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Valeurs Mobilières

Ce document traite du droit des sociétés et des valeurs mobilières. Il est organisé en chapitres et sections traitant de sujets tels que les caractéristiques fondamentales des valeurs mobilières, leur forme, leur nature et leur transfert de propriété.

Transféré par

sossey alaoui zakaria
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Valeurs Mobilières

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Répertoire de droit des sociétés

 Table des matières


 Bibliographie
 Généralités (1 - 6)
 Chapitre 1 – Droit commun des valeurs mobilières (7 - 61)
o Section 1 – Caractères fondamentaux des valeurs mobilières (8 - 26)
 Art. 1 – Les valeurs mobilières sont des titres émis par les personnes morales
(9 - 12)
 Art. 2 – Les valeurs mobilières sont fongibles (13 - 15)
 § 1 – Les valeurs mobilières sont nécessairement plurales (14)
 § 2 – La fongibilité suppose que les valeurs mobilières soient totalement
substituables les unes aux autres dans la même catégorie (15)
 Art. 3 – Les valeurs mobilières sont négociables (16 - 17)
 Art. 4 – Les valeurs mobilières sont nécessairement comptabilisées (18 - 20)
 Art. 5 – Les valeurs mobilières constatent un droit d'associé ou un droit de
créance envers l'émetteur (21 - 25)
 Art. 6 – La valeur mobilière est un titre susceptible d'être coté et négocié en
bourse (26)
o Section 2 – Forme des valeurs mobilières (27 - 40)
 Art. 1 – Domaines respectifs des valeurs nominatives et au porteur (31 - 32)
 Art. 2 – Problématique de l'identification des actionnaires (33 - 40)
 § 1 – Titres au porteur identifiables (TPI) (34 - 35)
 § 2 – Question des investisseurs dits « intermédiés » (36 - 40)
 A – Déclaration de la qualité d'intermédiaire (38)
 B – Révélation de l'identité des investisseurs intermédiés (39 -
40)
o Section 3 – Nature des droits conférés par les valeurs mobilières et nature des droits
exercés sur celles-ci (41 - 61)
 Art. 1 – Droit de propriété (42 - 46)
 Art. 2 – Régime du transfert de propriété (47 - 61)
 § 1 – Transfert de propriété des valeurs non cotées (49 - 56)
 A – Principe (50)
 B – Incertitudes (51 - 54)
 C – Maintien du système antérieur (55 - 56)
 § 2 – Transfert de propriété des valeurs cotées et valeurs assimilées (57
- 61)
 Chapitre 2 – Droit spécial des valeurs mobilières (62 - 207)
o Section 1 – Titres donnant un accès immédiat au capital (65 - 128)
 Art. 1 – Règles générales applicables aux actions (72 - 94)
 § 1 – Émission des actions. – Organes compétents. – Prix d'émission (76
- 85)
 A – Organes compétents (76 - 84)
 B – Prix d'émission (85)
 § 2 – Circulation de l'action. – Clause d'agrément en cas de cession (86 -
87)
 § 3 – Prérogatives et charges attachées à l'action (88 - 94)
 A – Diversité des prérogatives (88)
 B – Charges attachées à l'action (89 - 94)
 Art. 2 – Règles propres aux actions de préférence (95 - 128)
 § 1 – Premier critère de qualification : les actions de préférence sont des
actions (98 - 118)
 A – Principe : les actions de préférence doivent respecter les
règles de l'ordre public sociétaire (99 - 105)
 B – Exception : les actions de préférence sont des actions qui
peuvent ne pas ouvrir droit au vote (106 - 113)
 C – Cas particulier des actions de préférence dans les groupes de
sociétés (114 - 118)
 § 2 – Deuxième critère de qualification : les actions de préférence
forment une catégorie d'actions (119 - 121)
 § 3 – Troisième critère de qualification : les actions de préférence
comportent des avantages supérieurs aux actions ordinaires. Énoncé (122
- 128)
o Section 2 – Obligations (129 - 173)
 Art. 1 – Conditions de l'émission (132 - 148)
 § 1 – Conditions relatives à l'émetteur (132 - 142)
 A – Capacité de l'émetteur (133 - 136)
 B – Organes compétents (137 - 142)
 § 2 – Réalisation de l'émission. Publicité (143 - 146)
 § 3 – Législation sur l'usure (147 - 148)
 Art. 2 – Statut des obligataires (149 - 161)
 § 1 – Particularisme de la condition des obligataires. Droits particuliers
des obligataires (150)
 § 2 – Organisation des obligataires en une masse (151 - 161)
 Art. 3 – Titres participatifs et titres subordonnés (162 - 173)
 § 1 – Titres participatifs. Nature juridique (163 - 170)
 § 2 – Titres subordonnés. Absence d'autonomie conceptuelle (171 - 173)
o Section 3 – Valeurs mobilières donnant accès au capital ou le droit à un titre de
créance (174 - 207)
 Art. 1 – Régime de l'émission (180 - 184)
 § 1 – Compétence d'émission (180 - 183)
 § 2 – Droit préférentiel de souscription des actionnaires (184)
 Art. 2 – Régime de protection des porteurs (185 - 207)
 § 1 – Généralisation du groupement en une masse (192 - 196)
 § 2 – Défense à l'émettrice de procéder à certaines opérations (197 -
202)
 A – Interdiction relative (198 - 200)
 B – Interdiction absolue (201 - 202)
 § 3 – Licéité conditionnelle des autres opérations. Techniques de
protection (203 - 207)
 Index alphabétique
 Actualisation
Valeurs mobilières
Daniel OHL
Avocat à la cour d'appel de Paris
Professeur associé à l'université d'Orléans

septembre 2005

Table des matières

Généralités 1 - 6

Chap. 1 - Droit commun des valeurs mobilières 7 - 61


Sect. 1 - Caractères fondamentaux des valeurs mobilières 8 - 26
Art. 1 - Les valeurs mobilières sont des titres émis par les personnes morales 9 - 12
Art. 2 - Les valeurs mobilières sont fongibles 13 - 15
§ 1 - Les valeurs mobilières sont nécessairement plurales 14
§ 2 - La fongibilité suppose que les valeurs mobilières soient totalement substituables les unes aux
autres dans la même catégorie 15
Art. 3 - Les valeurs mobilières sont négociables 16 - 17
Art. 4 - Les valeurs mobilières sont nécessairement comptabilisées 18 - 20
Art. 5 - Les valeurs mobilières constatent un droit d'associé ou un droit de créance envers l'émetteur
21 - 25
Art. 6 - La valeur mobilière est un titre susceptible d'être coté et négocié en bourse 26
Sect. 2 - Forme des valeurs mobilières 27 - 40
Art. 1 - Domaines respectifs des valeurs nominatives et au porteur 31 - 32
Art. 2 - Problématique de l'identification des actionnaires 33 - 40
§ 1 - Titres au porteur identifiables (TPI) 34 - 35
§ 2 - Question des investisseurs dits « intermédiés » 36 - 40
Sect. 3 - Nature des droits conférés par les valeurs mobilières et nature des droits exercés sur celles-ci
41 - 61
Art. 1 - Droit de propriété 42 - 46
Art. 2 - Régime du transfert de propriété 47 - 61
§ 1 - Transfert de propriété des valeurs non cotées 49 - 56
§ 2 - Transfert de propriété des valeurs cotées et valeurs assimilées 57 - 61

Chap. 2 - Droit spécial des valeurs mobilières 62 - 207


Sect. 1 - Titres donnant un accès immédiat au capital 65 - 128
Art. 1 - Règles générales applicables aux actions 72 - 94
§ 1 - Émission des actions. – Organes compétents. – Prix d'émission 76 - 85
§ 2 - Circulation de l'action. – Clause d'agrément en cas de cession 86 - 87
§ 3 - Prérogatives et charges attachées à l'action 88 - 94
Art. 2 - Règles propres aux actions de préférence 95 - 128
§ 1 - Premier critère de qualification : les actions de préférence sont des actions 98 - 118
§ 2 - Deuxième critère de qualification : les actions de préférence forment une catégorie d'actions
119 - 121
§ 3 - Troisième critère de qualification : les actions de préférence comportent des avantages
supérieurs aux actions ordinaires. Énoncé 122 - 128
Sect. 2 - Obligations 129 - 173
Art. 1 - Conditions de l'émission 132 - 148
§ 1 - Conditions relatives à l'émetteur 132 - 142
§ 2 - Réalisation de l'émission. Publicité 143 - 146
§ 3 - Législation sur l'usure 147 - 148
Art. 2 - Statut des obligataires 149 - 161
§ 1 - Particularisme de la condition des obligataires. Droits particuliers des obligataires 150
§ 2 - Organisation des obligataires en une masse 151 - 161
Art. 3 - Titres participatifs et titres subordonnés 162 - 173
§ 1 - Titres participatifs. Nature juridique 163 - 170
§ 2 - Titres subordonnés. Absence d'autonomie conceptuelle 171 - 173
Sect. 3 - Valeurs mobilières donnant accès au capital ou le droit à un titre de créance 174 - 207
Art. 1 - Régime de l'émission 180 - 184
§ 1 - Compétence d'émission 180 - 183
§ 2 - Droit préférentiel de souscription des actionnaires 184
Art. 2 - Régime de protection des porteurs 185 - 207
§ 1 - Généralisation du groupement en une masse 192 - 196
§ 2 - Défense à l'émettrice de procéder à certaines opérations 197 - 202
§ 3 - Licéité conditionnelle des autres opérations. Techniques de protection 203 - 207

Bibliographie

I. Ouvrages généraux et manuels.


e
C. AUBRY et C. RAU, Cours de droit civil français, 6 éd. par P. ESMEIN, 1952, Librairies techniques ; Cours
e
de droit civil français, 5 éd., 1897, Librairies techniques. – J. CARBONNIER, Droit civil, t. 4, Les obligations,
e e
22 éd., 2000 ; t. 3, Les biens, 19 éd., 2000, PUF. – G. CORNU (sous la direction de), Vocabulaire juridique,
o
V Négociabilité, 2005, Association Henri Capitant, PUF. – P. DIDIER, Droit commercial, t. 2, L'entreprise en
e
société, 2 éd. refondue, 1997, coll. Thémis, Droit privé, PUF ; Droit commercial, t. 3, La monnaie, les
valeurs mobilières, les effets de commerce, 1999, coll. Thémis, Droit privé, PUF. – J. et E. ESCARRA et
J. RAULT, Traité théorique et pratique de droit commercial, t. 3, Sociétés par actions, 1955, Sirey. –
e
C. HOUPIN et H. BOSVIEUX, Traité général des sociétés civiles et commerciales, t. I, 7 éd., 1935, Adm. du
e
Journal des notaires et avocats. – P. LE CANNU, Droit des sociétés, 2 éd., 2003, Domat droit privé,
Montchrestien. – Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et P.-Y. GAUTIER, Les contrats spéciaux, 2004, Defrénois. –
A. CHARVÉRIAT, A. COURET et B. MERCADAL, Sociétés commerciales, Mémento pratique Francis Lefebvre,
2005. – J. MESTRE et D. VELARDOCCHIO, Lamy Sociétés commerciales, 2005. – G. RIPERT et R. ROBLOT,
e
Traité de droit commercial, t. I, vol. 2, Les sociétés commerciales, par M. GERMAIN, 18 éd., 2002, LGDJ ;
t. II, Effets de commerce, banque, contrats commerciaux, procédures collectives, par Ph. DELEBECQUE et
e
M. GERMAIN, 17 éd., 2004, LGDJ. – THALLER, De la nature juridique du titre de crédit, Contribution à une
étude générale sur le droit des obligations, 1906, Annales de droit commercial . – F. ZENATI et Th. REVET,
e
Les biens, 2 éd., 1997, coll. Droit fondamental, PUF.

II. Ouvrages spéciaux et thèses.

A.-L. ARCHAMBAULT, La nature juridique des valeurs mobilières, thèse dactyl., Paris I, 1999. –
F. AUCKENTHALER, Droit des marchés de capitaux, 2004, LGDJ. – Th. BONNEAU et F. DRUMMOND, Droit des
e
marchés financiers, 2 éd., 2005, Economica. – J.-P. BOUÈRE, Ph. DEROUIN, J.-M. DESACHÉ, A. DUHAMEL,
E. MALINVAUD et H. DE VAUPLANE, Titres et emprunts obligataires, t. 1, 1998, éd. Banque. – H. CAUSSE,
Les titres négociables. Contribution à une théorie du contrat négociable, thèse Montpellier, 1991 . –
e
J. COPPER-ROYER, Traité des sociétés anonymes, t. II, 4 éd., 1931, Dalloz - A. COURET et H. LE
NABASQUE, Valeurs mobilières et augmentations de capital, 2004, F. Lefebvre. – F. FORGUES, L'actionnaire
indirect, thèse, Paris I, 2002. – S. GINOSSAR, Droit réel, propriété et créance, Élaboration d'un système
rationnel des droits patrimoniaux, 1960, LGDJ. – L. GODON, Les obligations des associés, préf. Y. GUYON,
1999, Economica. – Ph. GOUTAY, Le transfert de propriété de titres cotés, thèse dactyl., Paris IX, 1997. –
H. HOVASSE, Les augmentations de capital à souscription conditionnelle, 1988, Economica. – M. JEANTIN,
e
Droit des sociétés, 3 éd., 1994, Domat droit privé, Montchrestien. – Ch. LASSALAS, L'inscription en compte
des valeurs, la notion de propriété scripturale, thèse, PU Clermont-Ferrand, 1997, Litec. – R. LIBCHABER,
Recherches sur la monnaie en droit privé, 1992, LGDJ. – F.-X. LUCAS, Les transferts temporaires de valeurs
mobilières, 1997, LGDJ. – P. MAILLARD, L'épargne salariale après la loi du 19 février 2001, Revue Banque
éd., 2002. – S. MOISDON-CHATAIGNER, La propriété des valeurs mobilières, thèse dactyl., Paris IX, 1999. –
R. MORTIER, Le rachat par la société de ses droits sociaux, 2002, Dalloz. – A.-C. MULLER, Droit des marchés
financiers et droit des contrats, thèse dactyl., Paris II, 2001. – A. MULTRIER-TRÉBULLE, La notion de
subordination de créance, thèse dactyl., Paris II, 2002. – F. NIZARD, Les titres négociables, Revue Banque
e
éd.-Economica, 2003. – D. OHL, Droit des sociétés cotées, 2 éd., 2005, Litec. – I. PARACHKÉVOVA, Le
pouvoir de l'investisseur professionnel dans la société cotée, 2005, LGDJ. – A. REYGROBELLET, La notion de
valeur mobilière, thèse, Paris II, 1995. – I. RIASSETTO et M. STORCK, OPCVM, 2002, coll. Affaires, Joly. –
D. SCHMIDT, Les conflits d'intérêts dans la société anonyme, 2004, coll. Pratique des affaires, éd. Joly. –
J. STOUFFLET et J.-P. DESCHANEL (sous la direction de), Études sur le cours de bourse, 1997, Economica. –
S. SYLVESTRE-TOUVIN, Le coup d'accordéon ou les vicissitudes du capital, 2003, PUAM. – F.-G. TRÉBULLE,
L'émission de valeurs mobilières, préf. Y. Guyon, 2002, coll. « Recherches juridiques », Economica. –
o
Brochure ANSA 2005, n 196 : La réforme du régime des valeurs mobilières, difficultés et solutions.

III. Articles.

A. Sur la réforme des valeurs mobilières du 24 juin 2004.


o
1) RD bancaire et financier n 5, sept.-oct. 2004 : six études, respectivement de : C. BAJ, Les délégations de
pouvoir, p. 348. – J.-J. DAIGRE, L'aménagement du droit de vote, p. 366. – F. DRUMMOND, Un nouveau
principe : la liberté d'émettre toutes valeurs mobilières, p. 361. – M. GERMAIN, La création et la disparition
des actions de préférence, p. 348. – B. LE BARS, Le nouveau visage des augmentations de capital en nature,
p. 369. – A. PIETRANCOSTA, La protection des titulaires de valeurs mobilières donnant accès au capital après
l'ordonnance du 24 juin 2004, p. 373.
o
2) Dr. et patrimoine, n 130, oct. 2004, p. 79 (Actes du colloque du 24 juin 2004, Paris II, « Le nouveau
droit des valeurs mobilières après la réforme du 24 juin 2004 »), dix contributions : F. AUCKENTHALER, Les
nouvelles règles d'émission des obligations, p. 90. – F. BARRIÈRE, Les causes de nullité des augmentations
de capital, p. 92. – G. BLANLUET, Le transfert de propriété des actions, p. 81. – Th. BONNEAU, L'application
de la réforme dans le temps, p. 100. – J.-M. DESACHÉ, Les règles propres aux sociétés cotées :
l'assouplissement des règles d'émission, p. 94. – M.-A. FAUVET, Le régime des valeurs mobilières
composées, p. 97. – M. GERMAIN, Les actions de préférence : le nouveau régime de création et de
suppression, p. 82. – J. LE PAPE, La philosophie de la réforme, p. 80. – T. MASSART, Les actions de
préférence et la question du droit de vote, p. 84. – P. TOURRES, Augmentation de capital : l'élargissement
des délégations, p. 87.

3) Rev. sociétés 2004.461 : Ph. BISSARA, Présentation générale de l'ordonnance portant réforme du
régime des valeurs mobilières émises par les sociétés, p. 461. – J.-J. DAIGRE, Les émissions sans droit
préférentiel de souscription, p. 479. – L. FAUGÉROLAS et S. SABATIER, Les émissions réservées, p. 515. –
M. GERMAIN, Les actions de préférence, p. 597. – T. GRANIER Le rôle des commissaires aux comptes,
p. 557. – B. GRELON, Le nouveau droit commun des valeurs mobilières donnant accès au capital, p. 579. –
B. LE BARS, Le volume des augmentations de capital, p. 531. – P. LE CANNU, La protection des porteurs,
p. 567. – H. LE NABASQUE, Les augmentations de capital réalisées avec maintien du droit préférentiel de
souscription des actionnaires, p. 491. – J.-P. MATTOUT, Les nouveaux pouvoirs financiers des organes de
direction, p. 543. – R. MORTIER, Rachat d'actions et actions rachetables, p. 639. – F. NIZARD, Le transfert
de propriété des valeurs mobilières : une réforme inachevée, p. 619. – B. SAINTOURENS, Le nouveau droit
des clauses d'agrément p. 611 ; Les titres en voie d'extinction et le droit transitoire, p. 659.

4) Bull. Joly sociétés, Spécial Ordonnance valeurs mobilières du 24 juin 2004, hors série févr. 2005 :
C. BAERT, Les actions de priorité : une catégorie de titres en voie d'extinction après l'ordonnance du 24 juin
o
2004, p. 107. – P.-Y. CHABERT, Les augmentations de capital après l'ordonnance n 2004-604 du 24 juin
2004 portant réforme des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales, p. 47. – B. LOSFELD, Le
sort des actions délaissées, p. 91. – D. OHL, Aspects de la réforme du droit des valeurs mobilières, p. 15. –
S. SYLVESTRE, Le regroupement d'actions après l'ordonnance du 24 juin 2004 : une occasion manquée,
p. 113.

5) Petites affiches : A. COURET et varii auctores, La réforme des valeurs mobilières, un an après, numéro
spécial, 22 sept. 2005.

B. Divers.

V. ALLEGAERT, De la propriété des valeurs mobilières, Bull. Joly 2005.340. – C. ARSOUZE et P. LEDOUX, Le
vote des actionnaires non résidents, Bull. Joly 2004.1066. – Cl. BAJ, La cessibilité du droit de vote, Cah. dr.
o
entr. 3 oct. 1996, n 4, p. 16. – M. BANDRAC, P. BIROTHEAU, C. DEBIN, J.-P. DOM, S. GAILLET, F. LE
ROQUAIS et M. SUPIOT, Le régime et l'émission des valeurs mobilières après les ordonnances de 2004, Actes
o
pratiques n 77, sept.-oct. 2004. – G. BARSI, Analyse juridique du système français d'échange de quotas
o
d'émission de gaz à effet de serre, Actes pratiques 2004, n 75, p. 33. – C. BARTHÉLEMY, La garantie
o
implicite, gratuite et illimitée de l'État aux établissements publics : mythe ou réalité ? CJEG 2004, n 613,
p. 423. – A. BERNARD, À propos de la guerre du chiffre et du droit. Comment les comptables étendent leur
territoire professionnel, D. 2004.1580 . – Ph. BISSARA, Analystes financiers et agences de notation, Bull.
Joly Bourse 2004.11. – M. BOIZARD, La réduction du capital social à zéro, Rev. sociétés 1999.735 . –
Th. BONNEAU, La diversification des valeurs mobilières : ses implications en droit des sociétés, RTD com.
1988.535 ; Les fonds communs de placement, les fonds communs de créances, et le droit civil, RTD
civ. 1991.1 ; De quelques stipulations affectant le dividende des actions sectorielles, RD bancaire et
o o
financier 2000, n 3, p. 151 ; L'ordonnance n 2004-604 du 24 juin 2004. Son application dans le temps, Dr.
sociétés août-sept. 2004, p. 6 ; L'acquisition de la qualité d'actionnaire par le salarié dans le plan d'épargne
d'entreprise, Bull. Joly 2005.29. – D. CHAUVAUX, La notion de contrôle conjoint, RJDA 2005.3. – D. COHEN,
La validité du « coup d'accordéon » (à propos d'une jurisprudence récente), D. 2003, chron. 410 . –
A. COURET, ADR, EDR, nominees, trustees, partnerships, global custodians, etc., Rev. sociétés 1999.555 ;
Actionnaires non résidents et détention de titres sur des places étrangères : la question de l'identification de
l'actionnaire réel, Dr. et patrimoine mai 2000, p. 103. ; Les agences de notation : observations sur un angle
mort de la réglementation, Rev. sociétés 2003.765 . – A. COURET et A. DARGENT, Le domaine
d'application de la procédure d'approbation des avantages particuliers, Actes pratiques, sept. 1999, p. 23. –
A. COURET et J.-L. MEDUS, Valeurs mobilières composées et bons de souscription autonomes, Joly sociétés,
Traité, janv. 1997. – J. DABIN, Une nouvelle définition du droit réel, RTD civ. 1962.20. – J.-J. DAIGRE,
Actions privilégiées, catégories d'actions et avantages particuliers, Mélanges M. Jeantin, 1999, Dalloz, p. 213.
– J.-J. DAIGRE, F. MONOD et P. BASDEVANT, Les actions à privilèges non financiers, Dr. sociétés, Actes
o
pratiques, n 35, nov. 1997. – G. DECOCQ, Une nouvelle forme de valeurs mobilières : les certificats de
valeur garantie, JCP, éd. E, 1997. I. 650. – P. DIDIER, La réduction du capital à zéro, Mélanges AEDBF
France, éd. Banque, 1997, p. 171 ; Les biens négociables, Mélanges Y. Guyon, 2003, Dalloz, p. 327. –
B. DONDERO, Le rapport 2004 de l'AMF sur les agences de notation, Dr. sociétés 2005, Alerte 38, p. 4. –
B. DONDERO, M. HASCHKE-DOURNAUX et S. SYLVESTRE, Les agences de notation, Actes pratiques, 2005,
o
n 78, p. 5. – F. DRUMMOND, Le contrat comme instrument financier, Mélanges F. Terré, 1999, PUF-Dalloz-
éd. du Juris-Classeur, p. 661. – G. ELIET et A. GAUVIN, Déontologie de la notation du crédit, RD banc. fin.
o
2004, n 6, comm. 276, p. 432. – M. FABRE-MAGNAN, Propriété, patrimoine et lien social, RTD
civ. 1997.583 . – R. FOY, Caractères généraux du régime du plan d'épargne d'entreprise, Dr. sociétés mars
1997, p. 6. ; Plan d'épargne d'entreprise, J.-Cl. sociétés, Traité, fasc. 173-30. – C. FREYRIA, Réflexion sur le
plan d'épargne d'entreprise, Mélanges J. Derruppé, 1991, Litec, p. 205. – M.-A. FRISON-ROCHE, Remarques
sur la distinction de la volonté et du consentement en droit des contrats, RTD civ. 1995.573 . –
S. GINOSSAR, Pour une meilleure définition du droit réel et du droit personnel, RTD civ. 1962.573. –
Ph. GOUTAY, Transfert de propriété de titres cotés, J.-Cl. Banque-Crédit-Bourse, fasc. 2085 ; La notion de
valeur mobilière, D. 1999, chron. 226 . – Y. GUYON, Les tracking stocks, Mélanges AEDBF France, 2001,
p. 183. – H. HOVASSE, Titres participatifs, Rép. prat. Dalloz, Sociétés, 1988 ; Les obligations remboursables
en actions, in Droit et gestion de l'entreprise, Mélanges R. Percerou, 1993, Vuibert gestion, p. 105. –
o
H. HOVASSE, La diversification des valeurs mobilières émises par les sociétés, Dr. sociétés 2000, n 181. –
M. JEANTIN, Observations sur la notion de catégorie d'actions, D. 1995, chron. 88 . – B. LE BARS, Dict.
o
Joly Bourse et produits financiers, V Certificat de valeur garantie, 1999 ; Adoption d'un statut des services
o
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o
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des certificats de valeur garantie, JCP, éd. E, 1999.114. – A. VIANDIER, Les actions reflet, RJDA 2001.3 ;
L'irréductible droit de vote de l'usufruitier, RJDA 2004.859 ; Les actions de préférence, JCP, éd. E,
2004.1440 ; La suspension des délégations d'augmentation de capital en cas d'offre publique, Rev.
sociétés 2004.783 . – F. ZENATI, Pour une rénovation de la théorie de la propriété, RTD civ. 1993.305
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et s. - Divers auteurs, Quelles exigences pour la notation financière ?, Rev. Risques n 61, mars 2005,
p. 16 et s. – V. Action [Sociétés], Appel public à l'épargne.

ACTUALISATION
Bibliographie. - GOUTAY, Transfert de propriété des instruments financiers, Les aspects réglementaires
de la réforme, Bull. Joly Bourse 2006. 491. – ANSALONI, Le compte d'instruments financiers n'est pas un
objet de droits, Option finance 16 juill. 2007, p. 27. – ROUSSEL et VERNIERES, Le transfert de propriété
des valeurs mobilières non cotées, JCP E 2007. I. 1840. – DUBERTRET, Négociabilité et possession, essai
sur l'inopposabilité des vices de la propriété mobilière (préf. Ghozi), éd. Panthéon-Assas 2009. –
BONNEAU, Valeurs mobilières et titres financiers en droit français, RDBF mars-avr. 2009, Dossier 10,
p. 75. – HAAR, Redefining the Concept of securities under German law, Dossier 11, p. 82. – MOJUYÉ,
« Titres financiers » et « Securities » au regard de l'article 8 du uniform commercial code (UCC), Dossier
12, p. 86. – ROUSSEAU, La notion de valeurs mobilières en droit canadien, Dossier 13, p. 92. –
DUBERTRET et MANGENET, Réforme du droit des titres : commentaire de l'ordonnance du 8 janv. 2009,
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juill.-août 2009, p. 90. – DAIGRE et PAILLER, Commentaire de l'ordonnance du 8 janv. 2009 relative aux
instruments financiers, Rev. sociétés 2009. 37 . – LE CORRE, Porteurs de titres super-subordonnés et
élaboration des plans de sauvegarde ou de redressement avec comités, D. 2010. Chron. 839 . – de
WATRIGANT, Instruments financiers et valeurs mobilières, LPA 28 avr. 2010, p. 6. – BORGA, Titres
super-subordonnés et plan de sauvegarde, Bull. Joly 2010. 604. – DUBERTRET, Négociabilité et
possession. Essai sur l'inopposabilité des vices de la propriété mobilière, éd. Panthéon Assas, coll. Thèses
2010. – BONNEAU, Quotas de CO2, biens et titres financiers, Bull. Joly Bourse 2011. 207. – ROBINE, Le
transfert de propriété des quotas, RLDA 2011. 88. – MARTIN LAPRADE, La modification a posteriori des
caractéristiques de valeurs mobilières donnant accès au capital, Option Finance 11 mars 2013, p. 28. –
M. MICHINEAU, La protection des porteurs de valeurs mobilières donnant accès au capital, Rev. sociétés
2016. 347 .

TADROS, La jouissance des titres sociaux d'autrui, vol. 130, 2013, coll. Nouvelle Bibliothèque des thèses,
Dalloz.
Généralités

1. Instruments du financement des sociétés commerciales, de l'État, des collectivités territoriales et des
entreprises publiques, les valeurs mobilières permettent la mobilisation de l'épargne à long terme et sa
transformation en investissements productifs. Les valeurs mobilières transforment un sujet peu actif et
modérément entreprenant, l'épargnant, en un acteur plus dynamique, l'investisseur qui, grâce au caractère
négociable des valeurs mobilières, peut procéder à de nombreuses opérations d'achat et de vente et ainsi
récupérer, facilement et sans délai, en théorie du moins, les montants investis. Toute réglementation des
valeurs mobilières doit tendre à créer et à répandre un climat favorable à l'investissement en mettant à la
disposition des investisseurs un large éventail de valeurs mobilières différentes, en simplifiant les procédures
d'émission dans l'intérêt des entreprises et en garantissant une protection suffisante des intérêts des
investisseurs, comme le mentionnait ce qui n'était alors que la proposition de directive sur les services
d'investissement et les marchés réglementés du 19 novembre 2002 (I. 2) : « Les marchés boursiers peuvent
résister à des épisodes de volatilité, à des corrections cycliques ou à la mauvaise performance de certains
titres. Mais ils ne survivront pas à l'érosion de la confiance des investisseurs sous l'effet d'un fonctionnement
désordonné, opaque et susceptible de donner lieu à des abus de marché ». L'objectif de « sécurité
o
financière » est difficile à atteindre. La succession des lois qui poursuivent cet objectif (L. n 89-531 du
o
2 août 1989 relative à la sécurité et à la transparence des marchés financiers ; L. n 99-532 du 25 juin 1999
o er
relative à l'épargne et à la sécurité financière ; loi de « Sécurité financière » n 2003-706 du 1 août 2003
dont l'objectif affiché était de « conforter la confiance dans les acteurs et les mécanismes de marché » et de
o
réparer une « chaîne de sécurité financière rompue », Rapp. P. HOUILLON, Doc. AN avr. 2003, n 772)
démontre qu'il ne sera sans doute jamais vraiment pleinement satisfait.

ACTUALISATION
o
1-1. Législation. - La loi n 2014-1662 du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d'adaptation
de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière contient diverses
dispositions d'adaptation de notre législation au droit de l'Union européenne en matière économique et
financière. L'article 9 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives
o
nécessaires à la transposition de la directive n 2013/50/UE du Parlement européen et du Conseil sur
l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information sur les émetteurs dont les
valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé.

1-2. Financement participatif. Création d'un cadre légal. - L'ordonnance du 30 mai 2014 relative
au financement participatif institue un régime du financement participatif ou « financement par la foule »
(crowdfunding). Les sociétés pourront désormais offrir des titres financiers sans que cela constitue une
« offre au public » et sans avoir à publier un prospectus d'information soumis à l'AMF lorsque l'opération
est faite par l'intermédiaire d'un prestataire de services d'investissement (PSI) ou d'un conseiller en
investissements participatifs au moyen d'un site internet remplissant les caractéristiques fixées par le
règlement général de l'Autorité des marchés financiers. Le crowdfunding devra donc se faire par
l'intermédiaire de sites spécialisés et de professionnels disposant d'un statut dédié ou non (PSI) qu'il
sera plus facile de surveiller. Le montant qui pourra être levé sera fixé par décret et sera calculé sur une
période de douze mois dans des conditions fixées par le règlement général de l'AMF. Les sociétés par
actions simplifiées (SAS) pourront bénéficier de ce régime. Le financement est donc basé sur des plates-
formes spécialisées qui disposeront d'un nouveau statut, celui de conseiller en investissement
participatif, qui les exemptera de l'exigence de 730 000 € de fonds propres au titre de l'agrément pour
l'exploitation d'un système multilatéral de négociation (SMN). Elles pourront obtenir le label de « plate-
forme de financement participatif régulée par les autorités françaises » décerné par l'AMF et par l'ACPR
o o
(Ord. n 2014-559 du 30 mai 2014, JO 31 mai ; Décr. n 2014-1053 du 16 sept. 2014, JO 17 sept.).

o
1-3. Blockchain - L'ordonnance n 2017-1674 du 8 décembre 2017 (JO 9 déc.) adapte notre législation
pour permettre la représentation et la transmission, au moyen d'un « dispositif d'enregistrement
électronique partagé » (DEEP, en anglais, distributed ledger technology ou DLT), c'est-à-dire de la
technologie Blockchain, de certains titres financiers. Sont visés les titres qui ne sont pas admis aux
opérations d'un dépositaire central ni livrés dans un système de règlement et de livraison d'instruments
financiers, à savoir : les titres de créance négociables, les parts ou actions d'organismes de placement
collectif, enfin les titres de capital émis par les sociétés par actions et les titres de créance autres que les
titres de créance négociables et à condition qu'ils ne soient pas négociés sur une plate-forme de
négociation. Le DEEP peut être défini comme « une technologie informatique innovante qui permet à des
participants d'un réseau de valider par consensus des échanges et des transactions entre plusieurs
participants sans faire intervenir d'organe central. Elle pourrait trouver de nombreuses applications,
notamment pour l'enregistrement des transactions ayant lieu sur les marchés financiers de titres » (DG
Trésor, Consultation publique sur le projet de réformes législative et réglementaire relatif à la
Blockchain, 24 mars 2017). L'ordonnance du 8 décembre 2017 permet de conférer à l'inscription d'une
émission ou d'une cession de titres financiers dans une Blockchain les mêmes effets que l'inscription en
compte de titres financiers. Ainsi est-il énoncé : « L'inscription dans un dispositif d'enregistrement
électronique partagé tient lieu d'inscription en compte » (C. mon. fin., art. L. 211-3, al. 2). L'utilisation
de la Blockchain ne crée pas d'obligation nouvelle, ni n'allège les garanties existantes relatives à la
représentation et à la transmission des titres concernés. Les dispositions au sein du code monétaire et
financier et du code de commerce relatives aux titres financiers sont cependant ajustées pour permettre
le recours à ce dispositif. En particulier, l'ordonnance précise que c'est l'émetteur qui décide de recourir
au DEEP (C. mon. fin., art. L. 211-7). S'agissant des sociétés, il conviendra dès lors que cette possibilité
soit prévue par les statuts (et donc autorisée par la majorité renforcée des actionnaires réunis en
assemblée générale extraordinaire). La Blockchain peut également être utilisée à des fins de garantie
(V. Sûretés financières [Sociétés], Mise à jour). Un décret en Conseil d'État doit venir fixer les conditions
applicables à l'inscription de titres financiers dans un DEEP, ainsi que les modalités du nantissement de
titres financiers également lorsqu'ils sont inscrits dans une Blockchain. L'ordonnance du 8 décembre
er
2017 doit entrer en vigueur à la publication d'un décret d'application et, au plus tard, le 1 juillet 2018.

o
2. Définition. - La définition des valeurs mobilières figurait initialement dans la loi n 88-1201 du
o
23 décembre 1988 relative aux OPCVM (transposition de la directive n 85/611/CEE du 20 déc. 1985). Le
code monétaire et financier l'a ensuite généralisée dans son article L. 211-2 qui définit les valeurs mobilières
comme « les titres émis par des personnes morales, publiques ou privées, transmissibles par inscription en
compte ou tradition, qui confèrent des droits identiques par catégorie et donnent accès, directement ou
indirectement, à une quotité du capital de la personne morale émettrice ou à un droit de créance général sur
son patrimoine ». L'article L. 211-2 ajoute que « Sont également des valeurs mobilières, les parts de fonds
communs de placement et de fonds communs de créances ». C'est à cette définition que se réfère, en ce qui
concerne les sociétés par actions, l'article L. 228-1, alinéa 3, du code de commerce tel qu'il résulte de
o
l'importante ordonnance n 2004-604 du 24 juin 2004 qui consacre le triomphe de la notion de valeurs
mobilières, à un moment où son utilité est parfois contestée (V. Th. BONNEAU et F. DRUMMOND, Droit des
e o
marchés financiers, 2 éd., 2005, Economica, n 81).

ACTUALISATION
1-2. Financement participatif. Création d'un cadre légal. - L'ordonnance du 30 mai 2014 relative
au financement participatif institue un régime du financement participatif ou « financement par la foule »
(crowdfunding). Les sociétés pourront désormais offrir des titres financiers sans que cela constitue une
« offre au public » et sans avoir à publier un prospectus d'information soumis à l'AMF lorsque l'opération
est faite par l'intermédiaire d'un prestataire de services d'investissement (PSI) ou d'un conseiller en
investissements participatifs au moyen d'un site internet remplissant les caractéristiques fixées par le
règlement général de l'Autorité des marchés financiers. Le crowdfunding devra donc se faire par
l'intermédiaire de sites spécialisés et de professionnels disposant d'un statut dédié ou non (PSI) qu'il
sera plus facile de surveiller. Le montant qui pourra être levé sera fixé par décret et sera calculé sur une
période de douze mois dans des conditions fixées par le règlement général de l'AMF. Les sociétés par
actions simplifiées (SAS) pourront bénéficier de ce régime. Le financement est donc basé sur des plates-
formes spécialisées qui disposeront d'un nouveau statut, celui de conseiller en investissement
participatif, qui les exemptera de l'exigence de 730 000 € de fonds propres au titre de l'agrément pour
l'exploitation d'un système multilatéral de négociation (SMN). Elles pourront obtenir le label de « plate-
forme de financement participatif régulée par les autorités françaises » décerné par l'AMF et par l'ACPR
o o
(Ord. n 2014-559 du 30 mai 2014, JO 31 mai ; Décr. n 2014-1053 du 16 sept. 2014, JO 17 sept.).

o
1-3. Blockchain - L'ordonnance n 2017-1674 du 8 décembre 2017 (JO 9 déc.) adapte notre législation
pour permettre la représentation et la transmission, au moyen d'un « dispositif d'enregistrement
électronique partagé » (DEEP, en anglais, distributed ledger technology ou DLT), c'est-à-dire de la
technologie Blockchain, de certains titres financiers. Sont visés les titres qui ne sont pas admis aux
opérations d'un dépositaire central ni livrés dans un système de règlement et de livraison d'instruments
financiers, à savoir : les titres de créance négociables, les parts ou actions d'organismes de placement
collectif, enfin les titres de capital émis par les sociétés par actions et les titres de créance autres que les
titres de créance négociables et à condition qu'ils ne soient pas négociés sur une plate-forme de
négociation. Le DEEP peut être défini comme « une technologie informatique innovante qui permet à des
participants d'un réseau de valider par consensus des échanges et des transactions entre plusieurs
participants sans faire intervenir d'organe central. Elle pourrait trouver de nombreuses applications,
notamment pour l'enregistrement des transactions ayant lieu sur les marchés financiers de titres » (DG
Trésor, Consultation publique sur le projet de réformes législative et réglementaire relatif à la
Blockchain, 24 mars 2017). L'ordonnance du 8 décembre 2017 permet de conférer à l'inscription d'une
émission ou d'une cession de titres financiers dans une Blockchain les mêmes effets que l'inscription en
compte de titres financiers. Ainsi est-il énoncé : « L'inscription dans un dispositif d'enregistrement
électronique partagé tient lieu d'inscription en compte » (C. mon. fin., art. L. 211-3, al. 2). L'utilisation
de la Blockchain ne crée pas d'obligation nouvelle, ni n'allège les garanties existantes relatives à la
représentation et à la transmission des titres concernés. Les dispositions au sein du code monétaire et
financier et du code de commerce relatives aux titres financiers sont cependant ajustées pour permettre
le recours à ce dispositif. En particulier, l'ordonnance précise que c'est l'émetteur qui décide de recourir
au DEEP (C. mon. fin., art. L. 211-7). S'agissant des sociétés, il conviendra dès lors que cette possibilité
soit prévue par les statuts (et donc autorisée par la majorité renforcée des actionnaires réunis en
assemblée générale extraordinaire). La Blockchain peut également être utilisée à des fins de garantie
(V. Sûretés financières [Sociétés], Mise à jour). Un décret en Conseil d'État doit venir fixer les conditions
applicables à l'inscription de titres financiers dans un DEEP, ainsi que les modalités du nantissement de
titres financiers également lorsqu'ils sont inscrits dans une Blockchain. L'ordonnance du 8 décembre
er
2017 doit entrer en vigueur à la publication d'un décret d'application et, au plus tard, le 1 juillet 2018.

o
2. Définition. - L'ordonnance du 8 janvier 2009 relative aux instruments financiers (Ord. n 2009-15 du
8 janv. 2009, art. 7) déplace la définition des valeurs mobilières dans le code de commerce (C. com.,
o
art. L. 228-1, al. 2, réd. Ord. n 2009-15 du 8 janv. 2009, art. 7), alors que celle issue de la loi du
23 décembre 1988 était intégrée dans l'art. L. 211-2 du code monétaire et financier. Les valeurs
mobilières sont des titres financiers au sens de l'article L. 211-1 du code monétaire et financier. qui
confèrent des droits identiques par catégorie. Ainsi la fongibilité est une caractéristique essentielle de
l'émission. – Par ailleurs, l'art. L. 211-1, préc., ne définit pas le titre financier mais énumère les titres de
capital, de créance, les parts ou actions d'organismes de placement collectif. Suite de l'ordonnance du
o
8 janvier 2009. La réforme du droit des instruments financiers issue de l'ordonnance n 2009-15 du
8 janvier 2009 est complétée par deux décrets qui modifient la partie réglementaire. Les dispositions
constituent une mise en cohérence avec l'ordonnance. Le premier décret vise à harmoniser des
dispositions du code de commerce et du code monétaire et financier. Le second concerne surtout le
o o
régime du nantissement de compte-titres (Décr. n 2009-295 et n 2009-297, JO 18 mars 2009,
D. 2009. Actu. législative p. 797, obs. Dubertret). Enfin, l'ordonnance du 8 janvier 2009 est ratifiée par
o
la loi de simplification et de clarification du droit et d'allégement des procédures (L. n 2009-526 du
o
12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allégement des procédures, art. 138, 32 ,
JO 13 mai). Une ordonnance du 24 juin 2009 propose l'extension et l'adaptation de ces nouvelles
o
dispositions dans les territoires d'outre mer (Ord. n 2009-797 du 24 juin 2009 relative à l'application à
Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en
o
Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna de l'ordonnance n 2009-15 du 8 janvier 2009
relative aux instruments financiers, JO 26 juin).

3. Conception du droit européen. - La compréhension communautaire de la notion de valeurs mobilières


o
était initialement très proche de celle du droit français. Ainsi la directive n 2001/108/CE du Parlement
o
européen et du Conseil du 21 janvier 2002 (JOCE, n L 41, 13 févr.), modifiant la directive OPCVM
o er
n 85/611/CEE disposait-elle (art. 1 , point 2) que les valeurs mobilières s'entendent, aux fins de la présente
directive, des actions et autres valeurs assimilables à des actions ; des obligations et autres titres de créance
et de toutes autres valeurs négociables donnant le droit d'acquérir de telles valeurs par voie de souscription
ou d'échange, et ce à l'exception des techniques et instruments du marché monétaire. La directive services
o o
d'investissement n 93/22/CE du Conseil du 10 mai 1993 (JOCE, n L 141, 11 juin) était aussi relativement
er
voisine du droit français : selon son article 1 , point 4, les valeurs mobilières sont les actions, les obligations
et les autres titres de créance négociables sur le marché des capitaux, et toutes les autres valeurs
habituellement négociées permettant d'acquérir de telles valeurs mobilières par voie de souscription ou
d'échange ou donnant lieu à un règlement en espèces, à l'exclusion des moyens de paiement. La directive
o
marchés d'instruments financiers n 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004, qui
o
abroge et remplace celle de 1993 en retient (art. 4-1, point 18, JOUE, n L 145, 30 avr.) une conception plus
large, mais moins précise. Ce sont toutes « les catégories de titres négociables sur le marché des capitaux (à
l'exception des instruments de paiement) ». La directive donne les exemples suivants de ces catégories : a)
les actions de sociétés et autres titres équivalents à des actions de sociétés, de sociétés de type partnership
ou d'autres entités ainsi que les certificats représentatifs d'actions ; b) les obligations et les autres titres de
créance, y compris les certificats d'actions concernant de tels titres ; c) toute autre valeur donnant le droit
d'acquérir ou de vendre de telles valeurs ou donnant lieu à un règlement en espèces, fixé par référence à des
valeurs mobilières, à une monnaie, à un taux d'intérêt ou rendement, aux matières premières ou à d'autres
indices ou mesures. Comme on le constate, la notion européenne diffère sensiblement de la conception
française, notamment en ce qu'elle intègre les warrants et les parts de société de personnes auxquels le droit
o
français discute ou refuse la qualification de valeurs mobilières (V. infra, n 12 et 15).

ACTUALISATION
o
1-3. Blockchain - L'ordonnance n 2017-1674 du 8 décembre 2017 (JO 9 déc.) adapte notre législation
pour permettre la représentation et la transmission, au moyen d'un « dispositif d'enregistrement
électronique partagé » (DEEP, en anglais, distributed ledger technology ou DLT), c'est-à-dire de la
technologie Blockchain, de certains titres financiers. Sont visés les titres qui ne sont pas admis aux
opérations d'un dépositaire central ni livrés dans un système de règlement et de livraison d'instruments
financiers, à savoir : les titres de créance négociables, les parts ou actions d'organismes de placement
collectif, enfin les titres de capital émis par les sociétés par actions et les titres de créance autres que les
titres de créance négociables et à condition qu'ils ne soient pas négociés sur une plate-forme de
négociation. Le DEEP peut être défini comme « une technologie informatique innovante qui permet à des
participants d'un réseau de valider par consensus des échanges et des transactions entre plusieurs
participants sans faire intervenir d'organe central. Elle pourrait trouver de nombreuses applications,
notamment pour l'enregistrement des transactions ayant lieu sur les marchés financiers de titres » (DG
Trésor, Consultation publique sur le projet de réformes législative et réglementaire relatif à la
Blockchain, 24 mars 2017). L'ordonnance du 8 décembre 2017 permet de conférer à l'inscription d'une
émission ou d'une cession de titres financiers dans une Blockchain les mêmes effets que l'inscription en
compte de titres financiers. Ainsi est-il énoncé : « L'inscription dans un dispositif d'enregistrement
électronique partagé tient lieu d'inscription en compte » (C. mon. fin., art. L. 211-3, al. 2). L'utilisation
de la Blockchain ne crée pas d'obligation nouvelle, ni n'allège les garanties existantes relatives à la
représentation et à la transmission des titres concernés. Les dispositions au sein du code monétaire et
financier et du code de commerce relatives aux titres financiers sont cependant ajustées pour permettre
le recours à ce dispositif. En particulier, l'ordonnance précise que c'est l'émetteur qui décide de recourir
au DEEP (C. mon. fin., art. L. 211-7). S'agissant des sociétés, il conviendra dès lors que cette possibilité
soit prévue par les statuts (et donc autorisée par la majorité renforcée des actionnaires réunis en
assemblée générale extraordinaire). La Blockchain peut également être utilisée à des fins de garantie
(V. Sûretés financières [Sociétés], Mise à jour). Un décret en Conseil d'État doit venir fixer les conditions
applicables à l'inscription de titres financiers dans un DEEP, ainsi que les modalités du nantissement de
titres financiers également lorsqu'ils sont inscrits dans une Blockchain. L'ordonnance du 8 décembre
er
2017 doit entrer en vigueur à la publication d'un décret d'application et, au plus tard, le 1 juillet 2018.

4. Le concept de valeur mobilière est-il obsolète ? - Les valeurs mobilières appartiennent à la catégorie plus
o
vaste des instruments financiers, née de la directive services d'investissement n 93/22/CEE du 10 mai 1993,
codifiée sous l'article L. 211-1 du code monétaire et financier, catégorie qui se subdiviserait en deux sous-
catégories, les titres financiers et les contrats financiers (V. M. FAVERO, Pour une réforme ambitieuse des
instruments financiers, Actes pratiques, janv.-févr. 2004, p. 3 ; Livre blanc de Paris Europlace ;
o
Th. BONNEAU et F. DRUMMOND, op. cit., n 83 et s.). La catégorie des valeurs mobilières s'est-elle dissoute
dans celle des instruments financiers ? A-t-elle encore un intérêt en elle-même ? La réponse est clairement
affirmative : la réforme du 24 juin 2004 ne se sert pas de la notion d'instrument financier et consacre tout au
contraire le maintien de la notion de valeur mobilière. De sérieuses et importantes raisons l'expliquent, tant
théoriques que pratiques. Tout d'abord, la notion de valeur mobilière se fonde sur une véritable définition,
synthétique, conceptuelle, centrée sur des caractéristiques communes. L'approche des instruments financiers
est au contraire purement descriptive, énumérative. Ainsi le I de l'article L. 211-1 du code monétaire et
financier regroupe, de façon contingente, d'authentiques valeurs mobilières, mais aussi d'autres titres qui ne
se rangent pas, ou mal, dans cette catégorie comme les parts de SCPI - qui ne sont ni négociables ni
susceptibles d'être cotées en bourse - et les titres de créances négociables - qui ne sont pas suffisamment
fongibles ni admissibles aux négociations. Il est permis à cet égard de penser que la seule mention figurant à
l'article L. 211-1 : « I. Les instruments financiers comprennent :… » n'assure pas une sécurité juridique
suffisante aux émetteurs et à leurs conseils. Lorsqu'il faut qualifier un produit financier nouvellement apparu
sur le marché, il est plus utile de raisonner par référence à une définition synthétique et à des
caractéristiques stables et bien connues, telles que la nature des droits conférés par les titres, leur
négociabilité, leur fongibilité, etc., que par analogie avec des catégories composites de « produits » nommés,
mais sous des termes vagues et mal différenciés (V. pour un exemple, C. mon. fin., art. L. 211-1, II : « Les
instruments financiers à terme sont :… 6. Tous… instruments de marché à terme »… ; V. F. DRUMMOND, Le
contrat comme instrument financier, Mélanges F. Terré, 1999, PUF-Dalloz-éd. du Juris-Classeur, p. 661).

ACTUALISATION
DURBERTRET et MANGENET, Réforme du droit des titres : commentaire de l'ordonnance du
8 janv. 2009, D. 2009. Chron. 448 . – PACLOT, La réforme des instruments financiers par l'ordonnance
du 8 janv. 2009, Bull. Joly Bourse 2009. 59

4. Instruments financiers. Titres financiers. - La réforme et la simplification du droit des


o
instruments financiers avait été annoncée par l'article 152 de la loi n 2008-776, dite LME, du 4 août
o
2008 qui a habilité le gouvernement à prendre l'ordonnance n 2009-15 du 8 janv. 2009 relative aux
instruments financiers (JO 9 janv.). En la forme, elle procède à une réorganisation des articles L. 211-1 à
L. 211-41 du code monétaire et financier. Si elle ne donne pas de définition des instruments financiers,
elle introduit la notion de titres financiers qui permet de regrouper au sein d'une même catégorie
juridique des instruments qui présentent des caractéristiques identiques (dématérialisation, inscription
en compte) et qui sont, pour cette raison, soumis à des règles communes (tenue de compte, droits du
titulaire du compte, négociabilité… – V. Rapport au président de la République, JO 9 janv.). – Les titres
financiers sont : « 1. Les titres de capital émis par les sociétés par actions ; « 2. Les titres de créance, à
l'exclusion des effets de commerce et des bons de caisse ; « 3. Les parts ou actions d'organismes de
placement collectif » (art. L. 211-1, II). Les titres financiers, qui comprennent les valeurs mobilières au
sens l'article L. 228-1, alinéa 2, du C. com., ne peuvent être émis que par l'État, une personne morale,
un fonds commun de placement, un fonds de placement immobilier ou un fonds commun de titrisation
(C. mon. fin., art. L. 211-2).

