Études sur l’Évangile de Jean
John Gi ord Bellett
Chapitres 1 à 4
Chapitre 1.1-18
Ces versets me paraissent former une sorte de préface, qui place
devant nous l’Évangile de Jean sous son vrai caractère, comme
l’Évangile du Fils de Dieu — le Fils du Père ; — et le témoignage
de Jean le baptiseur, qui est sommairement ajouté à cette
préface, concourt au même but.
Observons d’emblée que le Seigneur, en venant sur la terre,
prend immédiatement la place qui lui appartient comme Fils de
Dieu, une place qui appartient aussi à l’Église avec lui, celle
d’étranger. Dès les premiers moments, il nous est montré sous ce
caractère. Il est la lumière au milieu des ténèbres ; le Créateur du
monde et inconnu au monde ; il vient chez les siens, et n’y est pas
reçu ; il est fait chair, et ne demeure parmi nous que peu de jours.
Tout le fait voir comme étranger ici-bas, et c’est comme tel que
cet Évangile nous le présente. Aussi dès le début, les questions
que le Seigneur avait avec le monde et avec son peuple terrestre
d’Israël, sont toutes tranchées. Dans cet Évangile, l’Esprit de
Dieu renferme sous la condamnation le monde et Israël : le
premier comme étant « sans Dieu », et le second comme étant
incrédule ; et il parle d’une famille élue, qui n’est pas enregistrée
sur la terre ou née de la chair, mais qui est née de Dieu, et en
faveur de laquelle « la grâce et la vérité », la plénitude du Père
dans le Fils, sont désormais préparées.
Le livre de la Genèse s’ouvre par la création ; l’Évangile de Jean,
par la révélation de Celui qui était avant la création et au-dessus
de la création. C’est à lui que nous sommes amenés. La création
est passée sous silence, et nous nous trouvons devant la Parole,
qui était avec Dieu, et qui était Dieu.
Tel est le début par lequel notre Évangile apparaît comme
l’Évangile du Fils de Dieu, Créateur de toutes choses, Révélateur
du Père, Source et Canal de grâce et de vérité pour des pécheurs.
C’est pourquoi Jean nous dit que la gloire qu’ils ont vue était la
gloire « d’un Fils unique de la part du Père », c’est-à-dire, une
gloire personnelle, tandis que celle dont parlent les autres
Évangiles comme ayant été vue, était la gloire sur la sainte
montagne, une gloire o cielle seulement. Ceci nous montre
encore, d’une manière caractéristique, le but et la portée de
l’évangile de Jean.
Bien précieuses sont-elles, en même temps qu’élevées et divines,
les pensées que ces versets nous suggèrent. Elles nous disent,
comme je l’ai déjà remarqué, que la lumière, la lumière de la vie,
a lui, quoique voilée, avant que la Parole fût faite chair et habitât
parmi nous ; avant même que vînt Jean Baptiste son précurseur.
Il en a été ainsi dans la création. La lumière fut formée la
première par la puissance de Dieu. Elle a existé avant le soleil,
qui fut créé le quatrième jour, tandis que la lumière fut la
première chose créée au premier jour. Les trois premiers jours,
par conséquent, s’accomplirent à la simple lueur de la lumière,
sans la présence de l’astre qui devait plus tard dominer sur le
jour.
Une même chose se voit dans l’histoire de la lumière de la vie.
Christ a été la première pensée de Dieu, et Dieu a déclaré que
cette lumière se lèverait sur les ténèbres morales et le chaos
introduits par l’homme apostat. Dans cette parole : « Il te brisera
la tête », la lumière de la vie fut nommée de Dieu. Des jours ou
dispensations prirent leur cours : les trois premiers jours se
déroulèrent : il y eut les temps des patriarches et après, ceux de
Moïse. Ainsi, la lumière de la vie s’était répandue au loin, bien
avant que la Parole eût été faite chair. La lumière luisait avant
que le soleil se montrât dans le ciel. Et c’est là une douce pensée.
Le Christ de Dieu a été la première révélation qui ait jeté sa
lumière sur les ruines et les ténèbres amenées par la chute
d’Adam ; et quoique, pendant un temps, le Dépositaire divin de
toute lumière, la Source de tous rayons vivi ants, demeurât
voilé, des gerbes de sa lumière sont venues réjouir et éclairer ce
premier âge du premier, deuxième et troisième jour.
Mais nous possédons la chaleur aussi bien que la lumière,
pourrais-je dire. La même Écriture qui nous dit ce qui s’est passé
dans la création, nous apprend que le sein du Père nous a été
découvert. « Le Fils unique, qui est dans le sein du Père, lui, l’a
fait connaître ». Il n’existe rien de pareil. Cet amour profond,
inexprimable, insondable — l’amour qui habite dans le « sein du
Père » — est Celui qui nous a visités, et qui est venu à nous dans
sa beauté et sa plénitude. Cette faveur ne dépasse-t-elle pas toute
connaissance ? Il nous convient de demander d’être forti és en
puissance par l’Esprit pour la comprendre (Éphésiens 3). Se
taire ! garder le silence, dans la foi, pour laisser notre cœur
ouvert aux richesses d’une si grande révélation, n’est-ce pas déjà
une félicité ?
1.19-28
Ces versets font aussi plus ou moins partie de l’introduction ; à
peine peut-on dire que l’action ait commencé. Ils nous donnent,
sous forme de récit, le témoignage rendu aux Juifs par Jean le
Baptiseur, avant que le Seigneur Jésus lui eût été manifesté
comme le Fils de Dieu ; car le Saint Esprit, dans cet Évangile,
s’occupe si peu d’un témoignage juif, que les choses nous sont
données comme une révélation de la confession de Jean, aux
messagers que les Juifs lui avaient adressés.
1.29-43
Ici toutefois, l’action commence réellement par le témoignage
que Jean Baptiste rend à Jésus, après qu’il lui a été manifesté
comme le Fils de Dieu. Après ce témoignage rendu, Jean semble
avoir la conscience que sa course est achevée. Au verset 35, nous
le voyons comme retiré de son ministère, et simplement se
réjouissant dans ce qui en était le résultat : — la manifestation de
l’Agneau de Dieu. On l’entend exprimer la secrète satisfaction de
son cœur, lorsqu’il dit : « Voilà l’Agneau de Dieu ! » car il ne paraît
pas avoir adressé ces paroles à ses disciples ; mais ceux-ci, ayant
entendu cette expression de sainte joie d’un cœur qui
contemplait Jésus, suivent Jésus eux-mêmes. — Bien-aimés, cet
e et se produit aussi maintenant : la puissance qui attire les
âmes au Seigneur, réside surtout dans notre propre joie, et dans
notre communion avec lui. — Jean en avait ni avec lui-même ;
toutes ses pensées étaient xées sur l’Agneau de Dieu ; et ses
disciples paraissent l’avoir compris, car ils le quittent pour
suivre Jésus.
C’était le vrai ministère, un ministère qui exerçait de la
puissance sur le cœur de ceux qui entendaient. Voyez ce que dit
Paul (1 essaloniciens 1.5-6).
Mais les disciples, où suivent-ils Jésus ? L’Évangile ne le dit pas.
Plein de grâce, le Seigneur les a encouragés à le suivre, et « ils
allèrent, et virent où il demeurait, et ils demeurèrent auprès de
lui ce jour-là ; mais le lieu ne nous est pas nommé. Ils suivent
Jésus par quelque chemin ignoré et ils sont avec lui-même ; c’est
tout ce que nous apprenons ; car le Fils de Dieu n’était sur la terre
qu’un étranger, et ceux qui l’accompagnent doivent, comme lui,
y être étrangers. C’est ce qui paraît ici. Le petit rassemblement
était groupé autour du Fils de Dieu, de l’Agneau de Dieu,
seulement il n’était pas pour ici-bas ; car c’était la première
poignée de froment pour le grenier céleste, les prémices de la
famille du ciel pour Dieu et l’Agneau, et vraiment la terre n’y a
pas pris garde, le fait a passé inaperçu.
Jean le baptiseur déclare que Celui qui venait après lui, était de
fait avant lui, et cela il le répète même avec une sainte jalousie
(vers. 15, 27, 30), et Paul, en rappelant le ministère de Jean
Baptiste, y fait allusion (Actes 19.4). Cela est d’un grand prix pour
nous ; car le Saint Esprit, qui inspire Jean, rend ainsi honneur à
Jésus comme au grand Objet de tous les conseils divins, la
grande Ordonnance de Dieu, que toutes les autres ordonnances
avaient en vue. C’est pourquoi, bien que venant après Jean,
Jésus était avant lui, et le Baptiseur semble rendre la pensée de
toutes les ordonnances et de tous les ministères, lorsqu’il dit :
« Celui qui vient après moi prend place avant moi, car il était
avant moi ». Nul autre que le Fils de Dieu n’a été signalé dès les
siècles (Proverbes 8.23), lui, le premier, le grand Objet de tous les
conseils de Dieu ; et soit prophètes, soit ordonnances, tous
n’étaient que des serviteurs, appelés à rendre témoignage de lui.
Je ferai remarquer que Jean et le Seigneur ne se connaissaient
pas, jusqu’au moment où Jésus s’avança pour entrer dans son
ministère : le Baptiseur avait été élevé en Judée et le Seigneur en
Galilée. Toutefois, quand Jésus s’approche de Jean pour être
baptisé, Jean le reconnaît aussitôt. Il semblerait qu’il avait de lui
quelque intuition (Matthieu 3.14). Il l’avait en e et reconnu
avant d’être né (Luc 1.44). Le monde ne connaissait pas Jésus ;
Jean le connaissait et ainsi condamne le monde. Cependant, il ne
le connaît pas de manière à rendre témoignage de lui comme le
Fils de Dieu, avant que l’Esprit ne fût descendu et n’eût demeuré
sur Jésus, car, selon l’avertissement qu’il avait reçu, c’est à cela
que Jean reconnaîtrait le Fils de Dieu.
Ensuite, cet Évangile, en plein accord avec son caractère général,
nous montre, dans ces versets, ce que je nommerai l’appel
personnel d’André et de Pierre ; tandis que Matthieu ne donne
que leur appel o ciel. Tout est en harmonie avec la pensée de
l’Esprit dans les deux Évangiles ; et c’est avec bonheur et
gratitude que nous pouvons remarquer toute la perfection des
témoignages divins.
1.44-51
Ces versets nous présentent l’action qui appartient à une période
subséquente, appelée « le lendemain ». Nous voyons le ministère
du Seigneur lui-même, en même temps que le fruit de ce
ministère dans les personnes de Philippe et de Nathanaël.
C’est une chose nouvelle. Ce n’est plus un rassemblement avec
Jésus comme « l’Agneau de Dieu », dans un lieu mystérieux et
inconnu ; c’est un rassemblement avec Celui « duquel Moïse a
écrit dans la loi et duquel les prophètes ont écrit » * ; et ce n’est
plus ici l’image de l’Église ou de la famille céleste, mais de l’Israël
de Dieu, le résidu qui sera sauvé au dernier jour, et que Jésus
connaîtra en grâce du milieu de la nation, comme il connaît
Nathanaël sous le guier, symbole permanent du peuple juif
(Matthieu 21). Alors ils le confesseront de la même manière que
Nathanaël le fait ici. Ils le reconnaîtront et le recevront comme
le Fils de Dieu, le roi d’Israël. Et quand ce moment sera venu,
tout sera préparé pour le déploiement de la gloire dont le re et
lointain brille ici sur le Seigneur, et dont il promet la
manifestation, en sa saison, à Nathanaël. — Tout ceci est d’une
grande portée et se trouve con rmé au chapitre suivant.
* Ceci est caractéristique ; c’est tout ce que je veux en
déduire. Évidemment tous se groupèrent autour de Jésus,
quoiqu’il en soit des circonstances de détail, et l’ont connu
comme l’Agneau de Dieu.
Chapitre 2.1-12
Nous venons de voir l’Église et Israël respectivement manifestés
dans les deux rassemblements auprès de Christ. En conséquence,
nous avons ici « le troisième jour », ou la noce, pour laquelle le
vin est fourni par Jésus lui-même. Ces circonstances mêmes
nous indiquent le sens mystique de la scène, car le troisième jour
(le même que celui de la résurrection), la noce, et le vin fourni
par le Seigneur sont des choses qui se rapportent au royaume,
comme le savent ceux qui sont habitués aux Écritures. Je ne
doute donc pas que la noce de Cana ne représente le royaume à
venir du Seigneur, où il sera vu à la fois comme Roi et comme
Époux.
Le Seigneur avait été invité en qualité de convive ; mais bientôt il
devient l’hôte qui fournit et distribue le vin. Ainsi, après que
nous aurons goûté les consolations que nous trouvons dans cette
scène inférieure, le Seigneur nous donnera la joie du royaume, et
boira nouveau, avec nous, du fruit de la vigne. Par son
intervention pleine de grâce, il transforme ce qui n’était qu’une
simple noce en mystère, et en fait l’occasion de manifester sa
gloire, la gloire pré gurée du royaume, que Nathanaël avait
reconnu en sa personne. Jésus lui-même devient l’hôte ou
l’époux. Le maître d’hôtel s’adresse à l’époux qui les avait
conviés, comme si lui était l’hôte ; mais c’était Jésus qui avait
pourvu à la joie du festin ; et qui, maintenant encore, garde le
bon vin à son peuple pour la n, lorsque toute autre joie aura
cessé. Jésus était le véritable époux. La fête était là où il
changeait l’eau en vin ; comme dans son royaume il mettra de
côté nos joies premières, et nous donnera ce que l’œil n’a pas vu,
ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme.
À ce sujet, je désire ajouter que nous avons à entretenir
soigneusement l’assurance que la joie est notre part, l’élément
préparé et nécessaire dans lequel notre éternité aura son cours.
Nous sommes enclins à ne nous réjouir qu’avec parcimonie ; il
faut combattre ce sentiment et laisser nos cœurs s’abandonner à
la joie. « La joie est la chose première, a dit quelqu’un ; la fatigue,
le danger, la douleur ne sont que subordonnés » ; et cette vérité est
pleine d’encouragement. Lorsque jadis les conseils éternels se
tinrent, lorsque l’ordre de la création fut établi, ce furent un
moment et une scène de joie divine. L’Éternel trouvait ses délices
dans la Sagesse. La Sagesse, en Christ, se réjouissait dans la
partie habitable de la terre, et ses plaisirs étaient avec les ls des
hommes (Proverbes 8) ; et cette joie de Dieu fut communiquée :
les anges la connurent et l’exprimèrent (Job 38.7), et la création,
dans ce jour de sa naissance, elle aussi, sourit.
Le renversement de cet état de choses, par l’in délité de
l’homme, n’a pas mis obstacle à la joie ; il n’a fait qu’en changer le
caractère. La rédemption devient la source d’un bonheur plus
élevé, plus étendu et d’un ton plus solennel, et la nouvelle
création sera l’occasion d’une joie plus abondante encore que
l’ancienne. Quelle viande est procédée de celui qui dévorait !
Viande pleine de saveur, agréable pour le cœur de Jésus lui-
même. Quelle douceur, même pour Dieu, est procédée du fort !
Que de fontaines ouvertes dans les sables arides de ce monde,
rafraîchissent les célestes régions elles-mêmes !
