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Les trente ans du magasin Patagoni a d e Chamonix.
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30 ANS
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PATAGONIA
Le staff de la grande époque ! Archives Patagonia
CHAMONIX
Rédacteur en chef Floran Tomei Rédaction Shauna Cleary Conseiller de la rédaction Antoine Grospiron-Jaccoux Propos receuillis par Tim Walker & Pierre Cadot Traduction Nina Berrehar Design graphique Wouter Struyf Photographie Pierre Cadot sauf indiqué Illustrations Clémentine Viallon Patagonia Roos van de Weerd
Merci à : Kristine McDivitt Tompkins Sarah Cartier Andy Parkin Roch Malnuit
Anne Lassman Trappier L’association Boutch à Boutch Iris Bee Hawke Marie-Hélène Thevenet
Tirage limité à 1000 exemplaires. Imprimé en Decembre 2017 sur un papier Cocoon offset, 100% recyclé garanti sans chlore Imprimerie Monterrain (Cluses / 74)
EDITORIAL
En 1987 les fondateurs Yvon et Malinda Chouinard ont pris la décision de s’installer au pied du mont Blanc, faisant de Patagonia la première marque de vêtements de sport à ouvrir ses portes dans la station alpine française de Chamonix. Premier magasin exclusif en Europe, le choix de Chamonix s’est fait naturellement, au détriment de rivaux comme Zermatt ou St. Anton. Comme Yvon le souligne dans son livre Homme d’affaires malgré moi : confessions d’un alter-entrepreneur (originalement Let My People Go Surfing: The Education of a Reluctant Businessman) : “Chamonix est la plus cosmopolite des villes alpines. J’ai gardé de merveilleux souvenirs du temps que j’y ai passé, et j’ai pensé que ce serait l’endroit idéal pour présenter la ligne Patagonia et établir une relation directe avec une vaste clientèle européenne. Je voulais créer un repère local, animé par une équipe internationale de skieurs et de grimpeurs passionnés.” A l’instar de tous les points de vente Patagonia, nous avons choisi un site historique – en pleine rue du Docteur Paccard – et nous nous sommes efforcés de préserver l’intégrité du bâtiment tout en saluant l’histoire et la culture locale. Trente ans après l’ouverture du magasin, Chamonix est toujours une destination mondiale emblématique pour tout ce qui gravite autour de la neige et du granite. Capitale du “grand ski” c’est la Mecque des amoureux des sports de glisse et de l’alpinisme. J’ai débarqué pour la première fois à Chamonix en septembre 2012, à l’occasion d’un séjour d’escalade franco-suisse. J’ai eu la chance de revenir ici une douzaine de fois, au gré des quatre saisons. À chaque fois que je m’apprête à franchir les portes de la vallée c’est le même sentiment d’excitation qui m’envahit. Les montagnes, la ville et sa communauté, ont toujours quelque chose à offrir, qu’importe le jour ou l’occasion de la visite. Chez Patagonia, tout ce que nous entreprenons renvoie à notre ligne de conduite : fabriquer les meilleurs produits en causant le moindre impact sur l’environnement et utiliser l’entreprise pour inspirer et mettre en oeuvre des solutions à la crise environnementale. C’était vrai il y a 30 ans, lorsque le magasin ouvrait ses portes pour la première fois, et c’est tout aussi vrai aujourd’hui. Les questions de pollution de l’air ou du recul des glaciers menacent le futur de Chamonix. C’est pour cela que nous soutenons des associations environnementales et citoyennes, comme Inspire ou Boutch à Boutch, qui continuent de lutter pour un développement durable et la protection de cet environnement fragile. Fêter ces trente années d’aventure – tout en pensant bien sûr à celles à venir - c’est l’occasion de rendre hommage à Chamonix et aux personnages qui ont façonné cet endroit si exceptionnel. Voici leurs histoires. Ryan Gellert Directeur Général, EMEA Patagonia
EDITORIAL
In 1987, Yvon and Malinda Chouinard took the decision for Patagonia to settle here at the foot of Mont‑Blanc and we were the first outdoor brand to open our doors in the French alpine resort of Chamonix. The first Patagonia store in Europe, Chamonix was a natural choice over rivals such as Zermatt or St. Anton. As Yvon said in his book Let My People Go Surfing: “Chamonix is the most cosmopolitan of the Alpine towns. I had fond memories of my time there and believed it was an ideal place to showcase the Patagonia line and create a direct relationship with a wide range of European customers. I wanted to create a local hangout, staffed with international hard-core skiers and climbers.” As with all Patagonia retail stores, we chose a historic site – on the Rue Docteur Paccard - and worked to preserve the integrity of the building, honouring its surrounding history and culture. Thirty years later, an iconic global destination for all things powder and home of “le grand ski”, Chamonix is a Mecca for those with a love of snowsports and mountaineering. I first set foot in Chamonix in September 2012, while climbing in Switzerland and France. I’ve been fortunate enough to return a dozen times since, across all four seasons. I still get that same feeling of excitement, deep in my stomach, each time I drive into the valley. The mountains, the town and the community – they all offer you something different, every day of every visit. As a business, everything that we do at Patagonia goes back to our mission statement: Build the best product, cause no unnecessary harm and use business to inspire and implement solutions to the environmental crisis. This was true 30 years ago, when the Chamonix store opened its doors for the first time, and it is just as true today. Issues such as air pollution in the valley and the receding Mer de Glace threaten the future of Chamonix. That’s why we work with local NGOs such as Inspire and Boutch à Boutch, who continue to fight for the protection and sustainable development of this fragile environment. It feels right that we should mark our adventure of the last thirty years (and counting) by paying homage to Chamonix itself and the people who have helped to make it the exceptional place it is today. Here are their stories.
Ryan Gellert General Manager, EMEA Patagonia
PATAGONIA
Avant rĂŠnovation, 1987. Archives Patagonia
CHAMONIX
Après rénovation, 1987. Archives Patagonia
GRAVITATION
« Mont Blanc yet gleams on high:—the power is there, The still and solemn power of many sights, And many sounds, and much of life and death. In the calm darkness of the moonless nights, In the lone glare of day, the snows descend Upon that Mountain; none beholds them there, Nor when the flakes burn in the sinking sun, Or the star-beams dart through them. Winds contend Silently there, and heap the snow with breath Rapid and strong, but silently! Its home The voiceless lightning in these solitudes Keeps innocently, and like vapour broods Over the snow. The secret Strength of things Which governs thought, and to the infinite dome Of Heaven is as a law, inhabits thee! And what were thou, and earth, and stars, and sea, If to the human mind's imaginings Silence and solitude were vacancy? »
Percy Bysshe Shelley, Mont Blanc: Lines Written in the Vale of Chamouni, 1816.
INTRO
Gravitation En 1816, les auteurs romantiques anglais Mary et Percy Bysshe Shelley accompagnés par Lord Byron himself font partie des audacieux voyageurs venus visiter la vallée de Chamonix. Charmé par son passage au pied du mont Blanc, Percy rédige le poème Mont-Blanc: Lines Written in the Vale of Chamouni. Deux décennies plus tard c’est le poète et dramaturge Victor Hugo qui accomplit le périple. Il relate ses impressions exaltées, citées ci‑contre, dans la Revue des Deux Mondes en 1829. Depuis la seconde moitié du siècle précédent - et la première ascension du mont Blanc par Michel Paccard et Jacques Balmat en 1786 - la représentation de la montagne s’est apaisée et les “glacières” sont devenues des destinations prisées des bourgeois de l’époque. Elle n’est plus ce domaine maudit, “ces monts affreux” (les mots de l’évêque François de Sales en 1606), mais est en passe de devenir cette merveille naturelle que l’on vient contempler et parfois tenter de gravir. Le chant des poètes a contribué à la renommée du val de Chamouni dans l’imaginaire collectif et préfigure ainsi l’attrait de ces paysages hors du commun pour les yeux du monde entier.
Voilà trois siècles que le massif du Mont-Blanc exerce sa force d’attraction sur les hommes. Son magnétisme est tel qu’il est devenu le troisième site naturel le plus visité au monde. Alpinistes, glisseurs, voltigeurs, marcheurs, coureurs et amoureux de la montagne en tout genre viennent explorer ses dédales et ses mythiques flèches de granite. Les sommets et les aventures fascinantes qu’elles engendrent font rêver les hommes aux quatre coins du globe. Chamonix fascine pour ce qu’on y vit et ce qu’on y voit. Mais, fort heureusement, son magnétisme ne se cantonne pas aux vagabonds des cimes. Depuis les premières heures du tourisme chamoniard, on vient dans la vallée pour contempler, se ressourcer, fêter ou participer à un événement culturel. C’est ce qui fait sa richesse et sa force. Ainsi s’y côtoient, toutes nationalités confondues, grands alpinistes et artistes en villégiature, guides prestigieux et saisonniers aventuriers, personnalités politiques ou illustres inconnus. En 1987 Kristine McDivitt Tompkins alors aux manettes de l’entreprise Patagonia et inspirée par les précédentes aventures alpines d’Yvon Chouinard, le fondateur historique, ouvre à Chamonix le premier magasin hors des États-Unis. Comme nombre de rochassiers du monde entier venus se frotter aux fissures chamoniardes, c’est au pied du mont Blanc que Kristine a choisi de tenter l’aventure sur le vieux continent. Cette année, le camp de base de la rue Paccard souffle fièrement ses trente bougies.
GRAVITATION
« Qu’on se figure d’énormes prismes de glace, blancs, verts, violets, azurés, selon le rayon de soleil qui les frappe, étroitement liés les uns aux autres, affectant une foule d’attitudes variées, ceux-là inclinés, ceux-ci debout, et détachant leurs cônes éblouissans* sur un fond de sombres mélèzes. On dirait une ville d’obélisques, de cippes, de colonnes et de pyramides, une cité de temples et de sépulcres, un palais bâti par des fées pour des âmes et des esprits ; et je ne m’étonne pas que les primitifs habitans* de ces contrées aient souvent cru voir des êtres surnaturels voltiger entre les flèches de ce glacier à l’heure où le jour vient rendre son éclat à l’albâtre de leurs frontons et ses couleurs à la nacre de leurs pilastres. »
Victor Hugo, Fragment d’un voyage aux Alpes, 1829. * L’orthographe de l’époque a été respecté.
INTRO
Gravitation Throughout its existence, Mont-Blanc has been an inspiration for the greatest writers and poets of our time. Given his belief that truth could be uncovered in nature, it is fitting that Percy Bysshe Shelley was one of the first Romantic authors to document his visit to the valley in 1816. Mont-Blanc: Lines Written in the Vale of Chamouni, narrates Shelley’s
It’s clear that the seductive charm of the majestic Mont-Blanc has been luring visitors from all corners of the world to its summit for centuries. Alpinists, riders, acrobats, hikers, runners, mountain lovers and many more have been arriving to discover the idiosyncrasies and mythical spires of this massif. While the Mont-Blanc continues to inspire,
journey to Chamonix alongside his wife Mary and the legendary Lord Byron. The poem, published in his collection History of a Six Weeks’ Tour, recounts his understanding and interpretation of the MontBlanc as he stood at the foot of the mountain. In 1829, Victor Hugo endeavoured to undertake the same journey to the valley and his similar feelings of exhilaration can be seen above in his poem Fragment d’un voyage aux Alpes.
encourage and assist men in the realisation of their dreams, let’s not forget that the magnetism of the Chamonix valley is not only limited to aspiring poets or to daredevils in search of the peaks; the town has become a place of escapism for all ages and is known for the many cultural events which take place in the area. Chamonix’s richness undoubtedly lies not only in the town itself but also in the eclectic mix of visitors who come to visit the valley; from alpinists to artists, prestigious guides to seasonal workers and political personalities to undercover celebrities, everyone is invited to share in the wonder of this magical town.
The animated works of these Romantic poets, who strived to showcase nature in all its glory, is a far cry from the previous interpretations of the mountain. Two centuries earlier in 1606, Bishop Francis de Sales was referring to “those dreadful mounts” - a clear nod to the old saying that man fears what he does not understand. It was only after the first ascent of the Mont-Blanc by Michel Paccard and Jacques Balmat in 1786, that the threatening perceptions of the mountain began to change. Following this, it wasn’t long before the glaciers became a popular tourist destination for the bourgeois. Thanks to the work of poets such as Hugo and Shelley, the mountain was brought to life through the written word and the mystification and uncertainty surrounding the Mont-Blanc diminished. To this day, this natural wonder stands as the third most visited site in the world.
Given all of this, it is no surprise that in 1987, Kris McDivitt Tompkins – then at the helm of Patagonia and inspired by the previous mountaineering adventures of its historic founder Yvon Chouinard – decided to open the first store outside of the US in Chamonix. At a time in the eighties when rock climbers from all around the world were coming to face Chamonix’s fissures, it was at the foot of the Mont-Blanc where Kris chose to lay the foundations of the Patagonia enterprise on the old continent. This year, three decades after making the move to Europe, Rue Paccard base camp proudly blows out its thirty candles.