5. D'autres raisons expliquent le maintien de la catégorie des valeurs mobilières. Sa disparition rendrait
caduques de nombreuses réglementations existantes car la notion de valeur mobilière permet de cerner le
o
domaine de la dématérialisation prévue par la loi n 81-1160 du 30 décembre 1981 (C. mon. fin., art. 94-II,
devenu l'art. L. 211-4) et de définir différentes incriminations pénales, donc d'interprétation stricte, qui
deviendraient lettre morte en cas d'abandon de cette qualification. Ainsi en est-il de l'interdiction du
colportage de valeurs mobilières (C. mon. fin., art. L. 342-1) ou des infractions à la réglementation du
o
démarchage sur ces valeurs (C. mon. fin., art. L. 342-2). En outre, la loi n 91-650 du 9 juillet 1991 portant
o
réforme des procédures civiles d'exécution (art. 79 et Décr. n 92-755 du 31 juill. 1992, art. 178 et s.) a
prévu des règles spécifiques pour la saisie de valeurs mobilières (V. C. PEROT-REBOUL, L'exécution forcée
des instruments financiers, D. 2000, chron. 353 ). Ainsi encore, l'article L. 232-7 du code de commerce
impose aux sociétés cotées de faire figurer dans l'annexe aux comptes annuels l'inventaire des valeurs
mobilières détenues en portefeuille à la clôture de l'exercice. Les articles 457 et 459 du code civil envisagent
les conditions auxquelles un mineur peut céder des valeurs mobilières. Enfin, la notion de valeur mobilière
sert, à l'occasion, de critère pour l'application d'une dispense légale ; par exemple, l'article L. 421-7 du code
monétaire et financier dispense de l'obligation d'intermédiation certaines cessions portant sur des valeurs
mobilières, ce qui exclut du bénéfice de la dérogation les autres instruments financiers.

6. Plan de l'étude. - L'examen de la nature juridique des valeurs mobilières permet de repérer des
o
principes généraux, un droit commun, auxquels ces valeurs sont soumises (V. infra, n 7 et s.). Leurs
particularités (actions, obligations, autres valeurs) justifient l'étude d'un droit spécial des valeurs mobilières
o
(V. infra, n 62 et s.).

er
Chapitre 1 - Droit commun des valeurs mobilières
o
7. L'étude précisera les caractères fondamentaux des valeurs mobilières (V. infra, n 8 et s.) et la nature des
o
droits - de créance et/ou de propriété - qu'elles confèrent à leurs titulaires (V. infra, n 27 et s.). Elle portera
enfin sur certaines conséquences attachées à la forme - au porteur ou nominative - que les valeurs
o
mobilières peuvent revêtir (V. infra, n 41 et s.).

re
Section 1 - Caractères fondamentaux des valeurs mobilières

8. Les valeurs mobilières présentent les caractéristiques suivantes : ce sont des titres émis par une personne
morale ; ces titres sont fongibles ; ils sont aussi négociables ; leur mode de transmission est l'inscription en
compte ou la tradition ; les valeurs mobilières constatent un droit d'associé ou un droit de créance envers
leur émetteur ; enfin, elles sont susceptibles d'une cotation en bourse. Il faut reprendre chacun de ces
éléments.
er
Art. 1 - Les valeurs mobilières sont des titres émis par les personnes morales

9. L'émetteur doit être constitué sous la forme d'une entité disposant de la personnalité juridique. Par
exception, l'article L. 211-2, in fine, du code monétaire et financier admet toutefois que des fonds sans
personnalité juridique peuvent émettre des valeurs mobilières.

10. Titres émis par des entités personnifiées. - La personnalité juridique de l'émetteur, qu'il soit de droit
privé ou de droit public, est un critère de qualification des valeurs mobilières. Faut-il encore que l'émetteur
soit une personne morale : « Seule la personnalité morale autorise l'émission de valeurs mobilières » (F.-
G. TRÉBULLE, L'émission de valeurs mobilières, préf. Y. Guyon, 2002, coll. « Recherches juridiques »,
o
Economica, p. 183, n 218). Pour classique qu'elle soit, la raison de la mise à l'écart des personnes physiques
ne s'impose pas avec évidence. Pourquoi, par exemple, alors que l'ordonnance du 24 juin 2004 banalise
l'emprunt obligataire et le ravale, dans une certaine mesure, au rang de l'emprunt ordinaire (D. OHL, Aspects
de la réforme du droit des valeurs mobilières, Bull. Joly Bourse 2004.689, Bull. Joly, Spécial Ordonnance
o
valeurs mobilières du 24 juin 2004, hors série, févr. 2005, p. 15, spéc. n 57) une entreprise individuelle, par
exemple, qui peut emprunter de l'argent à une banque, ne pourrait-elle pas émettre des obligations pour se
procurer un financement ? Si les émetteurs sont pour l'essentiel des sociétés par actions, la faculté d'émettre
des obligations nominatives a été reconnue à d'autres personnes morales. Tel fut le cas de certaines
associations d'abord (C. mon. et fin., art. L. 213-8 ; Ph. REIGNÉ, Les valeurs mobilières émises par les
o
associations, Rev. sociétés 1989.1), puis avec l'ordonnance n 2004-274 du 25 mars 2004, de SARL de taille
o
importante, qui sont tenues de désigner un commissaire aux comptes (V. infra, n 134).

11. Dérogation en faveur des fonds communs de placement et de créances. - Le critère de la


personnalité juridique n'est pas rempli pour les fonds communs de placement (C. mon. fin., art. L. 214-20
et s.) et les fonds communs de créances (C. mon. fin., art. L. 214-43 et s.), dont les parts « représentent un
droit de propriété sur les actifs » (Th. BONNEAU, Les fonds communs de placement, les fonds communs de
créances, et le droit civil, RTD civ. 1991.1 ). Ces parts sont des valeurs mobilières par détermination de la
loi (C. mon. fin., art. L. 211-2, in fine).

12. Condition d'un versement de fonds à l'émetteur. - Selon une position doctrinale, la qualification de
valeurs mobilières doit être normalement réservée aux titres émis en contrepartie d'un versement de fonds à
la personne morale ou au fonds (B. OPPETIT, La notion de valeur mobilière, in L'Europe et le droit des
o
valeurs mobilières, Banque et droit 1991, n hors série, p. 4). Si l'on admet cette exigence d'un financement
au profit de l'émetteur, certains titres ne pourront pas être qualifiés de valeurs mobilières. Il en est ainsi des
instruments de couverture qui n'ont pas pour objet de fournir un financement aux entreprises (par exemple
les warrants financiers et les instruments financiers à terme énumérés à l'art. L. 211-1, II, c. mon. fin., créés
par l'entreprise de marché Euronext Paris SA) et des certificats de valeur garantie, même s'ils réunissent
indéniablement certaines caractéristiques des valeurs mobilières car ils sont négociables et confèrent à leurs
titulaires des prérogatives identiques (G. DECOCQ, Une nouvelle forme de valeurs mobilières : les certificats
de valeur garantie, JCP, éd. E, 1997. I. 650 ; B. LE BARS, Dict. Joly Bourse et produits financiers,
o
V Certificat de valeur garantie, 1999 ; F.-G. TRÉBULLE, La nature des certificats de valeur garantie, JCP, éd.
E, 1999.114).

Art. 2 - Les valeurs mobilières sont fongibles


13. Absence de mention expresse de ce critère dans la définition légale. - Toutes les valeurs
mobilières de même nature et de même catégorie doivent être indifférenciées et entraîner les mêmes
prérogatives, sans considération de la personne de leurs titulaires. Élément essentiel pour la qualification de
valeur mobilière, la fongibilité n'est pourtant que suggérée à l'article L. 211-2 du code monétaire et financier,
à travers l'affirmation que les valeurs mobilières doivent ouvrir des droits identiques au sein d'une même
catégorie. Des textes particuliers reprennent la même idée. Ainsi ne peuvent cohabiter au sein de la même
masse que les titulaires d'obligations ouvrant les mêmes droits à leurs porteurs (C. com., art. L. 228-46,
er
al. 2, et art. L. 228-103, al. 1 in fine). De leur fongibilité découle que les valeurs mobilières sont
nécessairement plurales et substituables les unes aux autres (V. A. LAUDE, La fongibilité. La diversité des
critères de la fongibilité. L'unité des effets de la fongibilité, RTD com. 1995.307 et s. ).
er
§1 - Les valeurs mobilières sont nécessairement plurales
14. Elles doivent être émises en nombre et en même temps. Si, du côté de la société, l'émission a
nécessairement un caractère global et unitaire, même si elle est fractionnée, du côté des souscripteurs, elle
s'exprime en une pluralité de titres de même nature juridique, de même montant nominal. Les valeurs
mobilières sont émises en série dont chaque unité représente une fraction. Ainsi, une personne n'est pas
o
titulaire par exemple des actions n 21 à 30. Elle est titulaire, dans la catégorie considérée, de dix unités,
sans qu'il soit possible de les identifier les unes par rapport aux autres. L'émission d'une valeur mobilière
isolée est inconcevable puisqu'elle ne saurait être confondue avec d'autres. Mais l'appartenance des titres à
une même émission ou à une même catégorie n'est pas toujours une condition absolue de la fongibilité.
D'abord la société émettrice ou le contrat d'émission peut expressément prévoir la « fongibilité » de valeurs
nouvelles avec d'autres antérieurement émises. Ensuite, des valeurs mobilières provenant d'émissions
différentes ou de catégories différentes au sein d'une même émission peuvent être fongibles, tandis que des
valeurs mobilières faisant partie d'une même émission ou catégorie peuvent ne pas l'être. Ainsi, des valeurs
mobilières peuvent être fongibles alors même qu'elles sont issues d'émissions différentes. Les actions émises
au moment de la constitution de la société puis lors d'augmentations de capital successives sont fongibles
entre elles. C'est d'ailleurs pour que cette identité de droits conférés aux actionnaires nouveaux ne nuise pas
aux anciens qu'un droit préférentiel de souscription est reconnu à ces derniers en proportion du montant de
leurs actions (C. com., art. L. 225-132, art. L. 225-135 à L. 225-140, art. L. 228-91, al. 2). En outre, les
contrats d'émission d'obligations comportent parfois des clauses d'assimilation aux obligations provenant
d'autres émissions. C'est le cas des obligations assimilables du Trésor (OAT), dont la caractéristique est que
chaque tranche d'emprunt nouvelle est assimilée aux tranches précédentes ; tous les titres composant la
tranche nouvelle sont identiques (date d'échéance, taux d'intérêt, etc.) à ceux des tranches précédentes. En
sens inverse, des valeurs mobilières peuvent ne pas être fongibles alors qu'elles sont issues d'une même
o o
émission. Par exemple, une action ordinaire (V. infra, n 65 et s.) et une action de préférence (V. infra, n 95
et s.) peuvent être issues d'une même émission. Pourtant ces actions ne sont pas fongibles car elles
confèrent chacune des droits différents. Autre exemple : des valeurs mobilières issues d'une même émission
peuvent ne pas rester fongibles, soit à l'initiative de l'émetteur, soit à celle du titulaire. Ainsi, les valeurs
mobilières composées prévoyant l'échange, le remboursement ou la conversion, même si elles sont issues
d'une même émission, ne sont pas fongibles entre elles, puisque les titulaires qui exerceront l'option
disposeront de droits différents. Parmi les souscripteurs, certains auront les droits conférés par le titre
originaire, d'autres ceux conférés par le titre second. Les droits seront différents alors que toutes les valeurs
sont issues de la même émission.

§ 2 - La fongibilité suppose que les valeurs mobilières soient totalement substituables les unes
aux autres dans la même catégorie
15. Les droits qu'elles confèrent doivent donc être strictement les mêmes. Cette exigence commande
d'exclure de la catégorie des valeurs mobilières des effets de commerce, qui représentent des créances
issues d'opérations commerciales de vente ou de location de biens et services. Elle conduit aussi à écarter les
titres de créances négociables (TCN) visés à l'article L. 213-1 du code monétaire et financier, qui sont créés
au gré des besoins de trésorerie de leurs émetteurs. L'idée d'une émission qui implique la pluralité de titres
et la dimension collective - marques des valeurs mobilières - est absente. Bien individualisés, les effets de
commerce, bons de caisse, certificats de dépôt des banques et billets de trésorerie des entreprises ont des
caractéristiques propres qui empêchent leur confusion : leur montant, leur échéance et leur taux d'intérêt les
singularisent. Ils ne sont pas en principe interchangeables et susceptibles d'être pris l'un pour l'autre
o
(M. VASSEUR et X. MARIN, Les effets de commerce, p. 5, n 5). Faute de fongibilité, le marché réglementé
sur lequel les TCN sont traités, qui n'est pas un marché boursier mais un marché monétaire de
professionnels, n'assure aucune liquidité. La solution ne varie pas en présence d'une chaîne de traites ou de
TCN émis en série. Une émission groupée de quelques TCN dans le cadre d'un programme ne fait pas de ces
o
titres des obligations (en ce sens Brochure ANSA 2005, n 196 : La réforme du régime des valeurs
mobilières, difficultés et solutions, p. 134). La qualification de valeurs mobilières ne leur convient pas (en ce
sens : Rép. min. M. REVEAU, JOAN Q 27 oct. 1986, p. 3942, et M. COUVEINHES, JOAN 9 mai 1988,
o
p. 2002 ; F.-X. LUCAS, Valeurs mobilières [Notion], Joly sociétés, Traité, série A, spéc. n 29). Avec celui de
la fongibilité, le critère de la négociabilité est habituellement présenté comme le plus distinctif des valeurs
mobilières (P. DIDIER, Les biens négociables, Mélanges Y. Guyon, 2003, Dalloz, p. 327).

Art. 3 - Les valeurs mobilières sont négociables

16. Définition. - La négociabilité est voisine de l'idée de mobilité. Elle signifie que les valeurs mobilières ont
cette aptitude à circuler rapidement, sans avoir à respecter le formalisme de la cession de créance ordinaire
de l'article 1690 du code civil : signification du transport au débiteur cédé, l'émetteur, ou son acceptation
o
dans un acte authentique (G. CORNU [sous la direction de], Vocabulaire juridique, V Négociabilité, 2005,
Association Henri Capitant, PUF ; F. NIZARD, Les titres négociables, Revue Banque éd.-Economica, 2003 ;
H. CAUSSE, Les titres négociables. Contribution à une théorie du contrat négociable, thèse, Montpellier,
1991 ; Ch. LASSALAS, L'inscription en compte des valeurs : la notion de propriété scripturale, thèse, PU
o
Clermont-Ferrand, 1997, Litec, n 768 et 771 ; S. MOISDON-CHATAIGNER, La propriété des valeurs
o
mobilières, thèse dactyl., Paris IX, 1999, n 322 ; A.-L. ARCHAMBAULT, La nature juridique des valeurs
o
mobilières, thèse dactyl., Paris I, 1999, n 222 et s. ; Ph. GOUTAY, La notion de valeur mobilière D. 1999,
o
chron. 226 . ; F.-X. LUCAS, Valeurs mobilières [Notion], Joly sociétés, Traité, série A, spéc. n 24 ; Retour
o
sur la notion de valeur mobilière, Bull. Joly 2000.765, n 24 ; D.R. MARTIN, Du titre et de la négociabilité [À
propos des pseudo-titres de créance négociables], D. 1993, chron. 20 ; Th. BONNEAU et F. DRUMMOND,
o o
op. cit., n 31 ; F.-G. TRÉBULLE, op. cit., n 602). Le critère de la négociabilité exclut de la catégorie des
valeurs mobilières les reconnaissances de dettes, les parts de société en nom collectif ou en commandite
simple (C. com., art. L. 221-13) ou de sociétés civiles, les parts sociales de SARL (C. com., art. L. 223-12) -
mais non les obligations de SARL pour celles de ces sociétés que l'ordonnance du 25 mars 2004 (préc.)
o
autorise à émettre des obligations (V. infra, n 134). La négociabilité conditionne la rapidité des échanges
dont les valeurs mobilières sont l'objet, rapidité de circulation qui permet elle-même d'attirer les capitaux
vers les entreprises. Une valeur mobilière n'est négociable qu'après l'immatriculation de la société ou, en
cours de vie sociale, au moment de la réalisation définitive de l'émission des valeurs mobilières. La
négociabilité ne dispense pas de toute formalité. En effet, si les formalités de la cession de créance ordinaire
de l'article 1690 du code civil sont sans application, d'autres règles de transmission, propres au droit
commercial, doivent être respectées. Ainsi la transmission de valeurs mobilières exige la délivrance
d'instructions du candidat cédant à l'émetteur ou à un intermédiaire teneur de compte et la réalisation
d'opérations de virement du compte de l'ancien titulaire à celui du nouveau. En outre, la cession de titres
o
cotés doit se conformer aux règles de marché (V. infra, n 57).

ACTUALISATION
16. Avant l'immatriculation les actions ne sont pas négociables mais cessibles. - L'article
L. 228-10 du code de commerce ne prohibant que la négociation des actions avant l'immatriculation de
la société, ces actions pouvaient, au cours de cette même période, faire l'objet d'une cession selon les
o
modes du droit civil (Com. 26 févr. 2008, n 06-17.981 , D. 2008. 850 ). – Les titres financiers sont
négociables. La négociabilité est une caractéristique essentielle. Ils se transmettent par virement de
compte à compte à deux exceptions près : les parts de sociétés civiles de placement immobilier (SCPI)
et celles de sociétés d'épargne forestière (SEF) (C. mon. fin., art. L. 211-14 et L. 211-15).

17. Négociabilité et cessibilité. - La négociabilité se distingue de la cessibilité, autre condition nécessaire


de la qualification de valeur mobilière. On ne conçoit pas une valeur mobilière inaliénable ou objet d'« une
atteinte sévère portée à la libre cessibilité » (Ph. REIGNÉ et Th. DELORME, Réflexions sur la distinction de
l'associé et de l'actionnaire, D. 2002, chron. 1330, spéc. 14 ). Ainsi les actions frappées d'inaliénabilité par
la loi (exemple : actions des dirigeants et des « initiés », stock-options) ou par une clause des statuts
(exemple : actions stipulées inaliénables d'une société par actions simplifiée) pourraient ne pas relever de la
catégorie des valeurs mobilières. Mais si les valeurs mobilières sont essentiellement cessibles et aptes à
circuler, leur circulation doit s'effectuer dans des conditions assurant la plus grande sécurité aux
souscripteurs et aux acquéreurs, ce qui suppose d'employer exclusivement certains procédés de
transmission.

Art. 4 - Les valeurs mobilières sont nécessairement comptabilisées

18. Loi de dématérialisation du 30 décembre 1981. - Aujourd'hui, en principe, toutes les valeurs
o
mobilières émises en France prennent, depuis la loi n 81-1160 du 30 décembre 1981, la forme numérique
d'une inscription en compte au nom de leur propriétaire (C. mon. fin., art. L. 211-4 ; C. com., art. L. 228-1).
Il existe quelques rares exceptions qui s'expliquent par l'impossibilité juridique ou pratique d'opérer la
dématérialisation des titres (essentiellement les titres étrangers et les titres non « dématérialisables »,
comme les obligations amortissables par tirage au sort). Des certificats représentatifs d'actions ou
d'obligations peuvent également être émis dans la situation singulière suivante. Sur certaines places
étrangères, l'usage des titres papier a encore une certaine importance. Cette circonstance pouvant entraver
la circulation des valeurs françaises, spécialement des valeurs françaises cotées à l'étranger ou qui y font
o
l'objet de mouvements importants, le décret n 83-359 du 2 mai 1983 a permis à la SICOVAM (devenue
Euroclear France) de créer des certificats représentatifs de valeurs mobilières exclusivement destinés à être
utilisés hors de France (art. 8-1 et 8.2 des règles de fonctionnement d'Euroclear France). Ces certificats sont
des titres au porteur, identifiés par des numéros, détachés d'un registre à souche et munis d'une formule de
coupons. Leur mise en circulation s'effectue exclusivement à la demande et par l'entremise d'un adhérent
o
d'Euroclear France (V. J. MESTRE et D. VELARDOCCHIO, Lamy Sociétés commerciales, 2005, n 4098). Mais,
dans la grande généralité des cas, les valeurs mobilières n'ont de concret que leur mention sur des relevés
de compte ou avis d'opéré. Seule l'inscription est importante, laquelle peut faire suite à l'émission de valeurs
mobilières nouvellement créées ou à un transfert de propriété du titre par virement du compte du titulaire au
compte de son ayant droit. L'inscription assure plusieurs fonctions.

ACTUALISATION
18 s. Inscription en compte. - Projet de directive sur les titres intermédiés. Examen du document de
er o
travail de la Commission du 1 févr. 2010, ANSA, févr. 2010, Com. n 10-004.

19. Fonctions de l'inscription. - L'inscription permet tout d'abord l'affectation du titre à une personne et la
reconnaissance des droits que le titre confère à cette personne. Ce sont ces deux significations que
e
l'article 312-6, alinéa 2 (2 phrase), du règlement général de l'AMF réunit dans la formule suivante :
« Inscrire en compte les instruments financiers au nom de leur titulaire, [c'est] reconnaître au titulaire ses
droits sur lesdits instruments financiers ». Ensuite, le transfert de propriété inter partes « résulte » de
l'inscription (C. com., art. L. 228-1, dern. al.). L'inscription ou plus exactement l'instruction du vendeur de
virer les valeurs cédées au compte de l'acquéreur (qui se traduit par un « ordre de mouvement » pour les
valeurs nominatives) peut s'analyser comme l'exécution (ou la demande d'exécution) de l'obligation de
délivrance des titres à la charge du cédant (A. REYGROBELLET, Le droit de propriété du titulaire
o
d'instruments financiers dématérialisés, RTD com. 1999.305, n 25 ). Elle « réalise le transport en la
o
puissance et possession du nouveau propriétaire du titre » (F.-G. TRÉBULLE, op. cit., n 576, p. 407 et
o
n 651, p. 457). Enfin, la personne morale émettrice étant étrangère à l'acte ou au fait qui entraîne le
transfert de propriété, celui-ci doit lui être rendu opposable pour qu'elle reconnaisse au cessionnaire le
bénéfice des prérogatives attachées à son titre ; c'est à nouveau l'instruction de virement des titres au
compte de l'acquéreur qui fait office de signification au débiteur cédé au sens de l'article 1690 du code civil.
C'est à compter de l'inscription à son compte que le cessionnaire peut prétendre exercer à l'encontre de
l'émetteur les droits attachés à la valeur acquise, percevoir des dividendes ou des intérêts selon qu'il s'agit
d'actions ou d'obligations, être tenu informé des émissions et souscriptions, participer aux assemblées
générales et y voter. L'opposabilité dépasse les relations entre l'émetteur et le porteur du titre et c'est ainsi,
à dater de l'inscription de la valeur au compte de l'acquéreur, que les créanciers du cédant ne pourront plus
la saisir.

ACTUALISATION
19. Inscription en compte : distinction entre le titre et le droit. - L'inscription en compte des
valeurs mobilières au nom de leur titulaire, n'ayant pas pour fonction d'informer les tiers des
imperfections susceptibles d'affecter les droits de celui-ci, ne peut être assortie d'aucune mention ayant
o
un tel objet (Com. 29 janv. 2008, n 06-19.624 , D. 2008. AJ 481, obs. Lienhard ; Rev. sociétés
2008. 589, note Dubertret ; Dr. sociétés 2008. Comm. 79, obs. Hovasse).
20. Procédés exclus. - La loi ne prévoyant que l'inscription en compte et la tradition, elle écarte ainsi
implicitement le procédé de l'endossement, par lequel le cédant inscrit au dos du titre l'ordre qu'il donne au
débiteur de payer le cessionnaire. Les titres à ordre qui se transmettent par endossement ne peuvent donc
être qualifiés de valeurs mobilières. Il en découle que les effets de commerce sont exclus de la catégorie des
valeurs mobilières. La tradition, bien qu'admise, est un procédé peu utilisé. Elle désigne la remise de la main
à la main d'un titre existant matériellement sous la forme d'une formule imprimée individualisée par un
numéro. À l'égard de ce titre, désigné « au porteur vif » ou titre « vif », l'idée a longtemps prévalu que
l'imprimé incorporait le droit. Cette « créance-papier » était regardée comme un bien corporel, d'où la faculté
de la transmettre par tradition (pour une critique de cette conception, V. déjà THALLER, De la nature
juridique du titre de crédit, Contribution à une étude générale sur le droit des obligations, Annales de droit
o o
commercial, 1906, n 47 ; V. infra, n 52). Actuellement, le transfert de propriété par tradition ne s'applique
plus que dans un nombre limité de cas : les rentes perpétuelles sur l'État émises avant le 3 mai 1986, les
obligations créées antérieurement à cette date et amortissables par tirage au sort de numéros qui sont par
construction non « dématérialisables » (C. mon. fin., art. L. 211-4, al. 3) et les valeurs étrangères.

Art. 5 - Les valeurs mobilières constatent un droit d'associé ou un droit de créance envers
l'émetteur

21. Distinction des titres de capital et des titres de créance. - La définition des valeurs mobilières
repose sur la distinction des titres de capital et des titres de créance. La seule terminologie ne rend pas
compte de cette distinction car les unes et les autres donnent naissance à des créances. La société émettrice
doit rembourser et rémunérer les apports en capital et les emprunts. Cette réalité juridique est correctement
transcrite en comptabilité : le capital et l'emprunt correspondent l'un et l'autre à du passif, le premier
figurant tout en haut de la colonne « passif » du bilan alors que le second y est mentionné plus bas. Il existe
cependant une différence essentielle qui réside dans le rang et les modalités de ce remboursement. Les
obligations sont remboursables selon les termes du contrat d'émission, tandis que les actions ne le sont que
dans les cas d'amortissement ou de réduction du capital non motivée par des pertes, ou bien lors de la
dissolution anticipée ou de la survenance du terme prévu aux statuts, mais seulement si les opérations de
liquidation permettent de dégager un actif net suffisant pour rembourser les apports. La distinction entre
titres de capital et titres de créance ne peut en réalité se concevoir que si l'on considère que les créances
o
incluses (« représentées » selon l'art. L. 111-1, I, 2 , du C. mon. fin) dans les titres de créance sont
principalement, sinon exclusivement, des créances monétaires. Cette présentation permet a contrario de
faire apparaître ce qui fait la spécificité des titres de capital : si ces derniers confèrent à leurs titulaires des
droits identiques au remboursement et à la rémunération des apports, ces droits sont marqués par la
précarité ; les actionnaires n'ont aucune assurance d'être rémunérés et à plus forte raison remboursés de
leurs apports ; leur exposition au risque est plus grande que celle de tout autre créancier. Et c'est
précisément pour rendre supportable cette précarité que les actionnaires reçoivent d'autres droits, non
monétaires ceux-là, comme celui d'être informé de la marche des affaires et celui de participer aux
délibérations et au vote en assemblée générale.

ACTUALISATION
21. Titres de capital. Titres de créance. - L'ordonnance du 8 janv. 2009 définit les titres de capital :
« Les titres de capital émis par les sociétés par actions comprennent les actions et les autres titres
donnant ou pouvant donner accès au capital ou aux droits de vote » (C. mon. fin., nouv. art. L. 212-1,
o er o
A, réd. Ord. n 2009-15 du 8 janv. 2009, art. 1 , 2 ). Constitue un titre de capital un bon de
souscription d'action, une obligation convertible en action, un CDV, etc. – L'ordonnance définit les titres
de créance : les titres de créance représentent chacun un droit de créance sur la personne morale ou le
o
fonds commun de titrisation qui les émet (C. mon. fin., nouv. art. L. 213-1 A, réd. Ord. n 2009-15 du
er o
8 janv. 2009, art. 1 , 3 ). Font partie des titres de créance les obligations simples et composées, telle
une OBSO, par exemple. On notera une autre réforme importante. Nonobstant toute disposition
législative contraire, l'indexation des titres de créance et des contrats financiers mentionnés
respectivement au 2 du II et au III de l'article L. 211-1 est libre (C. mon. fin., nouv. art. L. 112-3-1, réd.
Ord., art. 7).

22. Les seuls titres de capital qu'une société par actions puisse émettre aujourd'hui, depuis l'ordonnance du
24 juin 2004 (préc.), sont les actions ordinaires et les actions de préférence. Ils ne comprennent pas les
valeurs mobilières donnant accès à terme au capital telles que les obligations avec bons de souscription
d'actions, obligations convertibles, remboursables ou échangeables en actions, les bons de souscription
d'actions, etc. En effet, ces valeurs sont érigées en catégorie distincte et obéissent à un régime propre
depuis l'ordonnance du 24 juin 2004. Quant aux titres de créance, ils comprennent les obligations et autres
valeurs mobilières ouvrant droit à des créances monétaires à l'encontre de l'émetteur, ainsi que les titres
participatifs et les titres subordonnés.

23. Titulaires successifs. - Les personnes qui se succèdent dans la propriété des titres de capital ou des
titres de créance possèdent l'ensemble des prérogatives qui sont attachées aux valeurs mobilières, sans qu'il
soit besoin de conventions particulières. Mais comment la société peut-elle être juridiquement liée à des
personnes titulaires de valeurs mobilières émises par elle mais avec lesquelles elle n'a aucun lien contractuel,
ces personnes ayant acquis lesdites valeurs mobilières non auprès d'elle mais auprès des souscripteurs
d'origine ? Deux explications sont envisageables : l'une est fondée sur la stipulation pour autrui, l'autre sur la
cession de contrat.

24. Stipulation pour autrui. - Dans la première explication, un contrat de souscription est conclu entre les
fondateurs agissant pour le compte de la société en formation (titres de capital) ou entre la société, une fois
immatriculée, agissant par ses organes compétents et le souscripteur (toutes valeurs mobilières). Ce contrat
engagerait l'émettrice non seulement envers le souscripteur lui-même, mais aussi envers le cessionnaire
futur de celui-ci en vertu d'une stipulation implicite pour le cessionnaire du titre (C. civ., art. 1121). La
société émettrice serait qualifiée de promettant, le souscripteur de stipulant et le cessionnaire futur du titre
o
serait le tiers bénéficiaire (F. NIZARD, op. cit., n 262 et s., et 295). Le tiers est un parfait inconnu dont le
souscripteur ne peut espérer aucun avantage en retour. Mais la volonté du souscripteur de stipuler pour le
compte de ce tiers pourrait néanmoins être présumée car il a intérêt à faciliter le reclassement de son titre.
L'avantage de cette théorie est qu'elle reconnaît au tiers cessionnaire un droit direct contre la société
émettrice, qui ne transite pas par le patrimoine du souscripteur. Ainsi la société émettrice ne saurait opposer
au tiers les exceptions personnelles qu'elle possède contre le souscripteur. Cependant, on peut douter du
fondement de la stipulation pour autrui. Certes, on ne saurait l'écarter au simple constat que le titre est
grevé de charges car la stipulation pour autrui n'exclut pas que le tiers bénéficiaire soit tenu de certaines
re o
obligations (Cass. 1 civ. 8 déc. 1987, Bull. civ. I, n 343). Mais la stipulation pour autrui ne saurait
expliquer que chacun des cessionnaires dans la chaîne des diverses mutations dont le titre peut faire l'objet,
puisse transmettre à son tour le bénéfice d'une telle stipulation. Il faut alors évoquer la deuxième explication,
qui est fondée sur la notion de cession de contrat.

25. Cession de contrat. - Dans cette deuxième conception, la propriété d'une valeur mobilière « fait »
l'associé ou le créancier de la société. Le titre est un véhicule apte à transmettre à ses porteurs successifs les
droits que confèrent les statuts, le contrat d'émission et les décisions sociales aux porteurs de titres de
même nature et de même catégorie, dans la mesure exacte de ces droits. Le transfert du titre confère au
cessionnaire la qualité de partie substituée au contrat de société ou au contrat d'émission. Le transfert
e
entraîne « cession de la position contractuelle » (J. CARBONNIER, Droit civil, t. 4, Les obligations, 22 éd.,
o
2000, PUF, n 325, p. 575 ; H. CAUSSE, Les titres négociables, 1993, Litec ; J.M. MOUSSERON, Technique
e o
contractuelle, 2 éd., 1999, Francis Lefebvre, n 502) du titulaire vis-à-vis de la société, ainsi que sa
soumission aux statuts ou au contrat d'émission. Le transfert d'une action « ne se ramène pas à une cession
de créance, mais réalise une substitution de personne dans le bénéfice de la qualité de partie au contrat de
société » (Ph. MALAURIE, La cession de contrat, Cours de doctorat, Paris II, 1975-1976, Les Cours du Droit,
o
p. 20 et p. 188, cité par F.-G. TRÉBULLE, op. cit., n 632, qui observe que « la cession de droits sociaux
entraîne cession de contrat dans la mesure précisément où elle confère au cessionnaire la qualité de partie
au contrat de société » ; adde : R. LIBCHABER, Pour un renouvellement de l'analyse des droits sociaux,
Mélanges Y. Guyon, 2003, Dalloz, p. 717, spéc. p. 723).

Art. 6 - La valeur mobilière est un titre susceptible d'être coté et négocié en bourse

26. On enseigne généralement que toutes les valeurs mobilières ont en commun le fait qu'elles peuvent être
cotées et négociées en bourse. La jurisprudence a retenu ce critère pour exclure les parts de sociétés civiles
de placement immobilier de la catégorie des valeurs mobilières (CA Versailles, 13 avr. 1995, Bull. Joly Bourse
o
1995.402, note P. Le Cannu et, sur pourvoi [rejeté] : Cass. com. 21 oct. 1997, Bull. civ. IV, n 283, Rev.
sociétés 1998.117, note F.-X. Lucas , Bull. Joly 1998.137, note Peltier). La Chancellerie considère
également que « le terme de valeur mobilière s'entend d'un ensemble de titres de même nature, cotés ou
susceptibles de l'être, issus d'un même émetteur et conférant, par eux-mêmes, des droits identiques à leurs
détenteurs » (circulaire du ministère de la Justice du 8 août 1983). Certains auteurs contestent toutefois la
valeur de ce critère en faisant observer que l'aptitude à la cotation en bourse n'est que la conséquence
d'autres caractéristiques, celles-là incontestables, des valeurs mobilières : la négociabilité et la fongibilité (F.-
o
X. LUCAS, Valeurs mobilières [Notion], Joly sociétés, Traité, série A, spéc. n 27 ; Retour sur la notion de
o
valeur mobilière, Bull. Joly 2000.765 ; C. LASSALAS, thèse préc., n 130). Il est vrai que la définition légale
des valeurs mobilières (C. mon. fin., art. L. 431-2 et C. com., art. L. 228-1, nouvel al. 9) ne fait aucune
allusion au critère de l'aptitude à la cotation. Le critère est d'autant moins sûr que la « bourse », entendu au
sens habituel d'un marché réglementé, n'a pas vocation à rester l'unique lieu d'échange des valeurs
mobilières et que d'autres systèmes de négociation la concurrencent fortement (en application de l'art. 4-1,
o o
7, de la directive n 2004/39/CE marchés d'instruments financiers du 21 avr. 2004 [préc. supra, n 3], le
règlement général de l'Autorité des marchés financiers [AMF] prévoit une nouvelle architecture des
marchés dans laquelle se côtoient, sur un pied d'égalité, marchés réglementés - art. 521-1 et s. – et
e
systèmes multilatéraux de négociation - art. 521-1 et s. ; V. notre ouvrage, Droit des sociétés cotées, 2 éd.,
2005, Litec). Au moins est-on sûr que les valeurs déjà cotées en bourse sont des valeurs mobilières.

Section 2 - Forme des valeurs mobilières

o
27. Présentation. Titres nominatifs. - À de rares exceptions près (V. supra, n 18), les valeurs mobilières
sont uniformément comptabilisées au nom de leurs titulaires et transmissibles par virement de compte à
o
compte. L'article L. 211-4 du code monétaire et financier modifié par l'ordonnance n 2004-604 du 24 juin
2004 (art. 52, II) impose aux valeurs mobilières émises sur le territoire français et soumises à la législation
française d'être représentées par une inscription en compte ouvert au nom de leur propriétaire et définit
deux modalités de tenue de ces comptes qui déterminent les deux formes que peuvent alternativement
revêtir les valeurs mobilières : la forme nominative ou la forme au porteur. Les titres nominatifs sont ceux
inscrits au nom de leurs propriétaires dans les comptes titres tenus par la société émettrice. C'est le régime
normal des titres des sociétés par actions qui ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé.
Cependant, une évolution récente a rendu la matière plus complexe. En effet, l'alinéa 3 de l'article L. 211-4
admet à certaines conditions que des titres non cotés soient inscrits au porteur chez un intermédiaire
o
financier (établissement de crédit ou entreprise d'investissement) habilité par l'AMF (V. infra, n 32).

28. Titres au porteur. - L'appellation de titres au porteur est désuète. Les titres au porteur ne peuvent plus
être « portés », au sens propre du mot, ni être rendus individualisables comme jadis par un numéro,
o
lorsqu'ils étaient conservés par les intermédiaires financiers. La loi de dématérialisation n 81-1160 du
o
30 décembre 1981 ne les a pas remis en cause pour autant. La récente ordonnance n 2004-604 du 24 juin
2004 (C. com., art. L. 228-1, al. 3) consacre formellement cette appellation : « Les valeurs mobilières
émises par les sociétés par actions revêtent la forme de titres au porteur ou de titres nominatifs… » La
distinction entre les titres nominatifs et les titres au porteur est donc restée de droit positif, mais elle ne sert
plus qu'à déterminer la personne chargée de la tenue du compte. Les titres sont inscrits, dans un cas, dans
les livres de la société émettrice et, dans l'autre, chez un intermédiaire financier.

ACTUALISATION
28. Inscription en compte des titres au porteur. - Le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la
Constitution l'article L. 211-4 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de l'ordonnance
o
n 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières, qui oblige les titulaires
des anciennes valeurs mobilières « au porteur » à solliciter l'inscription de leurs titres en compte (Cons.
o
const. 27 janv. 2012, décis. n 2011-215 QPC, D. 2012. Actu. 280 ; renvoi de Com., QPC, 15 nov. 2011,
o
n 11-16.255 , Rev. sociétés 2012. 693, note Dubertret ). La suspension des droits attachés aux
titres non inscrits en compte et la cession ultérieure de ces titres par la société émettrice poursuivent un
but d'intérêt général : lutter contre la fraude fiscale et réduire le coût de la gestion des valeurs
mobilières. La cession des titres est subordonnée à la carence de leur détenteur ; le produit de la vente
ainsi réalisée est consigné jusqu'à sa restitution éventuelle aux ayants droit. L'article L. 211-4 du code
monétaire et financier ne porte au droit de propriété des détenteurs de ces valeurs mobilières aucune
atteinte disproportionnée.

29. Inscription en compte chez un intermédiaire habilité et inscription au nominatif administré


(différences) - Lorsque les titres sont uniquement inscrits dans les livres de la société, ils sont appelés des
titres nominatifs « purs ». Mais il est permis à tout « titulaire de titres nominatifs [de] charger un
intermédiaire habilité [établissement de crédit, entreprise d'investissement] de gérer son compte ouvert chez
o
un émetteur » (Décr. n 83-359 du 2 mai 1983, art. 4). C'est le régime du « nominatif administré ». Un
mandat de gestion comportant des mentions obligatoires doit être conclu entre cet intermédiaire et le
titulaire des titres nominatifs administrés, mandat par lequel celui-ci s'engage à ne donner d'instructions qu'à
celui-là. Le mandat doit être notifié à l'émettrice (Règl. général de l'AMF, art. 332-60), laquelle connaît
l'identité du teneur de compte et celle du titulaire concerné. Tout achat ou vente est enregistré dans le
compte d'administration ouvert au nom du titulaire et notifié à la société émettrice, qui doit alors modifier le
compte de l'intéressé et ouvrir un compte au nom du cessionnaire si ce dernier n'est pas déjà actionnaire. En
pratique, le titulaire donne ses instructions à cet intermédiaire qui répercute l'information à l'émetteur par un
« bordereau de références nominatives ». La différence entre la formule d'administration des titres
nominatifs et la tenue de compte propre aux titres au porteur tient à la nécessaire relation qui doit exister
entre l'intermédiaire teneur de compte et la personne morale émettrice, dans le premier cas, et dans
l'absence de toute relation entre eux, dans le second, l'intermédiaire n'ayant alors de lien qu'avec le porteur.
Les titres nominatifs administrés restent des titres nominatifs car ils demeurent inscrits dans la comptabilité
titres de la société émettrice, en même temps qu'ils figurent dans le compte d'administration chez le
prestataire habilité. Tout titulaire d'un titre nominatif peut normalement être connu de l'émetteur, qui peut
donc communiquer directement avec lui (il est convoqué à l'assemblée générale par lettre individuelle), alors
qu'un actionnaire au porteur doit faire établir par l'établissement financier teneur de son compte une
attestation d'inscription en compte pour exercer ses droits.

ACTUALISATION
29. Inscription en compte. - Une sous-section 2 du C. mon. fin. est consacrée à l'inscription en
compte. Elle contient des dispositions générales, des dispositions relatives à la tenue du compte et à la
protection du titulaire du compte et des dispositions transitoires. Ici le déplacement s'opère du code de
commerce (C. com., art. L. 228-1 s.) vers le code monétaire et financier (C. mon. fin., art. L. 211-3 à
o er
L. 211-13, réd. Ord. n 2009-15 du 8 janv. 2009, art. 1 ). Le titre financier est un droit négociable
constaté par une inscription en compte. L'ordonnance apporte des modifications au régime des comptes
de titres financiers.

Compte de titres financiers. – Le compte-titres est tenu soit par l'émetteur, soit par l'un des
o o
intermédiaires mentionnés à l'article L. 542-1, 2 à 7 du code monétaire et financier. Il est ouvert au
nom d'un ou de plusieurs titulaires, propriétaires des titres financiers qui y sont inscrits. Par dérogation il
peut être ouvert au nom d'un fonds ou d'un intermédiaire habilité (C. mon. fin., art. L. 211-4). L'alinéa
er
1 de cette disposition institue une présomption que le titulaire du compte-titres est propriétaire des
titres financiers inscrits. « Il semble en effet utile de préciser que les titulaires de comptes-titres sont
propriétaires des titres financiers et non créanciers de l'établissement qui tient ceux-ci » (Rapport au
président de la République). – Pour la procédure d'identification des propriétaires de titres de capital un
renvoi et fait aux articles L. 228-2 à L. 228-3-4 du C. com. » (C. mon. fin., art. L. 211-5). On notera que
disparaît la référence à l'article 94, II de la loi de finances pour 1982 qui a institué la dématérialisation.
Elle est remplacée par une référence « aux articles L. 211-3 et L. 211-4 C. mon. fin. » (C. com.,
art. L. 228-1, al. 6). – Le teneur de compte-conservateur. a pour mission de sauvegarder les droits des
titulaires des comptes sur les titres financiers qui y sont inscrits. Sur les dispositions de protection du
titulaire de compte notamment en cas d'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation
judiciaire d'un intermédiaire : V. C. mon. fin., art. L. 211-9 à L. 209-12.

30. Deux problématiques seront examinées : le domaine respectif des valeurs nominatives et des valeurs au
o o
porteur (V. infra, n 31 et s.) et l'identification des actionnaires (V. infra, n 33 et s.).

er
Art. 1 - Domaines respectifs des valeurs nominatives et au porteur

31. a) Avant la réforme du 24 juin 2004, la ligne de partage entre titres nominatifs et valeurs au porteur
était relativement nette. Toutes les valeurs non cotées, les actions de SICAV exceptées, devaient
nécessairement être nominatives (C. mon. fin., anc. art. L. 211-4, al. 2). Le consensus était général. Seul
était discuté le point de savoir si l'obligation de « nominativité » devait s'appliquer dans tous les cas et
notamment aux obligations (V. pour l'affirmative, J.-P. BOUÈRE, Ph. DEROUIN, J.-M. DESACHÉ, A. DUHAMEL,
E. MALINVAUD et H. DE VAUPLANE, Titres et emprunts obligataires, t. 1, 1998, éd. Banque, p. 132). Quant
aux valeurs cotées et aux actions de SICAV, au contraire, leur condition normale était d'être au porteur. Sauf
dans les rares cas où elles étaient matérialisées et conservées au coffre, les valeurs cotées étaient inscrites
dans les livres des intermédiaires choisis par les porteurs parmi les professionnels de la tenue de compte
habilités, puis enregistrées par ces intermédiaires dans des comptes courants ouverts à leur nom auprès
d'Euroclear France SA (anciennement Sicovam SA), le dépositaire central qui assure (sans aucun monopole
légal à cet effet) le règlement-livraison des titres cotés chez Euronext France. Ce n'est que dans certains cas
particuliers que des valeurs cotées étaient nominatives : actions émises par les sociétés exploitant une
o er
entreprise de presse (L. n 86-897 du 1 août 1986, art. 4) ; actions des sociétés exploitantes d'un service
o
de communication audiovisuelle (L. n 86-1067 du 30 sept. 1986, art. 36) ; actions de numéraire
obligatoirement nominatives jusqu'à leur entière libération (C. com., art. L. 228-9) ; actions rachetées par la
er
société émettrice (C. com., art. L. 225-210, al. 1 ) ; actions des « initiés » visés à l'article L. 225-109 du
o
code de commerce (Décr. n 67-236 du 23 mars 1967, art. 153-1 et s.) ; actions acquises par des salariés
pendant un délai de cinq ans (C. com., art. L. 225-194 et L. 225-197) ; actions devant servir à l'échange
d'obligations échangeables (C. com., art. L. 225-173) ; valeurs cotées appartenant à des associations
er o
reconnues d'utilité publique (L. 1 juill. 1901, art. 11) ou à des fondations d'entreprise (L. n 87-571 du
23 juill. 1987, art. 19-3) ; actions cotées pour lesquelles les porteurs ont opté pour la nominativité, par
exemple pour pouvoir bénéficier d'un droit de vote double (C. com., art. L. 225-123).

32. b) La nouveauté des valeurs non cotées susceptibles d'être « mises au porteur ». – L'ordonnance du
24 juin 2004 maintient les solutions applicables aux valeurs cotées mais modifie celles qui étaient propres
aux valeurs non cotées. En effet, par dérogation à l'obligation de nominativité qu'elle impose en matière de
valeurs non cotées (C. mon. fin., art. L. 211-4, al. 2), l'ordonnance autorise, à l'alinéa suivant du même
texte, l'inscription en compte de ces valeurs dans les livres d'un intermédiaire teneur de compte habilité
lorsque ces valeurs sont « admises aux opérations d'un dépositaire central », c'est-à-dire à l'heure actuelle
aux opérations d'Euroclear France. Certes l'alinéa 3 de l'article L. 211-4 ne parle pas explicitement de titres
au porteur, mais il s'agit bien de cela, puisque des valeurs comptabilisées dans les livres d'un intermédiaire
habilité et soumises au régime de tenue et de conservation des titres au porteur, qui interdit à l'émettrice de
connaître le nom de ses actionnaires, ne peuvent être inscrites en même temps au nominatif, régime qui, au
o
contraire, autorise l'émettrice à connaître ses actionnaires (V. supra, n 27). À la différence, cependant, des
actions cotées sur un marché réglementé français, qui sont admises d'office aux opérations de la société
Euroclear France SA (art. 3.2 des règles de fonctionnement d'Euroclear France), l'admission d'actions non
cotées n'est pas automatique. Elle exige au préalable une vérification par le dépositaire central de
l'importance du volume d'échanges du marché du titre concerné. Ce n'est que si ce volume est jugé suffisant
que le titre est admis. Il convient qu'au préalable (C. mon. fin., art. L. 211-4, mod., al. 3) la société
émettrice ait procédé à une modification des statuts autorisant la forme au porteur (ou que le contrat
d'émission le prévoie s'il ne s'agit pas d'actions, mais de titres de créance). Ce n'est qu'à cette double
condition (décision d'admission du dépositaire central et décision de l'émetteur ou accord des parties au
contrat d'émission) que des valeurs non cotées peuvent être inscrites au porteur. Ce nouveau dispositif
aurait un double but, selon le rapport au président de la République sur l'ordonnance du 24 juin 2004. D'une
part, il serait destiné à attirer les émetteurs internationaux vers le Marché libre d'Euronext, trop peu actif.
D'autre part, la règle permettrait de mieux contrôler, grâce à l'intervention du dépositaire central, les appels
publics à l'épargne pouvant résulter de la cession dans le public d'actions au porteur à l'insu des dirigeants
de la société émettrice ou de l'actionnaire majoritaire. On sait, en effet, que le simple fait pour un actionnaire
d'une société dont les titres ne sont pas admis sur un marché réglementé de reclasser ses titres dans le
public, avec le concours d'un intermédiaire (opération qui répond au deuxième critère de l'appel public à
l'épargne établi par l'art. L. 411-1, c. mon. fin.) aboutit à placer la personne morale émettrice dans le statut
de l'appel public à l'épargne avec toutes les contraintes qui en résultent (V. not. P. LE CANNU, Droit des
e o
sociétés, 2 éd., 2003, Domat droit privé, Montchrestien, n 1135 ; A. PIETRANCOSTA, Appel public à
o
l'épargne, Joly sociétés, mars 2002, n 27 ; F. PELTIER, Appel public à l'épargne, J.-Cl. Bourse, Traité,
o
fasc. 1610, déc. 1999, n 28). L'ordonnance du 24 juin 2004 a logiquement étendu aux sociétés émettrices
de valeurs non cotées, mais tenues et conservées chez un intermédiaire habilité comme le sont les titres
cotés, la faculté d'obtenir des renseignements sur son actionnariat, problématique complexe dont il sera à
présent traité.

Art. 2 - Problématique de l'identification des actionnaires

33. Intérêts pratiques de la question. - Quelques exemples suffiront à montrer l'importance de la


question. Pour s'assurer du respect des règles régissant le droit de vote et, partant garantir, la régularité et
l'intégrité des scrutins, la société doit savoir qui est actionnaire et qui ne l'est pas, qui peut voter et qui ne le
peut pas (rappelons que seuls les actionnaires peuvent voter : C. com., art. L. 225-107, et qu'ils ne peuvent
se faire représenter que par un autre actionnaire ou par leur conjoint : C. com., art. L. 225-106). De même
la société doit pouvoir contrôler le respect de l'interdiction de vote qui peut peser sur certains actionnaires,
par exemple en cas de détention d'actions auto détenues (C. com., art. L. 225-111) ou d'autocontrôle
(C. com., art. L. 222-31), ou encore d'actions non libérées ou correspondant à un franchissement de seuil
non déclaré. Dans un autre ordre de préoccupations, il peut devenir un inconvénient sérieux pour les
dirigeants de la société émettrice de ne pas connaître les actionnaires dans certaines éventualités. Il en est
notamment ainsi dans le contexte d'une OPA « inamicale », lorsque des alliances doivent être négociées
contre l'attaquant ; cela suppose une bonne connaissance de l'actionnariat de la société. La société et ses
dirigeants ne sont du reste pas les seuls concernés. La connaissance de la « géographie » du capital est
primordiale pour ses actionnaires et, si la société est cotée, pour l'ensemble des investisseurs sur le marché.
Elle permet d'observer tantôt une volonté de prise de contrôle ou, à l'inverse, une intention de se
désengager, et d'apprécier ainsi les possibles conséquences sur le cours du titre. Or, les moyens pour la
société de connaître ses actionnaires ne sont pas si nombreux. Les feuilles de présence aux assemblées, qui
peuvent être consultées par tout actionnaire, doivent mentionner les noms, prénoms et domiciles des
actionnaires, à savoir non seulement ceux qui sont physiquement présents aux assemblées mais aussi ceux
qui y sont représentés par un mandataire ou encore ceux qui votent par correspondance (C. com.,
art. L. 225-114 et Décr. 23 mars 1967, art. 145). Pour le reste, la forme de détention des actions est
déterminante pour la connaissance de l'actionnariat. Seules les actions nominatives permettent
véritablement cette connaissance. Quant aux actionnaires qui détiennent des titres au porteur, la société ne
peut normalement pas les connaître puisqu'elle ne tient pas de comptabilité-titres pour les valeurs au
porteur. Les actionnaires titulaires de titres au porteur ne peuvent être identifiés que par les teneurs de
compte qui n'ont eux-mêmes qu'une vue très partielle de la composition du capital : ils ne peuvent connaître
que les actionnaires qui ont choisi d'ouvrir un compte de titres chez eux ; en outre, les échanges
d'information entre teneurs de comptes sont interdits en raison du secret professionnel (opposable erga
omnes sauf au juge pénal) auquel ils sont tenus.