Toute l’Écriture rend ce témoignage, et pas n’est besoin d’y
ajouter. Seulement je ferai remarquer encore — et il est doux de
voir quelle part les saints ont dans ces choses — que les serviteurs
seuls se trouvent en rapport avec le Seigneur. Ils sont dans sa
con dence, tandis que le maître d’hôtel lui-même ne sait rien. La
mère également (en relation avec le Seigneur quant à la chair) est
tenue à distance. Dans tout ce qui se passe, les serviteurs sont
amenés le plus près de Jésus. — Et il en est ainsi pour nous, bien-
aimés. Jésus, le Seigneur de gloire, héritier de toutes choses, a
été ici-bas un serviteur. Il est venu non pour être servi, mais
pour servir ; et ceux qui sont le plus humbles dans le service sont
aussi le plus près de lui. Au jour où il servira le véritable vin du
royaume, ses serviteurs d’aujourd’hui seront encore une fois les
dispensateurs de la joie par lui donnée, et seront seuls dans le
secret de sa gloire. « Si quelqu’un me sert, le Père l’honorera ».
2.13-22
Ensuite nous voyons le Seigneur à Jérusalem, puri ant le temple
avec autorité, et revendiquant ainsi la royale prérogative du Fils
de David (voyez Matthieu 21.12-16).
Il est interpellé sur les droits qu’il a d’exercer cette autorité, et
Jésus allègue sa mort et sa résurrection. « Détruisez ce temple »,
dit-il, « et en trois jours je le relèverai ». En e et, c’est là son titre.
Les droits et l’honneur qui lui appartenaient, comme Créateur
du monde et Seigneur d’Israël, lui étaient refusés, comme nous
l’avons vu ; son titre, comme tel, était méconnu. Mais nous
savons qu’il a acquis toute puissance dans le ciel et sur la terre
par un autre titre, c’est-à-dire, par la mort et la résurrection ;
titre qui a chassé l’usurpateur, et reconquis pour l’homme
l’héritage qu’il avait perdu. Ceci donne à Jésus un droit
irrécusable sur toutes choses. Constamment les apôtres parlent
de la mort du Seigneur et de sa résurrection, comme établissant
et assurant ses droits à tous ses diadèmes et à toutes ses gloires.
La prédication de Pierre (Actes 2) en est un témoignage. Il dit au
peule d’Israël qu’ils ont mis à mort Jésus, par les mains
d’hommes iniques, mais que Dieu l’a ressuscité et l’a fait
Seigneur et Christ. L’enseignement de Paul, dans l’épître aux
Philippiens (chap. 2), entre autres Écritures, le répète encore ; et
ici le Seigneur lui-même, en réponse à l’interpellation des Juifs,
met en avant sa mort et sa résurrection, comme son titre aux
fonctions les plus élevées, à l’exercice de l’autorité royale et
sacerdotale. Parce qu’il s’est abaissé lui-même, Dieu lui a donné
un nom au-dessus de tout nom. Le Fils de David, selon l’Évangile
de Paul, a été ressuscité d’entre les morts (2 Timothée 2). La
couronne de Jésus était avec lui xée à la croix, à la vue du
monde entier, Hébreux, Grecs, et Latins (Luc 23), de sorte que
tous les témoignages publient, comme Jésus lui-même l’avance
ici, que les sou rances du Seigneur conduisaient à ses gloires (1
Pierre 1), et que sa mort et sa résurrection sont ses titres.
2.23 à 3.21
Ainsi la joie du royaume était manifestée, la puissance du
royaume mise en exercice, et le titre du Seigneur à cette
puissance démontré et revendiqué. Maintenant, selon l’ordre
voulu, il s’agit d’un titre pour d’autres personnes à entrer avec lui
dans le même royaume, et cette question est ici discutée. Saint et
solennel sujet, qui doit profondément a ecter nos cœurs.
L’homme est une créature à laquelle Dieu le Créateur ne peut pas
se er. Le manque de délité d’Adam dans le jardin d’Éden en est
la cause. L’homme a fait tout ce qu’il pouvait faire, pour vendre
la gloire de Dieu entre les mains d’un autre. Plus tard, la
dispensation de la loi vint prouver qu’il était encore également
indigne de la con ance de Dieu ; et le Seigneur lui-même le étrit
ici de ce caractère : « Jésus lui-même ne se ait pas à eux, parce
qu’il connaissait tous les hommes ». Il savait ce qu’il y avait dans
l’homme, et il ne trouvait rien qui lui inspirât la con ance. Quel
jugement ! Il y a plus. L’homme, tel qu’il est, ne peut jamais être
amélioré, de manière à ce que Dieu puisse de nouveau se er à
lui. Son cœur peut être touché, son intelligence développée, sa
conscience convaincue, pourtant Dieu ne peut pas avoir
con ance en lui. Il nous est dit que « plusieurs crurent en son
nom, contemplant les miracles qu’il faisait. Mais Jésus lui-même
ne se ait pas à eux ». L’homme ici faisait de son mieux ; il était
impressionné à la vue des choses que Jésus faisait, et pourtant le
Seigneur ne pouvait pas se er à lui. — C’est pourquoi, l’homme
doit « être né de nouveau ».
La nécessité d’être « né de nouveau » ou d’en haut, ou bien,
comme on s’exprime improprement, la nécessité de la
régénération, est comprise et reconnue parmi les saints.
Cependant, la nouvelle naissance n’est-elle pas une chose plus
simple et plus évidente qu’on ne le suppose généralement ? Je le
crois. La doctrine, à ce sujet, éveille presque toujours dans l’âme
le sentiment de quelque chose de vague et d’étrange, ce qui ne
doit pas être.
Nicodème était venu à Jésus comme un disciple. « Nous savons,
dit-il, que tu es un docteur venu de Dieu » ; sur quoi le Seigneur
lui dit immédiatement qu’il doit être né de nouveau ; et il ne le
laisse pas qu’il n’ait dirigé sa pensée vers le serpent d’airain, en
lui montrant que c’était là qu’il devait aller, pour recueillir la
semence de cette vie nouvelle dont il avait besoin.
Sous quel caractère, par conséquent, faut-il que Nicodème
prenne sa place là, et qu’il regarde vers le Fils de l’homme élevé à
la croix ? Simplement comme un pécheur, un pécheur convaincu
de péché, et qui, pareil à l’Israélite mordu par le serpent, porte
au-dedans de lui la sentence de mort. Mais Nicodème avait
encore à apprendre que telle était sa condition, car ce n’est pas
dans cet esprit qu’il était venu à Jésus. Il doit donc tout
recommencer ; il doit être né de nouveau, arriver auprès de Jésus
par un nouveau chemin et sous un nouveau caractère. Il se
considérait comme un disciple, et voyait en Jésus un docteur
venu de Dieu ; mais que lui, Nicodème, fût un pécheur mort dans
ses péchés, un homme mordu par le serpent ancien ; que le Fils
de Dieu fût un Esprit vivi ant, un Rédempteur qui serait sa
justice, voilà ce qu’il ne comprenait pas encore, de sorte que la
semence de la vie n’avait jamais pénétré dans son cœur.
Le caractère de la vie éternelle, de cette nature divine en nous,
est par conséquent aussi simple que le besoin pour nous de la
posséder ; et le secret de cette vie, c’est d’apprendre à connaître
Jésus, le Fils de Dieu, comme le Sauveur, d’aller à lui comme un
pécheur convaincu ; de regarder à lui comme possédant la même
vertu que le serpent d’airain apportait à l’Israélite mordu. — Et il
y a une grande douceur à suivre depuis ce moment les traces de
Nicodème, d’après ce que nous apprend ce même Évangile.
Jusqu’alors, comme nous l’avons vu, Nicodème s’était trompé de
chemin ; mais, lors même qu’il avait dû changer sa route, la
direction que le Seigneur lui donne ici, la rend bonne et sûre ; car
plus tard, nous le voyons prendre le parti de Jésus devant le
conseil, et trouver une part de l’opprobre attaché au Galiléen
rejeté ; et à la n, il est là où le Seigneur l’avait envoyé dès le
début, c’est-à-dire, devant le serpent d’airain. Il voit le Fils de
l’homme élevé à la croix. Alors il va à Jésus, mais non pas comme
un disciple à un docteur ; il va à lui, mais non pas le soir ; il le
reconnaît, non pas devant le conseil seulement, mais en plein
jour ; et en présence du monde entier, il lui rend hommage
comme à l’Agneau de Dieu froissé, frappé, meurtri. Nicodème
était lent de cœur peut-être, mais le serpent est encore sur la
perche, même pour ceux-là ; il est toujours là, attendant pour
bénir.
C’est ainsi que la vie éternelle nous apparaît aussi simple dans
son caractère que dans sa nécessité. Nous découvrons la semence
qui la produit. La divine puissance, le Saint Esprit, qui préside à
toute l’œuvre selon sa propre énergie, agit d’une manière qui
dépasse toutes nos pensées. Que ce soit le vent ou l’Esprit, nous
ne savons ni d’où il vient, ni où il va ; mais nous apprenons quelle
est la nature de la semence qu’il emploie et du terrain dans
lequel il sème. L’une est la parole du salut, l’autre, l’âme d’un
pécheur convaincu de péché.
La vie qui coule au travers de la famille de Dieu est esprit, parce
que Jésus, le second Homme, le Premier-né de cette vie, est
« Esprit vivi ant » ; et « ce qui est né de l’Esprit est esprit », nous
dit le Seigneur. Telle est notre nouvelle vie. Elle est éternelle,
infaillible, et, soit qu’elle réside dans la Tête ou dans les membres
du corps, elle est victorieuse de tout le pouvoir de la mort. Le
docteur divin dit encore : « Si quelqu’un n’est né d’eau et de
l’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu ». Il n’y a
d’admission là que pour les « nés de nouveau », c’est-à-dire pour
des pécheurs justi és ou vivi és par la parole du salut. Il n’y a pas de
justes, pas de sages, pas de riches dans ce royaume ; personne qui
ait sous ce rapport quelque con ance en la chair. Cette vérité est
donc établie, pour la joie et l’assurance de nos cœurs ; car tout en
étant décisive, elle est pleine d’encouragement. Lorsqu’il est dit
« Si quelqu’un n’est né de nouveau, il ne peut voir le royaume de
Dieu », il est encourageant de comprendre en même temps, que si
nous sommes nés de nouveau, nous verrons le royaume, et que
ni ruse, ni force de la part des hommes ou du diable, ne pourra
nous tenir dehors. Si nous prenons la place de pécheurs
convaincus de péché (tirés du Père sans doute par l’action secrète
du Saint Esprit), et que nous recevions du Fils de Dieu la parole
du salut — si, comme les Israélites mordus, nous levons les yeux
vers le serpent élevé sur la perche, nous sommes déjà entrés dans
le royaume, nous possédons la vie, et la gloire nous attend. Notre
cantique aura de l’écho dans le ciel et retentira jusque dans
l’éternité. La vue que nous aurons de Jésus et de son salut n’aura
pas de limites, et s’étendra dans la sphère de la gloire à venir. La
vie éternelle est à nous, la vie du ciel est en nous.
Revenons un instant à Nicodème. Après que le Seigneur lui eut
ainsi révélé quelle était la semence de la vie éternelle, il cherche
à la jeter au-dedans de lui, là où elle doit être semée pour
produire du fruit, c’est-à-dire, dans la conscience. Car Nicodème
était venu de nuit, comme si ce qu’il faisait ne pouvait pas
supporter la lumière ; aussi le Seigneur, voulant sans doute
parler à sa conscience, lui dit au moment de le quitter :
« Quiconque fait des choses mauvaises hait la lumière, et ne vient
pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient reprises ».
La nécessité d’une nouvelle naissance par la parole du salut,
nous est donc enseignée par le Seigneur. Si l’homme n’est né de
nouveau, Dieu ne peut pas se er à lui ; et cet homme ne peut ni
voir le royaume de Dieu ni y entrer. Quel rapport y a-t-il, par
exemple, entre le ls aîné, frère du prodigue, et la joie qui
remplissait la maison de son père ? Aucun. Jamais il n’avait eu,
lui, seulement un chevreau pour faire bonne chère avec ses
amis ; il n’y avait que le ls prodigue, « revenu à lui-même », qui
pouvait obtenir l’anneau, la plus belle robe et le veau gras. Et le
royaume aussi est tel, que des pécheurs rachetés seuls peuvent en
comprendre le bonheur et y avoir place. Tous ceux qui s’y
trouvent sont des « nouvelles créatures », des êtres d’un ordre qui
ne se trouve pas dans la première création. Adam fut créé
intègre ; mais dans le royaume il n’y a que des pécheurs rachetés
par le sang. Toutes choses y ont été réconciliées par le sang, ainsi
qu’il est écrit : « La plénitude s’est plue … à réconcilier toutes
choses avec elle-même, ayant fait la paix par le sang de sa croix,
par lui, soit les choses qui sont sur la terre, soit les choses qui
sont dans les cieux » (Colossiens 1).
3.22-36
Nous voyons ensuite le Seigneur poursuivre son service en
Judée, comme ministre de la circoncision, mais nous ne le
voyons qu’un moment ; car s’occuper ici de ces questions n’aurait
pas été en accord avec le plan général de cet Évangile qui, nous le
savons, présente le Seigneur en dehors des relations juives. Une
même remarque s’applique au passage suivant, où le Baptiseur
est vu en rapport avec Israël, mais encore en passant seulement,
et dans le but, semble-t-il, d’avoir l’occasion, par le Saint Esprit,
de rendre témoignage à Jésus, vu, non pas dans sa gloire juive,
mais dans des honneurs plus élevés et des joies plus douces, que
le Christ, comme Fils de David, n’avait pas en partage.
Ici je m’arrêterai un peu, pour considérer ce moment particulier,
cette épreuve morale, par laquelle Jean est appelé à passer, ainsi
qu’il en avait été pour Moïse (Nombres 11), et qu’il en fut plus
tard pour Paul (1 Corinthiens 3).
Josué, le serviteur de Moïse, était jaloux pour son maître de ce
que Eldad et Médad prophétisaient dans le camp. Moïse le
reprend, non seulement par une parole, mais aussi par un acte ;
car il se rend immédiatement dans le camp, dans l’intention
évidente de jouir et de pro ter du don et du ministère de ces
deux hommes, sur lesquels le Saint Esprit venait de tomber.
C’était là une noble conduite de ce bien-aimé de Dieu. Nulle
rancune, nulle jalousie ne venait souiller le fond pur de son
cœur, ni troubler la sérénité de son âme. Lui-même, vase
richement doué par le Saint Esprit, voulait recevoir aussi par le
moyen d’autres vases, bien qu’ils fussent inférieurs, et recevoir
avec reconnaissance et promptitude de cœur.
Paul, en son jour, dut passer par une épreuve semblable. Des
rivalités s’étaient élevées à Corinthe au milieu des saints ;
quelques-uns disaient : « Moi, je suis de Paul », d’autres : « et moi,
d’Apollos ». Comment Paul a-t-il fait face à l’épreuve ? A-t-il su
triompher du tentateur, comme Moïse avait triomphé ? Oui ;
mais par une arme di érente. D’une main puissante et d’un
cœur dévoué, il met en pièces tous les vases, a n que Celui qui
doit les remplir, et lui seul, ait toute la gloire. « Qui donc est
Apollos, et qui Paul ? » dit-il ; « ni celui qui plante n’est rien, ni
celui qui arrose, mais Dieu qui donne l’accroissement ». C’était
vaincre, également au mauvais jour, mais d’une manière
di érente et avec d’autres armes.
