, en 1997, sur le site de Saint Marcel, a été identifié un espace de stockage à dolia. A Saint-André-deSangonis, dans la vallée de l’Hérault, les fonds de plusieurs cuves et les points d’ancrage de pressoirs ainsi qu’une zone à dolia constituent les seuls éléments matériels encore en place de cet établissement. Dans le Gard, en 1998, dans la villa de La Gramière, à Castillondu-Gard, une cuve à cupule est en relation à un radier de pressoir. Dans l’exploitation agricole des Figuierasses à Bernis (Gard), on note la présence d’une cuve et de quelques logements pour dolium. En 1995-1997, dans la villa de Mayran, à St-Victor-la-Coste (Gard), l’exploitation viticole, bien que très partiellement dégagée, livre des installations vinicoles tardives, en particulier des cuves, datées entre le IIIe s. et la fin du Ve -début VIe s. 3.3 Parcellaire, cadastration et formes du paysage On rappellera la réduction du nombre des opérations de prospection et des grands inventaires mis en oeuvre par des chercheurs spécialistes de l’Antiquité, pendant les années 1980 et 1990. Seules, les vallées de la Tave et de la Cèze, dans le Gard, et le bassin du Vidourle, à la limite avec l’Hérault continuent à être investies par ce type de programme. Déjà sensibles au milieu des années quatre-vingt-dix, l’apport de la géoarchéologie et des sciences paléoenvironnementales a pris de plus en plus d’importance. Cette approche est désormais fortement implantée dans la discipline et s’intègre souvent en amont dans la réflexion. Elle permet de pondérer les lecture des cartes archéologiques, d’affiner la compréhension du terrain et d’ouvrir des débats riches sur la complexité du paysage ou la complémentarité des productions. 113 Sur l’A75, en 1998, les fouilles de La Quintarié, à Clermontl’Hérault, ont révélé un découpage de champs et vignes se développant le long de la voie antique en direction de Lodève (Brun, Laubenheimer ed. 2001, Pomarèdes et al. 2005). En 2006-2007, sur le tracé de l’autoroute A 75 (tronçon PézenasBéziers), plus particulièrement dans la commune de Valros (Vigne de Bioaux, Le Pirou, Rec de Ligno, Renaussas) et Montblanc (Champ Redon), plusieurs sections de fouilles ont permis de mettre en perspective, sur de longues sections topographiques, l’organisation de l’espace agricole antique. Celui-ci s’appuie sur un maillage de fossés et de chemins, qui constitue l’ossature parcellaire. Les espaces définis sont essentiellement occupés par le vignoble, parfois entrecoupé de plantations de vergers (fig. 18), dans une zone où la prégnance de la centuriation du Biterrois a été mise en évidence. Cet important dossier montre toute la complexité du paysage agricole antique, où chaque élément, chemin, fossé, fosse de plantation, répond parfois à une réalité différente. Grâce aux travaux du PCR sur Nîmes et ses campagnes, les recherches sur l’organisation de l’espace rural ont permis de mettre en évidence une pérennité du réseau viaire depuis l’âge du Fer, même si celui-ci est renforcé durant la période galloromaine. Toute l’organisation agraire de la plaine du Vistre est dépendante de ces voies et des cadereaux (écoulements naturels secs se mettant en charge lors des orages). L’arrière-pays reste le parent pauvre de la recherche sur le monde rural antique, la carte des sites interprétés comme des villas et des exploitations agricoles (Fig. 3) est à ce titre éloquente. Dès que l’on passe les premiers reliefs les sites disparaissent et même si l’image est faussée par les opérations qui se concentrent dans la plaine et les abords des grandes agglomérations force est de constater que d’immenses zones ne livrent aucune trace d’établissement rural. Le sud de la cité de Narbonne, des Corbières à la partie nord du Roussillon semble délaissé : la nature « caillouteuse » de ce relief de garrigues ne laisse que peu de place à des espaces agraires facilement valorisables, alors que la plaine narbonnaise n’est pas si loin. La région située entre Lodève, le Vigan, Alès et Florac semble tout aussi dépeuplée. 3.4. Des traces agraires en général et de la vigne en particulier Les productions agricoles, plus précisément les plantations de vigne, sont désormais identifiées sur la plupart des opérations de terrain. Les grands décapages ou les interventions plus ponctuelles attestent dans toutes les plaines et les premiers reliefs d’immenses plantations de vignobles. Si les archéologues savent appréhender ce type de structure et en faire une analyse planimétrique, la question de leur datation reste souvent le parent pauvre de cet exercice. La présence de ces plantations ainsi que l’imprécision des datations associées, contribuent à alimenter cette image « de mer de vigne », qui n’est qu’une vision cumulée et donc fausse de la réalité antique. Cette vision n’est que le reflet déformé de la réalité moderne voire contemporaine de notre région mono-culturale et spéculative. Un premier bilan avait été réalisé en 2001 sur de nombreuses thématiques (Brun, Laubenheimer ed. 2001). Figure 18 – Verger de la fin du IIe s. de n.