KRIS
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Kris Thompkins
Chamonix ! « On ne peut pas rêver mieux ! »
Kris McDivitt Tompkins travaille pour Patagonia depuis 45 ans. Depuis ses modestes débuts employée comme vendeuse dans un petit magasin, Kris a gravi les échelons pour devenir Directrice Générale et finalement PDG. Elle a été à la tête de l’entreprise jusqu’à son départ en 1993, quand elle a choisi de déménager en Argentine avec son mari Doug Tompkings pour s’investir dans des projets de sauvegarde de l’environnement. A l’occasion du trentième anniversaire du magasin Chamoniard, nous avons rencontré Kris pour évoquer la philosophie des premiers points de vente Patagonia. Kris, que pouvez-vous nous dire sur la philosophie des premiers magasins Patagonia ? Quand Yvon a lancé Chouinard Equipment, nous avons débuté avec un tout petit magasin. De ce point de départ, Malinda et lui avaient tous les deux une vision très claire : les points de vente devaient être un cadeau à la communauté locale ainsi qu’un lieu d’information et d’activisme pour les clients Patagonia, qu’ils se trouvent à Ventura ou à New York. L’idée était que vous puissiez pénétrer dans un magasin et ressentir l’image, le dessein et l’authenticité de l’entreprise. Je ne pense pas que cela ait changé. Il faut se rappeler qu’avant les magasins, il n’y avait que les catalogues pour présenter notre ligne, et ces derniers n’étaient que bi-dimensionnels. C’est pour cette raison que les lieux de vente sont devenus si importants pour Patagonia. Dès les débuts du magasin de Cham’, on a été agréablement surpris de retrouver un esprit qui correspondait à l’espoir que nous avions de faire un cadeau à la communauté locale. Un lieu pédagogique, un endroit qui vous donne envie de sauter du lit le matin que ce soit pour ramasser des déchets ou quoi que ce soit. De plus, il y avait
le fameux Bar National au bout de la rue - une institution, le repère des grimpeurs de la première heure - on y dégustait de délicieuses salades sous une montagne de bacon et je me souviens me dire : j’espère vraiment que le magasin Patagonia deviendra une petite réplique du Bar Nas’, et je crois que c’est ce qui s’est passé. Parlez-nous de la mise en place du magasin ? Je pense que lorsque nous avons décidé d’ouvrir un magasin à Chamonix on s’est tous dit “on ne peut pas rêver mieux”. C’était mon frère Roger McDivitt, qui s’était déplacé le premier pour nous trouver un emplacement. Ma mission principale était de remplir et d’organiser l’espace. Je me souviens que le magasin avait d’énormes vitrines sur la devanture, elles avaient été remplies de déchets accumulés à la suite d’un nettoyage d’un glacier de la vallée. Et le message était : “A VOUS DE NETTOYER ! Cette vallée a besoin d’être belle mais regardez ce que nous avons trouvé” - c’était fantastique ! C’était vraiment l’esprit du magasin dès le début. De cette manière Chamonix était le magasin le plus original et le plus extraordinaire, et ce dès l’ouverture des portes.
THOMPKINS
Quels souvenirs gardez-vous de l’année d’ouverture du magasin ?Je me souviens vivement de l’ambiance de la vallée à cette l’époque. L’escalade avait bien sûr une importance capitale mais la communauté comptait aussi beaucoup de génies de la glisse, très talentueux mais un peu fou, qui passaient leur temps en ski hors-piste. C’était l’avant-poste du ski extrême et des débuts du snowboard. Pourquoi avez-vous choisi Chamonix comme lieu où implanter le premier magasin Patagonia en Europe ? Je pense que nous l’avons choisi parce qu’il représentait bien tous les sports auxquels nous nous intéressions – hormis la pêche à l’époque, mais en ce qui concerne l’escalade, le ski et le ski de randonnée, c’était évident de s’installer au pied du mont Blanc. Sans oublier que la plupart d’entre nous étaient très enthousiastes à l’idée de devoir travailler à Chamonix de temps en temps. Ce que nous avons eu la chance de faire ! En ce qui me concerne Chamonix a été une aventure incroyable pour l’entreprise. Rappelez-vous que l’un des premiers articles qu’Yvon a souhaité produire pour Patagonia était le Chamonix Guide Sweater (littéralement le pull des guides de Chamonix N.D.T.), cet épais pull-over traditionnel de laine qui habillait les guides d’antan. Avant même que l’on débarque on avait cette histoire de la montagne qui nous connectait tous. Pouvez-vous nous parler des premiers jours du magasin ? Les débuts du magasin étaient typiques du fonctionnement de Patagonia à son commencement. Alors qu’on essayait de faire décoller l’entreprise le budget était plutôt serré, et c’était le cas pour le lancement de Chamonix. On louait donc un appartement sur place et on se retrouvait à dix dans une chambre – c’était comme ça qu’on allait sur les salons et n’importe où ailleurs ! Je me souviens que les personnes ne cessaient d’aller et venir, c’était un fonctionnement très flexible. Les premiers employés que nous avons engagés étaient incroyablement talentueux, drôles et créatifs, ils n’avaient pas d’idées préconçues de ce que devait être le magasin. En voulant exprimer qui ils étaient et ce que Patagonia
représentait à leurs yeux ils se sont accordé une grande liberté. C’était un incroyable succès non seulement pour le chiffre d’affaires mais également en terme d’image. Quelques belles anecdotes à nous offrir ? J’ai tellement de souvenirs de mes passages à Chamonix et de mon travail au magasin que ce serait difficile de n’en citer qu’un ou deux. Je me rappelle à coup sûr l’énergie qui émanait de la boutique et cela surpasse tous les souvenirs possibles. Lorsque vous démarrez quelque chose de ce type vous engagez évidemment des personnes que vous ne connaissez pas et qui souvent ne se connaissent pas non plus, mais quand la sauce prend et que ça fonctionne, l’alchimie qui se crée est quelque chose de bien supérieure à la somme de ces individus. Et c’est exactement ce qui s’est passé à Cham’. Le magasin Chamoniard représentait et continue de représenter avec succès les valeurs défendues par les Chouinard. Voilà ce qui leur importe, le sens de l’engagement et la beauté de faire ce qui est juste plutôt que ce qui fait la norme. Je pense que tous les magasins Patagonia s’efforcent de travailler dans ce sens. Et je dois admettre qu’à l’époque Chamonix montrait l’exemple. Voulez-vous adresser un message à Chamonix ? Les amis, je sais que c’est le trentième anniversaire du magasin et j’en profite pour vous saluer depuis le Nord-Est de l’Argentine. Je vous aime !
KRIS
THOMPKINS
Kris McDivitt, jeune assistante du service expédition, ca. 1974, GARY REGESTER.
KRIS
Kris McDivitt Tompkins has been working with Patagonia for the past 45 years. From her humble beginnings working in a tiny retail store, Kris graduated to become General Manager and eventually, CEO of the company. She held the position of CEO right up to her retirement in 1993, when she moved to Argentina with her husband Doug Tompkins to work on conservation projects in the region. On the 30th anniversary of our Chamonix store, we caught up with Kris to discuss the early philosophy of physical spaces and retail for Patagonia. Kris, what can you tell us about this early philosophy of the Patagonia stores? When Yvon started Chouinard equipment, we started out with a tiny retail store. I think that from this point forward both him and Malinda had a clear vision that retail should be a gift to the community as well as being the heart of activism and information for Patagonia customers, whether the space was in Ventura or in New York City. The idea was that you could come into the store and feel the image, intentions and genuineness of the company. I don’t think that this has ever changed. You have to remember that before the stores, you only had the catalogues displaying our brand which are very two dimensional. This is why physical places became so important for Patagonia. The really nice thing about the Cham store was that it had this vibe from the beginning in that it represented our hopes of being a gift to the community, a learning space, a place that makes you get out of bed in the morning whether it’s to pick up trash on the glacier or whatever it is. Moreover, there was this famous bar National down the street - a really classic, well-known place for all of the climbers in the early days – and the guys would come in and have a salad with bacon all over it and I remember thinking to myself: “I really hope that the Patagonia store becomes a tiny version of the bar Nat,” and I think it did.
Tell us about setting up the Chamonix store. I think that when we decided to open a store in Chamonix it was like “this couldn’t be better!” It was my brother Roger McDivitt, who first went over to find a space for us. My main role was to organise the space and to help fill it. I remember that the store had huge picture windows in the front, filled with trash that the team had accumulated from one of the glaciers nearby! The whole message was: “CLEAN UP! This place needs to be beautiful but look at all of the trash that we found!” - it was absolutely fantastic! You know, that was the spirit of the store from the beginning. It really was in that certain kind of way, the most outrageous and extraordinary store from the beginning. What can you remember about the year that the store opened? I can vividly remember the vibe of the area in those days. There was obviously still a lot of climbing going on at this time but there were also a lot of crazy, talented people in the community who were doing a lot of off-piste skiing. I suppose it was sort of the front end of the extreme skiing, early snowboarding days.
THOMPKINS
Why did you choose Chamonix as the first place to set up a store in Europe? I think we chose it because it represented all of the sports that we were really interested in - not so much fishing at the time but in terms of climbing and skiing and off-piste skiing, this made it a kind of no-brainer for us to put a store there. Not to mention the fact that most of us wanted to work out of Chamonix on and off, which we did! As far as I’m concerned Chamonix was an incredible story for the company. Remember that one of the first items Yvon wanted to make for Patagonia was the Chamonix Guides Sweater this heavy, wool sweater that traditional guides wore all of the time. So really we had this history that connected all of us even before we had ever been to Chamonix. What can you tell us about the early days of the Chamonix store? The early days were classic Patagonia. We were always living on a shoestring when we were getting the company going and Chamonix was part of that spirit. We would rent a flat and there would be ten of us in one room - this is actually how we went to retail shows and every place else! I remember that people were always coming and going and it was just this kind of free-flowing event. The people whom we found to work in the store in that first generation were just unbelievably talented and funny and creative; they had no barriers about what the store should be. They wanted to express who they were and who they thought Patagonia was and they took free license to do it in any way they wanted to. It was an incredible success not only for the business but also in terms of representing Patagonia’s image unbelievably well. Do you have any anecdote from the Chamonix store that you remember fondly? I have so many memories of being in Chamonix and working in the store and so it’s hard to highlight one or two of them. I just can’t stress enough the energy that came out of the store and that is really worth everything. When you’re opening something like this you are obviously hiring people whom you don’t know and who often times they don’t know
one another, but when it just gels and works its alchemy, it goes and creates something much greater than the sum of its parts and that is exactly what happened in Cham. The Cham store represented and continues to represent so much of the values the Chouinards had. That arc of what’s important to them, that arc of engagement and beauty and doing what’s right rather than what’s common, I think that all of the stores that we have are really striving to achieve that. And I have to say that Chamonix, in its day, was leading the charge on that. Would you like to send a message to Chamonix from here? Well guys, I know this is the 30th anniversary of the store and so I’m saying hi from North-Eastern Argentina. I love you all.
ANDY
Andy Parkin
Question de Style
Andy Parkin esquisse au pied des Drus.
02
PARKIN
Grimpeur britannique établi à Chamonix depuis la fin des années 1970, Andy s’est mué en artiste-alpiniste suite à un grave accident de montagne. Rencontre avec un anticonformiste qui n’a de cesse d’explorer l’infinie perception des montagnes. Originaire de Sheffield, Andy Parkin découvre l’escalade sur les falaises de grès qui bordent cette ville industrielle du nord de l’Angleterre. Il s’initie le plus simplement du monde à la varappe : “J’ai toujours fait du solo. Lorsque avec mes amis, nous avons commencé à grimper, on faisait du solo simplement parce que nous étions des gamins sans personne pour nous montrer ce qu’il fallait faire. On allait tout bonnement grimper. Sans corde, sans équipement et avec très peu de connaissances”. Il arpente les parois de calcaire du Peak District – le Verdon britannique, le soleil en moins - et rencontre de “vrais” grimpeurs. Il se familiarise avec le matériel et trouve déjà dans l’escalade le moyen de s’échapper des conventions. “On était très sportifs, mais on avait cette volonté de fuir les sports organisés, le rugby, le foot, le cricket. On voulait découvrir par nous-même ce qu’était l’aventure.” Après avoir écumé les parois des îles de Sa Majesté, Andy part en quête de nouveaux terrains verticaux et, après un passage par les falaises californiennes, tend le pouce en direction du mont Blanc.
La découverte de Chamonix Chamonix est déjà “the place to be” et en passe de devenir un point névralgique de l’escalade moderne. C’est une époque bénie, on campe aux abords de la Pierre d’Orthaz, le fameux bloc erratique devenu spot d’escalade et librement dans le champ Snell (celui du tenancier du célèbre magasin technique de la ville). Andy tombe sous le charme. “On a débarqué ici pour perfectionner nos compétences alpines et on a tout de suite été séduits. Chamonix est rapidement devenu un lieu où revenir. Tous les grimpeurs du monde se retrouvaient ici chaque été. C’était passionnant. Nous qui avions tendance à être marginalisés puisque l’escalade n’était pas encore reconnue comme pratique, ici nous avions le sentiment de faire partie d’un phénomène international. C’était l’un des avant-postes de notre contre-culture.