Que voyons-nous chez Jean ? Il rencontre ici la même ruse de
l’Ennemi. Ses disciples témoignent en sa faveur de la jalousie à
l’égard de Jésus. Mais, comme Moïse et comme Paul, il tient
ferme au mauvais jour, bien que placé dans une autre situation.
Il ne peut pas, comme Paul, briser le vase rival. Il ne peut pas
dire : « Qui donc est Jean et qui, Jésus ? » comme Paul disait : « Qui
donc est Apollos et qui, Paul ? » Il ne peut traiter le nom de Jésus
comme Paul traite celui d’Apollos. Alors Jean met en pièces un
des vases rivaux, c’est-à-dire lui-même, sous les yeux de ses trop
zélés disciples ; et celui dont ils étaient jaloux, par attachement à
leur maître, Jean lui reconnaît des gloires qui dépassent toutes
leurs pensées, et que n’aurait pu contenir aucun autre vase que
Jésus.
Combien cela est parfait ! Quel beau témoignage Jean donne, par
sa conduite en cette circonstance, d’avoir su se er à la direction
et à la sauvegarde de l’Esprit de sagesse ! Jésus, il est vrai, était,
dans un certain sens, un vase de la maison de Dieu comme les
prophètes et les apôtres. Il était serviteur de la circoncision.
Comme Jean, il prêchait l’Évangile du royaume à venir. Il
chantait des airs joyeux, et Jean, des complaintes. Dieu parlait
par lui comme il avait parlé par tout autre prophète, de sorte
que, sans nul doute, il était un vase de la maison de Dieu. Mais il
était d’un ordre particulier. La matière et le travail de ce vase
di éraient des autres ; et quand l’occasion le place, comme dans
ce passage, en face d’un autre vase, l’honneur qui lui appartient
doit être reconnu. Ce sont les délices de Jean de servir
d’instrument alors. Dirigé par l’Esprit, et en pleine communion
avec la pensée du Père, il trouve sa joie à montrer la verge eurie
du véritable Aaron brillante de eurs et de fruits, et à exposer les
verges rivales dans tout leur état de mort et de sécheresse,
réduisant ainsi au silence les murmures d’Israël et les pensées
a ectueuses, mais partiales, de ses propres disciples (Nombres
17). Sa joie était accomplie par ce qui provoquait leur
mécontentement. Il n’était que l’ami de l’époux. Sa course à lui
était achevée, et il était satisfait de se retirer et d’être mis en
oubli. Comme ses compagnons de service, les prophètes, il avait
tenu haut élevée la lumière, pour guider sa génération à Christ,
pour conduire l’épouse à l’époux, et il ne lui restait plus qu’à se
retirer. Il se tient là, comme le dernier de la lignée des prophètes,
et en son nom et au leur, il laisse toutes choses aux mains du Fils.
Et quand il touche le sujet des gloires de Celui qui était plus
grand que lui, avec quel bonheur il demeure sur ce thème !
L’Esprit fait passer devant lui les divers rayons de cette gloire.
Combien il est heureux, en e et, quand Jésus est l’objet qui
occupe toute notre intelligence, tout notre cœur, et que tous,
nous sommes contents de n’être rien, pour que lui seul remplisse
toutes choses !
Que par ta grâce divine, Seigneur, il en soit ainsi de plus en plus
de tous tes saints !
Chapitre 4
Jean a disparu de la scène, et le ministère du Fils nous reste seul.
Tout est entre ses mains, et ainsi il s’avance simplement comme
le Fils de Dieu, le Sauveur du monde. Ce chapitre nous le montre
rejeté d’Israël, et quittant la Judée, le lieu de la justice, sans autre
caractère que celui de Sauveur des pécheurs, Il doit
nécessairement traverser un lieu souillé, et faire l’expérience
que passer au milieu de nous lui coûte d’amères douleurs et
lassitudes. Nous en trouvons un exemple ici.
Les Juifs, dans leur justice, étaient conséquents de refuser toute
relation avec les Samaritains. C’était en accord avec leur appel de
dire : « C’est une chose illicite pour un Juif que de se lier avec un
étranger, ou d’aller à lui » (Actes 10.28), car c’était un témoignage
contre le mal, témoignage qui était précisément le dépôt que
Jéhovah avait con é à Israël. Ils se disaient les témoins de Dieu
contre le monde, eux, la nation pure, séparée des nations
impures, en témoignage de la justice de Dieu contre une terre
corrompue. Mais Jésus se tenait loin d’Israël maintenant. Il
avait quitté la Judée, le lieu de la justice, et se trouvait dans
l’impure Samarie, comme le Fils de Dieu, le Sauveur des
pécheurs. Déjà, il était allé en Judée cherchant la justice, ce fruit
qui convenait à un tel pays, et il n’en avait pas trouvé ; mais dans
la Samarie, il n’a pas la peine d’en chercher. Il doit être là dans un
caractère tout di érent, celui de la grâce pure ; aussi, dans la
conscience que cela est, qu’il n’est là qu’en grâce, comme le
Sauveur des pécheurs, il s’adresse à une femme, venue pour
puiser de l’eau à la fontaine de Sichar.
Il y avait, dès le commencement, un secret en Dieu, secret qui
dépassait toutes les exigences révélées à Israël et tout l’ordre de
justice établi en Judée. C’était la grâce et le don par la grâce. Si
un témoignage de justice avait été con é au Juif contre le monde,
le Fils était le don de Dieu au monde ; il avait la vie pour le
monde. « La loi a été donnée par Moïse ; la grâce et la vérité
vinrent par Jésus Christ » ; et sachant qu’il apportait ce secret de
grâce pour des pécheurs, Jésus dit à la femme : « Donne-moi à
boire ». Elle s’étonne, et avec raison, de ce qu’un Juif ne se tenait
pas à distance. Elle ne savait pas encore que le secret de Dieu
était avec lui. Ceci toutefois devait lui être dévoilé bientôt. La
gloire excellente allait occuper ce lieu impur. L’Éternel Dieu
prenait sa place, non pas en justice sur la montagne brûlante,
mais à la source du euve de la vie, comme le Seigneur, prêt à en
dispenser les salutaires eaux.
Quelle bénédiction que celle qui se prépare pour la pauvre paria !
Seule, une paria pouvait en comprendre l’étendue. Cependant
elle doit apprendre que la source de cette bénédiction n’est pas
en elle-même. La Samaritaine est amenée à connaître ce qu’elle
est, à regarder en arrière sur tout ce qu’elle a été, et à voir qu’il ne
lui reste que le désert et un pays de ténèbres. Sa conscience est
troublée. « Celui que tu as maintenant n’est pas ton mari ». Mais
dans ce désert et ces ténèbres, le Fils de Dieu y est avec elle ; et
c’était le bonheur, un bonheur qu’une pauvre paria isolée
pouvait comprendre. Ce fut à Jacob proscrit, ayant pour oreiller
les pierres du chemin, que le ciel fut ouvert et que Dieu fut révélé
dans toute sa grâce et sa gloire. Il en était ainsi de cette lle de
Jacob. L’Éternel de nouveau fendait le rocher pour en donner
l’eau. L’arche de Dieu se trouvait ramenée dans le camp au milieu
du désert. Le Seigneur des sources de la vie adresse la parole à
une vile créature, et la joie et la puissance de l’amour de Dieu lui
sont aussitôt manifestées. La Samaritaine ne pense plus à sa
cruche, et son cœur et ses lèvres débordent d’un témoignage
rendu au nom de Jésus.
Bien-aimés, tout cela est divin. Une pauvre Samaritaine, à qui la
justice a enjoint de se tenir à l’écart dans un lieu souillé, devient
le fruit du travail de Jésus, et est admise dans les secrets et
l’intimité du Fils de Dieu. Pécheresse, sa position et son
caractère sont ce qui la place devant les pas du Fils de Dieu. Il n’y
a que le pécheur qui se trouve ainsi sur le chemin du Sauveur. —
Ah ! mes frères, quelles que soient les a ictions et les épreuves
que l’entrée du péché dans le monde nous ait occasionnées et
peut nous occasionner encore, sans lui cependant nous
n’eussions pas connu Dieu, et nous ne l’eussions pas possédé
comme nous le possédons maintenant, — le Dieu qui nous a
ouvert son sein, les trésors de son amour, en nous donnant son
Fils.
Les disciples, à leur retour, s’étonnent, comme la femme, de ce
que Jésus, comme Juif, ne se fût pas tenu à distance. Conscients
toutefois de la présence d’une gloire au-dessus de leur portée,
nul ne dit : « Que lui demandes-tu ? » ou : « de quoi parles-tu avec
elle ? » Ils ne connaissaient pas encore le secret que le Fils de Dieu
portait en lui ; et Jésus leur montre alors, blancs pour la
moisson, des champs que leur foi n’avait jamais contemplés. Les
seuls champs qu’ils connussent, c’étaient ceux qui jadis avaient
été partagés entre les tribus d’Israël. Dans leur estime, le
labourage de Dieu devait se borner à cette enceinte sacrée, et la
Samarie, pensaient-ils, lieu impur, était en dehors. Mais, comme
nous l’avons vu, il y avait un secret en Dieu. Le Fils de Dieu, le
Sauveur des pécheurs, était sorti, portant la semence, et son
travail avait préparé une moisson pour les moissonneurs dans
les plaines souillées de la Samarie. Il montre à ses disciples une
compagnie d’hommes, arrivant de Sichar, qui bientôt devaient
dire : « Celui-ci est véritablement le Sauveur du monde ».
C’étaient des épis prêts pour la faucille. La moisson était
abondante dans la Judée ; dans la Samarie, elle était blanche
pour la moisson. Le Seigneur avait porté la charge du semeur ;
las et épuisé, il avait parlé avec la femme ; maintenant il veut
partager avec ses disciples la joie de la moisson, et comme gage,
il demeure deux jours à Sichar, avec la petite assemblée, laquelle
croyait en lui et le reconnaissait comme le Sauveur du monde.
La proximité à laquelle le Seigneur invite l’âme, l’intimité avec
lui-même qu’il veut établir dans le cœur du pécheur sauvé par la
foi, sont d’une grande douceur à connaître. Il n’agit pas envers
nous comme un protecteur ou un bienfaiteur, principe dont le
monde est rempli. « Ceux qui exercent l’autorité sur elles [les
nations] sont appelés bienfaiteurs » (Luc 22.25). L’homme est
assez disposé à conférer des bienfaits dans le caractère d’un
protecteur, en maintenant la distance d’une supériorité à la fois
avancée et reconnue. Jésus n’agit pas ainsi. Il peut dire : « Je ne
donne pas, moi, comme le monde donne ». Il amène son obligé
très près de lui. Il lui fait voir et éprouver qu’il le traite plutôt
comme un parent que comme un protecteur. Toute la di érence
est là ; et j’ose dire que le ciel dépend de cette di érence. Le ciel
que l’âme espère, et dont elle jouit déjà en esprit, dépend de ce
que Jésus n’agit pas envers nous sur le principe du protectorat ;
sinon le ciel ne serait qu’un monde bien ordonné de principes
humains et de bienveillance humaine. Et que serait-ce que cela !
Aussi, ce n’est pas la condescendance d’un grand de la terre que
nous voyons en Christ. « Je suis au milieu de vous comme celui
qui sert », a-t-il dit. Et chaque circonstance de sa vie nous le
con rme. Jamais sa manière de faire n’était celle d’un
bienfaiteur simplement ; jamais il n’a montré la hauteur et la
réserve d’un protecteur. Il « a pris nos langueurs, et a porté nos
maladies ».
Voyez-le ici, à cette fontaine, avec cette femme de la Samarie.
Elle avait dans ce moment les pensées les plus élevées à son sujet :
« Je sais que le Messie qui est appelé le Christ, vient ; quand celui-
là sera venu, il nous fera connaître toutes choses ». Telle était son
appréciation juste et élevée du Messie, ne sachant pas que celui à
qui elle parlait face à face pouvait immédiatement lui répondre :
« Je le suis, moi qui te parle ».
Où se trouvait alors ce Messie haut élevé ? Assis sur le bord de la
fontaine, il causait avec cette femme qui l’y rencontrait, et à qui,
a n de la mettre à l’aise dans sa présence, il avait demandé un
peu d’eau !
Était-ce là du protectorat comme les hommes en font ? Y avait-il
la distance et la condescendance d’un supérieur ? Était-ce le ciel
ou la terre, l’homme ou Dieu ? La condescendance du monde
vous accordera toutes les faveurs que vous voudrez, pourvu que
le rang du supérieur et la déférence du protégé soient dûment
maintenus. Le ciel ou l’amour n’agit pas ainsi, Dieu soit béni !
Jésus, Dieu manifesté en chair, était là si près, qu’on aurait dit un
parent de celui à qui il dispensait ses faveurs. Il cherche à nous
amener près de lui, à mettre dans nos cœurs la liberté et la
con ance. Il nous visite ; même il vient à nous sur notre
invitation, comme il alla demeurer deux jours chez les
Samaritains, que la parole de la femme avait attirés vers lui. Il
nous demande une faveur pour que, de notre côté, nous en
acceptions une de sa main. Il boira de notre cruche, pour nous
encourager à nous abreuver aux sources intarissables qu’il a
ouvertes, et il mangera de notre chevreau à la porte de la tente,
en même temps qu’il nous révélera des secrets divins (Genèse 18).
Ceci peut réjouir nos cœurs. Le cœur du Seigneur jouit aussi de
ses propres voies d’amour ; car ces deux jours à Sichar furent
pour lui un peu de la joie de la moisson ; ils furent un
rafraîchissement pour le Fils de Dieu fatigué et lassé sur cette
terre. Il trouvait là la foi la plus pure qu’il ait jamais rencontrée ;
et il n’y avait que la foi du pécheur qui pouvait le rafraîchir ici-
bas. Rien dans l’homme n’en était capable, mais seulement la foi
qui sort l’homme de lui-même.
Toutefois, cette joie ne devait durer que deux jours. Bientôt il est
appelé dans une région moins élevée ; car, après ces deux jours, il
alla en Galilée, se retrouvant ainsi dans un milieu juif. Il s’y rend
avec le triste présage « qu’un prophète n’est pas honoré dans son
propre pays », et il le ressent d’autant plus, après la communion
dont il venait de jouir parmi les pauvres pécheurs de Samarie. Le
présage n’est que trop vrai. Il trouve dans la Galilée de la foi,
mais d’un ordre inférieur. Les Galiléens le reçurent, ayant vu
toutes les choses qu’il avait faites à Jérusalem. Le Seigneur de la
cour crut, lui et toute sa maison, mais non avant d’avoir
soigneusement véri é la puissance de Jésus, par ses propres
témoins. L’assemblée à Sichar avait cru Jésus lui-même ; les
Galiléens le croient à cause de ses œuvres ; les Samaritains le
connaissaient dans sa propre personne ; les Juifs demandent,
pour ainsi dire, un signe nouveau. Aussi les uns se trouvent en
communion avec le Fils de Dieu, tandis que les autres sont guéris
par le Médecin d’Israël. La bénédiction de Samarie l’impure
dépasse celle de Jérusalem la juste.