ACTUALISATION
33 s. Pour la procédure d'identification des propriétaires de titres de capital un renvoi est fait aux
articles L. 228-2 à L. 228-3-4 du C. com. (C. mon. fin., art. L. 211-5).

er
§1 - Titres au porteur identifiables (TPI)
34. À condition que ses statuts prévoient le dispositif adéquat, la société peut être en mesure de connaître
les détenteurs d'actions au porteur à un moment déterminé en adoptant le système des titres au porteur
o
identifiables créé par la loi sur l'épargne n 87-416 du 17 juin 1987. Il est alors possible à la société
émettrice de demander au dépositaire central qui assure la tenue du compte émission de ses titres, le nom
et l'adresse des détenteurs de titres au porteur ouvrant le droit de vote, immédiat ou à terme, dans ses
assemblées d'actionnaires, ainsi que la quantité de titres détenue par chacun d'eux et les restrictions dont les
titres peuvent être frappés (C. com., art. L. 228-2-I). En cas de résistance des établissements teneurs de
compte, le dépositaire central peut demander au président du tribunal de grande instance territorialement
compétent, statuant en référé, l'exécution forcée de l'obligation de communication sous astreinte. La société
émettrice a la faculté, au vu des renseignements ainsi obtenus, si elle estime que les personnes indiquées
comme étant ses actionnaires peuvent être inscrites pour le compte de tiers, de demander toutes
informations complémentaires concernant les propriétaires véritables des titres (C. com., art. L. 228-2-II,
al. 2). Les renseignements obtenus par la société émettrice ne peuvent être cédés par celle-ci, même à titre
gratuit. Toute violation de cette disposition est punie des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal,
soit un emprisonnement d'un an et une amende de 15 000 € (C. com., art. L. 228-2, III).

35. Titres non admis aux négociations sur un marché réglementé. - L'ordonnance du 24 juin 2004
étend aux sociétés non cotées qui ont émis des titres au porteur la faculté, jusqu'alors réservée aux sociétés
cotées, d'engager une procédure en vue d'obtenir des renseignements relatifs à l'identité de leurs
actionnaires au porteur et de connaître la quantité de titres détenus par chacun d'eux.

§ 2 - Question des investisseurs dits « intermédiés »


36. Qui est actionnaire ? - La réponse à cette question semble évidente : c'est celui au nom de qui les
actions sont inscrites dans un compte ouvert dans les livres de la société émettrice ou d'un intermédiaire
habilité. Il s'agira normalement du propriétaire des titres. Mais la personne inscrite peut ne pas être le
propriétaire et le teneur de compte n'a pas en principe l'obligation de vérifier que les personnes inscrites sont
les véritables propriétaires (V. J. MESTRE et D. VELARDOCCHIO, Lamy Sociétés commerciales, 2005,
o
n 4082). Ainsi les non-résidents qui n'ont pas leur domicile en France au sens de l'article 102 du code civil,
quoique véritables propriétaires, peuvent ne pas être inscrits et ne pas avoir par conséquent la qualité
d'actionnaires au sens du droit français. Les propriétaires nominaux, inscrits en compte, sont des
intermédiaires financiers (nominees, trustees ou global custodians), souvent de grandes banques
gestionnaires de portefeuilles de valeurs mobilières (V. A. COURET, ADR, EDR, nominees, trustees,
partnerships, global custodians, etc., Rev. sociétés 1999.555 ; Actionnaires non résidents et détention de
titres sur des places étrangères : la question de l'identification de l'actionnaire réel, Dr. et patrimoine mai
2000, p. 103 ; Ch. GOYET, N. RONTSCHEVSKY et M. STORCK, Droit des marchés financiers, RTD com. 2002,
chron. 502 ). L'actionnaire apparent n'étant pas le véritable actionnaire, la validité de son vote aux
assemblées générales de la société peut être discutée (C. com., art. L. 225-106). Aussi, pour ne pas
contrarier la volonté d'investir dans notre pays (le total des investissements de non résidents représenterait
environ la moitié de la capitalisation des sociétés composant le CAC 40, La Tribune 18 janv. 2005, p. 24), la
loi NRE du 15 mai 2001 a-t-elle reconnu explicitement le droit de vote des non-résidents, même si leurs
titres sont détenus par un tiers, sous la forme de comptes collectifs ouverts au nom de l'intermédiaire pour
l'ensemble de sa clientèle de non-résidents ou sous la forme de comptes individuels d'investisseurs non
résidents (V. C. ARSOUZE et P. LEDOUX, Le vote des actionnaires non résidents, Bull. Joly 2004.1066 ;
o
F. FORGUES, L'actionnaire indirect, thèse, Paris I, 2002, n 252, p. 201 et s.).

37. Licéité de l'interposition des intermédiaires inscrits. Conditions. - Les intermédiaires ont
désormais la possibilité de voter en déclarant qu'ils n'agissent pas en tant qu'actionnaires, mais en qualité
d'intermédiaires inscrits. La loi autorise ces intermédiaires inscrits à ouvrir des comptes d'actionnaires chez la
société émettrice (titres nominatifs purs) ou chez l'intermédiaire habilité teneur de compte conservateur
(titres nominatifs administrés ou au porteur) pour le compte de leurs clients ne résidant pas en France (les
« investisseurs intermédiés »). Certains intermédiaires étrangers disposent de comptes titres directement
ouverts chez Euroclear France. Dans ce cas, leur déclaration doit être faite auprès de ce dépositaire central
o
(Décr. n 2002-803 du 3 mai 2002, art. 46, introduisant les art. 151-1 à 156-6 dans le décret du 23 mars
1967). En contrepartie, les intermédiaires doivent respecter deux obligations : se déclarer spontanément en
qualité d'intermédiaire détenant des titres pour le compte d'autrui et révéler l'identité des investisseurs
intermédiés.

A - Déclaration de la qualité d'intermédiaire


38. Cette déclaration doit être faite dès l'ouverture du compte intermédié (C. com., art. L. 228-1, al. 8 ;
o
Décr. 23 mars 1967, art. 151-1 et 151-2, réd. Décr. n 2002-803 du 3 mai 2002). Si les titres des non-
résidents sont nominatifs et ouvrent droit à des avantages statutaires (dividende majoré et/ou droit de vote
double), les intermédiaires inscrits sont tenus de fournir les renseignements nécessaires à la société
émettrice (ou au teneur de compte si les titres sont au nominatif administré) pour que les actionnaires
concernés puissent en bénéficier (identité, nombre d'actions) et garantir leur détention continue (C. com.,
art. L. 228-3, al. 2). La formalité de déclaration a le mérite de lever le doute qu'il était permis de nourrir
quant à la validité du vote émis par l'intermédiaire en tant que personne interposée. L'article L. 228-3-2,
er
alinéa 1 , du code de commerce et l'article 151-6 du décret du 23 mars 1967 permettent en effet à
l'intermédiaire, déclaré comme tel et qui agit « en vertu d'un mandat général de gestion des titres », de
transmettre ou d'émettre sous sa signature les votes des propriétaires d'actions véritables en vue des
assemblées.

B - Révélation de l'identité des investisseurs intermédiés


39. La seconde obligation de l'intermédiaire est de révéler l'identité des propriétaires réels des titres pour le
er o
compte desquels il agit (C. com., art. L. 228-3, al. 1 ; V. Comité juridique ANSA 7 nov. 2001, avis n 630 et
631), ce qui suppose que les non résidents intermédiés acceptent que leur identité soit communiquée à la
société. Cette information doit être donnée spontanément, avant toute assemblée générale : l'intermédiaire
est systématiquement tenu « avant de transmettre des pouvoirs ou des votes en assemblée générale […] de
fournir la liste des propriétaires non résidents des actions auxquelles ces droits de vote sont attachés »
(C. com., art. L. 228-3-2). Elle doit aussi être communiquée à tout autre moment, sur simple demande de la
société émettrice, aussi bien pour les actionnaires au porteur (C. com., art. L. 228-2) que pour les
actionnaires nominatifs (C. com., art. L. 228-3). Dans le cas où les renseignements fournis ne permettent
pas le contrôle des conditions requises pour l'exercice de ces droits, l'article L 228-3, alinéa 2, prévoit, à titre
de sanction spécifique de la réticence, que les droits spéciaux attachés aux actions nominatives et
notamment ceux prévus aux articles L. 225-123 (droit de souscrire à titre réductible à une augmentation de
capital) et L. 232-14 (droit à un dividende majoré) ne pourront pas être exercés par l'intermédiaire inscrit.
En outre, lorsque la société émettrice estime que les personnes dont l'identité lui aura été communiquée par
l'intermédiaire inscrit ne sont elles-mêmes que des prête-noms, elle peut renouveler ses demandes
d'information et remonter d'intermédiaire en intermédiaire jusqu'au propriétaire réel (C. com., art. L. 228-3-
1, I). « À l'issue de ces opérations », lorsque ses recherches n'ont pas complètement abouti, la société peut
demander à tout actionnaire personne morale détenant plus de 2,5 % des actions composant son capital, ou
plus de 2,5 % des droits de vote à ses assemblées, de lui faire connaître l'identité des personnes détenant
directement ou indirectement plus du tiers de son capital social ou des droits de vote exercés lors des
assemblées générales (C. com., art. L. 228-3-1, II). La société peut ainsi percer les écrans successifs entre
elle et le propriétaire réel des titres.

40. Sanctions. - Le vote ou le pouvoir émis par la personne interposée, inscrite en compte, qui n'aurait pas
préalablement déclaré sa qualité ou révélé l'identité de ses clients « ne peut être pris en compte » (C. com.,
art. L. 228-3-2, dern. al.). En outre, si l'intermédiaire ne répond pas à une demande de complément
d'information de la société émettrice dans le délai de dix jours ouvrables à compter de la date de la demande
(Décr. mod. 23 mars 1997, art. 151-5) ou s'il a transmis des renseignements incomplets ou erronés, relatifs
soit à sa qualité, soit aux propriétaires des titres, soit à la quantité de titres détenus par chacun d'eux, les
actions et autres titres donnant immédiatement ou à terme accès au capital, inscrits en compte à son nom,
sont privés du droit de vote pour toute assemblée d'actionnaires se tenant jusqu'à la régularisation de la
er
situation et le paiement du dividende est suspendu jusqu'à la même date (C. com., art. L. 228-3-3, al. 1 ).
Si cette dissimulation a été faite sciemment, le juge, saisi par la société ou par des actionnaires détenant au
moins 5 % du capital, pourra prononcer la privation totale ou partielle du droit de vote pendant cinq ans et,
éventuellement, la privation des dividendes pour la même période (C. com., art. 228-3-3, al. 2) pour toutes
les actions « ayant fait l'objet de l'interrogation » c'est-à-dire potentiellement la totalité des actions détenues
par la personne interposée.

Section 3 - Nature des droits conférés par les valeurs mobilières et nature des droits exercés sur
celles-ci

41. Qualification. - Les valeurs mobilières confèrent des droits subjectifs à leurs titulaires. Dans la théorie
classique, les droits subjectifs sont personnels ou réels. Les droits personnels consistent dans le droit
d'exiger d'autrui l'accomplissement d'une obligation de donner, faire ou ne pas faire. « Se rattachant à un
lien d'obligation déterminée, (ils) ne sont… susceptibles d'être exercés que contre la personne obligée et
contre ceux qui sont tenus de ses engagements », soulignent les professeurs C. AUBRY et C. RAU (Cours de
e
droit civil français, t. 2, 5 éd., 1897, Librairies techniques, § 172) qui ajoutent que « les droits réels sont
ceux qui, créant un rapport immédiat et direct entre une chose et la personne au pouvoir de laquelle elle se
trouve soumise, d'une manière plus ou moins complète, sont par cela même susceptibles d'être exercés non
pas seulement contre telle personne déterminée mais envers et contre tous ». Dans quelle catégorie faut-il
placer les valeurs mobilières ? Les droits de leurs titulaires sont assurément des droits personnels. Ce sont
des droits à l'exécution d'obligations déterminées qui pèsent sur la personne morale émettrice en vertu de la
loi et du contrat. Ces droits peuvent avoir un caractère patrimonial (exemples : droit de recevoir le dividende
voté attaché à l'action ou l'intérêt convenu au contrat d'emprunt obligataire) ou un caractère
extrapatrimonial (exemple : droit de vote de l'actionnaire ou de l'obligataire aux assemblées ; droit de
recevoir certaines informations sur la situation patrimoniale et financière de l'émetteur). Il apparaît que, en
dépit du fait que les prérogatives que le titre renferme sont des droits personnels, un droit de propriété sur le
o
titre est concevable (V. infra, n 42 et s.). On s'interrogera ensuite sur les conditions de la transmission de ce
o
droit de propriété (V. infra, n 47 et s.).

er
Art. 1 - Droit de propriété

42. Discussion. - La tradition juridique répugne à l'idée qu'une créance puisse être l'objet d'un droit de
propriété. Selon une objection classique, un droit de créance est un lien entre des sujets de droit, un
ensemble de droits personnels qui ne peuvent être un objet de propriété (sur le débat relatif à la propriété
des créances, V. not. la controverse entre J. DABIN, Une nouvelle définition du droit réel, RTD civ. 1962.20,
et S. GINOSSAR, Pour une meilleure définition du droit réel et du droit personnel, RTD civ. 1962.573). En
réalité, il faut distinguer les droits que la valeur mobilière constate et les droits dont elle peut faire l'objet.
Comme nous l'avons observé, la valeur mobilière constate un ensemble de prérogatives et d'obligations qui
lui sont attachées et qui sont transmises avec elle. Mais si elle constitue une créance et donc un lien entre le
porteur et l'émetteur, le titre est aussi un bien si l'on se place du point de vue de sa valeur économique. Or
cette valeur, qui provient de la vocation du titre à créer des revenus et de son aptitude à générer une plus-
value en cas de cession, existe nécessairement dès lors que les droits que le titre renferme peuvent être
exercés par le titulaire en échange d'une prestation en retour. En outre, parce que seul le titulaire du titre
peut jouir des revenus et de la plus-value et qu'il n'est pas admissible qu'autrui les accapare à sa place, il est
permis de qualifier ce titulaire de propriétaire du titre (V. en dernier lieu : V. ALLEGAERT, De la propriété des
valeurs mobilières, Bull. Joly 2005.340). Cette analyse est en réalité fort ancienne en doctrine : « Quoique de
prime abord, il paraisse étrange de voir employer, en fait de créances, les expressions propriété et
propriétaire, ces expressions se justifient cependant lorsqu'on considère les créances, non plus en elles-
mêmes et d'après leur nature propre, mais comme des biens, c'est-à-dire comme des éléments constitutifs
e
du patrimoine » (C. AUBRY et C. RAU, Cours de droit civil français, 6 éd. par P. ESMEIN, 1952, Librairies
techniques, p. 143 ; sur ce double aspect en matière d'actions : CA Poitiers, 12 nov. 2002, Dr. sociétés
o
2003, n 6, obs. J. Monnet et H. Hovasse, p. 21). Autrement dit, le droit réel ne porte pas sur la créance
sous jacente, mais sur le bien qu'elle représente : « Il n'est pas question d'un droit réel sur un droit
personnel, mais d'un droit réel sur la chose, la valeur, qui n'est pas le droit personnel de créance mais
o
l'objectivation de ce droit » (F.-G. TRÉBULLE, op. cit., n 666 et 662 ; V. égal. C. LASSALAS, thèse préc.,
o o
n 354 et s. ; A. REYGROBELLET, article préc., RTD com. 1999.307, n 5 et s. ; contra : H. CAUSSE,
o
Principe, nature et logique de la dématérialisation, JCP, éd. E, 1992. I. 194, n 18 ; F.-X. LUCAS, Les
o
transferts temporaires de valeurs mobilières, 1997, LGDJ, n 441).

43. Sur ce bien particulier, les conditions du droit de propriété déduites de l'article 544 du code civil sont
remplies. En effet, le droit exercé par le titulaire sur la valeur mobilière est à la fois exclusif et direct.

44. Droit exclusif. - Le propriétaire est seul maître de sa chose, il peut faire ce qu'il veut de sa chose, la
transformer, la vendre, la gager et s'opposer à tout empiétement d'un tiers sur ses droits. Nous avons déjà
observé que leur nature de choses de genre ne s'oppose pas à une parfaite identification des valeurs
mobilières grâce à l'inscription en compte qui met fin à l'impossibilité de les distinguer et permet d'éviter leur
confusion avec d'autres valeurs identiques. Le pouvoir du propriétaire est donc bien assis sur des valeurs
déterminées, identifiées dans leur nature et leur nombre. Que la consistance du droit du propriétaire puisse,
sous certaines limites, être modifiée contre son gré par une assemblée d'actionnaires ou d'obligataires
statuant à la majorité ne contredit pas l'exclusivité du pouvoir. En effet, « la consistance et la portée des
pouvoirs que l'on a sur une chose dépendent nécessairement de la nature de cette chose » (M. FABRE-
o
MAGNAN, Propriété, patrimoine et lien social, RTD civ. 1997.583, n 9 ). L'encadrement, légal ou
statutaire, dont le droit peut être l'objet, s'il relativise l'exclusivité du pouvoir qu'il confère, ne disqualifie pas
le droit de propriété. La possession d'une action confère la qualité d'actionnaire et emporte la soumission à la
loi de la majorité. Nonobstant l'application de dispositions impératives les valeurs mobilières restent dans le
pouvoir exclusif de leurs titulaires.

45. Pouvoir direct sur la chose. - Pour exercer son droit, le propriétaire dispose d'une faculté d'action
directe sur sa chose : il n'a pas besoin de passer par l'entremise d'autrui. À première vue, cette condition
n'est pas remplie pour les valeurs dématérialisées. Le titulaire est dans l'obligation de passer par le teneur de
compte pour réaliser toute opération portant sur ses titres. L'interposition d'un intermédiaire est obligatoire
pour les valeurs cotées à peine de nullité de la cession (C. mon. fin., art. L. 426-6). La satisfaction du
titulaire paraît donc dépendre entièrement du teneur de compte qui a seul un pouvoir direct sur l'écriture en
compte. Mais cette circonstance matérielle importe peu. En revanche, il importe que le titulaire ait la
possibilité, juridiquement sanctionnée, d'exercer un pouvoir de propriétaire sur la chose. Or, le teneur de
compte doit obéir aux instructions qu'il reçoit du titulaire de l'inscription, sauf à engager sa responsabilité à
l'égard de ce dernier. Ainsi, par exemple, aux termes de l'article 332-6 du règlement général de l'AMF, « le
teneur de compte conservateur s'assure que […] tout mouvement d'instruments financiers affectant le
compte d'un titulaire se réalise exclusivement sur instruction de celui-ci… ». Si le teneur de compte n'est plus
en mesure d'exécuter les ordres reçus, parce qu'il n'est plus à la tête de ses affaires, s'il est en liquidation
judiciaire par exemple, le titulaire a le droit, reconnu par la loi sous certaines conditions, de faire virer
d'autorité ses titres à un compte tenu par un autre intermédiaire financier habilité de son choix. C'est bien la
preuve de l'existence d'un « pouvoir direct » du titulaire sur les valeurs inscrites à son nom.

46. Conclusion. - Le titulaire d'une valeur mobilière est bien propriétaire de cette valeur, à l'égard de tous,
si elle est inscrite en compte à son nom. Son droit est inaccessible à autrui et a une opposabilité absolue
(S. GINOSSAR, Droit réel, propriété et créance, Élaboration d'un système rationnel des droits patrimoniaux,
1960, LGDJ ; F. ZENATI, Pour une rénovation de la théorie de la propriété, RTD civ. 1993.305 et s. ;
e o o
F. ZENATI et Th. REVET, Les biens, 2 éd., 1997, coll. Droit fondamental, PUF, n 46, n 89 et s.). Au
demeurant, on relèvera que la loi vise la propriété des valeurs mobilières à de nombreuses occasions.
L'article L. 533-7 du code monétaire et financier fait obligation aux prestataires de services d'investissement
de protéger les droits de propriété des investisseurs sur les instruments financiers dont ils assurent la tenue
(ce texte interdit la pratique dite du tirage sur la masse par laquelle un intermédiaire prélève des titres pour
son usage sur le compte de ses clients, sans avoir obtenu leur accord explicite). De même, les articles
o
L. 225-107-1 à L. 233-7 du code de commerce, issus de la loi NRE n 2001-420 du 15 mai 2001, visent à dix
o
reprises « les propriétaires de titres » ou les « propriétaires d'actions ». Le décret n 83-359 du 2 mai 1983,
er
article 1 , énonce que « les valeurs mobilières ne sont plus matérialisées que par une inscription au compte
de leur propriétaire ». La jurisprudence, qu'elle soit constitutionnelle (Décis. Cons. const. 16 janv. 1982, à
propos des nationalisations, JCP 1982. II. 19788) ou judiciaire (Cass. req. 7 déc. 1873, S. 1874.1.409, note
o
Labbé ; Cass. com. 22 nov. 1988, Korzilius, Bull. civ. IV, n 322, Bull. Joly 1989.84 ; 24 janv. 1989, Bull.
o
civ. IV, n 39, Bull. Joly 1989.266, note D. Lepeltier ; 10 juin 1997, Aubertin, D. 1999.89, note H. Causse ,
o o
Dr. sociétés 1997, n 134, obs. H. Hovasse, Banque et droit 1997, n 55, p. 30, obs. H. de Vauplane, Bull.
Joly 1997.859, note J.-J. Daigre, Dalloz affaires 1997.869) utilisent aussi fréquemment les termes de
« propriété » ou de « propriétaires » à propos des valeurs mobilières.

Art. 2 - Régime du transfert de propriété

Bibliographie.
Avant l'ordonnance du 24 juin 2004 : Ch. LASSALAS, L'inscription en compte des valeurs : la notion de
propriété scripturale, thèse, PU Clermont-Ferrand, 1997, Litec. – D. R. MARTIN, Du titre et de la
négociabilité, D. 1993, chron. 20 ; De la nature corporelle des valeurs mobilières (et autres droits
scripturaux), D. 1996, chron. 47 ; De l'inscription en compte d'actifs scripturaux, D. 1998, chron. 15 ;
Du corporel, D. 2004.2285 . – A. REYGROBELLET, Le droit de propriété du titulaire d'instruments financiers
dématérialisés, RTD com. 1999.305 et s. . – S. MOISDON-CHATAIGNIER, La propriété des valeurs
mobilières, thèse dactyl., Paris IX, 1999. – F. NIZARD, Les titres négociables, Revue Banque éd.-Economica,
2003. – J. PRIEUR et A. BIENVENU-PIERROT, Le transfert de propriété dans les cessions d'instruments
financiers, Dr. et patrimoine mai 2000, p. 79. – A.-L. ARCHAMBAULT, La nature juridique des valeurs
mobilières, thèse dactyl., Paris I, 1999. – A.-C. MULLER, Droit des marchés financiers et droit des contrats,
thèse dactyl., Paris II, 2001. – M. GERMAIN, Le transfert de propriété des titres cotés, Actes pratiques 2003,
o e
n 70, p. 5. – D. OHL, Droit des sociétés cotées, 2 éd., 2005, Litec. – F. AUCKENTHALER, Droit des marchés
de capitaux, 2004, LGDJ, p. 23. – Après l'ordonnance du 24 juin 2004 : F. NIZARD, Le transfert de propriété
des valeurs mobilières : une réforme inachevée, Rev. sociétés 2004.619 . – G. BLANLUET, Le nouveau
droit des valeurs mobilières après la réforme du 24 juin 2004 - Le transfert de propriété des actions, Dr. et
patrimoine 2004.81. – A. COURET et H. LE NABASQUE, Valeurs mobilières et augmentations de capital,
o
2004, F. Lefebvre, n 400 et s. – D. OHL, Aspects de la réforme du droit des valeurs mobilières, Bull. Joly
Bourse 2004.689 ; Bull. Joly Spécial Ordonnance valeurs mobilières du 24 juin 2004, hors série, févr. 2005,
o o
n 83 et s. – D. ROBINE, La réforme du transfert de propriété des valeurs mobilières, LPA 2005, n 189,
p. 49 et s.
o
47. Jusqu'à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n 2004-604 du 24 juin 2004, les règles du transfert de
propriété des valeurs mobilières résultaient des dispositions des articles 1583 et suivants du code civil pour
les titres non cotés et de l'article L. 432-2 du code monétaire et financier pour les titres cotés sur un marché
réglementé. L'ordonnance du 24 juin 2004 est venue ériger en critère général du transfert de propriété
l'inscription des valeurs au compte de l'acquéreur. Elle a créé un article L. 228-1, alinéa 9, du code de
commerce ainsi rédigé : « En cas de cession de valeurs mobilières admises aux négociations sur un marché
réglementé ou de valeurs mobilières non admises aux négociations sur un marché réglementé mais inscrites
en compte chez un intermédiaire habilité participant à un système de règlement et de livraison mentionné à
l'article L. 330-1 du code monétaire et financier, le transfert de propriété s'effectue dans les conditions
prévues à l'article L. 431-2 de ce code. Dans les autres cas, le transfert de propriété résulte de l'inscription
des valeurs mobilières au compte de l'acheteur, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. »

ACTUALISATION
47. Le transfert de propriété. - Le transfert de propriété de titres financiers résulte de l'inscription de
ces titres au compte-titres de l'acquéreur (C. mon. fin., art. L. 211-17). Cette disposition issue de
o
l'ordonnance n 2009-15 du 8 janv. 2009 reprend l'article L. 431-2 du même code. Surtout, l'inscription
pose une présomption irréfragable de propriété à l'égard des tiers, l'ordonnance se calant sur le principe
que l'inscription en compte vaut titre. « Nul ne peut revendiquer pour quelque cause que ce soit un titre
financier dont la propriété a été acquise de bonne foi par le titulaire du compte-titres dans lequel ces
titres sont inscrits » (art. L. 211-16). L'objectif est d'introduire, en liaison avec les travaux
internationaux et européens en cours, la protection du droit de propriété du titulaire du compte, lorsque
celui-ci a acquis des titres financiers de bonne foi (V. Rapport au Président de la République).
DUBERTRET et MANGENET, D. 2009. Chron. préc. p. 450 .

48. Premières appréciations. - Désormais, a-t-on écrit, les solutions anciennes seraient périmées
o
(A. COURET et H. LE NABASQUE, op. cit., n 404, p. 190) et une règle unique régnerait pour toutes les
valeurs mobilières qui lierait le transfert à leur inscription au compte de l'acheteur. L'ordonnance du 24 juin
2004 n'est pas la seule à retenir l'inscription des valeurs au compte de l'acquéreur comme critère du
o
transfert de propriété. L'ordonnance n 2004-330 du 15 avril 2004 (C. env., art. L. 229-15, I) l'utilise
également ; celle-ci crée un système d'échange des quotas d'émission de gaz à effet de serre, qualifiant
lesdits quotas de biens meubles, négociables, transmissibles par virement de compte à compte et conférant
des droits identiques à leurs détenteurs, exclusivement matérialisés par une inscription au compte de leur
détenteur dans un registre national qui comptabilise les quotas délivrés, détenus, transférés et annulés
(V. G. BARSI, Analyse juridique du système français d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre,
o
Actes pratiques 2004, n 75, p. 33 ; S. ROUSSEAUX, Le système d'échange de quotas d'émission de gaz à
effet de serre : un partenariat entre la CE, les États membres et les entreprises, coll. « Finances publiques et
o
protection de l'environnement » des 3 et 4 juin 2004 à Nantes, RF fin. publ. 2005, n 90, p. 81 ; M. PÂQUES,
La directive 2003/87/CE et le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la
Communauté européenne, RTD eur. 2004.249 ; M. MOLINER-DUBOST, Le système français d'échange de
quotas d'émission de gaz à effet de serre, AJDA 2004.1132 ). Cependant, il n'est pas certain que la rupture
avec le passé soit aussi franche. La généralité de la règle est un trompe-l'œil car la distinction entre valeurs
non cotées et valeurs cotées n'a pas disparu. Elle prend aujourd'hui de nouvelles formes puisqu'il convient de
o
distinguer entre les valeurs non négociées sur un marché réglementé (V. infra, n 49 et s.) et les valeurs
admises à ces négociations auxquelles doivent être assimilées, parce qu'elles sont soumises au même régime
de transfert de propriété, les valeurs qui quoique non cotées peuvent être inscrites en compte chez un
o
intermédiaire habilité, c'est-à-dire celles (V. supra, n 32) susceptibles d'être mises au porteur dès lors
o
qu'elles sont admises aux opérations d'un dépositaire central (V. infra, n 57 et s.).

er
§1 - Transfert de propriété des valeurs non cotées
49. Le nouveau principe est clair, mais il engendre l'incertitude sur plusieurs points. De surcroît, il n'est
curieusement pas encore entré en vigueur.

A - Principe
50. Le transfert de propriété de valeurs non cotées résulte de leur inscription au compte de l'acheteur, dans
des conditions fixées par décret en Conseil d'État. Ce critère présente plusieurs avantages. Il énonce
clairement le critère du transfert de propriété des valeurs non cotées, gage d'une plus grande sécurité
juridique. Il est de meilleure qualité car il est plus objectif que l'accord des parties dont la preuve, en la
matière, est source de contentieux. Il peut être généralisé, comme nous le verrons, quel que soit le nombre
de valeurs cédées, même en cas de vente en bloc. Enfin il fait coïncider la date du transfert de propriété et
celle de l'opposabilité de ce transfert à l'émettrice, ce qui permet, notamment, d'éviter les litiges portant sur
l'attribution du « coupon » de l'exercice lorsque les parties n'ont rien prévu à ce sujet. La solution nouvelle
issue de l'ordonnance du 24 juin 2004 soulève cependant l'incertitude à divers égards.

B - Incertitudes
51. Caractère impératif ou supplétif de la règle nouvelle. - Le transfert de propriété des valeurs
mobilières peut-il être conventionnellement fixé par référence à un critère différent de l'inscription au compte
de l'acquéreur ? Cette question renvoie au caractère, impératif ou supplétif, de la règle nouvelle. En faveur
du caractère obligatoire, on peut penser à invoquer la rupture avec le principe du consensualisme que
marque l'ordonnance. Mais cette rupture aboutit-elle à une mise à l'écart ? L'affirmer serait excessif car si
l'ordonnance pose un principe nouveau, elle n'interdit pas aux parties de convenir de modalités différentes,
d'autant qu'en la matière aucun intérêt supérieur n'est en cause : les cessions ici envisagées ne concernent
que les valeurs non cotées, elles n'affectent donc pas les marchés financiers et les conventions conclues
entre les parties au sujet du transfert de propriété ne peuvent pas troubler le fonctionnement de ceux-ci. La
convention de cession conclue entre le vendeur et l'acheteur pourrait donc parfaitement retenir un autre
critère du transfert de propriété que l'inscription au compte de l'acquéreur. À cet effet, l'ANSA, dans une
lettre du 16 décembre 2004 au ministre de la Justice, recommande d'utiliser la formule, généralement
o
pratiquée, d'ordre de mouvement (correspondant à la norme AFNOR n NF K 12-500, déc. 2001), pour porter
à la connaissance de la société émettrice la date choisie par les parties pour le transfert de propriété. Une
rédaction a été suggérée pour être intégrée dans le futur décret, selon laquelle « l'inscription au compte de
l'acheteur est réputée faite à la date fixée par la convention entre les parties, dès lors que cette date a été
notifiée à la société émettrice en temps utile, par une mention apposée sur l'ordre de mouvement »
o
(Brochure ANSA 2005, n 196 : La réforme du régime des valeurs mobilières, difficultés et solutions, p. 151).
Dans la logique de cette proposition, il pourrait être ajouté que le critère de l'inscription au compte de
l'acheteur s'appliquerait subsidiairement, à défaut de précision figurant sur l'ordre de mouvement.

ACTUALISATION
51. Ordre de mouvement. - Un ordre de mouvement délivré par le cédant à la société émettrice ne
constitue pas un titre au sens de l'article 1282 du code civil. Le juge ne peut pas se substituer aux
parties pour leur imposer une méthode de détermination du prix qui n'avait pas recueilli leur accord
o
(Com. 12 févr. 2008, n 06-18.414 , Dr. sociétés 2008, Comm. 68, note Coquelet).

52. Autre difficulté, concernant la preuve : le transfert de propriété des valeurs mobilières peut-il désormais
être prouvé autrement que par l'inscription ? Celui qui, par exemple, aura fait annuler une cession d'actions,
rétablissant ainsi sa qualité de propriétaire des titres, a-t-il encore une chance de prospérer dans une action
en revendication contre la personne au nom de laquelle la valeur est inscrite ? La preuve contre l'inscription
est-elle admissible ? Avant la réforme du 24 juin 2004, lorsque la personne inscrite en compte n'était pas le
vrai propriétaire des titres, la jurisprudence faisait prévaloir la situation juridique véritable (Cass. com.
o o
24 janv. 1989, Bull. civ. IV, n 39 ; 23 nov. 1993, Bull. civ. IV, n 431, Bull. Joly 1994.93, obs. D. Lepeltier,
o o
Banque et droit 1994, n 35, p. 20, obs. F. Peltier, Petites affiches 1996, n 54, p. 9, note H. Causse ;
o re
22 févr. 1994, RJDA 1994, n 812 ; Cass. 1 civ. 28 nov. 1995, Dalloz Affaires 1996.74 ; V. égal. P. LE
o
CANNU, op. cit., n 1033, p. 622 ; Conseil national du crédit et du titre, Problèmes juridiques liés à la
dématérialisation des moyens de paiement et des titres, Rapport mai 1997, p. 123 et 127, cité in RD
bancaire et bourse août-sept. 1997.167 et 168, obs. M. Germain et M.-A. Frison-Roche ; J. MESTRE et
o
D. VELARDOCCHIO, Lamy Sociétés commerciales, 2003, n 4085). L'inscription en compte ne valait pas titre
de propriété, mais seulement une présomption de propriété au bénéfice du titulaire. Pour la Cour de
cassation et une partie de la doctrine, cette présomption pouvait être renversée par la preuve contraire
o
(Cass. com. 10 juin 1997, Aubertin, préc. supra, n 46 ; V. égal. dans le sens d'une présomption simple, J.-
J. DAIGRE, note préc. sous cet arrêt ; G. RIPERT et R. ROBLOT, par M. GERMAIN et Ph. DELEBECQUE, op.
o o
cit., n 1794 ; Cass. com. 22 oct. 2002, n 98-22.772 , D. 2003, somm. 1225, obs. A. Reygrobellet ,
JCP, éd. E, 2003.398, note A. Denis-Fatôme, RTD com. 2003.324, obs. J.-P. Chazal et Y. Reinhard , Rev.
o
sociétés 2003.511, note M. Dubertret , RD bancaire et financier 2003, n 42, obs. H. Le Nabasque, Bull.
Joly Bourse 2003.43, obs. Ph. Goutay et E. Luyton). Selon une autre opinion, la présomption était au
contraire irréfragable. L'inscription constituait la preuve complète et inattaquable du droit de propriété
e
(C. HOUPIN et H. BOSVIEUX, Traité général des sociétés civiles et commerciales, t. I, 7 éd., 1935, Adm. du
o
Journal des notaires et avocats, n 452 ; J. et E. ESCARRA et J. RAULT, Traité théorique et pratique de droit
o
commercial, t. 3, Sociétés par actions, 1955, Sirey, n 1281 ; D. R. MARTIN, De la nature corporelle des
valeurs mobilières [et autres droits scripturaux], D. 1996, chron. 47 ). Dans cette conception, l'inscription
est plus qu'un moyen de preuve, davantage même que le seul mode de preuve admissible. La règle de
preuve aboutit en quelque sorte à l'édiction d'une règle de fond : l'impossibilité de combattre l'inscription
équivaudrait à donner à cette formalité une fonction acquisitive de propriété. C'est ce glissement que semble,
à première vue, consacrer le nouvel alinéa 9 de l'article L. 228-1 du code de commerce. L'inscription en
compte serait aujourd'hui devenue la « forme » imposée pour rendre le transfert de propriété effectif. Le
respect de cette forme permettrait au titulaire inscrit de résister à toute action en revendication. Une telle
analyse modifierait profondément la nature du contrat de cession d'actions. En effet, si l'inscription
conditionne le transfert de propriété de valeurs mobilières - qui est l'objet même du contrat - la cession de
valeurs mobilières ne devient-elle pas un contrat formel qui se formerait litteris, par une écriture, une
inscription en compte ?

ACTUALISATION
52. Possession de bonne foi des actions. - Aucun registre des transferts de titres n'avait été tenu au
sein de la société lors de la cession des titres litigieux, ce dont il résultait qu'aucune présomption de
propriété de titre ne pouvait être retenue, la cour d'appel a admis la possession de bonne foi des actions
o
(Com. 5 mai 2009, n 08-18.165 , D. 2009. AJ 1415 et p. 2723, obs. Delebecque ; Rev. sociétés
o
2009. 580, obs. Dubertret ; Dr. sociétés 2009, n 137, obs. Hovasse).

53. Critique. - Un tel raisonnement conduit sans doute trop loin. D'abord, l'inscription ne crée pas le droit
de propriété. Ainsi, ce n'est pas parce qu'une personne est inscrite en compte comme détenteur d'une action
cotée qu'il est permis de dire qu'elle est nécessairement propriétaire du titre. Il se peut très bien, comme le
permet la loi (C. com., art. L. 228-1, al. 7), que cette personne ne détienne les titres que pour le compte
d'une autre (exemple : le client non résident en France d'un prestataire de service d'investissement) qui en
est la véritable propriétaire. Ensuite, l'ordonnance ne subordonne pas la conclusion du contrat de cession
d'actions à l'inscription. Elle dispose seulement que le transfert de propriété « résulte » de l'inscription des
valeurs mobilières au compte de l'acheteur. La transmission de la propriété est la conséquence de
l'inscription. Le défaut (ou le retard) d'inscription empêche (ou diffère) le transfert de propriété mais
n'empêche nullement que le contrat de vente d'actions soit formé. On peut donc poser que le nouvel article
L. 228-1 du code de commerce dissocie la conclusion de la vente et le transfert de propriété, et institue ainsi
une nouvelle dérogation formelle au principe du transfert de propriété opéré par le seul effet du contrat
(principe déjà bien écorné d'ailleurs : Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et P.-Y. GAUTIER, Les contrats spéciaux,
o
2004, Defrénois, n 252, p. 192).

54. Cependant, ce nouveau critère n'est pas encore applicable, faute de parution du décret fournissant les
o
précisions voulues (le décret n 2005-112 du 10 février 2005, texte d'application de l'ordonnance du 24 juin
2004, est totalement muet sur la question).

C - Maintien du système antérieur


55. Mais le nouveau régime légal n'est-il pas radicalement différent de l'ancien, ce qui pourrait s'opposer au
maintien en vigueur du système ancien ? La réponse est négative. Le critère que prévoit l'ordonnance du
24 juin 2004 « n'est pas directement contraire aux règles conventionnelles et jurisprudentielles antérieures ;
par conséquent jusqu'à la publication du décret, les règles antérieures s'appliquent » (Brochure ANSA 2005,
o
n 196, p. 151, préc.). En attendant la publication du décret, il convient donc de continuer à appliquer le
système ancien. Il repose sur les règles suivantes : la cession de valeurs mobilières s'analyse en une cession
de créance, donc en une vente ; elle n'a à respecter aucune forme particulière pour sa validité ; en
conséquence, le transfert de propriété s'opère par le seul effet du contrat, lequel résulte lui-même du seul
consentement des parties (C. civ., art. 1583). La jurisprudence, en général, appliquait ces principes au
o
transfert de valeurs mobilières (Cass. com. 22 nov. 1988, arrêt Korzilius, Bull. civ. IV, n 322, Bull. Joly
o o
1989.84 ; 23 nov. 1993, Bull. civ. IV, n 431, Banque et droit 1994, n 35, p. 20, obs. F. Peltier, Bull. Joly
o
1994.93, obs. D. Lepeltier, Petites affiches 1996, n 54, p. 9, note H. Causse ; 22 févr. 1994, RJDA 1994,
o
n 812).

56. En réalité, ces solutions n'étaient pas totalement fondées. En effet, le principe du transfert solo consensu
n'est applicable qu'aux corps certains et non aux choses de genre. Le transfert de propriété portant sur des
valeurs mobilières, choses de genre, était donc normalement en dehors de son champ d'application, sauf
dans le cas d'une cession en bloc d'une ligne de valeurs de même nature, issues du même émetteur et
inscrites au nom du même titulaire. Alors, le retour à la règle consensualiste était autorisé car une telle ligne
constitue un bloc individualisé et donc un « corps certain » au sens de l'article 1586 du code civil
e
(V. F. COLLART-DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 7 éd., 2004, Dalloz,
o o
n 133 ; Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et P.-Y. GAUTIER, Les contrats spéciaux, op. cit., n 170 et 251. – Une
illustration est donnée dans l'arrêt Korzilius où les cédants avaient cédé l'intégralité des titres dont ils étaient
o
propriétaires ; pour une autre application, V. Cass. com. 13 févr. 1996, Bull. civ., n 46, Rev.
sociétés 1996.297, note L. Faugerolas ). On pouvait donc penser que, en dehors de ce cas particulier,
re
l'accord des parties ne suffisait pas. Au moins deux arrêts de la Cour de cassation (Cass. 1 civ. 27 oct.
o o
1993, Bull. civ. I, n 299 ; 6 mars 1996, Bull. civ. I, n 119, RD bancaire et bourse 1997.238, obs.
M. Germain et M.-A. Frison-Roche, JCP, éd. N, 1997, prat. 4140, obs. R. Le Guidec) et le Conseil national du
crédit et du titre (Problèmes juridiques liés à la dématérialisation des moyens de paiement et des titres,
o
rapport mai 1997, p. 128, préc. supra, n 52) ont retenu, à notre avis à juste titre, que le transfert de
propriété des titres devait être retardé jusqu'à leur individualisation, laquelle n'était réellement établie que
o
par virement au compte de l'acquéreur (H. HOVASSE, Dr. sociétés 1994, n 41). Or c'est exactement la
re o
solution que retient l'ordonnance du 24 juin 2004… (V. déjà Cass. 1 civ. 27 oct. 1993, Bull. civ. I, n 299).

§ 2 - Transfert de propriété des valeurs cotées et valeurs assimilées


57. Avant d'exposer les règles applicables à cette hypothèse, il est utile de rappeler sommairement les
conditions et règles de formation des transactions sur les marchés réglementés, celles-ci ayant un caractère
impératif. En premier lieu, tout investisseur qui souhaite céder ou acheter des valeurs admises sur un
marché réglementé doit, à peine de nullité de l'opération, agir sur le marché en vertu du principe de
concentration obligatoire des ordres. Ce principe est censé assurer le plus juste cours, puisque toute l'offre
doit rencontrer toute la demande. Sous l'influence européenne (Direct. Marchés d'instruments financiers
o o o o
n 2004/39/CE du 21 avr. 2004, art. 4-1, 7 , préc. supra, n 3), il a été récemment aboli (L. n 2005-811 du
20 juill. 2005, art. 5), mais il restera néanmoins provisoirement en vigueur jusqu'à la transposition en droit
français de la directive précitée, laquelle doit intervenir par ordonnance au plus tard le 20 janvier 2007
(C. mon. fin., nouv. art. L. 421-12 et L. 421-13). En second lieu, l'investisseur ne peut agir seul et
directement, à peine de nullité des opérations (C. mon. fin., art. L. 421-6) : il doit donner un ordre à un
intermédiaire habilité afin que celui-ci procède pour son compte à l'achat ou à la vente de valeurs mobilières.
L'intermédiaire entre en relation, directement ou par l'entremise d'un sous-dépositaire, avec le dépositaire
central du titre concerné. L'intermédiaire habilité - du moins s'il adhère à une chambre de compensation d'un
marché réglementé - agit comme commissionnaire ducroire et supporte les conséquences du défaut de la
contrepartie. Il garantit à son commettant, en fonction de l'ordre reçu (achat ou vente), la livraison ou le
paiement des titres (Règl. général de l'AMF, art. 532-1 et 321-20 ; C. mon. fin., art. L. 533-5 ; CA Paris
o o
18 juin 1992, JCP, éd. E, 1994. I. 399, n 21, Dr. sociétés 1992, n 237, Bull. Joly Bourse 1993.25, obs.
H. De Vauplane). Pour faciliter le traitement informatisé et éviter les difficultés de compréhension d'ordres
mal formulés, les ordres sont standardisés et rangés par catégories différentes. Tous les ordres sont inscrits
dans une base de données informatique appelée « carnet d'ordres central » tenu dans les comptes d'un
dépositaire central. Le cours est déterminé par le système informatique de telle manière qu'il permette la
satisfaction du maximum d'ordres et, par là même, la conclusion du plus grand nombre de transactions. Les
transactions sont réalisées, à ce cours, par l'appariement de deux ordres de sens opposé, compatibles entre
eux, dans le « carnet d'ordres central ». Le donneur d'ordre qu'il soit à l'achat ou à la vente, normalement,
ne connaît pas et ne connaîtra jamais sa « contrepartie ». Le seul point commun entre acheteur et vendeur
est purement fortuit. Il résulte de ce qu'ils traitent au même moment la même valeur, aux mêmes
conditions, mais en sens inverse l'un de l'autre. Sur un marché réglementé, il y a seulement un croisement
« électronique » de deux manifestations de volonté. Une transaction négociée en bourse ne correspond donc
pas à la conception classique de la formation du contrat. Il n'y a pas de rencontre des volontés des parties, ni
d'échange des consentements. Acheteurs et vendeurs ne conviennent pas d'obligations réciproques et
interdépendantes. Ils expriment deux manifestations de volontés unilatérales, l'une pour acheter et l'autre
pour vendre, compatibles et de sens inverse. Une fois « objectivés », les consentements/ordres se suffisent à
eux-mêmes pour produire les effets de droit voulus, dès lors qu'ils mentionnent les précisions nécessaires au
système central pour qu'il puisse « techniquement » les apparier (M.-A. FRISON-ROCHE, Remarques sur la
distinction de la volonté et du consentement en droit des contrats, RTD civ. 1995.573 ).

ACTUALISATION
57. Date du transfert de propriété librement convenue. - Selon l'article L. 228-1, al. 9, dernière
phrase, du code de commerce, le transfert de propriété résulte de l'inscription des valeurs mobilières au
compte de l'acheteur, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État (V. C. com., art. R. 228-10,
o
réd. Décr. n 2006-1566 du 11 déc. 2006, art. 60) d'où il résulte que l'inscription au compte de
l'acheteur est faite à la date fixée par l'accord des parties et notifiée à la société émettrice. HOVASSE,
o
Dr. sociétés 2007, n 31.

58. Critère du transfert de propriété. - Le transfert de propriété des valeurs mobilières émises par les
sociétés commerciales et de toutes les valeurs mobilières équivalentes émises sur le fondement de droits
étrangers, lorsqu'elles sont admises aux opérations d'un dépositaire central ou livrées dans un système de
règlement et de livraison d'instruments financiers mentionné à l'article L. 330-1, résulte de leur inscription au
compte de l'acheteur, à la date et dans les conditions définies par le règlement général de l'AMF. C'est ce qui
se déduit de la combinaison des articles L. 228-1, alinéa 9, première phrase, du code de commerce et
L. 431-2 du code monétaire et financier, ce dernier texte étant pris dans sa rédaction modifiée par
o
l'ordonnance n 2005-303 du 31 mars 2005, telle qu'elle a été modifiée par l'article 7, II, de la loi de
o
ratification de l'ordonnance n 2005-811 du 20 juillet 2005. Sous le régime antérieur à ces textes, l'article
L. 431-2 du code monétaire et financier prévoyait deux régimes pour le transfert de propriété des valeurs
cotées : l'un valait pour toute transaction intervenant sur les marchés réglementés : le transfert résultait de
l'inscription en compte à une date définie par les règles de place ; l'autre s'appliquait aux opérations conclues
hors des marchés réglementés mais dénouées dans un système de règlement et de livraison prévu à l'article
L. 330-1 du code monétaire et financier (en pratique, il s'agissait des transactions portant sur les
instruments de taux d'intérêt) : le transfert de propriété était alors réalisé au moment du dénouement des
opérations. Désormais le critère du transfert de propriété n'est plus fonction du marché sur lequel les titres
sont admis aux négociations ou du « lieu » ou plutôt des moyens des négociations, mais de l'admission des
titres aux opérations d'un dépositaire central ou de leur livraison dans un système de règlement et de
livraison mentionné à l'article L. 330-1 précité. Peu importe donc que les titres soient admis aux négociations
sur un marché réglementé (par exemple l'Eurolist d'Euronext) ou aux négociations d'un autre marché (par
exemple des marchés non réglementés, comme le Marché libre et Alternext).

59. Modalités pratiques. - Selon la réglementation d'Euroclear France SA, gestionnaire du système de
règlement-livraison (C. mon. fin., art. L. 330-1 et L. 431-2, al. 4), le dénouement de l'opération intervient en
général à J + 3, dans les livres d'Euroclear France, alors que l'écriture d'inscription en compte pour les
transactions sur les marchés réglementés est passée le jour même de la négociation (J), ou au plus tard le
lendemain (J + 1). Désormais, l'écriture d'inscription en compte qui est passée le jour de la négociation ne
marquera plus la date du transfert de propriété. Ce ne sera plus qu'une écriture d'enregistrement de la
négociation. Elle n'acquerra le statut juridique d'inscription en compte valant transfert de propriété qu'à la
date de dénouement réel et irrévocable dans les livres du dépositaire central ou des teneurs de compte
conservateurs intermédiaires. Le dénouement aura lieu à la date à laquelle les ordres symétriques d'achat et
de vente étant suffisamment provisionnés, le système procédera au virement des titres et des espèces sur
les comptes des participants, c'est-à-dire à J + 3. Selon les conditions particulières que fixera le règlement
général de l'AMF, l'acheteur ne deviendra propriétaire des titres que s'il en a complètement payé le prix au
moment du « dénouement irrévocable de l'opération » (le paiement, comme la livraison, sont ainsi la
conséquence du dénouement de l'opération, alors que paiement et dénouement sont étymologiquement sur
le même plan car le sens originaire du terme « dénouer » qui vient du latin solvere, est payer, acquitter ses
e o
dettes : CARBONNIER, Droit civil, Les obligations t. 4, 22 éd., PUF, n 327). Dans l'intervalle entre J (date
de la négociation) et J + 3 (date du paiement du prix et du dénouement), l'acheteur détiendra un droit de
créance à l'encontre de son intermédiaire (droit de se faire livrer une chose et droit d'en recevoir la
propriété) et aura à sa charge une dette de prix de la transaction. Corrélativement, le vendeur sera créancier
du prix, créance qui sera exigible au dénouement. Dès avant cette date, cependant, les titres seront sortis du
patrimoine du vendeur. C'est l'intermédiaire qui reçoit de la loi la qualité de propriétaire jusqu'au paiement
complet du prix des titres par l'acquéreur. Le transfert de propriété au profit de l'intermédiaire lui permet
d'obtenir du crédit pour financer les importantes immobilisations de fonds non rémunérés requises par le
système de règlement-livraison. La propriété des titres lui donne la possibilité de les offrir en garantie
(notamment par la technique dite de la « pension livrée ») aux banques afin de se procurer les ressources de
financement nécessaires. Elle représente aussi une garantie en cas de défaillance des clients auxquels il a
avancé des fonds et un moyen de minimiser le risque de propagation de la défaillance d'un participant à
d'autres qui mettrait en péril l'équilibre du marché tout entier (risque « systémique »).

60. Raisons de la réforme. - L'inconvénient majeur de l'ancien système était lié au fait que la propriété
des titres était transférée à l'acquéreur avant le règlement-livraison des titres. La propriété était transférée à
J, alors que le règlement-livraison intervenait généralement à J + 3. Or, le compte de l'intermédiaire habilité
du vendeur auprès d'Euroclear France pouvait être insuffisamment crédité, parce que cet intermédiaire ne
disposait pas du nombre suffisant de titres, faute de liquidité du marché ou de disponibilités de trésorerie.
Pire, une décision de redressement ou de liquidation judiciaire de l'intermédiaire, ou de l'acheteur ou du
vendeur lui-même, était à craindre. Un mécanisme résolutoire était bien prévu par la loi en cas de défaut de
livraison des titres entre intermédiaires, mais il était lourd et injuste pour l'acquéreur et pour tous les clients
de l'intermédiaire défaillant. En effet, l'insuffisance de la provision qui figurait au compte de l'intermédiaire
chez Euroclear France entraînait, à hauteur du manque constaté, la radiation de plein droit, nonobstant toute
disposition législative contraire, des inscriptions existant au nom des acheteurs des titres concernés. Les
acheteurs perdaient ainsi rétroactivement la propriété de ces titres (C. mon. fin., ancien art. L. 431-2, al. 2),
préjudice qui n'était pas indemnisable. En effet, la seule possibilité qu'ouvrait ce texte aux acheteurs
dépossédés était d'exercer un « recours ». Or un recours contre l'intermédiaire chargé de l'exécution de leurs
ordres (C. mon. fin., art. L. 421-11) était certes possible puisque ce dernier est garant ducroire de la
livraison des instruments financiers achetés (Règlement général de l'AMF, art. 321-20), mais peu efficace en
cas de liquidation judiciaire.
61. L'existence de règles communes aux diverses valeurs mobilières ne saurait masquer la spécificité des
règles régissant chacune des catégories de valeurs mobilières.

