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CT Zola L'Assommoir Avec Corrigé

Ce passage décrit la visite d'une noce populaire au musée du Louvre. Zola présente cette scène de manière comique, en mettant en avant le décalage entre les personnages issus d'un milieu modeste et le lieu prestigieux qu'est le musée. Néanmoins, l'auteur utilise également cette scène pour réfléchir de manière sous-jacente à la question de l'art et de sa réception.

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CT Zola L'Assommoir Avec Corrigé

Ce passage décrit la visite d'une noce populaire au musée du Louvre. Zola présente cette scène de manière comique, en mettant en avant le décalage entre les personnages issus d'un milieu modeste et le lieu prestigieux qu'est le musée. Néanmoins, l'auteur utilise également cette scène pour réfléchir de manière sous-jacente à la question de l'art et de sa réception.

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Sujet 1 - COMMENTAIRE DE TEXTE

L'Assommoir raconte la grandeur puis la décadence de Gervaise Macquart, blanchisseuse dans le quartier de
la Goutte-d'Or à Paris. Gervaise et son amant Auguste Lantier viennent à Paris avec Claude et Etienne, leurs deux fils.
Lantier quitte Gervaise qui se retrouve seule pour subvenir à ses besoins et ceux de ses enfants. Elle fait ensuite la
rencontre à L’Assommoir, un cabaret, de Coupeau qu’elle va épouser quelques temps plus tard. Le mariage est
célébré à la hâte, et les convives de Gervaise et Coupeau, privés de promenade à la campagne par un orage, visitent
le Louvre. C’est l’occasion, pour Zola, d’une réflexion sur l’art.

Cependant, [Madinier]1 surveillait la queue du cortège. D’un geste, il commanda une halte, au milieu
du salon carré. Il n’y avait là que des chefs-d’œuvre, murmurait-il à demi-voix, comme dans une église. On
fit le tour du salon. Gervaise demanda le sujet des Noces de Cana2 ; c’était bête de ne pas écrire les sujets sur
les cadres. Coupeau s’arrêta devant la Joconde, à laquelle il trouva une ressemblance avec une de ses tantes.
Boche et Bibi-la-Grillade ricanaient, en se montrant du coin de l’œil les femmes nues ; les cuisses de
l’Antiope3 surtout leur causèrent un saisissement. Et, tout au bout, le ménage Gaudron, l’homme la bouche
ouverte, la femme les mains sur son ventre, restaient béants, attendris et stupides, en face de la Vierge de
Murillo.

Le tour du salon terminé, M. Madinier voulut qu’on recommençât ; ça en valait la peine. Il s’occupait
beaucoup de madame Lorilleux, à cause de sa robe de soie ; et, chaque fois qu’elle l’interrogeait, il répondait
gravement, avec un grand aplomb. Comme elle s’intéressait à la maîtresse du Titien, dont elle trouvait la
chevelure jaune pareille à la sienne, il la lui donna pour4 la belle Ferronnière, une maîtresse d’Henri IV, sur
laquelle on avait joué un drame, à l’Ambigu5.

Puis, la noce se lança dans la longue galerie où sont les écoles 6 italiennes et flamandes. Encore des
tableaux, toujours des tableaux, des saints, des hommes et des femmes avec des figures qu’on ne comprenait
pas, des paysages tout noirs, des bêtes devenues jaunes, une débandade de gens et de choses dont le violent
tapage de couleurs commençait à leur causer un gros mal de tête. M. Madinier ne parlait plus, menait
lentement le cortège, qui le suivait en ordre, tous les cous tordus et les yeux en l’air. Des siècles d’art
passaient devant leur ignorance ahurie, la sécheresse fine des primitifs, les splendeurs des Vénitiens, la vie
grasse et belle de lumière des Hollandais. Mais ce qui les intéressait le plus, c’étaient encore les copistes 7,
avec leurs chevalets installés parmi le monde, peignant sans gêne ; une vieille dame, montée sur une grande
échelle, promenant un pinceau à badigeon dans le ciel tendre d’une immense toile, les frappa d’une façon
particulière. Peu à peu, pourtant, le bruit avait dû se répandre qu’une noce visitait le Louvre ; des peintres
accouraient, la bouche fendue d’un rire ; des curieux s’asseyaient à l’avance sur des banquettes, pour assister
commodément au défilé ; tandis que les gardiens, les lèvres pincées, retenaient des mots d’esprit. Et la noce,
déjà lasse, perdant de son respect, traînait ses souliers à clous, tapait ses talons sur les parquets sonores, avec
le piétinement d’un troupeau débandé, lâché au milieu de la propreté nue et recueillie des salles.