Comme le Yosemite, c’était l’une des capitales de notre mode de vie.” Prenant part à cette émulation vers les sommets, Andy poursuit son apprentissage dans le massif. Il enchaîne alors les classiques de haute volée avant de commencer à ouvrir ses propres lignes engagées. Il s’encorde souvent avec la fine fleur de l’alpinisme de l’époque (Thierry Renault, Roger Baxter Jones), mais ne délaisse pas pour autant son premier amour : le solo. Pur produit de l’école anglo-saxonne de l’escalade libre des années 1970 et de sa philosophie de l’escalade propre (ne pas utiliser de moyens de protection qui détériorent le rocher), Andy a toujours mis un point d’honneur à respecter une certaine éthique. Plus que tout, c’est le style qui importe. “L’idée était de grimper pour des raisons très pures. Notre éthique était en fait très stricte. La pratique à vue et en libre, c’est tout ce qui comptait.” L’été 1981 il tente seul la face nord des Droites, un gros morceau. C’est une face qu’il a déjà gravie par la voie Ginat l’hiver précédent. Minimaliste, Andy n’a emporté ni corde ni matériel de bivouac. Après une courte nuit sur le glacier d’Argentière, il se lance à minuit. Il compte répéter la voie classique Cornuau-Davaille mais sa frontale faiblit. Il se trompe d’itinéraire et ouvre une nouvelle voie très technique... L’année suivante il réalise la première ascension hivernale à vue et en solitaire de l’éperon Walker aux Grandes Jorasses. S’ensuivent des expéditions au Pakistan : le Broad Peak (8 051 m) est épinglé en 1983 au côté d’Alan Rouse et le K2 (8 611 m) lui échappe de peu avec Doug Scott. Il décide de s’installer dans la vallée pour entreprendre une formation de guide.
QUESTION
L’art in extremis L’année suivante, alors qu’il accompagne des clients sur une course classique aux abords du Cervin (le Riffelhorn), Andy a rendez-vous avec le destin : le bloc de rocher sur lequel il évolue se détache. L’accident est critique, il subit de lourdes interventions et échappe de justesse à la mort. C’est alors que l’art refait irruption dans sa vie. Lui qui avait abandonné la peinture s’accroche au pinceau pour supporter sa convalescence. Il dessine sans relâche et pense ne plus être capable de grimper, et pourtant, il reprend pied sur le rocher. Quatre ans après son accident et malgré un corps meurtri, Andy contredit les pronostics des médecins ; expéditions lointaines, ouvertures dans le massif du Mont-Blanc et même solos, l’ex-gamin de Sheffield montre une force de caractère exceptionnelle. En 1992, en compagnie de l’Américain Mark Twight, il ouvre une voie qui sera baptisée Beyond good and evil inspirée par la citation de Nietzsche “Nous sommes enchaînés à la douleur, à chercher nos vérités, au-delà du bien et du mal” en face nord de l’aiguille des Pèlerins (3 318 m). Chef-d’œuvre de l’alpinisme moderne, la ligne louvoie au fil de placages de glace précaires. En 1994, il ouvre avec le Français François Marsigny, une nouvelle voie glaciaire sur le Cerro Torre en Patagonie. Pris par le mauvais temps du grand sud, les deux alpinistes s’en sortent in extremis après une survie épique de dix jours. Cet exploit vaudra à la cordée un Piolet d’or, soit la plus haute distinction de l’alpinisme. Citons encore son expédition solitaire et hivernale au Népal en 2011 sur le Dingjung Ri (6 249 m) qu’il considère comme l’un de ses voyages les plus difficiles.
Connais-toi toi même S’il reprend l’alpinisme de haut niveau, le terrain exploratoire d’Andy n’est plus confiné à l’aventure mais devient une source d’inspiration artistique. Pastels, crayons et encres font désormais partie du voyage, tandis que se dévoilent d’autres formes de concepts esthétiques. Associé au sculpteur Philippe Vouillamoz, il réalise en 1989 une installation d’art recyclé sur la Mer de Glace. “Au printemps, au fur et à mesure que la saison se réchauffait et que la neige se retirait, on découvrait une multitude de déchets jusqu’alors emprisonnés
par la glace… On a alors décidé d’en faire une sculpture pour interpeller : ‘tout ça n’a rien à faire ici non ?’” Le “recyclage” sera désormais un de ses moyens d’expression privilégié. Il aime utiliser des fragments d’objets abandonnés, souvent charriés et rejetés par les glaciers. “Ces matériaux ramassés ont déjà leurs propres histoires. Beaucoup d’énergie a déjà infusé en eux et j’essaie de composer avec. En garder les formes basiques, les changer au minimum parce qu’ils sont déjà emplis d’une crédibilité, il y a de la vérité en eux. Voilà l’idée de mon art recyclé.” Pour Andy, alpinisme et art se nourrissent l’un l’autre. Ainsi, la contrainte physique devient énergie artistique. “Je recherche cette expérience pure. C’est pour ça que j’aime cet effort de peindre dans les montagnes. Les gens me disent ‘Pourquoi ne pas prendre une photo et travailler confortablement installé ?’ Mais je veux ressentir le froid, la soif, la faim. Cela semble apporter quelque chose à mon travail. Qu’importe si les gens s’en aperçoivent ou non, c’est important pour moi. J’utilise également la peinture comme baromètre de mon aptitude. Surtout si je suis seul. Si je commence à produire quelque chose de correct, si je commence à avoir ce sentiment de satisfaction, alors je me sens en phase avec mon environnement et je me dis que c’est le moment d’aller grimper. Ça remonte à cette philosophie zen des grimpeurs californiens des années soixante-dix. Connais-toi toi-même, sens-toi bien et lance-toi.” Quelques années après son emménagement dans la vallée et tandis qu’il poursuit sa convalescence, Patagonia ouvre son premier magasin européen à Chamonix. Andy se fait embaucher comme “agent de maintenance” (sic) pour terminer les petits travaux nécessaires à l’ouverture de la boutique. Mais rapidement son approche artistique de la montagne séduit la famille Chouinard. “Je me suis retrouvé à exposer dans les vitrines pour soutenir leurs projets environnementaux. Yvon et Melinda ont injecté beaucoup d’énergie personnelle à ces projets.” Andy intervient régulièrement au magasin. Il décore les vitrines, expose et propose des événements solidaires comme ce fut le cas en 1991 pour plaider la cause du peuple tibétain.
DE STYLE
Le Moulin des Artistes
Éternel optimiste
Dans les années 1990 Andy accompagne son ami Philippe Vouillamoz dans la réhabilitation d’une vieille bâtisse familiale. Autrefois moulin à grain puis scierie du village des Praz, ce monument du patrimoine chamoniard devient le Moulin des Artistes. Lieu de création et d’exposition, le bâtiment se transforme en espace de rencontre autour de l’art et permet de secouer l’apathie culturelle de la vallée. À la suite du décès de Philippe, le Moulin est investi par le fabricant de ski Rabbit on the Roof, Peter Steltzner et sa compagne peintre Anati Graetz. L’arrivée de ce couple d’artistes crée une nouvelle synergie autour du lieu ; de nombreuses expositions et soirées caritatives se succèdent, notamment pour les enfants d’une école de Bahrabise au Népal. Un soutien qu’Andy entretient depuis plusieurs années grâce à la fondation Community Action Népal créée par l’alpiniste Doug Scott.
Témoin des années les plus insouciantes de la vie Chamoniarde, Andy ne se démoralise pas en voyant le Chamonix d’aujourd’hui. “La communauté chamoniarde a beaucoup évolué en trente ans, mais subsiste ce sentiment de solidarité. Il y a une certaine spiritualité qui accompagne cette vallée, un vrai esprit de communauté au bon sens du terme. Je pense que ça n’a pas beaucoup changé depuis les premiers jours, quand des grimpeurs venaient ici pour camper dans la forêt et réaliser toutes ces ascensions. À l’époque, il y avait déjà un esprit de communauté entre grimpeurs. Aujourd’hui, je pense que c’est plus global.”
En décembre 2016, les flammes ravagent le Moulin. Andy perd son studio et une partie de ses œuvres, tandis que Peter et Anati voient disparaître leur stock de skis, l’intégralité de leurs moyens de production, mais surtout leur logement. Se faisant l’écho du mouvement de solidarité lancé par les habitants de la vallée, Julia, la responsable du magasin, organise une soirée de soutiens aux sinistrés. L’occasion de rendre la pareille à celui qui a si souvent coloré les vitrines de l’enseigne. Au cours de l’hiver 2017, Andy est de retour au 249 rue du Docteur Paccard pour exposer ses créations et les skis de son compère Peter. Aujourd’hui, les sinistrés ont trouvé refuge dans l’ancienne pharmacie du village d’Argentière et, en attendant la rénovation du Moulin, c’est dans la Pharmacie des Artistes que chacun peut découvrir les œuvres d’Andy, d’Anati et de Peter.
Cela ne l’empêche pas de regretter les dérives consuméristes des responsables de la ville qui veulent à tout prix rendre accessible ce qui ne l’est pas. “Il y a de quoi se faire du souci puisque Chamonix devient sur-développée. On essaie de vendre cet endroit à tout le monde, mais on ne peut pas faire de Chamonix un Alpine-Disneyland.” Espérons que les pensés de l’artiste-alpiniste seront entendues et que Chamonix n’envisagera son développement qu’avec style.
ALPINISTE
ESTHETE
ANDY
British climber Andy Parkin has been settled in Chamonix since the end of the 1970s. Following a serious climbing accident, Andy discovered his interest in mountain artistry. We were lucky enough to sit down and chat with this nonconformist, who never ceases to explore the infinite perceptions of the mountain. Sheffield native Andy first discovered climbing while exploring the sandstone cliffs which border his city in the North of England. Reflecting on his early days practising the art he tells us: “I’ve always
Andy is a typical by-product of the “clean” freeclimbing school of thought from the seventies and never uses safety tools which will harm the rock on his ascent. This is a philosophy which he
been soloing... We started soloing on the gritstone Britain because we were children from school, my friends and myself, that had no-one to show us. We just went climbing; we had no ropes, no equipment, and didn’t have much knowledge.”
has stuck with for his entire career. “The idea was to do it for the pure reasons. Not for anything else. Our ethics were very strict actually. On-site, soling, only that counted.”
These early explorations ignited his interest in rock climbing and it wasn’t long before he began to tackle the limestone walls of the Peak District. It was during this time that Andy became acquainted with several “real climbers” and began to familiarise himself with the standard climbing gear. Climbing soon became an escapism for him: “We were athletic but we wanted to get away from the idea of organized sports - the rugby, football, cricket thing - and just discover, for ourselves, some adventure.” After scouring the walls on all sides of the British Isles, Andy set off in search of new vertical landscapes. After passing through the Californian cliffs, he eventually hitchhiked his way towards the Mont-Blanc.
The discovery of Chamonix At the time when the valley was fast becoming a hotspot of modern climbing, Andy arrived and fell in love with Chamonix. “We came here to develop our alpine skills. We were straight away seduced into it, and so it became the place to come back to. All climbers from around the world met there every summer. It was fascinating. As marginalized as we were before climbing became accepted as a sport, we were becoming aware that we were part of an international phenomenon. Chamonix was definitely very important for a whole kind of counter culture in the 70’s and the 80’s. We enjoyed coming to places like this, and Yosemite, because they represented capitals - poles - and they represented our culture.”
In between his time tackling the summits, Andy undertook an apprenticeship in the massif. He easily conquered the classic routes and eventually began to open his own lines. Although he rubbed shoulders with some of the best climbers of his time – Thierry Renauld and Roger Baxter Jones to name but a few – he still missed the enjoyment of his solo adventures. In the summer of 1981, Andy attempted a solo ascent on the North Face of the Droites. Having already climbed the Ginat route the previous winter and being a minimalist, he did not take along any rope or bivouac gear. After a short rest on the Argentière glacier, he set off at midnight, intending to repeat the classic route Cornuau-Davaille. Despite his intentions, his headlamp soon began to dim and forced him to open up a new and very technical route. One year later, he achieved the first on-site solo winter ascent of the Walker on the Grandes Jorasses. Expeditions in Pakistan soon followed; after ticking off the Broad Peak in 1983 with Alan Rousse by his side, K2 narrowly escaped him with Doug Scott. After these adventures, he decided to settle in the valley and began training as a guide.
PARKIN
The extremis art A little over one year after settling in Chamonix, Andy had a brush with destiny; while guiding clients on a classic route near the Cervin, a block of rock from which he was hanging, tore away from the wall. While the accident was critical, Andy underwent heavy medical attention and narrowly escaped death. During his recuperation, art made a welcome return into his life and helped him immensely at a time when it was thought that he would never climb again. Despite the prognosis of his doctors, it was little under four years later that Andy defied all odds and returned to the sport, completing remote expeditions and opening new routes in the massif of the Mont-Blanc – both with friends and alone. In 1992 alongside American Mark Twight, Andy opened a new route on the north face of the Aiguille des Pélerins, which they baptised Beyond Good and Evil, inspired by Nietzche’s, “we are all chained to pain, seeking our truths, beyond good and evil.” A true masterpiece of modern alpinism, the route staggers along the edge of the precarious ice veneers. Refusing to rest, in 1994 he opened a new glacial route on the Cerro Torre in Patagonia with Frenchman Francois Marsigny. Struck down by bad weather, the two alpinists survived ten days in epic weather conditions. Their exploits earned them a Piolet d’or - the highest distinction of alpinism. Almost 7 years later, Andy completed his most difficult journey in conquering the Dingjung Ri (6,249m) in Nepal. All of this coming from the man who was never expected to take up a harness again.