La première section de notre Évangile est terminée. Nous avons
suivi les pas du Fils de Dieu, du Fils du Père, dans ce siècle
mauvais où nous sommes. Au début, nous avons vu sa gloire qui,
du moment où elle brilla dans le monde, manifesta les ténèbres
du monde. Elle ne trouva pas de réponse chez l’homme. Le
monde, qui fut créé par lui, ne le connut pas. Mais le Fils de Dieu
portait avec lui un secret, le secret de la grâce de Dieu pour les
pécheurs, cette chose plus profonde que toutes les pensées des
hommes. Sur la terre il fut un Étranger, mais la révélation de son
secret aux pauvres pécheurs avait la puissance de faire de ceux-ci
des étrangers avec lui.
Chapitres 5 à 12
Nous venons de parcourir les chapitres 1 à 4 ; et nous désirons,
avec le secours de la grâce de Dieu, continuer à suivre les pas du
Seigneur. Qu’il daigne, par son Esprit, faire de ce travail
l’occasion d’une sainte jouissance, et de la gratitude de nos
cœurs.
Dans les chapitres 5 à 12, le Seigneur est vu en relation avec les
Juifs. Cependant le dessein de l’Esprit n’est pas de nous montrer
ici la vie publique et le ministère de Jésus. On ne voit pas le
Seigneur, comme dans les autres évangiles, aller dans les villes et
les villages, prêchant le royaume, a n d’amener peut-être
quelques pécheurs à la repentance. Ce qui surtout semble
occuper sa pensée, c’est l’éloignement de Dieu dans lequel vivait
ce monde où il passait, et ce n’est que de temps à autre qu’on le
voit s’avancer, pour agir en puissance et en grâce autour de lui
comme le Fils de Dieu — l’Étranger céleste — le Sauveur des
pécheurs.
Il en est de même pour ce qui concerne ses disciples. Dans
l’évangile de Jean, ils ne sont pas ses compagnons dans son
ministère, comme c’est le cas dans les autres. Jésus ne nomme
pas les douze ; il n’envoie pas les soixante-dix : le service reste
dans ses propres mains. Jusqu’au chapitre 13, alors que le
ministère du Seigneur a pris n, les apôtres sont rarement vus
dans sa compagnie. Et quand ils sont avec lui, il y a une certaine
réserve.
D’autre part, il n’est aucun des évangiles où Jésus soit montré
aussi rapproché du pécheur que dans celui-ci. Il est seul avec la
Samaritaine ; seul avec la femme adultère ; seul avec l’aveugle
mendiant ; et c’est ce qui rend cette portion de la Parole de Dieu
d’un si grand prix. La joie et la sécurité d’être seul avec le Fils de
Dieu, comme cela est vu ici, sont du plus haut intérêt pour l’âme.
Le pécheur apprend ainsi qu’il a un droit auprès du Sauveur, et il
lui devient évident que le pécheur et le Sauveur ont été faits l’un
pour l’autre. Aussitôt que nous apprenons que nous sommes des
pécheurs, nous pouvons lever les yeux vers le Fils de Dieu et le
réclamer comme nôtre. Quel moment que celui-là ! Quel
événement à enregistrer dans les annales du ciel ! Jésus est venu
chercher et sauver ce qui est perdu ; il marchait solitaire ici-bas,
sauf quand il rencontrait un pécheur. Celui-ci avait le droit et, on
oserait dire, le pouvoir de troubler la solitude de l’Étranger
céleste. Le monde ne le connaissait pas. Son chemin parmi nous
fut un chemin solitaire, si ce n’est lorsque le pécheur et Lui se
trouvaient face à face. Le lépreux en dehors du camp le
rencontrait, mais nul autre.
Être seul avec Jésus est la première position du pécheur. C’est le
commencement de sa joie, — une intimité avec Jésus dans
laquelle il n’est permis à personne de s’immiscer. Dans tous les
âges du christianisme, ce qui s’appelait l’Église a cherché à
pénétrer dans l’intimité du Sauveur et du pécheur, et à se
constituer partie intéressée dans la question qui existait entre les
deux. Mais l’Église a eu tort en ceci. Le péché nous rejette sur
Dieu seul.
Et, dans les jours où nous sommes, au milieu de tant d’opinions
diverses, il est nécessaire de le savoir, bien-aimés, pour notre
repos. Quelques-uns voudraient exiger que nous nous joignions
à eux dans certains sentiers de service, ou pour certaines formes
de culte ; ils nous croient désobéissants à Dieu si nous refusons.
Toutefois, quelle que soit la mesure dans laquelle nous cédions,
nous n’osons pas, à cause d’eux, mettre de côté la prérogative qui
appartient à Dieu, d’agir seul envers nous, pécheurs. Nous ne
devons laisser personne se saisir du droit que Dieu a de nous
entretenir seul de nos péchés ; et, quelque juste que soit notre
anxiété au sujet d’une foule de questions qui se présentent, elle
ne doit jamais nous faire oublier que, comme pécheurs, nous
nous sommes déjà trouvés seuls avec Jésus, et que, une fois pour
toutes, selon les richesses de sa grâce, il nous a pardonné nos
péchés et nous a reçus à lui.
La solitude dans laquelle Christ et le pécheur se rencontrent, est
mise en relief dans cet Évangile de la manière la plus
encourageante. Quant à ses rapports avec d’autres, Jésus est vu
comme à distance et dans la réserve, pour ce qui concerne les
lieux aussi bien que les personnes. Le Fils de Dieu n’avait rien à
faire avec un endroit plutôt qu’avec un autre : l’immense désert
du monde, où sont les pécheurs, c’est là qu’il était appelé à agir.
— Mais suivons les chapitres par ordre.
Chapitre 5
Bien des exemples de ce qui est arrivé en Israël durant toutes les
périodes de son histoire, nous montrent qu’il y avait eu, par
moments, la manifestation d’une action particulière du Saint
Esprit, manifestation par laquelle, et non par les ressources de
leur propre système, le Seigneur soutenait le peuple, et leur
enseignait à reconnaître après tout où se trouvait le fondement
de leur espérance. On peut remarquer cela, en particulier, dans
l’intervalle qui sépare Abraham de David *.
* Le peuple d’Israël devait savoir, par l’histoire nationale,
combien souvent leur sort avait dépendu des ressources
que Dieu a par devers lui, et selon lesquelles il avait agi en
leur faveur, quoique en dehors du système dans lequel ils
étaient légalement établis. Dans toutes les périodes de leur
histoire, ils avaient été soutenus et conduits de Dieu par le
déploiement de ces ressources, provenant de sa grâce
souveraine. Leur père Abraham avait été appelé par un
acte de cette grâce (Josué 24.2, 3). La main de Dieu les avait
protégés et considérablement multipliés en Égypte (Exode
1.12). Dans les lointaines solitudes de Madian, où Israël
n’était pas connu, Moïse est préparé de Dieu pour être leur
libérateur. Durant leur chemin à travers le désert, ils
avaient expérimenté leur entière dépendance de Dieu.
Josué, après Moïse, accomplissant son ministère, avait
réduit les nations de Canaan, non par sa force, mais par
celle de l’Esprit de Dieu. Et plus tard, quoique en des
circonstances di érentes, il en fut toujours de même.
L’épée de Josué, qui avait donné la preuve de la délité du
Seigneur envers Abraham et sa semence, fut à peine
rentrée dans le fourreau, et la bénédiction acquise par la
main de Dieu fut à peine con ée au peuple, que tout était
déjà perdu. Le premier chapitre des Juges se termine en
déclarant qu’Israël avait, par sa faute, tout compromis.
Israël et Canaan, c’est de nouveau Adam et le jardin. Israël
alors ne fut pas chassé du pays, mais le reste du livre nous
montre Dieu, présent au milieu de son peuple, réparant les
maux de sa propre main et par l’énergie de son Esprit. Il
leur donne des libérateurs ; il a suscité Débora, Gédéon,
Jephté, Samson. — Ainsi, d’Abraham à David, toutes les
périodes de l’histoire d’Israël sont marquées de l’action de
Dieu en grâce souveraine, quand, par le système établi en
Sinaï et con é aux mains d’Israël, il ne restait aucune
ressource, mais plutôt une occasion de châtiment pour un
peuple in dèle.
Il me paraît que Béthesda était un témoin de cette action.
Béthesda ne provenait pas du système juif proprement. C’était
une source curative, ouverte à Jérusalem par la grâce souveraine
de Jéhovah (comme en e et le nom l’indique) ; ce n’était pas un
secours permanent, mais seulement un secours momentané,
ainsi que l’avaient été les juges et les prophètes. Comme eux,
Béthesda était un témoignage de la grâce et de la puissance qui
étaient en Dieu pour Israël, et l’avait été, à certaines saisons
peut-être, pendant toute la sombre période écoulée depuis les
jours du dernier de leurs prophètes. Et maintenant, Béthesda
devait être mis de côté. Ses eaux ne devaient plus être agitées.
Celui vers lequel tendaient tous ces témoignages était là. Source
véritable de santé, le Fils de Dieu était venu à la lle de Sion, et se
présentait.
Il y avait une fête à Jérusalem, nous est-il dit. Les choses se
passaient comme si tout était en règle avec Dieu : on observait
dûment les fêtes ; les services religieux étaient exactement
suivis. Pourtant, la présence seule de Béthesda aurait pu dire à la
lle de Sion qu’elle avait besoin d’un médecin, et qu’elle n’était
pas en possession de ce repos dans lequel la délité à l’Éternel
l’aurait maintenue. Et le Seigneur lui disait la même chose. Il
guérit l’homme in rme, prenant ainsi la place de Béthesda ;
seulement, il le fait de manière à faire comprendre à Israël qu’ils
ont perdu le sabbat, perdu ce qui était leur gloire. — « Or, c’était
sabbat ce jour-là ».
La nation s’émeut aussitôt. L’orgueil des Juifs est froissé, car le
sabbat était le signe qui les distinguait comme peuple, et ils en
veulent à Jésus. « Ils cherchaient à le faire mourir, parce qu’il
avait fait ces choses en un jour de sabbat ».
Je m’arrêterai ici un moment.
Jésus auprès du réservoir de Béthesda est une vision qui mérite,
comme t Moïse auprès du buisson, que nous nous détournions
pour la voir. Bien que, anciennement, cette eau eût en quelque
sorte re été Jésus, lui est là maintenant pour la tarir. Il est venu
comme une chose nouvelle, et s’il est auprès du réservoir, c’est
pour être en contraste avec la vertu de ses eaux, avec le réservoir
même. « Veux-tu être guéri ? » demande-t-il au malade couché-là.
Et cet homme était-il disposé à se remettre tel qu’il était entre ses
mains ? Voulait-il être son débiteur, et se con er avec toute son
impuissance et sa misère, à Jésus seul ? C’était autre chose
assurément que le système compliqué et embarrassant de
Béthesda. Il n’y avait pas de rivalité à craindre, pas de secours à
solliciter, nul retard, aucune incertitude. Le pauvre in rme
n’avait plus à s’occuper de ceux qui s’e orçaient de le devancer
dans l’eau, ni de ceux qui voulaient l’aider à y descendre avant les
autres. Au lieu de vivre d’attente et d’espérance, il y avait une
guérison instantanée et complète. Anges et réservoir, amis et
rivaux, retard et incertitude, Jésus disposait de tout en sa faveur
de la manière la plus étendue et la plus glorieuse. Lorsque Jésus
paraît, quand le Fils de Dieu se tient auprès du réservoir de
Béthesda, il ne s’agit plus que de savoir si le malade consent à lui
devoir tout, — à demeurer tranquille pour voir la délivrance de
Dieu.
L’insu sance du réservoir de Béthesda est mise à découvert : ce
n’est qu’un « misérable élément », dépourvu de gloire à cause de
la gloire qui excelle. De la même manière, dans l’épître aux
Hébreux, l’Esprit, par le moyen de l’apôtre, montre ce qu’était le
sanctuaire terrestre avec toutes ses dispositions et ses services.
S’il m’est permis de le dire, Jésus est vu là une fois de plus auprès
du réservoir de Béthesda. Le Saint Esprit le place en contraste
avec le système d’ordonnances et d’observances qui avait
précédé, et dont il fait ressortir toute l’impuissance et la
pauvreté. Il y avait eu, sans doute, une ré exion de Christ dans
les cérémonies de l’ancien tabernacle, comme dans l’eau à la
Porte des brebis, mais cela disparaît dès que la lumière elle-
même est là.
Mais que dirons-nous en voyant non seulement l’homme
malade, mais une multitude d’in rmes retenus auprès de cette
eau douteuse et décevante, pendant que le Fils de Dieu est dans le
pays, apportant avec lui et en lui la guérison et la délivrance,
sans incertitude et sans retard, en dépit de toute rivalité et sans
le secours de personne ? N’y a-t-il pas là une leçon pour nous ? Le
réservoir est entouré de monde, et Jésus passe inaperçu.
Béthesda est recherché, tandis que Jésus est obligé de chercher
lui-même et de s’o rir. Quel témoignage de la religion de
l’homme ! On s’attache à des ordonnances, à un système, et la
grâce de Dieu qui apporte le salut est méprisée.
Nous nous étonnerions si nous ne connaissions, par une triste
expérience, quelles sont les œuvres de cette nature corrompue
qui est la nôtre.
Mais continuons. Dans les autres évangiles, quand le Seigneur
est interpellé parce qu’il fait des guérisons le jour du sabbat, il
répond en citant David mangeant les pains de proposition, les
sacri cateurs faisant le service dans le temple, et le fait que ceux-
là mêmes qui l’accusaient, conduisaient leurs ânes à l’abreuvoir
le jour du sabbat. Ici, au contraire, il ne parle pas de ce que
faisaient David, et les sacri cateurs et ses accusateurs eux-
mêmes, mais il dit ce que le Père qui est au ciel avait fait sans
relâche dans ce pauvre monde perdu. « Mon Père travaille
jusqu’à maintenant, et moi je travaille ». Voilà ce que répond le
Seigneur à ceux qui l’attaquaient au sujet de son œuvre à
Béthesda, faite un jour de sabbat.
Parole étrange ! parfaitement en accord avec tout ce que
l’évangile de Jean dit de Jésus. Ce n’est ni dans la compagnie de
David, ou des sacri cateurs, ou de ses voisins que le Seigneur se
place, c’est dans celle de Dieu. « Mon Père travaille jusqu’à
maintenant, et moi je travaille ».
Dans ce que nous apprenons de ces paroles à l’égard du Père et du
Fils, il y a bien des motifs de joie et de louange pour ceux qui
connaissent le Seigneur. Mais pour les Juifs il n’en était pas
ainsi. Ces paroles leur disaient de nouveau qu’ils avaient perdu le
sabbat dont ils se glori aient ; qu’ils l’avaient perdu depuis
longtemps, depuis le commencement même ; car à chacune des
périodes de leur histoire, Dieu, « son Père », avait agi parmi eux
en grâce, ce dont Béthesda était le témoignage. Et lui-même,
Jésus, était aussi venu pour travailler en grâce parmi eux, ce
dont la guérison de l’homme in rme était le témoignage à son
tour. Voilà ce que signi ait : « Mon Père travaille jusqu’à
maintenant, et moi je travaille », paroles qui rappelaient au
souvenir du peuple cette action de la grâce pendant toute la
durée de leur histoire. Aussi les Juifs en sont d’autant plus irrités
contre Jésus, et comme ils n’étaient pas dans le secret de sa
gloire, ils l’accusent de blasphème parce qu’il appelle Dieu, son
Père.