Zola, L’Assommoir, 1877.

Sujet 2 : DISSERTATION.

1
Madinier, Boche, Bibi-la-Grillade, Gaudron, Lorilleux : noms ou surnoms populaires des invités de la noce.
2
Les Noces de Cana, La Joconde, La Vierge de Murillo, Le Titien : toiles et peintres célèbres exposés au Louvre. [Les Noces de
Cana sont un épisode de l’Ancien Testament qui raconte que lors d’un mariage auquel il était invité avec sa mère Jésus a changé
de l’eau en vin pour les invités.]
3
L’Antiope : personnage de la mythologie grecque.
4
il la lui donna pour : il la lui présenta comme étant
5
L’Ambigu : Théâtre de l’Ambigu-Comique, où sera donné L’Assommoir de Zola, adapté pour le théâtre
6
écoles : ensembles de peintres pouvant être rapprochés par leur origine et leur style.
7
copistes : personnes, peintres plus ou moins amateurs, qui viennent au musée pour recopier des toiles
Selon vous, peut-on dire que Manon Lescaut est une tragédie qui, outre la crainte et la pitié, suscite le plaisir du
lecteur ?
Vous répondrez à cette question dans un développement organisé en vous appuyant sur Gargantua, sur les textes
que vous avez étudiés dans le cadre du parcours associé et sur votre culture personnelle.

CONSIGNES POUR LES DEUX SUJETS.

Pour le sujet 1 comme pour le sujet 2, vous rédigerez l’introduction, vous ferez le développement du
devoir en plan très détaillé (avec titres, sous-titres, tirets/astérisques…) et vous conclurez par une
conclusion rédigée.

Commentaire de texte : CORRECTION.

Pbq : Comment Zola réalise-t-il à travers cette visite d’une noce populaire au musée du Louvre un
passage à la fois plaisant et profond / un passage permettant une double lecture ?
Annonce de plan : Nous verrons successivement que ce passage évoque une visite au musée
présentée dans une tonalité comique, puis comment l’auteur s’en sert pour réaliser une réflexion sur
l’Art.

I] Une visite au musée de tonalité comique.

A- L’évocation du musée du Louvre :

- Déambulation chronologique dans les lieux identifiables du musée : « au milieu du salon carré » (l. 2), « on
fit le tour du salon » (l.3), « Le tour du salon terminé » (l. 9), « Puis (…) la longue galerie où sont (…) » Le
musée lui-même est cité l. 26 : « Louvre »
- Evocation de toiles célèbres : « Noces de Cana », évocation de la maîtresse du Titien (« La femme à sa
toilette, dit aussi La Maîtresse »), la Belle Ferronnière (confondue ici mais dont le tableau est effectivement
également au Louvre sous le titre de « Portrait de femme, dit à tort La Belle Ferronnière » de Vinci)
+ de différentes écoles de peinture représentées au Louvre : « écoles italiennes et flamandes » (l. 15), les
« primitifs », les « Vénitiens », les « Hollandais » (l.21-22), le tout synthétisé par « des siècles d’art » (l. 20)
- Champ lexical de la peinture : des « chefs d’œuvre » (l.2), des « tableaux » (l.16), des « saints », des
« hommes », des « femmes », des « paysages », des « bêtes », des couleurs (« noirs », « jaunes »
couleurs ») (l. 16-18)
- Mention aussi de l’absence de notices explicatives, et même de titres (l.4: « les sujets sur le cadres »), des
« banquettes » (l. 27) sur lesquelles se reposer ou depuis lesquelles contempler certaines œuvres, des
parquets sonores » (l.29), de la « propreté nue et recueillie des salles » (l. 30) et des « copistes » présents.
 Description concrète et évocatrice notamment pour les habitués du musée du Louvre