è. dégagé sur le tracé de l’A75, aire de repos de Valros (Cécile JUNG, Inrap, © M.R.W. Zeppeline Provence). 114 Nîmes (Gard) a largement alimenté le corpus de vignobles identifiés sur la période 1995-2010, avec les fouilles du Mas Carbonnel, les grands décapages de la ZAC Esplanade Sud ou ceux de la ZAC du Mas de Vignoles. En plaine alluviale, à Lattes (Hérault), lors de la fouille de Port Ariane III, 2,5 hectares de vignoble continu ont été identifiés pour le IIe s. avant J.-C. La pratique du provignage atteste une exploitation dans la durée pour ce vignoble. Une nouvelle plantation intervient au changement d’ère. La pérennité de cette culture est d’autant plus surprenante que les sols sont alors gorgés d’eau comme le montrent les données environnementales. A Montpellier en 2003, sur le secteur collinaire des Jardins de la Lironde, des plantations de vigne sont associées à un établissement agricole du Haut Empire. Un peu plus au sud, durant les années deux mille, à Villeneuve-lès-Maguelone, plusieurs opérations de diagnostic dans le secteur de Font-Majour et Domenove, ont permis de reconnaître de la vigne à proximité d’une voie antique. A Poussan (Hérault), entre 2006 et 2008, les abords de la villa des Clachs, occupée jusqu’au Moyen Âge se partagent entre des parcelles de vigne et d’arbres fruitiers. Sur l’établissement proche de Roumège, en 2007-2008, une première phase de vignoble, avec des témoignages de provignage est datée du Ier s. avant J.-C. D’autres vignes s’étendent durant le Haut Empire sur plusieurs hectares. A Montbazin (Hérault), cinq phases de vignobles se succédent du Ier s. avant J.-C. à la fin du Ier s. de notre ère. autour de l’exploitation vinicole de Reylha, sur une emprise de plus de vingt hectares. Sur la presqu’île balarucoise, entre les deux agglomérations antiques de Balaruc-le-Vieux et des Bains, toutes les interventions d’archéologie préventive entre 1997 et 2010, ont livré des traces agraires, et exclusivement de la vigne qui semble plantée en continu. A Béziers (Hérault), en 2006, au Gasquinoy, à proximité d’une ferme dont la superficie est estimée à 1500 m2 environ, des aménagements agraires liés à la culture de la vigne ont été cartographiés sur plus de treize hectares. Dans l’Aude, à Sallèles d’Aude, un diagnostic sur le pôle commercial La Taulo a permis d’attribuer au Haut Empire des plantations de vigne. En 2010, à Mazeran, commune de Béziers, c’est encore de la vigne qui est datée du Ier s. avant J.-C. et dont les rangs de plantations s’inscrivent dans les orientations des centuriations dites Béziers C et E. 3.5. La question des autres productions agricoles On insistera sur l’apport déterminant des études paléobotaniques pour la caractérisation des systèmes agraires en Languedoc durant l’époque romaine. Des programmes de recherches sur les cépages, les modes de plantation marquent un tournant décisif dans les recherches engagées sur la viticulture dont les premiers résultats sont prometteurs. L’idée de forêts dont les ressources sont gérées apparaît à l’issue des analyses anthracologiques dont le pratique s’est généralisée. On n’hésite plus à évoquer l’hypothèse de complants. La fouille exhaustive de plusieurs puits, en particulier dans le Gard et l’Hérault, souvent dans des habitats ruraux, ouvre un espace documentaire inédit pour une région méditerranéenne, où l’on dispose de peu de matériaux périssables. Ce corpus en cours de constitution vient alimenter la réflexion sur les autres productions « discrètes » : vannerie, bois, restes de fruits, outils. Les céréales et légumineuses sont les grands absentes de cet inventaire. Mais quelles traces agraires peuvent-elles nous informer de la présence de ces cultures ? Il faut probablement s’orienter vers des équipements liés au stockage ou à la transformation de ces productions, comme les greniers ou les moulins. Pour la région, le moulin hydraulique à roue horizontale découvert anciennement à Lattes, à la Cougourlude faisait figure d’exception. Depuis la fin des années quatre-vingtdix, avec l’archéologie préventive et programmée, les découvertes sont nombreuses. On en donnera quelques exemples pour le département de l’Hérault. Dans la grande villa viticole de Vareilles à Paulhan, deux moulins ont été identifiés pour le Haut Empire. Non loin de là, à Pézenas, dans l’établissement de l’Auribelle-Basse, un autre moulin à roue verticale est alimenté par l’intermédiaire d’un aqueduc. En 2006, à Béziers, dans la villa des Fangasses, occupée de la période républicaine au Ve s. ap. J.-C., a été dégagé un moulin hydraulique construit en grand appareil, en partie de récupération, et alimenté par un aqueduc. 