Knowing Yourself While Andy eventually returned to climbing to complete all of these massive feats, he hasn’t left his paintbrush behind; his climbing essentials have now grown to incorporate his pastels, pencils, paper and inks. With seemingly no end to his talents, Andy did not limit his art to the page and working with the sculptor Philippe Vouillamoz, they created an installation of recycled art on the Mer de Glace. “In spring just when the climbing was warming up and so the snow was going down, we were on the Mer de Glace and suddenly there is rubbish on the glacier, that before was covered
by snow… And so we made a sculpture out of this stuff and people asked ‘how did that get up there?’ well it was up there already - we just found it; the point being that it shouldn’t be there should it ?” From this point forward, recycling became one of Andy’s preferred means of expression. To this day, he continues to use fragments of abandoned objects which he often finds on the glacier. “In using found materials there’s already a history, there’s a lot of energy gone into it already and if you make something from it... you’ve already got a story! I had this idea of respect for the material; keeping the basic form. I changed as little as possible because everything has got credibility, there’s a truth within it already and that’s what attracted me to it, to store it and carry on with the story and embellish it. But don’t ruin it and don’t try and dominate it too much. So, that’s the idea of recycled stuff.” For Andy, mountaineering and art nourish each other. “I want that pure experience, that’s why I want to go to the trouble of painting in the mountains. People say “well why don’t you just take a photograph and work here, where it’s comfortable?”. But I want to feel cold, tired, thirsty and hungry. Because it seems to lend something to the work. Whether others see it or not - it is important to me to know it. It has become a very important aspect of the way I climb, on expeditions particularly. I paint everywhere I go in the world, even on the big things. I use it as a barometer to test when I’m ready to go climbing, especially if I’m on my own. If I start producing some good art on the spot and I’m starting to get that good feel, I’m happy with what I’m doing. Then I know I’m in sync with my environment. And I think: ok, it’s time to go climbing. It’s going back to this old seventies thing that they (the Californians) were all involved in the zen approach to climbing; know yourself, feel good, then hit it, on-site. That’s the ideal.”
QUESTION
A few years after his move to the valley and while still in recovery mode, Patagonia opened their first European store in Chamonix. Andy was soon hired as a maintenance man, to finish all of the bits and pieces that needed to be done before the official opening. It wasn’t long before his artistic approach to the mountain seduced the Chouinard family. “I found myself exhibiting in the windows to support their environmental projects. And ever since the word go with Yvon Chouinard and Melinda Chouinard. We had a really good feeling about that because they liked all this and they brought a lot of their personal energy into these.” Andy soon became a regular in the store; decorating windows, arranging exhibitions and also organising solidarity events.
The Moulin des Artistes Towards the end of the 90’s, Andy began a renovation project on an old family home belonging to his friend Philippe Vouillamoz. Formerly a grain and sawmill in the village of Les Praz, this monument of the Chamonix heritage became what we now know to be the Moulin des Artistes. A place of creation and exhibition, the building soon evolved into an artistic and cultural meeting place in the valley. Following the death of Philippe, the space in the Moulin was filled by the owner of Rabbit on the Roof, a wooden ski company. The arrival of the couple, Peter Steltzner and Anati Graetz, created a synergy in the place and the building was soon packed with visitors attending numerous exhibitions and charity events for causes such as the school of Bahrabise in Nepal. To this day, Andy continues his work with this organisation thanks to his involvement with Community Action Nepal, the foundation founded by alpinist Doug Scott in 1975. In December 2016, the mill was unfortunately ravaged by a fire, resulting in Andy losing his studio and with Peter losing his entire stock of skis, his machinery and his home with Anati. Echoing the many solidarity movements organised by Andy and other inhabitants of the valley, the then Patagonia store manager Julia, organised an evening of support for the occupants. The shop continues to be known for returning favours to those who have put their time and energy into building and contributing to life in the valley.
Eternal Optimist During the Winter of 2017, Andy returned to 249 Docteur Paccard street to exhibit his creations and the skis of his friend Peter. Today, the victims have found refuge in the old pharmacy in the village of Argentière and while waiting for the renovation of the Moulin, it is here that everyone can discover the works of Andy, Anati and Peter. Having witnessed the most carefree years of life in Chamonix, Andy remains positive about the current state of the valley: “In 30 years the Chamonix community has certainly changed but there is still that underlying sense of solidarity and a certain spiritualism that goes with the valley. There is a strong sense of community still, and that what’s good. I think that hasn’t change much from the early days when the Americans like Chouinard came across and camped in the forest, and did the climbs they did, and we did that as well. There was still a sense of community then. Like that, amongst climbers. Now it’s kind of more global.” Having said this, Andy is more aware than ever of the threat of consumerism and of the City Officials who want to make the city as accessible as possible whatever it takes. “There is a lot of worry about because as Chamonix evolves and gets overdeveloped and we’re trying to sell this place to everybody, we have to realise that we can’t make a kind of Alpine‑Disneyland out of it, no matter how hard they try.” Undoubtedly during these times where strength and resilience are needed, one needs to look no further than to artist, climber and all-round hero Andy Parkins, for inspiration.
OF STYLE
“Je recherche cette expérience pure. C’est pour ça que j’aime cet effort de peindre dans les montagnes.”
03
ROCH
“Let my people go jumping !”
Roch, un drôle d’oiseau chamoniard.
ou comment s’envoler à sa pause déjeuner.
MALNUIT
Ancien employé du magasin, Roch Malnuit fut un témoin privilégié de l’aventure Patagonia à Chamonix. Aujourd’hui instructeur de BASE jump, ce touche-à-tout des cimes garde un souvenir joyeux et aérien de ses années au 249 rue du Docteur Paccard. Originaire de Lyon, Roch rejoint Chamonix à l’aube de l’adolescence pour intégrer la section sport étude hockey sur glace du collège. Cependant, la surface plane d’une patinoire va rapidement lui paraître étriquée face aux espaces verticaux qui dominent la vallée. Il s’essaye à tous les sports qui lui tombent sous les mains… ou les pieds… et devient un insatiable explorateur du massif. Ses talents de snowboarder l’amènent à devenir ambassadeur Patagonia à tout juste 18 ans. Durant l’été, il vient grossir les rangs de la boutique et rejoint l’équipe pour un mi-temps à partir de 2000. Ses horaires de travail lui permettent de parfaire son apprentissage de la montagne et de réaliser de grandes courses en pente raide ou en alpinisme mixte. À l’aube de ses 20 ans, il est initié par son père – Jacques Malnuit, l’un des pionniers du BASE jump - à cette discipline alliant parachutisme et vol libre qui consiste à sauter d’objets fixes ou de montagnes avec un parachute. Il se lance corps et âme dans la pratique et succombe bientôt à la tentation de la wingsuit – vol en combinaison ailée pour en devenir l’un des chefs de file tricolore.
Montagnard passionné et éclectique, Roch conjugue avec talent tous les aspects des activités de montagne : parapente, télémark, ski, snowboard, alpinisme, escalade et VTT. De part son expérience et son tempérament posé il est devenu le représentant local de la communauté BASE jump. Il est l’un des interlocuteurs privilégiés des pouvoirs publics pour dialoguer sur l’avenir d’une pratique suspendue depuis un an à la suite de nombreux accidents. Cet oiseau rare est de ceux qui n’ont plus quitté la vallée pour y vivre une existence paisible – celle d’un père de famille avec sa compagne Marie et ses filles Nathy et Bella - pimentée de puissantes aventures alpines. Et si la montagne est un terrain de jeu dangereux, il n’a qu’une consigne à observer auprès des siens, mais elle est impérieuse, redescendre entier pour le souper. Après plus de dix ans de bons et loyaux services pour Patagonia, Roch a pris son envol pour monter Rockdrop - première école de BASE jump hexagonale - et transmettre ainsi tout son savoir sur l’art de la chute. Roch a accepté de revenir sur sa riche expérience chez Patagonia et notamment l’une de ces belles journées où la pause déjeuner s’est étirée sur 6 000 mètres de dénivelé. “Pour les montagnards, le charme de Chamonix réside dans l’accessibilité à la montagne. Pour moi qui suis BASE jumper c’est aussi le nombre important de falaises qui nous entourent. Michelle Trehet notre responsable de l’époque avait vraiment compris la philosophie Let my people go surfing d’Yvon Chouinard. Mon poste au magasin me permettait donc de pratiquer presque quotidiennement la montagne. En fonction des conditions, je pouvais aller faire une descente en snowboard à l’aiguille du Midi, un vol en parapente ou un saut en BASE jump avant d’embaucher. C’est vrai qu’il y a une super ambiance au sein du magasin et beaucoup de gens pratiquent des sports de montagne. C’est ce qui fait que l’équipe est si particulière. Lors de mon passage j’ai vraiment apprécié ces moments-là. Notre pause de midi était assez longue, ce qui nous permettait d’aller pratiquer nos sports favoris. De ces années passées au magasin, j’ai une petite anecdote qui me revient en mémoire ...
LUNCH
”Un ami avait repéré un saut depuis l’arête Midi‑Plan au départ de l’aiguille du Midi. Je les avais prévenus que je n’avais qu’un court créneau entre 12 h 30 et 15 heures puisque ce jour-là c’était moi le responsable de l’ouverture et de la fermeture des portes. Après avoir fermé le magasin et m’être assuré d’avoir mis les clefs en sécurité, je me suis dirigé fissa en direction du téléphérique. Pour gagner un peu de temps Matt Gerdes et Erwan Madore m’avaient réservé une place dans la benne. Partis légers nous avons rapidement avalé la traversée en alpinisme classique en direction de l’aiguille du Plan. Nous avons escaladé le rognon du Plan pour trouver le point de départ de notre vol en wingsuit. Après une heure et demie d’approche, nous avons inauguré un saut en aile d’un peu plus d’une minute. J’ai réussi à me poser près du magasin et à être à l’heure pour l’ouverture ! J’ai même pu savourer mon sandwich. De bons moments passés entre amis dans un environnement que j’adore, c’était une pause déjeuner bien remplie !”
BREAK
3,2,1 BASE !
ROCH
Former store employee Roch Malnuit was a privileged witness of the Patagonia adventure in Chamonix. Now, a jump instructor at BASE, he has a joyful and aerial memory of his many years at 249 rue du Docteur Paccard. It was on the brink of adolescence that Lyon native Roch Malnuit, first arrived in Chamonix to enrol in a hockey programme in the local high school. Despite the intentions of his arrival, this young adventurer soon left the icy, horizontal planes of the rink in favour of the vertical spaces which dominated the valley. An exceptionally gifted young man, Roch tried every sport to fall under his hands (or feet!) and became an insatiable explorer of the massif. His snowboarding talents soon caught the eye of Patagonia and he became an ambassador at the age of 18 before taking on a part-time job in the store in 2000. Luckily, the working hours in Chamonix allowed him to perfect his talents and to partake in many steep slope and mixed climbing adventures. At the age of twenty, Roch’s father, Jacques Malnuit - one of France’s base-jumping pioneers – introduced him to the discipline, beginning with a mixture of parachuting and paragliding. Roch threw himself both literally and mentally into the practice and today, he is one of the French leaders in the sport. An eclectic and passionate mountain dweller, there is no end to Roch’s sporting talents. Be it paragliding, base-jumping, skiing, snowboarding, alpinism, climbing or mountain biking, Roch approaches every activity with a calmness and a level of experience which has led him to become one of the leading representatives of the BASE jumping community. He is so highly respected in this field, that following several accidents which led to a year-long suspension of the sport, he was invited as a guest speaker to talks with the public authorities. While this daredevil never seems to take time to rest, he only has one rule to follow, set by his wife Marie and daughters Nathy and Bella: to come home for dinner in one piece!
After ten years of faithful service for Patagonia, Roch flew the nest to create Rockdrop – France’s first BASE jumping school – as a means of sharing his knowledge on the art of falling. In between his busy schedule, he caught up with us to share his memories from his time at Patagonia and in particular, the one lunch break that he managed to turn into a 2,000m drop. “For mountain dwellers, Chamonix’s charm lies in the access to the mountains. For me, as a base jumper, it is also the significant number of cliffs surrounding us. Back when I worked in the Patagonia store, Michelle Trehet, our manager, really understood the philosophy of Yvon Chouinard’s Let my people go surfing. Luckily for me, my job there allowed me to go to the mountains almost daily. Depending on the conditions, I was able to snowboard at the Aiguille du Midi, go paragliding or go base jumping before clocking on. It is true what they say about there being a great atmosphere in the store and that everyone had such an interest in the activities – this is what made the team so special for me. During my time there I really appreciated the moments we had together and our long lunch breaks where we could practice the sports we liked. Having spent so many years there, I have a lot of stories. On this occasion, I am reminded of one in particular ...