B- Un comique burlesque dû au décalage social.


Comique burlesque = marqué par le décalage entre les personnages et le lieu. Personnages trop simple dans un lieu
élitiste.
- cette noce = composée de gens issus d’un milieu populaire. En effet, bien qu’on indique la « robe de soie »
(l. 10) de Mme Lorilleux (preuve que les autres femmes sont vêtues simplement), et si deux personnages
bénéficient bien d’une civilité lorsqu’ils sont nommés (« M. Madinier », Mme Lorilleux », care ce sont les
plus aisés de la troupe), les autres sont dénommés de manière plus rustique, uniquement par leur prénom
(« Gervaise »), nom (« Coupeau ») ou, pire, leurs surnoms (« Boche et Bibi-la-Grillade »).
On trouvera aussi un couple (le « ménage Gaudron » détaillé par leur genre « l’homme (…) la femme (…) » (l.
(paragraphes 1 et 2).
Ils sont aussi évoqués par des termes collectifs qui noient leurs personnalités : « la noce » (l.15,25,28), le
« cortège » (l.1,15), le « défilé » (l.27)  défini comme un groupe solidaire. On trouve aussi le pronom
impersonnel « on » : « on fit le tour » (l.3), « on ne comprenait pas » (l.17).
- Le narrateur évoque aussi certaines parties de leurs corps (« cous tordus et yeux en l’air » l. 20, « les
mains sur son ventre » l.8, « la bouche ouverte ») dans une attitude qui les ridiculise (« tordus » a une
connotation négative et « en l’air » les expose à des accidents de déplacement, ce n’est pas une attitude
naturelle)
- et la modestie de leurs chaussures (« souliers à clous » l. 29)

C- Un comique burlesque dû au décalage culturel : ils ne se comportent pas comme les autres visiteurs habitués
du musée du louvre.
- recherchent la ressemblance des personnages des tableaux avec leur entourage : « une ressemblance
avec une de ses tantes » (l. 5), « dont elle trouvait la chevelure jaune pareille à la sienne » (l.12)
- regard égrillard sur la nudité : « ricanaient en se montrant du coin de l’œil les femmes nues » (l. 5-6)
- stupéfaction : « l’homme la bouche ouverte , la femme les mains sur son ventre, restaient béants, attendris
et stupides » (énumérations d’adjectifs qui marquent la stupéfaction : « béants » par métonymie – ils ont les
yeux grand ouverts, la « bouche ouverte », « stupides » qui signifie ici « frappés de stupeur » et l’admiration
pour une figure religieuse appréciée, aimée : « attendris »). Rythme ternaire double insiste sur leur
réaction : « le ménage/ l’homme/ la femme » // « béants/ attendris/ stupides ».
Certaines œuvres leur paraissent énigmatiques, trop peu réalistes : « des hommes et des femmes avec
des figures qu’on ne comprenait pas, des paysages tout noirs, des bêtes devenues jaunes »
- « ce qui les intéressait le plus, c’étaient encore les copistes »  décalage car le plus intéressant ce sont
évidemment les œuvres et non ceux qui viennent juste pour les copier, avec plus ou moins de talent. Ils
n’ont jamais vu de peintres au travail  fascination.
- Malaise et fatigue physiques :
 Le choc culturel produit jusqu’au malaise physique : « une débandade de gens et de choses dont le
violent tapage de couleurs commençait à leur causer un gros mal de tête »  face à tant de scènes
inconnues, qu’ils n’identifient pas clairement, et des effets esthétiques auxquels ils ne sont pas
habitués, ils en viennent à souffrir physiquement. Le nombre des tableaux qui s’enchaînent est
souligné par la répétition du mot « tableaux » avec surenchère : « Encore des tableaux, toujours des
tableaux » (l. 16)
 tout ce tourbillon d’œuvre dont ils n’ont pas l’habitude les fatigue (« déjà lasse » l’adverbe de temps
« déjà » soulignant que ces visiteurs s’ennuient plus vite que les autres ; « perdant de son respect » =
ils n’ont plus la force de s’intéresser, de se soumettre à la solennité du lieu et des œuvres, l’effort
devient excessif) ; traduction physique : leur pas devient moins allant : « traînait ses souliers à clous »,
« piétinement », « tapait ses talons »  produit un bruit inhabituel en ce lieu qui résonne du fait de son
architecture (« sur les parquets sonores (…) au milieu de la propreté (…) recueillie des salles ») 
s’annonce de loin et se ridicule par manque de connaissance des codes.