4. ECHANGES ET PRODUCTIONS NON AGRICOLES 4.1. Mines et métallurgie L’activité minière durant l’époque gallo-romaine concerne plusieurs grandes zones de la région (Fig.19). Ce sont pour l’essentiel des secteurs exploités en zone de relief, si l’on exclut une extraction de surface par grattage sur des argiles à pisolithes, en secteur de garrigue non loin de Nîmes dans des secteurs de carrière dans le Bois des Lens. Sur cette exploitation originale, probablement présente sous cette forme ailleurs dans la région sur des gisements à pisolithes, la fouille d’un bas fourneau, en 2005, à Saint-Mamert-duGard a permis de dater cette activité de réduction du fer du IVe s. (Pages 2010). A l’ouest de la région, sur le versant sud de la Montagne Noire (Aude), un des plus importants centre d’extraction et de transformation du fer pour l’Antiquité se développe sur plusieurs vallées voisines. Les campagnes de fouilles menées par Claude Domergue (TRACES-UMR 5608) jusqu’en 1995 aux Martys offrent le dossier le plus complet d’un complexe métallurgique. Cette exploration a été accompagnée, à la fin des années quatre-vingt-dix, de plusieurs campagnes de prospection, qui permirent de localiser des dizaines de ferriers et d’épandages de scories. Cette métallurgie est organisée autour de petites unités dès le Ier s. avant J.-C., puis connaît une phénomène de concentration à partir de la période augustéenne et jusque dans le courant du IIIe s. Dans les Corbières, au sud du département de l’Aude, l’activité minière est aussi présente à travers l’extraction du plomb, du cuivre, de l’antimoine, de l’argent et bien sûr du fer durant la période républicaine et le Haut Empire. Après les premiers inventaires dans les années soixante et dix et quatre-vingt-dix, ce travail de recensement est relancé depuis 115 2009-2010 par Julien Maintenant, de l’équipe TRACES-UMR 5608 (Ournac et al. 2009 : 85-95). Dans l’Hérault, le secteur minier de Cabrières, en activité depuis la fin du Néolithique, fournit son lot d’informations durant l’exploration des différents réseaux reconnus. En 1997, dans la mine de Pioch Farrus IV, une série d’aménagements et d’outils (herminette, hache-marteau, lampe à huile), en liaison avec l’exploitation du Ier s. av. J.-C. a pu être identifiée. Plus au nord, autour de Lodève et dans la haute vallée de l’Orb, une trentaine de points d’extraction métallurgique indique un autre secteur minier de la période gallo-romaine, comme le montre le travail d’inventaire de Robert Gourdiole jusqu’au début des années 1990. Le secteur lozérien, au nord-est de la région constitue une zone d’exploitation métallurgique avérée (plomb, argent…) mais dont l’étude reste encore à développer en particulier sur la question de la chronologie. Dans les Pyrénées-Orientales, l’activité métallurgique est avérée par la présence d’importants ferriers (Amélies-lesBains, Ile-sur-Têt), ainsi que plusieurs mines reconnues. Plusieurs opérations archéologiques de terrain ont fourni la matière pour développer une étude d’archéométrie sur le métal ferreux. Gaspard Pagès a mené ce travail sur l’artisanat et l’économie du fer en France méditerranéenne de l’Antiquité au début de Moyen Age, dans le cadre d’une thèse publiée en 2010 (Pages 2010). 4.2. Carrières L’origine des matériaux pour la construction est souvent issue d’extractions opportunes, au plus près des besoins, qui ne laissent souvent que des traces fugaces : les fosses d’extraction de terre pour la construction finissent le plus souvent en réceptacle de dépotoir. L’identification de carrières antiques (Fig. 19) est plus facile, surtout celles liées à un chantier de construction monumentale ou clairement individualisée, comme avec la carrière de l’Estel pour l’ouvrage du Pont du Gard, ou celle présente dans l’île SainteLucie, dans l’étang de Narbonne. En 2002, de nouvelles carrières de granite datées du Haut Empire ont été localisées au nord-est de l’agglomération de Javols (Lozère). Suite à une crue exceptionnelle du Gardon en septembre 2002, qui a dégagé le banc rocheux qui supporte le Pont du Gard, de nombreuses traces d’ancrage ont pu être relevées. Ces aménagements permettent de restituer un puissant cabestan et un mât de charge situés à l’aplomb de l’ouvrage, équipements qui nous informent sur l’organisation et la chronologie du développement de ce chantier exceptionnel. Les Meulières Jusqu’au milieu des années quatre-vingt-dix, les différentes coulées de basaltes de la vallée de l’Hérault étaient essentiellement évoquées pour l’activité d’extraction et de fabrication de meules rotatives gallo-romaines. Des 116 travaux de caractérisation des différents basaltes, menés par Jean-Louis Reille à travers de nombreux articles de 1995 à 2000, ont souvent concerné des éléments retrouvés sur des sites de consommation ou sur des épaves. La fouille du site d’Embonne (Agde), sur la coulée de basalte la plus méridionale de la région, a permis d’appréhender une activité d’exctraction en relation avec un établissement rural. Autour de celui-ci, a été identifiée une série de fronts de taille de petites dimensions sur des zones de basalte homogène et exploitable ainsi que des dizaines d’ébauches de meules rotatives assez standardisées. C’est à partir de 2005, sous l’impulsion de Samuel Longepierre qu’une véritable réflexion s’est organisée sur la chaîne opératoire de fabrication de meules rotative durant l’Antiquité. Ce chercheur s’est appuyé sur une étude de cas inédite de la Meulière de grès de