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Nabi (peinture)

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Ker-Xavier Roussel, Édouard Vuillard, Romain Coolus et Félix Vallotton, photographie de Louis-Alfred Natanson, 1899.

Le mouvement nabi (dont les membres sont les nabis) est un mouvement artistique postimpressionniste d'avant-garde, né en marge de la peinture académique de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle.

Nabi est le nom que se sont donné les jeunes peintres qui se regroupent autour de Paul Sérusier, vers 1888. Le terme nabi, en arabe, ou nevi'im, נביאים en hébreu, signifie dans un sens actif « orateur » ou « annonciateur », ou, dans un sens passif, « celui qui est ravi dans une extase » ou « appelé par l'esprit ». En Occident, nabi a été traduit par « prophète », « illuminé », ou encore « celui qui reçoit les paroles de l'au-delà », « l'inspiré de Dieu ».

Paul Sérusier, Le Talisman, l'Aven au Bois d'Amour (1888), huile sur bois, Paris, musée d'Orsay.

Ce cercle naît d'une controverse autour d'une peinture de Paul Sérusier, Le Talisman, l'Aven au Bois d'Amour, réalisée sous la direction de Paul Gauguin, rencontré en Bretagne à Pont-Aven, durant l'été 1888. Gauguin encourage Sérusier à se débarrasser de la contrainte imitative de la peinture, à user de couleurs pures et vives, à ne pas hésiter à exagérer ses visions, et à donner à ses peintures sa propre logique décorative[1] et symbolique.

Lorsque Sérusier revient à Paris, son tableau fait naître des débats enflammés avec les autres étudiants de l'Académie Julian et de l'École des Beaux-Arts, sur le rôle sacré de l'art et de la peinture. Sérusier forme le groupe des nabis[2], avec ses proches amis, Pierre Bonnard, René Piot, Henri-Gabriel Ibels, Maurice Denis, Édouard Vuillard, Ker-Xavier Roussel, Paul Ranson. En 1891, le Hollandais Jan Verkade, en 1892, le Suisse Félix Vallotton, puis Georges Lacombe, Mogens Ballin, József Rippl-Rónai, Charles Filiger, Adolf Robbi, ainsi que Georges Joseph Rasetti[3] et le sculpteur Aristide Maillol[4], les rejoignent.

Ker-Xavier Roussel, Vénus et l'Amour au bord de la mer (1908), huile sur toile, Paris, musée d'Orsay.

Ils se donnent tous un surnom, signe de leur initiation[5], et paraphent les lettres qu'ils échangent du sigle « ETPMVMP » (« En ta paume mon verbe et ma pensée ») :

Félix Vallotton, Cinq peintres (1903) : l'auteur Félix Vallotton (debout), Pierre Bonnard, Édouard Vuillard, Charles Cottet et Ker-Xavier Roussel (debout). 145 x 187 cm, Kunstmuseum, Winterthur.

Le mouvement ne dure que quelques années. Les nabis, vers 1900, prennent des voies différentes. Il faut toutefois préciser que l'appellation « nabi » n'aura jamais été publique ni revendiquée lors des expositions de ces artistes à l'époque. Son usage courant dans l'historiographie ne date que des années d'après la Seconde Guerre mondiale et ne connaît une plus grande diffusion qu'à partir des années 1980. En effet, au XIXe siècle, le terme est utilisé entre eux par les peintres, non sans une certaine distance, voire avec humour, et il ne recouvre pas non plus une spiritualité réelle ou commune, ni une véritable société rituelle. Ainsi le Portrait de Paul Ranson en tenue nabique par Sérusier (Paris, musée d'Orsay), est-il purement fantaisiste.

Caractéristiques

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Maurice Denis, Le Mystère catholique (1889), huile sur toile, Saint-Germain-en-Laye, musée départemental Maurice-Denis.

En réaction à l'impressionnisme, au naturalisme, les nabis veulent libérer leur peinture des exigences du réalisme, comme Henri-Gabriel Ibels a pu l'écrire : « Ensemble, nous avons méprisé l'école et les écoles, les rapins, leurs traditions, leurs farces et leurs bals inutilement nudistes. Ensemble nous nous sommes sérieusement amusés ».

Détachés ou non du christianisme, les artistes nabis cherchent des voies plus spirituelles au contact de philosophies et de doctrines nouvelles teintées d'Orient, d'orphisme, d'ésotérisme et de théosophie[7]. Ils s'appliquent à retrouver le caractère « sacré » de la peinture et à provoquer un nouvel élan spirituel au moyen de l'art[8].

L'art des nabis qui continue celui de l'école de Pont-Aven, de Gauguin, de Van Gogh, de Cézanne, et d'Odilon Redon, s'imprègne, comme les œuvres des musiciens de leur époque, Satie et Debussy, d'orientalisme et de japonisme, notamment au travers des ukiyo-e parus dans la revue Le Japon artistique. Vuillard a possédé une importante collection d'objets japonais[9]. Ils se sont nourris des textes de sagesse orientale et des ouvrages ésotériques et « occultisants », fort en vogue à l'époque.

Notes et références

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  1. Jean-François Gautier, « L’individualisme pictural des Nabis », L'inactuelle,‎ (lire en ligne).
  2. « Ou prophètes, chargés d'annoncer le nouvel évangile de la peinture », dans Claire Frèches-Thory et Antoine Terrasse, Les Nabis, Flammarion, 1990.
  3. Maurice Malingre, La Vie prodigieuse de Gauguin, Buchet-Chastel, pp. 239extraits sur Gallica.
  4. Sans l'aisance de leur culture bourgeoise, Maillol ne s'est pas intégré au groupe mais en a été très proche.
  5. La Peinture des nabis, Claude Jeancolas, FVW Édition.
  6. Sandrine Malinaud, Bonnard, peintre de l’intime, Paris, À Propos, 64 p. (ISBN 9782841862986), p. 6-18
  7. Édouard Vuillard : « Notre mérite, si toutefois il y a mérite, consiste peut-être en ceci que nous avons accepté les expressions les plus hétérogènes quand elles étaient sincères. ».
  8. Retour à la teinte plate, aux coloriages des images d'Épinal, au hiératisme des Égyptiens, des Byzantins, des fresques romanes...
  9. Claude Jeancolas, « Les ukiyo-e et les maîtres japonais », dans La Peinture des Nabis, FVW Édition, p. 66.

Bibliographie

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  • Claire Frèches-Thory et Antoine Terrasse, Les Nabis, Flammarion, 1990; nouv. éd. mise à jour, 2003, 319 p. (ISBN 978-2080110633).
  • Claude Jeancolas, La Peinture des Nabis, FVW Édition, 2002, 220 p. (ISBN 978-2914304047).
  • Céline Julhiet (dir.), Nabis 1888-1900, catalogue de l'exposition du Grand Palais, Munich/Paris, Prestel-Verlag/Éditions de la Réunion des musées nationaux, 1993, 512 p..

Articles connexes

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Liens externes

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