D- Un comique burlesque renforcé par la mise en abyme :


La « noce » venu regarder le spectacle offert par les toiles devient finalement elle-même le spectacle pour les
autres visiteurs et personnels du musée.
- « pourtant » : marque une transition, une opposition  on va changer de point de vue, désormais c’est le
regard des rieurs que nous allons adopter
- « le bruit avait dû se répandre » : l’événement = suffisamment spectaculaire et rare pour que chacun le
raconte et en fasse un sujet d’intérêt
- Fort enthousiasme suscité : « des peintres accouraient »  distraction inespérée dans leur travail
- On s’installe confortablement pour profiter de la scène : « on s’asseyait à l’avance »  comme au
spectacle on arrive avant les artistes et on prend place « pour assister commodément »
- Ridicule des malheureux visiteurs : « la bouche fendue d’un rire » (les peintres sont les moins charitables,
ceux qui exhibent le plus leurs moqueries, ce sont des artistes qui se moquent des bienséances), « défilé »
(la « noce » est travestie en sorte de défilé carnavalesque, elle perd de sa respectabilité, on vient regarder
l’enchaînement de tous ces personnages inaccoutumés en ces lieux et qui se déplacent à la queue-leu-leu.
Gardiens : par déontologie professionnelle ils ne peuvent se moquer ouvertement des visiteurs, ni par leurs
mimiques (« lèvres pincées » pour ne pas rire) ni par des remarques moqueuses ou des plaisanteries
(«« retenaient des mots d’esprit » )
- Commentaire du narrateur : métaphore moqueuse, la noce est comparée à des animaux en pagaille (« un
troupeau débandé, lâché »)
 Ce sont les spectateurs d’un spectacle sérieux (les toiles du musée) qui deviennent eux-mêmes un
spectacle comique dont les initiés du lieu (peintres, visiteurs, gardiens) se repaissent.
Au-delà de la satire de cette noce populaire poussée par le mauvais temps dans un lieu qui ne leur est pas le
moins du monde familier, Zola profite de ce passage pour faire une réflexion sur l’Art.

II] . Une réflexion sur l’Art.

A- L’Art peut parler à tous.