MALNUT
“I had a friend who spotted an opportunity to jump from Midi-Plan ridge at the start of the Aiguille du Midi. I told him that I only had time between 12:30-15:00 because I was the one who was responsible for opening and closing the store and so, after I closed the store, I quickly made sure that the keys were safe and headed to the cable cars. To save some time, Matt Gerdes and Erwan Madore had booked me a place in the lift. We were packed so lightly that we quickly did the crossing towards the Aiguille du Plan. From there, we climbed the Rognon du Plan to find the best departure point for our jump. After almost one-hour travelling, our descent was a little more than one minute. I managed to land near the store and made it back in time for the opening - I even had time to enjoy my sandwich! It was a great time, spent with great friends in an environment that I love. Most importantly however, it was an action‑packed lunch break!�
CHAMONIX
30 ANS
“Une des mes photos préférées de nos vêtements en action” - Yvon Chouinard
Chamonix, Winter 1989, GARY BIGHAM.
Chamonix, Fall 2000, GREG VON DOERSTEN.
OVNI en survol au-dessus du glacier d’Argentière.
CHAMONIX
Nettoyer pour créer : en 1989 les artistes Andy Parkin et Philippe Vouillamoz érigent une immense sculpture en utilisant des déchets ramassés sur la Mer de Glace. Chamonix, Fall 1990, GARY BIGHAM.
POLLUTION CRISIS
A
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04
DE L’AIR
De l’Air On étouffe toujours au pied du mont Blanc.
DE L’AIR
À l’instar de nombreuses vallées alpines, la vallée de l’Arve affiche régulièrement des taux de pollution à faire pâlir les plus grandes mégalopoles. Face à ce problème majeur de santé publique, les associations citoyennes se mobilisent pour secouer l’apathie des pouvoirs publics. Chaque début d’hiver, les conditions climatiques favorisent des pics de pollution inquiétants qui font la une des médias nationaux et écornent l’image d’Épinal de l’air pur de nos montagnes. Industrie,
Ces polluants peuvent être responsables d’irritations et altérer la fonction respiratoire, favoriser les infections pulmonaires et sont, pour certains, délicieusement cancérigènes. À
chauffage au bois, transport routier, les sources de pollutions sont diverses et se combinent pour donner un cocktail asphyxiant. Dès les débuts de son implantation à Chamonix, Patagonia s’est engagé aux côtés des associations locales qui luttent contre la pollution atmosphérique. Petit éclairage sur ce fléau et sur l’engagement citoyen qui vient au secours de nos poumons.
ce cocktail détonnant s’ajoutent de nombreux éléments qui ne sont pas forcément surveillés par Atmo, l’observatoire pour la surveillance et l’information sur la qualité de l’air. Certes moins concentrés, certains sont tout aussi nocifs. Ainsi, le transport routier émet 382 polluants, dont 30 sont cancérigènes.
Le syndrome de la cuvette La vallée de l’Arve, qui englobe celle de Chamonix, s’étend sur une centaine de kilomètres entre Annemasse (ville riveraine de Genève) et le col de Balme. Bassin industrialisé et fortement densifié, c’est aussi l’un des grands axes du trafic international vers l’Italie via le tunnel du Mont-Blanc. En raison de son encaissement, de son urbanisation et des activités humaines qu’elle accueille, elle est fréquemment soumise à d’intenses épisodes de pollution de l’air. À l’automne et en hiver, les phénomènes d’anticyclones entraînent de longues périodes de beau temps et de fréquentes inversions de températures. L’air réchauffé par le soleil en altitude forme alors un couvercle invisible qui fige l’air froid et les polluants au fond des vallées. Si l’anticyclone se prolonge, les émissions dégagées ne peuvent pas s’évacuer et s’accumulent. En été, les vallées sont naturellement ventilées et de telles concentrations de pollution sont plus rares.
Une pollution multifactorielle Les habitants de la vallée de Chamonix, comme tous ceux de la vallée de l’Arve, respirent à pleins poumons des quantités trop élevées de polluants. Les principaux incriminés sont les PM10 (fines particules dont la taille est inférieure à 10 micromètres), le dioxyde d’azote (NO2) et les benzo(a)pyrènes (BaP) de la famille des HAP (Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques).
Suivant leur situation géographique, les communes sont plus ou moins concernées par un polluant en particulier. Les bronches d’un Chamoniard seront plutôt noircies par le dioxyde d’azote (émis principalement par le transport routier) tandis qu’un habitant de Passy sera plutôt exposé aux particules fines et au benzo(a)pyrène, notamment dégagés par les usines des alentours. Cela dit, s’il y a un facteur sur lequel les pouvoirs publics peuvent agir rapidement, c’est celui du transport international, notamment le ferroutage et particulièrement la ligne ferroviaire transalpine du Mont Cenis, largement sous-utilisée. Certes sur les dix dernières années la qualité de l’air à Chamonix s’est très légèrement améliorée avec notamment une baisse régulière des émissions de particules au centre-ville et une baisse plus récente aux Bossons (aux abords de la Route Blanche), résultats sans doute de l’effort engagé en terme de chauffage et grâce à la généralisation des filtres à particules. Mais les normes européennes et françaises de qualité de l’air restent dépassées de façon récurrente. À la fin de l’année 2016 un anticyclone exceptionnel a entraîné un dépassement du seuil de pollution pendant plus de 35 jours consécutifs. Cet épisode sans précédent a réveillé les consciences des citoyens du Pays du Mont-Blanc qui se sont mobilisés sans relâche.
POLLUTION CRISIS
Il faut que tu inspires Créée en 1991 sous l’impulsion de deux guides, Christian Mollier et Denis Ducroz, l’Association pour le Respect du Site du Mont-Blanc a été la première association locale à monter au créneau pour contrer un projet de doublement du tunnel. À la suite de l’incendie de 1999 qui a coûté la vie à 39 personnes et entraîné une longue fermeture du percement transalpin, l’ARSMB s’est trouvée en première ligne du combat contre le retour des camions. Malgré la détermination et les manifestations fleuves, les promesses des dirigeants de tous bords politiques confondus de ne plus jamais faire passer un seul poids lourd sous le mont Blanc n’ont pas été tenues. En 2003 les camions étaient de retour, fumants et triomphants. Les efforts de l’ARSMB ont souvent été mis à l’honneur dans les vitrines de l’échoppe Patagonia et l’association a reçu un soutien financier entre 1998 et 2006. Cette année, suite aux importants épisodes de pollution et à l’approche des élections législatives du printemps 2017, l’association a mis en place Les États Généraux de l’Air pour recenser les doléances des citoyens face à la crise. Elle a également organisé un débat intitulé Le Grand Oral Législatives pour connaître l’engagement des futurs candidats à la députation. Dans son combat l’ARSMB a notamment été rejoint par l’association Environn’Mont-Blanc créée en 1996 afin de combattre un projet d’aménagement routier faramineux à l’entrée des Houches. Une bataille gagnée face à des forces colossales qui a convaincu ses initiateurs que les citoyens pouvaient déplacer des montagnes. Emmenée par sa très dynamique présidente, Anne LassmanTrappier, l’association a été et demeure de toutes les batailles pour améliorer la qualité de l’air et chercher des alternatives au tout routier. Soutenue financièrement depuis 2014 par Patagonia, membre du réseau AIR 74, Inspire est l’une des associations locales les plus entreprenantes.
En 2013, l’association a lancé sa campagne Inspire. S’affranchissant des pratiques associatives classiques, elle a permis de toucher un public plus large, notamment la communauté anglosaxonne, donnant au mouvement plus de voix. Cette campagne a amené une réflexion globale sur la crise de la pollution, s’attaquant aux problèmes du transport routier international sans occulter le problème du chauffage et celui du transport individuel. Elle a également défriché le terrain de la mobilité douce, encourageant le covoiturage, l’auto-stop sécurisé et les transports en communs. Vélo’rutionnaire, Inspire a fait de la bicyclette l’un de ses chevaux de bataille. Cette campagne a également permis aux locaux de prendre conscience qu’ils étaient certes victimes mais aussi en partie responsable du problème.
POLLUTION CRISIS
Au printemps 2017, le succès d’Inspire a amené l’association à se rebaptiser en son nom. Exit donc Environn’Mont-Blanc, l’association se nomme dorénavant Inspire. Associée à Cellule Verte HauteSavoie (plateforme d’échange et d’information sur le développement durable), elle a réalisé un web documentaire intitulé ATMOSphère. Ce documentaire interactif a pour objectif de donner aux citoyens, et particulièrement les jeunes, les outils pour mieux comprendre l’urgence de la situation et fournir des pistes pour devenir acteur de la réduction des émissions polluantes. En mai dernier, Nicolas Hulot, nouveau ministre de la Transition écologique et solidaire, annonçait vouloir “s’attaquer d’abord à la situation de la Vallée de l’Arve”. L’avenir nous dira si le nouveau ministre aura les coudées franches pour mettre ses paroles à exécution. Lui qui, en 1997, défilait à vélo dans la vallée de Chamonix pour l’interdiction des poids lourds, porte désormais les espoirs des habitants pour un véritable changement de politique environnementale.
Trois principaux secteurs d’activité ont été identifiés comme émetteurs de polluants : Le transport routier responsable à 80% des émissions de dioxyde d’azote (NO2) et à 25% des émissions de particules (PM10). Le chauffage au bois et au fioul responsable de 50% des PM10 et 20% des HAP (hydrocarbures aromatiques). L’industrie responsable à 60% des HAP et 20% des PM10.
Sources Observatoire Atmo Auvergne-Rhône-Alpes www.air-rhonealpes.fr Association Nationale pour la Prévention et l’Amélioration de la Qualité de l’Air www.respire-asso.org Mesures et prévisions de la qualité de l’air en régions alpines www.transalpair.eu Association Inspire inspire74.com/ et le site du web documentaire | www.inspire74.com/atmosphere Association pour le Respect du Site du Mont-Blanc www.arsmb.org
Jour de
marché
DE L’AIR
DE L’AIR
Like many alpine valleys, the Arve valley exhibits pollution levels to rival those of the largest cities in the world. Faced with this major issue of public health, citizen associations are rallying in an attempt to awaken the apathy of public authorities. At the beginning of every winter, the front pages of our national media are plastered with headlines highlighting the disturbing peak in pollution levels and the subsequent effect on our planet. These images and articles, call into question our idealised images of the “clear air” environment in the countryside and in the mountains. Be it industry, wood heating or even road transport, the sources of this pollution are diverse and widespread. Since their establishment in Chamonix in the 1980s, Patagonia has been working alongside local associations to fight against atmospheric pollution.
The Bowl Effect The Arve valley, which encompasses the Chamonix valley, stretches over one hundred kilometres between Annemasse (Geneva’s French neighbour) and the Col de Balme. An industrialised and densely populated area, it is one of the main routes of international traffic to Italy via the Mont-Blanc tunnel. Due to its narrow sides, the urbanisation and increase in human activity in the area, the valley is frequently subjected to intense episodes of air pollution. In autumn and winter, high atmospheric pressure causes long periods of good weather and frequent temperature inversions. To put it simply, when the air is heated by the sun at high altitude, an invisible layer is formed which freezes the cold air and pollutants. If this anticyclone is prolonged, the released emissions cannot escape, causing them to accumulate at the bottom of the valley. During the summer period, the valleys are naturally ventilated and so these concentrated levels of pollution are rarer.
Different sources of pollution The inhabitants of the valley of Chamonix, like those from the valley of the Arve, are breathing in an increased amount of toxins and pollutants. The main contributors are PM10, nitrogen dioxide (NO2) and Benzo[a]pyrene (BaP) from the PAH (Polycyclic Aromatic Hydrocarbons) family.
These pollutants can cause irritation, impair respiratory function, promote lung infections and can for some, be highly carcinogenic. Within this explosive mixture are many elements that are not necessarily known to ATMO – the organisation for monitoring and providing information on air quality. Although these additions may be less known, they are equally as harmful. All in all, road transport emits 382 pollutants, 30 of which are carcinogenic and are exposed to these inhabitants on a daily basis. Depending on their geographical situation, municipalities are more or less concerned with one pollutant or another. While the bronchi of a Chamoniard will be blackened by nitrogen dioxide (emitted mainly by road transport), the lungs of a Passy inhabitant will be exposed to fine particles and BaP, released by the nearby factories. Although there are many factors which need to be tackled, there are some areas in which the government can act quickly to improve air quality. In particular, the issue of national transport and particularly rail transportation – the transalpine railway line of Mont Cenis being just one example – which is largely under-used. Over the past decade, the air quality in Chamonix and Les Bossons has improved slightly, most notably due to the steady decline in particle emissions in the city centre. This decrease can also be put down to the joint effort to improve heating systems and particle filters in modern vehicles. However, European and French standards of air quality are frequently passed and at the end of 2016, an exceptional period of high air pressure caused the pollution threshold to be exceeded for 35 consecutive days. This unprecedented episode has awakened the general consciousness of Mont-Blanc’s citizens who have relentlessly swung into action.