Chapitre 2 - Droit spécial des valeurs mobilières

62. Actions et obligations. Points de convergence. - Historiquement les deux sortes de titres sont très
e
liées. Au XIX siècle, « actions et obligations concourent au capital social, en dépit des différences de
caractéristiques de chacune… ; les dirigeants de société lançaient leurs emprunts obligataires auprès des
actionnaires de la société pour augmenter leur capacité de financement et contourner diverses contraintes
pesant sur les augmentations de capital » (A. COURET et H. LE NABASQUE, Valeurs mobilières et
o
augmentations de capital, op. cit., n 17). C'était le temps où le capital-obligations était perçu comme une
source de financement venant en appoint au capital-actions (B. OPPETIT, article préc., in L'Europe et le droit
o
des valeurs mobilières, Banque et droit 1991, n hors série). Cette conception est restée vivace pendant
e
longtemps : au milieu du XX siècle, une émission obligataire était encore analysée comme un « complément
de capital » (Cass. crim. 15 juin 1954, JCP 1955. II. 724, note D. B.). Le point commun essentiel entre
action et obligation est qu'elles sont toutes deux la contrepartie d'un transfert temporaire de richesse à la
société. Celle-ci doit rembourser le capital social comme l'emprunt obligataire, l'un et l'autre étant des dettes
o
de la société (V. supra, n 21). La situation des obligataires se rapproche en fait de celle des actionnaires.
Les uns et les autres dépendent entièrement sur le plan économique, pour leur rémunération et leur
remboursement, des revenus et du patrimoine de l'émetteur. Actions et obligations doivent pouvoir circuler
facilement et sont des droits de créance négociables (V. H. LE NABASQUE, Les actions sont des droits de
créance négociables, Mélanges Y. Guyon, 2003, Dalloz, p. 671). À la différence de l'obligation, qui renferme
des prérogatives essentiellement monétaires, l'action comporte certes des droits politiques, au premier rang
desquels le droit de voter aux assemblées générales, donc de participer à la prise des décisions sociales et de
contrôler par ce moyen le respect par la société des droits du porteur. Mais, outre le fait que l'obligataire
peut aussi voter aux assemblées de masse, le droit de vote en assemblée a perdu une part sensible de sa
signification. En droit, il peut être supprimé ou aménagé dans le cas des nouvelles actions de préférence
créées par l'ordonnance du 24 juin 2004 (C. com., art. L. 228-11). En fait, le taux de participation aux
assemblées générales des sociétés est si faible et les pouvoirs « en blanc » accordés aux dirigeants sociaux,
notamment dans les grandes sociétés cotées, si nombreux que les personnages les plus puissants aux
assemblées sont souvent très minoritaires en capital. Ce phénomène est trop bien connu pour qu'il soit
nécessaire d'insister davantage : non seulement le droit de vote a été « désacralisé », mais, bien plus, il est
devenu dans une assez large mesure - et nonobstant la règle selon laquelle il est « hors du commerce
juridique » au sens des articles 1128 et 1598 du code civil - une « marchandise » dont la valeur se calcule et
est en permanence évaluée par le marché. En veut-on une preuve supplémentaire (nous devons l'anecdote à
l'aimable communication du professeur D. SCHMIDT) : voilà une personne qui achète des actions d'une
société cotée pour les revendre aussitôt à terme au même prix. Pourquoi cette opération bizarre ? Pour
pouvoir, entre temps, voter en assemblée générale ordinaire de la société émettrice des actions en vue
d'approuver une OPA la visant car elle détient aussi des actions de l'initiatrice de l'OPA. En réalité, cette
personne acquiert des droits de vote sans bourse délier, dans le cas d'espèce. Le nouveau visage du droit de
vote est la conséquence de l'affaiblissement de son rôle dans la protection des droits de l'actionnaire.
Classiquement, le droit de vote était conçu comme le moyen pour l'actionnaire de contrôler le respect par la
société de ses droits pécuniaires nés de l'apport (Cass. req. 23 juin 1941, Journ. soc. 1943.209, note R. D. ;
Cass. com. 9 févr. 1999, arrêt Château-d'Yquem, Bull. Joly 1999.566, note J.-J. Daigre). L'évolution du droit
positif qui permet désormais l'émission d'actions de préférence « avec ou sans droit de vote », que nous
avons évoquée, fait douter que le droit de vote ait encore un si grand rôle dans la défense des droits de
l'actionnaire. La tendance contemporaine semble être de privilégier un système de défense qui repose moins
sur le droit de vote aux assemblées que sur le contrat, c'est-à-dire les statuts ou les pactes d'actionnaires.
L'ordonnance du 24 juin 2004 ne laisse-t-elle pas aux statuts le soin de prévoir les formes de protection
nécessaires au profit des investisseurs qui acceptent de souscrire des actions de préférence privées du droit
de vote ?

63. Points de divergence. Valeurs nouvelles. - Mais les différences entre actions et obligations restent
toutefois essentielles et profondes. Ainsi les actions ne sont rémunérées que s'il existe des bénéfices et si les
associés décident de les distribuer, alors que les obligations sont en général dispensées d'aléa et assurées
d'un intérêt fixe prédéterminé, payable même en période déficitaire (intérêt qui peut être réévalué en
o
fonction du niveau général des prix depuis la loi n 98-546 du 2 juillet 1998, par exception aux art. L. 112-1
et s. c. mon. fin.). En outre, le remboursement des obligations est prioritaire ; celui des actions vient
nécessairement après : les actions sont des créances ultimes remboursables après toutes les autres, leur
rang, dit-on parfois, est « hypo-chirographaire ». Enfin les actions sont des créances non sécurisées, à la
différence des obligations qui peuvent être assorties d'une garantie ou sûreté. Aujourd'hui, en raison de la
sophistication croissante des produits financiers, les différences sont devenues, il est vrai, moins tranchées.
Ainsi la dette peut être infiniment subordonnée, à condition cependant que le débiteur conserve un rang
supérieur à celui de l'actionnaire (V. C. com., art. L. 228-97). Ce déclassement est assez fréquent en
pratique pour les titres participatifs, les titres subordonnés à durée indéterminée (TSDI) et les obligations à
haut rendement (high yield bonds) qui offrent un taux de rémunération élevé en raison de la situation
financière et de la médiocre notation de leur émetteur par les agences de rating. Elles procurent un
financement « de dernier recours » pour des entreprises lorsque les crédits bancaires ne sont plus
accessibles et que les augmentations de capital sont impossibles, inopportunes ou trop coûteuses.

64. L'ordonnance du 24 juin 2004 range les valeurs mobilières en trois ensembles, qui formeront la matière
des trois sections successives du présent chapitre : les titres donnant accès immédiat au capital (actions,
actions de préférence, sans mentionner les titres interdits d'émission pour l'avenir et qui ont vocation à
s'éteindre avec le temps comme les certificats d'investissement, les actions de priorité et les actions à
dividende prioritaire sans droit de vote), les titres de créances (obligations et valeurs mobilières ouvrant droit
à attribution de titres de créance, titres participatifs et titres subordonnés) et les valeurs mobilières donnant
accès différé au capital (obligations avec bons de souscription d'actions, obligations convertibles,
remboursables ou échangeables en actions, bons de souscription d'actions…).
re
Section 1 - Titres donnant un accès immédiat au capital

65. Fonds propres. - Les titres de capital donnant immédiatement accès au capital ouvrent droit à certaines
prérogatives en cours de vie sociale, mais ne sont remboursables, indépendamment de cas particuliers
(amortissement ou réduction du capital non motivée par des pertes), qu'à la dissolution de la société si les
opérations de liquidation permettent de dégager un actif net suffisant pour rembourser les apports. Pour
exprimer cette idée de permanence de la mise à disposition, les fonds apportés et rémunérés par ces titres
sont appelés « fonds propres » ou « capitaux propres ». L'expression, à strictement parler, est une
exagération puisque la société reste juridiquement comptable de la valeur des apports envers ses associés.
Cependant, elle est assez réaliste car les porteurs de titres de capital n'ont qu'une créance de tout dernier
rang à son encontre.

66. Évaluation des actions. - Pour déterminer la valeur vénale réelle, différentes méthodes d'évaluation
sont envisageables. Elles peuvent se ranger en deux catégories principales : les méthodes prônant une
approche analogique et celles reposant sur une approche intrinsèque. L'approche analogique conduit à
prendre en compte des facteurs extérieurs à l'entreprise et à raisonner à partir de transactions récentes
comparables sur les titres d'entreprises similaires. Elle peut aussi consister à isoler un échantillon de sociétés
du même secteur économique pour lesquelles les analyses financières disponibles permettent de déterminer
des critères d'évaluation en fonction de l'activité et de la rentabilité. L'approche intrinsèque consiste à
considérer « de l'intérieur » la société à évaluer. Elle peut ainsi s'attacher à calculer le volume des « flux
futurs de trésorerie » (discounted cash flow) que permet de dégager l'exploitation. Ou retenir le prix auquel
se sont antérieurement réalisées des cessions de titres semblables (CA Paris, 16 déc. 1999, Sovabail, JCP,
éd. E, 2000.133, note A. Viandier, D. 2000.109, obs. M. Boizard , Bull. Joly Bourse 2000.135, note
L. Faugerolas ; 13 nov. 2001, Expand, D. 2002, AJ 574, obs. M. Boizard , AJ 1663, obs. S. Thomasset-
Pierre et AJ 1745, obs. Y. Reinhard , Bull. Joly Bourse 2002.114, note A. Pietrancosta, Banque et droit
o
2001.26, obs. H. de Vauplane et J.-J. Daigre, Dr. sociétés 2002, n 72, obs. Th. Bonneau ; 13 sept. 2003,
inédit). Une approche comptable sert de base à toute évaluation.

67. Valeur « mathématique ». - C'est a priori l'approche qui devrait permettre de mesurer au plus près la
richesse de l'émetteur. N'est-elle pas celle qui permet d'obtenir la (plus) juste valeur, tout au moins aux
yeux des juristes, sensibles au vieux et familier débat du juste prix ? On peut cependant en douter. D'abord,
il est des éléments ayant une valeur économique certaine qui ne figurent habituellement pas dans les
comptes, faute sans doute de pouvoir être évalués, séparément et objectivement, en fonction des avantages
économiques futurs qu'ils permettent de générer : qualité du réseau de distribution ; importance des liens
d'affaires tissés par l'entreprise ; savoir-faire ; taux de rentabilité du capital investi et augmentation des
parts de marché détenues. S'il est souhaitable de prendre en considération tous ces éléments, leur
évaluation, parfois délicate, peut donner lieu à d'amples divergences entre experts et leur caractère subjectif
et négocié entraîner un « surprix » important (goodwill) de l'acquisition. Ensuite, il est parfois avancé que la
véritable valeur serait introuvable. Pis, elle n'existerait pas : « Les modèles… utilisés par les auditeurs
reposent sur des fictions ; ils sont des constructions d'équations à inconnues multiples, bâties sur le sable
d'hypothèses invérifiables » (A. BERNARD, À propos de la guerre du chiffre et du droit. Comment les
comptables étendent leur territoire professionnel, D. 2004.1580, spéc. p. 1584 ).

68. Cours de bourse. - Il est naturel, si le titre est coté, que soit pris en considération l'accueil que réserve
la bourse à l'entreprise considérée ou, éventuellement, le cours des sociétés cotées concurrentes dans la
perspective d'une évaluation par analogie avec des entreprises comparables (V. J. STOUFFLET et J.-
P. DESCHANEL [sous la direction de], Études sur le cours de bourse, 1997, Economica, p. 38 ;
o
M. NUSSENBAUM, La formation des cours boursiers, RJ com., n spéc. nov. 2003, in Le droit boursier en
mouvement, colloque « Droit et commerce », Chantilly, juin 2003, p. 83). Pour le juge de l'impôt (E. LE
DOLLEY, La valeur vénale des titres, RD bancaire et financier 2002.288 et s.), le cours de bourse « doit être
o
réputé exprimer la valeur vénale réelle des titres » (CE 27 mars 1991, n 81119 et 84788, Dr. fisc. 1991,
comm. 1705, concl. C. Nouraï : « Si les actions d'une société sont cotées en bourse, leur valeur ne peut être
fixée qu'en fonction des cours constatés »). Le cours de bourse résulte de la confrontation de toutes les
offres et de toutes les demandes portant sur le titre concerné. Il est censé intégrer toutes les informations
disponibles concernant l'évolution de la valeur et les perspectives de la société émettrice ainsi que les
spéculations des opérateurs sur l'avenir du titre concerné et de son émetteur. Le cours dépend notamment
des dividendes espérés et de la prime de risque que l'investisseur exige pour placer son épargne en actions
plutôt qu'en obligations. Des décotes se justifient parfois (actions de holding, actions faisant l'objet d'un
engagement de conservation et qui sont par conséquent temporairement inaliénables…) (V. P. RAIMBOURG,
Évaluation des titres de capital, Dalloz action, Ingénierie financière, fiscale et juridique, 2005).

69. Actif net réévalué. - Une autre forme d'approche de la valeur de l'action est de se référer au prix global
susceptible d'être obtenu, dans une situation de jeu normal de l'offre et de la demande, de la vente des actifs
de la société. Cette valeur, parfois désignée de manière significative « valeur à la casse », correspond au prix
pouvant être retiré de la cession de tous les actifs, après déduction des charges afférentes aux cessions
(impôts, charges sociales, rémunération des intermédiaires ou liquidateurs…).

70. Combinaison des méthodes. - Dans les analyses prospectives, appelées business plans, qui anticipent
chiffre d'affaires, marges et résultats, les différentes méthodes exposées ci-dessus sont souvent
combinées entre elles. La mise en œuvre de plusieurs méthodes est même obligatoire pour qu'une offre
publique soit déclarée recevable (méthode multicritères). Mais l'exercice n'est probant que si les méthodes
retenues ne font pas double emploi et sont employées de bonne foi, sans usage excessif de moyennes et de
coefficients de pondération injustifiables destinés à accréditer une évaluation retenue a priori (pour une
critique très argumentée de l'appréciation par la cour d'appel de Paris, 6 avr. 2004, de l'indemnité versée par
France Télécom aux minoritaires de sa filiale Orange dans le cadre du retrait obligatoire visant les actions
Orange : V. D. SCHMIDT, note Bull. Joly Bourse 2005.180, spéc. 186).

71. Nouvelle classification des actions. - Les actions représentent par excellence les titres de capital.
Mais l'offre de titres de capital ne s'est pas limitée à elles. À côté des actions proprement dites, ont ainsi vu
le jour les actions de priorité (L. 16 nov. 1903), les actions à dividende prioritaire sans droit de vote
o o
(L. n 78-741 du 13 juill. 1978) et les certificats d'investissement (L. n 83-1 du 3 janv. 1983). Cependant
leur régime juridique était parfois incertain. Par exemple, on discutait de l'applicabilité aux actions de priorité
de la procédure d'approbation des avantages particuliers ; de même la qualité d'associé des titulaires
d'actions à dividende prioritaire sans droit de vote était débattue. Cela contribuait à décourager leur
utilisation. L'ordonnance du 24 juin 2004 les supprime pour l'avenir et s'efforce, par rachat ou conversion, de
faciliter la disparition des titres en circulation qu'elle qualifie de titres « en voie d'extinction ». Elle range
désormais les titres de capital en deux catégories : les actions (qu'elle ne qualifie pas d'« ordinaires », mais
qui le sont devenues avec la réforme) et les actions de préférence, le régime applicable aux premières valant
en principe pour les secondes, mais non l'inverse. Ce qui conduit à distinguer les règles générales applicables
o o
aux actions (V. infra, n 72 et s.) et les règles propres aux actions de préférence (V. infra, n 95 et s.).

er
Art. 1 - Règles générales applicables aux actions

72. Généralités. - Introduites en droit français par la loi du 24 juillet 1867, les actions sont les valeurs
mobilières les plus anciennes. Aujourd'hui encore la très grande majorité des sociétés capables d'émettre des
valeurs mobilières n'émettent que des actions. L'action désigne un titre, transmissible par simple virement de
compte à compte, sans les formalités de la cession civile de créance, qui confère à son titulaire des droits
d'associé. Une opinion doctrinale ancienne devenue classique distinguant entre actionnaires bailleurs de
fonds et actionnaires de contrôle (RIPERT, Aspects juridiques du capitalisme moderne ; C. CHAMPAUD, Le
pouvoir de concentration de la société par actions, 1969, Sirey ; D. SCHMIDT, Les droits de la minorité dans
o
la société anonyme, 1969, Sirey, n 21), récemment revisitée (F.-X. LUCAS, Les actionnaires ont-ils tous la
qualité d'associé ? Brefs propos discursifs autour du thème de l'associé et de l'investisseur, RD bancaire et
financier 2002.216 ; Ph. REIGNÉ et Th. DELORME, Réflexions sur la distinction de l'associé et de
l'actionnaire, D. 2002, chron. 1330 ), met en doute que tout actionnaire soit nécessairement un associé. La
thèse part du constat que deux types de titulaires d'actions coexistent. D'un côté, il y a ceux, très peu
nombreux, qui se comportent en véritables « propriétaires » de l'entreprise, utilisent effectivement leurs
droits, notamment le droit de vote, et ont une influence véritable sur les décisions sociales. De l'autre se
trouvent les « gros bataillons » d'actionnaires, « consommateurs » de produits financiers, épargnants peu
aguerris et investisseurs plus ou moins avertis. Ces derniers sont certes dotés des mêmes droits que les
premiers, mais ils ne les utilisent pas. Il est vrai que, lorsqu'ils ne possèdent qu'un petit nombre d'actions et
n'occupent aucun poste de direction, ces actionnaires du second type se désintéressent de la gestion de
l'entreprise. Le voudraient-ils, d'ailleurs, qu'ils ne posséderaient pas les moyens juridiques d'exercer un
véritable contrôle de cette gestion. S'ils sont en désaccord avec l'orientation générale de la société, ils la
quitteront plutôt que de combattre la direction en place. Sociologiquement fondée, la distinction entre
associés véritables copropriétaires de l'entreprise sociétaire et actionnaires simples investisseurs ne fournit
cependant pas un critère opératoire pour l'application de régimes juridiques différents. Par ailleurs, la
présentation binaire exposée ci-dessus ne correspond pas à la réalité observée dans nombre de sociétés,
notamment dans les sociétés cotées, dans lesquelles il existe d'autres types d'actionnaires qui ne sont ni des
actionnaires bailleurs de fonds ni des actionnaires de contrôle, sans toujours relever de catégories assez
nettement tranchées pour justifier l'application de régimes juridiques différents. Ainsi les gestionnaires de
l'épargne collective (OPVCM), les « fonds de pension » (exemple : Calpers qui impose ses « tables de la loi »
dans les entreprises dans lesquelles il investit) et autres investisseurs de métier (exemple : Berkshire
Hathaway Inc., le fonds d'investissement de Warren Buffett) utilisent non seulement tous leurs droits
o er o
d'actionnaires, en particulier le droit de vote (la loi n 2003-706 du 1 août 2003 a ajouté un 8 nouveau à
l'art. L. 533-4 du c. mon. fin., disposant que les sociétés de gestion de portefeuille ont l'obligation d'exercer
les droits de vote attachés aux actions détenues par les OPCVM qu'elles gèrent dans les assemblées
d'actionnaires, sauf à devoir expliquer les motifs du non exercice du droit de vote), mais ils obtiennent aussi
lors de leur entrée, généralement minoritaire, au capital des prérogatives exorbitantes, statutaires ou non,
qui leur permettent d'échapper aux effets normaux de la règle de gouvernement majoritaire des sociétés par
actions (V. I. PARACHKÉVOVA, Le pouvoir de l'investisseur professionnel dans la société cotée, 2005, LGDJ).

73. Fonctions de l'action. - Les actions jouent un rôle fondamental sur différents plans. Comme la
monnaie, l'action « est à la fois une unité de mesure et un moyen de paiement » (R. LIBCHABER, Recherches
o
sur la monnaie en droit privé, 1992, LGDJ, n 17 et s.). Moyen de paiement, l'action apparaît comme un
moyen d'acquérir, par échange, des titres émis par d'autres sociétés. En émettant des actions, une société
créerait d'une certaine façon une monnaie privée, lui permettant de financer l'acquisition du contrôle d'autres
sociétés au moyen d'une fusion-absorption ou, lorsqu'elle est cotée en bourse, par offre publique d'échange.
L'action constitue aussi pour les dirigeants et les salariés de la société un moyen de rémunération
supplémentaire, notamment à travers les plans de stock-options et les plans d'épargne entreprise
(C. FREYRIA, Réflexion sur le plan d'épargne d'entreprise, Mélanges J. Derruppé, 1991, Litec, p. 205 ;
R. FOY, Plan d'épargne d'entreprise, J.-Cl. sociétés, Traité, fasc. 173-30 ; Caractères généraux du régime du
plan d'épargne d'entreprise, Dr. sociétés 1997.6 ; P. MAILLARD, L'épargne salariale après la loi du 19 février
2001, Revue Banque éd., 2002 ; Th. BONNEAU, L'acquisition de la qualité d'actionnaire par le salarié dans le
plan d'épargne d'entreprise, Bull. Joly 2005.29). Mais le caractère de monnaie de l'action ne saurait être
exagéré. La monnaie est en effet un bien, sélectionné par l'usage ou par la loi, donnant un pouvoir d'achat
universel, pour acquérir indifféremment tous les autres biens (J. CARBONNIER, Droit civil, t. 3, Les biens,
e o
19 éd., 2000, PUF, n 13). Tel n'est pas le cas des actions, qui ne peuvent servir de contrepartie que pour
certains usages limités. Par ailleurs, l'action est aussi une unité de mesure. Élément de la division du capital
social, l'action sert à répartir les droits, patrimoniaux et autres, entre les actionnaires. C'est notamment
l'étalon de mesure des droits de vote et donc de l'influence en assemblée dont dispose l'actionnaire, même si
cette fonction lui est quelque peu disputée aujourd'hui (P. LE CANNU, Les rides du capital social, in
A. COURET et H. LE NABASQUE [sous la direction de], « Quel avenir pour le capital social ? », 2004, Dalloz,
p. 3). La détention des actions permet de savoir à qui appartient le contrôle.

74. Notion de contrôle. - Les droits de vote procurés par les actions, s'ils sont suffisamment nombreux,
confèrent aux actionnaires qui les détiennent le pouvoir dans l'entreprise sociétaire. Ce pouvoir, dénommé
contrôle, n'est évidemment pas employé ici comme synonyme de surveillance ou de vérification a posteriori.
Il signifie la possibilité pour certains associés de déterminer, grâce aux droits de vote en assemblée qu'ils
possèdent, les décisions sociales et notamment les plus importantes d'entre elles, celles relatives à la
désignation et à la révocation des dirigeants sociaux. Le critère de la détention de la majorité du capital ne
doit cependant pas être le seul car nombreuses sont les sociétés cotées dont le capital n'est pas contrôlé.
Toute définition du contrôle doit faire une place à l'influence réelle des actionnaires, même non majoritaires
en voix, et prendre en considération l'éventualité d'actionnaires dissidents qui pourraient tenir les premiers
en échec. Le paragraphe I de l'article L. 233-3 du code de commerce oppose contrôle de droit, contrôle
conjoint et contrôle de fait. Le paragraphe II établit une présomption de contrôle lorsqu'un actionnaire
détient, directement ou indirectement, plus de 40 % des droits de vote (20 % des actions, si elles sont
assorties d'un droit de vote double) et qu'aucun autre actionnaire ne détient, directement ou indirectement,
une fraction supérieure à la sienne. Le paragraphe III de l'article L. 233-3 vise le contrôle conjoint.
o
75. Contrôle unipersonnel et contrôle conjoint. - 1 ) Contrôle unipersonnel. – Le contrôle unipersonnel
est la forme classique du contrôle. Il existe en cas de détention de la majorité des droits de vote à
o
l'assemblée générale de la société par une seule et même personne (art. L. 233-3, I, 1 ). Il y a également
contrôle quand une société peut disposer seule de la majorité des droits de vote dans la société émettrice en
regroupant ses propres voix et celles d'autres actionnaires en exécution d'un accord conclu avec eux
o
(art. L. 233-3, I, 2 ). Un tel accord caractérisera une action de concert entre les actionnaires intéressés dès
lors qu'il tend à l'exercice planifié des droits de vote en vue de permettre à l'un d'eux de disposer de la
majorité à l'assemblée pour, on s'en doute, déterminer une politique vis-à-vis de la personne morale. Le
texte ne vise ici que le contrôle détenu par un seul actionnaire et non un contrôle exercé à plusieurs, suivant
l'ancienne conception qui voulait que le contrôle, au contraire du bénéfice ou de la perte, ne puisse se
partager. Une personne seule, la « société » visée à la première phrase du paragraphe I de l'article L. 233-3,
o
peut prétendre l'exercer. Enfin, l'article L. 233-3, I, 3 , dispose qu'un contrôle existe si aucun associé ne
dispose de la majorité des droits de vote, donc du contrôle de droit, mais que l'un d'eux est suffisamment
fort pour déterminer en fait, par les droits de vote dont il dispose, les décisions dans les assemblées
générales. Cet associé peut imposer ses décisions aux autres. Il peut définir la politique de l'entreprise,
décider des acquisitions et des cessions d'actifs, arbitrer la répartition des profits. Il peut imposer les
dirigeants qu'il veut, décider de leur rémunération et les révoquer, s'ils se comportent différemment de ce
o
qui est attendu d'eux. Cette figure du contrôle a été distinctement consacrée par la loi n 2005-842 du
o
26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie qui, insérant un 4 à la suite de l'article
L. 233-3, I, considère qu'une société en contrôle une autre « lorsqu'elle est associée ou actionnaire de cette
société et dispose du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes
d'administration, de direction ou de surveillance de cette société ». Caractéristique des sociétés dont les
titres sont dispersés, qui connaissent un fort taux d'absentéisme aux assemblées, le contrôle de fait concerne
o
la majorité des grandes sociétés de la cote. 2 ) Contrôle conjoint. – Le contrôle conjoint est une figure plus
o
récente. La loi n 2001-1168 du 11 décembre 2001 a introduit le cas d'un contrôle conjoint exercé par deux
ou plusieurs personnes, agissant de concert (C. com., art. L. 233-3, III). Ce type de contrôle suppose que
deux ou plusieurs personnes déterminent en fait les décisions prises en assemblée générale, dans le cadre
d'un accord qu'elles ont conclu pour exercer leurs droits de vote dans le même sens et mettre en œuvre une
politique vis-à-vis de la personne morale (V. D. CHAUVAUX, La notion de contrôle conjoint, RJDA 1/2005,
p. 3 : application de la notion au contrat passé entre les sociétés Canal + et Lagardère, actionnaires des
chaînes de TV « thématiques » MCM et Canal J.). Ici le contrôle n'est plus entre les mains d'une personne
o
seulement, comme dans le cas visé au 2 de l'article L. 233-3, I, mais de plusieurs. Par rapport à la situation
envisagée par ce texte, il existe une deuxième différence importante : le II de l'article L. 233-3 ne concerne
pas seulement les actions de concert existant entre une société et d'autres actionnaires, comme dans le I de
l'article L. 233-3 ; il couvre toute action de concert pouvant exister entre toutes personnes morales (et pas
seulement des sociétés) et/ou physiques.
er
§ 1 - Émission des actions. – Organes compétents. – Prix d'émission
A - Organes compétents
76. Ce sont traditionnellement les actionnaires, lors de l'assemblée constitutive de la société ou d'une
assemblée générale extraordinaire postérieure (V. l'article très complet de P.-Y. CHABERT, Les
o o
augmentations de capital après l'ordonnance n 2004-604 du 24 juin 2004, Bull. Joly 2004.1023, spéc. n 51
o
et s. ; adde : H. HOVASSE, Les augmentations de capital après l'ordonnance n 2004-604 du 24 juin 2004,
o
Dr. sociétés 2004, n 13), qui décident de l'émission des actions composant le capital social.

ACTUALISATION
76-1. Liberté d'émission. - Selon l'ordonnance du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés, à côté
des valeurs mobilières représentatives d'un droit de créance qu'elles peuvent émettre dans les conditions
du livre II du code de commerce (conditions qui font l'objet d'une série de retouches, dans le sens d'une
simplification), un nouvel article L. 228-36-A du code de commerce est créé, qui permet aux sociétés par
actions de créer « toutes autres valeurs mobilières représentatives d'un droit de créance dans les
conditions prévues par les statuts ou, le cas échéant, par le contrat d'émission ». C'est, en quelque
o
sorte, une liberté totale dans la création de titres de dette qui est ainsi consacrée (Ord. n 2014-863 du
31 juill. 2014, art. 25 s., JO 2 août).

77. Délégation du pouvoir de fixer les modalités de l'émission. - L'assemblée générale extraordinaire
peut fixer elle-même les modalités de l'émission. Ce procédé est rarement utilisé : par exemple, dans le cas
où l'augmentation est réservée à un bénéficiaire déterminé. Il ne l'est jamais dans les sociétés cotées,
notamment en raison des risques de fluctuation du titre sur le marché qui empêchent de fixer trop longtemps
à l'avance le prix d'émission. Le plus souvent, l'assemblée générale extraordinaire décide de l'opération en
son principe et délègue tous pouvoirs au conseil d'administration ou au directoire des SA pour en fixer les
modalités. La décision d'émission ayant été prise, ces organes ne peuvent que l'exécuter. Ils ne peuvent en
différer la réalisation que lorsque les conditions dictées par l'assemblée générale extraordinaire (AGE) ne
sont pas remplies. La durée de cette sorte de délégation ne doit pas dépasser cinq ans, à compter de la
décision d'émission des actions (C. com., art. L. 225-129, al. 2). Dans les sociétés cotées, et elles seules, il a
paru opportun, pour faciliter les ultimes « réglages », de permettre au conseil d'administration ou au
directoire des SA de subdéléguer le pouvoir de réaliser l'augmentation de capital au directeur général ou au
président du directoire, ou encore en accord avec eux, à un directeur général délégué ou à un membre du
directoire (C. com., art. L. 225-129-4). La subdélégation peut aussi concerner le pouvoir de surseoir à
l'augmentation de capital. La subdélégation s'opère directement, sans que l'assemblée ait à l'autoriser
expressément.
o
78. « Délégation globale ». - Parallèlement à la « délégation modalités », sous l'empire de la loi n 84-
679 du 8 août 1994 portant DDOEF, la pratique de la « délégation globale » s'était répandue : l'assemblée
générale extraordinaire consentait au conseil d'administration ou au directoire une véritable autorisation
d'émission à concurrence d'un certain plafond (V. not. F. PELTIER, M. GERMAIN et F. SÈVE, Les autorisations
o
globales d'augmentation de capital, Actes prat. ing. sociétaire 1995, n 21, p. 2 et s.). Cette autorisation qui
pouvait ne pas être utilisée ou l'être seulement de façon partielle permettait à l'organe de gestion de
procéder, sur ses seules décisions, à toutes émissions de titres de capital ou de titres y donnant
ultérieurement accès, jusqu'à concurrence du montant maximum prévu (que la loi de 1994 ne limitait pas et
qui pouvait en pratique être très élevé) et pendant la durée fixée pour utiliser la délégation (qui était de
vingt-six mois au plus, selon cette loi). Il y avait déjà là une sorte de délégation de la compétence pour
décider de l'augmentation de capital. Même si, à notre connaissance, aucun contentieux n'a visé cette forme
de délégation, sa licéité ne semblait pas à l'abri de toute contestation. Il faut rappeler à cet égard qu'il est
interdit à l'assemblée des actionnaires, depuis l'arrêt Motte du 4 juin 1946 (Cass. civ. 4 juin 1946,
S. 1947.1.153, note Barbry, JCP 1947. II. 3518, note Bastian), de se dessaisir de ses pouvoirs exclusifs et
que toute clause statutaire conférant au conseil d'administration ou au directoire le droit de décider lui-même
e
de l'augmentation de capital était réputée non écrite (C. com., art. L. 225-129-VI ancien ; 2 Direct.
o o
n 77/91 du Conseil, 13 déc. 1976, art. 25, JOCE, n L 26 31 janv. 1977). Désormais, la question ne se pose
plus. L'ordonnance du 24 juin 2004 valide expressément cette formule de délégation globale.

79. Délégation de compétence. - Toutefois, depuis l'ordonnance du 24 juin 2004, l'AGE peut déléguer la
er er
fonction de prise de décision elle-même (C. com., art. L. 225-129, al. 1 , et L. 228-12, al. 1 ). En quelque
sorte, l'assemblée est aujourd'hui autorisée à partager avec l'organe d'administration le pouvoir de décider
d'augmenter le capital social. Cette forme nouvelle de délégation emporte de plein droit délégation des
er
pouvoirs nécessaires à la réalisation des émissions (Avis du comité juridique de l'ANSA, 1 déc. 2004). La
délégation de compétence peut porter sur les actions ordinaires comme sur les actions de préférence, sous
réserve, dans ce second cas, que les actions de préférence émises confèrent les « droits particuliers »
préalablement définis dans les statuts et qu'elles entrent donc dans une catégorie préexistante d'actions de
préférence en application des dispositions de l'article L. 228-11 du code de commerce.

80. Conditions de la délégation de compétence. - Toute délégation de compétence doit réunir certaines
conditions à peine de nullité de plein droit (C. com., art. L. 225-149-3, al. 3) : (i) sa durée ne peut excéder
er
vingt-six mois (C. com., art. L. 225-129-2, al. 1 ), exceptionnellement trente-huit mois s'il s'agit de
l'émission de stock-options (C. com., art. L. 225-177) ; (ii) un plafond de l'augmentation de capital doit être
prévu (C. com., art. L. 225-129-2 nouv.) ; (iii) en outre, pour permettre aux actionnaires de se déterminer
de manière plus éclairée et sélective, les demandes de délégation de compétence soumises à leur vote
doivent faire l'objet de résolutions particulières dans les cas prévus à l'article L. 225-129-2, alinéa 3, du code
de commerce : augmentations de capital réalisées avec suppression du droit préférentiel de souscription,
résolutions prévoyant d'augmenter le montant de l'émission en cas de demandes excédentaires (C. com.,
art. L. 225-135-1), émissions sur exercice de stock-options, émissions d'actions de préférence ; (iv) enfin,
semble-t-il, l'assemblée générale extraordinaire, si elle délègue sa compétence, doit en même temps se
prononcer sur un projet de résolution tendant à une augmentation de capital réservée aux salariés (C. trav.,
art. L. 443-5) ; en effet, bien que l'article 29-1 de la loi sur l'épargne salariale du 19 février 2001, devenu le
er
nouvel article L. 225-129-6, alinéa 1 , du code de commerce, se limite à mentionner que « lors de toute
décision d'augmentation du capital […], l'AGE doit se prononcer sur un projet de résolution… » et qu'à
strictement parler une décision d'augmentation de capital prise par l'assemblée n'est pas une délégation
donnée à l'organe de gestion pour prendre une telle décision, cette solution paraît devoir s'imposer pour
éviter que la faculté nouvelle de délégation de compétence ne tienne en échec l'obligation faite par l'article
L. 443-5 du code du travail (contra J.-P. MATTOUT, Les nouveaux pouvoirs financiers des organes de
o
direction, Rev. sociétés 2004.543, spéc. n 12 ).

81. Conditions de la délégation de compétence. - Toute délégation de compétence doit réunir certaines
conditions à peine de nullité de plein droit (C. com., art. L. 225-149-3, al. 3) : (i) sa durée ne peut excéder
er
vingt-six mois (C. com., art. L. 225-129-2, al. 1 ), exceptionnellement trente-huit mois s'il s'agit de
l'émission de stock-options (C. com., art. L. 225-177) ; (ii) un plafond de l'augmentation de capital doit être
prévu (C. com., art. L. 225-129-2 nouv.) ; (iii) en outre, pour permettre aux actionnaires de se déterminer
de manière plus éclairée et sélective, les demandes de délégations de compétence soumises à leur vote
doivent faire l'objet de résolutions particulières dans les cas prévus à l'article L. 225-129-2, alinéa 3, du code
de commerce : augmentations de capital réalisées avec suppression du droit préférentiel de souscription ;
résolutions prévoyant d'augmenter le montant de l'émission en cas de demandes excédentaires (C. com.,
art. L. 225-135-1) ; émissions sur exercice de stock-options ; émissions d'actions de préférence. On peut se
demander si l'assemblée générale extraordinaire, lorsqu'elle délègue sa compétence ne doit pas, en même
temps, se prononcer sur un projet de résolution tendant à une augmentation de capital réservée aux salariés
(C. trav., art. L. 443-5). À relire l'article 29-1 de la loi sur l'épargne salariale du 19 février 2001, devenu le
er
nouvel article L. 225-129-6, alinéa 1 , du code de commerce, la solution paraît clairement négative. Le texte
se limite à mentionner que : « Lors de toute décision d'augmentation du capital [hellip;], l'AGE doit se
prononcer sur un projet de résolutionhellip; ». Or, ce n'est pas décider d'augmenter le capital que de
déléguer à l'organe de gestion le pouvoir [hellip;] de décider d'augmenter le capital. La faculté nouvelle de
délégation de compétence tiendrait en échec l'obligation faite par l'article L. 443-5 du code du travail (en ce
sens : J.-P. MATTOUT, Les nouveaux pouvoirs financiers des organes de direction, Rev. sociétés 2004.543,
o
spéc. n 12 ).

82. Faute de disposition contraire, la durée maximale de cette délégation est celle de toute délégation de
compétence, soit vingt-six mois, ce qui couvre trois exercices et permet « de hausser librement le capital de
30 % sur une seule et même période de vingt-six mois » (A. COURET et H. LE NABASQUE, Valeurs
o
mobilières et augmentations de capital, op. cit., n 288-1, p. 141).

83. Règles de suivi des délégations. - Des règles communes à toutes les formes de délégation ont été
prévues par l'ordonnance qui visent à organiser un suivi des délégations et la suspension de celles-ci en
période d'offre publique d'achat (OPA). Concernant le suivi des délégations en cours de validité, deux
obligations d'information nouvelles sont instituées. L'organe d'administration doit établir un rapport
complémentaire en vue de l'assemblée générale ordinaire suivante (C. com., art. L. 225-129-5) et présenter
dans son rapport annuel de gestion un tableau récapitulatif des délégations en cours de validité dont il
dispose et sur lequel doit apparaître l'utilisation faite de ces délégations au cours de l'exercice (art. L. 225-
100, al. 4).

84. Suspension des délégations en période d'OPA. - (V. A. VIANDIER, La suspension des délégations
d'augmentation de capital en cas d'offre publique, Rev. sociétés 2004.783 ). À peine de nullité - mais le
juge saisi peut refuser de la prononcer au vu des circonstances (C. com., art. L. 225-149-3, al. 2) -, toute
délégation de l'assemblée générale doit être suspendue en période d'offre publique d'achat ou d'échange sur
les titres de la société (C. com., art. L. 225-129-3). Il peut être dérogé à ce principe à deux conditions. D'une
part, la délégation doit « s'inscri[re] dans le cours normal de l'activité de la société ». Cette expression est
assez difficile à interpréter. On doit comprendre, semble-t-il, que ce n'est pas la délégation qui doit être
« normale », mais l'augmentation de capital, par ses caractéristiques propres et notamment son volume, et
qu'une telle augmentation, qui n'est jamais l'activité habituelle et courante d'une société, doit se justifier par
les besoins normaux de l'exploitation. D'autre part, pour que l'exception joue, il est exigé que « sa mise en
œuvre [ne soit] pas susceptible de faire échouer l'offre ». Auparavant, la règle de suspension de la
délégation pour cause d'OPA pouvait également céder, mais sous deux conditions différentes : d'une part,
l'AGE devait avoir expressément autorisé, par une décision préalable à l'offre publique, la réalisation de
l'opération pendant la période d'offre ; d'autre part, l'augmentation envisagée ne devait pas être
« réservée », de manière à éviter que les dirigeants puissent placer les nouveaux titres entre des mains
amies, en privant les actionnaires minoritaires de la chance de plus-value que représente l'OPA (C. com.,
art. L. 225-129-IV ancien). La nouvelle formulation du texte, devenu l'article L. 225-129-3 du code de
commerce, s'inscrit dans un registre différent. La légitimité des émissions de titres en cours d'offre dépend
moins de l'adhésion des actionnaires que de leur justification économique ou financière au regard des
activités habituelles de la société ; la délégation ne peut plus être une arme « anti-OPA », même si elle a le
soutien de l'actionnariat majoritaire de la cible. Cependant, lorsque la délégation qui leur a été donnée est
suspendue par l'effet de l'ouverture d'une OPA sur les titres de la société, rien n'interdit à des dirigeants de
réunir l'assemblée en cours d'offre publique pour l'inviter à se prononcer sur une nouvelle augmentation du
o
capital social ou, comme la directive OPA n 2004/25/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril
o
2004 (art. 9, al. 3, JOUE, n L 142, 30 avr.) le permet expressément, pour lui demander d'« approuve[r] ou
de confirme[r] toute décision qui ne s'inscrit pas dans le cours normal des activités de la société et dont la
mise en œuvre est susceptible de faire échouer l'offre ».

B - Prix d'émission
85. Le prix d'émission comprend classiquement la valeur nominale et, le cas échéant, une prime d'émission
qui doit être intégralement libérée lors de la souscription (C. com., art. L. 225-144), à peine de sanctions
er
pénales (C. com., art. L. 225-17, II) et même, depuis la loi sécurité financière du 1 août 2003, à peine de
nullité de la décision d'augmentation de capital (C. com., art. L. 225-149-1). Si les actions nouvelles ouvrent
les mêmes droits que les actions préexistantes déjà cotées et sont ainsi entièrement assimilables à celles-ci,
la problématique du prix d'émission est cependant particulière. Elle est bien posée par le professeur LE
NABASQUE (Les augmentations de capital réalisées avec maintien du droit préférentiel de souscription des
o
actionnaires, Rev. sociétés 2004.491, spéc. n 43 ) : « Fixé trop haut, ce prix consommait l'échec de
l'augmentation de capital [mieux vaut acheter les titres sur le marché]. Fixé trop bas, et poussés en cela par
les établissements bancaires, garants en seconde ligne du placement des titres, les dirigeants arrêtaient
certes un prix très attractif, mais au vrai peu conforme aux intérêts de la société ou à celui de ses
actionnaires ». La société cotée qui entend procéder à une augmentation avec droit préférentiel de
souscription ne peut pas modifier le prix d'émission pendant la période de souscription. Pour être plus faible
qu'avant l'ordonnance du 24 juin 2004, le risque que le prix d'émission excède le cours de bourse (le risque
de marché) reste présent, comme celui, qui lui est corrélé, de l'application d'une décote excessive au prix
d'émission. Dès lors les sociétés cotées sont tentées de procéder à des émissions par appel public à l'épargne
en obtenant de leurs actionnaires la suppression de ce droit. La suppression du droit préférentiel de
souscription est fréquente en pratique. Mais l'émission « sans droit » interdit aux actionnaires de faire valoir
un droit de préférence et de compenser l'inconvénient de la dilution de leurs droits dans le capital par la
cession de leurs droits de souscription. L'inconvénient peut ne pas être négligeable lorsque la valeur du droit
est substantielle, ce qui peut être le cas si le prix d'émission est très décoté par rapport au cours de bourse.
C'est pourquoi le législateur ne laisse pas l'émetteur libre de fixer le prix d'émission des actions nouvelles. Il
lui impose indirectement un prix minimum d'émission qui doit être en rapport avec le cours de bourse du
titre. Il est en effet à craindre que l'émetteur se laisse aller, pour assurer le succès du placement des actions
nouvelles en période baissière, à fixer le prix des actions nouvelles à un niveau trop bas par rapport au cours
de bourse des actions anciennes, au risque d'entraîner une dilution injustifiée des actionnaires anciens. Pour
cerner le degré de proximité souhaité entre le prix d'émission et le cours de bourse, plusieurs approches ont
été expérimentées par le passé qui encouraient toutes, à des degrés divers, le reproche de créer un obstacle
o
aux augmentations de capital en période de baisse boursière. Un décret n 83-363 du 2 mai 1983 avait
d'abord décidé que le prix ne pouvait être inférieur au cours moyen sur 20 jours de bourse consécutifs
choisis parmi les 40 jours précédant le début de l'émission. Puis la loi du 8 août 1994 (C. com., art. L. 225-
136) avait réduit les délais à, respectivement, 10 et 20 jours (V. not. ANSA, La procédure des augmentations
o
de capital après la loi DDOEF du 8 août 1994, Bull. n 2729, sept.-oct. 1994, p. 1 et s.). Cette règle des « dix
parmi les vingt » (D. BOMPOINT, La réforme des procédures d'appel public à l'épargne, La règle des « 10
parmi les 20 », Actes prat. ing. sociétaire janv.-févr. 2004, éd. J.-Cl., p. 20), qui avait été fortement
critiquée par la place financière de Paris, a été écartée par l'ordonnance du 24 juin 2004 (C. com.,
art. L. 225-136). Désormais, le prix d'émission doit être au moins égal à la « moyenne pondérée des cours
des trois dernières séances de bourse précédant sa fixation, éventuellement diminuée d'une décote
maximale de 5 % » (art. D. 155-5, mod.). Cependant, depuis l'ordonnance du 24 juin 2004, la règle d'un
prix d'émission-plancher a reçu un tempérament de portée pratique non négligeable dans les sociétés cotées.
o
L'article L. 225-136, 1 , alinéa 2, du code de commerce permet en effet à l'assemblée générale
extraordinaire d'autoriser le conseil d'administration ou le directoire, pour un volume d'augmentation de
capital annuel pouvant aller jusqu'à 10 % du capital social, à fixer lui-même le prix d'émission au vu d'un
rapport du conseil d'administration ou du directoire et d'un rapport spécial du commissaire aux comptes. La
liberté de fixation du prix d'émission est réelle, mais elle n'est pas totale. Le calcul du prix doit en effet
respecter les modalités déterminées par l'assemblée générale extraordinaire dans sa décision d'autorisation.
Toutefois, ces modalités pourront valablement ignorer la règle de la moyenne pondérée des cours des trois
o
dernières séances de bourse fixée par l'article D. 155-5. Aux termes de l'article L. 225-136, 1 , alinéa 2, du
er
code de commerce et de l'article D. 155-2, alinéa 1 , modifié lorsqu'il est fait usage de cette autorisation, le
conseil d'administration ou le directoire établit un rapport complémentaire décrivant les conditions définitives
de l'opération établies conformément à l'autorisation donnée par l'assemblée et donnant des éléments
d'appréciation de l'incidence effective de l'émission sur la situation de l'actionnaire en particulier en ce qui
concerne sa quote-part des capitaux propres à la clôture du dernier exercice et si la clôture est antérieure de
plus de 6 mois à l'émission, cette incidence doit être appréciée au vu d'une situation financière intermédiaire
arrêtée selon les mêmes méthodes comptables que le dernier bilan annuel. Pour les sociétés cotées, le
rapport du conseil ou du directoire doit en outre comporter l'incidence théorique de l'émission sur la valeur
boursière de l'action telle qu'elle résulte de la moyenne des 20 séances de bourse précédentes. Le rapport
doit être vérifié et certifié par le commissaire aux comptes, notamment en ce qui concerne la conformité des
modalités d'exercice de la délégation au regard de l'autorisation donnée par l'assemblée et des indications
fournies à celle-ci. Le commissaire doit aussi donner son avis sur le choix des éléments de calcul du prix
d'émission et sur son montant définitif ainsi que sur l'incidence de l'émission sur la situation des titulaires de
titres de capital ou de valeurs mobilières donnant accès au capital. L'absence de communication des rapports
ou d'établissement du rapport spécial peut donner lieu à injonction de faire sous astreinte.

§ 2 - Circulation de l'action. – Clause d'agrément en cas de cession


86. V. not. B. SAINTOURENS, Le nouveau droit des clauses d'agrément, Rev. sociétés 2004.611 ;
C. MALECKI, Le remaniement du régime des clauses d'agrément par l'ordonnance du 24 juin 2004,
D. 2004.2775 ; B. DONDERO, Les clauses d'agrément dans les sociétés par actions après la réforme, LPA
o
2005, n 189, p. 44 et s. – Le droit d'agrément ne peut être prévu que dans les statuts des sociétés non
o
cotées. L'ordonnance n 2004-604 du 24 juin 2004 l'interdit en matière de cession d'actions cotées de façon
implicite, en limitant la possibilité de prévoir une clause d'agrément en cas de cession de titres non admis
aux négociations sur un marché réglementé (C. com., art. L. 228-23), et de façon explicite, en abrogeant
l'article L. 228-25 du code de commerce qui autorisait la procédure d'agrément lors de cessions d'actions
négociées sur un tel marché. En réalité, le changement est relatif car la pratique était déjà dans le sens du
rejet de la clause d'agrément dans les sociétés cotées. L'autorité de régulation boursière et l'entreprise de
marché refusaient l'introduction en bourse des sociétés dont les statuts prévoyaient une clause d'agrément
er
(art. P-1-1-17, al. 1 , et art. P-1-1-28 des Règles de marché Euronext). De même, en période d'offre
o
publique, l'article 17 du règlement COB n 87-01 (devenu l'art. 231-6 du Règlement général de l'AMF)
disposait qu'« aucune clause d'agrément statutaire […] ne peut être opposée à l'initiateur d'une offre
publique pour les titres qui lui seraient apportés dans le cadre de son offre » (sauf quand elle résulte d'une
obligation législative). Mais ces règles, qui étaient contra legem en raison des dispositions permissives de
l'article L. 228-25 du code de commerce ancien, sont désormais validées. Par ailleurs, conformément à la
législation précédente, l'article L. 228-23, alinéa 2, dispose qu'« une clause d'agrément ne peut être stipulée
que si les titres sont nominatifs en vertu de la loi ou des statuts », ce qui rend inutilisable la clause
d'agrément lorsque la cession porte sur des valeurs au porteur. La précision n'est pas inutile, puisque la
catégorie des titres soumis au régime de tenue des titres au porteur (inscription en compte chez un
intermédiaire habilité) ne correspond plus nécessairement, depuis l'ordonnance du 24 juin 2004, à la
catégorie des titres cotés pour lesquels l'interdiction des clauses d'agrément est acquise, mais peut
également, par dérogation, comprendre des titres non cotés admis aux opérations d'un dépositaire central
o
(V. supra, n 32). La sanction de la méconnaissance de la clause d'agrément est la nullité de la cession
(C. com., art. L. 228-23, al. 4). Enfin l'article L. 228-23, tel qu'il a été réécrit par l'ordonnance du 24 juin
2004, maintient la solution ancienne de l'inapplicabilité des clauses d'agrément aux transmissions
intervenant entre parents proches.
87. Modifications apportées par l'ordonnance du 24 juin 2004 (C. com., art. L. 228-24) - En
revanche, et c'est un grand changement, le jeu de la clause d'agrément entre actionnaires devient possible
(la solution antérieure de l'interdiction était purement jurisprudentielle : Cass. com. 10 mars 1976,
D. 1977.455 note J.-C. Bousquet, Rev. sociétés 1976.332, note Hémard, JCP 1976. II. 18406, note Rabot,
RTD com. 1976.533, note R. Houin, Defrénois 1977.1233, note J. Derruppé ; 24 févr. 1987, D. 1987, IR 56).
De même, contrairement au droit antérieur à l'ordonnance de 2004 qui ne concernait que les actions, les
clauses d'agrément peuvent désormais porter sur tous les titres de capital, y compris les titres donnant accès
à terme au capital (actions avec bons de souscription à des actions, obligations convertibles en actions ou
assorties de bons de souscription d'actions, obligations remboursables en actions, bons de souscription
« secs », etc.). Bien plus, il est reconnu au cédant le droit de renoncer à tout moment à son projet de
cession. Ce « droit de repentir » offre une échappatoire au cédant qui, ayant accepté la procédure d'expertise
demandée par les associés repreneurs en vue de fixer le prix de rachat après refus d'agrément de leur part
o
(Cass. com. 13 oct. 1992, Bull. civ. IV, n 310, JCP, éd. E, 1993. I. 218, obs. A. Viandier et J.-J. Caussain, RJ
com. 1993.113, note J.-P. Storck ; CA Paris, 16 oct. 1992, Bull. Joly 1992.1300), était censé de ce seul fait
avoir confirmé sa volonté de céder ses titres en sorte qu'il ne pouvait plus se rétracter au vu d'un prix, trop
faible à ses yeux, fixé par l'« expert ». Désormais le cédant peut conserver ses titres si le prix fixé par
l'expert de l'article 1843-4 du code civil ne lui convient pas (C. com., art. L. 228-24). La règle est bienvenue
car elle évite au cédant de se trouver obligé de céder ses titres alors que le prix ne lui convient pas. Enfin,
lorsque les statuts d'une société ne faisant pas publiquement appel à l'épargne réservent des actions aux
salariés de la société, il peut être stipulé une clause d'agrément interdite entre parents, dès lors que cette
clause a pour objet d'éviter que lesdites actions ne soient dévolues ou cédées à des personnes n'ayant pas la
qualité de salarié de la société (C. com., art. L. 228-23, al. 3).