 Même s’ils n’ont aucune familiarité avec le milieu artistique, ils ont l’intuition d’être dans un lieu
respectable, qui les dépasse mais qu’ils respectent.
- M. Madinier donne le ton : « surveillait la queue du cortège », veillant à se que chacun ait un comportement
approprié. Et la troupe est disciplinée : « menait lentement le cortège, qui le suivait en ordre »
Lorsqu’il parle, c’est en « murmur[ant] à demi-voix » (l.2) : il sait qu’un musée est un lieu à l’ambiance
feutrée, et la comparaison « comme dans une église » montre qu’il considère ce lieu presque comme
sacré. Il a le sens de l’art, même s’il n’y connaît rien.
Il est lui-même très impressionné de ce qu’il a entendu dire de ce lieu : discours indirect libre (« Il n’y a que
des chefs-d’œuvre »  mise en valeur l’ensemble de la collection, avec un terme très élogieux + « ça en
valait la peine »  il est conscient que ces merveilles méritent d’être vues et revues  « M. Madinier
voulut qu’on recommençât » le tour du salon. Les autres, soumis à son autorité, acceptent.
« tous les cours tordus et les yeux en l’air » : l’intérêt de tous pour toutes les œuvres qui les entourent.
 Ils aimeraient comprendre ce qu’ils voient, preuve que ces portraits ou scènes les interpellent : «c’était
bête de ne pas écrire les sujets sur les cadres » ; « il la lui donna pour la belle Ferronière » (même s’il
se trompe, il essaie d’interpréter ce qu’il voit, il cherche à trouver le sens, les clés d’interprétation)
 Comme nous l’avons vu plus haut, même s’ils sont novices en la matière, ces œuvres les font réagir,
même si leurs réactions, dans leur manière de s’exprimer peuvent paraître décalées : Boche et Bibi-la-
Grillade sont sensibles aux « femmes nues », aux « cuisses de l’Antiope », preuve du réalisme du
tableau, de sa charge sensuelle, celle précisément qu’avait recherchée le peintre ; de la même façon,
le ménage Gaudron est violemment ému par ce portrait de la Sainte Vierge, et leur émotion, palpable,
comme s’ils se tenaient face à une apparition mariale, peut tenir lieu d’hommage au peintre. L’Art a
pour objectif de faire réagir, et leurs réactions, pour diverses et inhabituelles qu’elles soient, sont bien
présentes.
 Au-delà du musée, on voit que certains fréquentent des lieux artistiques plus populaires : si Madinier
confond la maîtresse du Titien avec la belle Ferronnière, c’est parce que manifestement il a assisté à
une pièce de théâtre, « un drame, à l’Ambigu », qui portait sur cette maîtresse de Henri IV.

B- Une réflexion sur son propre art, la Littérature naturaliste


- ce passage permet à Zola de mettre en scène la particularité de la littérature naturaliste qui est de plonger
des personnages dans différents milieux et d’observer leur manière de se comporter, de réagir. On voit ici
une véritable peinture sociale. On découvre le musée du Louvre comme un lieu ouvert, accessible, mais
finalement peu fréquenté par les classes sociales les plus populaires et les moins instruites (les artistes
comme les « copistes » ne sont le plus souvent pas socialement favorisés, mais ils sont instruits…)
- Le discours indirect libre permet au lecteur de partager l’intériorité des personnages et leurs sentiments
face aux œuvres qu’ils découvrent : « Il n’y avait là que des chefs-d’œuvre » (l.2), « ça en valait la peine »
(l. 9), « c’était bête de ne pas écrire les sujets sur les cadres » (l.4) (aujourd’hui, pour faciliter l’accès à la
culture, on trouve des cartons explicatifs affichés à proximité de chaque œuvre).
- Le respect témoigné envers le lieu et les réactions, même décalées, les questionnements, montrent que ce
public non averti pourrait être instruit, qu’il serait demandeur. Derrière le portrait satirique on voit une
certaine tendresse du narrateur et de l’auteur face à ces petites gens qui apprécient comme ils peuvent.
Lorsque M. Madinier « répondait gravement, avec un grand aplomb », il cherche certes à paraître instruit
aux yeux de Mme Lorilleux, mais il est conscient que l’art est un sujet sérieux, dont il convient de parler
avec sérieux.