À ceci le Seigneur répond encore (toujours en parlant de lui
comme le Fils, mais en gardant en même temps une position de
dépendance) : « En vérité, en vérité, je vous dis, Le Fils ne peut
rien faire de lui-même ». *
* Si on ne fait la part de la dignité de sa divine personne, on
ne peut discerner la position de sujétion que le Seigneur
prend ici ; car dans la bouche d’une créature, même la plus
distinguée, ces paroles : « Je ne puis rien faire de moi-
même », n’auraient qu’un sens vulgaire, et ne
signi eraient que ce qui appartient à la nature des choses ;
mais dans la bouche du Fils, elles nous disent l’état de
sujétion envers Dieu dans lequel, par son abaissement, il
est entré.
Tout cela est très précieux. Celui qui venait dans le monde à
cause de Dieu et de sa gloire, ne pouvait prendre une autre place.
C’était celle de la justice. « Celui qui cherche la gloire de celui qui
l’a envoyé, celui-là est vrai, et il n’y a point d’injustice en lui »
(chap. 7.18). L’homme, par orgueil, avait déshonoré Dieu. Il avait
o ensé sa majesté en prêtant l’oreille à la suggestion de Satan :
« Vous serez comme des dieux » ; et le Fils, qui venait pour relever
la gloire de Dieu o ensée, a dû s’abaisser. Bien qu’étant en forme
de Dieu, il a dû ici-bas s’anéantir lui-même. La gloire de Dieu
demandait ce sacri ce, dans un monde que l’orgueil avait
entraîné loin de lui. Et ce sacri ce, le Fils l’a o ert. Cela n’allait
pas à l’homme ; ce n’était pas selon l’homme ; et il ne pouvait ni
reconnaître, ni recevoir Celui qui venait ainsi. « Moi, je suis venu
au nom de mon Père, et vous ne me recevez pas ; si un autre vient
en son propre nom, celui-là vous le recevrez » (v. 43).
Bien-aimés, ce sont de saintes et profondes pensées. Par son
abaissement et sa soumission, le Fils honorait Dieu et mettait
l’homme à l’épreuve. Il reconnaissait au seul Seigneur les droits
qui lui appartiennent dans ce monde ; mais en même temps lui-
même devenait un signe, par lequel les pensées de plusieurs
cœurs seraient révélées. Le Juif, le Juif favorisé, était manifesté
comme partageant l’athéisme de tous les hommes ; car le but du
discours de Jésus, dans ce chapitre, était de mettre à découvert
cette source cachée d’incrédulité. Ni la lumière, ni les
témoignages ne leur faisaient défaut. Ils avaient les œuvres de
Christ, la voix du Père, leurs propres écritures et le témoignage
de Jean. Mais l’amour de Dieu n’était pas en eux ; l’amour du
monde les tenait ; c’est pourquoi ils n’étaient pas préparés à
recevoir le Fils de Dieu.
« Comment pouvez-vous croire, vous qui recevez de la gloire l’un
de l’autre et qui ne cherchez pas la gloire qui vient de Dieu seul ? »
(v. 44). Cela nous est dit aussi à nous. N’avons-nous pas à veiller
sur notre cœur et sur toutes ses tendances secrètes ? « Garde ton
cœur plus que tout ce que l’on garde, car de lui sont les issues de
la vie » (Proverbes 4.23). Des courants puissants et dangereux
peuvent se trouver sous la surface. Job était un homme pieux ; il
n’avait pas d’égal sur la terre ; dans son cœur toutefois se mouvait
un courant per de. Il attachait de la valeur à son caractère, aux
circonstances dans lesquelles il était placé. Non qu’il fût ce qu’on
appellerait un homme mondain ou plein de propre justice ; il
était vraiment un croyant, un ami généreux, un homme qui
aimait à faire le bien. Mais il se glori ait de sa position dans la
vie et de la considération dont il jouissait parmi les hommes.
Dans le secret de son âme il s’y complaisait (Job 29) ; et c’était un
courant caché et puissant. Ses amis n’avaient rien vu à son état
intérieur ; mais son Père céleste voyait tout, et parce qu’il aimait
Job et qu’il voulait le rendre participant de sa sainteté, avec
laquelle cet état ne s’accordait pas, il le t passer à son école et
l’exerça pour son bien.
Avertissement plein de grâce, pour que nous aussi, nous
veillions sur les hausses et les baisses de nos cœurs. Il est bon de
se demander chaque jour : « Quelle est la pensée qui m’occupe ? À
quoi s’applique mon activité ? Quels sont mes calculs dans le
secret du cœur ? Est-ce de l’Esprit ou de la chair que j’attends un
aliment pour mon âme ? Et mes désirs sont-ils d’en haut ou d’en
bas ? »
C’est un examen pro table, que suggère la portée profonde des
paroles du Seigneur : « Comment pouvez-vous croire, vous qui
recevez de la gloire l’un de l’autre ? »
L’homme, apostat orgueilleux, ne pouvait supporter la présence
du Fils de l’homme dans l’abaissement, du Fils de Dieu sans
gloire. La source de l’incrédulité était là. C’était chose
incompatible que l’état de l’homme et la présence de Celui qui
maintenait devant l’homme l’honneur de Dieu. Jésus était
repoussé dans son humble apparence, comme son œuvre de
grâce à Béthesda avait été méconnue. Ses frères auraient dû
comprendre que Dieu voulait les délivrer par son moyen, mais
ils ne le comprenaient pas. Ils ne croient pas Moïse, et par le fait,
en principe, ils sont encore en Égypte, encore dans la chair ; ils
ne sont pas rachetés. S’ils avaient cru Moïse, ils auraient cru
Christ, et auraient été délivrés par lui de cet autre Pharaon, la
puissance de la chair et du monde. Mais par leur incrédulité ils
sont asservis à toutes ces choses ; et c’est ainsi que dans ce
chapitre nous les trouvons et que nous les laissons.
Chapitre 6
Une scène nouvelle s’ouvre ici. C’était la Pâque. —
Malheureusement la miséricorde de Dieu, dont cette fête était la
commémoration, Israël n’en avait pas fait cas. Le peuple avait
encore à apprendre ce qu’était l’Égypte et ce qu’était le désert ; et
Dieu, dans sa patiente bonté, malgré tant de provocations,
voulait bien encore les enseigner. Le Seigneur nourrit donc les
foules dans un désert, manifestant la puissance et la grâce de
Celui qui pendant quarante ans, dans un autre désert, avait
nourri leurs pères. Comme Moïse, les disciples incrédules
s’étonnent : « Leur égorgera-t-on du menu et du gros bétail, a n
qu’il y en ait assez pour eux ? » (Nombres 11). Or la main de
Jéhovah n’est pas raccourcie, et il donne à manger à la
multitude. Et celle-ci, mêlant le zèle à ses impressions, veut
l’enlever pour le faire roi. Mais cette ferveur n’est pas agréée du
Seigneur. Le royaume du Fils de Dieu ne doit pas avoir une
origine pareille. Si les « bêtes » reçoivent leurs royaumes « des
vents qui se déchaînent sur la grande mer » (Daniel 7), Jésus ne le
peut pas. Il n’y avait pas là le témoignage de la franche volonté
de son peuple, au jour de sa puissance (Psaume 110). Cet appel au
trône n’aurait pas reposé sur une base meilleure que celui qui
avait fait de Saül un roi. Le royaume du Seigneur aurait été le
fruit de l’excitation du peuple, comme celui de Saül était le fruit
des sentiments d’un cœur révolté. Il n’en pouvait être ainsi.
D’ailleurs, avant que le Seigneur pût s’asseoir sur le mont de
Sion, il fallait qu’il gravît la montagne solitaire. Avant que le
peuple pût entrer dans le royaume, il avait à passer par la mer
orageuse. Ces choses sont ici placées devant nous comme dans
un miroir. Le Seigneur s’en est allé sur la montagne, pour un
temps, et les siens luttent contre les vents et les ots ; mais quand
le moment est venu, il descend des lieux élevés, calme la
tempête, et conduit les siens au port qu’ils désirent. Il en sera
ainsi bientôt. Du haut du ciel où le Seigneur est maintenant, il
descendra en puissance pour délivrer les siens qui sou rent.
Alors ils verront ses merveilles dans les lieux profonds, ils
célébreront sa bonté et les merveilles qu’il fait envers les ls des
hommes (Psaume 107).
Le Seigneur ne peut donc que se retirer devant le ot de cette
faveur populaire. Étranger et céleste, il ne pouvait ressentir dans
son âme qu’une séparation complète d’avec ces choses. Il
s’éloigne, mais pour reprendre le lendemain un travail di érent,
et dévoiler le secret de la véritable pâque et de la manne du
désert que les Juifs ne connaissaient pas. Ils avaient à apprendre
quelle serait la vertu de la croix, véritable pâque, qui délivre de
l’Égypte, de la puissance de la chair, de la condamnation de la
loi ; qui rend le pécheur capable de dire : « Je suis cruci é avec
Christ ; et je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi ». Le salaire
du péché, c’est la mort ; et dans la croix, le péché a reçu son
salaire. La mort a exercé son empire, et la loi peut retourner au
trône de Dieu, honorée de la sanction que lui donne la mort du
Juste. Elle a accompli sa mission : Christ est mort et il est mort
pour nous. C’est la vraie pâque, la puissance de la rédemption,
par la grâce de laquelle nous quittons l’Égypte, le pays de
l’esclavage, et nous entrons avec le Fils de Dieu dans le désert,
pour y être nourris de la manne, et vivre de toute parole qui sort
de la bouche de Dieu.
Et bien que, dans un certain sens, ces choses fussent distinctes
l’une de l’autre, le Seigneur semble réunir dans son discours le
mystère de la pâque et celui de la manne. C’est au temps de la
Pâque qu’il leur parle ainsi de la manne : toutes deux
appartenaient au même Israël. Le sang pascal couvrait les
linteaux des portes, pour la rédemption, pendant que dans
l’intérieur de la maison, l’Israélite mangeait l’agneau, se
trouvant ainsi en communion vivante avec ce qui garantissait sa
sécurité. C’était pour lui le commencement d’une vie dans la
puissance de laquelle il marchait vers le désert, pour y être
nourri de la manne.
Mais Israël, nous le voyons, n’en a pas encore ni avec l’Égypte,
pour recevoir la pâture de Dieu dans le désert. Les Juifs
montrent qu’ils sont étrangers à la vie spirituelle et que, jusqu’à
ce moment, ils n’ont jamais réellement célébré la pâque, ni
mangé la manne. « Ils murmuraient contre Jésus ». Leurs
pensées étaient trop occupées de Moïse : « Il leur a donné à
manger du pain venant du ciel », disent-ils. Avant de pouvoir
manger de la manne, ils devaient entrer dans les voies de
l’amour, connaître le Père, et ne plus se réclamer de Moïse. Car
c’est l’amour qui nous attire à la croix, et Moïse n’avait jamais
donné ce pain-là. La loi ne dresse pas la table du festin ; c’est
l’amour, et nous savons ce qu’est l’amour quand nous sommes
assis à sa table. Voilà pourquoi il y a si peu de convives. L’homme
a des pensées dures au sujet de Dieu, et des pensées orgueilleuses
au sujet de lui-même ; et pour célébrer la fête, il faut penser à
Dieu avec bonheur et à nous-mêmes avec humilité, nous
renonçant nous-mêmes. C’est la communion avec le Père et avec
le Fils, sur le fondement du salut — la communion avec Dieu en
amour — qui est la vie.
Mais Israël ne connaissait pas cette communion. Les Juifs se
retirent. Comme leurs pères, ils retournent de leurs cœurs en
Égypte. Un résidu seulement se nourrit des paroles de la vie
éternelle — un résidu qui reste au désert avec Christ, qui ne
trouve rien hors de lui, et qui déclare son attachement à Christ
en disant : « Auprès de qui nous en irions-nous ? »
Et ce résidu d’où provenait-il ? Il était « selon l’élection de la
grâce », comme le Seigneur nous l’apprend ensuite, en nous
montrant l’action du Père dans le mystère de la vie éternelle,
c’est-à-dire que c’est lui qui donne au Fils ceux qu’il destine à la
vie, lui qui les attire vers le Fils ; ainsi l’attrait du Père et ses
enseignements sont les canaux secrets par lesquels la vie
parvient jusqu’à nous. « Seigneur, auprès de qui nous en irions-
nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle ; et nous, nous croyons
et nous savons que toi, tu es le Saint de Dieu ». Telles sont la foi et
la parole de ce résidu élu. Sorti de l’Égypte, il vit par la foi au Fils
de Dieu. Mais au fond, c’est la foi au Fils de Dieu cruci é ; car
notre vie est dans sa mort, et par la foi qui se nourrit de cette
mort. Il n’y a que Christ cruci é qui nous donne la vie. Nous
vivons, non de ses vertus, de ses enseignements, de son exemple ;
nous vivons de sa mort (de sa chair et de son sang). La mort de
Christ seule a accompli ce que rien d’autre n’aurait accompli.
Notre Seigneur est mort ; il a remis son esprit, il a donné sa vie —
une vie que personne n’avait le droit de lui ôter. Mais aussitôt
cela accompli, des résultats immenses se manifestent. À la mort
de Christ, le voile du temple se déchira, les rochers se fendirent,
les sépulcres s’ouvrirent. Le ciel, la terre, le hadès, subirent
l’e et d’une puissance qu’ils n’avaient pas connue auparavant. Ni
la vie de Jésus, ni ses bienfaits envers l’homme, ni sa soumission
à Dieu, ni le parfum de son humanité sans tache, ni la sainteté de
cette « chose » née de la vierge, de tout cela rien, si ce n’est le don
de sa vie — sa mort — n’aurait déchiré le voile et ouvert les
sépulcres. Dieu serait demeuré à distance, l’enfer n’aurait pas été
conquis, et celui qui a le pouvoir de la mort serait encore en
possession de son empire. Le sang du Fils bien-aimé a fait ce que
rien d’autre n’a fait et ne pouvait faire. Et maintenant, le
Seigneur étant manifesté dans sa victoire sur la mort et
annoncé, il s’ensuit qu’on peut dire : « Celui qui a le Fils a la vie ».
Ceci me conduit à dire quelques mots sur un sujet qui se rattache
à la vie dont ce chapitre nous entretient. Je veux parler de
manger le sang. Le Seigneur ici nous commande de manger le
sang et même son propre sang ; et sous la loi, manger le sang
était défendu. Sous la loi, toutes les bêtes qu’on sacri ait
devaient être amenées à la porte du tabernacle, et leur sang était
o ert sur l’autel ; il ne devait jamais être mangé (Lévitique 17). On
reconnaissait de cette manière que la vie retournait à Dieu et
n’était pas au pouvoir de l’homme. Sous la loi, manger le sang
aurait été chez l’homme une tentative de retrouver la vie par sa
propre force, de reprendre ce qu’il avait perdu. En Christ, les
choses sont changées : « Si vous ne mangez la chair du Fils de
l’homme et ne buvez son sang, vous n’avez pas la vie en vous-
mêmes ». La vie appartient à Dieu, et Dieu l’a donnée pour faire
la propitiation. Le sang du Nouveau Testament a été répandu
pour la rémission des péchés ; et la vie, par le sang, est donnée
aux pécheurs dans le Fils de Dieu. En lui était la vie. Il est venu de
Dieu, nous apportant la vie. « Celui qui a le Fils, a la vie ». Et Dieu
nous commande, nous supplie même, de recevoir de lui la vie.
