Transicion Democratica Chile Persee
Transicion Democratica Chile Persee
temps
Riquelme Segovia Alfred. La transition démocratique au Chili et la fin de la guerre froide. In: Matériaux pour l'histoire de notre
temps, n°54, 1999. Regards sur l'Amérique latine 1945-1990. pp. 22-25;
doi : https://doi.org/10.3406/mat.1999.404222
https://www.persee.fr/doc/mat_0769-3206_1999_num_54_1_404222
de la guerre froide
Cet article est un compte rendu de réflexions le pays ingouvernable et à provoquer la rupture du
sur le processus de retour à la démocratie au blindage autoritaire. Ils n'avaient pas d'autre
Chili et sur les transformations qu'ont objectif que l'écroulement du régime qui avait été imposé
connues ses acteurs, transformations qui ont fait et son remplacement par des structures propres à
l'objet de deux études dans le passé 1. Il s'agit ici un État de droit démocratique.
d'établir le lien entre ces transformations et la L'irruption des masses dans le processus socio-
« guerre froide », processus mondial qui a coïncidé politique, à partir du cycle des protestations
avec la transition démocratique au Chili. nationales ouvert en mai 1983, a fait penser pendant un
Ces réflexions, présentées ici sous la forme d'un certain temps que le renversement de Pinochet et
essai, constituent le cadre historique et conceptuel l'effondrement de ce régime grâce à la
d'une recherche qui est actuellement en cours. désobéissance civile représentaient pour l'opposition un
objectif à portée de main.
Dans ce contexte, alors que le pays était paralysé
La confrontation entre la transition par des journées de manifestations, le système de
autoritaire et la transition démocratique partis se réorganisait et l'organisation sociale se
réactivait. C'est ainsi que s'est formée en 1983 lAlliance
(1980-1988) démocratique qui regroupait des forces politiques
allant de la droite démocratique au socialisme
rénové ; le Bloc socialiste, réunion des socialistes de
l'Alliance et d'autres groupes de gauche ; le
Mouvement démocratique populaire qui réunissait
des communistes, socialistes, encore léninistes et
d'autres groupes de la gauche radicale. Au même
moment, sur le terrain social, les mouvements
syndicalistes et estudiantins qui avaient joué un rôle
important, furent rejoints par les corps
profes ionnels, alors que la population devenait l'acteur
principal de la mobilisation contre la dictature.
Cependant, la dictature se servit de tout l'énorme
pouvoir dont elle disposait pour contrecarrer les
projets de ses opposants. La violence de l'État se
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ajouté le recours massif aux militaires pour réprimer
les manifestations populaires antigouvernementales.
Cela a eu pour résultat la mort de 124 personnes
pendant les journées de protestations qui
s'étendirent entre 1983 et 1986. A ce chiffre s'ajoutent les
quelque 3 000 victimes des violations des Droits de
l'Homme mortes ou ont disparues pendant les
17 années de dictature, selon les conclusions de
l'enquête menée par la Commission nationale de vérité
et réconciliation 2. Par ailleurs, des milliers de
personnes ont été emprisonnées, torturées, malmenées
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La brutalité du régime autoritaire a énormément
contribué à diviser l'opposition qui le restera
jusqu'en 1985-1986. En effet, certains privilégiaient de
plus en plus la recherche d'un consensus beaucoup
autoritaire, aspiraient à la réalisation d'un grand plus large qui inclurait les partisans du régime pour
consensus social et politique en faveur de la trouver une issue à une confrontation
démocratie. Inspirés par la mémoire historique de la politico-militaire qui menaçait de mener à la catastrophe. Il y avait
société, ils furent également encouragés par le aussi ceux qui encourageaient une réplique armée
soutien que leur manifestaient de larges secteurs des à l'action répressive de l'appareil militaire de l'État
classes moyenne et populaire qui se libéraient du Finalement, les deux tentatives se soldèrent par
conformisme et de la peur. C'est ainsi qu'ils un échec. Il ne se forma pas de bloc libéral
organisèrent des mobilisations sociales destinées à rendre regroupant les modérés du gouvernement et de l'opposi-
La transition démocratique au Chili et la fin de la guerre froide 23
Du plébiscite à la négociation
des limites de la transition (1988-1989)
Tous les acteurs politiques et sociaux opposés au
maintien du régime autoritaire se réunirent
Caricature, peinture murale contre Pinochet, quartier La progressivement autour du non au plébiscite du 5 octobre
Victoria, Santiago du Chili, photo Hugo Cabello, exposition 1998. Par ailleurs, toutes les forces issues du cycle de
BDIC 1992. mobilisation nationale des années précédentes se
réunirent sur le projet de renverser la dictature par
tion, parce que ceux qui auraient pu se séparer du la voie électorale. Une grande espérance gagnait la
régime continuèrent d'adhérer à la dictature et à ses société civile, même si la peur d'une manipulation
institutions autoritaires. Par ailleurs, les partisans des consciences et des votes par le pouvoir
d'une rébellion armée n'atteignirent pas non plus demeurait latente. Il régnait également la crainte fondée
leur objectif parce que la société mobilisée ne fut que, face au résultat adverse des urnes, la dictature
pas prête à les suivre dans une stratégie vouée à réplique par le durcissement et la répression.