C- Une réflexion sur son propre art, la Littérature, mise au service de la peinture.
- La littérature est ici un moyen de faire l’éloge de la peinture : cette visite au Louvre est l’occasion pour
l’auteur de s’exprimer sur son amour de l’art pictural. Les deux arts s’y entremêlent.
- Il parle manifestement à un public relativement averti, avec une certaine culture : il évoque les œuvres,
mais pas forcément avec leur auteur (le peintre des Noces de Cana n’est pas mentionné – il s’agit de Paul
Véronèse, en 1563-, « les cuisses de l’Antiope » désigne le tableau Jupiter et Antiope, du Titien).
- Il oppose à l’incompréhension de ses personnages sa propre maîtrise de l’histoire de l’Art, son propre goût
(l. 20-22) : il énumère des écoles célèbres qu’il apprécie, à savoir les « écoles italiennes et flamandes » (l.
15), les « primitifs », les « Vénitiens », les « Hollandais », dont il caractérise l’esthétique de façon
extrêmement méliorative avec les expressions « sécheresse fine », « splendeurs » et « la vie grasse et
belle de lumière »
- Au-delà des œuvres elles-mêmes, Zola nous montre aussi le tableau de la peinture en action à travers le
passage sur les copistes (l.22-25) : « leurs chevalets installés parmi le monde, peignant sans gêne ». Ces
peintres sont concentrés sur leur œuvre, ils ne sont pas perturbés par le public qui déambule autour d’eux :
l’Art est une passion. La narration insiste sur cette vision du peintre à travers l’exemple détaillé de la
« vieille dame », qui met en scène la peinture comme un art magistral à travers les adjectifs « grande » et
« immense » (extension verticale et horizontale). Les détails précis de sa posture, puisqu’elle est « montée
sur une grande échelle », et de son action (elle « prom[ène] un pinceau à badigeon dans le ciel tendre
d’une immense toile ») relèvent de l’hypotypose : ils nous montrent en effet de manière précise, réaliste et
vivante la peintre en action. L’adjectif « tendre » révèle là aussi l’amour de Zola pour la peinture.
- Le caractère vivant de cette peinture s’incarne aussi dans la métaphore : « Des siècles d’art passaient
devant leur ignorance ahurie », dans un renversement inattendu : ce n’est plus la noce qui passe devant
les toiles, c’est l’inverse, c’est l’Histoire de la peinture qui réalise un véritable défilé sous les yeux de ces
spectateurs stupéfaits (= sens d’« ahurie », ici), les spectateurs deviennent objets de l’action tandis que les
toiles la réalisent ; la peinture est ici mise en valeur, montrée comme vivante.
- Zola réalise la synthèse de la Littérature et de la peinture à travers l’allusion à la toile des Noces de Cana :
il s’agit en effet d’une mise en abyme, puisque celle qui s’interroge au sujet de ce tableau, Gervaise, est
elle-même une jeune mariée et elle visite le Louvre avec sa « noce » : sur le tableau et devant le tableau,
ce sont deux noces qui se contemplent. La Littérature et la Peinture, comme tous les arts, sont aussi
intimement liées par leur aptitude commune à témoigner des siècles et de leur passage (« des siècles
passaient… ») en représentant des scènes historiques, mythologiques, religieuses, de la vie quotidienne
des hommes, etc. De Lascaux à la peinture contemporaine, de l ’Iliade et l’Odyssée à la littérature du
XXième siècle, l’Art porte de la même façon témoignage de l’Histoire des hommes.

.
Note : ci-dessous Jupiter et Antiope, dit aussi La Vénus du Pardo, tableau du Titien, XVIème s.

L’Immaculée Conception (càd la Vierge) de Murillo, milieu du XVIIème s. (présente au Louvre de 1852 jusqu’à 1941,
date à laquelle Franco fit pression sur Vichy pour que la France la lui cède contre un tableau de moindre valeur).

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