Saint-Quentin-laPoterie (Gard). L’étude va des fronts d’extraction, avec une extraction par tube, quasi-industrielle, dans un vaste massif de grès et de conglomérat, jusqu’aux sites ruraux en relation avec la meulière. Sur ces derniers, une activité de fabrication de meule est attestée grâce à la présence de nombreuses ébauches et de nombreux éclats de taille. Ce travail a concerné aussi l’étude d’un imposant corpus de meules issues de sites de consommation concernant tout l’arc méditerranéen (Longepierre 2011). La production de chaux Evoquer cette production semble être un lieu commun dans un contexte où la présence du calcaire est générale sauf dans quelques secteurs montagnards. Cependant, en LanguedocRoussillon, l’artisanat de la chaux est peu documenté par les opérations archéologiques programmées ou préventives. On peut évoquer la présence de deux fours à chaux sur l’agglomération gallo-romaine d’Espeyran, dans le Gard. Ce constat semble correspondre à une réalité géographique : les rares indices de four à chaux antiques ont été identifiés en prospection dans des massifs calcaires encore couverts par la forêt méditerranéenne dégradée. Ces points de production ne sont pas associés à l’habitat et leurs implantations sont dépendantes de la présence de matière première et de combustible. 4.3. Les productions potières La production régionale de céramiques est organisée en plusieurs groupes spécifiques : céramiques communes, céramiques fines et amphores. Un grand nombre de ces ateliers produit aussi des matériaux de construction: tegulae, imbrices, briques, briquettes, tuyaux, tubulures, briques de voûte… La carte de la région montre une ample répartition, qui se dessine des bords du Rhône, sur tout le littoral jusqu’à la plaine roussillonnaise, ainsi que le long de la voie d’aquitaine, de Narbonne à Toulouse, avec une autre pénétrante dans le secteur de Limoux (Fig 20). La Lozère n’est pas totalement absente de cette thématique, avec, dans le sud du département les ateliers de sigillée de l’agglomération antique de Banassac-La Canourgue et du Rozier, et un atelier de céramique commune identifié Figure 19 – Carte des mines et carrières de l’Antiquité d’après les données de la base Patriarche, Ministère de la Culture et de la Communication (I. Bermond DAO) Figure 20 – Carte des ateliers de potiers et de résiniers de l’Antiquité d’après les données de la base Patriarche, Ministère de la Culture et de la Communication (I. Bermond DAO). 117 à Florac. L’absence d’ateliers est notable sur les reliefs de l’arrière pays et dans les Corbières. L’intense activité potière du Haut Empire Le dossier majeur reste l’étude du complexe potier de Sallèle d’Aude, entamée en1976, par Fanette Laubenheimer, et achevée en 1998 (Laubenheimer 2001). D’autres sites de production, explorés anciennement, ont été repris et constituent aujourd’hui de nouvelles références pour cet artisanat. Ils bénéficient en plus de l’étude des unités de productions et des productions elles-mêmes, d’une mise en perspective avec l’établissement le plus proche, certainement à l’origine de l’implantation artisanale, qui est souvent luimême fouillé. La moyenne vallée de l’Hérault a été un laboratoire sur ce sujet. Dans le domaine de l’archéologie préventive, on pense au dossier de l’A75, de la vallée de l’Hérault jusqu’à Béziers, qui a permis d’aborder cette thématique à partir de plusieurs fouilles. En bordure d’une voie antique en direction du Massif Central, à Soumaltre (Aspiran), un atelier d’amphores Gauloise 4 et de céramiques communes a pu être dégagé en 1995, ainsi que la ferme auberge voisine, dans un second temps, en 1999. Pour la recherche programmée, on soulignera l’ampleur du dossier documentaire constitué pour la villa de Saint-Bézard, Aspiran, qui est connue depuis les années cinquante. C’est surtout dans les années soixante et dix que la fouille d’une partie de la villa et de plusieurs fours de potier a permis d’identifier la production d’amphores, de céramiques sigillées sud-gauloises, et de céramique commune. Mais c’est en 2005 que l’équipe dirigée par Stéphane Mauné a repris cet ensemble, pour en donner une vision globale, qui met en perspective les différents ateliers et les installations de productions agricoles de la villa. Une fabrication spécifique de dolium a été mis en évidence. Une poursuite de l’occupation et une phase de production potière datée de l’Antiquité tardive sont maintenant clairement reconnues. La question de la relation entre la villa et le complexe potier qu’une voie sépare reste encore sans réponse définitive, mais tous les éléments sont enfin rassemblés pour alimenter la discussion. Dans la vallée de l’Hérault, d’autres ateliers fouillés viennent enrichir le corpus. En rive gauche à Saint-Pargoire, l’atelier de Contours (2004), produisant principalement des amphores Gauloises 4, enrichit la réflexion sur les composantes de la chaîne opératoire de l’officine, avec la présence de nombreux bassins et au moins huit fours. Sur le bord de l’étang de Thau à Loupian (1995 - 1999), l’atelier du