Dieu a rendu parfaites notre tranquillité et notre assurance
devant lui, en nous montrant que c’est de la désobéissance de ne
pas recevoir de lui la vie comme un don ; tout comme ce ne serait
que de l’orgueil et de l’indépendance de cœur, de la chercher par
nos propres œuvres. Nous sommes désobéissants si nous ne
sommes pas sauvés ! La mort est l’ennemi de Dieu aussi bien que
le nôtre ; et si nous ne recevons pas la vie du Fils, nous nous
joignons à l’ennemi de Dieu. « Vous ne voulez pas venir à moi
pour avoir la vie », dit le Fils de Dieu a igé. Et lorsque, dans ce
chapitre, quelques-uns lui demandent : « Que ferons-nous pour
faire les œuvres de Dieu ? », il a cette seule réponse : « C’est ici
l’œuvre de Dieu, que vous croyiez en Celui qu’il a envoyé ».
Croire, et recevoir la vie comme le don de Dieu par le Fils, est le
seul acte d’obéissance que Dieu demande d’un pécheur, la seule
chose qu’un pécheur, avant d’être réconcilié avec Dieu, puisse
faire pour lui plaire.
Révélation merveilleuse et précieuse de la grâce !
Le commandement qui défendait de manger le sang était comme
l’épée amboyante des chérubins à l’entrée d’Éden. L’un et l’autre
disaient au pécheur qu’aucun e ort de sa part ne pouvait lui
rendre la vie qu’il avait perdue. Et ici la soumission d’Adam s’est
montrée avec beaucoup de charme. Il ne chercha pas à détourner
l’épée, comme s’il pouvait par lui-même recouvrer l’arbre de vie.
Mais il lui restait une ressource, il pouvait s’attacher à la
promesse concernant la semence de la femme, et on peut penser
qu’il le t, puisqu’il appela sa femme : « La mère de tous les
vivants ».
Chapitre 7
De nouveau une scène nouvelle s’ouvre. Ce sont les jours de la
fête des Tabernacles, comme la scène précédente se passait aux
jours de la Pâque.
C’était le temps le plus joyeux de l’année juive ; celui de la grande
fête annuellement célébrée à Jérusalem, en commémoration du
séjour du peuple dans le désert et de son repos dans la terre de
Canaan. C’était aussi le type de la gloire et de la joie à venir du
Messie, comme roi d’Israël. — Les frères du Seigneur l’engagent
à pro ter de ce moment et à aller à Jérusalem, pour manifester
sa puissance et se faire un nom dans le monde. Ils ne le
comprenaient pas. Ils étaient du monde. Ils s’y trouvaient chez
eux, et monter à la fête pour la célébrer avec le monde, pour eux,
cela allait de soi. Le Fils de Dieu était étranger ici-bas. Lui n’était
pas du monde. Il était pour Dieu contre le monde. Celui de qui
cette fête rendait témoignage ne pouvait pas y monter et prendre
la place qui lui appartient, car le monde était là, et le chef du
monde avait usurpé cette place et gâté toute la scène.
Cet état de choses montrait jusqu’où Israël était tombé. Qu’était-
ce la fête dont ils se vantaient, quand Celui qu’elle devait honorer
et qui par sa présence en ferait la joie, devait y demeurer
étranger ?
L’or était devenu obscur. Les chemins de Sion restaient déserts ;
personne, dans le sens véritable, ne venait aux fêtes solennelles,
et en esprit le prophète pleurait encore. Le Seigneur monte à
Jérusalem, il est vrai, mais non dans sa gloire. Il n’y va pas
comme ses frères désiraient qu’il y allât. Il se rend à Jérusalem
dans l’obéissance, pour prendre la place des humbles et non celle
des grands de la terre. C’est dans ce caractère que nous le
trouvons dans la ville en fête ; il va au temple et enseigne ; et
comme ceci attirait l’attention, il se cache en disant : « Ma
doctrine n’est pas mienne, mais de celui qui m’a envoyé ». Il se
cache, pour que le Père qui l’avait envoyé, fût en évidence, et pas
lui. Dépouillé de lui-même, ayant pris la forme d’esclave, il est
content de n’être rien.
Cependant ceux qui célébraient la fête montrent à l’endroit
même de la fête, combien ils ont fait de chemin dans
l’éloignement de Dieu. Ils disent : « Comment celui-ci connaît-il
les lettres, vu qu’il ne les a point apprises ? ». Dans leur orgueil, ils
n’admettaient aucune source de connaissance ou de sagesse au-
dessus de l’homme. C’était la créature qu’ils voulaient honorer,
tandis que la fête célébrait Jéhovah, et avait été instituée pour
rendre honneur à Celui qui, présent en ce jour, devait, pour la
justice, cacher sa gloire et rester étranger à tout ce qui se passait.
Israël et la fête, Israël et le Fils de Dieu n’allaient plus ensemble.
Ils ne se convenaient plus ; de sorte que, dans ce chapitre, soit
que nous écoutions les Juifs, ou les hommes de Jérusalem, ou les
pharisiens, de tous nous apprenons qu’ils rejettent Jésus ; et lui-
même, à la n, en vient à leur dire : « Là où moi je serai, vous,
vous ne pouvez venir ».
Ainsi Jésus refuse de sanctionner la fête. Il déclare aux Juifs
qu’ils n’avaient plus aucun droit au repos et à la gloire dont elle
avait été pour eux le gage ; qu’en réalité ils n’étaient pas dans la
terre de Canaan, et n’avaient jamais puisé aux fontaines du salut ;
que leur pays, au lieu de recevoir les eaux du euve de Dieu,
n’était qu’une parcelle aride et désolée de la terre maudite ; qu’ils
avaient abandonné la source des eaux vives, et que leurs propres
citernes étaient crevassées. En conséquence, le dernier jour de la
fête, Jésus fait couler les eaux vives dans de nouveaux vaisseaux,
et il tarit les sources qui sont à Jérusalem. Le pays deviendra
encore plus désert, par suite de la méchanceté de ceux qui y
habitent. Et Jésus ouvre ailleurs un cours au euve de Dieu. « Et
en la dernière journée, la grande journée de la fête, Jésus se tint
là et cria, disant : Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il
boive. Celui qui croit en moi, selon ce qu’a dit l’Écriture, des
euves d’eau vive couleront de son ventre ».
En rapport avec ceci, je désire rechercher les traces du euve de
Dieu à travers l’Écriture. Nous verrons ce euve poursuivre son
cours par des canaux di érents, selon les diverses dispensations.
Dans le Paradis, le euve sortit d’Éden pour arroser le jardin, et
ensuite, divisé en quatre bras, il parcourut la terre. La
dispensation d’alors était celle d’une bénédiction terrestre :
l’homme ne connaissait aucune source de bonheur ou de joie en
dehors de la création. — Dans le désert, le Rocher frappé était la
source du euve, et chacun des sentiers du camp en était le
canal. Il suivait le peuple ; car dans ce temps-là, les Israélites
étaient seuls les rachetés de l’Éternel, les seuls sur qui son regard
s’arrêtait dans le monde. — Plus tard, en Canaan, les eaux de
Siloé coulaient doucement. L’Éternel arrosait le pays de ses
propres vaisseaux, et lui donnait les pluies du ciel ; et pour le
cœur du peuple, chaque fête et chaque sacri ce étaient une
fontaine de l’eau du euve. Le service annuel dans le sanctuaire
en était le canal permanent. Israël était le peuple de l’Éternel et
leur pays était sa demeure.
Mais le temps était venu où Canaan serait changée en un lieu
aride, et un autre cours s’ouvrirait devant le euve de Dieu.
Comme le Seigneur l’enseigne ici, les eaux allaient s’élever et
procéderaient du Fils de l’homme glori é dans le ciel, et ceux qui
croyaient en lui seraient les canaux du euve sur la terre. Ce
serait une dispensation de bénédictions spirituelles dans les
lieux célestes. Pour le moment, la terre ne devait plus être
arrosée, mais l’Église de Dieu seule. — Après cependant, et
bientôt, lors du royaume, quand l’âge actuel aura comme les
autres accompli son cours, et que des dispensations nouvelles
seront introduites, le même euve trouvera d’autres canaux et
d’autres fontaines. Il sortira du trône de Dieu et de l’Agneau et
coulera dans la rue d’or de la cité, pour réjouir les multitudes
devant le trône (Apocalypse 22). Il surgira aussi de dessous les
fondations du temple de la Sion terrestre, pour arroser
Jérusalem et la terre tout entière (Ézéchiel 47). Alors sera le
temps de la double bénédiction, de la gloire céleste et de la gloire
terrestre. Toutes choses auront part à la grâce et à la puissance
de Dieu ; toutes seront visitées par les « ruisseaux de Dieu qui
sont pleins d’eau ». Alors la fête des Tabernacles sera célébrée à
Jérusalem dans sa réalité ; et les nations qui ne monteront pas à
Jérusalem pour la célébrer, perdront leur part à la visitation en
grâce du euve fertilisant.
J’examinerai de plus le rapport qu’il y a entre notre soif et
l’e usion de ces eaux vives. L’enfant de Dieu est-il altéré, il va à
Jésus, et il revient ayant en lui le euve de Dieu, l’eau vive,
l’action de l’Esprit, pour son propre rafraîchissement et celui de
ceux qui sont las. À la soif qu’il éprouvait succède la présence
abondante du Saint Esprit, qui fait de lui un canal du euve de la
vie — du euve dont la source est en haut avec le Chef de l’Église ;
et les eaux descendent de lui vers les siens. Ah ! que n’éprouvons-
nous davantage cette soif de Dieu, comme le cerf brame après les
eaux courantes ! Que ne soupirons-nous plus ardemment après
les parvis de l’Éternel ! Alors l’Esprit remplirait nos âmes, et il y
aurait de la consolation et du rafraîchissement pour les saints
dans le service et la communion mutuelle. Car c’est en cela que
consiste la puissance du ministère. Le ministère n’est que
l’e usion de cette eau vive, l’expression de la présence abondante
et secrète de l’Esprit en nous. Le Chef a reçu pour nous les dons,
et de lui tout le corps, alimenté et bien uni ensemble par des
jointures et des liens, croît de l’accroissement de Dieu. Voilà
notre fête des Tabernacles, en attendant que nous la célébrions
plus parfaite autour du trône. Nous jouissons de la fête dans sa
forme actuelle, en marchant ensemble dans la liberté et la joie de
l’Esprit Saint.
Cette fête, cette « joie dans le Saint Esprit », est quelque chose de
plus que la pâque d’Égypte ou la manne du désert. Ces dernières
parlaient de rédemption et de vie, tandis que la fête des
Tabernacles est la joie et l’avant-goût de la gloire future. Elles
étaient la chair rompue et le sang versé du Fils de l’homme ici-
bas, tandis que notre fête célèbre la gloire du Fils de l’homme
présent dans le ciel. Elle ramène le peuple vers Canaan, bien que
destinée à être la consolation dans le désert, comme la fête des
Tabernacles était célébrée en Canaan, le pays du repos et de la
gloire, après la traversée du désert.
Israël cependant, comme nous l’avons vu ne comprenait rien à
ces choses. Au chapitre 5, le Seigneur était venu à eux, comme
s’il les rencontrait en Égypte ; il était venu en grâce et en
puissance pour sauver. Semblable à Moïse qui jetait sa verge
devant la face d’Israël comme preuve de sa mission, Jésus avait
guéri l’homme in rme qui sou rait depuis trente-huit ans. Mais
cela n’aboutit qu’à mettre au jour leur vouloir de rester en
Égypte ; ils refusent de croire Moïse en refusant de croire Celui
de qui Moïse avait écrit ; et quelle délivrance y avait-il pour
Israël, si Moïse était rejeté ? — Au chapitre 6, Jésus venait à eux
dans le désert, avec la manne ; et là encore, ils montrent qu’ils ne
sont pas le camp de Dieu qui était nourri du pain de Dieu. —
Dans le chapitre qui nous occupe, le Seigneur vient à eux en
Canaan, et là aussi tout fait voir que Canaan était toujours le pays
des incirconcis, la terre aride où ne coulait pas le euve de Dieu.
Aussi dès ce moment, Jésus se tient-il en dehors de la ville en
fête, et monte-t-il en Esprit dans le ciel, comme Chef de l’Église,
pour abreuver de là ceux qui ont soif. « Si quelqu’un a soif », dit-
il, « qu’il vienne à moi, et qu’il boive ». Et tandis que les Juifs
raisonnent entre eux, puis s’en vont chacun dans sa maison,
Jésus, dans la conscience qu’Israël lui est certainement aliéné, et
n’ayant par conséquent point de chez soi sur la terre, s’en va à la
montagne des Oliviers.
Chapitre 8
Voilà où en était Israël. Ils ne savaient pas qu’ils étaient toujours
esclaves ; et ils avaient besoin de la main du Seigneur pour les
délivrer et les nourrir à nouveau. Ils ne savaient pas que la
véritable Canaan, le pays d’Emmanuel, leur restait à atteindre.
Ils rejetaient la grâce du Fils de Dieu et se vantaient de la loi, et
dans la con ance qu’elle était à eux et qu’ils pouvaient en faire
usage pour embarrasser le Seigneur, ils lui amènent la femme
adultère.
Ils avaient pu remarquer la grâce avec laquelle Jésus agissait
envers les pécheurs ; toutes ses voies le leur disaient. Ils
pensèrent s’en prévaloir pour faire de Jésus un ennemi de Moïse
et de la loi. Mais le Seigneur remporte un saint et glorieux
triomphe. La grâce peut chanter victoire sur le péché, comme le
pécheur sur ceux qui l’accusent. Le Seigneur ne combat pas la
loi. Il ne le pouvait pas d’ailleurs, car elle est sainte, et lui n’était
pas venu anéantir la loi, mais l’accomplir. De l’autre côté, il
n’acquitte pas la coupable ; il ne le pouvait pas non plus ; car il
était venu dans le monde sachant la culpabilité du pécheur, et
c’était cela même qui L’avait conduit au milieu de nous. Aussi ne
met-il en avant aucune de ces questions. La pécheresse est
convaincue et la loi la condamne justement. Seulement, qui est-
ce qui appliquera la loi ? Qui jettera la pierre ? Cette question,
Jésus seul peut la soulever, et il la soulève en e et. Que Satan
accuse une pécheresse coupable, sur qui la loi prononce la peine
de mort, le droit de la loi est évident ; mais l’exécuteur, qui sera-t-
il ? Qui peut manier l’épée ardente de la loi ? Personne que le
Seigneur lui-même. Lui seul peut revendiquer les droits de la
justice de Dieu sur le pécheur ; lui seul a les mains assez pures
pour lever la pierre et la jeter, et il se refuse à le faire. Il se baisse
et écrit de son doigt sur la terre, comme s’il n’entendait pas. Il ne
présidait pas une cour qui connaissait pareilles causes. Il n’était
pas venu pour juger.
Cependant ils continuent à l’interroger, et alors le Seigneur
répond, de fait, que s’ils veulent Sinaï, ils l’auront. Si, comme
Israël autrefois, ils se réclament de la loi et des conditions
prononcées du haut de la montagne brûlante, eh bien ! ils auront
la loi, et la voix de cette montagne résonnera encore une fois à
leurs oreilles. En conséquence, Jésus donne issue à quelques jets
de la chaleur native de ce lieu, et bientôt ils se sentent atteints
aussi bien que l’était la femme coupable, et le terrain sur lequel
ils se trouvent devient trop ardent sous leurs pieds.