POLLUTION CRISIS
Take a deep breath Created in 1991 by guides Christian Mollier and Denis Ducroz, the Association for the Respect of the Mont-Blanc Site was the first association to protest against the doubling of the Mont-Blanc tunnel. Following the fire in 1999 that killed 39 people and resulted in a lengthy shutdown of the underpass, the ARSMB found itself on the frontline in the fight against the return of any trucks. Despite their determination and incessant demonstrations along with the promises of all political sides to never allow HGVs to pass under the Mont Blanc again, the trucks returned steaming and victorious in 2003. The efforts of the ARSMB have often been showcased in the Patagonia Chamonix windows, and the association received financial support from the company between 1998-2006. This year, following major pollution episodes and the imminent approach of legislative elections in spring ’17, the association established the Air General Estates to collect the complaints of citizens who are affected by the crisis. They also organised a debate entitled ‘The Grand Oral Legislative,’ to identify the commitment of future delegates to the cause. Joined by the Environn’Mont-Blanc association, the ARSMB have also fought against the gargantuan project of road construction at the entrance of Les Houches. Winning this battle convinced both the organisation and the citizens that they could move mountains. Led by its dynamic president Anne Lassman-Trappier, the group remains at the forefront of all battles to improve air quality and find alternatives to road transportation. In 2013, the association launched its Inspire campaign. Breaking away from the traditional Association model, it has reached a wider audience – including the Anglo-Saxon community – and has given even more voice to the movement. This campaign led to a global reflection the pollution crisis, tackling the problem of international road transport, without overshadowing the problems caused by heating and individual transport. They’ve also laid the groundwork for increased car-sharing, safe hitchhiking and improved public transport.
In spring 2017, spurred by the success of their campaign, Environn’Mont-Blanc renamed itself Inspire. Together with Cellule Verte Haute-Savoie (the platform for the exchange of information on sustainable development), they created a web documentary entitled ATMOSphère. This interactive documentary aims to give citizens, especially young people, the tools to better understand the urgency of the environmental situation, and to provide opportunities to become a participant in the fight against pollution. Last May, the new Minister of Ecology, Sustainable Development and Energy, Nicolas Hulot, announced his desire to “tackle the situation in the Arve Valley.” For now, only time will tell if he will be given the free rein to follow through on his promises. It is now down to this man who himself protested on his bicycle in the Chamonix valley in 1997 for the ban of HGVs, to realise the hopes of the inhabitants and to bring about a real change to our environmental policy.
Three primary sectors have been identified as the main culprits of air pollution: Road transport the cause of 80% of nitrogen dioxide (NO2), and 25% of particulate emissions (PM10). Wood and oil heating emits 50% of the total PM10, and 20% of the total PAHs (Polycyclic aromatic hydrocarbon) released into the atmosphere. Industry responsible for 60% of PAH emissions and 20% of PM10.
Sources Observatory Atmo Auvergne-Rhône-Alpes www.air-rhonealpes.fr National Association for Prevention and Improvement of Air Quality www.respire-asso.org Measurements and forecasts of air quality in alpine regions transalpair.eu Association Inspire inspire74.com/ et le site du web documentaire | inspire74.com/atmosphere Association for the Respect of the Mont-Blanc Area www.arsmb.org
BOUTCH A BOUTCH
Initiative locale non-partisane, indépendante, autofinancée et ouverte à toutes et à tous, l’association Boutch à Boutch propose aux habitants de prendre en main leur quotidien et d’unir leur force pour participer directement à la vie communautaire. Chamoniard, lève-toi. En 2013, afin de tendre l’oreille aux souhaits des habitants et tenter de resserrer les liens de la communauté chamoniarde, un groupe de jeunes gens s’organisent. Ils souhaitent encourager le rassemblement, la discussion et la concertation entre citoyens du petit val. Ils veulent faire se rencontrer les boutchs (ce qui signifie jeune taureau en patois local), ces villageois difficiles d’approche au tempérament bourru et un peu têtus. Afin de mettre leur ambition en pratique, ils créent une association. Son patronyme est tout trouvé, ce sera Boutch à Boutch ! L’association s’attache à stimuler la participation des habitants à la vie de leur cité et aux décisions publiques. L’idée est d’institutionnaliser un débat public et de donner vie à des propositions citoyennes dans une vallée où l’argent prend insidieusement le pas sur le respect des hommes et de l’environnement. Une philosophie résumée par la devise de l’association : “Soyons à la hauteur de nos montagnes !”. Chaque automne, une votation ouverte à tous est organisée pour permettre aux citoyens de proposer de nouvelles initiatives. L’événement regroupe entre 200 à 300 personnes et quelque 20 propositions sont présentées. Elles sont regroupées sous trois thèmes : l’amélioration du quotidien, des relations entre habitants et l’environnement. À l’issue de cette journée de votation, les propositions ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages sont sélectionnées. Puis, lors de l’assemblée générale, une des propositions plébiscitées est sélectionnée pour être mise en œuvre l’année suivante. Il s’agit donc d’une expérimentation de démocratie participative – en proposant des idées aux dirigeants - et de démocratie directe, les membres de l’association s’investissent personnellement dans les projets choisis.
Prêts de jardin et permaculture en montagne Le premier projet de l’association, “Le Potager de mon pote âgé”, s’est concrétisé au printemps 2014. Le concept est simple, il s’agit de mettre en relation propriétaires de terrains cultivables et jardiniers “sans terre”. L’objectif est de multiplier les potagers dans la vallée pour produire localement des fruits et des légumes biologiques, mais aussi de consolider les liens entre les différentes générations et ainsi assurer la transmission des connaissances en culture maraîchère de montagne. En parallèle de ce projet, la mairie a mis à disposition de l’association un terrain pour créer un jardin pilote. Situé à quelques minutes du centreville, le jardin collectif de l’île des Barrats est ouvert à tous et non clôturé. Il permet aux jardiniers de l’association d’expérimenter des techniques de permaculture en montagne. Théorisée par Bill Mollison, la permaculture est une méthode d’agriculture régénérative (par opposition à l’agriculture intensive) qui prend en considération la biodiversité de chaque écosystème. Son ambition est de produire durablement en étant le plus économe possible en énergie, en respectant totalement les êtres vivants et en laissant à la nature “sauvage” le plus de place possible. Cette belle parcelle d’environ 500 m2 a été pensée comme un jardin pédagogique et non pas comme un terrain uniquement productif. Il fertilise les terres mais aussi les discussions et permet la transmission des savoirs et techniques. C’est un îlot de verdure où il fait bon flâner et se retrouver. L’association en a fait son quartier général et y organise régulièrement des événements. Ses bénévoles exportent également leur savoir en intervenant dans les écoles primaires de la vallée.
BOUTCH A BOUTCH
05
Arthur Ghilini
Soyons à la hauteur de nos montagnes. Coup de projecteur sur Boutch à Boutch, mouvement d’idées et d’initiatives de la Vallée de Chamonix.
BOUTCH A BOUTCH
L’or noir du jardinier Une autre initiative portée par l’association est un projet de compost de village qui a vu le jour au printemps 2016. Il s’agit d’accompagner des groupes d’habitants d’un même hameau à créer un site de compostage collectif. Le but du projet intitulé “Passez, compostez” est de ne plus gaspiller de matières organiques, mais de les composter pour fertiliser les sols des potagers. Ce projet est aussi une réponse pragmatique au problème de qualité de l’air qui touche la vallée de l’Arve. En effet, l’incinération des déchets est une des causes de la pollution atmosphérique. Or, le compostage permet de réduire jusqu’à 30 % la part de déchets transportés et incinérés au centre de traitement de Chedde. Le projet a reçu un soutien sonnant et trébuchant de la part de Patagonia et un composteur a même été installé à l’arrière de la boutique pour permettre aux employés de recycler leurs déchets organiques. Élaboré avec le SITOM de la vallée de l’Arve, l’organisme local responsable du traitement des déchets, le projet a permis de mettre en place 6 sites de compostage. Un résultat encourageant, mais qui aurait pu être bien plus élevé si les Boutchs ne s’étaient pas heurtés à une certaine lourdeur administrative… Qu’importe, la révolution par les vers est en marche !
La route de Donovan ! Si beaucoup d’habitants pensent instinctivement au jardin à l’évocation de l’association, de nombreuses autres actions ont vu le jour. Ainsi, dans cette vallée où les loisirs sportifs sont omniprésents, l’association a chapeauté des cours de ski gratuits (matériel, forfaits et leçon) et une sortie hors-piste à la Vallée Blanche encadrée par des guides (gratis elle aussi). Histoire que les locaux sans le sou ne soient pas les laissés pour compte des sports de glisse.
Seul bémol à ce brillant compte rendu, la proposition retenue lors de la seconde assemblée générale demeure à ce jour dans les cartons. En effet, le projet de La Maison des Associations et des Initiatives Citoyennes n’a pas reçu l’accueil escompté de la part des pouvoirs publics. Dommage, puisque ce lieu de rencontre et de travail pour les groupes de la vallée était, selon les responsables, primordial au développement de la vie associative. Qu’à cela ne tienne, l’association ne désespère pas et a déjà un nouveau projet sur les rails : une caravane-donnerie baptisée “La Donovan”. Il s’agira de vagabonder d’événement en événement pour collecter des biens afin de les redistribuer gratuitement. De quoi assurer la circulation des biens dont on souhaite se séparer tout en réduisant nos déchets. Offrir une deuxième vie à nos objets, les faire durer le plus longtemps pour diminuer notre empreinte, cela ne vous rappellerait pas le cheval de bataille d’une certaine marque californienne ? Si vous êtes intéressé par les actions de Boutch à Boutch, n’hésitez pas à les contacter, l’association a toujours besoin de forces vives. Rejoignez-les !
BOUTCH A BOUTCH
It’s 2013 and Chamonix has been jolted into action. Set up by a group of young people, a new association – Boutch à Boutch - has been formed. The intentions of the youngsters are simple: to organise, gather and engage with the citizens of the Chamonix valley. Moreover, this group wishes to meet with the local boutches, meaning ‘young bull’ in the local slang or as they describe in their own words, “someone who has little to say or… the courage to express themselves”. With thousands of tourists descending upon Chamonix each year, the Boutch à Boutch association have tried to stimulate the participation of locals regarding the day-to-day goings-on and public decisions concerning their city. In attempting to create a public debate, this young group are hoping to give a voice back to the people, in an area where money and capitalism have begun to take precedence over respect for the people and the environment. Each autumn, an event is organised in the town where the locals are welcome to propose new initiatives for the valley. With an attendance of between 200-300 people, proposals are welcome under three main themes: improvements to everyday life, relations between inhabitants and, the environment. At the end of the meeting, the proposals with the highest number of votes are selected. These proposals are then put to the general assembly and one will be implemented the following year. It is through this simple yet effective democracy, that the group hope to involve each citizen personally in the chosen projects for their region.
Communal Gardens and Permaculture The first project undertaken by the association, “Le Potager de mon pote âgé”, began in Spring 2014. This simple concept aimed to connect local landowners, with gardeners lacking the space to cultivate. The aim was to increase the number of vegetable gardens in the valley, but also to produce local and organic fruits and vegetables. In conjunction with this project, the town hall donated a plot of land to the group. This pilot garden is unfenced, open to all and most importantly, it allows the gardeners in the association to experiment permaculture techniques in the mountains. Theorised by Bill Mollison, permaculture is a method of regenerative agriculture that takes into account the biodiversity of each ecosystem. The idea is to grow sustainable produce by being as economical as possible with energy, fully respecting living beings, and disturbing nature as little as possible. The added bonus of the initiative, is the transmission of knowledge from the older to younger generations on how to farm in the mountains. As well as visiting the local schools to speak with the students, the 500m2 plot has since become the headquarters of the organisation and regular events are held here.
BOUTCH A BOUTCH
The Gardener’s Gold Another successful initiative arising from the town meetings is the village compost project which was launched in spring 2016. The goal of the project was to create separate collective composting sites where no organic materials are wasted and are instead used to fertilise the soil of the vegetable gardens. The compost initiative also provided a pragmatic response to the air quality issue affecting the Arve valley, given that waste incineration is one of the main causes of the atmospheric pollution here. Composting could reduce the amount of waste sent to the Chedde treatment centre by up to 30%. Patagonia has strongly backed this initiative and even installed their own composter at the back of the store to allow employees to recycle their organic waste. In conjunction with the SITOM (the local body responsible for waste treatment in the Arve valley), six compost sites have now been made available to the community. Although administrative issues have somewhat stilted the project’s expansion, they hope to grow even more in the coming months and years.
Donovan’s Road Despite of all their work in the gardens, we mustn’t think that the organisation is only interested in horticulture. Alongside the communal garden and compost project, many other programmes have emerged. Due to the ubiquity of sports in the valley, free ski lessons and off-piste excursions to the Vallée Blanche have been organised by the guides for the locals. While the proposal from the second general meeting has yet to come to fruition, Boutch à Boutch already have a number of new projects lined up. One of these projects involves creating a ‘Freecaravan’ called “La Donovan”. It will be travel from event to event to collect goods in order to redistribute them for free. Cutting down on the carbon footprint, giving a second life to items and reducing waste… sounds like a certain Californian brand that we know! If you are interested in any of the work currently being undertaken by Boutch à Boutch, don’t hesitate to contact them. It’s important that we all work together to design the future that we all desire.
BOUTCH A BOUTCH
Arthur Ghilini
SARAH
Sarah seule capitaine Ă bord.
Hymne Ă la sentinelle des Drus par la gardienne du refuge.