§ 3 - Prérogatives et charges attachées à l'action


A - Diversité des prérogatives
88. Le titulaire de l'action dispose de tout un ensemble de prérogatives qu'il doit uniquement à la détention
de son titre, prérogatives « dans » et « contre » la société. Ainsi, le titulaire de l'action a le droit de recevoir
une quote-part des bénéfices mis en distribution ; le remboursement de l'apport et le bonus de liquidation ;
le droit préférentiel de souscription lors de toute augmentation de capital en numéraire… L'actionnaire actuel
est seul créancier du dividende voté, mais non versé. S'il n'est pas le souscripteur originaire, le précédent
actionnaire, dont il tire ses droits, ne saurait lui opposer sa qualité d'actionnaire à l'époque de la réalisation
du bénéfice et de la décision sociale de le distribuer. De même son titre lui ouvre le droit de participer et de
voter aux assemblées générales au vu de l'information qui lui est légalement due sur les comptes et les
activités de la société. Il lui confère une « prérogative individuelle de contrôle de la gestion » (J.-
F. BARBIÉRI, note sous Cass. crim. 12 déc. 2000, Bull. Joly 2001.508) et un « droit propre » (Cass. crim.
12 déc. 2000, préc.) pour agir en justice au nom de la personne morale contre le dirigeant qui par sa faute a
appauvri le patrimoine social, même si cette faute a été commise antérieurement à la date à laquelle il est
devenu actionnaire. La jurisprudence n'exige pas que le demandeur à l'instance ait été actionnaire dès la
date de l'acte ou de la délibération dont il poursuit l'annulation ou la date des faits à raison desquels la
o
responsabilité du dirigeant est recherchée (Cass. com. 4 juill. 1995, n 93-17.969 , D. 1996.186, note J.-
C. Hallouin , JCP 1995.3885, obs. A. Viandier et J.-J. Caussain, Rev sociétés 1995.504, note P. Le Cannu,
JCP, éd. E, 1995. II. 22560, note Y. Guyon, RTD civ. 1996.413, chron. P.-Y. Gautier , RTD com. 1996.71,
o
obs. B. Petit et Y. Reinhard , Petites affiches 26 janv. 1996, n 12, p. 18, note D. Giribila). Selon
l'excellente formule du professeur P. LE CANNU (note sous Cass. com. 4 juill. 1995, Rev. sociétés 1995.504,
spéc. p. 511 ) « Le droit d'agir est attaché au titre et transmis avec celui-ci… [il] est transporté avec
l'action, au moment de sa transmission [par cession, succession, fusion, etc.]… [il est] l'un des attributs
patrimoniaux de l'action… en achetant un titre, on acquiert le droit d'agir et de fouiller le passé de la
société » (V. égal. M.-C. PINIOT, La corporate gouvernance à l'épreuve de la jurisprudence, Mélanges AEDBF
France, 1999, p. 383). Corrélativement, le cédant perd le droit d'agir, bien que les faits se soient déroulés
pendant le temps où il était actionnaire de la société. L'actionnaire ne peut exercer l'action sociale en
responsabilité contre les administrateurs qu'à condition de conserver sa qualité d'actionnaire. S'il cède ses
actions, le cédant cesse de courir les risques et chances de la société et transmet au cessionnaire le droit
attaché à ces titres d'exercer l'action sociale (Cass. com. 26 janv. 1970, JCP 1970. II. 16385, note
Y. Guyon). S'il agit en justice postérieurement à la cession de ses actions, son action est irrecevable. La
solution est conforme à l'enseignement de COPPER-ROYER (J. COPPER-ROYER, Traité des sociétés
e o
anonymes, t. II, 4 éd., 1931, Dalloz, p. 800, n 151) : « Le résultat auquel une action sociale peut
uniquement aboutir est un enrichissement de l'être moral ou la disparition d'une irrégularité le concernant ;
ce sont là choses sans intérêt pour une personne qui n'est pas, ou qui n'est plus associée. Or il ne peut
exister d'action si celui qui exerce l'action ne peut justifier d'aucun intérêt personnel dans le résultat de cette
action. » L'action est un titre intégrant la plénitude des droits résultant du contrat de société (F.-
o
G. TRÉBULLE, op. cit., n 774). Elle est cédée en cet état. Mais si les actions (et généralement les valeurs
mobilières) font profiter leurs porteurs successifs des prérogatives qui leur sont attachées, se transmettent-
elles aussi « passivement » ? Autrement dit, le cessionnaire est-il tenu des dettes qui pesaient sur le cédant
à raison de la propriété des titres objet de la cession ?

B - Charges attachées à l'action


89. La possibilité d'une transmission passive est beaucoup plus discutée car le cessionnaire acquerrait un
droit nouveau, un titre « purifié » des obligations souscrites par tout propriétaire antérieur du titre. Les
exceptions et plus largement les moyens et les défenses à l'encontre du cédant ne seraient pas opposables
e o
au cessionnaire (Y. GUYON, Droit des affaires, t. 1, 11 éd., 2001, Economica, n 277 ; M. JEANTIN, Droit
e o
des sociétés, 3 éd., 1994, Domat droit privé, Montchrestien, n 425). À vrai dire, cet effet de purge
s'explique difficilement. Certes, en principe, sauf stipulation pour autrui - par hypothèse écartée ici -, le
cessionnaire ne devrait pas être tenu des engagements que le cédant a contractés envers la société
émettrice en procédant à l'acquisition de son titre (C. civ., art. 1165). De plus, le droit français est hostile à
la cession de dette. Mais, d'une part, le vendeur ne peut transférer plus de droits qu'il n'en a lui-même, en
sorte que si les droits transmis sont affectés de charges, le cessionnaire ne saurait s'affranchir des charges
pour n'exercer que les droits. D'autre part, la cession de dette n'est interdite que si elle est réalisée à titre
autonome ; tel n'est évidemment pas le cas ici, puisque le titre cédé confère par définition des droits à son
titulaire. Enfin, l'hostilité envers la cession de dette s'explique par le fait que le créancier ne doit pas se voir
imposer un débiteur qu'il n'a ni choisi ni accepté. Mais, ici, la personnalité de celui qui doit payer ne compte
pas vraiment pour la personne morale, pourvu qu'elle soit réglée de son dû. Bien plus, la cession de la valeur
o
mobilière peut, comme il sera observé (V. infra, n 90), donner un débiteur supplémentaire à la société
émettrice. L'opération présente pour elle un intérêt si évident qu'il est permis de présumer un accord tacite
de sa part. Ainsi les devoirs essentiels que le code civil met à la charge de tout associé à l'égard de
l'émettrice sont automatiquement reportés du cédant sur le cessionnaire : la libération du solde non versé de
l'apport et la contribution aux pertes sociales (C. civ., art. 1843-3 et 1832, al. 3).

90. Libération du solde non versé de l'apport. - Le cessionnaire de la valeur mobilière est soumis, à
raison de la détention de son titre, aux mêmes obligations que le cédant et les prédécesseurs de celui-ci.
L'illustration la plus nette est probablement la charge, définitive, qui incombe au cessionnaire de verser à la
société émettrice le montant correspondant au solde non libéré de l'apport (P. LE CANNU, Droit des sociétés,
o
2003, Montchrestien, n 1030, p. 618 ; V. Action [Sociétés]). Une action même libérée en partie est
négociable ; il lui faut simplement conserver la forme nominative (C. com., art. L. 228-9) ; si elle est cotée,
elle se distingue des autres actions intégralement libérées par un code valeur (code ISIN) différent. En
l'aliénant, le cédant donne à la société émettrice un autre débiteur du montant non libéré de l'action : le
cessionnaire. Entre son émission et l'appel par l'émettrice des fonds complémentaires, l'action peut donc être
cédée plusieurs fois. Certes le cédant, tout comme les propriétaires intermédiaires de l'action, demeure
er
solidairement tenu de la dette pendant deux ans (C. com., art. L. 228-28, al. 1 ) ; mais le cessionnaire,
dernier de la chaîne, en assume la charge définitive (C. com., art. L. 228-28, al. 2). Le cessionnaire,
actionnaire actuel au jour où la société a réclamé paiement, devient redevable du montant de la dette
d'apport contractée par l'actionnaire « initial », premier titulaire du titre. « L'obligation en cause fournit donc
l'exemple d'une obligation propter rem attachée au titre et qui se transmet avec lui », comme l'observe
o
M. GODON (Les obligations des associés, préf. Y. Guyon, 1999, Economica, n 32, p. 30). Le propriétaire
actuel « est tenu d'une obligation personnelle qui constitue comme une charge du titre, de telle sorte que sa
condition se rapproche de celle de l'acquéreur d'un immeuble hypothéqué ou, mieux, grevé de l'inscription de
o
privilège du vendeur » (J. et E. ESCARRA et J. RAULT, op. cit., n 1029, p. 50). S'il ne l'acquitte pas dans le
er er
temps fixé (C. com., art. L. 225-3, al. 1 , et L. 225-144, al. 1 ), ses actions peuvent faire l'objet d'une
vente forcée (C. com., art. L. 228-27). Il existe, de façon plus exceptionnelle, d'autres cas de transmission
au cessionnaire d'obligations envers la société. Mais ils sont beaucoup moins nets car il ne s'agit pas
réellement d'engagements nés du chef de l'associé cédant mais de l'effet direct de la loi. Ainsi, l'acquéreur de
parts de sociétés de construction-vente (C. constr. hab., art. L. 211-1 à L. 211-4) ou de sociétés d'attribution
(C. constr. hab., art. L. 212-1 à L. 212-13) est tenu de donner suite à tous appels de fonds nécessaires à la
réalisation de l'objet social, à peine d'exclusion (C. constr. hab., art. 211-3 et art. L. 212-3) ; le cessionnaire
de droits sociaux des sociétés coopératives agricoles a l'obligation de procéder aux livraisons prévues aux
statuts.
91. Contribution aux pertes sociales. - Il n'est pas contestable que l'actionnaire actuel a la charge, dans
la mesure de la « part d'apport » que représentent ses titres, de contribuer aux pertes sociales (C. com.,
art. L. 225-1). Cette obligation concerne toutes les pertes, même celles que la société a réalisées
antérieurement à l'entrée de l'actionnaire dans la société. La meilleure preuve en est qu'au lendemain de
l'acquisition de ses actions, la société peut imposer au cessionnaire une réduction de capital pour cause de
pertes. L'opération peut même entraîner son éviction si elle se traduit par un « coup d'accordéon » par l'effet
duquel le capital social est réduit à zéro et les actions existantes « annulées » sous la condition suspensive
(C. com., art. L. 224-2) de la reconstitution, au moyen d'une émission d'actions nouvelles, des fonds propres
à un montant au moins égal à celui des pertes majoré du montant du capital minimum (P. DIDIER, La
réduction du capital à zéro, Mélanges AEDBF France, 1997, éd. Banque, p. 171 ; M. BOIZARD, La réduction
du capital à zéro, Rev. sociétés 1999.735 ; D. COHEN, La validité du « coup d'accordéon » [à propos d'une
jurisprudence récente], D. 2003, chron. 410 ; S. SYLVESTRE-TOUVIN, Le coup d'accordéon ou les
vicissitudes du capital, 2003, PUAM).

92. « Coup d'accordéon ». - L'idée a été émise (Y. REINHARD, Actualité générale et sociétés cotées, in Le
droit des sociétés pour 2003, Dalloz, Dossiers) que l'absence totale d'actions, même pendant un instant de
raison, met en jeu la continuité de la société. Mais la rétroactivité de la condition suspensive prévue à
l'article L. 224-2 s'oppose à cette analyse de l'extinction du contrat de société que la jurisprudence, à notre
connaissance, n'a d'ailleurs jamais retenue. Au contraire, la validité de la réduction de capital à zéro est
affirmée par la Cour de cassation qui considère qu'elle vient sanctionner l'obligation de contribution aux
pertes sociales (Cass. com. 10 oct. 2000, Dr. sociétés 2001.10, comm. Th. Bonneau ; 18 juin 2002,
D. 2002.2190, obs. A. Lienhard , JCP, éd. E, 2002.1556, note A. Viandier, JCP 2002. II. 10180, note
H. Hovasse). L'annulation des actions supprime les droits et obligations réciproques des actionnaires et de la
société émettrice. Par voie de conséquence, la société est libérée de son obligation de rembourser la valeur
de leurs apports à ses actionnaires, tandis que ceux-ci sont quittes de leur obligation de contribution aux
pertes. L'opération entraîne la disparition définitive des droits des actionnaires anciens.

93. Sans doute, la société peut ne pas procéder à une réduction de capital en cas de pertes inférieures à la
moitié du capital. Elle les inscrira alors à un compte de « report à nouveau ». Mais si elle réalise
ultérieurement des bénéfices, ceux-ci ne peuvent être distribués qu'après imputation des pertes antérieures.
er
Une « somme distribuable » au sens de l'article L. 232-12, alinéa 1 , du code de commerce est, en effet, un
er
bénéfice diminué des pertes passées (C. com., art. L. 232-11, al. 1 ). De ce fait, l'actionnaire actuel, même
s'il ne supporte pas une réduction de capital, contribuera néanmoins aux pertes passées, puisque la part des
bénéfices qui aurait pu lui être versée, en l'absence de ces pertes, est diminuée à due concurrence. La
société peut aussi être l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, l'instant suivant l'arrivée d'un nouvel
actionnaire. Cet actionnaire contribuera bien aux pertes antérieures s'il n'obtient pas le remboursement de
l'apport fait par l'actionnaire initial. La dette de contribution aux pertes, on le voit, grève incontestablement
le titre et tous les porteurs successifs la supportent.

94. Limites à la transmission passive. - Les obligations nées de la qualité de contractant de la personne
morale émettrice sont transmises de plein droit aux cessionnaires successifs du titre-action comme du titre-
obligation (celui-ci, fraction de l'emprunt collectif consenti à la société, entraîne l'adhésion du cessionnaire au
contrat d'émission et sa soumission aux règles régissant la masse des créanciers obligataires). Cette
explication rejoint le principe désormais acquis en jurisprudence suivant lequel le sous-acquéreur jouit de
o er
tous les droits et actions attachés à la chose acquise (Cass. ass. plén. 7 févr. 1986, Bull. civ., n 2, 1 arrêt,
D. 1986.293, note A. Bénabent, D. 1987, somm. 185, note. H. Groutel, JCP 1986. II. 20 616, note
re o
Ph. Malinvaud, RTD civ. 1986.605, obs. Ph. Rémy ; Cass. 1 civ. 21 janv. 2003, Bull. civ. I, n 18). La
doctrine admet la transmission passive pour les obligations d'origine légale qui pèsent sur le titulaire de la
o
valeur mobilière (V. Ph. MALAURIE, L. AYNÈS et P.-Y. GAUTIER, Les contrats spéciaux, op. cit., n 308),
auxquelles il semble permis d'ajouter les obligations statutaires pesant sur l'associé, mais pas celles que le
cédant peut avoir contractées par ailleurs. Par exemple, le fait pour un vendeur d'actions d'avoir été partie à
une action de concert ne crée pas d'obligations en matière de franchissement de seuil à la charge du
cessionnaire qui se dissocie du concert. Le cas des créanciers qui ont accepté de se lier par un engagement
o
dit de subordination (V. infra, n 171) est plus délicat : un créancier dit junior accepte d'être payé après un
ou plusieurs autres créanciers du même débiteur, désignés seniors. Un tel engagement passe du cédant au
o
cessionnaire (V. A. TRÉBULLE, La notion de subordination de créance, thèse dactyl. Paris II, 2002, n 318,
qui explique que la subordination de la créance est « une obligation réelle accessoire à la propriété de la
créance junior »).
Art. 2 - Règles propres aux actions de préférence

Bibliographie.
M. BANDRAC, P. BIROTHEAU, C. DEBIN, J.-P. DOM, S. GAILLET, F. LE ROQUAIS et M. SUPIOT, Le régime et
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l'émission des valeurs mobilières après les ordonnances de 2004, Actes pratiques n 77, sept.-oct. 2004,
p. 12 ; A. COURET et H. LE NABASQUE, Valeurs mobilières et augmentations de capital, 2004, F. Lefebvre,
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n 484 et s., p. 212 ; J.-J. DAIGRE, L'aménagement du droit de vote, RD bancaire et financier 2004.366 ;
D. DAVODET, A. GUENGANT, Ph. ENGEL, S. LE PAVEC et S. de VENDEUIL, Actions de préférence, questions
re e e
de praticiens (1 partie), JCP, éd. E, 2005.1156 ; (2 partie) JCP, éd. E, 2005.1210 ; (3 partie) JCP, éd. E,
2005.1262 ; M. GERMAIN, La création et la disparition des actions de préférence, RD bancaire et financier
2004.348 ; Les actions de préférence, Rev. sociétés 2004.597 ; V. MAGNIER, Les actions de préférence :
à qui profite la préférence ?, D. 2004.2559 ; T. MASSART, Les actions de préférence et la question du
droit de vote, Dr. et patrimoine oct. 2004, p. 84 ; F. MONOD et R. ARAKELIAN, Les actions de préférence :
er
comment utiliser la procédure d'avantages particuliers ?, Petites affiches 1 -2 nov. 2004, p. 8 ; J.-
o
M. MOULIN, Les actions de préférence, LPA 2005, n 189, p. 24 et s. ; D. OHL, Aspects de la réforme du droit
des valeurs mobilières, Bull. Joly Bourse 2004.689 ; Bull. Joly Spécial Ordonnance valeurs mobilières du
24 juin 2004, hors série, févr. 2005 ; G. de TERNAY, SAS et actions de préférence : modus operandi, JCP,
éd. E, 2005.615 ; A. VIANDIER, Les actions de préférence, JCP, éd. E, 2004.1440.

95. Premières approches : avantages particuliers et actions de préférence. - Avant l'avènement des
actions de préférence, un débat doctrinal s'était engagé sur le point de savoir si la procédure dite
d'approbation des avantages particuliers s'appliquait à l'émission d'actions à dividende prioritaire ou d'actions
de priorité (D. SCHMIDT, Les conflits d'intérêts dans la société anonyme, 2004, coll. Pratique des affaires,
o
éd. Joly, n 98 ; Ph. REIGNÉ et Th. DELORME, La nature nécessairement pécuniaire des avantages
particuliers, Bull. Joly 2002.1117 ; M. JEANTIN, Observations sur la notion de catégorie d'actions, D. 1995,
chron. 88 ; A. COURET et A. DARGENT, Le domaine d'application de la procédure d'approbation des
avantages particuliers, Actes pratiques, sept. 1999, p. 23 ; J.-J. DAIGRE, Actions privilégiées, catégories
d'actions et avantages particuliers, Mélanges M. Jeantin, 1999, Dalloz, p. 213 ; Th. GRANIER, Définition des
avantages particuliers, Dr. sociétés, déc. 2003, Repères 12) dont dérivent dans une certaine mesure les
actions de préférence. Cette discussion a trouvé son épilogue dans l'ordonnance du 24 juin 2004 (C. com.,
art. L. 228-15, nouv.) qui, interdisant pour l'avenir toute émission d'actions à dividende prioritaire et
d'actions de priorité, a réglé la question de la manière suivante en ce qui concerne les actions de
préférence : (i) indéniablement, les actions de préférence entraînent une rupture d'égalité entre les
actionnaires ou plutôt entre les actions ; (ii) cette rupture ne peut cependant justifier l'application de la
procédure des avantages particuliers que si l'émission d'actions de préférence est réservée à une ou
plusieurs personnes identifiées, qu'il s'agisse d'actionnaires ou de tiers ; (iii) l'avantage n'est en effet
particulier que s'il n'est pas accessible à tout le monde ; (iv) donc, si l'émission est réalisée par appel public
à l'épargne, ou si elle s'adresse à tous les actionnaires de la société, il est impossible de soutenir que certains
sont a priori exclus des avantages particuliers procurés par les titres proposés. Dès lors, deux cas peuvent se
présenter : ou bien la faculté de souscrire est accordée à tous les actionnaires ou au marché dans son
ensemble et la procédure ne s'applique pas ; ou bien, au contraire, l'émission est réservée à un ou plusieurs
actionnaires ou tiers identifiés et la société émettrice devra respecter la procédure d'approbation des
o
avantages particuliers (H. LE NABASQUE, À propos de la réponse ministérielle n 13390, JO Sénat Q 14 oct.
2004, p. 2341, RD bancaire et financier 2005.31).

96. Intervention du commissaire aux avantages particuliers. - La procédure d'approbation des


avantages particuliers, visée aux articles L. 225-8, L. 225.10, L. 225-14 et L. 225-147 du code de commerce,
tient essentiellement, on le sait, dans la désignation en justice d'un « commissaire » chargé d'apprécier, sous
sa responsabilité, la valeur de l'avantage (C. com., art. L. 228-15) et d'en faire rapport aux actionnaires afin
que ceux-ci puissent, en assemblée générale, les approuver ou les refuser en connaissance de cause. Il doit
s'agir d'un commissaire aux comptes n'ayant pas réalisé depuis cinq ans et ne réalisant pas de mission au
sein de la société. Son rapport doit décrire la nature et le mode d'évaluation de l'avantage particulier
octroyé, expliquer pourquoi ce mode a été retenu et vérifier que la valeur de l'avantage correspond au moins
à la valeur nominale des actions à émettre, éventuellement augmentée de la prime d'émission, en en
justifiant. Le commissaire n'a pas à proprement parler à rechercher les conséquences de l'octroi de
l'avantage particulier pour la société et ses actionnaires. Lors de l'assemblée générale qui doit statuer sur
l'opération, le bénéficiaire de l'avantage, s'il est déjà actionnaire, ne peut participer au vote ni en son nom ni
comme mandataire. Dès lors, si le bénéficiaire de l'avantage est le représentant légal de la société, les
actions pour lesquelles il dispose de pouvoirs en blanc ne sont pas prises en compte pour le calcul de la
majorité dans le vote. V. Avantages particuliers [Sociétés]

97. Qualification. - Comment ne pas confondre actions de préférence et actions ordinaires ou actions de
préférence de catégories différentes entre elles ? Comment distinguer les actions de préférence des titres de
créance ? La qualification d'action de préférence donnée aux titres par l'assemblée qui les crée ne suffit
évidemment pas. L'article 12 du nouveau code de procédure civile oblige le juge à restituer leur exacte
qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination qu'en auront donnée les parties. Or,
les enjeux ne sont pas minces. Une nullité - obligatoire - sanctionne toute décision d'augmentation du capital
par émission de titres nouveaux ne s'analysant ni en des actions ni en des actions de préférence (C. com.,
article L. 225-127). Le porteur d'actions de préférence peut avoir intérêt à voir disqualifier ses titres en titres
de créance, notamment dans le cas de la survenance d'une procédure collective affectant la société
émettrice. En outre, la qualification d'action de préférence ne saurait être opposée aux tiers si elle ne
correspond pas à la réalité. L'administration fiscale pourrait ainsi remettre en cause l'application d'un régime
o
fiscal de faveur pour l'imposition des dividendes attachés aux actions de préférence (V. infra, n 102 et 113).
D'autres créanciers pourraient contester la qualification de titres de capital en présence d'actions de
préférence sans droit de vote et assorties d'une rémunération prédéfinie qui continuerait à être servie même
en période déficitaire. Au-delà, la sincérité des comptes de l'émettrice pourrait être mise en doute si ce qui
apparaît comme des articles de dette était rangé dans la rubrique des capitaux propres. Assurément, il faut
que la qualification ne soit pas contestable et, pour cela, que certains critères objectifs soient réunis.
L'ordonnance du 24 juin 2004 n'est pas de grand secours. Selon l'article L. 228-11 du code de commerce, les
actions de préférence peuvent être émises « avec ou sans droit de vote, assorties de droits particuliers de
toute nature, à titre temporaire ou permanent » qui doivent être « mentionnés dans les statuts » (C. com.,
art. L. 228-11). Ce n'est pas une définition, mais tout au plus une double indication : d'une part, l'action de
préférence doit nécessairement comporter des « droits particuliers » ; d'autre part, l'absence de droit de vote
est sans influence pour la qualification d'action de préférence. C'est un début, mais c'est manifestement
insuffisant. Nous avons proposé (D. OHL, Aspects de la réforme du droit des valeurs mobilières, article préc.,
o
n 14 et s.) les critères de qualification suivants : - les actions de préférence sont des actions (V. infra,
o
n 98) ; - les actions de préférence à droits particuliers identiques forment une catégorie d'actions (V. infra,
o
n 119) ; - les actions de préférence doivent comporter un avantage supérieur aux actions ordinaires
o
(V. infra, n 122).

er
§1 - Premier critère de qualification : les actions de préférence sont des actions
98. En dépit des apparences, la proposition n'était pas évidente. Ainsi dans la conception du MEDEF, élément
moteur de la réforme du 24 juin 2004 (Les actions de préférence : pour une modernisation du droit des
valeurs mobilières, mai 2001, p. 4), les actions de préférence devaient former « une nouvelle catégorie de
titres entre les actions et les obligations », en somme un titre « mixte » à mi-chemin de l'action et de
l'obligation. L'ordonnance écarte ce point de vue : non seulement elle range l'action de préférence, même
non votante, dans une section II intitulée « Des actions » (C. com., art. L. 228-11 et s.), mais encore elle
énonce expressément que l'action de préférence contribue à former le capital social (C. com., art. L. 225-
127), lequel ne peut être divisé qu'en actions (C. com., art. L. 225-1). Par conséquent, les actions de
préférence doivent respecter les règles impératives du droit des sociétés applicables aux actions (V. infra,
o
n 99 et s.), à une exception d'importance cependant : ce sont des actions qui peuvent ne pas donner un
o
droit de vote (V. infra, n 106 et s.). Leur émission dans les groupes est expressément prévue par le
o
législateur, mais elle suscite de nombreuses incertitudes (V. infra, n 114 et s.).

A - Principe : les actions de préférence doivent respecter les règles de l'ordre public sociétaire
99. Créance « ultime ». - L'action de préférence n'étant qu'une action, elle ne confère à son titulaire
qu'une créance de tout dernier rang. Même si elle assure un rang très préférentiel dans le partage de l'actif
net de liquidation, l'actionnaire de préférence aura toujours une situation nécessairement subordonnée par
rapport à celle de tout créancier social. Ainsi encore, s'il peut en fait obtenir une restitution, au moins
partielle, de l'apport en cas de clause statutaire prévoyant le rachat de ses actions de préférence (C. com.,
art. L. 228-12, al. 2), le titulaire de celles-ci est soumis à la procédure d'opposition des créanciers sociaux
(C. com., art. L. 225-205, al. 2), car le rachat entraîne l'annulation des titres, du moins s'ils ne sont pas
cotés, et donc une réduction du capital non motivée par des pertes (R. MORTIER, Rachat d'actions et actions
o
rachetables, Rev. sociétés 2004.639, spéc. n 34 ).
100. Compétence d'émission. - L'action de préférence ne peut être créée que par l'assemblée générale
extraordinaire. Ce monopole se justifie à un double titre : les actions de préférence contribuent à former le
capital social (C. com., art. L. 225-127) et les droits particuliers qu'elles comportent doivent être définis dans
er e
les statuts de la société émettrice, ce qui implique leur modification (art. L. 228-11, al. 1 , 2 phrase).
Toutefois, l'assemblée générale extraordinaire peut choisir de déléguer sa compétence d'émission, ce qui est
o
une autre grande nouveauté de la réforme (V. supra, n 79 et s.). La délégation peut désormais concerner
les actions ordinaires comme les actions de préférence. Dans ce dernier cas, l'émission est subordonnée à la
condition préalable de l'insertion dans les statuts d'une clause définissant le contenu de la préférence, les
droits particuliers attachés aux actions, décision qui relève du monopole de l'AGE (J. MESTRE et
o
D. VELARDOCCHIO, Lamy Sociétés commerciales, 2005 n 4431 ; ANSA, Les actions de préférence, régime
juridique, mars 2005). Sans cette définition préexistante dans les statuts, une délégation de compétence
serait inefficace. L'émission d'actions de préférence peut avoir lieu lors de la constitution de la société ou
d'une augmentation de capital. Des actions de préférence peuvent être créées par la conversion d'actions
ordinaires (C. com., art. L. 228-15 : sol. implicite). Elles peuvent aussi être émises, mais seulement si les
statuts ont préalablement prévu et défini le type de préférence accordé aux actions en cause, au moyen
d'une attribution gratuite aux titulaires d'actions de préférence ou même à titre de distribution de dividendes,
l'article L. 228-18 du code de commerce ne l'excluant pas.

101. Proportionnalité. - L'action de préférence ouvre un droit de vote, lorsque ce droit est maintenu, en
proportion de la quotité de capital qu'elle représente en vertu de l'article L. 225-122 du code de commerce.
Ce texte, que l'ordonnance du 24 juin 2004 n'a pas écarté, est applicable à toutes les actions : une action,
une voix. Il est donc interdit aux SA et aux commandites par actions (mais non aux SAS, l'article L. 227-1 du
code de commerce excluant l'application des dispositions de l'art. L. 225-122) de créer des actions
(ordinaires ou de préférence) à vote multiple, à peine de nullité de la décision d'émission (C. com.,
art. L. 235-2-1). L'affirmation n'est pas contredite par la faculté de prévoir dans les statuts un droit de vote
double. Celui-ci est conçu par la loi (C. com., art. L. 225-123 et L. 225-124, non modifiés par Ord. 24 juin
2004) comme un privilège réservé aux titulaires d'actions nominatives et entièrement libérées, inscrites de
manière ininterrompue depuis deux ans au minimum à leur nom, en récompense de leur fidélité
d'actionnaire. Il n'est pas un « droit particulier » caractéristique d'une action de préférence pour deux
raisons. D'une part, le vote double peut bénéficier aussi bien aux actionnaires de préférence qu'aux
actionnaires ordinaires, dès lors que les uns et les autres remplissent les conditions requises par les textes
précités. Ces conditions ne sauraient varier selon la catégorie à laquelle appartiennent les actionnaires. Ainsi
er
la disposition de l'article L. 225-123, alinéa 1 , du code de commerce prévoyant le temps de présence
minimum de deux ans dans la société présente un caractère impératif. Les statuts ne peuvent pas la
diminuer. Une préférence consistant en un raccourcissement de la période de détention ne serait donc pas
possible. D'autre part, le vote double ne suit pas le titre. Il dépend de la personne de l'actionnaire et de son
comportement. Le droit de vote double n'est acquis qu'au terme de la période de détention de deux ans et il
se perd automatiquement en cas de cession de l'action, l'actionnaire montrant alors les limites de sa fidélité
à la société. Tout autre est le « droit particulier » attaché à une action de préférence, qui existe dès
l'émission du titre au profit de son titulaire (indépendamment de son ancienneté dans la société) et qui
subsiste en cas de cession du titre, quelles que soient les circonstances de la cession.

102. Respect de la prohibition de l'intérêt fixe ou intercalaire et des clauses léonines. - Les droits
particuliers peuvent consister en une faculté de prélèvement préférentiel sur les bénéfices ou sur l'actif net
de liquidation. L'action de préférence ne peut cependant être rémunérée en l'absence de bénéfice (C. com.,
art. L. 232-15). Cette interdiction peut poser problème lorsque les statuts prévoient que les actions de
préférence assurent une rémunération prédéfinie, plus ou moins fixe, ou lorsqu'ils stipulent que le dividende
est dû, même si l'assemblée générale ne décide pas formellement de distribution du bénéfice. L'action de
préférence ne peut pas non plus réserver à ses titulaires tous les bénéfices, ni les exonérer de toute
contribution aux pertes (C. civ., art. 1844-1). Assurément, ne seraient pas permises les clauses réservant
toute distribution future de dividendes aux seuls titulaires d'actions de préférence. Mais des difficultés
peuvent surgir dans des situations intermédiaires, moins nettement tranchées. Il existe aussi dans de telles
hypothèses (dividende réservé et/ou appréhendé hors assemblée) un risque fiscal non négligeable pour
l'application du régime des sociétés mères. En effet, l'administration fiscale pourrait contester, en application
de la jurisprudence du Conseil d'État, le caractère de dividende des sommes perçues (CE 8 juill. 1992, req.
o
n 88.734, Gardet, Rec. CE, p. 284) dès lors qu'elles ne seraient pas servies à l'ensemble des associés et ne
seraient pas la suite d'une décision régulière de l'assemblée générale de la société.
103. Respect des règles de hiérarchie et d'autonomie des pouvoirs. - Les droits particuliers peuvent
comprendre le droit à une information renforcée sur les affaires sociales ou celui d'être représenté au sein
o
des organes de direction ou de surveillance (V. not. J. COPPER-ROYER, op. cit., n 321 ; J. et E. ESCARRA et
o o
J. RAULT, op. cit., n 1079, p. 108 ; F. MONOD, Dictionnaire Joly Sociétés V Actions de priorité ; F.-
D. POITRINAL, La limite des droits non financiers attachés aux actions de priorité, Banque 1998.50 ; J.-
J. DAIGRE, F. MONOD et P. BASDEVANT, Les actions à privilèges non financiers, Dr. sociétés, Actes pratiques
o
n 35, nov. 1997). Cependant, les actions de préférence ne doivent pas conférer de prérogatives telles que
les règles de hiérarchie et d'autonomie des pouvoirs au sein de la société anonyme, élaborées par la
o
jurisprudence Motte (préc. supra, n 78 ; Y. GUYON, Traité des contrats, Les sociétés, Aménagements
e o
statutaires et conventions entre associés, 5 éd., 2002, LGDJ, n 156) et de la libre révocabilité des
dirigeants (C. com., art. L. 225-18, L. 225-55, L. 225-61), soient méconnues. Les actions de préférence qui
confèrent à leurs titulaires le droit intangible d'être représentés au sein des organes de direction ou de
surveillance de l'émettrice dans des conditions conduisant à neutraliser les compétences réservées des
organes sociaux, assemblée générale et conseil d'administration, sont susceptibles de présenter quelques
difficultés. Non pas que le principe de telles clauses soit contestable : elles étaient courantes avant
l'ordonnance et à notre connaissance non contestées devant les tribunaux. C'est dans leurs modalités de
mise en œuvre (la préservation d'une véritable liberté de choix des personnes appelées à voter) et par les
sanctions qu'appelle leur méconnaissance (comment sanctionner le vote félon) qu'elles suscitaient des
problèmes. De même, la possibilité de stipuler un droit de veto au sein de l'organe d'administration ou de
surveillance ou dans le cadre des assemblées générales paraît sujette à caution. Il est obligatoire que chaque
membre de l'organe d'administration ou de surveillance dispose d'une voix en son nom propre (il peut, le cas
échéant, disposer en outre d'une autre voix comme mandataire). Or, accorder un droit de veto reviendrait à
remettre en cause ce principe du vote individuel et égalitaire, puisque le vote des autres membres de
l'organe collectif serait neutralisé. Il en est de même en assemblée générale. Le droit de veto accordé à
certains actionnaires porte atteinte à la règle d'ordre public de la majorité, au principe de la souveraineté des
assemblées et au droit de vote des autres actionnaires. De plus, le droit de veto aboutirait à contourner
l'interdiction du vote plural.

104. Préservation du droit préférentiel de souscription. - Les actions de préférence ne peuvent


réserver ou ôter à leurs titulaires le droit préférentiel de souscription à de futures augmentations de capital.
De manière générale, l'article L. 225-132 du code de commerce n'autorise la suppression de ce droit que
pour une augmentation de capital déterminée. Un auteur (H. LE NABASQUE, Les augmentations de capital
réalisées avec maintien du droit préférentiel de souscription des actionnaires, Rev. sociétés 2004.491,
o
spéc. 495, n 10 ) a suggéré l'idée que la préférence pourrait peut être consister à « accrocher
statutairement à des actions de préférence des droits de souscription disproportionnés par rapport au
montant du capital qu'elles représentent », avant de l'écarter au motif que la règle de proportionnalité des
droits préférentiels de souscription au montant des actions détenues était une disposition impérative, ce qui
rend nulle toute décision d'augmentation de capital prise en violation de cette disposition en application de
l'article L. 225-149-3 du code de commerce.

105. Usufruit d'action de préférence. - L'usufruitier d'actions de préférence comportant un droit de vote
qui serait conventionnellement privé de ce droit au profit du nu-propriétaire, ne peut être empêché de voter
à l'assemblée générale lorsqu'elle statue sur les questions concernant les bénéfices, en application de l'arrêt
o
Hainaut du 31 mars 2004 (Cass. com. 31 mars 2004, n 03-16.694 , D. 2004, AJ 1167, obs. A. Lienhard
, RTD civ. 2004.318, obs. Th. Revet , Rev. sociétés 2004.317, note P. Le Cannu , JCP, éd. E, 2004.929,
note A. Rabreau ; A. VIANDIER, L'irréductible droit de vote de l'usufruitier, RJDA 2004.859 ; M.-
H. MONSÈRIÉ-BON et L. GROSCLAUDE, Usufruit des droits sociaux : le droit des sociétés rattrapé par le droit
civil, Dr. et patrimoine juill.-août 2004, p. 42), cette solution valant logiquement pour toutes les actions,
ordinaires ou de préférence.

B - Exception : les actions de préférence sont des actions qui peuvent ne pas ouvrir droit au vote
106. Actions de priorité et actions de préférence. - Le droit français connaissait (L. 16 nov. 1903) les
actions de priorité qui, elles aussi, disposaient de droits particuliers statutaires. Leur finalité était d'ailleurs
identique à celle, aujourd'hui, des actions de préférence : instituer une rupture d'égalité dans la vocation de
tout actionnaire, en proportion du nombre de ses titres, à participer à la conduite ou au contrôle de la société
et/ou à venir au partage du résultat. Mais les actions de priorité, qu'il est désormais interdit d'émettre, ne
pouvaient être privées du droit de vote. Cette impossibilité marque leur très grande différence avec les
actions de préférence.
107. Actions de préférence sans droit de vote. - Par le passé, lorsqu'un titre de capital était
irrémédiablement privé du droit de vote, il était refoulé de la catégorie des actions. Le certificat
d'investissement en est l'exemple. Titre de capital, mais sans droit de vote, il ne créait pas un droit d'associé
et, pour cela, la dénomination d'action lui était refusée. Au vrai, il n'existait pas d'actions sans droit de vote :
en dépit de leur appellation, les actions à dividende prioritaire sans droit de vote conféraient bien un droit de
vote virtuel, un droit de vote qui restait en sommeil si tout allait bien, mais qui était automatiquement activé
si les dividendes prioritaires faisaient défaut pendant trois exercices (C. com., ancien art. 228-14). La
privation du droit de vote de l'action de préférence constitue donc une véritable révolution dans le monde
des actions.

108. Incidences sur le concept d'action et sur la qualité d'actionnaire. - La faculté d'émettre des
actions « non votantes » entraîne d'importants bouleversements sur le concept d'action et sur la qualité
d'actionnaire. La définition de l'action est changée. Le droit de vote n'apparaît plus comme une composante
essentielle de l'action (V. R. KADDOUCH, Le droit de vote de l'associé, thèse, Aix-en-Provence, 2003, p. 446
et s. ; V. égal. J.-P. LANGLAIS et G. KERVILER, La notion d'apport remise en question, Actes pratiques 2004,
o
n 77) puisqu'elle peut exister sans lui. Le droit de vote n'est plus une condition nécessaire, mais une simple
modalité de l'action. La question, troublante, se pose de savoir si une action à droit de vote mérite toujours,
sans vérification, la qualification d'action. La faculté d'émettre des titres qualifiés actions ne comportant pas
de droit de vote modifie aussi la notion d'associé, puisque le droit de vote n'est plus inhérent à la qualité
d'associé, ce qui bat en brèche les solutions jurisprudentielles les plus anciennes et les mieux assises (Cass.
civ. 7 avr. 1932, DP 1933.1.153, note Cordonnier : « Le droit de vote aux assemblées générales, étant un
des attributs essentiels de l'action, ne saurait en aucun cas être supprimé » ; Cass. req. 23 juin 1941, Journ.
soc. 1943.209, note R.B. ; Cass. com. 9 févr. 1999, arrêt Château-d'Yquem, Bull. Joly 1999.567, note J.-
J. Daigre : les statuts ne peuvent déroger à la règle qui permet à tout associé de participer aux décisions
collectives et de voter).

109. Questions nouvelles. - Les justifications habituelles de l'incessibilité du seul droit de vote ne sont-
elles pas remises en cause (V. sur ce thème, V. déjà Cl. BAJ, La cessibilité du droit de vote, Cah. dr. entr.
o
3 oct. 1996, n 4, p. 16). Le droit de vote est-il toujours en dehors du commerce juridique (au sens des
art. 1128 et 1598 c. civ.). Il est aujourd'hui évident que le droit de vote a une valeur économique, qui se
calcule et que le marché jauge et apprécie en permanence. Le droit de vote ne peut-il vraiment pas exister
indépendamment des droits financiers nés de l'apport (sauf exception légale, comme le certificat de droit de
vote que l'ordonnance du 24 juin 2004 a supprimé pour l'avenir) ? L'assistance et le vote aux délibérations
de l'assemblée générale permettent-ils véritablement à l'actionnaire de contrôler que la société respecte les
droits pécuniaires entrés dans son patrimoine personnel avec la propriété de l'action (Cass. req. 23 juin
1941, préc.) ? Ne faut-il pas davantage se fier au contrat (les statuts) pour prévoir d'autres formes de
protection ? On ne peut que constater que l'ordonnance du 24 juin 2004, en ce qui concerne les actions de
préférence, a osé franchir le pas : le droit de vote n'est plus le rempart des droits de l'actionnaire ; il peut
sans dommage être abandonné sur le bord du chemin ; le contrat est un bien meilleur système de
protection. On passe ainsi d'une protection de l'actionnaire mal assurée par le droit de vote à une protection
jugée plus efficace par les statuts.

110. Actions de préférence à droit de vote aménagé. - Lorsque l'action de préférence a été créée avec
droit de vote (C. com., art. L. 228-11, al. 2), celui-ci peut être « aménagé » (par ex. l'exercice du droit de
vote est limité à certaines assemblées - assemblée générale extraordinaire et non assemblée générale
ordinaire - et/ou à certaines décisions comme celles susceptibles de modifier les droits des porteurs d'actions
de préférence), « suspendu » (ex. : le droit de vote des actionnaires est suspendu le temps qu'ils perçoivent
l'avantage pécuniaire attaché, selon le modèle - mais non forcément suivant les mêmes conditions - des
anciennes actions à dividende prioritaire sans droit de vote) ou encore supprimé. Là encore, l'ordonnance
apporte d'importantes modifications par rapport aux solutions les plus classiques.

111. Plafonnement du nombre des actions de préférence sans droit de vote. - L'article L. 228-11,
alinéa 3, du code de commerce interdit de créer des actions de préférence sans droit de vote pour plus de
50 % du capital social dans les sociétés non cotées et de 75 % dans les sociétés cotées, alors qu'il ne
plafonne pas le nombre des actions de préférence qui peuvent ainsi composer l'intégralité du capital, à
condition qu'elles disposent du droit de vote (arg. : l'art. L. 228-15, al. 2, du code de commerce permet
d'envisager la conversion de l'intégralité des actions en actions de préférence). Pour le calcul des quotités
er
légales de 50 % et 25 %, il faut, selon l'article L. 228-29-10, alinéa 1 , du code de commerce, « tenir
compte » des actions à dividende prioritaire sans droit de vote et des certificats d'investissement
existants pour calculer les 50 % (ou 25 %) d'actions de préférence sans droit de vote autorisées, même si
ces titres, du fait des particularités de leur régime, peuvent donner, un jour, accès au vote (al. 2). Cela
signifie, semble-t-il, qu'il convient de les ajouter aux actions de préférence sans droit de vote pour calculer
les maxima autorisés. Par exemple, lorsqu'une société non cotée aura émis des ADP ou certificats
d'investissement à hauteur de 40 % de son capital, elle pourra émettre jusqu'à concurrence de 10 %
d'actions de préférence sans droit de vote, mais pas davantage.

112. Actions de préférence dont le droit de vote est retiré ou « affaibli ». - Pour apprécier le
franchissement ou non du plafond légal, faut-il tenir compte des seules actions émises ab initio sans droit de
vote ou faut-il ajouter celles dont le droit de vote a été supprimé par la suite ou suspendu en vertu des
statuts ou de la loi (y compris pour des motifs « ordinaires » : autodétention d'actions de préférence ; non-
déclaration de franchissement de seuil, etc.) ? Dans l'attente de solutions bien établies, il semble prudent de
totaliser toutes les actions de préférence sans droit de vote, même si l'absence de droit de vote est
seulement temporaire (dans le même sens : A. VIANDIER, Les actions de préférence, JCP, éd. E, 2004.23 ;
J.-J. DAIGRE, L'aménagement du droit de vote, RD bancaire et bourse 2004.366 ; A. COURET et H. LE
o
NABASQUE, Valeurs mobilières et augmentations de capital, op. cit., n 535 ; Mémento Francis Lefebvre,
o
Sociétés commerciales, 2005, n 18198 ; Comité juridique de l'ANSA 3 nov. 2004). De même si les titulaires
d'actions de préférence ne sont admis à voter en assemblée générale d'actionnaires que dans des cas très
particuliers (par exemple, sur les questions qui mettent en cause leurs droits en tant que porteurs d'actions
de préférence ; sur le projet d'une dissolution anticipée de la société ou de sa transformation en une société
d'une autre forme), les titres devraient être considérés comme dépourvus du droit de vote selon la position
adoptée par le comité juridique de l'ANSA dans sa séance précitée du 3 novembre 2004. D'autres situations
peuvent poser problème. Ainsi que décider lorsque le droit de vote est limité aux décisions d'approbation des
comptes et d'affectation du résultat ? Il est évident qu'il ne s'agit plus de titres sans droit de vote et il faudra
les prendre en compte pour savoir si le plafond a été dépassé. Une extrême prudence est de mise. En effet,
un calcul trop juste expose à une sanction sévère, qui est l'annulabilité de toute émission ultérieure de
nouvelles actions de préférence sans droit de vote si elle a pour effet de porter la proportion de telles actions
au-delà du maximum légal (art. L. 228-11, al. 4). La nullité est facultative pour le juge mais, si elle est
prononcée, la nullité frappe l'émission en entier, même si elle n'est irrégulière que pour partie.

113. Risque fiscal. - L'absence de droit de vote, mais aussi peut-être, dans l'attente d'une instruction de
l'administration des impôts à ce sujet, sa suspension ou son aménagement (ex. : un droit de vote limité aux
AGE, ou réduit à certaines résolutions, ou encore suspendu pendant plusieurs années…) peuvent faire
obstacle à l'application de certains régimes fiscaux de faveur. Il en est ainsi des régimes de groupe : celui
des sociétés mères et filiales (5 % de détention et de droits de vote) et celui de l'intégration fiscale (95 %)
o
(V. supra, n 97).

C - Cas particulier des actions de préférence dans les groupes de sociétés


114. Présentation. Différences entre actions de préférence et actions « traçantes » ou « reflet ».
- L'article L. 228-13 du code de commerce prévoit que les droits particuliers mentionnés à l'article L. 228-11
peuvent être exercés dans la société qui possède directement ou indirectement plus de la moitié du capital
de l'émettrice ou dans la société dont l'émettrice possède directement ou indirectement plus de la moitié du
capital. Le problème se pose de savoir si la liberté d'émettre des actions de préférence assorties de droits
particuliers de toute nature est aussi grande lorsque ces droits ont vocation à s'exercer, non dans le sein de
la société émettrice, mais dans une autre société unie à l'émettrice par un lien en capital de plus de 50 %.
L'hypothèse ressemble à celle des actions dites « traçantes » ou « reflet » (A. VIANDIER, Les actions reflet,
RJDA 2001.3 ; Th. BONNEAU, De quelques stipulations affectant le dividende des actions sectorielles, RD
bancaire et financier 2000.151 ; Y. GUYON, Les tracking stocks, Mélanges AEDBF France, 2001, p. 183). En
effet, le rendement des actions de préférence peut tenir compte des résultats d'une entreprise autre que
l'émettrice, notamment d'une filiale de celle-ci, tout comme des actions traçantes. Mais les deux sortes
d'actions ne sauraient être confondues. Seules les actions de préférence sont le cas échéant susceptibles
d'autoriser leurs titulaires à exercer certains droits particuliers auprès de la société tierce, société mère ou
grand-mère de l'émettrice, ou de sa filiale ou sous-filiale. En revanche, des actions traçantes ne peuvent
normalement donner un droit à leurs porteurs à l'encontre d'une société différente de celle qui les a émises.

115. Procédure d'émission. - L'émission d'actions de préférence dans les groupes doit être autorisée par
l'assemblée générale extraordinaire de la société appelée à émettre les actions de préférence (société A) et
par celle de la société au sein de laquelle les droits sont exercés (société B), sur le rapport spécial des
commissaires aux comptes respectifs des sociétés A et B. La société A contracte l'obligation de créer et
d'inscrire au compte du souscripteur les actions de préférence (elle exécute son obligation de délivrance),
tandis que la société B prend l'engagement envers les porteurs, qui ne sont pas ses actionnaires, d'exécuter
les obligations qu'elle a souscrites à leur profit. De la sorte, les deux sociétés doivent modifier leurs statuts,
l'une procédant à une augmentation de son capital et l'autre devant reconnaître et définir dans ses statuts
les « droits particuliers » qu'elle a la charge de satisfaire (C. com., art. L. 228-11). Mais le respect des
formes ne suffit pas.

116. Droit de vote. - L'émission d'actions de préférence dans les groupes devra en outre respecter le
principe de l'indépendance juridique des sociétés membres d'un groupe. Or ce principe dicte d'assez étroites
limites à la liberté de manœuvre et l'on ne peut à cet égard que déplorer le laconisme déconcertant des
termes de l'article L. 228-13. Le rapport au président de la République qui précède l'ordonnance du 24 juin
2004 n'apporte aucun éclaircissement, puisqu'il se borne à paraphraser le texte. Si l'on raisonne en
application des principes habituels, plusieurs limites s'imposent. D'abord, la détention d'une action de
préférence ouvrant des droits dans une autre société ne peut, à elle seule, conférer la qualité d'actionnaire
de cette autre société. Ainsi, bien que l'article L. 228-13 vise les « droits particuliers » mentionnés à l'article
L. 228-11, c'est-à-dire des « droits particuliers de toute nature », il ne peut être question qu'une action de
préférence comporte au profit de son titulaire, actionnaire de la société A, le droit de voter aux assemblées
générales d'actionnaires de la société B. Comme l'énoncent des auteurs, « les principes fondamentaux en la
matière ne sont pas remis en cause par l'ordonnance, et notamment la liaison entre action et droit de vote…
Un droit de vote ne peut s'exercer s'il n'est pas rattaché à une action » (A. COURET et H. LE NABASQUE,
o
Valeurs mobilières et augmentations de capital, op. cit., n 530-2, p. 233). « Un droit particulier ne saurait
consister en l'octroi d'un droit de vote dans la filiale ou la mère. De la même façon, l'exercice d'un droit de
veto dans la société mère ou fille semble difficilement concevable » (M. BANDRAC, P. BOROTHEAU,
C. DEBIN, J.-Ph. DOM, S. GAILLET, F. LE ROQUAIS et M. SUPIOT, Le régime et l'émission des valeurs
o o
mobilières après les ordonnances de 2004, Actes pratiques n 77, sept.-oct. 2004, spéc. n 43). Le droit de
er
vote est intrinsèque à la qualité d'actionnaire (Avis comité juridique ANSA 1 déc. 2004). « Pour jouir des
droits d'un associé… il faut être associé : on ne saurait donc par exemple stipuler la participation avec voix
délibérative des porteurs d'actions de préférence dans les assemblées de la société tierce » (A. VIANDIER,
Les actions de préférence, JCP, éd. E, 2004.1440, spéc. 41).