l'échec et à la tragédie face à un adversaire militaire Dans ce contexte, le triomphe du non s'avéra
inexpugnable. déterminant dans la marche vers les élections
L'échec de la tentative de meurtre contre le présidentielles et législatives libres l'année suivante,
dictateur à la fin de l'année 1986 ne fit que renforcer son mais n'entraîna pas la chute du système autoritaire
pouvoir. C'est dans ce contexte qu'il informa la en place.
population réduite au silence par l'état de siège de Les forces démocratiques avaient vaincu par la
sa ferme intention de ne céder en aucun cas aux voie des urnes. Cependant, elles ne disposaient pas
demandes de l'opposition et de continuer dans la d'assez de pouvoir pour démanteler les institutions
voie tracée par la constitution autoritaire. Les de la « démocratie protégée » consacrées par l'ordre
adversaires du régime se virent donc obligés de redéfinir constitutionnel en vigueur.
leurs stratégies. L'opposition finit par conclure que Les partisans de la dictature durent assumer le fait
la seule issue possible au résultat catastrophique de qu'ils perdaient le pouvoir; mais ils bénéficiaient
la stratégie de mobilisation sociale, qui tendait au toujours de la protection de la constitution de 1980 et de
chaos, devait se réaliser dans le cadre même de la l'appui que les forces armées lui apportaient. Ils se
constitution de 1980. Cependant, elle adopta cette rendaient cependant de plus en plus compte qu'ils
position sans pour autant modifier son projet d'une étaient obligés de procéder à la réforme de leurs
transition à la démocratie, ni abandonner le rejet de institutions face à la nouvelle réalité politique du pays.
principe du plan de transition autoritaire du régime C'est ainsi que s'ouvrirent des négociations entre la
militaire à la « démocratie protégée ». Concertation des partis politiques pour la
Ainsi, le plébiscite pour la succession présidentielle démocratie d'une part, et d'autre part les forces politiques
fut caractérisé par l'affrontement — une fois envolés partisanes du régime et le gouvernement militaire. Ces
les espoirs d'une réforme démocratique que la négociations aboutirent à des réformes
dictature n'était pas disposée à concéder, et d'une constitutionnelles qui furent approuvées par le peuple à la suite
rupture démocratique que l'opposition ne pouvait d'un plébiscite organisé en juillet 1989.
imposer — entre les partisans du maintien du régime Le 14 décembre 1989 eurent lieu les élections
autoritaire et ceux de la transition démocratique. présidentielles et législatives. À la suite du triomphe du
Le plébiscite de 1988 faisait évidemment partie du candidat de l'opposition, un gouvernement
projet de transition autoritaire. Son but était de démocratique fut instauré le 11 mars 1990.
permettre la légitimation par le peuple du régime et de S'ouvrait ainsi une nouvelle étape de la
son guide et, défait, l'institutionnalisation du régime confrontation entre le maintien d'un régime autoritaire et la
24 Matériaux pour l'histoire de notre temps, n° 54 (avril-juin Î999)