Charpoua, Mon Amour
CARTIER
Vaillante capitaine de l’un des plus emblématiques refuges de l’Alpe, Sarah a pris la plume pour dévoiler ce petit coin de paradis niché à 2 841 mètres d’altitude. Points de départ et de retour des grandes aventures alpines, les refuges constituent les robustes emblèmes de la culture montagnarde. Havres chaleureux et conviviaux, ils permettent aux montagnards de profiter d’un repos bien mérité avant de reprendre leur course. Ce sont des îlots d’humanité perchés au cœur des hautes altitudes où les ronfleurs règnent en maîtres sur leurs dortoirs et où le souper jouit d’une saveur singulière. Parmi ceux-ci, le petit refuge de la Charpoua est un monument de l’alpinisme au pays du Mont-Blanc. Surplombant la rive droite du glacier de la Mer de Glace, le bassin glaciaire de la Charpoua est l’un des recoins les plus sauvages du massif. Dominé par les sommets mythiques des Drus (3 754 m) et de l’aiguille Verte (4 122 m), c’est un sanctuaire de granite dominé au nord par l’arête des Flammes de Pierres et, au sud-ouest - doux Jésus - par le chaînon des ecclésiastiques : Moine, Nonne, Évêque, Enfant de Chœur et Cardinal. Au centre de cet environnement de roche et de glace, une petite cahute accueille depuis plus d’un siècle les conquérants de ce flanc du massif, le refuge de la Charpoua.
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Construite en 1904, la cabane a été érigée sur un îlot rocheux du glacier homonyme. Là où, autrefois, les candidats à l’ascension des Drus bivouaquaient sous une pierre rebaptisée “l’hôtel des courants d’air”. Monter à la Charpoua, c’est aussi remonter le temps. Cette cabane, dont les planches ont été montées à dos d’hommes depuis la vallée, est historique. C’est le seul refuge des Alpes à avoir conservé sa forme d’origine. Ici, rien ou presque, n’a été modifié depuis sa création (on y a tout de même ajouté un panneau solaire et une fine cloison pour garantir l’intimité du gardien, ou de la gardienne). Minimaliste, l’unique pièce commune se compose d’un dortoir pouvant accueillir 12 personnes et d’une cuisine salle à manger. Gardée en été malgré son exiguïté, la Charpoua est le passage obligé vers de prestigieuses ascensions. Avec sa voisine de Leschaux (départ pour les Grandes Jorasses), la cabane peut s’enorgueillir d’avoir accueilli à sa table les plus grands alpinistes. C’est faire un saut dans le passé certes, mais c’est aussi se coltiner une sacrée bambée. Car pour espérer taper une bise à la gardienne, il faut mouiller le maillot : descendre les échelles du Montenvers, traverser et remonter la Mer de Glace, se jouer des blocs en équilibre sur les moraines instables, s’enfiler une nouvelle volée d’échelles aérienne et terminer avec un chemin bien casse-pattes. Comptez quatre heures bien tassées depuis la gare d’arrivée du train à crémaillère. Vous l’aurez compris, le refuge de la Charpoua n’est pas un refuge à touristes. Ici, pas de baraques à frites, ni de magasins de souvenirs ou de cars d’excursionnistes garés sur la terrasse. On est également bien loin de certains refuges usines et impersonnels qui accueillent des milliers d’alpinistes pendant la saison d’été. Depuis trois ans, Sarah Cartier, monitrice de ski et de snowboard, “emmontagne” chaque été pour trois mois de gardiennage. Grâce à une carte postale qu’elle nous a adressée via des canaux numériques, l’ambassadrice du magasin chamoniard nous présente sa résidence secondaire et la démarche qu’elle a mise en place à 2 841 mètres d’altitude.
CHARPOUA
« Chamoniarde et passionnée de ski depuis gamine, j’ai toujours été tournée vers la montagne. Plus que cela, j’ai toujours rêvé d’y vivre. Le métier de guide ou d’accompagnatrice en moyenne montagne ne m’a pas inspiré, on redescend toujours dans la vallée, alors que nous autres gardiens nous y vivons constamment. Après 10 ans à arpenter les cimes et les refuges, je n’ai pas hésité quand l’opportunité de venir me perdre dans cette bicoque chaleureuse s’est présentée. À quelques heures de marche de la capitale mondiale de l’alpinisme, la Charpoua est hors de l’agitation chamoniarde, hors du temps, hors de tout. Les falaises austères qui m’entourent sont devenues des fortifications bienveillantes et je me plais à vivre ici entourée de chocards et de chamois. Se retrouver seule ici est un plaisir égoïste car la montagne se dévoile souvent rien que pour moi. Un peu chauvine, je dis souvent à qui veut l’entendre que mon refuge accueille le plus beau coucher de soleil de l’Alpe. Mais l’éblouissement du paysage n’apparaît pas qu’à la tombée de la nuit. C’est un kaléidoscope d’ambiances : la légèreté du ciel bleu, le grondement de l’orage, le calme des journées de météo maussade… Vivre ici permet de m’échapper et de prendre du recul sur la vie d’en bas. La rusticité et l’isolement me font prendre conscience que nous avons besoin de peu pour être heureux. Au-delà du côté spirituel - je vous livrerai dans une prochaine carte le secret des incantations vaudou pour attirer les choucas à plumes vertes, il s’agit d’une aventure humaine. La petitesse de la cabane permet un vrai échange et le manque d’intimité impose un certain savoir-vivre. La simplicité du lieu nous transporte directement à l’essentiel. Seuls les amateurs de granite sauvage et les randonneurs pugnaces frappent à la porte. Une fine dose d’esprit solitaire est nécessaire pour vivre ici. Il faut savoir apprécier la solitude pendant les périodes de mauvais temps, mais aussi savoir ouvrir son jardin aux autres. J’aime découvrir des recoins inconnus dans l’idée d’en faire profiter les “passagers” de ma cabane.
Gardienne d’un lieu aussi symbolique, j’ai à cœur de faire les choses bien. On reproche souvent aux gardiens la voracité énergétique et les émissions de carbone de leurs approvisionnements héliportés. Je suis consciente de l’impact écologique de mon unique ravitaillement saisonnier et j’ai choisi de cuisiner uniquement des produits locaux en favorisant, autant que possible, ceux issus de l’agriculture biologique. Toutes mes denrées viennent de Haute-Savoie, même la bière et les sodas. Voilà de quoi étancher sa soif avec bonne conscience ! Après tout, si mes produits ont fait moins de cent kilomètres et un vol de 10 minutes, le bilan reste meilleur que pour des produits ayant traversé la planète entière pour atterrir au pied des Drus. Je pense qu’il est temps de mieux consommer en montagne et de montrer l’exemple en valorisant les producteurs locaux. Il ne s’agit pas là de donner une leçon d’écologie, mais de semer une petite graine. En espérant que ce lieu aussi particulier soit-il, en inspire d’autres. »
MON AMOUR
Sarah Cartier, the valiant captain of one of the most emblematic refuges on the Alps, unveils life in her little corner of paradise 2,481m above sea level. Being the start and end point of all great alpine adventures, the refuges are one of the strongest emblems of mountain culture. A warm and friendly haven, they allow mountaineers to enjoy a well-earned rest before once again continuing on their upward adventure. Amongst these legendary cabins, nestled at the highest of altitudes, lies the little hut of Charpoua, a monument of alpinism in the country of Mont‑Blanc which has been welcoming conquerors of the massif for over a century. Overlooking the right side of the Mer de Glace, the Charpoua glacier is one of the wildest corners of the massif. Dominated by the mythical peaks of the Drus (3,754m) and the Aiguille Verte (4,122m), it is a granite sanctuary shadowed on the north by the edge of the Flammes de Pierres and on the south west by the secondary range of the ecclesiastics: Moine, Nonne, Évêque, Enfant de Choeur et Cardinal. It is at the centre of this rocky and icy environment that you will find the legendary shelter of Charpoua.
Built in 1904 using planks of wood carried up the mountain on the backs of local men, the shelter stands on a rocky outcrop of the homonymous glacier. This historic cabin remains the only shelter in the entire valley which has kept its original shape apart from a solar panel and small separation added in later years. Despite these minor changes, the minimalism and originality of the Charpoua takes you on a journey back in time. In the olden days, those attempting to climb the Drus would bivouac under a stone baptised “l’hôtel des courants d’air” or “The Draught Hotel.” Nowadays, the stone has been upgraded to this small cabin with a single common room to house twelve people and a tiny kitchen/dining area. For anyone attempting the prestigious ascent to the summit, the Charpoua remains an obligatory stop en route and alongside its neighbour Leschaux (the starting point for the Grandes Jorasses), the hut can boast about accommodating the greatest of alpinists. Reaching the Charpoua is not for the faint hearted and working up a sweat is part of the journey to get there. The rest of your experience will include going down Montenvers’ ladder, crossing over the Mer de Glace, negotiating the blocks on the unstable moraine and dealing with a new set of ladders before tackling the final never-ending path to the top. All in all, it will take you about four hours from your arrival at the station to reach the hut – simple! As you will have now realised, this is not a shelter for your average tourist; there’s no chip van, no souvenir shops and no tour buses parked on the terrace. It’s also a farcry from the generic, impersonal and robotic lodgings that normally welcome thousands of alpinists during the summer seasons.
CHARPOUA
For three years now, ski and snowboarding instructor Sarah Cartier has been spending three summer months as a guardian on the mountain. Thanks to a postcard that she sent to us via digital channels, the ambassador of the Chamonix store was able to present her second home to us and describe the life which she has set up at the Charpoua. “Being a Chamoniard and a passionate skier since I was a kid, I’ve always turned to the mountain. More than that, I’ve always dreamed about living there. Working as a guide or a mountain leader didn’t inspire me; the guests always got to go down in the valley while us guardians live up there constantly. After 10 years roaming various peaks and shelters, I didn’t hesitate when the opportunity presented itself to get lost in this warm and welcoming shack in the sky.” Just a few hours walk away from the alpine capital of the world, the Charpoua escapes the hustle and bustle of the city, the noise, everything. The austere cliffs that surround me have become benevolent fortifications and I like to live here surrounded by flora and fauna. Being alone here is a selfish pleasure because the mountain often reveals itself only to me. A little chauvinist, I often say to anyone who will listen that my refuge welcomes the most beautiful sunset of the Alps. It is not only at nightfall that the landscape dazzles. It is a kaleidoscope of atmospheres; the lightness of the blue sky, the roar of the storm, the calm of the day during the gloomy weather… Living here allows me to escape and to take a break from life below.
Aside from the spiritual aspect (in my next postcard I will give you the secret Voodoo incantation to attract the green-feathered jackdaws!) Charpoua is about human adventure. The smallness of the hut and the lack of privacy enforces a certain savoirvivre. The simplicity of the place leads us to know what is essential - it is being up here and really going back to the basics that makes me realise we don’t need much to be happy. To live here, you don’t depend on others for entertainment and you need to be able to be as comfortable being alone than with a group of the visiting wild-granite lovers or pugnacious hikers. As the guardian of such a symbolic place, I have my heart set on doing things well. Keepers are often blamed for the carbon emissions caused by the helicopters who carry our supplies but for me, I am conscious of the environmental impact of receiving my one and only seasonal food supply; this is why I choose to cook only with local produce and favour organic foods as much as possible. All of my supplies come from Haute-Savoie – even the beer and sodas! At least this way, I can quench my thirst with a good conscience! After all, if my products travel less than a hundred kilometres and endure a 10-minute flight, it’s still less travel time than the products which cross the whole planet to land at the foot of the Drus. I think that it’s time we reevaluate our consumer needs in the mountains and lead the way in buying more and more from local producers. For us, it’s not about giving a lesson in ecology but rather to sow a little seed in the hope that it will soon grow and inspire others.”
MY LOVE
Cabane avec vue sur les séracs du Géants.
SARAH
Une refuge minimaliste au cœur d’un sanctuaire de granite.
CARTIER
“Je n’ai pas hésité quand l’opportunité de venir me perdre dans cette bicoque chaleureuse s’est présentée.”
CHAMONIX
07 Alors que le magasin de Chamonix souffle ses 30 ans, petite plongée dans l’histoire de la “capitale” en 5 dates, 5 personnalités et 5 lieux qui ont forgé le mythe de l’ex-bourgade alpine.
La Mer de Glace... à marée basse.
HISTOIRE
Le 20 juin 1741 deux jeunes aristocrates britanniques, Richard Pococke et William Windham, explorent la vallée. Ils grimpent jusqu’au Montenvers pour observer La Glacière de Chamouny, qui sera baptisée quelques années plus tard Mer de Glace. Ils rédigent un guide touristique et sèment la graine d’une insatiable curiosité à son égard.
June 20th 1741. Two young British aristocrats, Richard Pococke and William Windham, explore the valley. They climb to Montenvers to see La Glacière de Chamouny, which is later renamed La Mer de Glace. In writing a tour guide of their adventure, the two young men sow the insatiable seeds of curiosity which surround the Mont-Blanc for the coming centuries.
CHAMONIX
Le 8 août 1786 à 18 h 23, Michel Gabriel Paccard, premier médecin de Chamonix, et Jacques Balmat, jeune cristallier, paysan et chasseur de chamois, posent le pied sur la plus haute taupinière d’Europe. Ils viennent de réussir la première ascension du mont Blanc (4 809 m).