117. Autres droits particuliers. - Quels droits exerçables dans la société B autres que le droit de vote aux
assemblées peut-on alors concevoir ? Il a été affirmé qu'à proprement parler le titulaire d'une action ne peut
tirer des revenus sous la forme de dividendes d'une société dont il n'est pas actionnaire (A. VIANDIER, op. et
loc. cit.). Les dividendes ne peuvent profiter qu'aux actionnaires de la société qui les distribue (M. BANDRAC,
P. BOROTHEAU, C. DEBIN, J.-Ph. DOM, S. GAILLET, F. LE ROQUAIS et M. SUPIOT, op. et loc. cit.). On a déjà
évoqué, à propos de la possible ressemblance des actions de préférence avec les actions traçantes, le droit
particulier consistant à percevoir des dividendes calculés sur la base des performances d'une société mère ou
d'une filiale. Peut-être pourrait-on retenir le droit à être consulté sur les orientations de certaines divisions
fonctionnelles qui regroupent diverses sociétés d'un groupe ou celui de missionner un expert pour effectuer
certaines investigations dans les comptes de certaines filiales. On pourrait aussi imaginer qu'une société en
difficulté règle son passif par remise d'actions comportant des droits financiers particuliers au sein de sa
société mère ou d'une filiale ou sous-filiale, par exemple une entité créée pour poursuivre ses activités, qui
prendrait l'engagement de rembourser le passif arriéré sur une certaine période. Mais la prudence est de
mise. Au final, il n'existe probablement pas beaucoup de « droits particuliers » susceptibles d'être exercés à
l'extérieur de la société émettrice.

118. Contreparties adéquates. - L'indépendance des patrimoines des sociétés du groupe impose en toute
hypothèse de prévoir des contreparties adéquates au profit de la société B lorsque l'exercice des droits de
préférence entraîne des frais à sa charge. Son intérêt propre ne saurait être sacrifié au profit de l'intérêt
d'une autre société, cette dernière serait-elle membre du même groupe (application de la jurisprudence
Rozenblum : Cass. crim. 4 févr. 1985, D. 1985.478, note D. Ohl). Autrement dit, la société B qui supporte la
charge de l'exercice des droits particuliers attachés aux actions de préférence doit recevoir une compensation
adaptée de la société A (ou d'une autre société du groupe, mais le problème est alors « relogé » ailleurs). En
outre, selon la même jurisprudence, les charges incombant à B ne devront pas excéder ses « possibilités
financières ». Ce qui entraîne une nouvelle et importante difficulté dans l'hypothèse, qui n'est pas non plus
envisagée par le texte, remarquablement muet sur la question, de la perte du lien en capital de plus de 50 %
entre A et B par cession de contrôle ou introduction en bourse de la majorité des actions. Le contrôle
changeant de mains, le lien de capital est rompu et la politique de groupe qui justifiait l'émission d'actions de
préférence ouvrant des droits dans une société différente n'existe plus. La sortie du groupe efface la cause
qui a déterminé les sociétés A et B, ainsi que les souscripteurs aux actions de préférence à contracter. Selon
un auteur, les actions de préférence « deviennent caduques dès que le lien majoritaire disparaît »
o
(A. VIANDIER, article préc., n 34). Quelle que soit l'appréciation que l'on puisse avoir sur cette caducité, il
est conseillé en pratique de prévoir les dispositions ou stipulations permettant, dans le cas d'une sortie de
groupe, la conversion automatique des actions de préférence en actions ordinaires de la société émettrice ou
leur rachat par celle-ci. De même, le mode de règlement des difficultés résultant de l'éventuelle inexécution
par la société B de ses engagements envers les titulaires d'actions de préférence devrait être
minutieusement précisé. À cet égard, il pourrait être envisagé que la société A soit tenue d'exécuter à la
place de la société B, si celle-ci s'avère défaillante, ou bien, en cas d'impossibilité d'exécution, que la société
A s'engage à réparer le dommage causé à la société B.

§ 2 - Deuxième critère de qualification : les actions de préférence forment une catégorie d'actions
119. Deuxième critère de qualification : les actions de préférence à droits particuliers identiques
forment une catégorie d'actions. - Les actions de préférence sont des actions, certes, mais qui ne sont
pas seulement définissables par les droits et obligations attachées aux actions (V. supra, premier critère de
o
qualification, n 98). Elles le sont aussi par les droits particuliers qu'elles comportent. Ces droits et
obligations ne résultent pas ni ne dépendent de la situation juridique dans laquelle les titulaires d'actions de
préférence se trouvent vis-à-vis de la société et ils sont transmis avec les titres en cas de cession. Les
actions de préférence constituent donc une catégorie d'actions, selon le critère de cette notion élaboré par la
doctrine (P. CORDONNIER, De l'égalité entre actionnaires, thèse, Paris, 1924 ; du même auteur, L'égalité des
actionnaires avant et après la loi du 22 nov. 1913, Journ. soc. 1924.417 ; M. JEANTIN, Observations sur la
notion de catégorie d'actions, D. 1995, chron. 88 ). Mais les actions de préférence ne forment pas
nécessairement un ensemble homogène par opposition au bloc constitué des actions ordinaires. Dès lors que
les actions de préférence peuvent porter des droits particuliers différents, il existe autant de catégories
possibles d'actions de préférence que de causes de préférence différentes. Les actions de préférence peuvent
se distinguer non seulement des actions ordinaires mais aussi entre elles.

120. Constitution des titulaires d'actions de préférence en assemblées spéciales (C. com.,
art. L. 228-19) - La notion de catégorie d'actions permet à son tour de préciser certains aspects du régime
des actions de préférence. Elle détermine en effet l'intervention d'une assemblée spéciale. C'est ainsi que les
titulaires d'actions de préférence à droits particuliers identiques sont de plein droit constitués en une
assemblée spéciale (C. com., art. L. 228-19). Il y aura autant d'assemblées spéciales que de catégories
distinctes d'actions de préférence, c'est-à-dire d'actions de préférence à droits particuliers différents. D'où
une certaine complexité d'organisation si des programmes d'émission d'actions de préférence sont lancés
successivement ou même concomitamment au profit de partenaires ou d'investisseurs différents. Constitués
en assemblée spéciale, les titulaires d'actions de préférence membres de la catégorie concernée sont investis
du pouvoir de bloquer toute décision de l'assemblée générale affectant les droits particuliers attachés à leurs
titres. Toute modification des droits particuliers doit obtenir l'approbation de l'assemblée spéciale (C. com.,
art. L. 225-99, al. 2). En revanche, l'assemblée spéciale ne peut s'opposer à l'exécution d'opérations
financières décidées par la société, sauf bien évidemment si elles aboutissent à modifier les droits particuliers
des porteurs d'actions de préférence. C'est ainsi que l'assemblée spéciale peut paralyser une opération de
fusion ou de scission dès lors que les titulaires des actions de préférence ne reçoivent pas en échange de
leurs actions de préférence des actions émises par la société bénéficiaire comportant des droits particuliers
équivalents (art. L. 228-17, al. 2). La gravité des conséquences prévisibles d'une fusion manquée donne une
arme puissante aux titulaires d'actions de préférence en désaccord avec les dirigeants. La contestation
judiciaire de l'équivalence, voire la simple menace d'une désapprobation de l'assemblée spéciale, peuvent
conduire les opérateurs à des concessions. Parmi les autres opérations financières, la modification et
l'amortissement du capital ont également semblé devoir justifier une protection des intérêts des titulaires
d'actions de préférence : les statuts, ou à défaut l'assemblée générale extraordinaire qui décide ces
opérations, doivent déterminer leurs incidences éventuelles sur les droits des porteurs d'actions de
préférence (art. L. 228-16). L'efficacité du dispositif est toutefois incertaine. La qualité de la rédaction de la
clause statutaire (ou de la résolution soumise à l'assemblée) n'est pas seule en cause. Quels recours peut-on
en effet concevoir si « l'incidence » réelle de l'opération financière réalisée n'est pas conforme à la relation
qui en aura été faite ? (Sur le sort des actions de préférence en cas de fusion ou de scission de la société
o
émettrice, consulter H. LE NABASQUE, À propos de la réponse ministérielle n 13316, JO Sénat Q 30 sept.
2004, p. 2236, RD bancaire et financier 2005.30).

121. Autres compétences de l'assemblée spéciale. - Statuant dans les conditions de l'article L. 225-99,
l'assemblée spéciale des porteurs d'actions de préférence peut tout d'abord donner mission à l'un des
commissaires aux comptes de la société aux fins de vérifier le respect des droits particuliers de ses membres
o o
(art. L. 228-19). Le décret n 67-236 du 23 mars 1967, dans sa nouvelle rédaction datant du décret n 2005-
112 du 10 février 2005, précise que le commissaire missionné doit donner son avis sur le respect par la
société des droits particuliers attachés aux actions de préférence. Par ailleurs, l'assemblée spéciale doit
approuver toute opération de fusion lorsque les actions de préférence n'ont pas été échangées contre des
actions des sociétés bénéficiaires du transfert de patrimoine comportant des droits particuliers équivalents
(art. L. 228-17 nouv.). En outre, les titulaires d'actions de préférence bénéficient d'une protection
supplémentaire : l'assemblée spéciale concernée peut donner mission à l'un des commissaires aux comptes
de la société d'établir un rapport spécial sur le respect par la société des droits particuliers attachés aux
o
actions de préférence (C. com., art. L. 228-19). Le décret d'application n 2005-112 précise que le
commissaire missionné doit indiquer, le cas échéant, depuis quand dure la méconnaissance des droits
particuliers. Il ajoute que le commissaire aux comptes doit diffuser son rapport aux titulaires d'actions de
préférence concernés lors d'une assemblée spéciale et le tenir à la disposition des actionnaires, au siège
social, au moins quinze jours avant ladite assemblée spéciale (Décr. 23 mars 1967, art. 206-6). Cette
mission confiée par un groupe d'actionnaires au commissaire aux comptes qui, jusque-là, généralement,
n'entretenait aucun rapport avec les actionnaires et déclinait leurs demandes d'investigation, est de nature à
modifier les habitudes prises et peut soulever des difficultés du point de vue de l'obligation au secret
professionnel et de l'indépendance du commissaire. Par ailleurs, un problème de recevabilité pourrait être
soulevé : pour mettre en mouvement la procédure, faudra-t-il apporter la preuve d'une entorse avérée ou
potentielle aux droits particuliers ? L'article L. 228-19 du code de commerce n'exige rien de tel, ce qui laisse
à penser que, sauf abus caractérisé, la procédure peut se répéter autant de fois que l'assemblée spéciale le
décidera.

§ 3 - Troisième critère de qualification : les actions de préférence comportent des avantages


supérieurs aux actions ordinaires. Énoncé
122. Comme la prefered share de droit américain qui lui a servi de modèle, l'action de préférence, pour
mériter sa qualification, doit créer au profit de son titulaire une préférence par rapport à une action ordinaire.
C'est l'avis des professeurs A. COURET et H. LE NABASQUE (Valeurs mobilières et augmentations de capital,
o
op. cit., n 504-8) pour lesquels « l'action de préférence ne saurait se ramener à un antiprivilège ». La même
o
opinion est professée par J. MESTRE et D. VELARDOCCHIO (Lamy Sociétés commerciales, 2005, n 4421) :
« La qualification d'action de préférence… est même difficilement concevable si, au final, l'action considérée
apparaît manifestement moins privilégiée que l'action ordinaire. » C'est aussi l'avis de Paul LE CANNU, pour
qui « il serait contraire au texte de l'article L. 228-11 que [les actions de préférence] ne comportent que des
éléments distinctifs négatifs. Il en résulte que les actions sans droit de vote doivent recevoir des droits
particuliers, ce qui nous replace dans la logique des actions à dividende prioritaire sans droit de vote » (RTD
com. 2004.534 ). L'action de préférence doit comporter des avantages supérieurs (D. DAVODET,
A. GUENGANT, Ph. ENGEL, S. LE PAVEC et S. de VENDEUIL, Actions de préférence, questions de praticiens
re
[1 partie], JCP, éd. E, 2005.1156). Il serait paradoxal que des titres dont la dénomination implique qu'ils
augmentent ou renforcent les droits de leurs titulaires par rapport aux autres actionnaires conduisent tout au
contraire à un affaiblissement de ces droits. Certes, le rapport au président de la République relatif à
l'ordonnance mentionne que « les droits sont entendus au sens générique du terme, les titres pouvant donc
être dotés d'obligations particulières et faire l'objet de restrictions ». Certes, également, peut-on observer
avec le Comité juridique de l'ANSA (réunion du 3 nov. 2004) que la définition des actions de
préférence donnée par l'article L. 228-11 qui se réfère à des droits particuliers est différente de celle qui était
retenue dans l'ancienne rédaction de ce texte applicable aux anciennes actions de priorité, qui mentionnait
clairement que ces actions jouissaient d'« avantages par rapport à toutes autres actions ». Mais, d'une part,
l'article L. 228-11 nouveau ne permet pas de créer des actions de préférence désavantagées par rapport aux
actions ordinaires - précision qui aurait été bienvenue, sinon indispensable vu l'importance de la question, si
tel avait été le but recherché par l'ordonnance. Et, d'autre part, le texte de l'article L. 228-11, qui fait seul
autorité, se limite à évoquer des actions assorties de droits particuliers dont les éventuelles restrictions
concernent exclusivement le droit de vote. C'est donc au premier chef lorsque les actions sont privées de
droit de vote qu'elles doivent être dotées de droits particuliers (P. LE CANNU, op. et loc. cit.).

123. Difficultés inhérentes à ce critère de qualification. - L'avantage pourrait très bien n'exister qu'en
« solde », après compensation des attributs qui peuvent éventuellement manquer au titre (c'est-à-dire le
droit de vote). Cela signifie que si le solde est négatif, si les atteintes aux droits attachés aux actions
ordinaires ne sont pas compensées, et au-delà, par des priorités ou avantages incontestables, il faut
disqualifier le titre faussement appelé action de préférence. Plus précisément, s'il est privé de droit de vote, il
faut le dégrader en simple titre de créance puisqu'il ne peut être qualifié d'action ordinaire. Il ne faut pas
cacher les difficultés pour déterminer ce solde. Elles sont cependant à notre avis inévitables et nullement
exceptionnelles. Il arrive assez souvent que le juge déduise la qualification juridique d'une opération d'une
pesée économique de l'élément à qualifier, éventuellement après expertise (par ex. pour savoir si
l'insuffisance de prix dans une vente cèle une donation dissimulée). L'appréciation des diverses prérogatives
offertes par le titre sera certes parfois délicate, mais l'analyse financière parvient bien aujourd'hui à calculer
la valeur économique d'un droit préférentiel de souscription à une augmentation de capital, voire d'un droit
de vote…

124. Critiques doctrinales. - L'opinion selon laquelle les actions de préférence doivent être avantageuses
ne fait cependant pas l'unanimité. Certains n'excluent pas que les actions de préférence confèrent des droits
inférieurs aux actions ordinaires et rejettent la nécessité d'une compensation de la suppression du droit de
vote par un avantage pécuniaire que n'auraient pas les actions ordinaires. Il a d'abord été avancé que « c'est
l'altérité et non le privilège qui définit l'action de préférence » (A. VIANDIER, Les actions de préférence, JCP,
o
éd. E, 2004.1440, spéc. n 8). De cette manière, l'action de préférence pourrait être « dotée de prérogatives
inférieures à celles des autres actions ». Mais interpréter ainsi le texte réduit la préférence à « l'altérité »,
c'est-à-dire à la différence que présente l'action de préférence avec une action ordinaire. Or, une différence
n'égale pas nécessairement une préférence. La seule existence d'une différence par rapport à une action
ordinaire ne suffit pas pour caractériser une action de préférence. Faut-il encore que cette différence consiste
précisément en un avantage au profit de son titulaire, que n'a pas l'actionnaire ordinaire.

125. Interprétation large d'un nouveau principe de liberté. - Un autre auteur (F. DRUMMOND, Un
nouveau principe : la liberté d'émettre « toutes valeurs mobilières », RD bancaire et financier 2004.361)
justifie le dépassement d'une lecture littérale des mots « action de préférence » par la ratio legis :
l'ordonnance permet aux sociétés par actions de créer de nouveaux titres, complètement inédits, sous
l'étiquette « actions de préférence ». Cette nouvelle liberté ne doit pas être entravée par une lecture « au
premier degré » des termes action de préférence. Sans doute l'argument sonne juste quand il y a matière à
interprétation : on progresse toujours dans la bonne direction en cherchant, à partir des dispositions
exprimées, des solutions nouvelles conformes aux intentions du législateur. Mais, dans le cas particulier,
cette analyse peut être contestée. En premier lieu, les intentions du « législateur » ne sont pas ici connues, à
défaut de travaux préparatoires publiés - catégorie dont ne saurait relever le rapport au président de la
République sur l'ordonnance. En deuxième lieu, il est difficile de retenir une interprétation qui aboutit à
donner un sens exactement inverse au mot qu'utilise le législateur : une action de préférence ne peut être
une action de contre-préférence. Si l'ordonnance avait englobé dans les nouveaux titres de capital créés par
elle des titres dotés de droits inférieurs à ceux attachés à l'action ordinaire, elle aurait évité la locution
d'action de préférence et utilisé simplement des expressions plus neutres telles que « actions particulières »
(à l'instar des droits qu'elles confèrent) ou « actions spéciales » (à l'imitation des assemblées qui réunissent
leurs titulaires). En troisième lieu, si les actions de préférence n'étaient pas nécessairement plus
avantageuses que les autres, on ne comprendrait pas que les titulaires d'actions ordinaires devant être
transformées en actions de préférence soient exclus du vote sur la conversion, sous peine de nullité absolue,
et que leurs actions ne soient pas prises en compte pour le calcul du quorum et de la majorité (art. L. 228-
15, al. 2).

126. Action de préférence et certificat d'investissement. - Un argument par analogie a enfin été
proposé qui est relatif aux certificats d'investissement, titres qui ont vocation à disparaître et à être
remplacés par des actions de préférence (Comité juridique de l'ANSA 3 nov. 2004 ; J.-J. DAIGRE,
L'aménagement du droit de vote, RD bancaire et financier 2004.366). Le raisonnement prend appui sur les
dispositions des articles L. 228-33 et L. 228-34 du code de commerce qui prévoient dans certaines situations
- distribution gratuite de titres de capital et augmentation de capital en numéraire - la remise aux
propriétaires de certificats d'investissement d'actions de préférence sans droit de vote et assorties des
mêmes droits pécuniaires que les certificats. Or, les certificats d'investissement qui sont par définition des
titres non votants n'offrent à leurs propriétaires aucun avantage financier supplémentaire par rapport à une
action ordinaire, puisqu'ils n'ont en principe vocation qu'au seul « dividende de base ». La conversion
imposée par la loi des certificats d'investissement ordinaires en actions de préférence serait la preuve que
l'ordonnance considère qu'une action de préférence peut conserver sa qualification en étant assortie de droits
inférieurs à ceux des actions ordinaires.

127. Il est permis de ne pas être entièrement convaincu. Rien n'interdit d'émettre des actions de préférence
sans droit de vote, assorties des mêmes droits pécuniaires que les certificats, mais comportant des droits
particuliers extra-pécuniaires. De plus, le raisonnement tenu conduit à considérer que « les actions de
préférence sans droit de vote (remises aux propriétaires de certificats d'investissement) ne seront donc pas
nécessairement assorties de droits particuliers, pécuniaires ou autres » (J.-J. DAIGRE, loc. cit.). Or, dès lors
que la marque essentielle d'une action de préférence est de conférer des droits particuliers à son titulaire, au
o
point que le titre est en réalité uniquement repérable par ces droits particuliers (V. supra, n 119 et s.), une
action de préférence sans droit particulier par rapport à une action ordinaire ne peut plus être une action de
préférence…

128. À moins de considérer que le droit particulier peut être l'absence de droit de vote, il faut constater que
des titres sont qualifiés aux articles L. 228-33 et L. 228-34 du code de commerce d'actions de préférence qui
ne le sont pas selon l'article L. 228-11. On comprend, certes, l'embarras des auteurs de l'ordonnance : les
propriétaires de certificats doivent normalement recevoir ou pouvoir souscrire de nouveaux certificats ; or,
l'ordonnance du 24 juin 2004 interdit d'émettre de nouveaux certificats d'investissement et il est impossible
de distribuer ou d'attribuer des actions ordinaires, donc votantes, à celui qui n'a que des titres sans droit de
vote. La seule solution était donc d'attribuer aux propriétaires de certificats d'investissement l'unique titre de
capital restant, à part l'action, à savoir l'action de préférence. L'action de préférence est ici utilisée comme
un simple expédient, pour démêler une situation autrement sans issue. Il est excessif d'en tirer la preuve
certaine que l'action de préférence peut être moins dotée qu'une action ordinaire. La correspondance entre
certificats d'investissement et actions de préférence est faite pour reclasser les certificats existants et ne pas
en mettre d'autres en circulation. « Les actions de préférence sans droit de vote sont appelées à remplacer
les certificats d'investissement dans les sociétés qui ont émis de tels titres » (P. LE CANNU, L'ordonnance
o
n 2004-604 du 24 juin 2004 et les actions de préférence, RTD com. 2004.533 ). Comme l'écrit justement
le professeur Th. BONNEAU, « on ne doit toutefois pas donner à cette correspondance [entre les certificats
d'investissement et les actions de préférence] une portée exagérée car elle n'est établie que pour faciliter le
o
passage aux nouveaux titres » (Th. BONNEAU, L'ordonnance n 2004-604 du 24 juin 2004… Son application
dans le temps, Dr. sociétés 2004.6).

Section 2 - Obligations

129. Présentation. Marché primaire. - Les obligations sont nées de la pratique pour répondre aux besoins
e
de financement des premières grandes sociétés par actions au XIX siècle, spécialement des compagnies de
chemin de fer. L'importance prise par ce moyen de financement est à l'aune des besoins des investissements
des entreprises et surtout des très considérables déficits publics qu'il s'agit de refinancer. La dette obligataire
de l'État français (en OAT surtout) représente la grande majorité des opérations réalisées par les émetteurs
français. La dette publique ne désenfle pas car les emprunts échus sont remboursés par de nouveaux
emprunts (en 2001, les émissions brutes faites par le Trésor atteignaient 3 à 4 milliards d'euros par mois :
Source Bull. COB mai 2001, p. 124). Une plate-forme est même exclusivement dédiée à la négociation des
emprunts de l'État : MTS France. Les entreprises privées sont dans une plus faible mesure des pourvoyeurs
du marché obligataire, notamment en produits qui ne sont pas concurrencés par les emprunts publics tels
que les obligations convertibles qui offrent à l'investisseur l'attrait des actions avec la sécurité des
obligations. Mais le volume reste modeste : il ne se traite qu'une centaine de lignes d'obligations convertibles
sur le marché secondaire parisien pour un volume d'échange annuel de 25 milliards d'euros. Le marché
obligataire français est un marché quasi exclusivement de gré à gré. Dans leur très grande majorité, les
acheteurs sont des investisseurs institutionnels (assurances, caisses de retraite, OPCVM, établissements de
crédit). Les particuliers ne détiennent que 5 % des emprunts d'État français (La Tribune 16 déc. 2004). Les
intermédiaires pour la négociation des OAT sont appelés des spécialistes en valeurs du Trésor qui jouent le
rôle de teneurs de marchés.

ACTUALISATION
129 s. Voir la rubrique Obligation [Sociétés].

130. Rachat des obligations par l'émetteur sur le marché secondaire. - Il peut être avantageux pour
la société d'acquérir les obligations dont elle est débitrice sur le marché secondaire en cas d'élévation du
taux d'intérêt sur le marché primaire car une hausse provoque normalement une baisse des cours des
emprunts cotés sur le marché secondaire, les obligations nouvelles devenant plus attractives pour les
investisseurs que les anciennes. La société emprunteuse peut même avoir intérêt à émettre de nouvelles
obligations pour financer le rachat des anciennes. Inversement, pour le créancier obligataire, la vente de ses
titres, avant l'échéance, sera avantageuse en cas de baisse du taux d'intérêt du marché primaire car une
telle baisse entraîne une hausse des cours des emprunts cotés sur le marché secondaire, les obligations qu'il
détient étant plus recherchées que les obligations nouvellement émises. La validité de l'opération de rachat
n'a jamais été contestée car la société est toujours libre d'acquérir des créances sur elle-même et d'éteindre
ainsi sa dette par confusion en procurant à l'obligataire un remboursement anticipé. La seule exigence légale
est que les obligations rachetées par la société soient annulées et ne puissent plus circuler.

ACTUALISATION
130. Libéralisation du régime de rachat de titres ne donnant pas accès au capital par l'institution d'un
dispositif d'acquisition ordonné (Règl. gén. AMF, art. 238-1 à 238-5, nouv., réd. Arr.du 20 août 2010
portant homologation des modifications du RG, JO 28 août ; D. 2010. Actu. 1939 ; Rev. sociétés 2010.
474, obs. Conac ).

131. Définition. Plan. - Les obligations sont des « titres négociables qui, dans une même émission,
confèrent les mêmes droits de créance pour une même valeur nominale » (C. com., art. L. 228-38). Les
obligations ici étudiées sont les plus anciennes et les plus simples, celles qui se dénouent seulement par le
remboursement de l'emprunt en numéraire, par opposition aux obligations composées qui, en guise de
remboursement ou en complément de celui-ci, donnent accès, selon des modalités variables, au capital de
l'émetteur ou à d'autres titres de créance. Il convient de préciser les conditions d'émission des obligations
o o
(V. infra, n 132 et s.), puis le statut des créanciers obligataires (V. infra, n 149 et s.), avant d'examiner les
o
quasi-obligations que sont les titres participatifs et les titres subordonnés (V. infra, n 162 et s.).

ACTUALISATION
131-1. Qualification d'obligation. Garantie de remboursement. - Doit être refusée la demande
d'un client qui réclame des dommages et intérêts à son courtier en assurance à raison de la perte en
capital constatée sur un portefeuille obligataire investi dans un contrat d'assurance vie motifs pris de ce
que le créancier obligataire aurait droit au remboursement du nominal des obligations à l'échéance alors
que « la qualification d'obligation n'est pas subordonnée à la garantie de remboursement du nominal du
e o
titre » (Civ. 2 , 23 nov. 2017, n 16-22.620 , Rev. sociétés 2018. 392, note J.-M. Moulin ).

er
Art. 1 - Conditions de l'émission
er
§1 - Conditions relatives à l'émetteur
132. Elles tiennent en premier lieu à la capacité de l'émetteur et, en second lieu, aux organes compétents
pour prendre la décision d'émission.

A - Capacité de l'émetteur
133. Les personnes physiques n'ont pas la capacité d'émettre des obligations. Seules les personnes morales,
et seulement certaines parmi elles, peuvent émettre des obligations. Le plus important émetteur est l'État,
mais d'autres institutions, qui ont souvent le double souci de se procurer de nouvelles ressources de
financement et d'intervenir sur les marchés de capitaux et monétaire à court terme, peuvent lancer des
emprunts obligataires. On peut citer notamment la Caisse des dépôts et consignations, les collectivités
locales et certains établissements publics tels que l'Agence française de développement (AFD) ou la Caisse
d'amortissement de la dette sociale (CADES). Les émetteurs de droit privé sont principalement les sociétés
par actions. Il leur est demandé d'avoir établi au moins deux bilans régulièrement approuvés par leurs
er
assemblées d'actionnaires ou, à défaut (C. com., art. L. 228-39, al. 1 ), d'avoir fait préalablement vérifier
leur actif et leur passif dans les conditions prévues aux articles L. 225-8 et L. 225-10 du code de commerce,
c'est-à-dire par un professionnel de la comptabilité désigné en justice avec une mission comparable à celle
d'un commissaire aux apports. Par ailleurs, leur capital doit être entièrement libéré sauf si les actions non
libérées et/ou les obligations à émettre sont réservées aux salariés (C. com., art. L. 228-39, al. 2).

134. SARL de taille importante. - L'ajout des SARL, ou du moins des SARL économiquement les plus
o
importantes, à la liste des émetteurs est récent. Il date de l'ordonnance n 2004-274 du 25 mars 2004
(H. LÉCUYER, Commentaire de l'ordonnance du 25 mars 2004 dans ses dispositions relatives aux SARL,
o
Petites affiches 16 avr. 2004, p. 4 et s. ; T. MASSART, Aspects sociétaires de l'ordonnance n 2004-274 du
25 mars 2004 portant simplification du droit et des formalités pour les entreprises, Bull. Joly 2004.743), qui
a suivi sur ce point l'exemple des droits allemand et italien. L'article L. 223-11 du code de commerce
subordonne l'émission des obligations par les SARL à la réunion de plusieurs conditions : (i) les obligations
doivent être obligatoirement nominatives ; (ii) les SARL émettrices doivent avoir établi les comptes de trois
exercices de douze mois, régulièrement approuvés par les associés ; (iii) le placement des obligations émises
ne peut pas s'opérer par appel public à l'épargne, ce qui exclut toute publicité, comme le démarchage et
l'entremise de banques (H. LÉCUYER, article préc. ; B. SAINTOURENS, L'attractivité renforcée de la SARL
o
après l'ordonnance n 2004-274 du 25 mars 2004, Rev. sociétés 2004.207 ), et limite la souscription aux
associés, à leurs relations familiales ou amicales et, au-delà, au cercle des investisseurs « qualifiés » ou
er
composé de moins de cent 100 personnes (C. mon. fin., art. L. 411-2, al. 1 ) - à défaut de placement public,
le placement privé est autorisé ; (iv) la « taille » des SARL doit être assez importante. Ce sont les SARL
tenues en vertu de l'article L. 223-35 du code de commerce de désigner un commissaire aux comptes. Ne
sont en conséquence éligibles que les SARL qui dépassent deux au moins des trois seuils fixés à l'article 12
du décret du 23 mars 1967 (à savoir, un total du bilan de 1 550 000 € ; un chiffre d'affaires annuel HT de
3 100 000 € et un nombre moyen de salariés égal à 50). Il ne suffirait pas que les SARL, sans y être
légalement tenues, demandent spontanément la désignation d'un commissaire aux comptes
(B. SAINTOURENS, article préc., spéc. p. 212 ; H. LÉCUYER, article préc., spéc. p. 13). Comme on l'a
pertinemment remarqué, « il serait assez facile de demander la désignation d'un commissaire aux comptes
avec pour seul objectif de pouvoir ultérieurement émettre des obligations » (A. COURET et H. LE NABASQUE,
o
Valeurs mobilières et augmentations de capital, op. cit., n 380, p. 172).

135. Associations et GIE. - À titre dérogatoire, d'autres personnes morales de droit privé telles que les
associations et les groupements d'intérêt économique peuvent également émettre des obligations, mais sous
la condition de bénéficier de la garantie d'une collectivité publique ou de sociétés qui remplissent, sans aide
extérieure, les conditions pour émettre des obligations. La garantie de l'État est la plus fréquente. Mais il
existe d'autres garanties : celle d'une région, d'un département, d'une commune ; parfois celle donnée par
une société mère pour les emprunts de ses filiales.

136. Groupement d'emprunteurs. - Une société peut émettre des obligations, seule ou en se groupant
avec d'autres. Les raisons d'un emprunt obligataire collectif peuvent être diverses : appartenance à un même
secteur d'activité ou à un groupe, faible importance relative des besoins financiers individuels à couvrir.
Chaque entreprise participante reçoit une part de l'emprunt global placé par le groupement (GIE, holding
d'un groupe, société de développement régional…) et en garantit le remboursement. Cette formule évite
d'avoir à faire appel au marché pour des montants isolément trop faibles.

B - Organes compétents
1° - Dans les sociétés par actions

137. Sous l'empire de la législation précédant l'ordonnance du 24 juin 2004, le pouvoir de décider un
emprunt obligataire appartenait exclusivement à l'assemblée générale ordinaire des actionnaires. Les
praticiens et certaines organisations professionnelles regrettaient la lourdeur de ce système qui remontait à
une conception ancienne dans laquelle une émission obligataire s'analysait en un « complément de capital »
(Cass. crim. 15 juin 1954, JCP 1955. II. 724, note D. B.) et s'accompagnait d'un formalisme rigoureux
proche de celui des émissions d'actions (V. P. LE CANNU, Les émissions d'obligations sans droit d'accès au
o
capital après l'ordonnance n 2004-604, RTD com. 2004.536 ). C'était le temps où le capital-obligations
était perçu comme une source de financement venant en appoint au capital-actions (B. OPPETIT, article
o
préc., in L'Europe et le droit des valeurs mobilières, Banque et droit 1991, n hors série). Il était affirmé que
(i) « l'émission d'emprunts sous quelque forme que ce soit n'est pas une attribution normale de l'assemblée
o
générale » (Comité juridique de l'ANSA 5 janv. 2000, rapporté in Brochure ANSA préc. [supra, n 51],
p. 136) et que (ii) l'emprunt obligataire ne constituait qu'un des modes de financement externe de la société
et qu'il n'était pas justifié que les dirigeants - qui disposent du pouvoir d'engager seuls la société dans des
opérations de crédit - se plient à des règles plus lourdes pour l'émission d'obligations (V. rapport conjoint de
l'AFEP, de l'ANSA et du MEDEF, Pour un droit moderne des sociétés, oct. 2003, p. 71). Désormais, aux
er o
termes de l'article L. 228-40, alinéa 1 , du code de commerce modifié par l'ordonnance n 2004-604 du
24 juin 2004, « le conseil d'administration, le directoire, le ou les gérants ont qualité pour décider ou
autoriser l'émission d'obligations, sauf si les statuts réservent ce pouvoir à l'assemblée générale ou si celle-ci
décide de l'exercer ». Ce sont donc maintenant, par principe, les organes de gestion et non l'assemblée, les
dirigeants et non les actionnaires qui vont décider les émissions obligataires dans les sociétés par actions. En
droit positif, l'assemblée n'a plus compétence que dans le cas où une stipulation statutaire expresse lui
réserve le pouvoir d'émission. La perte du pouvoir d'émission de l'assemblée n'est que faiblement compensée
par la nouvelle obligation imposée au conseil d'administration et au directoire d'inclure dans leur rapport
annuel aux actionnaires « une analyse objective et exhaustive de l'évolution des affaires, des résultats et de
la situation financière de la société, notamment de sa situation d'endettement, au regard du volume et de la
complexité des affaires » (C. com., art. L. 225-100, al. 3).

138. Maintien de l'ancien système. - En pratique, il est probable que beaucoup de sociétés conserveront
purement et simplement leurs statuts dans l'état qui était le leur au moment de l'entrée en vigueur de
l'ordonnance du 24 juin 2004. Si les statuts se sont limités à répéter la solution légale de la compétence
d'émission exclusive de l'assemblée, la compétence sera celle de l'assemblée puisque les sociétés restent
liées par leurs dispositions statutaires, nonobstant le changement de législation.

139. Décision de l'assemblée générale d'exercer le pouvoir d'émission. - Dans le nouveau système,
s'il s'applique, l'assemblée a encore malgré tout, selon l'article L. 228-40, le pouvoir d'exercer directement le
pouvoir d'émission à la place de l'organe de gestion. Mais cette faculté paraît bien théorique. En effet, même
si l'assemblée (par le truchement du président de son bureau ? - les textes sont muets) le décidait, elle ne
pourrait délibérer sur une question qui n'est pas inscrite à l'ordre du jour (C. com., art. L. 225-105, al. 3).
Elle resterait dépendante du conseil d'administration, qui est maître de l'ordre du jour de l'assemblée qu'il
convoque. En définitive, le conseil conserverait ainsi l'initiative de la décision d'émission. Et si, par hasard, un
actionnaire minoritaire (C. com., art. L. 225-105, al. 2) ou le comité d'entreprise (C. trav., art. L. 432-6-1)
demandait l'inscription du projet d'émission à l'ordre du jour, il y aurait assez peu de chances que la majorité
consente à approuver le projet. En pratique, il faudrait imaginer que le projet d'émission obligataire soit
ajouté à l'ordre du jour de l'assemblée, à la demande d'actionnaires majoritaires. L'hypothèse semble quand
même exceptionnelle.

140. Délégation financière. - L'article L. 228-40 du code de commerce, dans ses alinéas 2 et 3, permet et
organise les délégations des pouvoirs pour réaliser l'opération. Le conseil d'administration peut déléguer à un
ou plusieurs de ses membres, au directeur général ou, en accord avec ce dernier, à un ou plusieurs
directeurs généraux délégués les pouvoirs nécessaires pour réaliser, dans un délai d'un an l'émission
d'obligations et en arrêter les modalités. De son côté, le directoire peut donner la même délégation pour la
même durée à son président et avec l'accord de celui-ci à un ou plusieurs de ses membres. Dans les
établissements de crédit, délégation peut être donnée à toute personne. Le même délai maximum d'un an
s'applique. En revanche, l'article L. 228-40 ne prévoit pas de règles particulières pour les délégations que
peut donner l'assemblée lorsque celle-ci décide ou autorise l'émission d'obligations. Il semble que
l'assemblée puisse, dès lors, prévoir une délégation d'une durée supérieure à une année.

2° - Dans les SARL

o
141. L'article L. 223-11 du code de commerce (mod. par Ord. n 2004-274 du 25 mars 2004, art. 12),
précise que « l'émission d'obligations est décidée par l'assemblée générale des associés, conformément aux
dispositions applicables aux assemblées générales d'actionnaires » (T. MASSART, article préc., Bull. Joly
2004.743), sauf celles expressément refoulées par l'ordonnance du 25 mars 2004, qui sont celles des articles
L. 228-39 à L. 228-43 et L. 228-51. Ces exclusions appellent plusieurs remarques. Tout d'abord, il a été
observé (B. SAINTOURENS, article préc., Rev. sociétés 2004.212 ) que la mise à l'écart de l'article L. 228-
39 du code de commerce n'est pas anodine car elle permettrait l'émission d'obligations par les SARL dont le
capital n'a pas été libéré dans sa totalité. Ensuite, les articles L. 228-41 et L. 228-42 ont été abrogés (Ord.
o
n 2004-604 du 24 juin 2004, art. 40). Or l'abrogation de l'article L. 228-41 semble autoriser la délégation
au gérant de SARL des pouvoirs nécessaires pour réaliser l'émission obligataire décidée par l'assemblée.
Quant aux exclusions des articles L. 228-43 et L. 228-51, elles sont bien naturelles, ces textes visant l'appel
public à l'épargne, auquel les SARL n'ont pas accès.

142. L'exclusion de l'article L. 228-40 pose une autre difficulté, en apparence plus sérieuse. L'ordonnance
o
n 2004-274 du 25 mars 2004 a en effet écarté ce texte à une époque où il était encore rédigé comme suit :
« L'assemblée générale des actionnaires a seule qualité pour décider ou autoriser l'émission d'obligations. »
Il est dès lors permis de se demander pourquoi ce texte a été banni du droit des émissions obligataires dans
les SARL, dès lors que le principe retenu dans cette ordonnance (art. 12) était précisément que l'émission
d'obligations devait être décidée par l'assemblée générale des associés. Que peut signifier le refus de ses
auteurs de transposer à la SARL le monopole de l'assemblée générale alors imposé par l'article L. 228-40
pour la SA dans son ancienne rédaction ? La rédaction de l'article L. 223-11 du code de commerce est
quelque peu troublante. Mais il serait sans doute téméraire d'en déduire que le gérant de la SARL peut
décider, à côté de l'assemblée des associés, l'émission d'obligations. En dépit de la rédaction de l'article
L. 223-11 du code de commerce, décidément bien singulière (A. COURET et H. LE NABASQUE, Valeurs
o
mobilières et augmentations de capital, op. cit., n 382, p. 174), il faut retenir que dans les SARL la
compétence exclusive est celle de l'assemblée des associés.

§ 2 - Réalisation de l'émission. Publicité


143. La loi impose, comme pour l'émission d'actions, l'insertion, préalablement à toute autre forme de
publicité, d'une notice au BALO et l'établissement d'un document d'information soumis pour visa à l'AMF pour
toute émission obligataire qui fait publiquement appel à l'épargne. Ce document d'information est celui visé
aux articles 211-1 et suivants du règlement général de l'AMF, dès lors que l'admission des titres obligataires
à la cote est sollicitée.

144. Ce peut être le prospectus simplifié si les obligations émises ne sont pas destinées à être cotées mais
seulement diffusées dans le public (Règlement général de l'AMF, art. 214-1 et s.) par un des procédés
d'appel public à l'épargne : recours à la publicité ou au démarchage, concours d'un établissement de crédit
ou d'un prestataire de services d'investissement. Tel sera pratiquement toujours le cas en raison du concours
de banques qui effectuent, et souvent garantissent, le placement de l'emprunt, lorsqu'elles ne le « prennent
pas ferme ».

145. Quant aux sociétés émettrices qui ne font pas appel public à l'épargne et dont les titres ne sont donc
pas admis aux négociations sur un marché réglementé, les formalités sont plus réduites. Ainsi les SARL
doivent simplement mettre à la disposition des souscripteurs une notice relatant les conditions de l'émission
et un document d'information selon les modalités fixées par décret en Conseil d'État (C. com., art. L. 223-11,
al. 3).

146. Notation de l'emprunt par une agence de notation de crédit. - Une agence de notation de crédit -
dite aussi agence de rating - est un organisme indépendant et spécialisé qui a pour objet d'émettre des
opinions sur la solvabilité d'un émetteur ou sur la qualité d'un titre à une date donnée. La directive
o e o
européenne n 2003/125/CE de la Commission du 22 décembre 2003 (10 considérant, JOUE, n L 339,
24 déc.) recommande que les agences de notation s'organisent de telle manière « que les notations de crédit
qu'elles publient soient présentées de manière équitable et qu'elles mentionnent de manière appropriée leurs
intérêts ou conflits d'intérêts significatifs en rapport avec lesdits émetteurs ou instruments auxquels se
rapportent leurs notations de crédit » (B. DONDERO, Le rapport 2004 de l'AMF sur les agences de notation,
Dr. sociétés 2005, Alerte 38, p. 4 ; B. DONDERO, M. HASCHKE-DOURNAUX et S. SYLVESTRE, Les agences de
o
notation, Actes pratiques, 2005, n 78, p. 5 ; G. ELIET et A. GAUVIN, Déontologie de la notation du crédit,
RD bancaire et financier 2004.432 ; C. BARTHÉLEMY, La garantie implicite, gratuite et illimitée de l'État aux
établissements publics : mythe ou réalité ?, CJEG 2004.423 ; J.-P. MATTOUT et S. MOUY, La notation, Bull.
Joly Bourse 1994.441 ; A. COURET, Les agences de notation : observations sur un angle mort de la
réglementation, Rev. sociétés 2003.765 ; J.-F. DE POLIGNAC, Du bon usage de la notation, Banque
o
magazine n 658, mai 2004, p. 22 ; Ph. BISSARA, Analystes financiers et agences de notation, Bull. Joly
o
Bourse 2004.11 ; divers auteurs, Quelles exigences pour la notation financière ? Rev. Risques n 61, mars
2005, p. 16 et s. ; B. LE BARS, Adoption d'un statut des services d'analyses financières et des agences de
o
notation, LPA, n 228, 14 nov. 2003, p. 63 ; B. QUENTIN, Les agences de notation, RD bancaire et financier
2004.465). Pour disposer d'une évaluation des risques courus par les épargnants, l'AMF peut demander la
notation de l'émission obligataire, notamment lorsque l'admission des obligations sur un marché réglementé
est sollicitée. La notation est parfois, mais rarement, imposée par un texte particulier (par ex., V. pour
l'obligation de notation des bons à moyen terme (BMTN) négociables d'une durée initiale supérieure à un an :
o o
V. Décr. n 92-137 du 13 févr. 1992, mod. et complété par deux autres décrets n 94-848 du 27 sept. 1994
et 98-1316 du 31 déc. 1998, qui impose de rendre publique une notation par une agence spécialisée des
programmes d'émission de BMTN ; pour la notation obligatoire en matière de titrisation, C. mon. fin.,
o
art. L. 214-44 et Décr. n 2004-1255 du 24 nov. 2004, art. 21). La note obtenue permet de classer l'emprunt
en fonction des risques présentés par l'émetteur et des éléments propres aux titres qu'il propose au marché.
L'entreprise de marché peut également requérir une telle notation. Celle-ci doit être mentionnée sur tout
document concernant l'émission. En raison de la sécurité qu'ils procurent, l'État et les émetteurs du secteur
public qu'il garantit bénéficient des meilleures notes. Cela explique la faveur du secteur public pour l'emprunt
obligataire et le fait que le marché obligataire soit dominé par les emprunteurs publics.

§ 3 - Législation sur l'usure


147. Levée des incertitudes anciennes. - Leur mauvaise note auprès des agences de rating contraint
certains émetteurs d'obligations à offrir des taux d'intérêt très élevés (high yield bonds). Le doute a
longtemps existé quant à l'application de la législation sur l'usure aux émissions dont le taux dépasse de plus
du tiers le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les banques pour des opérations
de même nature comportant des risques analogues (C. consom., art. L. 313-3 : « Constitue un prêt usuraire
tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus
du tiers le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit pour
des opérations de même nature comportant des risques analogues, telles que définies par l'autorité
administrative après avis du Conseil national du crédit »). Cette incertitude engendrait des comportements
attentistes et anticoncurrentiels. Certains l'utilisaient comme un épouvantail pour se protéger contre le
développement des junk bonds en France. Les entreprises françaises étaient incitées à réserver leurs
emprunts obligataires les plus attractifs aux investisseurs étrangers, tandis que les émetteurs étrangers
délaissaient la place de Paris au profit de marchés plus accueillants. Deux objections avaient été avancées
contre l'application du régime de l'usure qu'il est intéressant de rappeler. Il avait d'abord été invoqué qu'une
émission de titres de créance ne constituait pas un prêt conventionnel au sens de la législation sur l'usure
laquelle, étant pénalement sanctionnée, devait être strictement appliquée. En effet, un titre de créance est
un titre négociable, ce qui le distingue d'un contrat de prêt conventionnel. De plus, avait-il aussi été soutenu,
dans une émission de titres de créance, la situation n'est pas celle d'un prêteur qui imposerait sa loi à un
emprunteur qu'il faudrait protéger, ce qui est l'une des finalités de la législation sur l'usure.

148. Non-application de la législation sur l'usure. - Ces arguments avaient conduit le ministre des
Finances à écarter l'applicabilité de la législation sur l'usure aux émissions obligataires sous l'empire du droit
o er o
antérieur à la loi n 2003-721 du 1 août 2003 (Rép. min. à Ph. Marini, sénateur, n 1827, JO Sénat CR
o er
2 janv. 2003, p. 41). La discussion est aujourd'hui close. La loi dite « Dutreil » n 2003-721 du 1 août 2003
pour l'initiative économique (art. 32) exclut à présent très généralement du domaine de l'usure les prêts
consentis à une personne morale se livrant à une activité productive. Il faut en déduire que la prohibition de
l'usure ne s'applique pas aux émissions d'obligations (en ce sens, V. not. Mémento Francis Lefebvre, Sociétés
o o
commerciales, 2005, n 19512 ; Th. BONNEAU et F. DRUMMOND, op. cit., n 111 ; J. STOUFFLET, Les
emprunts obligataires et la limitation légale du taux de l'intérêt conventionnels, Mélanges AEDBF III, 2001,
p. 343 ; D. CARAMALLI, La question de l'application des règles relatives à l'usure aux emprunts obligataires,
o
D. 2002, chron. 1413 ; Dossier ANSA, oct. 2002, n 3158 ; P. PORTIER, Réforme du régime de l'usure, RD
o
bancaire et financier 2003, n 90).

Art. 2 - Statut des obligataires

149. Les droits des obligataires sont de même origine et de même nature. Ils partagent les mêmes intérêts.
Le fait de ne pas faire « cavalier seul », comme les autres créanciers, est la marque de leur particularisme
o
(V. infra, n 150 et s.). En outre, ils disposent d'une organisation propre en une « masse » permettant
o
l'expression de leur volonté collective (V. infra, n 151 et s.).

er
§1 - Particularisme de la condition des obligataires. Droits particuliers des obligataires
150. La loi confère aux créanciers obligataires des droits que n'ont pas les créanciers ordinaires. Il leur est
permis de participer, dans une certaine mesure, à la vie de la collectivité emprunteuse. Leurs représentants
ont accès aux assemblées générales des actionnaires de la société débitrice de l'emprunt obligataire. Même
s'ils n'ont pas voix délibérative, ils peuvent malgré tout s'y exprimer. De même, ils peuvent obtenir
communication des documents mis à la disposition des actionnaires dans les mêmes conditions que ceux-ci
(C. com., art. L. 228-55). La loi oblige en outre les dirigeants sociaux à consulter les créanciers obligataires
lorsque la société veut accomplir certaines opérations de nature à affecter leurs droits : (i) modification de
o
l'objet ou de la forme de la société (C. com., art. 228-65, I, 1 ) ; (ii) fusion ou scission de la société
o
(C. com., art. L. 228-65, I, 3 ) ; (iii) émission d'obligations nouvelles comportant un droit de préférence par
o
rapport à la créance des obligataires composant la masse (C. com., art. L. 228-65, I, 4 ). Dans ces
hypothèses, l'assemblée des obligataires donne son avis sur la mesure envisagée. Elle ne peut certes pas
s'opposer à sa réalisation. Mais si elle refuse de l'approuver, la société doit rembourser les obligataires qui en
font la demande (C. com., art. L. 228-72). Tout se passe comme si la société encourait la déchéance du
terme, tout comme un débiteur ordinaire qui diminuerait, par son fait, les sûretés offertes à ses créanciers.

§ 2 - Organisation des obligataires en une masse


151. Dans le cas le plus fréquent où il existe une pluralité de créanciers obligataires, les droits des
obligataires sont exercés par l'intermédiaire d'une « masse » dotée de la personnalité juridique et de
représentants qui sont le « lien » des créanciers obligataires avec la société émettrice et qui exercent les
droits appartenant aux créanciers obligataires au sein de cette société. S'il n'existe qu'un obligataire unique,
celui-ci exerce personnellement les pouvoirs attribués à la masse et à ses représentants (Mémento
o
Francis Lefebvre, Sociétés commerciales, 2005, n 19692).

152. Nature juridique de la masse des créanciers obligataires. - La masse est une personne juridique
sans patrimoine. Les obligataires ne lui font pas apport de leurs droits. Deux conséquences en découlent.
D'une part, la masse n'a normalement pas de droits propres à faire valoir. Elle se conçoit simplement comme
un outil juridique mis par le législateur à la disposition des obligataires pour leur permettre d'exercer leurs
droits et de défendre leurs intérêts communs. D'autre part, n'ayant ni bien ni revenu, la masse vit en
« parasite » au sein de l'organisation générale de la société. Les rémunérations des représentants de la
masse (C. com., art. L. 228-56), les frais d'organisation des assemblées d'obligataires (C. com., art. L. 228-
71) sont supportés par la société émettrice. La charge n'est pas anormale lorsque l'on sait les services que
peut rendre la masse à l'émetteur. La masse lui permet en effet de se passer de l'accord unanime des
créanciers obligataires pour réaménager, en cas de besoin ou de meilleure opportunité, sa dette obligataire.
Une décision majoritaire de l'assemblée de la masse suffit pour que tous les créanciers concernés soient
réputés d'accord.

153. Composition de la masse. - La masse est un groupement légal imposé de tous les titulaires
d'obligations provenant d'une même émission et dont les droits sont identiques. C'est pourquoi il y a autant
de masses qu'il y a d'emprunts et, pour un même emprunt, autant de masses qu'il existe de tranches
comportant des conditions différentes, par exemple d'intérêt ou de remboursement. Par dérogation, la masse
n'est pas obligatoire pour les emprunts des sociétés qui sont soumis à un régime légal spécial ou garantis par
l'État, les régions, les départements, les communes ou les établissements publics. L'institution de la masse
est justifiée par le souci de protéger les petits porteurs contre leur propre impéritie. On estime que cette
mesure de protection ne s'impose pas pour les détenteurs de titres d'emprunt garantis par la puissance
publique.