Ceci dépassait leurs calculs. Ils n’avaient pas pensé que les
tonnerres de la montagne les feraient frissonner, que ses
e rayantes ténèbres les envelopperaient eux aussi, en
compagnie de la pécheresse déshonorée que leurs propres mains
avaient traînée là. Mais ils avaient voulu la montagne de feu ; ils
ont ce qu’ils avaient choisi.
Or Jésus, en donnant à la loi ce caractère, et faisant qu’elle frappe
aussi bien les juges que la coupable, se manifestait comme le
Seigneur de Sinaï. Ainsi que je l’ai dit, il fait jaillir un peu du feu
brûlant de la montagne. Lui, le Seigneur, il commande à ses
tonnerres, il dirige ses foudres, et répand son obscurité terrible.
Il ordonne aux armées du Sinaï de sainteté (Deutéronome 33.2)
de s’appliquer à leur œuvre, et aussitôt, comme jadis, la position
est trouvée intolérable. Que Dieu ne nous parle pas, avait dit
Israël ; et les pharisiens maintenant, étant repris par leur
conscience, « sortirent un à un ». Ils ne pouvaient pas mieux se
maintenir devant cette présence qu’eux-mêmes avaient appelée,
que jadis le peuple d’Israël devant la montagne ardente.
Tout ceci est grand de caractère. Le Seigneur est hautement
glori é. Les Juifs espéraient citer Jésus comme l’adversaire de
Moïse, et Jésus se manifeste comme son Seigneur, le maître de
ces tonnerres et de ces éclairs, qui avaient épouvanté Moïse lui-
même.
Mais poursuivons. Nous voyons à la fois la gloire du Seigneur et
notre bénédiction. Si le Seigneur est glori é en dirigeant la
puissance redoutable de la loi, nous voyons qu’il agit en notre
faveur. Et il le donne à comprendre à la pauvre pécheresse.
Pendant que les pharisiens l’accusaient, il reste sourd à leurs
paroles, et quand ils le pressent, elle voit les foudres détournées
sur la tête même de ses accusateurs. Ils sont forcés de s’éloigner,
et de la laisser seule avec Celui qui venait de se faire connaître
comme le Dieu de Sinaï et comme son Rédempteur.
Pouvait-elle désirer davantage ? Voudrait-elle quitter la place où
elle se trouvait ? Impossible. Elle pouvait y demeurer aussi bien
que le Seigneur de la montagne lui-même. Sinaï n’avait pas de
terreurs pour elle plus que pour lui. Mais voulait-elle cacher sa
honte et s’en aller, c’était le moment, car ceux qui l’avaient
amenée de force étaient disparus. Le Seigneur connaît son péché
dans toute son étendue, et elle n’a pas à penser qu’en restant là
elle sera déclarée innocente. Ce serait le comble de la folie ; il ne
lui resterait qu’à se retirer sur les traces de ses accusateurs. Mais
non. Les paroles et les actes de Jésus lui ont fait comprendre la
grâce qui délivre, et elle n’a que faire de s’en aller. Les sentiments
naturels l’auraient conduite à s’éloigner ; mais la foi qui a saisi la
rédemption, s’élève au-dessus de la nature ou du jugement de
l’homme, et la pécheresse reste là où elle se trouve. Elle ne craint
pas la montagne brûlante. Voici le « son doux et subtil » qui avait
répondu à Moïse et plus tard à Élie, qui lui répond aussi à elle :
« Je ne te condamne pas ». L’ombre de la mort s’était transformée
en lumière de vie. Il n’était pas nécessaire qu’elle s’en allât. Peut-
elle quitter la présence de Jésus, qui s’était montré si
glorieusement à la fois le Dieu de Sinaï et son Libérateur ? Elle
savait qu’elle était une pécheresse, et celui devant lequel elle se
tenait le savait aussi, et il avait réduit au silence ses accusateurs.
La lumière de la vie rayonnait autour d’elle. En peu d’instants sa
conscience avait parcouru un long chemin d’expérience ; et de la
région des ténèbres et de la mort, elle avait passé, conduite par le
Seigneur de la vie, au royaume de la liberté, de la sécurité et de la
joie.
C’est le triomphe de la grâce ; c’est le bonheur du pécheur
pardonné. C’est le chant de victoire sur les rives de la mer Rouge,
quand l’ennemi vaincu gît inanimé sur ses bords. Elle avait
appelé Jésus : « Seigneur », et Jésus lui avait dit : « Moi non plus, je
ne te condamne pas. Va, dorénavant ne pèche plus ».
La délivrance était entière, et la même délivrance attend tout
pécheur qui va à Jésus et qui, à l’exemple de la pécheresse, reste
seul avec lui. Comme pécheurs (je l’ai déjà fait remarquer), nous
n’avons a aire qu’à Dieu. Il peut nous arriver d’o enser nos
semblables, de leur faire quelque tort ; et eux de se plaindre et de
nous attaquer ; toutefois, comme pécheurs, c’est à Dieu seul que
nous avons a aire. Savoir cela est d’un grand secours. David
l’apprit et s’en trouva bien. Il avait causé un grand tort à son
semblable ; il lui avait enlevé l’unique petite brebis qu’il
possédait. Mais dans cet acte il avait aussi péché contre Dieu ; il le
reconnaît et dit : « J’ai péché contre l’Éternel », et ainsi, c’est avec
Dieu qu’il se rencontre. Urie aurait pu réclamer contre l’outrage
reçu, mais il n’avait rien à faire avec David pécheur. Dieu était
saisi de la conduite de son enfant, et celui-ci, dès l’instant que
son péché le place devant Dieu seul, semblable à la femme
adultère, c’est la voix de la miséricorde qu’il entend : « Aussi
l’Éternel a fait passer ton péché : tu ne mourras pas » (2 Samuel
12.13). Le châtiment l’atteint pour le mal qu’il avait fait, mais la
culpabilité envers Dieu est pardonnée, le péché lui est remis.
C’est toujours avec succès que le pécheur vient à Jésus par la foi,
pour être seul avec lui. Le sacri cateur et le lévite ont passé leur
chemin ; qu’auraient-ils pu faire, eux ? Que savait faire la Loi
pour secourir le pécheur ? C’est la grâce — l’Étranger venu du
ciel — qui doit venir à son aide. Le pauvre pécheur blessé est
couché sur la route, et le bon Samaritain doit aller à lui. — Oui, à
mesure qu’on avance dans la vie, on aime à se rappeler comment
on l’a commencée dans la solitude avec Jésus, le Sauveur.
Tout ceci est à la gloire du Seigneur comme aussi à notre
consolation. Jésus est glori é de sa gloire la plus élevée, sa gloire
comme Sauveur des coupables. Une coupe est préparée pour les
pécheurs rachetés, laquelle contiendra un parfum qui n’a son
égal nulle part (Exode 30) ; même les coupes des anges ne
contiennent pas ce parfum. Ils louent l’Agneau, il est vrai, mais
non sur des notes aussi élevées que celles de l’Église des sauvés.
Ils attribuent à l’Agneau « puissance, et richesse, et sagesse, et
force, et honneur, et gloire, et bénédiction », mais l’Église chante
ce cantique devant le trône : « Tu es digne… car tu as été immolé
et tu as acheté pour Dieu par ton sang, de toute tribu, et langue,
et peuple, et nation ».
Cette bénédiction pour le pécheur, cette gloire pour le Sauveur,
nous les voyons dans ce chapitre. La pécheresse était mise à l’abri
de ses accusateurs, à qui le Seigneur avait imposé silence. Les
huissiers avaient été désarmés par le charme et la sainteté de ses
paroles, et les scribes, à leur tour, sont repris par la lumière qui
en rejaillit : ce sont des armes non point charnelles, mais d’une
trempe divine. La haine des Juifs avait épuisé ses ressources ; ils
avaient essayé de la force du lion et de la ruse du serpent ; puis,
quand tout est passé, le Fils de Dieu prend la place suprême qui
lui appartient, et se montre entièrement séparé et loin d’eux. Il
élève la colonne de nuée, qui était lumière aux uns et ténèbres
aux autres, dans le désert de la Canaan d’aujourd’hui, et il place
Israël, comme jadis les Égyptiens, du côté de l’obscurité. « Je suis
la lumière du monde », dit-il, « celui qui me suit ne marchera
point dans les ténèbres ».
Tel était l’état d’Israël, spirituellement appelé Égypte. Ils
n’avaient aucun lien avec Abraham, ni avec Dieu, tout en se
glori ant et de l’un et de l’autre ; car ils ne savaient discerner ni la
joie d’Abraham, ni l’Envoyé du Père ; il ne leur restait qu’à
prendre leur place loin de Dieu, dans les ténèbres de l’athéisme.
Le Seigneur les met au rang d’Ismaël, là même où Paul les met
plus tard. Israël est pareil au ls de la servante, et le sera jusqu’à
ce qu’il se tourne vers le Seigneur, jusqu’à ce qu’il connaisse la
vérité et qu’il soit rendu libre, semblable à Isaac. Les Juifs
prétendent n’avoir jamais été esclaves, et Jésus n’aurait eu qu’à se
faire montrer un denier, dont l’image et la légende auraient
établi leur mensonge. Mais, selon l’intention élevée et divine de
cet Évangile, le Seigneur traite la question avec eux autrement,
et les convainc d’un esclavage plus mortel que celui de Rome : la
servitude à la chair et au péché.
Voyez aussi leurs pensées basses et erronées au sujet du Seigneur
lui-même et de ses paroles les plus simples. Jésus avait dit :
« Abraham a tressailli de joie de ce qu’il verrait mon jour », et ils
répondent comme s’il disait avoir vu Abraham. La di érence est
immense, et ils ne s’en aperçoivent pas. Le Seigneur, par les
expressions dont il s’était servi, revendiquait pour lui-même les
plus hautes gloires. Il se faisait connaître comme étant, depuis le
commencement, le grand objet de la foi ; Celui qui dans tous les
âges avait occupé les pensées, engagé les espérances, satisfait les
besoins de tous les élus de Dieu. Ce n’était pas lui qui avait vu
Abraham, c’était Abraham qui l’avait vu, lui, et sans contredit, le
supérieur reçoit l’attention du moindre. « Tournez-vous vers
moi, et soyez sauvés, vous, tous les bouts de la terre » (Ésaïe
45.22). Voilà la place de Christ. Il a été l’objet de la foi d’Abel et de
Noé. Il a été vu d’Abraham et des patriarches, et ils se sont
réjouis en lui. Il était la substance des ombres et la n de la loi.
Devant les regards du Baptiseur, il était l’Agneau et la Lumière.
Maintenant il est l’objet de la con ance du pécheur racheté, et
pendant toute l’éternité il sera le centre et la gloire de la création
de Dieu.
Ce chapitre nous découvre donc pleinement l’état du peuple. Le
moment était sérieux pour Israël. Dans l’évangile de Matthieu, le
Seigneur mettait les Juifs à l’épreuve en se présentant comme le
Messie, et il nit en leur démontrant que comme tel, ils le
rejettent. Mais dans l’évangile de Jean, Jésus se place devant eux
sous des aspects plus élevés, comme la lumière, la vérité, comme
celui qui faisait les œuvres de Dieu, qui disait les paroles de Dieu,
comme le Fils du Père, et ainsi il les convainquait non seulement
d’incrédulité quant au Messie, mais de l’athéisme commun à
l’homme.
Dans ce caractère, Israël est vu ici dans l’état de Caïn, retiré au
pays de Nod, le séjour où l’homme se trouve par nature, loin de
Dieu. Jésus leur avait dit les paroles du Père, mais ils n’avaient
pas compris ; ils n’avaient pas cru. Comme l’Envoyé du Père, il
était venu à eux en grâce, ainsi qu’un envoyé semblable devait
venir, et ils l’avaient refusé. Il en est encore de même
aujourd’hui. L’Évangile est un message de bonté, mais l’homme
n’en veut pas. L’homme ne veut pas penser du bien de Dieu ; là est le
secret de l’incrédulité. L’Évangile est bonté (Romains 11), et
l’homme demande encore : Est-il vraiment de Dieu ? Car
l’homme a des pensées dures au sujet de Dieu, et Satan entretient
de telles pensées dans son esprit. Il fait ce qu’il peut, pour voiler
au pécheur la liberté avec laquelle il peut aller à Dieu, a n que ce
pécheur cherche ailleurs son héritage.
C’est le cas d’Israël ici. Jésus ne jugeait personne ; il disait la
parole du Père, qui leur apportait la liberté et la vie ; mais,
comme il le leur reproche, ils n’entendent pas son langage. Ils
avaient malheureusement un père de qui leurs cœurs tenaient,
celui qui est menteur et meurtrier, et ils n’avaient pas d’oreilles
pour écouter la grâce et la vérité qui venaient à eux par Jésus
Christ. Et lui, le témoin du Père, repoussé par eux, la Lumière du
monde, détestée du monde, il n’a pas de place dans le pays, ni de
chemin sur cette terre pour y poursuivre sa course. Il « s’en va »,
étranger, solitaire, mais comme la lumière du monde, répandant
partout ses rayons, a n d’éclairer ceux qui sont assis dans les
ténèbres et dans l’ombre de la mort.
Chapitres 9 et 10
Dans ce caractère, Jésus est séparé d’Israël. Le peuple est laissé
dans les ténèbres, et la colonne de Dieu se porte plus loin. Jésus,
« la lumière du monde », s’avance, et rencontre un homme
aveugle dès sa naissance ; en lui ses œuvres pouvaient être
pleinement manifestées.
L’Éternel Dieu est un grand roi et il agit en Souverain. Comme le
potier, il a pouvoir sur l’argile pour en faire ce qu’il veut. Or le
Fils ne venait pas du trône du roi, il venait du sein du Père. Il est
venu manifester le Père. L’aveugle était dans le monde,
partageant la condition de tous les hommes ; mais le Fils était
venu pour être la lumière du monde ; et comme tel, par
conséquent, il se met à son travail de grâce et de puissance ; il
ouvre les yeux de l’aveugle mendiant.
Qu’est-ce que cela importait à Jérusalem ? Les ténèbres y
régnaient et, quoique la lumière brillât, elle n’était pas comprise.
Aussi voyons-nous qu’ils « amenèrent aux pharisiens celui qui
auparavant avait été aveugle ». Il y avait à Jérusalem une haute
cour inquisitoriale, où les actes du Fils de Dieu devaient être
examinés. Au lieu de le saluer comme jadis, quand la nuée de
Dieu se levait, et de dire : « Lève-toi, Éternel ! et que tes ennemis
soient dispersés », ils préfèrent leurs ténèbres et y demeurent.
Ils commencent par questionner l’homme lui-même, mais ne
recevant pas l’appui qu’ils espèrent, ils s’adressent à des témoins
plus dociles ; ils appellent ses parents. Vaine espérance : le fait
que la lumière avait lui ne pouvait être nié. Alors ils cherchent à
faire diversion, et à conduire toute l’a aire de manière à ne pas
compromettre leur orgueil, ni révéler leur état moral, et ils
disent à l’aveugle : « Donne gloire à Dieu ; nous savons que cet
homme est un pécheur ». Cela ne va pas non plus. Le pauvre
homme maintient ce qu’il avait déjà dit. Sur quoi, ils tâchent de
lui faire peur, en le rejetant du fondement reconnu de toute
sécurité. « Toi, tu es le disciple de celui-là ; mais nous, nous
sommes disciples de Moïse ». L’homme est encore gardé, et non
seulement gardé, mais il marche de force en force. Il a, et
davantage lui est donné. Il suit la lumière qui le conduit, jusqu’à
ce qu’elle brille de manière à lui faire discerner les ténèbres où
sont les pharisiens ; et alors ceux-ci, lançant contre lui les
foudres de l’église, le jettent hors du camp.