Bourbou se consacre essentiellement à la production d’amphores Gauloise 4 durant le Haut Empire, pour l’exportation de la production viticole de la villa des Près-Bas située dans le même bassin versant. La fouille a montré une autre grande phase de production durant l’Antiquité tardive, constituée de nouvelles productions en céramique commune, en particulier des bassins à fond ombiliqué. Dans le Gard, à Beaucaire sur le site des Tourelles, de 2000 à 2004, Jean-Marc Ignace a pu dégager le plan d’un atelier 118 d’amphores qui participe à l’activité d’une villa viticole. A Vers-Pont-du-Gard en 1999, le site de Font de Dringues a livré un bassin de décantation et un four destiné à la cuisson d’amphores Gauloise 4. En 2008, à Saint-Victor-la-Coste, un four quadrangulaire a été dégagé dans l’établissement galloromain de la Tuilerie. Dans les Pyrénées-Orientales, à Perpignan, le dossier archéologique du Petit-Clos I et II a été construit de 1987 à 2002 grâce à plusieurs opérations préventives qui ont mis en relation la partie production viticole de la villa avec un atelier de potier qui est associé à l’établissement domanial. En Lozère, en 2007 au Pont de Roudils, commune de Serverette, c’est un four de tuiliers et peut-être pour d’autres productions potières pour le Haut Empire qui a été reconnu. Cet atelier dépend probablement d’un domaine rural et pourrait aussi alimenter l’agglomération antique de Javols située à 3 km. En zone urbaine, plusieurs secteurs de production potières sont pressentis ou avérés, comme à Lattara (Lattes, Hérault), en 2005, avec une important dépotoir comprenant des éléments de four et une probable production d’amphores gauloises. Dans l’agglomération d’Espeyran (Saint-Gilles, Gard), dominant la Camargue, entre 2007 et 2009, une douzaine de four est attestée par prospection magnétique et une production de céramique est avérée pour le Haut Empire, les dimensions de certains fours laissant présager une production amphorique. A Nîmes, au sud de la fouille du parking Jean-Jaurès, intra-muros, dans le premier îlot jouxtant l’enceinte augustéenne, se développe, dans le courant du Ier s. de notre ère, un ensemble d’ateliers de potiers pour la production d’amphores, de céramiques communes et de lampes. En Lozère, dans l’agglomération de Banassac-La Canourgue, une production de sigillée sudgauloise est connue depuis longtemps et en 1998, quelques sondages ont été réalisés par Gilbert Fages. Les productions précoces, aux premiers temps de la romanisation Dans l’Aude, plusieurs ateliers de potiers précoces ont fait l’objet d’opérations d’archéologie préventive. En 1997, à Bourriège, une série de huit fours de potier (fin IIe-Ier s. avant J.-C.) a pu être fouillée. Ils présentent un plan circulaire à pilier central, avec utilisation d’amphores italiques placées en position rayonnante, comme ceux observés anciennement dans l’agglomération de la Lagaste. La production associée pourrait correspondre à des céramiques communes ou fines de tradition indigène. A Laure-Minervois en 2009, les ateliers de potier de Tinal d’Abrens et de Salauze distant de trois kilomètres ont fait l’objet de prospections systématiques et de fouilles programmées (Gérald Sachot, Corinne Sanchez). Ils se développent en bordure d’une voie antique. Le site de Salauze, d’une assiette de près de cinq hectares, constitue un vaste complexe potier, avec une production importante de céramiques communes dès la période augustéenne comme à Sallèle d’Aude, ainsi que de pesons, de matériaux de constructions et de dolium. La prospection a montré l’absence d’épandage antique sur de vastes surfaces autour des ateliers, lacune qui pourrait indiquer la présence d’un vaste secteur boisé. C’est ce qui est aussi envisagé entre la vallée de l’Hérault et Béziers pour les ateliers de céramique brune orangée biterroise et à engobe plombifère situés près de la voie Domitienne. L’agglomération de Bram, installée sur l’axe de la voie d’Aquitaine, est bien connue pour ses productions potières précoces et variées de la seconde moitié du Ier s avant J.-C (pré-sigillée, céramique commune, parois fines). En 2008, lors de l’opération Althéas/rue des Fleurs, de nouvelles données sur l’atelier de potier anciennement dégagé par Michel Passelac ont pu être obtenues. A Béziers, dans l’Ilot Maître Gervais, en 2007, une fabrication de céramique commune dans un quartier urbain a pu être identifiée pour le Ier s. avant J.-C. A l’est d’Agde (Hérault), des sondages menés par Elian Gomez sur le site de SaintMichel ont permis d’identifier plusieurs fours circulaires à double alandier pour la fabrication d’amphores de modèle italique Dressel 1A. Ce type de production précoce du IIe-Ier s. avant J.