154. Durée de la masse. - La masse demeure constituée tant que les obligations n'ont pas été
intégralement remboursées, seraient-elles venues à échéance. Elle ne doit pas être dissoute tant qu'il y a des
intérêts communs à défendre (Cass. com. 7 mars 1967, RTD com. 1967.803, obs. Houin ; CA Paris, 21 janv.
1937, Journ. soc. 1939.411 ; 24 déc. 1939, DH 1939.120, Rev. sociétés 1949.394).

ACTUALISATION
154. Jugé en ce sens que la masse ne survit pas après l'échéance des dates limites d'amortissement et
de conversion des titres donnant accès au capital et que sont irrecevables les actions ayant pour objet
un ajustement des modalités de conversion en cas de distribution de dividendes (Com. 7 avr. 2010,
o o
n 09-11.196 , Rev. sociétés 2010. 455, note Gaudemet ; Dr. sociétés 2010, n 121, note Mortier).

155. Assemblée générale des obligataires. - Contrairement aux assemblées d'actionnaires, il n'y a plus
o
lieu, depuis la loi n 88-15 du 5 janvier 1988, de distinguer entre les assemblées ordinaires et les assemblées
extraordinaires. Il n'y a plus qu'une catégorie d'assemblées, laquelle statue, quel que soit l'ordre du jour
re
(C. com., art. L. 228-65, II), aux mêmes conditions de quorum (1/4 sur 1 convocation ; aucun quorum sur
la seconde) et de majorité (soit, depuis la règle posée par l'ordonnance du 24 juin 2004, les deux tiers des
voix des obligataires présents ou représentés). Lors de chaque assemblée est tenue une feuille de présence.
L'assemblée générale n'est pas convoquée périodiquement, ni même nécessairement. Mais si elle l'est, la
convocation doit être le fait d'une des personnes visées par l'article L. 228-58 du code de commerce (conseil
d'administration, directoire, gérant, représentant de la masse, liquidateurs pendant la période de liquidation,
mandataire désigné en justice) et doit respecter les conditions de forme et de délai des assemblées
d'actionnaires, sauf à encourir la nullité (art. L. 228-59, al. 2). Cette nullité est normalement seulement
facultative, le texte précité énonçant que « toute assemblée irrégulièrement convoquée peut être annulée ».
On peut se demander quelle sera la situation si l'irrégularité réside dans un défaut de convocation. Deux
attitudes sont envisageables pour le juge saisi d'une demande de nullité. Soit le juge évalue l'importance que
leurs droits de vote pouvaient donner aux absents dans le vote intervenu et en ce cas il ne prononcera pas la
nullité de l'assemblée si la décision contestée pouvait être prise nonobstant l'opposition des demandeurs.
Soit il privilégie le principe délibératif en prononçant la nullité sur la seule considération que le défaut de
convocation de certains n'a pas permis l'expression d'une décision régulière (rappr. pour l'annulation des
décisions prises par une assemblée de société civile à laquelle certains associés n'avaient pas été
e o o
convoqués : Cass. 3 civ. 21 oct. 1998, Bull. civ. III, n 203, JCP 1999.85, note Y. Guyon, RJDA 1998, n 12,
o
p. 987, note P. Le Cannu ; V. égal. 27 juin 2000, Dr. sociétés 2000, n 148, obs. Th. Bonneau).

156. Participation au vote lors des assemblées d'obligataires. - Le droit de vote attaché aux
obligations est proportionnel à la quotité du montant de l'emprunt qu'elles représentent. Chaque obligation
donne droit à une voix au moins (C. com., art. L. 228-67). Qui peut voter ? Ce droit appartient à tout
obligataire. Les statuts ne peuvent pas lui interdire de voter par correspondance s'il le souhaite, toute
disposition statutaire prohibitive étant réputée non écrite (C. com., art. L. 228-61, al. 3). Les formulaires de
vote par correspondance ne donnant aucun sens de vote ou exprimant une abstention sont considérés
comme des votes négatifs (art. L. 228-59, al. 3). Pour les obligations grevées d'usufruit, le droit de vote
appartient au nu-propriétaire (C. com., art. L. 228-66). S'il existe plusieurs masses, il est interdit de
er
délibérer au sein d'une assemblée commune (C. com., art. L. 228-61, al. 1 ). Il n'y a aucune incompatibilité
entre la qualité d'actionnaire, ou même d'administrateur, et celle d'obligataire. Les actionnaires, qui seraient
aussi des créanciers obligataires de la société, peuvent donc voter à l'assemblée générale des obligataires.
Mais, pas davantage qu'elle ne peut voter avec ses actions propres qu'elle rachète (C. com., art. L. 225-
210), la société émettrice ne saurait voter avec ses propres obligations : le rachat de ses obligations
contraint la société émettrice à les annuler, sans pouvoir les remettre en circulation (art. L. 228-74).

ACTUALISATION
156-1. Droit de vote. Contrat d'émission. Contournement. - La société émettrice des obligations
ayant l'interdiction de participer au vote à l'assemblée des obligataires, elle ne pouvait pas valablement
s'assurer le moyen de contourner l'interdiction pour elle de participer audit vote afin d'obtenir la
o
prorogation de la date d'échéance du contrat d'émission (Com. 31 janv. 2018, n 15-14.028, Rev.
sociétés 2018. 368, note F. Barrière ).

157. Exclusion de vote. - L'exclusion est étendue aux sociétés qui possèdent au moins 10 % des actions
o o
de la société débitrice (C. com., art. L. 228-61, al. 7 et L. 245-12, 6 ), à peine de sanctions pénales contre
o
leurs représentants légaux (C. com., art. L. 245-12, 5 ). En revanche, l'interdiction ne s'étend pas à leurs
filiales, même celles dont le capital est entièrement entre leurs mains. Ces interdictions s'expliquent par le
fait que l'assemblée générale des obligataires peut, à la demande de la société débitrice de l'emprunt,
autoriser la novation du contrat d'émission (notamment sur des points aussi importants que le taux convenu,
les modalités d'amortissement de l'emprunt, l'abandon des garanties, le report des échéances…) ou autoriser
les représentants de la masse à compromettre ou à transiger sur des droits litigieux. Le danger serait grand
de voir la société débitrice modifier en sa faveur les conditions de son endettement, s'il lui était possible de
voter aux assemblées d'obligataires, elle-même ou par sociétés associées à son capital interposées (V. Cass.
o o
com. 13 juin 1995, Bull. civ. IV, n 181 ; V. infra, n 178).

158. Décisions interdites. - Dans le même souci de protéger les intérêts des obligataires, sont interdites
par l'article L. 228-68 du code de commerce et seraient réputées non écrites, si elles étaient néanmoins
adoptées, toutes les décisions : - augmentant les charges des obligataires : la majorité ne peut pas forcer la
minorité à un nouveau sacrifice, par exemple en lui imposant un versement supplémentaire, c'est la même
interdiction que celle qui pèse sur l'assemblée générale des actionnaires de la société ; - impliquant une
inégalité de traitement entre les porteurs d'obligations de la même masse ou - entraînant une conversion des
obligations en actions, car cela modifierait la nature du droit de l'obligataire.

159. Droits exercés par l'intermédiaire des représentants de la masse. - Aux termes de l'article
L. 228-47 du code de commerce, la masse est représentée par un à trois mandataires élus par l'assemblée
générale des obligataires. Si la société fait publiquement appel à l'épargne, les représentants peuvent être
désignés dans le contrat d'émission (C. com., art. L. 228-47). Si le contrat est muet et sauf situation
particulière exigeant une nomination par le juge, les représentants sont élus par l'assemblée générale des
obligataires. Le représentant de la masse peut être une personne quelconque, la loi n'exigeant pas qu'il
possède personnellement des obligations ni qu'il s'agisse nécessairement d'une personne physique. Il faut et
il suffit qu'il soit de nationalité française ou ressortissant d'un État membre de la Communauté européenne,
et domicilié en France. Il existe des incompatibilités destinées à garantir l'indépendance des représentants
(C. com., art. L. 228-49) et sanctionnées pénalement (C. com., art. L. 245-12). Ne peuvent être désignés
comme représentants : - la société débitrice ; - les sociétés possédant au moins le dixième du capital de la
société débitrice ou dont celle-ci possède au moins le dixième du capital ; - les sociétés garantes des
engagements de la société débitrice ; - les gérants, administrateurs, membres du directoire ou du conseil de
surveillance, directeurs généraux, commissaires aux comptes ou employés d'une société visée sous l'une des
rubriques précédentes, ainsi que leurs ascendants, descendants et conjoint ; - les personnes frappées de
l'incapacité ou de la déchéance du droit d'exercer la profession de banquier ou de gérer ou administrer une
société.

160. Sauf restriction décidée par l'assemblée générale des obligataires, les représentants de la masse ont le
pouvoir d'accomplir tous les actes de gestion pour la défense des intérêts communs des obligataires. Le plus
souvent, il s'agit d'actes conservatoires (inscription d'hypothèque, réalisation d'un acte interruptif de
prescription).

161. Monopole de représentation. - Les représentants disposent d'un monopole de représentation des
intérêts des obligataires. Seuls les représentants de la masse ont qualité pour engager toutes les actions
ayant pour objet la défense des intérêts communs des obligataires. Dans la mesure où ces actions mettent
en cause la société, celle-ci est ainsi protégée contre les actions intempestives exercées par des obligataires
agissant isolément qui doivent être déclarées irrecevables. Les représentants de la masse ont le monopole en
application de l'article L. 228-54 du code de commerce des actions en nullité de la société ou des actes et
délibérations postérieurs à sa constitution, de la demande en résolution du contrat d'émission avec
dommages-intérêts au cas d'inexécution (Cass. civ. 2 févr. 1887, DP 1887.1.97, S. 1888.1.54 ; CA Paris,
9 juin 1893, DP 1894.2.437 ; 5 déc. 1901, DP 1906.1.56), de l'action en déchéance du terme pour
diminution des sûretés de l'article 1188 du code civil (Cass. 6 janv. 1885, DP 1885.1.55) ; de la demande de
mise en redressement ou en liquidation judiciaire de la société émettrice (C. com., art. L. 228-14). Un
obligataire ne peut pas agir individuellement, seul le représentant a qualité pour agir au nom de tous. Une
fois la procédure collective ouverte, le représentant de la masse devient le seul interlocuteur des organes de
cette procédure. Il fait une déclaration unique au nom de la masse pour le montant total de l'emprunt
(C. com., art. L. 228-84). Il est consulté par le représentant des créanciers sur les modalités de règlement
du passif proposées par l'administrateur ou le débiteur, et il donne son accord dans le sens défini par
l'assemblée générale des obligataires convoquée à cet effet (C. com., art. L. 228-86). Sur les difficultés
soulevées par le monopole de représentation des intérêts des obligataires : Cass. com. 15 juin 1999, Bull.
o
civ. IV, n 133, JCP, éd. E, 1999.1488, note A. Viandier, Rev. Procédures 1999.9, chron. H. Croze ;
Y. GUYON, note Rev. sociétés 1999.640 ; A. COURET, note Bull. Joly Bourse 1999.505 ; Y. REINHARD,
obs. RTD com. 1999.904 ; Ph. MERLE, note Bull. Joly 1999.915 ; sur l'arrêt cassé, CA Paris, 3 sept. 1996,
Bull. Joly 1997.29, note P. Le Cannu ; sur la cour de renvoi, CA Paris, 15 mai 2002, D. 2002, IR 2192 ,
o
Bull. Joly 2002.1054, note P. Le Cannu, RD bancaire et financier 2002, n 156, note A. Couret ; C. NICOD,
L'action en justice pour la défense des intérêts communs des obligataires, Rev. sociétés 2000.491 .

ACTUALISATION
161. Action en justice d'un obligataire. - En ce sens que les dispositions de l'article L. 228-54 du
code de commerce, selon lesquelles les représentants de la masse ont seuls qualité pour engager toutes
actions ayant pour objet la défense d'intérêts communs des obligataires, sont impératives. Un obligataire
(la société ABN Amro) ne saurait, en invoquant les règles relatives à la gestion d'affaires, s'affranchir des
o
dispositions impératives de cet article (Com. 7 avr. 2010, n 09-11.196 , préc . ; Rev. sociétés 2010.
o
455, note Gaudemet ; Dr. sociétés 2010, n 121, note Mortier).

Art. 3 - Titres participatifs et titres subordonnés

162. Défaut d'unité. - L'appellation titre participatif et titre subordonné est peu explicite. Il s'agit
indéniablement de valeurs mobilières, inscrites en compte, négociables, nominatives ou au porteur. Pour le
reste, il faut bien constater que ces titres ne correspondent pas à une notion unique ni à une catégorie
juridique bien déterminée. La doctrine les assimile généralement aux obligations, des obligations à très long
o
terme (A. REYGROBELLET, La notion de valeur mobilière, thèse, Paris II, 1995, n 272), bien qu'ils
présentent certains traits caractéristiques des titres de capital (V. Th. BONNEAU et F. DRUMMOND, op. cit.,
o
n 117).

er
§1 - Titres participatifs. Nature juridique
163. Prévus à l'article L. 228-36 du code de commerce, les titres participatifs sont des titres de créances à
durée (normalement) indéterminée. La collectivité émettrice peut en principe disposer des fonds
correspondants jusqu'à sa dissolution, tout comme s'il s'agissait de titres de capital. Les titres participatifs
« ne sont remboursables qu'en cas de liquidation de la société ». Pour cette raison, on désigne les titres
er
participatifs comme du « quasi-capital ». L'article L. 228-36, alinéa 1 , ajoute cependant que les titres
participatifs sont également remboursables à l'initiative de la société, mais seulement « à l'expiration d'un
délai qui ne peut être inférieur à sept ans et dans les conditions prévues dans le contrat d'émission ». Il
résulte de ce texte que, si le terme est bien indéterminé, c'est uniquement du point de vue de la société
débitrice. Celle-ci peut avancer la date du remboursement, si elle en a convenance, sous les deux conditions
suivantes : le contrat d'émission doit prévoir la faculté de remboursement anticipé (les souscripteurs sont
donc prévenus) et le remboursement ne peut avoir lieu avant l'expiration d'un délai de sept ans à compter de
l'émission.

164. Avantages de la formule. - L'avantage est grand pour l'émettrice qui peut ainsi renforcer ses (quasi)
fonds propres sans modifier la composition de son actionnariat, ni le pouvoir de contrôle qui en découle.
o
Comme l'expose le professeur H. HOVASSE (V. Titres participatifs [Sociétés], 1988, n 1), la loi de 1983
« s'explique par le contexte très particulier du moment où elle est intervenue. L'État entendait alléger la
charge que représentait pour lui le financement du secteur public qu'il venait d'étendre, sans s'exposer à la
critique de dénationalisations rampantes. Les instruments juridiques alors disponibles ne permettaient pas
d'atteindre l'objectif fixé. En effet, les valeurs mobilières proposées par notre droit des sociétés introduisent
toujours un lien, même s'il est d'intensité variable, entre le partage du risque d'entreprise à raison de la
participation à ses fonds propres et le partage du pouvoir de gestion. C'était ce lien qu'il fallait défaire ».
o
165. Souscripteurs. - La loi n 83-1 du 3 janvier 1983 qui a institué les titres participatifs réserve leur
émission à certaines catégories de personnes morales : les sociétés par actions appartenant au secteur
public, les sociétés anonymes coopératives, les établissements publics de l'État à caractère industriel et
commercial, les banques mutualistes ou coopératives, les coopératives agricoles et leurs unions depuis les
lois des 11 et 12 juillet 1985, les sociétés d'assurance et leurs unions, et enfin les caisses d'assurances et de
réassurance mutuelles agricoles soumises à agrément administratif. La spécificité des émetteurs expliquerait
pourquoi l'ordonnance du 24 juin 2004 a maintenu la catégorie des titres participatifs (en ce sens : Rapport
fait sur cette ordonnance lors de sa présentation au président de la République).

166. Publicité légale. - La personne morale émettrice doit préparer un prospectus, dont le projet doit être
visé par l'AMF, puis diffuser ce prospectus dans le public. En outre, il lui appartient de procéder à la
publication au BALO d'une notice mentionnant la valeur nominale des certificats à émettre, le taux et le
mode de calcul des intérêts, l'époque et les conditions de remboursement, les garanties conférées, le
montant non amorti des titres participatifs antérieurement émis et les garanties accordées (Décr. 23 mars
1967, art. 242-3).

167. Rémunération et remboursement des souscripteurs. - Traduisant la dualité de ces titres, titres de
créances très proches des titres de capital, la rémunération des souscripteurs doit comprendre une partie fixe
et une partie variable. La partie fixe doit représenter au moins 60 % du nominal. Quant à la partie variable,
qui ne peut pas être supérieure à 40 % du montant nominal du titre, elle est fonction de l'activité de
l'entreprise débitrice. Des grandeurs représentatives de l'activité déployée sont ainsi souvent retenues, par
exemple le chiffre d'affaires, le résultat consolidé, la marge brute d'autofinancement. C'est parce que le
titulaire participe à l'activité de l'emprunteur que le titre est dénommé participatif. Par leur forme de
rémunération, les titres participatifs ressemblent ainsi aux obligations avec participation aux bénéfices.
L'autre spécificité des titres participatifs est plus remarquable, elle réside dans les conditions de
remboursement des souscripteurs. Le contrat d'émission peut prévoir que les porteurs de titres participatifs
ne sont remboursables qu'après désintéressement des créanciers chirographaires et des prêts participatifs
qui sont assimilés à des fonds propres par la loi (C. mon. fin., art. L. 313-14). Depuis la loi sécurité
financière, il peut être convenu que les titres subordonnés sont remboursables après les titres participatifs
(C. com., art. L. 228-97). Dans la paradoxale course au dernier payé, les propriétaires de titres participatifs
occupent l'avant dernier rang, derrière les titres subordonnés, qui sont remboursables juste avant les
apports.

168. Regroupement obligatoire en une masse. - Mais les titres participatifs ressemblent à nouveau à
des obligations par l'organisation de plein droit du groupement de leurs porteurs en une masse qui jouit de la
personnalité juridique et qui assure la défense de leurs intérêts (C. com., art. L. 228-37). Comme pour les
obligations, il existe autant de masses que d'émissions distinctes de titres participatifs. L'article L. 228-37 du
code de commerce organise les rapports collectifs des porteurs de titres participatifs en se référant à
certaines dispositions concernant la masse des obligataires. Faute d'un renvoi à l'article L. 228-46 du même
code, on peut se demander si l'émetteur est en droit de faire insérer dans chaque contrat d'émission une
clause l'autorisant à « fusionner » en une masse unique les porteurs de titres participatifs relevant
d'émissions successives (pour l'affirmative, la restriction à une liberté ne se présumant pas dans le silence de
o
la loi, V. H. HOVASSE, article préc., n 61). La masse se réunit au moins une fois par an en assemblée
générale pour entendre le rapport des dirigeants sociaux sur l'exercice écoulé et le rapport des commissaires
aux comptes sur les comptes et les éléments servant à déterminer la rémunération des titres participatifs
(C. com., art. L. 228-37).

169. Alignement sur les règles des assemblées d'obligataires. - Le régime des assemblées de la
masse est, dans les grandes lignes, celui des assemblées d'obligataires. Les représentants de la masse
assistent, sans voix délibérative, aux assemblées d'actionnaires de la société émettrice. Ils sont consultés sur
toutes les questions inscrites à l'ordre du jour, à l'exception de celles qui concernent la désignation ou la
révocation des organes sociaux. Ils peuvent intervenir à tout moment au cours des assemblées
d'actionnaires (C. com., art. L. 228-37, al. 4). Deux sensibles différences séparent cependant les
propriétaires de titres participatifs des obligataires. D'une part, la société émettrice doit réunir l'assemblée de
la masse pour provoquer une prise de position de sa part si elle projette de modifier son objet ou sa forme
ou d'émettre de nouveaux titres participatifs comportant un droit de préférence par rapport aux titres
participatifs déjà en circulation. Mais, contrairement à la solution qui prévaut pour les obligataires, la société
ne peut, semble-t-il, passer outre un refus des titulaires de titres participatifs de modifier le contrat
d'émission en offrant de les rembourser. En effet, l'article L. 228-72 du code de commerce qui prévoit la
faculté de passer outre moyennant le désintéressement des créanciers concernés, ne figure pas au nombre
des textes auxquels renvoie l'article L. 228-37, alinéa 2, du même code.

170. Droits exercés individuellement. - Les propriétaires de titres participatifs disposent de droits dont
l'exercice n'est pas monopolisé par la masse. Ce sont des droits qu'ils exercent individuellement et qui ne
sont pas négligeables. En effet, les propriétaires de titres participatifs se voient reconnaître à titre individuel
un droit d'information qui est la réplique exacte de celui des actionnaires (C. com., art. L. 228-37, al. 5). Ces
droits excèdent les prérogatives dont sont investis les créanciers obligataires.

§ 2 - Titres subordonnés. Absence d'autonomie conceptuelle


171. Ces titres ne constituent pas une catégorie particulière de valeurs mobilières. Ce sont des obligations
caractérisées par la présence d'une clause dite de subordination. Selon l'article L. 228-97 du code de
commerce, la subordination est une modalité assortissant la création de certaines valeurs mobilières
représentatives de créances sur la société émettrice qui conditionne leur remboursement et même parfois le
paiement des intérêts, au désintéressement préalable des autres créanciers de l'émetteur (A. TRÉBULLE, La
notion de subordination de créance, thèse dactyl., Paris II, 2002). Le droit commun (C. com., art. L. 228-97)
autorise le déclassement pour toutes les valeurs mobilières représentatives de créances. Jusqu'à l'entrée en
er
vigueur de la loi sécurité financière du 1 août 2003, il ne pouvait être stipulé que les titres subordonnés
seraient remboursables après les prêts participatifs et les titres participatifs. Désormais cette limite n'existe
plus ; toute contrainte est levée dans l'ordre de remboursement - précision étant faite que la créance de tout
dernier rang restera celle des associés qui participent aux décisions sociales (« le capital constitue la dernière
dette » de la société : V. in A. COURET et H. LE NABASQUE [sous la direction de], Quel avenir pour le capital
social ?, 2004, Dalloz, les rapports de P. LE CANNU, p. 4, A. COURET, p. 85, Ph. BISSARA, p. 223). La loi a
en effet modifié l'article L. 228-97 du code de commerce pour permettre la création de titres subordonnés
remboursables après le désintéressement complet des titulaires de prêts ou de titres participatifs qui
faisaient jusqu'alors figure de dettes les moins bien placées dans l'ordre des remboursements. Ces titres sont
qualifiés de « super-subordonnés » par la pratique (TSS). Il est même permis d'organiser un ordre de
remboursement au sein d'une même catégorie de titres super-subordonnés, qui apparaîtraient dès lors
comme « super-super-subordonnés » (art. L. 228-97, al. 2). Dans cette même logique, la loi sécurité
financière a autorisé la prévision dans le contrat d'émission de la possibilité d'une conversion des titres
subordonnés en titres de capital. Ces titres ont été conçus pour « améliorer » le ratio de solvabilité des
entreprises et surtout des banques, en augmentant leurs fonds propres (V. M. GALLAND, Titre subordonné,
Dalloz action 2006-2007, Ingénierie financière, fiscale et juridique).

172. Titres subordonnés à durée indéterminée (TSDI) - Ce sont des titres de créance qui ressemblent
étrangement à des titres de capital. Non seulement ils ne sont remboursables qu'à la dissolution de la
société, après le désintéressement de tous les autres créanciers, mais encore l'intérêt n'est dû aux titulaires
de TSDI que s'il est versé un dividende aux actionnaires. Leur rémunération est subordonnée à l'existence
d'un bénéfice distribuable et au vote de l'assemblée générale des actionnaires décidant de sa distribution.
Les titulaires sont donc dans la même situation que les associés du point de vue de la rémunération de leurs
capitaux. C'est pourquoi les agences de notation et les analystes financiers traitent les ressources levées
grâce à ces titres comme des fonds propres par assimilation. Une éventuelle disqualification en dettes des
TDSI n'est cependant pas exclue si, par exemple, les TSDI étaient stipulés remboursables dans un délai
relativement rapproché (car le remboursement par la société émettrice peut être prévu avant que
n'intervienne la dissolution, si elle s'est réservé cette faculté dans le contrat d'émission : C. com.,
art. L. 228-75, a contrario) et si la société émettrice déduisait les intérêts payés de ses résultats imposables,
alors que, comme l'on sait, la rémunération des fonds propres par la distribution de dividendes n'est pas
déductible.

173. Titres subordonnés remboursables (TSR) - Leur échéance est généralement d'environ dix ans.
Aucune clause de subordination des intérêts n'est prévue. Ce sont donc, apparemment, de ce fait des titres
de créance, ce qui rapproche les porteurs de TSR de banals obligataires. Toutefois, le contrat d'émission peut
prévoir une clause de subordination du principal et partant une participation aux pertes, ce qui est un trait
commun avec les titres de capital.

Section 3 - Valeurs mobilières donnant accès au capital ou le droit à un titre de créance

174. Présentation. - Les émissions de valeurs mobilières nouvelles donnant droit à un titre d'action ou à un
titre de créance se sont multipliées depuis le début des années 1980 (H. HOVASSE, La diversification des
o
valeurs mobilières émises par les sociétés, Dr. sociétés 2000, n 181 ; Th. BONNEAU, La diversification des
valeurs mobilières : ses implications en droit des sociétés, RTD com. 1988.535). Les valeurs les plus
anciennes sont les obligations incorporant un droit à l'attribution d'une quote-part du capital de la société
émettrice. Ce furent d'abord (L. 25 févr. 1953) les obligations convertibles en actions (C. com., art. L. 225-
161 et s. ; C. mon. fin., art. L. 212-8). L'émettrice est non seulement redevable des obligations
traditionnelles de tout emprunteur obligataire - le service de l'intérêt et le remboursement du capital dans les
conditions prévues au contrat d'émission -, mais elle contracte aussi la promesse d'émettre de nouvelles
actions et s'engage à les proposer à la souscription des obligataires. Puis vinrent les obligations échangeables
contre des actions (V. R. DORAT DES MONTS, JCP 1965.1920 ; C. com., art. L. 225-168 et s. ; C. mon. fin.,
art. L. 212-9) qui prévoient les mêmes obligations de l'émetteur, à la différence près que la transformation
des titres s'opère par échange des obligations avec des actions préexistantes et non pas des actions à
émettre. Dans les deux cas, la créance de l'obligataire au remboursement de l'obligation se compense avec
sa dette de paiement du prix de l'action qui lui est réservée. Cette compensation entraîne l'extinction des
créances et dettes réciproques du titulaire du titre et de la société émettrice telles qu'elles sont nées du
rapport obligataire, ainsi que la création de créances et dettes nouvelles du fait des nouvelles relations
nouées entre les parties.

175. Évolution. - Plus tard on s'avisa qu'il pouvait être judicieux de ne pas supprimer le titre primaire et
des textes postérieurs ont institué les obligations à bons de souscription d'actions (C. com., art. L. 225-150 à
L. 225-160 ; C. mon. fin., art. L. 212-7) qui présentent l'avantage pour leurs titulaires de ne pas les
contraindre à choisir entre la qualité d'obligataire et la qualité d'actionnaire pendant la vie du titre. Il leur
suffit d'exercer un droit attaché à l'obligation, un bon de souscription à des actions. Ainsi, ils peuvent profiter
de la hausse éventuelle des obligations ou des actions (ces dernières influençant directement le cours des
bons) en répartissant au mieux leurs risques financiers. De son côté, la société émet l'obligation à un taux
inférieur à celui des obligations classiques en raison de l'avantage que l'option représente pour le
souscripteur. Elle réalise en outre deux opérations de financement jumelées : un emprunt obligataire, d'une
part, et une augmentation de capital qui lui procure des fonds propres, d'autre part. Les bons attachés aux
obligations donnent le droit de souscrire à des actions qui seront émises par la société à un ou plusieurs prix
et dans les conditions et délais fixés par le contrat d'émission. Le prix de souscription doit être au moins égal
à la valeur nominale des actions souscrites sur présentation des bons (C. com., art. L. 225-150, al. 3). Sauf
stipulation contraire du contrat d'émission, les bons peuvent être cédés ou négociés indépendamment des
obligations. Le souscripteur peut ainsi céder le bon de souscription et conserver l'obligation, ou vendre
l'obligation en conservant le bon, ou conserver à la fois l'obligation et le bon.

176. Loi du 14 décembre 1985. - Ces régimes spéciaux avaient l'inconvénient de laisser dans une certaine
o
insécurité juridique les valeurs non prévues par la loi. Pour y remédier, la loi n 85-1321 du 14 décembre
1985 (anc. art. L. 228-91, c. com.) avait établi un régime « par défaut » auquel tout produit non
expressément « nommé » se trouvait soumis dès lors que, répondant aux conditions du texte, il constituait
une valeur mobilière donnant droit à l'attribution de titres de capital de la société émettrice, émis ou à
émettre à cet effet, par conversion, échange ou remboursement de la valeur primaire ou au moyen de la
présentation d'un bon ou de toute autre manière, par exemple au moyen d'un tirage au sort. Avec la loi de
1985, toutes sortes de combinaisons conduisant à l'attribution de titres de capital (actions et certificats
d'investissement) devenaient possibles. Les plus répandues étaient les obligations convertibles et/ou
échangeables en actions nouvelles ou existantes (OCEANE), les bons de souscription et les obligations
remboursables en actions (ORA).

177. Les bons de souscription pouvaient être créés sans le support nécessaire d'une émission d'obligations
(leur qualification, contestée, semble celle de promesses d'actions - en ce sens, not. M. GERMAIN, Dr.
sociétés 1986.5 - négociables par dérogation suivant l'ancien art. L. 228-95, al. 4, c. com.). Engendrant un
effet de levier très important, les bons amplifient mécaniquement la variation des cours de l'action. Ils
attisent la spéculation. Les émetteurs y trouvent aussi avantage. Les bons peuvent servir à compenser la
renonciation par les actionnaires à leur droit préférentiel de souscription lors d'une émission nouvelle, à
intéresser les salariés au développement de leur entreprise ou à fidéliser les actionnaires en leur permettant
de souscrire des actions à un prix et à une date déterminés, sous réserve qu'ils aient conservé leur qualité
d'actionnaires nominatifs depuis le jour de l'attribution du bon. Enfin, l'émission d'actions auxquelles donnent
droit les bons n'astreignait pas les émetteurs cotés au lourd formalisme (publicité préalable à la souscription,
dépôt et retrait des fonds, certificat du dépositaire) des augmentations de capital à souscription ferme
(C. com., art. L. 228-96), ni au respect de la règle qui contraignait l'émetteur à fixer le prix d'émission des
titres par référence à une moyenne des cours boursiers (cette règle dite des « dix parmi les vingt » de
l'art. L. 225-136, al. 2, c. com. a été abrogée et remplacée, depuis la nouvelle rédaction du texte par
l'ordonnance du 24 juin 2004, par la référence à la « moyenne pondérée des cours des trois dernières
o
séances de bourse précédant sa fixation… » : Décr. 1967, art. 155-5 mod., réd. Décr. n 2005-112 du
o
10 févr. 2005, V. supra, n 85).

178. Des obligations remboursables en actions pouvaient de même être émises, qui avaient pour
caractéristique essentielle que leur remboursement s'effectuait par principe obligatoirement et exclusivement
en actions, sauf application de la clause, dite de sauvegarde, qui figure dans tous les contrats d'émission
d'ORA selon laquelle les titres devenaient remboursables non plus en actions mais en espèces et au pair,
c'est-à-dire au prix de souscription en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de la société
émettrice. L'idée a été que si la situation de chirographaire est habituellement peu avantageuse, le titulaire
d'ORA a encore moins à attendre d'un « remboursement » en titres dépréciés à 100 %. L'arrêt Métrologie
International rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 13 juin 1995 a mis fin à la
controverse sur la nature juridique des ORA. Rappelons que, pour les uns, les ORA devaient être qualifiées de
titres de créance (obligations) dont la seule particularité tenait à leur remboursement obligatoire en titres de
capital (actions ou certificats d'investissement) par compensation de créance. Pour les autres, les ORA, en
dépit de leur nom, n'étaient pas des obligations, mais des actions futures, souscrites et payées d'avance,
l'intérêt prévu au contrat d'émission rémunérant cette avance. Dans cette deuxième conception, le paiement
éteignant la dette obligataire, l'obligation n'existait plus à proprement parler et les porteurs d'ORA ne
pouvaient pas être réunis en une masse susceptible d'imposer des décisions majoritaires aux minoritaires.
Cette deuxième conception (défendue par H. HOVASSE, Les obligations remboursables en actions, in Droit et
gestion de l'entreprise, Mélanges R. Percerou, 1993, Vuibert gestion, p. 105 ; F. PELTIER, La nature juridique
des obligations remboursables en actions, JCP, éd. E, 1992. I. 155. ; À propos de la nature juridique de la
créance représentée par l'ORA, Réponse à P. Le Cannu, Bull. Joly Bourse 1996.23, Bull. COB déc. 1995) n'a
emporté la conviction ni de la cour d'appel de Versailles (17 nov. 1994, RD bancaire et bourse 1995.31, obs.
o
M. Germain et M.-A. Frison-Roche, Bull. Joly Bourse 1995.37, note T. Bonneau, JCP 1995. I. 3833, n 7, obs.
A. Viandier et J.-J. Caussain, Banque et droit 1995, p. 24, obs. F. Peltier, qui infirme T. com. Nanterre,
13 sept. 1994, Bull. Joly Bourse 1994.590, note F. Peltier, RD bancaire et bourse 1994.266, obs. M. Germain
et M.-A. Frison-Roche) ni, sur pourvoi, de la Cour de cassation (Cass. com. 13 juin 1995, Bull. civ. IV,
o
n 181, Rev. sociétés 1995.736, note P. Didier , JCP 1995. II. 22522, note Y. Guyon, JCP, éd. E, 1995.712,
même note, Bull. Joly 1995.855, note A. Couret, Bull. Joly Bourse 1995.37, note T. Bonneau, Quot. jur.
21 sept. 1995, note P.M., RD bancaire et bourse 1995.148, obs. M. Germain et M.-A. Frison-Roche) qui ont
au contraire estimé que les ORA étaient, avant leur remboursement, des obligations et que leurs porteurs
étaient groupés de plein droit en une masse. Il est vrai que la solution conduisant à analyser l'ORA, dès le
départ, comme une action aurait entraîné les plus graves perturbations. Car les titulaires d'ORA auraient pu
revendiquer le droit de participer aux assemblées d'actionnaires et dans le cas où ils n'auraient pas été
convoqués, toutes les assemblées des sociétés émettrices d'ORA, tenues depuis l'émission de ces titres,
auraient été entachées de nullité. Les intérêts versés aux porteurs d'ORA l'auraient été en vertu d'une clause
d'intérêt fixe, réputée non écrite (L. 24 juill. 1966, art. 348, devenu C. com., art. L. 232-15) entraînant
l'obligation de répéter les intérêts illégalement perçus. En l'absence de bénéfices, le versement de cet intérêt
à des actionnaires aurait pu être considéré comme un dividende fictif (C. com., art. L. 232-12, dernier al.) et
o
passible de sanctions pénales (C. com., art. L. 242-6, 1 ). Enfin, la présentation des comptes de la société
o
serait devenue infidèle (C. com., art. L. 242-6, 2 ).
o
179. L'ordonnance n 2004-604 du 24 juin 2004 rompt à son tour avec la méthode antérieure. L'article
L. 228-91 du code de commerce modifié dispose désormais, de façon générique, que les sociétés par actions
peuvent émettre des valeurs mobilières donnant accès au capital et ajoute qu'elles peuvent également
émettre des valeurs donnant droit à l'attribution de titres de créances. Sont ainsi regroupées les catégories
anciennes : actions avec bons de souscription à des actions ou à des obligations, obligations convertibles en
actions ou assorties de bons de souscription d'actions, obligations remboursables en actions, etc.
L'ordonnance du 24 juin 2004 confirme, s'il en était besoin, la licéité de l'émission de toutes valeurs
innommées sous réserve de respecter les règles considérées comme d'ordre public, telle par exemple
l'interdiction d'émettre des actions ordinaires ou de préférence convertibles ou transformables en obligations
o
(Th. BONNEAU et M. ANDREATOS, Valeurs mobilières composées, Actes prat. ing. sociétaire 2005, n 80,
p. 5). Désormais un régime uniforme des valeurs mobilières donnant accès au capital est institué aux articles
o
L. 228-91 à L. 228-97 du code de commerce en matière de règles d'émission (V. infra, n 180 et s.) et aux
articles L. 228-98 à L. 228-106 du même code en matière de protection des porteurs contre le risque de
o
dépréciation de leurs titres lorsque la société accomplit certaines opérations (V. infra, n 197 et s.).

er
Art. 1 - Régime de l'émission
er
§1 - Compétence d'émission
180. Indifférence de l'origine des actions remises aux porteurs. - La périphrase « valeurs mobilières
donnant accès au capital » a été consacrée par l'ordonnance du 24 juin 2004 (art. 49-1). Encore que
l'ordonnance vise aussi occasionnellement et de façon plus précise (V. C. com., art. L. 228-103) les termes
« valeurs mobilières donnant accès à terme au capital », nous utiliserons indifféremment les deux
expressions dans les développements qui suivent. La notion de valeurs mobilières donnant accès au capital
n'est pas définie par le code de commerce. À première vue, rien n'interdit de reprendre pour les définir la
terminologie de l'ancien article L. 228-91, abrogé. Il s'agirait ainsi de valeurs qui donnent droit par
conversion, échange, remboursement, présentation d'un bon ou de toute autre manière, à l'attribution, à
tout moment ou à une date fixe, de titres qui sont ou seront émis à cet effet en représentation d'une quotité
de capital de la société émettrice. Mais cette approche n'est-elle pas réductrice ? Faut-il vraiment que les
titres auxquels les valeurs concernées donnent accès soient émis à cet effet ? Il faut bien constater que la
notion de « valeurs mobilières donnant accès au capital » n'implique pas nécessairement l'émission d'actions
nouvelles. Avant l'ordonnance du 24 juin 2004, les émissions d'obligations donnant droit à des titres de
capital qui sont déjà en circulation obéissaient au régime de droit commun des obligations (la compétence
d'émission appartenait alors à l'AGO, non à l'AGE). Aujourd'hui, il semble bien que la notion nouvelle
de valeurs mobilières donnant accès au capital permette d'appréhender toutes les situations (émission de
titres neufs ou attribution de titres déjà émis) sous le même régime juridique (compétence d'émission
exclusive de l'AGE). Ainsi la société peut émettre des obligations à bons d'attribution d'actions existantes ou
échangeables contre des actions existantes qu'elle détient « sur » elle-même ; de même, le contrat
d'émission peut l'autoriser à exécuter son engagement envers les porteurs par attribution d'actions
existantes. Pour approvisionner son stock d'actions propres, la société peut en acquérir sur le marché sur
lequel elles sont cotées. Les conditions sont au demeurant favorables, puisque le règlement européen
o o
n 2273/2003 de la Commission du 22 décembre 2003 (art. 3, JOUE, n L 336, 23 déc.), transposé en droit
interne par l'article 631-5 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers, assortit d'une
« présomption irréfragable de légitimité » les rachats d'actions cotées en vue de permettre à l'émetteur
d'honorer ses obligations envers les détenteurs de titres de créance « convertibles » en titres de capital qui
exercent leurs droits. Il n'est pas non plus inconcevable que la société soit autorisée par le contrat d'émission
à se libérer de son obligation par la remise de ses propres actions détenues par une société de son groupe.

181. Compétence spéciale d'émission. - Que la société recoure ou non à une augmentation de capital
pour se procurer les actions promises aux porteurs de valeurs donnant accès au capital, l'assemblée générale
extraordinaire des actionnaires a compétence exclusive pour autoriser l'émission de ces valeurs (C. com.,
art. L. 228-92). Cette compétence « spéciale » de l'AGE (par rapport à sa compétence « normale » pour
modifier le capital et changer les statuts) s'expliquerait par la complexité des émissions de titres de capital
différé et les nécessités d'une bonne information des actionnaires (V. Brochure ANSA, préc., p. 89). Ce sont
les mêmes raisons qui expliquent le monopole d'émission de l'AGE alors même que la valeur dérivée n'est
pas un titre de capital, mais un titre de créance. Par exemple, une émission d'obligations avec bon de
souscription à des obligations (OBSO) doit être autorisée par l'AGE en vertu des dispositions formelles de
l'article L. 228-92 du code de commerce, alors que la décision d'émettre (et à plus forte raison d'attribuer)
des obligations simples appartient aux seuls organes de gestion. Là encore, il a été suggéré (Mémento
o
Francis Lefebvre, Sociétés commerciales, 2005, n 20590) que c'est « la complexité même du produit » par
rapport à un emprunt obligataire classique qui explique cette solution dérogatoire.

182. Émission de valeurs donnant accès au capital de l'émettrice elle-même. - La décision de


l'assemblée générale extraordinaire d'émettre des valeurs mobilières donnant accès au capital est soumise
aux règles générales applicables aux augmentations de capital (C. com., art. L. 228-92). L'assemblée
générale extraordinaire des actionnaires doit donc délibérer au vu du rapport du conseil d'administration ou
du directoire et sur le rapport spécial du commissaire aux comptes. Par dérogation, l'assemblée n'a pas à se
prononcer sur un projet de résolution tendant à la réalisation d'une augmentation de capital réservée aux
salariés (C. com., art. L. 225-129-6). La délégation en vue de la réalisation de l'opération est possible. Elle
est d'ailleurs courante, l'assemblée laissant aux organes de gestion le soin de déterminer les conditions de
souscription et/ou d'attribution des valeurs dérivées. Les nouvelles règles relatives à la délégation
décisionnelle de l'assemblée générale extraordinaire par laquelle celle-ci peut transférer, pour 26 mois au
plus et dans la limite d'un plafond qu'elle fixe, sa compétence pour décider l'émission au conseil
d'administration ou au directoire, trouvent aussi à s'appliquer.

183. Émission de valeurs donnant accès au capital d'une autre société que l'émettrice.
Particularités des émissions dans les groupes. - L'article L. 228-93 du code de commerce autorise toute
société par actions à émettre des valeurs mobilières donnant accès au capital de la société qui possède
directement ou indirectement plus de la moitié de son capital ou de la société dont elle possède directement
ou indirectement plus de la moitié du capital. Alors que jusque-là seule la filiale pouvait émettre des valeurs
mobilières donnant accès au capital de sa société mère, l'ordonnance du 24 juin 2004 permet également la
réciproque. Une mère a désormais la faculté d'attribuer des titres donnant accès au capital de sa filiale
comme la filiale peut émettre des valeurs mobilières donnant accès au capital de sa mère (C. com.,
art. L. 228-93). Les rapports de filiation indirecte, en aval ou en amont, sont également pris en compte. Ils
ne se calculent pas par la multiplication des coefficients de participation, mais s'entendent société par
société, d'une succession ininterrompue de participations majoritaires (Mémento Francis Lefebvre, Sociétés
o
commerciales, 2005, n 20515 ; Brochure ANSA, préc. p. 86). Le texte ajoute que toute émission, à peine de
nullité, doit être autorisée par l'assemblée générale extraordinaire des deux sociétés, celle appelée à émettre
les valeurs mobilières et la société au sein de laquelle les droits sont exercés (C. com., art. L. 228-93, al. 2).

§ 2 - Droit préférentiel de souscription des actionnaires


184. Les actionnaires de la société qui émet les valeurs mobilières donnant accès au capital ont, à peine de
nullité de l'émission, le droit de souscrire ces valeurs par préférence en proportion du montant de leurs
actions (art. L. 228-91, al. 2 et 3). Ce droit préférentiel est régi par les dispositions de droit commun des
articles L. 225-132 et L. 225-135 à L. 225-140. Dès lors, (i) les actionnaires peuvent y renoncer et
l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires de la société émettrice peut voter la suppression du
droit préférentiel de souscription (dans le cas où les valeurs mobilières donnant accès au capital émises
donnent accès au capital d'une société du même groupe, il semble que le droit préférentiel de souscription
appartient aux actionnaires de la société émettrice : V. Mémento Francis Lefebvre, Sociétés commerciales,
o
2005, n 20581) ; (ii) l'autorisation d'émettre des valeurs mobilières donnant accès au capital emporte
renonciation expresse des actionnaires à leur droit préférentiel de souscription aux titres de capital auxquels
ces valeurs mobilières donnent droit, au profit des propriétaires de ces valeurs (C. com., art. L. 225-132,
al. 6).

Art. 2 - Régime de protection des porteurs

185. Besoin de protection des investisseurs. - Les propriétaires de valeurs mobilières donnant accès au
capital ont droit à une protection de leurs droits futurs d'actionnaires lorsque la société émettrice décide ou
réalise des opérations qui affectent ses fonds propres, entraînant par là une perte de substance et une baisse
o
de la valeur des actions promises (Cass. com. 27 févr. 2001, Lagardère, n 99-18.646 , Bull. Joly
2001.627, note J.-J. Daigre, JCP, éd. E, 2001.764, note A. Viandier, Rev. sociétés 2001.361, note J.-
o o
Ph. Dom , Dr. sociétés 2001, n 87, obs. H. Hovasse, RJDA 2001, n 696, rejet CA Paris, 19 mai 1999,
o
Bull. Joly 1999.878, note J.-J. Daigre ; V. infra, n 199). En effet, si le droit reconnaît à une personne un
droit éventuel, cela implique logiquement qu'il sécurise et garantisse ce droit. Les titulaires de valeurs
mobilières permettant d'accéder à terme au capital sont créanciers d'une promesse unilatérale de se voir
proposer à la souscription ou à l'achat des titres à des conditions irrévocablement fixées par contrat
o
(H. HOVASSE, Les augmentations de capital à souscription conditionnelle, 1988, Economica, n 36 et s.).
« La loi a entendu [leur] assurer… que l'appréciation qu'ils ont faite, au jour de la souscription, de la valeur
des titres escomptés ne sera pas dévaluée par des opérations décidées par la société, qui seraient, à défaut
de précaution, susceptibles de modifier les avantages sur lesquels ils ont fondé leur décision » (Mémento
o
Francis Lefebvre, Sociétés commerciales, 2005, n 20640).

186. Principes d'organisation de la protection. - A priori, on pourrait penser que les porteurs de valeurs
mobilières donnant accès à terme au capital devraient mériter protection chaque fois que la société émettrice
décide, réalise ou envisage certaines opérations qui peuvent supprimer ou diminuer la valeur des titres
promis. Dans cette perspective, un nombre indéfini d'opérations entraînerait l'application des mesures
légales de protection. Au nombre de celles-ci pourraient être énumérées, sans prétention à l'exhaustivité,
l'augmentation de capital par émission de nouveaux titres et le paiement des dividendes en actions ; la
division ou l'annulation des actions ; la réduction du capital non motivée par des pertes ; l'amortissement du
capital, la distribution de réserves, de primes d'émission ou de sommes en report à nouveau ou le rachat par
la société émettrice cotée de ses propres actions (qui, si les actions sont cotées, a lieu en pratique au-dessus
du cours de bourse) par lesquels la société se vide d'une part de sa substance au profit de ses actionnaires
actuels ; une modification de la règle de répartition du résultat. Mais bien d'autres opérations encore seraient
envisageables. Faut-il vraiment protéger les intéressés contre tous les événements de la vie sociale de
l'émetteur susceptibles de supprimer ou de diminuer la valeur des titres promis ? Selon nous, une telle
analyse du régime de protection, qui peut être qualifiée de « finaliste », ne doit pas être encouragée pour les
raisons suivantes.
o
187. 1 ) La protection ne doit pas être telle qu'elle constitue un obstacle à des opérations rendues
nécessaires par l'évolution des affaires de l'émetteur. Elle ne doit pas « générer des risques pour la société
émettrice, dont le fonctionnement et l'évolution ne doivent pas se trouver exagérément entravés, encore
moins paralysés, du fait de l'existence des valeurs » donnant accès au capital (A. PIETRANCOSTA, La
protection des titulaires de valeurs mobilières donnant accès au capital après l'ordonnance du 24 juin 2004,
RD bancaire et financier 2004.373). En conséquence le régime de protection ne devrait jouer que pour un
certain nombre d'opérations identifiées par la loi comme particulièrement sensibles. Le législateur a choisi,
assez nettement, de ne faire jouer le dispositif protecteur que dans un nombre précis et limité de cas, selon
une approche descriptive ou énumérative. Le critère qu'il retient n'est pas simplement toute opération ayant
ou pouvant avoir une incidence sur les droits des intéressés. Mais cette considération doit être
immédiatement relativisée car, dans le même temps, le législateur fait la part belle à la liberté contractuelle
en permettant aux parties au contrat d'émission d'étendre le domaine d'application des dispositions de
protection. Est-ce à dire que le régime protecteur peut être étendu à l'infini ?
o
188. 2 ) Il serait paradoxal d'accorder aux porteurs de valeurs mobilières donnant accès à terme au capital
une protection que n'ont pas les actionnaires. À la question qui précède, la réponse est donc négative. Pour
cette raison, par exemple, aucune protection particulière n'est assurée par la loi aux porteurs de valeurs
mobilières donnant accès au capital en cas de réduction du capital social justifiée par des pertes. L'article
L. 228-98, aliéna 4, à cet égard, prévoit justement que « les droits des titulaires de valeurs mobilières
donnant accès au capital sont réduits en conséquence » (de la réduction pour pertes). En sens opposé, il faut
o
cependant mentionner l'arrêt précité de la Cour de cassation du 27 février 2001 (V. supra, n 185) qui a
considéré que les règles légales « destinées à préserver les intérêts des titulaires de valeurs mobilières
donnant droit à l'attribution d'actions, s'appliquent à toute opération, affectant les fonds propres, susceptible
d'entraîner pour la société une perte de substance impliquant une baisse de la valeur des actions ».
o
189. 3 ) Il existe enfin une dernière limite, d'ordre « technique ». Les cas dans lesquels les porteurs de
titres donnant accès au capital bénéficient du régime légal de protection ont une caractéristique commune :
ils sont quantifiables, évaluables en argent. Ainsi, la loi ne prévoit aucune protection en cas de modification
des droits extrapatrimoniaux attachés aux actions futures à attribuer comme, par exemple, dans le cas de
l'insertion dans les statuts d'une clause restreignant la libre cessibilité des actions. Il est vrai qu'il paraît
délicat en ce cas de valoriser et, partant, d'ajuster les droits des porteurs de titres de capital différé.
Combien d'actions supplémentaires, par rapport au nombre fixé initialement dans le contrat d'émission, faut-
il offrir aux titulaires de valeurs donnant accès au capital pour compenser l'obligation nouvelle mise à leur
charge de respecter une procédure d'agrément ou de préemption ? Il est évident que le contrat d'émission
devrait tout autant que la loi éviter toute mesure de protection non évaluable en argent.

190. Évolution. - Pendant longtemps, un grand nombre des opérations susvisées étaient purement et
simplement interdites, c'était notamment le cas de la réduction du capital par voie de remboursement de
l'apport aux actionnaires (V. R. MORTIER, Le rachat par la société de ses droits sociaux, 2002, Dalloz,
o
n 114, p. 100) - tant qu'étaient en circulation des bons de souscription ou des obligations convertibles ou
échangeables en actions. Ce système d'interdiction contrariait à l'excès les opérations financières des
sociétés (Rapp. de la mission ESAMBERT, Bull. COB janv. 1998, p. 31). C'est pourquoi, en particulier à la
o
suite de la loi n 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, la
règle de prohibition cédait du terrain. Mais le dispositif de remplacement ne s'appliquait qu'à certaines
opérations financières déterminées et à certains titres nommés, à savoir les obligations convertibles, les
obligations échangeables et les obligations avec bons de souscription d'actions (OBSA). Il arrivait même que
« les mêmes opérations [fussent] interdites ou contrôlées selon le type de valeur mobilière concerné »
(Rapp. AFEP/ANSA/MEDEF, Pour un droit moderne des sociétés, oct. 2003, p. 76). Bref, les dispositions de
défense des intérêts des titulaires de titres de capital différé étaient partielles, disparates et peu cohérentes
entre elles, à égalité d'enjeux et sans raison logique convaincante (V. A. PIETRANCOSTA, article préc.,
o
p. 373, spéc. n 4 et s.). La réforme du 24 juin 2004 uniformise les règles de protection des titulaires des
titres de capital différé en cas d'opérations financières réalisées par la société émettrice. Ce régime unique de
protection reprend pour l'essentiel des règles issues des divers dispositifs précédemment en vigueur.