August 8th, 1786. At 18:23, Chamonix’s first doctor Michel Gabriel Paccard, accompanied by young farmer and deer hunter Jacques Balmat, set foot on the tallest molehill in Europe. They have just completed the first ascent of Mont-Blanc (4,809m).
1865 est une année d’apothéose de l’âge d’or de l’alpinisme avec 65 premières grimpettes dans les Alpes (dont le Cervin et la tragédie qui coûtera la vie au célèbre guide Michel Croz). 7 premières sont réalisées dans le massif du Mont-Blanc dont l’aiguille Verte, les Grandes Jorasses ou encore l’éperon de la Brenva au mont Blanc. Chamonix accueille déjà 12 000 visiteurs par an, dont la moitié d’entre eux sont anglais ou américains.
1865 is considered the pinnacle of the Golden Age of Mountaineering with 65 successful first ascents in the Alps (including the first ascent of the Matterhorn with the tragedy which cost the life of famous guide Michel Croz). Seven first ascents were made in the Mont-Blanc massif including l’Aiguille Vert, the Grandes Jorasses and the Brenva Spur on Mont-Blanc. Chamonix is already playing host to 12,000 visitors a year; half of these visitors are either British or American.
Pendant l’hiver 1945, le col du Midi - vaste étendue glaciaire perchée à 3 532 mètres d’altitude entre l’aiguille du Midi et le mont Blanc du Tacul - est le théâtre de la plus haute bataille de la Seconde Guerre mondiale. Un soldat français et neuf soldats allemands sont tués.
During the winter of 1945, the Col du Midi – a vast glacial expanse perched at 3,532m above sea level, between the Aiguille du Midi and Mont Blanc du Tacul – was the scene of the highest battle of the Second World War. A French soldier and nine German soldiers are killed.
Le 26 décembre 1956, on signale la disparition de deux jeunes alpinistes partis gravir le mont Blanc par l’éperon de la Brenva. Sans nouvelles depuis quatre jours, leurs familles ont donné l’alerte. Jean Vincendon et François Henry, succombent de froid et d’épuisement après 10 jours de calvaire sous les yeux des Chamoniards, incapables de venir en aide. Cette tragédie entraînera la prise en charge du secours en montagne par l’état (aujourd’hui le PGHM).
On December 26th 1956, two mountaineers went to climb Mont-Blanc via the Brenva spur. With no news after four days, the families of Jean Vincendon and François Henry, alerted the authorities. Subjected to ten hellish days on the mountain, with the people of Chamonix watching on but unable to send help, the two men succumb to cold and exhaustion. This tragedy led to the establishment of the PGHM, a State Mountain Rescue Team.
L’arrête des Cosmiques (aiguille du Midi) sur fond de grand Blanc.
HISTORY
Henriette d’Angeville (17941871). Dubbed “Mont-Blanc’s fiancé”, Henriette became the second woman ever to reach the summit. Determined and audacious, she stood out as a symbol of female strength during a time when male climbers dominated the sport.
L’illustre coucher de soleil depuis la Charpoua.
Henriette d’Angeville (17941871).“La fiancée du mont Blanc” est la deuxième femme à réussir son ascension. Déterminée et audacieuse, c’est surtout la première dame “alpiniste” à une époque où il s’agit d’une activité essentiellement masculine.
Albert Smith (1816–1860). Enfant, il se prend de passion pour le mont Blanc après la découverte un ouvrage à son sujet. Le Britannique, qui a appris le français en lisant Voyages dans les Alpes d’Horace Bénédict de Saussure, réussi le sommet en 1851. Il en tire un livre et monte un spectacle à Londres qui sera vu par plus de 200 000 personnes. C’est lui qui met le mont-Blanc “à la mode” outre-manche. De son récit, on retiendra quelques chiffres impressionnants, à faire pâlir une expédition himalayenne contemporaine. Pour quatre alpinistes, seize guides, dix-huit porteurs, mais surtout près d’une centaine de bouteilles de vin, une demi-douzaine de rôtis de veau, une quarantaine de volailles et autant de pièces de viandes. Les anciens avaient la santé ! Michel Payot (1869-1908). Médecin dans la vallée, il comprend vite que les longs souliers de bois venus de Norvège faciliteraient ses tournées hivernales auprès des habitants. Glisseur généraliste, c’est à lui que l’on doit la démocratisation du ski dans la vallée. En compagnie du grand guide chamoniard Ravanel le Rouge, il réalise le premier tour du Mont-Blanc à ski et la première de la haute route, alias Chamonix-Zermatt. Roger Frison-Roche (1906–1999). Né à Paris, mais issu d’une famille savoyarde, Roger découvre Chamonix à l’adolescence. Brillant rochassier, il est le premier allochtone à intégrer la Compagnie des guides en 1930. Correspondant, puis grand reporter, il est l’auteur du plus célèbre roman de montagne, Premier de cordée. Résistant pendant la guerre, il devient aventurier et court l’Europe, la Baltique, l’Amérique du Nord mais surtout l’Afrique et ses déserts, sa terre d’élection. Grand amoureux de la vallée, il n’a eu de cesse de transmettre son amour de Chamonix. Gary Hemming (1934-1969). Formé dans la vallée du Yosemite (Californie), Gary fait partie de cette génération d’Américains venue goûter au granite Chamoniard dans les années 1960. Il ouvre avec John Harlin, Tom Frost, Stuart Fulton ou encore Royal Robbins quelques merveilles : la Directe Américaine aux Drus ou la face sud du Fou. En avance sur son temps – il a importé des techniques états-uniennes respectant le rocher - Hemming a surtout marqué les esprits par une conception libertaire de l’escalade. Personnage sensible et captivant, “le beatnik des cimes” reste le père spirituel de tous les grimpeurs vagabonds.
Albert Smith (1816 -1860). As a child, Albert became passionate about the Mont-Blanc after discovering a book about the mountain. The British native, who learned French while reading Travels in the Alps by H-B de Saussure, reached the summit in 1851. Following the journey he published a book and wrote and produced a play about the ascent which was seen by more than 200,000 people in London. Mont-Blanc became ‘a la mode’ for the British. From his journals we have learnt some impressive facts. For a group of four alpinists the supplies were enough to make a Himalayan expedition jealous; sixteen mountain guides, eighteen porters, almost 100 bottles of wine, half a dozen roasted veal, forty poultry and the same amount of cuts of beef. They ate well in those days! Michel Payot (1869-1908). It was whilst living as a physician in the valley, that Michel Payot realised his long wooden shoes from Norway would greatly facilitate his winter tours. He is now credited with making skiing accessible to all inhabitants in the valley. In the company of renowned Chamonix guide Ravanel le Rouge, he made the first tour of the Mont-Blanc, as well as the Chamonix-Zermatt, on skis. Roger Frison-Roche (1906–1999). Born in Paris but from a Savoyard family, Roger discovered Chamonix as a teenager. A brilliant rock climber, he was the first non-native to join the Compagnie des Guides in 1930. Having worked as a local correspondent before becoming a high-profile reporter, he is the author of one of the most famous mountain novels of all time, Premier de cordée. During the war, Roger joined the side of the resistance and adventured across Europe, the Baltics, North America and the African deserts. Despite the diversity of this travels, he never stopped proclaiming his love for Chamonix. Gary Hemming (1934-1969). After experiencing the Yosemite Valley in California, Gary was part of the generation of Americans who flocked to Chamonix in the 1960s. He opened several routes – including La Directe Americaine - with John Harlin, Tom Frost, Stuart Fulton and even Royal Robbins. Way ahead of his time, Hemming imported his American techniques to Chamonix, including the “free-climbing” school of thought and his respect for the rock. Sensitive and intriguing, ‘the beatnik of the alps’, Gary was the one of the forefathers of the dirt-bag climbers.
CHAMONIX
L’aiguille du Midi (3 848 m). Inauguré en 1955 après des travaux dantesques et périlleux, le téléphérique de l’aiguille du Midi relie le centreville à la haute montagne en une trentaine de minutes. Il devient alors l’illustration même de l’accessibilité à la haute montagne qui fait le succès - et aujourd’hui parfois les déboires - de Cham’. Longtemps plus haut téléphérique du monde, il transporte chaque année quelque 850 000 voyageurs et offre aux skieurs, alpinistes, parapentistes et BASE jumpers une porte directe vers le domaine des cieux.
Le Glacier des Bossons. Puissante langue de glace qui prend sa source au sommet du grand Blanc, ce glacier recèle bien des mystères depuis le crash au mont Blanc de deux appareils d’Air India : le 3 novembre 1950, celui du Malabar-Princess et, le 24 janvier 1966, celui du Kangchenjunga. Poursuivant sa lente reptation vers la vallée, le glacier n’en finit plus de livrer des vestiges des deux crashs. En août 2012, deux alpinistes ont redescendu une valise diplomatique datant du crash de 1966 et, l’année suivante, une caissette métallique contenant des pierres précieuses a été exhumée…
Les Drus (Petit 3 730 m et Grand Drus 3 754 m). Flèches de granite élancées vers le ciel, les Drus figurent parmi les sommets les plus symboliques de la vallée, au point d’être devenu l’emblème de la Compagnie des guides. En 1966, le sauvetage de deux alpinistes allemands sur la face ouest prend plusieurs jours et crée la polémique ; le célèbre alpiniste René Desmaison qui a réussi le sauvetage est radié de la Compagnie des guides. Malheureusement, aujourd’hui, les Drus ont perdu leurs profils légendaires et sont les victimes du réchauffement climatique avec la dégradation du permafrost (qui désigne les terrains gelés en permanence qui permettent à la glace de se former et de se maintenir). Lorsque le permafrost se dégrade, la glace fond et ne peut plus jouer son rôle de ciment des parois rocheuses. Depuis 1997 les Drus connaissent donc des éboulements impressionnants, notamment celui de 2005 qui a emporté le pilier Bonatti, voie historique ouverte en 1962 par Walter de son prénom.
Montenvers. Lieu de construction du premier refuge de montagne en 1795 (Le temple de la nature), le Montenvers s’accède aujourd’hui par son train à crémaillère rouge ultra-photogénique inauguré en 1909. La Mer de Glace, le glacier qu’il domine est malheureusement à marée basse, devenu l’illustration éloquente du réchauffement climatique. En 150 ans, il a perdu 9 kilomètres de long et 150 mètres d’épaisseur et fait aujourd’hui bien triste mine… La Pierre d’Orthaz est un énorme bloc de granite transporté par les glaciers et déposé au nord de Chamonix dans la forêt homonyme. Au XIXe siècle, des tailleurs de pierre en prélèvent un important fragment afin d’ériger un obélisque en hommage à tous ceux qui ont fait connaître la vallée. Malheureusement, le monument ne verra jamais le jour. Il est détruit par une mine déposée par une main malveillante… Dans les années 1970, la Pierre devient un spot d’escalade bloc, mais surtout le Camp 4 Chamoniard : le repère de dizaines de grimpeurs babas cool sans le sou qui campent alentour.
HISTORY
L’aiguille du Midi (3,848 m). Established in 1955, the cable car of the Aiguille du Midi connects the city centre to the high mountain in approximately 30 minutes. Nowadays, Chamonix is highly regarded for its accessibility to the mountains, as well as housing the longest cable car in the world. The cable car offers a direct journey to the clouds for 850,000 skiers, mountaineers, paragliders and base jumpers each year. Les Drus (Petit 3,730m et Grand Drus 3,754m). The Drus are one of the most symbolic summits of the valley and have even become the emblem of the Compaigne des Guides. In 1966, guide René Desmaison was struck out of the organisation after the rescue of two German mountaineers on the west face of the mountain took several days and was clouded in controversy. Unfortunately, today, the Drus have lost their legendary status and have become victims to global warming and to melting ice. Since 1997, the Drus have been experiencing several landslides, most notably, the one in 2005 which wiped away the Bonatti pillar, the notorious route opened by Walter Bonatti in 1962.
La Pierre d’Orthaz is a large block of granite which was transported by glaciers and deposited north of Chamonix in the Orthaz forest. In the 19th century, stonemasons removed a fragment, to create a monument in honour of all those who had contributed to the valley. Unfortunately, this monument no longer sees the light of day as it was later destroyed by a mine. In the 1970s, the block became a popular climbing spot, and the ‘Camp 4’ of Chamonix: the go-to spot for the authentic, penniless hippies who come to camp in the area.
The Bossons Glacier. This powerful tongue of ice that begins at the summit of the Mont-Blanc, has been a source of mystery since the Air India aircraft crashes on November 3rd 1950 and January 24th 1966. Over a quarter of a century later, the mountain continues to deliver vestiges from the crashes. In August 2012, two mountaineers uncovered a diplomatic bag from the 1966 crash, and the following year, a metal case containing precious stones was exhumed. Montenvers. In 1795, the Montenvers became home to the construction of the first mountain refuge. Today, it is best known for its famous red railway train established in 1909. Unfortunately, the Mer de Glace - the glacier that dominates the Montenvers - has become a poster for the effects of global warming. In just 150 years it has lost 9 kilometres in length and 150 meters in depth.
Les Bossons, le plus mystérieux des glaciers ?
Prix libre ; au profit de l’association Boutch à Boutch (Merci !).
www.patagonia.com @patagoniaeurope