-C. s’explique par la présence du comptoir massaliète voisin et d’une production vinicole précoce signalée dans de nombreux établissements ruraux (Gomez 2011). Un premier bilan de la question a été proposé lors du colloque de la SFECAG en 2006 à Pézenas (Rivet, Saulnier ed. 2006). il faut de même signaler la publication de la thèse de Corinne Sanchez sur Narbonne durant la période tardo-républicaine (Sanchez 2009). Les ateliers de l’Antiquité tardive Les ateliers de potiers en activité durant l’Antiquité tardive sont moins nombreux, mais le corpus s’est nettement enrichi durant la période du présent bilan. Le mauvais état de conservation des vestiges est souvent un frein à l’identification de ces productions. Dans l’Hérault, à l’est de Béziers en 2005, au domaine des Garrigues, deux fours circulaires sont les seuls vestiges conservés de l’atelier produisant durant le IVe s. après J.-C. de la céramique à pâte claire, parfois engobée (Rivet, Saulnier ed. 2006). On retrouve le même cas de figure sur le site de la Quintarié, à Clermont-l’hérault, toujours en bordure de la voie vers le Massif Central, où des productions de céramique fine engobée et de dérivée de sigillée paléochrétienne (DSP) avec poinçons sont attestées. Un meilleur état de conservation des vestiges permet d’appréhender la répartition spatiale des phases d’activités de l’atelier, comme cela a pu être fait au Bourbou à Loupian pour la période tardive. Les datations archéomagnétiques suffisantes et homogènes donnent deux phases de production durant la seconde moitiè du IVe s. et une seconde phase en plein Ve s. voire début du VIe s. ap. J.C. (Pomarèdes et al. 2005). Seuls, les dossiers originaux par leur chronologie ou leur importance dans l’avancée de la réflexion régionale sur cette thématique ont été évoqués. Plusieurs opérations ont décelé une activité potière, grâce la présence de dépotoirs spécifiques par leur composition, ou de bassin de décantation d’argile, d’éléments surcuits ou mécuits suivant la nature des argiles et bien sûr de parois de four. La carte de synthèse de ces potentialités reste édifiante. La production de poix (fig. 20) Faisant écho à la fabrication de céramique et en particulier à celle des amphores, la production de poix se localise, en l’état de la recherche, dans la région de Bédarieux pour l’Hérault et surtout dans le secteur des Causses en Lozère, en particulier le Méjean et le Sauveterre où une vingtaine d’ateliers a été recensée en prospection par Gilbert Fages et grâce à quelques sondages menés par Christophe Chardonnet jusqu’en 1995. La mise en perspective régionale et économique de ces données ne l’a été que très récemment (Trintignac 2003, Mauné, Trintignac 2011). 4.4. Les autres productions manufacturées L’artisanat du verre doit être abordée, même s’il est difficile de détecter ce type de production lorsque les structures de cuisson ne sont pas conservées. La faible quantité de rebuts ne facilite pas l’identification de cette activité. Il faut signaler, à Nîmes lors de la fouille du Parking Jean-Jaurès en 20062007, la découverte d’un four de verrier daté de la fin du IIe s. après J.-C. Les ateliers de production de l’Antiquité tardive, à partir du IVe s. sont un fait avéré et le corpus plus conséquent, même si celui-ci est encore limité pour le LanguedocRoussillon (Raux, Breuil, Pascal 2010). La réinterprétation de structures de fours atypiques, de petites dimensions peut être une piste de travail pour enrichir l’inventaire. En 2002, dans l’agglomération gallo-romaine de Javols, il est à noter la découverte originale d’un probable atelier de joaillier. Pour ce même site, avait été mis en évidence un artisanat de la tabletterie, et l’hypothèse de la présence de tonnelier a également été avancée (Trintignac et al. 2011). 4.5. Les voies de circulation La région Languedoc-Roussillon, du Rhône aux Pyrénées, est traversée par un des axes majeurs du monde romain occidental, la voie Domitienne. Deux franchissements inédits ont été découverts sur son tracé, l’un à Loupian (Hérault) et l’autre au sud-ouest de Narbonne (Aude), tous deux sur un thalweg sec drainant des bassins versants secondaires. La fouille de ces deux aménagements a permis en outre d’observer une rapide évolution paysagère, avec d’importants phénomènes d’érosion entre la mise œuvre de la voie à la fin du IIe s. avant notre ère et le Haut Empire. Ils ont nécessité l’exhaussement de la voie et de l’ouvrage de franchissement ; ponceau à barbacanes à Loupian ou un pont à une arche biaise à Narbonne (Barruol, Fiches, Garmy 2011). Plusieurs tronçons de cette voie ont pu être fouillés, dans l’Hérault, à Castries en 2009, à Ambrussum dans la traversée du quartier bas, dans l’Aude lors de la fouille des collines de Réveillon en 2007-2008. 119 Dans l’Aude, en 2009, un tronçon de la voie d’Aquitaine a été identifié par Véronique Canut, dans la ZAC de la Leude, commune de Capendu, non loin de la station routière de Liviana. La découverte de nombreux tronçons de chemins secondaires ou simplement agricoles jalonne les opérations d’archéologie préventive ou programmée, tant ceux-ci sont nombreux. Si la caractérisation des aménagements viaires ne pose pas de difficultés, leur attribution chronologique est souvent plus difficile, en l’absence d’éléments tels que des sépultures ou des vestiges d’habitat, et surtout de toute activité apportant des artefacts dans les recharges de la voie. Les axes viaires les plus importants, dont le tracé est dessiné sur des cartes par la recherche traditionnelle peuvent être maintenant datés grâce aux résultats de l’archéologie préventive. Le réseau des voies secondaires n’étaient même pas connues. Enfin, on observe une stabilité pour certains axes de circulation, mis en place dès l’âge du Fer, comme cela a pu être observé dans la campagne nîmoise. 