191. Si l'on met à part la règle spéciale de protection en cas de redressement judiciaire de la société
émettrice débouchant sur un plan de continuation (C. com., art. L. 228-106), le régime actuel se présente
o
sous les traits suivants : l'institution de la masse est généralisée (V. infra, n 192 et s.) ; l'émettrice ne peut
o
réaliser certaines opérations ouvrant droit à protection (V. infra, n 197 et s.) ; quant aux autres, l'émettrice
peut les accomplir à condition de prendre certaines mesures de protection des porteurs de valeurs ouvrant
o
droit à entrer dans son capital (V. infra, n 203 et s.).

er
§1 - Généralisation du groupement en une masse
192. Justification. - L'organisation des porteurs de valeurs mobilières donnant accès au capital en une
masse peut procurer une certaine protection dans le cas où la société émet ou attribue de nouvelles valeurs
mobilières représentatives de son capital social. Jusque-là, cette forme de protection ne bénéficiait qu'aux
titulaires de titres bâtis sur une base obligataire. Si la valeur primaire n'était pas une obligation, les porteurs
n'étaient pas légalement organisés en une masse. Certains discutaient qu'ils puissent être
conventionnellement compris dans une masse. Les praticiens ne s'y risquaient pas. Au résultat, les titulaires
de bons de souscription à des actions ne disposaient pas de représentants pour exercer leurs droits et
devaient agir individuellement. La situation est désormais clarifiée depuis l'ordonnance du 24 juin 2004,
puisque tous les titulaires de valeurs mobilières donnant accès à terme au capital sont, pour la défense de
leurs intérêts communs, groupés de plein droit en une masse qui jouit de la personnalité civile (C. com.,
art. L. 228-103).

193. Généralisation. - La constitution en masse des porteurs de valeurs donnant accès au capital ne
concerne pas seulement ceux dont les titres sont composés à partir d'un titre primaire obligataire destiné à
disparaître après conversion, échange ou remboursement en un titre de capital. Elle s'applique aussi aux
titulaires d'obligations assorties de bons de souscription à des actions. Enfin l'institution de la masse a été
étendue aux porteurs de bons de souscription autonomes. La généralité de la formule « valeurs mobilières
donnant accès à terme au capital » a d'ailleurs été choisie pour que des titulaires de titres qui ne sont pas
bâtis sur un socle obligataire, comme les porteurs de BSA, soient également groupés en une masse. Quant
aux règles d'organisation et de fonctionnement de la masse, l'article L. 228-103 prévoit qu'elles « sont
identiques » (sous réserve de modifier parfois certains termes) à celles qui sont fixées pour les masses
d'obligataires aux articles L. 228-47 à L. 228-64, à l'article L. 228-66 et à l'article L. 228-90 du code de
commerce. Selon une solution classique, une masse distincte est constituée pour chaque nature de titres
donnant les mêmes droits. La masse, quelle qu'elle soit et quelle que soit la nature des valeurs mobilières
donnant accès au capital dont sont porteurs ses membres, est compétente pour autoriser toute modification
au contrat d'émission et statuer sur toute décision touchant aux conditions de souscription ou d'attribution de
titres de capital déterminées au moment de l'émission (art. L. 228-103, al. 2).

194. Quorum et majorité des assemblées de masses. - Les règles de suffrage, de quorum et de
majorité aux assemblées sont fixées une fois pour toutes pour toutes les masses. L'article L. 228-103
attribue une voix à chaque valeur mobilière donnant accès au capital. Contrairement à la solution nouvelle
qui prévaut depuis l'ordonnance du 24 juin 2004 pour les assemblées d'obligataires (C. com., art. L. 228-65,
II), l'assemblée des porteurs de valeurs mobilières donnant accès au capital ne statue pas à la majorité des
deux tiers, mais à la majorité simple des voix dont disposent les porteurs présents ou représentés. Le
quorum nécessaire est du quart des titres assortis du droit de vote sur première convocation ; aucun n'est
requis en cas de deuxième convocation. Enfin, selon les règles habituelles, les frais d'assemblée ainsi que,
d'une façon générale, tous les frais afférents au fonctionnement des différentes masses sont à la charge de la
société émettrice.

195. Multiplication des masses. - Si des valeurs mobilières donnent accès à terme au capital et sont
composées de titres détachables et négociables séparément les uns des autres, combien de masses sont-
elles constituées ? La question a d'importantes incidences en pratique, eu égard aux compétences étendues
reconnues aux masses obligataires, notamment (i) à leur vocation à être informées et consultées sur un
o
grand nombre d'opérations décidées par l'émetteur (V. supra, n 151 et s.) et (ii) à leur droit d'autoriser
toute modification du contrat d'émission. Elle se pose particulièrement pour les titulaires d'obligations
assorties de bons de souscription à des actions. Les porteurs d'OBSA forment-ils deux masses, l'une
rassemblant les titulaires des OBSA dont les bons ne sont pas encore détachés et l'autre regroupant les
porteurs de bons de souscription détachés des obligations ? Ou bien faut-il considérer qu'il existera trois
masses en ajoutant aux deux premières visées ci-dessus la masse des porteurs de titres ravalés à des
obligations ordinaires après détachement des bons de souscription ? Le code de commerce en son article
er
L. 228-103, alinéa 1 , n'est pas très explicite à ce sujet, mais fournit néanmoins quelques indications : « Les
titulaires de valeurs mobilières donnant accès à terme au capital après détachement, s'il y a lieu, des droits
du titre d'origine… sont groupés de plein droit… en une masse. Il est formé, s'il y a lieu, une masse distincte
pour chaque nature de titres donnant les mêmes droits. » Il résulte des dispositions de ce texte qu'il y aura
autant de masses différentes que d'éléments dissociables et négociables séparément dans le titre originaire.
Dès lors, dans tous les cas où le contrat d'émission des OBSA stipule les bons détachables, trois
masses coexisteront si les bons sont effectivement détachés du titre primaire par leurs porteurs : la masse
des titulaires d'OBSA qui n'ont pas encore détaché les bons ; la masse des porteurs de bons de souscription
détachés des obligations, et la masse des porteurs des obligations dont les bons ont été détachés. En effet,
titulaires d'OBSA et porteurs d'obligations sèches ne peuvent cohabiter au sein de la même masse. Ils n'ont
pas les mêmes intérêts (C. com., art. L. 228-46) et les valeurs mobilières qu'ils possèdent ne donnent pas
er
les mêmes droits (C. com., art. L. 228-103, al. 1 in fine et art. L. 228-46, al. 2). Admettre indistinctement
les porteurs d'OBSA et les porteurs d'obligations ordinaires aux mêmes assemblées permettrait à de simples
obligataires de se prononcer sur des questions qui ne concernent que les porteurs des OBSA ou des BSA,
comme les questions relatives aux conditions d'exercice des bons et de souscription des titres de capital.
Cette promiscuité est susceptible de fausser le sens du vote (contra : avis Comité juridique de l'ANSA,
20 janv. 2005, pour qui « le porteur de la valeur mobilière complète participera… aux réunions de la masse
des porteurs de bons et aux réunions de la masse des porteurs d'obligations »). Ce n'est que dans le cas,
assez théorique, où le bon de souscription serait détaché concomitamment par tous les porteurs des OBSA,
qu'il y aurait deux masses, à savoir la masse des obligataires et celle des porteurs de bons de souscription.

196. Sanction des règles relatives à la masse. - L'article L. 228-104 du code de commerce prévoit que
« les délibérations ou stipulations » prises en violation des règles relatives à la masse fixées à l'article
L. 228-103 « sont nulles ». C'est un cas de nullité impérative. Le simple constat d'une assemblée
irrégulièrement composée ou d'un vote non valablement exprimé devrait donc suffire à justifier le prononcé
de la nullité, sans que le juge ait à prendre en considération la gravité de l'irrégularité commise ou son
influence sur la délibération adoptée par l'assemblée. L'institution généralisée de la masse est censée
favoriser les détenteurs de valeurs mobilières donnant accès au capital. Mais elle n'est pas non plus dénuée
d'intérêt pour les émetteurs car elle permet de faire autoriser par la masse des opérations normalement
interdites.

§ 2 - Défense à l'émettrice de procéder à certaines opérations


197. L'interdiction faite à la société émettrice n'a pas la même vigueur dans tous les cas. Elle est tantôt
relative, tantôt absolue.

A - Interdiction relative
198. L'article L. 228-98 du code de commerce interdit un certain nombre d'opérations, mais cette
interdiction a un caractère relatif car elle peut être levée dans le contrat d'émission ou, ultérieurement, par
l'assemblée de la masse des titulaires des valeurs mobilières donnant accès au capital. Ainsi, à dater de
l'émission de valeurs mobilières donnant accès à des titres de capital et tant que ces valeurs y donnant accès
existent, il est normalement interdit à la société qui est appelée à attribuer les titres (cette société pouvant
être l'émettrice elle-même ou une société de son groupe unie à elle par le lien majoritaire en capital exigé)
(i) de modifier la forme ou l'objet de la société, (ii) d'amortir le capital, (iii) de modifier le mode de
répartition des bénéfices et (iv) d'émettre des actions de préférence. Dans les cas (ii) et (iii), une
autorisation du contrat d'émission ou une approbation de l'assemblée de masse des porteurs de valeurs
donnant accès au capital ne suffit pas. Une condition supplémentaire est exigée : la société doit en effet
prendre, dans les conditions définies à l'article L. 228-99, les dispositions nécessaires au maintien des droits
des titulaires des valeurs mobilières. Quant à l'émission d'actions de préférence, visée au ( iv), elle est
soumise au même régime et donc à la même interdiction de principe que l'amortissement du capital ou le
changement du mode de répartition des bénéfices ; le texte énonce en effet « sous ces mêmes réserves, [la
société] peut cependant créer des actions de préférence ». Cela se comprend, de telles actions constituant
un des moyens qui permet la modification des règles de répartition de ses bénéfices.

199. Jurisprudence. - Le domaine de ces interdictions qui sont de droit strict, comme toutes les
dispositions restrictives, ne devrait pas être étendu par voie d'analogie à des situations voisines. Or, alors
o
que la prohibition de l'amortissement du capital n'englobe plus la réduction de capital depuis la loi n 98-546
du 2 juillet 1998 (S. ROBINEAU, Achat par la société de ses propres titres, J.-Cl. sociétés, Traité Banque,
o
fasc. 1650, n 23), la Cour de cassation n'a pas hésité à raisonner par analogie en recherchant la ratio legis.
Ainsi a-t-elle dépassé une lecture littérale de l'article L. 225-154 du code de commerce qui ne visait que la
distribution de réserves en y assimilant la distribution de primes d'apport au motif que la finalité du texte est
de s'« applique[r] à toute opération, affectant les fonds propres, susceptible d'entraîner pour la société une
perte de substance impliquant une baisse de la valeur des actions » (Cass. com. 27 févr. 2001, JCP, éd. E,
o
2001.764, note A. Viandier, Rev. sociétés 2001.361, note J.-Ph. Dom , Dr. sociétés 2001, n 87, obs.
o o
H. Hovasse, RJDA 2001, n 696 ; V. supra, n 185).

200. Sanction. - Les décisions et délibérations modifiant la forme ou l'objet de la société et celles tendant à
amortir le capital ou à modifier le mode de répartition des bénéfices qui sont prises en violation des
dispositions de l'article L. 228-98 du code de commerce « sont nulles » (art. L. 228-104). Cette nullité est
impérative et non pas simplement facultative comme l'avaient souhaité l'AFEP, l'ANSA et le MEDEF. Le juge
doit la prononcer si les conditions en sont réunies.

B - Interdiction absolue
201. Règle. - Aux termes du nouvel article L. 228-91, alinéa 5, « les titres de capital ne peuvent être
convertis ou transformés en valeurs mobilières représentatives de créances ». L'interdiction de remplacer un
titre de capital par un titre de créance est ici absolue. Un titre de créance peut devenir un autre titre de
créance ou un titre de capital. Mais il est interdit de convertir ou de transformer un titre de capital en un titre
de créance. Le concept de titre de capital est générique. Il recouvre, selon nous, les actions ordinaires, les
actions de préférence et tous les autres titres de capital voués à disparaître, mais encore en circulation,
comme les certificats d'investissement et les actions à dividende prioritaire sans droit de vote. L'interdiction
est fondée sur le principe d'intangibilité du capital. La loi veut éviter qu'à la veille d'un dépôt de bilan les
actionnaires n'obtiennent une conversion de leurs titres d'associés en droits de créance qui leur donnerait
une situation moins défavorable. Cependant, « l'interdiction ne concerne que les combinaisons faisant appel
à une conversion ou à une transformation, opérations auxquelles on peut assimiler l'échange »
(A. CHARVÉRIAT, A. COURET et B. MERCADAL, Sociétés commerciales, Mémento Francis Lefebvre, 2005,
o
n 20535 ; A. COURET et J.-L. MEDUS, Valeurs mobilières composées et bons de souscription autonomes,
o
Joly sociétés, Traité, janv. 1997, n 11). Elle vise le seul cas de la disparition du titre de capital initial et son
remplacement par un titre de créance et, partant, la perte de la condition d'actionnaire. L'émission d'actions
avec un droit de souscription à des obligations reste parfaitement possible car de telles valeurs laissent
subsister, après l'exercice des bons, le titre primaire ainsi que la qualité d'actionnaire.
er
202. Sanctions. - La loi sécurité financière du 1 août 2003 a supprimé les sanctions pénales prévues aux
o o
articles L. 242-18 (4 et 5 ) et L. 242-19 du code de commerce. Actuellement, les sanctions sont donc
purement civiles. Le nouveau texte (art. L. 228-91, al. 5) ne prévoit d'ailleurs plus la nullité des clauses
permettant la conversion ou la transformation de valeurs mobilières représentatives du capital en autres
valeurs mobilières représentatives de créances, qui figurait dans la version ancienne de l'article L. 228-91,
alinéa 4. La nouvelle sanction n'est guère éloignée, mais plus ajustée : désormais « toute clause contraire
est réputée non écrite ». Une action en dommages-intérêts des porteurs lésés de valeurs mobilières donnant
accès au capital est également envisageable. Il a ainsi été jugé qu'un porteur d'obligations à bons de
souscription subit un dommage personnel et direct du fait de l'attribution, lors de l'exercice des bons, d'un
nombre d'actions inférieur à celui auquel il pouvait prétendre en vertu du contrat d'émission et que cet
intérêt à agir rend son action en réparation recevable, même si le fait générateur de son dommage, en
l'espèce une distribution de réserves, a été antérieur à l'acquisition par lui du titre primaire (Cass. com.
27 févr. 2001, préc.).
§ 3 - Licéité conditionnelle des autres opérations. Techniques de protection
203. L'article L. 228-99 du code de commerce impose à la société de prendre des mesures de protection des
intérêts de porteurs de titres donnant accès au capital dans trois séries de cas : l'émission de titres nouveaux
avec droit préférentiel de souscription réservé aux actionnaires ; la modification de la répartition des
bénéfices par la création d'actions de préférence et la distribution de réserves, en espèces ou en nature, ou
de primes d'émission. Le texte précité consacre la jurisprudence assimilant la distribution de réserves
formées de primes d'émission à la distribution de réserves en espèces ou en titres de portefeuille (Cass. com.
27 févr. 2001, préc.). L'émetteur peut cependant accepter d'étendre la protection des porteurs de valeurs
donnant accès au capital à des cas non prévus par l'article L. 228-99. Ce dernier établit un dispositif
minimum qu'il est permis de compléter conventionnellement, sans toutefois leur accorder une protection que
o
n'ont pas les actionnaires (V. supra, n 186 et s.). Les techniques de protection sont de trois ordres :
l'exercice anticipé du droit de souscription ou de conversion ; la réservation des droits ; l'ajustement.
o
204. 1 ) Exercice anticipé du droit de souscription ou de conversion. - L'émetteur doit mettre les
porteurs de titres donnant accès au capital en mesure de (i) bénéficier de la distribution de réserves ou
primes ou (ii) d'exercer prématurément leur droit de souscription ou de conversion pour pouvoir participer
immédiatement à l'augmentation de capital, quoique la période prévue au contrat d'émission pour exercer le
droit de souscription ne soit pas encore ouverte, et il doit même leur réserver une « période exceptionnelle »
er
de souscription dans le cas prévu à l'article 242-8, alinéa 1 , du décret du 23 mars 1967 modifié par le
o
décret n 2005-112 du 10 février 2005.

o
205. 2 ) Réservation des droits. - L'émetteur doit prendre les dispositions nécessaires pour permettre
aux titulaires de valeurs mobilières donnant accès au capital qui n'ont pas fait un exercice anticipé de leur
droit de souscription ou de conversion de souscrire les nouvelles actions émises ou d'en obtenir l'attribution à
titre gratuit ou encore de recevoir des espèces ou biens semblables à ceux qui ont été distribués dans les
mêmes quantités ou proportions et aux mêmes conditions - sauf en ce qui concerne la jouissance - que s'ils
avaient été actionnaires lors de la réalisation de ces événements. En cas d'attribution gratuite, la société
émettrice doit virer à un compte de réserve indisponible la somme nécessaire pour attribuer les actions
gratuites aux porteurs de valeurs mobilières donnant accès au capital qui exerceraient leurs droits
o
ultérieurement (Décr. 1967, art. 242-9, réd. Décr. n 2005-112 du 10 févr. 2005). De même, en cas de
distribution de réserves, en espèces ou en nature, ou de primes d'émission, l'article 242-10 du décret du
23 mars 1967 (réd. Décr. 10 févr. 2005) exige de la société qu'elle vire à un compte indisponible la fraction
des réserves ou des titres du portefeuille, ou qu'elle conserve par-devers elle les biens en nature nécessaires
afin que les porteurs de valeurs mobilières donnant accès au capital, s'ils exercent leurs droits, reçoivent la
même somme ou la même quantité de biens en nature que s'ils avaient été actionnaires au moment de la
distribution. La même solution prévalait sous la réglementation antérieure à la réforme du 24 juin 2004 pour
les obligations convertibles et les OBSA.
o
206. 3 ) Ajustement. - Le troisième procédé consiste à ajuster les conditions de souscription, bases de
conversion ou modalités d'échange ou d'attribution initialement prévues de façon à compenser l'incidence
défavorable des opérations financières de la société sur les droits des titulaires de valeurs donnant accès
différé à son capital. Si l'opération financière entraîne la baisse du cours des actions, elle doit prévoir la
remise aux porteurs d'un nombre d'actions plus important que celui résultant de la formule convenue de
conversion, d'échange, d'option ou de remboursement, afin que lesdits porteurs disposent d'un nombre
d'actions de même valeur que celle des titres, moins nombreux mais non dépréciés, qu'ils auraient obtenus,
en exécution de cette formule, en l'absence de l'opération financière réalisée par la société émettrice
o
(V. R. MORTIER, op. et loc. cit., n 116 et s., p. 102). Cet ajustement doit être organisé par le contrat
d'émission lorsque les actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé. Dans le cas
inverse, le contrat d'émission peut prévoir un ajustement des bases d'exercice des droits attachés aux
valeurs mobilières donnant accès au capital sous le contrôle de l'Autorité des marchés financiers (V. art.
Décr. 1967, art. 242-12).

207. Choix de l'émetteur. - Sauf stipulations différentes du contrat d'émission, la société peut prendre
o o
simultanément les mesures prévues aux 1 ) et 2 ). Elle peut, dans tous les cas, les remplacer par
o
l'ajustement autorisé au 3 . Ces dispositions de l'article L. 228-99 du code de commerce, pénultième alinéa,
laissent une grande liberté à l'émetteur. Il n'est pas certain cependant qu'il puisse renoncer par avance à la
faculté d'ajustement, qui apparaît comme un substitut applicable « dans tous les cas ». Si les mesures de
protection spécifiques requises ne les accompagnent pas, la décision d'émission de titres de capital
nouveaux, la délibération de modification de la répartition des bénéfices par la création d'actions de
préférence ou celle de distribution de réserves, en espèces ou en nature, ou de primes d'émission sont nulles
de plein droit. Il est cependant permis de penser que dans bon nombre de cas, si la société a pris des
mesures d'accompagnement, le juge saisi dispose d'une certaine marge d'appréciation. Il lui appartiendra en
effet de mesurer le caractère véritablement inadapté ou insuffisant des mesures avant de prononcer la
nullité.

Index alphabétique

■ABSA179

■ABSO179

■Action62 s., 72 s.

à bon de souscription d'action ou d'obligation179

classification71 s.

émission76

évaluation66 s.

fonction73 s.

libération90

nominative27 s.

ordinaire22, 72 s.

au porteur28 s.

admise aux opérations d'un dépositaire central32

■Action de préférence22, 95 s.

action98

action de priorité106

action traçante ou reflet114

altérité124

antiprivilège122

assemblée spéciale120 s.

autodétention112

avantage supérieur aux actions ordinaires122

catégorie d'actions119

certificat d'investissement126

comptes sociaux, approbation112

contrepréférence125

convention de vote103

créance de dernier rang99

critères98 s., 119 s., 122 s.

dividende102

droit préférentiel de souscription104

droit de vote

aménagé110

double101

proportionnalité101

retiré ou affaibli112

sans107 s., 111

émission100

interdite198

fiscalité97, 102, 113

groupe de sociétés114

contrepartie adéquate118

dividende117

droit particulier exercé à extérieur117

droit de vote116

émission115

fiscalité97, 113

limites102 s.

ordre public99 s.

principe de hiérarchie103

qualification97 s.

rachat99

risque fiscal113

statuts109

usufruit105

■Action sociale88

■Action traçante ou reflet114

■Actionnaire

action sociale88

apparent36

bailleur de fonds72

contribution aux pertes91

de contrôle72

créance ultime99

fonds de pension72

identification33 s.

non-résident36, 39

prérogatives88 s.

qualité108

■Agence française de développement(AFD)133

■Agence de notation63, 146

■Alternext58

■Appel public à l'épargne



dissident32

■Apport

libération90

■Association

obligation, émission135

■Augmentation de capital76 s.

action de préférence104

délégation77 s.

de compétence79

droit préférentiel de souscription104

prix d'émission85

■Autocontrôle33

■Autorité des marchés financiers(AMF)19

■Avantage particulier95

■Bénéfice

répartition, modification interdite198

■Bon à moyen terme négociable(BMTN)146

■Bon de souscription autonome(BSA)



création177

masse des porteurs193

■Bordereau de références nominatives29

■Bourse

cours68

définition26

■Caisse d'amortissement de la dette sociale(CADES)133

■Capital social21

amortissement198

différé174 s.

libération90

■Carnet d'ordres central57

■Certificat d'investissement126 s.

■Certificat représentatif de valeurs mobilières18

■Certificat de valeur garantie12

■Cession

de contrat25

de créance16

de dette89

■Cession de valeurs mobilières



contrat formel52 s.

■Classification64

■Clause d'agrément86 s.

entre actionnaires87

opposabilité aux porteurs de titres de capital différé189

société cotée84

■Clause d'intérêt fixe102


■Clause léonine102

■Clause de subordination171
V. Titre subordonné

■Commissaire aux avantages particuliers96

■Comptabilité titres de la société émettrice18, 29

■Concentration des ordres57

■Contrôle

conjoint75

notion74

unitaire75

■Corporate governance88

■Coup d'accordéon92 s.

■Créancier

actionnaire99

clause de subordination171

hypo-chirographaire63

obligataire150 s.

social99

ultime99

■Délégation77 s.

de compétence79

dans les sociétés cotées81

globale78

suspension84 s.

■Dématérialisation18 s.
■Dépositaire central32

carnet d'ordres central57

intermédiaire étranger, déclaration37

■Directive

MIF26

■Dissolution112

■Droit

personnel42

réel42 s.

■Droit préférentiel de souscription



action de préférence104

valeur mobilière donnant accès au capital184

■Droit de propriété42 s.

exclusif44

■Droit de vote32

action de préférence101, 107 s.
V. ce mot

contrôle74 s.
V. ce mot

double101

incessibilité109

intermédiaire inscrit37

société de gestion de portefeuille72

usufruit105

valeur économique109

■Émetteur9 s.

action76 s.

entreprise individuelle10

fonds commun de créances11

fonds commun de placement11

obligation132 s.

personne morale10

■Emprunt obligataire21

notation146

usure147

■Endossement20

■Euroclear France18, 31, 32, 59

■Eurolist58

■Euronext58

■Evaluation des actions66 s.



actif net réévalué69

cours de bourse68

méthode multicritères70

valeur mathématique67

■Fonds commun de créances11

■Fonds commun de placement11

■Fonds de pension72

■Fonds propres65, 162 s.



titre super-subordonné171

■Fongibilité13 s.

■Forme27 s.
■Global custodian36

■Groupe de sociétés

action de préférence114 s.
V. ce mot

régime fiscal105

valeur donnant accès au capital d'une société du groupe183 s.

■Groupement d'intérêt économique



obligation, émission135

■High Yield Bonds63

■Identification des actionnaires33 s.



titre non admis aux négociations sur un marché réglementé35

TPI34

■Inscription en compte18, 46

fonction19

intermédiaire habilité29

territorialité27

transfert de propriété47 s.

■Instrument financier

directive4

énumération3

notion3

à terme12

■Intérêt fixe ou intercalaire102

■Intermédiaire inscrit27, 36 s.

déclaration37 s.

droit de vote37

■Investisseur intermédié36

identité, révélation39

■Libération du capital90

■Liquidité15

■Marché libre32

■Marché obligataire

primaire129 s.

secondaire130

■Marché réglementé26

■Masse des titulaires de valeurs mobilières



assemblée générale155 s., 194

composition153

généralisation192 s.

intérêt commun154, 161

nature juridique152

obligataire151 s.

porteur d'ORA178

porteur de titre participatif168 s.

porteur de valeurs mobilières donnant accès au capital191 s.

multiplication195

quorum194

sanction196

représentant de la masse159

monopole de représentation161

pouvoir160

■Méthode multicritères70

■Nationalisation46

■Négociabilité16 s.

cessibilité, distinction17

définition16

■Nominee36

■Non-résident36

identité, révélation39

■Obligataire62, 149 s.

assemblée156 s.

augmentation des charges158

droits150 s.

de vote156

inégalité de traitement158

intérêt commun154, 161

masse151 s.

■Obligation22, 62, 129 s.



définition131

donnant accès au capital174 s.

droit de vote156 s.

émetteur133 s.

émission, compétence

SARL141

société par actions137 s.

marché

primaire129

secondaire130

obligataire149 s.

publicité143 s.

usure147

■Obligation assimilable au trésor(OAT)129

■Obligation à bon de souscription d'actions(OBSA)179, 190, 195

■Obligation convertible174, 179

■Obligation échangeable190

■Obligation remboursable en actions(ORA)178

■Offre publique d'achat(OPA)



délégation, suspension83 s.

inamicale33

■OPCVM72, 129

■Ordre de mouvement51

■Part

de SCPI4

sociale16

■Prefered share122

■Prêt usuraire147

■Prime

distribution interdite199

■Principe de hiérarchie103
■Protection des investisseurs ayant accès au capital185 s.

dispositif186 s.

domaine188

droits extrapatrimoniaux189

masse192 s.

opération

interdite190 s., 197 s.

licéité conditionnelle203

■Ratio de solvabilité171

■Reconnaissance de dette16

■Réduction de capital

interdiction190

pertes92 s.

■Règlement-livraison59

■Réserves

distribution interdite199

■Société de gestion de portefeuille



droit de vote72

■Société par actions



obligation, émission137 s.

■Société à responsabilité limitée



obligation, émission134, 141

■Statuts109

■Stipulation pour autrui24

■Subordination de créance171
■Systèmes multilatéraux de négociation26

■Titre de capital

titre de créance distinction21

transformation en titre de créance interdite201

■Titre de créance

monétaire22

négociable15

titre de capital, distinction21

■Titre donnant un accès immédiat au capital65 s.

■Titre nominatif

administré29

domaine31

pur29

■Titre participatif22, 162 s.



définition162

droit financier167

droit individuel d'information170

masse168

nature juridique163

publicité légale166

quasi-fonds propres164

souscripteur165

■Titre au porteur28

actionnaire, identification33 s.

admis aux opérations d'un dépositaire central32

domaine31

identifiable, TPI34

■Titre subordonné22, 171



clause de subordination171

à durée indéterminée(TSDI)172

remboursable(TSR)173

super-subordonné(TSS)171

■Tradition20

■Transaction négociée en bourse57

■Transfert de propriété19, 47 s.

inter partes19

ordre de mouvement51

preuve52 s.

valeur cotée et assimilée57 s.

critère58

règlement livraison59

valeur non cotée49 s.

critère ancien55

nouveau49 s.

■Transformation d'un titre de capital en titre de créance



interdiction201

■Transmission passive94

■Trustee36

■TSDI63
■Usufruit

action de préférence105

■Usure147

■Valeur mobilière(nature juridique)



comptabilisée18 s.

cotée ou non26

créance42

fongibilité13 s.

négociabilité15 s.

en bourse26

pluralité14

substituable15

■Valeur mobilière composée14

■Valeur mobilière donnant accès au capital ou le droit à un titre de créance22, 174 s.



accès au capital d'une société du groupe183 s.

accès au capital de l'émetteur182

bon de souscription177

compensation174

compétence181

diversification174

droit préférentiel de souscription184

investisseur, protection185

législation175 s.

masse192 s.

notion180

régime uniforme179

■Virement16, 27

■Warrant12
Actualisation

Bibliographie. - GOUTAY, Transfert de propriété des instruments financiers, Les aspects réglementaires de la
réforme, Bull. Joly Bourse 2006. 491. – ANSALONI, Le compte d'instruments financiers n'est pas un objet de
droits, Option finance 16 juill. 2007, p. 27. – ROUSSEL et VERNIERES, Le transfert de propriété des valeurs
mobilières non cotées, JCP E 2007. I. 1840. – DUBERTRET, Négociabilité et possession, essai sur
l'inopposabilité des vices de la propriété mobilière (préf. Ghozi), éd. Panthéon-Assas 2009. – BONNEAU,
Valeurs mobilières et titres financiers en droit français, RDBF mars-avr. 2009, Dossier 10, p. 75. – HAAR,
Redefining the Concept of securities under German law, Dossier 11, p. 82. – MOJUYÉ, « Titres financiers » et
« Securities » au regard de l'article 8 du uniform commercial code (UCC), Dossier 12, p. 86. – ROUSSEAU, La
notion de valeurs mobilières en droit canadien, Dossier 13, p. 92. – DUBERTRET et MANGENET, Réforme du
droit des titres : commentaire de l'ordonnance du 8 janv. 2009, D. 2009. Chron. 448 . – MULLER, 2008 :
les marchés financiers au cœur de la tourmente, Dr. et patr. juill.-août 2009, p. 90. – DAIGRE et PAILLER,
Commentaire de l'ordonnance du 8 janv. 2009 relative aux instruments financiers, Rev. sociétés 2009. 37
. – LE CORRE, Porteurs de titres super-subordonnés et élaboration des plans de sauvegarde ou de
redressement avec comités, D. 2010. Chron. 839 . – de WATRIGANT, Instruments financiers et valeurs
mobilières, LPA 28 avr. 2010, p. 6. – BORGA, Titres super-subordonnés et plan de sauvegarde, Bull. Joly
2010. 604. – DUBERTRET, Négociabilité et possession. Essai sur l'inopposabilité des vices de la propriété
mobilière, éd. Panthéon Assas, coll. Thèses 2010. – BONNEAU, Quotas de CO2, biens et titres financiers, Bull.
Joly Bourse 2011. 207. – ROBINE, Le transfert de propriété des quotas, RLDA 2011. 88. – MARTIN LAPRADE,
La modification a posteriori des caractéristiques de valeurs mobilières donnant accès au capital, Option
Finance 11 mars 2013, p. 28. – M. MICHINEAU, La protection des porteurs de valeurs mobilières donnant
accès au capital, Rev. sociétés 2016. 347 .

TADROS, La jouissance des titres sociaux d'autrui, vol. 130, 2013, coll. Nouvelle Bibliothèque des thèses,
Dalloz.
o
1-1. Législation. - La loi n 2014-1662 du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d'adaptation de
la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière contient diverses
dispositions d'adaptation de notre législation au droit de l'Union européenne en matière économique et
financière. L'article 9 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives
o
nécessaires à la transposition de la directive n 2013/50/UE du Parlement européen et du Conseil sur
l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information sur les émetteurs dont les valeurs
mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé.

1-2. Financement participatif. Création d'un cadre légal. - L'ordonnance du 30 mai 2014 relative au
financement participatif institue un régime du financement participatif ou « financement par la foule »
(crowdfunding). Les sociétés pourront désormais offrir des titres financiers sans que cela constitue une
« offre au public » et sans avoir à publier un prospectus d'information soumis à l'AMF lorsque l'opération est
faite par l'intermédiaire d'un prestataire de services d'investissement (PSI) ou d'un conseiller en
investissements participatifs au moyen d'un site internet remplissant les caractéristiques fixées par le
règlement général de l'Autorité des marchés financiers. Le crowdfunding devra donc se faire par
l'intermédiaire de sites spécialisés et de professionnels disposant d'un statut dédié ou non (PSI) qu'il sera
plus facile de surveiller. Le montant qui pourra être levé sera fixé par décret et sera calculé sur une période
de douze mois dans des conditions fixées par le règlement général de l'AMF. Les sociétés par actions
simplifiées (SAS) pourront bénéficier de ce régime. Le financement est donc basé sur des plates-formes
spécialisées qui disposeront d'un nouveau statut, celui de conseiller en investissement participatif, qui les
exemptera de l'exigence de 730 000 € de fonds propres au titre de l'agrément pour l'exploitation d'un
système multilatéral de négociation (SMN). Elles pourront obtenir le label de « plate-forme de financement
o
participatif régulée par les autorités françaises » décerné par l'AMF et par l'ACPR (Ord. n 2014-559 du
o
30 mai 2014, JO 31 mai ; Décr. n 2014-1053 du 16 sept. 2014, JO 17 sept.).

o
1-3. Blockchain - L'ordonnance n 2017-1674 du 8 décembre 2017 (JO 9 déc.) adapte notre législation
pour permettre la représentation et la transmission, au moyen d'un « dispositif d'enregistrement électronique
partagé » (DEEP, en anglais, distributed ledger technology ou DLT), c'est-à-dire de la technologie Blockchain,
de certains titres financiers. Sont visés les titres qui ne sont pas admis aux opérations d'un dépositaire
central ni livrés dans un système de règlement et de livraison d'instruments financiers, à savoir : les titres de
créance négociables, les parts ou actions d'organismes de placement collectif, enfin les titres de capital émis
par les sociétés par actions et les titres de créance autres que les titres de créance négociables et à condition
qu'ils ne soient pas négociés sur une plate-forme de négociation. Le DEEP peut être défini comme « une
technologie informatique innovante qui permet à des participants d'un réseau de valider par consensus des
échanges et des transactions entre plusieurs participants sans faire intervenir d'organe central. Elle pourrait
trouver de nombreuses applications, notamment pour l'enregistrement des transactions ayant lieu sur les
marchés financiers de titres » (DG Trésor, Consultation publique sur le projet de réformes législative et
réglementaire relatif à la Blockchain, 24 mars 2017). L'ordonnance du 8 décembre 2017 permet de conférer
à l'inscription d'une émission ou d'une cession de titres financiers dans une Blockchain les mêmes effets que
l'inscription en compte de titres financiers. Ainsi est-il énoncé : « L'inscription dans un dispositif
d'enregistrement électronique partagé tient lieu d'inscription en compte » (C. mon. fin., art. L. 211-3, al. 2).
L'utilisation de la Blockchain ne crée pas d'obligation nouvelle, ni n'allège les garanties existantes relatives à
la représentation et à la transmission des titres concernés. Les dispositions au sein du code monétaire et
financier et du code de commerce relatives aux titres financiers sont cependant ajustées pour permettre le
recours à ce dispositif. En particulier, l'ordonnance précise que c'est l'émetteur qui décide de recourir au
DEEP (C. mon. fin., art. L. 211-7). S'agissant des sociétés, il conviendra dès lors que cette possibilité soit
prévue par les statuts (et donc autorisée par la majorité renforcée des actionnaires réunis en assemblée
générale extraordinaire). La Blockchain peut également être utilisée à des fins de garantie (V. Sûretés
financières [Sociétés], Mise à jour). Un décret en Conseil d'État doit venir fixer les conditions applicables à
l'inscription de titres financiers dans un DEEP, ainsi que les modalités du nantissement de titres financiers
également lorsqu'ils sont inscrits dans une Blockchain. L'ordonnance du 8 décembre 2017 doit entrer en
er
vigueur à la publication d'un décret d'application et, au plus tard, le 1 juillet 2018.

o
2. Définition. - L'ordonnance du 8 janvier 2009 relative aux instruments financiers (Ord. n 2009-15 du
8 janv. 2009, art. 7) déplace la définition des valeurs mobilières dans le code de commerce (C. com.,
o
art. L. 228-1, al. 2, réd. Ord. n 2009-15 du 8 janv. 2009, art. 7), alors que celle issue de la loi du
23 décembre 1988 était intégrée dans l'art. L. 211-2 du code monétaire et financier. Les valeurs mobilières
sont des titres financiers au sens de l'article L. 211-1 du code monétaire et financier. qui confèrent des droits
identiques par catégorie. Ainsi la fongibilité est une caractéristique essentielle de l'émission. – Par ailleurs,
l'art. L. 211-1, préc., ne définit pas le titre financier mais énumère les titres de capital, de créance, les parts
ou actions d'organismes de placement collectif. Suite de l'ordonnance du 8 janvier 2009. La réforme du droit
o
des instruments financiers issue de l'ordonnance n 2009-15 du 8 janvier 2009 est complétée par deux
décrets qui modifient la partie réglementaire. Les dispositions constituent une mise en cohérence avec
l'ordonnance. Le premier décret vise à harmoniser des dispositions du code de commerce et du code
monétaire et financier. Le second concerne surtout le régime du nantissement de compte-titres (Décr.
o o
n 2009-295 et n 2009-297, JO 18 mars 2009, D. 2009. Actu. législative p. 797, obs. Dubertret). Enfin,
l'ordonnance du 8 janvier 2009 est ratifiée par la loi de simplification et de clarification du droit et
o
d'allégement des procédures (L. n 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et
o
d'allégement des procédures, art. 138, 32 , JO 13 mai). Une ordonnance du 24 juin 2009 propose l'extension
o
et l'adaptation de ces nouvelles dispositions dans les territoires d'outre mer (Ord. n 2009-797 du 24 juin
2009 relative à l'application à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en
o
Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna de l'ordonnance n 2009-15 du
8 janvier 2009 relative aux instruments financiers, JO 26 juin).

DURBERTRET et MANGENET, Réforme du droit des titres : commentaire de l'ordonnance du 8 janv. 2009,
D. 2009. Chron. 448 . – PACLOT, La réforme des instruments financiers par l'ordonnance du 8 janv. 2009,
Bull. Joly Bourse 2009. 59

4. Instruments financiers. Titres financiers. - La réforme et la simplification du droit des instruments


o
financiers avait été annoncée par l'article 152 de la loi n 2008-776, dite LME, du 4 août 2008 qui a habilité
o
le gouvernement à prendre l'ordonnance n 2009-15 du 8 janv. 2009 relative aux instruments financiers (JO
9 janv.). En la forme, elle procède à une réorganisation des articles L. 211-1 à L. 211-41 du code monétaire
et financier. Si elle ne donne pas de définition des instruments financiers, elle introduit la notion de titres
financiers qui permet de regrouper au sein d'une même catégorie juridique des instruments qui présentent
des caractéristiques identiques (dématérialisation, inscription en compte) et qui sont, pour cette raison,
soumis à des règles communes (tenue de compte, droits du titulaire du compte, négociabilité… – V. Rapport
au président de la République, JO 9 janv.). – Les titres financiers sont : « 1. Les titres de capital émis par les
sociétés par actions ; « 2. Les titres de créance, à l'exclusion des effets de commerce et des bons de caisse ;
« 3. Les parts ou actions d'organismes de placement collectif » (art. L. 211-1, II). Les titres financiers, qui
comprennent les valeurs mobilières au sens l'article L. 228-1, alinéa 2, du C. com., ne peuvent être émis que
par l'État, une personne morale, un fonds commun de placement, un fonds de placement immobilier ou un
fonds commun de titrisation (C. mon. fin., art. L. 211-2).

16. Avant l'immatriculation les actions ne sont pas négociables mais cessibles. - L'article L. 228-10
du code de commerce ne prohibant que la négociation des actions avant l'immatriculation de la société, ces
actions pouvaient, au cours de cette même période, faire l'objet d'une cession selon les modes du droit civil
o
(Com. 26 févr. 2008, n 06-17.981 , D. 2008. 850 ). – Les titres financiers sont négociables. La
négociabilité est une caractéristique essentielle. Ils se transmettent par virement de compte à compte à deux
exceptions près : les parts de sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) et celles de sociétés d'épargne
forestière (SEF) (C. mon. fin., art. L. 211-14 et L. 211-15).

18 s. Inscription en compte. - Projet de directive sur les titres intermédiés. Examen du document de
er o
travail de la Commission du 1 févr. 2010, ANSA, févr. 2010, Com. n 10-004.

28. Inscription en compte des titres au porteur. - Le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la
Constitution l'article L. 211-4 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de l'ordonnance
o
n 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières, qui oblige les titulaires des
anciennes valeurs mobilières « au porteur » à solliciter l'inscription de leurs titres en compte (Cons. const.
o o
27 janv. 2012, décis. n 2011-215 QPC, D. 2012. Actu. 280 ; renvoi de Com., QPC, 15 nov. 2011, n 11-
16.255 , Rev. sociétés 2012. 693, note Dubertret ). La suspension des droits attachés aux titres non
inscrits en compte et la cession ultérieure de ces titres par la société émettrice poursuivent un but d'intérêt
général : lutter contre la fraude fiscale et réduire le coût de la gestion des valeurs mobilières. La cession des
titres est subordonnée à la carence de leur détenteur ; le produit de la vente ainsi réalisée est consigné
jusqu'à sa restitution éventuelle aux ayants droit. L'article L. 211-4 du code monétaire et financier ne porte
au droit de propriété des détenteurs de ces valeurs mobilières aucune atteinte disproportionnée.

19. Inscription en compte : distinction entre le titre et le droit. - L'inscription en compte des valeurs
mobilières au nom de leur titulaire, n'ayant pas pour fonction d'informer les tiers des imperfections
susceptibles d'affecter les droits de celui-ci, ne peut être assortie d'aucune mention ayant un tel objet
o
(Com. 29 janv. 2008, n 06-19.624 , D. 2008. AJ 481, obs. Lienhard ; Rev. sociétés 2008. 589, note
Dubertret ; Dr. sociétés 2008. Comm. 79, obs. Hovasse).

21. Titres de capital. Titres de créance. - L'ordonnance du 8 janv. 2009 définit les titres de capital : « Les
titres de capital émis par les sociétés par actions comprennent les actions et les autres titres donnant ou
pouvant donner accès au capital ou aux droits de vote » (C. mon. fin., nouv. art. L. 212-1, A, réd. Ord.
o er o
n 2009-15 du 8 janv. 2009, art. 1 , 2 ). Constitue un titre de capital un bon de souscription d'action, une
obligation convertible en action, un CDV, etc. – L'ordonnance définit les titres de créance : les titres de
créance représentent chacun un droit de créance sur la personne morale ou le fonds commun de titrisation
o er o
qui les émet (C. mon. fin., nouv. art. L. 213-1 A, réd. Ord. n 2009-15 du 8 janv. 2009, art. 1 , 3 ). Font
partie des titres de créance les obligations simples et composées, telle une OBSO, par exemple. On notera
une autre réforme importante. Nonobstant toute disposition législative contraire, l'indexation des titres de
créance et des contrats financiers mentionnés respectivement au 2 du II et au III de l'article L. 211-1 est
libre (C. mon. fin., nouv. art. L. 112-3-1, réd. Ord., art. 7).

29. Inscription en compte. - Une sous-section 2 du C. mon. fin. est consacrée à l'inscription en compte.
Elle contient des dispositions générales, des dispositions relatives à la tenue du compte et à la protection du
titulaire du compte et des dispositions transitoires. Ici le déplacement s'opère du code de commerce
(C. com., art. L. 228-1 s.) vers le code monétaire et financier (C. mon. fin., art. L. 211-3 à L. 211-13, réd.
o er
Ord. n 2009-15 du 8 janv. 2009, art. 1 ). Le titre financier est un droit négociable constaté par une
inscription en compte. L'ordonnance apporte des modifications au régime des comptes de titres financiers.

Compte de titres financiers. – Le compte-titres est tenu soit par l'émetteur, soit par l'un des intermédiaires
o o
mentionnés à l'article L. 542-1, 2 à 7 du code monétaire et financier. Il est ouvert au nom d'un ou de
plusieurs titulaires, propriétaires des titres financiers qui y sont inscrits. Par dérogation il peut être ouvert au
er
nom d'un fonds ou d'un intermédiaire habilité (C. mon. fin., art. L. 211-4). L'alinéa 1 de cette disposition
institue une présomption que le titulaire du compte-titres est propriétaire des titres financiers inscrits. « Il
semble en effet utile de préciser que les titulaires de comptes-titres sont propriétaires des titres financiers et
non créanciers de l'établissement qui tient ceux-ci » (Rapport au président de la République). – Pour la
procédure d'identification des propriétaires de titres de capital un renvoi et fait aux articles L. 228-2 à
L. 228-3-4 du C. com. » (C. mon. fin., art. L. 211-5). On notera que disparaît la référence à l'article 94, II de
la loi de finances pour 1982 qui a institué la dématérialisation. Elle est remplacée par une référence « aux
articles L. 211-3 et L. 211-4 C. mon. fin. » (C. com., art. L. 228-1, al. 6). – Le teneur de compte-
conservateur. a pour mission de sauvegarder les droits des titulaires des comptes sur les titres financiers qui
y sont inscrits. Sur les dispositions de protection du titulaire de compte notamment en cas d'ouverture d'une
procédure de redressement ou de liquidation judiciaire d'un intermédiaire : V. C. mon. fin., art. L. 211-9 à
L. 209-12.

33 s. Pour la procédure d'identification des propriétaires de titres de capital un renvoi est fait aux articles
L. 228-2 à L. 228-3-4 du C. com. (C. mon. fin., art. L. 211-5).

47. Le transfert de propriété. - Le transfert de propriété de titres financiers résulte de l'inscription de ces
titres au compte-titres de l'acquéreur (C. mon. fin., art. L. 211-17). Cette disposition issue de l'ordonnance
o
n 2009-15 du 8 janv. 2009 reprend l'article L. 431-2 du même code. Surtout, l'inscription pose une
présomption irréfragable de propriété à l'égard des tiers, l'ordonnance se calant sur le principe que
l'inscription en compte vaut titre. « Nul ne peut revendiquer pour quelque cause que ce soit un titre financier
dont la propriété a été acquise de bonne foi par le titulaire du compte-titres dans lequel ces titres sont
inscrits » (art. L. 211-16). L'objectif est d'introduire, en liaison avec les travaux internationaux et européens
en cours, la protection du droit de propriété du titulaire du compte, lorsque celui-ci a acquis des titres
financiers de bonne foi (V. Rapport au Président de la République). DUBERTRET et MANGENET, D. 2009.
Chron. préc. p. 450 .

51. Ordre de mouvement. - Un ordre de mouvement délivré par le cédant à la société émettrice ne
constitue pas un titre au sens de l'article 1282 du code civil. Le juge ne peut pas se substituer aux parties
pour leur imposer une méthode de détermination du prix qui n'avait pas recueilli leur accord
o
(Com. 12 févr. 2008, n 06-18.414 , Dr. sociétés 2008, Comm. 68, note Coquelet).

52. Possession de bonne foi des actions. - Aucun registre des transferts de titres n'avait été tenu au sein
de la société lors de la cession des titres litigieux, ce dont il résultait qu'aucune présomption de propriété de
titre ne pouvait être retenue, la cour d'appel a admis la possession de bonne foi des actions (Com. 5 mai
o
2009, n 08-18.165 , D. 2009. AJ 1415 et p. 2723, obs. Delebecque ; Rev. sociétés 2009. 580, obs.
o
Dubertret ; Dr. sociétés 2009, n 137, obs. Hovasse).

57. Date du transfert de propriété librement convenue. - Selon l'article L. 228-1, al. 9, dernière
phrase, du code de commerce, le transfert de propriété résulte de l'inscription des valeurs mobilières au
compte de l'acheteur, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État (V. C. com., art. R. 228-10, réd.
o
Décr. n 2006-1566 du 11 déc. 2006, art. 60) d'où il résulte que l'inscription au compte de l'acheteur est
faite à la date fixée par l'accord des parties et notifiée à la société émettrice. HOVASSE, Dr. sociétés 2007,
o
n 31.

76-1. Liberté d'émission. - Selon l'ordonnance du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés, à côté des
valeurs mobilières représentatives d'un droit de créance qu'elles peuvent émettre dans les conditions du livre
II du code de commerce (conditions qui font l'objet d'une série de retouches, dans le sens d'une
simplification), un nouvel article L. 228-36-A du code de commerce est créé, qui permet aux sociétés par
actions de créer « toutes autres valeurs mobilières représentatives d'un droit de créance dans les conditions
prévues par les statuts ou, le cas échéant, par le contrat d'émission ». C'est, en quelque sorte, une liberté
o
totale dans la création de titres de dette qui est ainsi consacrée (Ord. n 2014-863 du 31 juill. 2014,
art. 25 s., JO 2 août).
129 s. Voir la rubrique Obligation [Sociétés].

130. Libéralisation du régime de rachat de titres ne donnant pas accès au capital par l'institution d'un
dispositif d'acquisition ordonné (Règl. gén. AMF, art. 238-1 à 238-5, nouv., réd. Arr.du 20 août 2010 portant
homologation des modifications du RG, JO 28 août ; D. 2010. Actu. 1939 ; Rev. sociétés 2010. 474, obs.
Conac ).

131-1. Qualification d'obligation. Garantie de remboursement. - Doit être refusée la demande d'un
client qui réclame des dommages et intérêts à son courtier en assurance à raison de la perte en capital
constatée sur un portefeuille obligataire investi dans un contrat d'assurance vie motifs pris de ce que le
créancier obligataire aurait droit au remboursement du nominal des obligations à l'échéance alors que « la
qualification d'obligation n'est pas subordonnée à la garantie de remboursement du nominal du titre »
e o
(Civ. 2 , 23 nov. 2017, n 16-22.620 , Rev. sociétés 2018. 392, note J.-M. Moulin ).

154. Jugé en ce sens que la masse ne survit pas après l'échéance des dates limites d'amortissement et de
conversion des titres donnant accès au capital et que sont irrecevables les actions ayant pour objet un
o
ajustement des modalités de conversion en cas de distribution de dividendes (Com. 7 avr. 2010, n 09-
o
11.196 , Rev. sociétés 2010. 455, note Gaudemet ; Dr. sociétés 2010, n 121, note Mortier).

156-1. Droit de vote. Contrat d'émission. Contournement. - La société émettrice des obligations ayant
l'interdiction de participer au vote à l'assemblée des obligataires, elle ne pouvait pas valablement s'assurer le
moyen de contourner l'interdiction pour elle de participer audit vote afin d'obtenir la prorogation de la date
o
d'échéance du contrat d'émission (Com. 31 janv. 2018, n 15-14.028, Rev. sociétés 2018. 368, note
F. Barrière ).

161. Action en justice d'un obligataire. - En ce sens que les dispositions de l'article L. 228-54 du code de
commerce, selon lesquelles les représentants de la masse ont seuls qualité pour engager toutes actions
ayant pour objet la défense d'intérêts communs des obligataires, sont impératives. Un obligataire (la société
ABN Amro) ne saurait, en invoquant les règles relatives à la gestion d'affaires, s'affranchir des dispositions
o
impératives de cet article (Com. 7 avr. 2010, n 09-11.196 , préc . ; Rev. sociétés 2010. 455, note
o
Gaudemet ; Dr. sociétés 2010, n 121, note Mortier).

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