5. FUNÉRAIRE ET RELIGIEUX 5.1. Les lieux de culte La carte de répartition des lieux de culte antiques recensés est significative de la relative pauvreté de la documentation sur ce sujet (Fig. 21). Avec une soixantaine d’occurrences pour la région, recensées dans la Carte Archéologique Nationale sous les termes : temples, fana, lieux de cultes et sanctuaires, on remarque que les trois quart des lieux de cultes sont situées dans le Gard et l’Hérault. Ils ont fait l’objet d’un PCR en 2001-2003 (Michel Christol : Inventaire des lieux de culte en Narbonnaise occidentale -Gard et Hérault-) sur le modèle du PCR porté par Jean-Luc Fiches sur l’habitat groupé (Fiches dir. 2002), qui a abouti à une publication en 2007 (Christol et al. 2007). Si quelques fouilles avant 1995 ont permis d’identifier des lieux de culte, soit sous la forme de sanctuaires avec temples classiques comme à Roujan (Hérault) ou Gaujac (Gard), soit sous la forme de sanctuaires de hauteur « de tradition indigène », comme sur les crêtes de Mabousquet, (à Montmirat Gard), les opérations de terrain restent rares. Depuis 1995, des opérations ponctuelles ont été menées sur des édifices déjà connus comme la Maison Carré à Nîmes (cf. supra § 2.2.2), ou le temple dit d’Apollon, sur l’oppidum de Saint-Vincent à Gaujac (Gard, 2006). Un autre type d’équipement cultuel a pu être identifié par des fouilles : les sanctuaires de Balaruc-les-Bains en 1995 et d’Ambrusssum en 1998 (Bermond et al. 1998, Fiches et al. 2007), tout deux dans des agglomérations dites secondaires. 5.3. Funéraire Les Gallo-romains mourraient dans la plaine ! Plus encore que pour d’autres types de sites, la carte de répartition des sites funéraires gallo-romains recensés est le 120 reflet de la répartition des opérations de terrain (Fig 22). Peu abordé par les opérations d’archéologie programmée, sinon avec l’objectif plus ou moins avoué de limiter une emprise urbaine (comme à Javols en Lozère, Ferdière, Ode 2004), les vestiges funéraires sont la plupart du temps étudiés lors d’opérations d’archéologie préventive, dont l’objet premier n’est que rarement l’étude du fait funéraire. La connaissance des gestes funéraires, et de leur évolutions, a néanmoins progressé significativement depuis le milieu des années 90. Les acquis de ces dernières années sur l’évolution des pratiques et l’apport des recherches récentes sur l’archéologie funéraire ont permis à plusieurs synthèses de voir le jour récemment (Bel, Gleize 2010, Blaizot 2009). On observe des différences notables entre les territoires. Alors que les alentours de Nîmes ont livré une douzaine d’ensembles funéraires depuis 1995, qui ont donné lieu à des publications de synthèse (Bel et al. 2007, Bel et al. 2008), aux abords de Béziers bien peu de sites funéraires sont à ce jour connus (Béziers, ZAC de la Courondelle en 2006). A Narbonne, plusieurs opérations majeures ont permis de documenter le dossier complexe des nécropoles de la capitale de la Province (Narbonne Centre Hospitalier en 1996, et trois opérations en 2007 : Boulevard de 1848, Avenue de la grande Armée et ZAC du théâtre). En contexte rural, les petits ensembles funéraires dominent le corpus, surtout pour le Haut Empire. Ils sont le plus souvent installés le long d’axes routiers, quelquefois à proximité d’établissements agricole (par exemple, Thernot et al. 2004), souvent sans contexte clairement identifié. Les nécropoles rurales de l’Antiquité tardive présentent souvent un nombre d’individus plus important (voir par ailleurs le fait funéraire médiéval). Les ensembles témoignant d’une longue utilisation sont rares, et situés plutôt en contexte périurbain (Rue du Cirque romain à Nîmes ou ZAC de Théâtre à Narbonne, 2007). La connaissance des pratiques funéraires des IIe-Ier s. avant J.-C. a connu des avancées notables, surtout dans l’est de la région (Bel et al. 2007). Des édifices funéraires sont quelquefois mis au jour, mais la plupart n’ont pas fait l’objet d’études poussées. Ce sont quelquefois des mausolées (Narbonne, Aude, Centre Hospitalier ; Langlade, Gard, 2007, Carcassonne, Lo Badarel 2, 2009, Lattes, Cougourlude 2010). On trouve plus fréquemment des enclos, quelquefois des structures non identifiées (Gignac, Mas d’Alhen, 2007). Le seul mausolée monumental régional ayant fait l’objet d’une étude approfondie est le « mausolée-temple » de Marvejols en Lozère (Joulia et al. 2000). Fouillé en 2007, le site de Rec de Ligno, commune de Valros (Hérault, autoroute A75) a été interprété comme un jardin à vocation funéraire : entouré de murs, il contenait 25 fosses de plantations d’arbres et une stèle funéraire, retrouvée dans un puits. La vocation cultuelle du bâtiment à plan centré accolé a été avancée. On reconnaît un espace extérieur entouré de portiques avec trois bases d’autels maçonnés au centre de la cour. Figure 21 – Carte des agglomérations gallo-romaines et des lieux de culte d’après les données de la base Patriarche, Ministère de la Culture et de la Communication (I. Bermond DAO). 6. CONCLUSION PROVISOIRE privilégiés, les progrès enregistrés sans omettre un certain nombre de points faibles de la recherche régionale. Ce travail préliminaire ne convaincra certainement pas le chercheur qui attend d’une telle démarche de bilan la mise en évidence de résultats avérés, d’acquis fondés sur une documentation sans faille. Il ne permettra pas encore l’émergence d’une nouvelle programmation de la recherche archéologique gallo-romaine, objectif premier de l’effort de bilan demandé par la Direction du Patrimoine. L’étude du fait urbain reste encore insuffisante, les retards de l’archéologie des chefs-lieux de cité sont importants. On notera cependant des progrès encourageants à Narbonne ainsi que l’affirmation d’une réflexion collective à Nîmes. Les enquêtes de terrain demandent à être multipliées, mais aussi les travaux de publication à l’échelle de quartiers dans l’attente de synthèses sur l’urbanisme, les équipements publics et l’architecture privée. Les agglomérations secondaires sont quant à elles mieux connues, plus nombreuses que ce que l’on croyait ; leur rôle est plus assuré dans cette partie de la province et dans le cadre de la cité, de la période tardo-républicaine à la fin de l’Antiquité. Il serait souhaitable cependant étoffer nos connaissances sur ces agglomérations à partir de solides dossiers de fouilles et de publications monographiques. Pour ces quinze années écoulées, de 1995 à 2009, nous nous sommes cantonnés à partir de données chiffrées à montrer l’émergence d’une dynamique nouvelle de l’archéologie de terrain de la période antique, qui porte encore ses fruits aujourd’hui. Elle est le fait de nouvelles pratiques dans le domaine du préventif comme du programmé, mais aussi à une très nette progression du nombre de spécialistes travaillant sur le monde gallo-romain. Nous avons tenté de même, de mettre en évidence les thèmes d’étude qui ont été L’étude des campagnes reste la principale bénéficiaire de 121 cette croissance de l’activité archéologique, qui a vu la multiplication de chantiers, des surfaces traitées ainsi que la diversification des zones touchées par l’enquête de terrain. A la différence des périodes plus anciennes, les recherches sur l’époque gallo-romaine ne bénéficiaient pas d’une tradition d’études pluridisciplinaires. Aujourd’hui en Languedoc, la géoarchéologie et la bioarchéologie sont devenues des spécialités incontournables pour la compréhension des systèmes de cultures et de productions, de l’habitat à l’organisation des champs. Deux enjeux vont s’imposer aux chercheurs languedociens pour les années à venir. La réflexion sur les campagnes ne pourra plus passer de façon exclusive par des études de cas, considérées comme des exemples représentatifs et permettant la construction de modèle d’interprétation. Elle devra aussi prendre en compte une masse documentaire inégalée jusque-là, apportée en particulier par l’archéologie préventive, et donc s’intéresser à la notion de série, au moment de l’analyse comme dans l’étape de la publication. Le second de ces enjeux porte sur la diversité des échelles spatiales d’interprétation. La pratique de l’archéologie préventive a conduit à privilégier des espaces dont l’étendue peut atteindre dans le meilleur des cas quelques centaines d’hectares. Elle a entraîné un déclin des études sur l’occupation des sols documentées par les prospections pédestres ou sur les réseaux centuriés, qui portaient sur des espaces micro-régionaux de plusieurs centaines de kilomètres carrées. Même si l’intensité des recherches à grande échelle a renouvelé notre approche des paysages ruraux, il ne semble guère possible de faire l’économie d’un point de vue à petite échelle, qui permettra de replacer les données archéologiques dans le territoire historique de la cité4. Nous formulons le vœu de voir aboutir cet effort de bilan, dans le cadre qui avait été envisagé lors de réunion tenue à Lattes en 2009. Un plan de travail a été élaboré à cette occasion, décliné selon les quatre parties utilisées pour la présente contribution. Cécile Jung et Hervé Pomarèdes ont repris en mai 2010 la partie concernant les campagnes et les productions agricoles, afin d’en préciser la trame de rédaction. Les contributions rédigées dans le cadre de ce collectif pourraient constituer la matière pour la publication de chroniques, selon la formule adoptée à propos du thème des « Signes de la romanisation » dans le volume 31 (1998) de la Revue Archéologique de Narbonnaise. 4 Figure 22 – Carte des points de découvertes d’inhumations et d’incinérations de l’Antiquité d’après les données de la base Patriarche, Ministère de la Culture et de la Communication (I. 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