Et quel est le lieu où ils le jettent ? Là précisément où le pécheur
abandonné, repoussé, se trouve ; — où la Samaritaine, la femme
reconnue adultère s’étaient déjà trouvées : dans la présence de
Jésus, dans la solitude du Fils de Dieu — et c’est la porte du ciel,
car le Seigneur était sorti du camp avant lui. La brebis du
troupeau avait été « menée dehors », mais pour rencontrer le
berger qui « allait devant elle ». Ils sont ensemble à cette place de
réjection et d’ignominie. Il est trouvé par celui qui lui-même
avait été blessé par les archers. Cette rencontre était une
véritable réunion. Le pauvre Israélite, dans le camp, avait trouvé
en Jésus son Médecin ; maintenant, dehors, il trouve en lui le Fils
de Dieu ; il apprend à connaître en lui Celui qui lui a ouvert les
yeux, quand il était aveugle, et qui lui parle, maintenant qu’il est
réprouvé de la synagogue. Chers amis, c’est toujours de cette
manière que, comme pécheurs et rejetés, nous rencontrons
Jésus à l’endroit souillé. Si, après nous y avoir trouvés, il nous
prend à lui, c’est dans la pleine grâce du Fils de Dieu, le Sauveur ;
et c’est ainsi que notre caractère de pécheurs nous établit dans la
plus douce et la plus précieuse intimité avec le Seigneur de la vie
et de la gloire. Comme créatures, nous connaissons la force de
son bras, sa divinité, sa sagesse, sa bonté ; mais comme pécheurs,
nous voyons quel amour il y a dans son cœur et quels sont les
trésors de sa grâce.
Remarquez le changement de ton chez le pauvre mendiant. En
présence des pharisiens, il est ferme et in exible. Il ne modi e
pas un instant l’expression de la justice et de la vérité dont il a
conscience. Il rend son visage semblable à un caillou et supporte
la dureté. Mais dès qu’il est avec le Seigneur il est tout humilité
et douceur, s’anéantissant, pour ainsi dire, à ses pieds. Quel
aimable exemple de l’opération du Saint Esprit. Devant
l’homme, la hardiesse ; mais les attendrissements de l’âme et
l’attitude de l’adoration devant Celui qui nous a aimés et nous a
rachetés.
Cependant ce lieu souillé hors du camp, où le Seigneur du ciel et
de la terre se tenait avec le pauvre pécheur, n’était pas seulement
le lieu où celui-ci avait trouvé la liberté et le bonheur, c’était
aussi un vaste champ d’observation pour le Seigneur. Portant de
là son regard sur lui-même, sur le mendiant, sur le camp
d’Israël, hors duquel il était sorti avec son élu, il résume la
morale de toutes ces choses dans la parabole du « bon Berger ».
Chapitre 10
La scène qu’avait présentée le chapitre 9 montrait que Jésus était
entré par la porte dans la bergerie, car il était venu faisant les
œuvres du Père, prouvant ainsi qu’il possédait la con ance du
Maître de la bergerie, qu’il était le Berger reconnu du troupeau.
Devenu étranger à Israël, il lui restait, comme à Moïse dans un
cas pareil, à garder les troupeaux de son Père dans d’autres
pâturages, près de la montagne de Dieu. Les pharisiens qui lui
résistaient étaient nécessairement des voleurs et des larrons ; ils
montaient par ailleurs dans la bergerie ; et le pauvre mendiant
était une des brebis du troupeau qui, ayant refusé d’écouter la
voix des étrangers, et entendu et connu la voix de Celui qui était
entré par la porte, entrait aussi par lui qui est « la porte des
brebis », et en qui elles trouvent sécurité, repos et nourriture.
Tout ceci s’est déroulé dans ce que nous avons eu sous les yeux, et
s’est exprimé dans la parabole du berger et des brebis, précieux
commentaire de la condition nouvelle du pauvre homme qu’on
avait mis hors caste. Au point de vue des Juifs (et ils auraient
voulu que le mendiant en jugeât comme eux), il venait d’être
séparé de toute sécurité, en étant séparé d’eux. Jésus fait voir
qu’au contraire c’est depuis lors seulement qu’il est en sécurité,
et que s’il était resté avec eux, il serait devenu la proie des
larrons. Maintenant il a été trouvé et recueilli par Celui qui,
pour lui donner la vie, allait laisser la sienne.
Voilà ce que nous disent et le récit et la parabole. C’est à ce
moment de notre Évangile que le Seigneur et le résidu se
trouvent en présence. On voit « les pauvres du troupeau » que
leurs propres pasteurs n’épargnent pas, et que le Berger venu du
ciel prend à lui, comme étant ce dont il a souci, a n de les garder
et de les paître (Zacharie 11).
Mais l’amour et les soins de Celui qui lui avait dit : « Pais le
troupeau de la tuerie », sont vus ici de la manière la plus
touchante. C’est peut-être le détail le plus doux de la parabole.
Nous apprenons quelle est la pensée du Père envers le troupeau ;
car le Seigneur dit : « Comme le Père me connaît et moi je connais
le Père ; et je mets ma vie pour les brebis » ; nous découvrant
ainsi, dans les profondeurs du cœur du Père, les secrets de son
amour et de sa sollicitude pour les brebis. En e et, le troupeau
appartenait au Père avant d’être con é à Christ, « Ils étaient à
toi », dit le Seigneur, « et tu me les as donnés ». Ils étaient dans la
main du Père avant d’être dans celle du Fils. Ils appartenaient au
Père par l’élection dès avant la fondation du monde, et furent à
Christ par le don du Père et le prix du sang de l’Agneau. L’activité
et les soins du Berger ne sont que l’expression de la pensée du
Maître du troupeau. Le Berger et le Maître sont un, comme le
Seigneur le dit : « Moi et le Père nous sommes un » ; un en gloire,
sans doute, mais un aussi en amour et en tendresse pour le
pauvre troupeau de pécheurs sauvés. Christ répondait à la
pensée du Père, quand il a aimé l’Église et qu’il s’est donné lui-
même pour elle ; et lui et le Père demeurent pour jamais un dans
cet amour, aussi certainement qu’ils demeurent un dans leur
gloire. C’est une vérité d’un très grand prix pour nous. Notre
communion est avec le Père et avec son Fils Jésus Christ. Dieu est
amour ; et, quand nous le savons, nous trouvons en Dieu le repos
qui n’existe nulle autre part. Le cœur fatigué et brisé du pécheur
peut se reposer dans l’amour, car « Dieu est amour, et celui qui
demeure dans l’amour, demeure en Dieu et Dieu en lui ».
Ici, par conséquent, les « pauvres du troupeau » trouvent de la
pâture et se reposent. Cependant les deux verges, Beauté et
Liens, doivent être rompues. Les houlettes du Berger, qui
auraient conduit et gardé Israël, doivent être mises en pièces. Il
n’y avait qu’un résidu qui connaissait sa voix. Et qui peut
connaître la voix du Sauveur si ce n’est le pécheur ? Ceux qui se
portaient bien n’avaient pas besoin du médecin ; et cela met n
aux relations du Seigneur avec Israël. Il refuse de les paître
davantage. « Que ce qui meurt, meure ; et que ce qui périt,
périsse ». (Zacharie 11.9).
Remarquez que la rupture des relations du Seigneur avec Israël
est tout à fait en accord avec le caractère de l’évangile de Jean.
Les Juifs cherchent à lapider Jésus, parce que, étant homme, il se
faisait Dieu. Dans les autres évangiles, on voit aussi l’âme d’Israël
dégoûtée du Seigneur (comme l’exprime Zacharie) ; mais c’est
pour des motifs di érents : c’était parce qu’il annulait leurs
traditions, qu’il touchait à leur sabbat, et recevait des pécheurs ;
tandis que, dans l’évangile de Jean, c’est l’assertion d’être le Fils
de Dieu, la revendication des honneurs divins appartenant à sa
Personne, qui deviennent la cause du débat. En réponse aux
Juifs, le Seigneur met en avant ce qu’il avait manifesté au sujet
de lui-même ; et ce n’était pas le premier exemple en Israël : la
chose s’était faite déjà avant lui. Des hommes, élevés en dignité,
avaient été appelés dieux parce qu’ils manifestaient Dieu dans
son caractère d’autorité et de jugement, et qu’ils étaient les
pouvoirs ordonnés de Dieu. Or Jésus avait manifesté le Père. Les
juges et les rois auraient pu montrer que la parole de Dieu était
venue à eux, leur con ant l’épée de Dieu. Jésus s’était fait
connaître comme l’Envoyé du Père, plein de grâce et de vérité,
travaillant parmi eux comme le Père avait travaillé jusqu’alors :
la grâce restaurant, guérissant et bénissant les pécheurs ; et il
avait montré ainsi que le Père était en lui et lui dans le Père. Mais
leurs cœurs étaient trop endurcis ; les ténèbres ne pouvaient
comprendre la lumière, et Jésus doit songer à s’échapper de leurs
mains, et à garder sur la terre une position en dehors de la nation
insoumise *.
* Voir chap. 2.13 ; 6.4 ; 11.55. Nous pouvons remarquer que
dans cet évangile, les fêtes sont appelées « fêtes des Juifs »,
comme si l’Esprit de Dieu y était étranger. C’est un trait
assez remarquable de cet évangile dans lequel, ainsi que je
l’ai fait remarquer, l’Esprit, comme en dehors des
traditions de sa nation, est occupé à tracer le chemin qu’a
suivi le Fils de Dieu, le Fils du Père, Celui qui est
personnellement au-dessus de toute connexion avec les
Juifs. Pareillement, nous voyons que la montagne d’Horeb
en Sinaï, qui dans l’Ancien Testament est appelée « la
montagne de Dieu », dans le Nouveau, par la plume de
Paul, est appelée : « le mont Sina, en Arabie », l’Esprit de
Dieu ne reconnaissant pas cette montagne plus longtemps
et se bornant à la désigner d’un nom simplement local.
Ici se termine la seconde section de l’évangile de Jean. Nous y
avons vu le Seigneur en controverse avec les Juifs, mettant de
côté toutes les choses juives les unes après les autres, et prenant
lui-même de droit la place qu’elles avaient. Au chapitre 5, il met
de côté Béthesda, dernier témoignage de l’activité du Père au
milieu de son peuple, et en prend la place comme le serviteur de
la grâce. Aux chapitres 6 et 7, il abolit les fêtes : celle de la Pâque,
qui ouvrait l’année juive par ce qui était la vie de la nation, puis
celle des Tabernacles, qui fermait l’année par ce qui était leur
gloire, prenant lui-même la place de ces ordonnances et
montrant qu’il était, lui, l’unique source de vie et de gloire. — Au
chapitre 8, après avoir montré combien la loi s’adaptait peu aux
besoins de l’homme, à cause de l’état de péché et de faiblesse de
l’homme, il prend encore la place de la loi comme « la lumière du
monde », comme Celui par qui seul, et non par la loi, les pécheurs
peuvent arriver à la vérité et à la liberté et jusqu’auprès de Dieu.
En n, au chapitre 9, dans ce caractère de lumière du monde, il
sort d’Israël. Il avait fait luire ses rayons sur ce peuple, mais ils
ne l’avaient pas compris. Il sort par conséquent, emmenant avec
lui les pauvres du troupeau ; et au chapitre 10, il se montre avec
eux hors du camp, laissant le pays d’Israël, comme le prophète
l’avait dit, un chaos sans forme et vide. La Parole de Dieu, qui y
aurait apporté la beauté et l’ordre, était repoussée, et désormais
le lieu dont Dieu avait jadis pris soin, sur lequel il avait eu
continuellement les yeux, depuis le commencement de l’année
jusqu’à la n (Deutéronome 11), et qu’il arrosait des pluies du ciel,
ce lieu est abandonné au désert et à l’ombre de la mort.
Chapitres 11 et 12
Tel était l’état d’Israël. Ayant repoussé les o res du Fils de Dieu,
ils sont abandonnés à l’incrédulité et aux ténèbres. Cependant,
ces chapitres nous montrent que si Israël retarde l’œuvre de la
miséricorde qui doit lui être faite, il ne peut la détourner pour
toujours. Le dessein de Dieu est de bénir et il bénira. En vertu de
sa propre alliance, c’est-à-dire dans la puissance de la
résurrection et de la grâce, il apportera la bénédiction à Israël.
C’était comme Celui qui ressuscite les morts que jadis il avait
traité alliance avec Abraham, et dans ce même caractère il était
apparu à Moïse, en Horeb, comme l’espérance de la nation
(Exode 3). C’était par la résurrection qu’il devait donner à Israël
le prophète promis, semblable à Moïse (Comp. Deutéronome 8 et
Actes 3) ; et tous les prophètes parlent de lui comme devant agir
selon ce caractère, envers la semence d’Abraham aux derniers
jours. L’apôtre Paul aussi dit que la résurrection de Jésus est le
gage de toutes les bénédictions promises aux Juifs (Actes 13.31).
L’Éternel rendra à Israël la vie et la gloire, dans la puissance et la
grâce de la résurrection. Dans ce moment d’extrême détresse,
quand toute leur force les aura abandonnés, il se lèvera pour
venir à leur secours. Il établira la gloire dans la terre des vivants.
La femme stérile aura une famille. L’Éternel appellera Israël
hors de ses tombeaux et fera revivre les os secs (Ézéchiel 37). Et,
qu’il accomplisse ces choses, ces deux chapitres l’a rment. Les
chapitres précédents ont montré Israël en ruines et loin de Dieu ;
ici le Seigneur, avant de disparaître de devant eux, leur donne
dans la résurrection de Lazare et ses résultats, les gages certains
de la vie et de la gloire futures.
Telle est la portée générale des chapitres 11 et 12. Ils forment ainsi
une sorte d’appendice de la section qui précède, plutôt qu’une
partie distincte de l’Évangile.
Le Seigneur avait quitté la Judée et s’était retiré au-delà du
Jourdain, lorsqu’un message lui parvint, disant qu’un homme
qu’il aimait était malade en Judée. Il demeura au lieu où il était,
jusqu’à ce que la maladie eût ni ses ravages et eût abouti à la
mort ; alors il s’apprête au départ. C’était le moment qui
convenait au Fils de Dieu, à Celui qui vivi e les morts, pour se
rendre auprès de ses amis a igés ; et dans la conscience qu’il
allait déployer sa puissance, il se met en route, en disant :
« Lazare, notre ami, s’est endormi, mais je vais pour l’éveiller ».
Arrêtons-nous ici un instant.
Les paroles qui, dans le courant de ce chapitre, sont prononcées
par les deux sœurs, semblent faire un reproche au Seigneur du
retard qu’il a mis à venir. « Seigneur, si tu eusses été ici », disent-
elles, « mon frère ne serait pas mort ». Mais en s’exprimant ainsi,
ces femmes manquaient d’intelligence. Elles n’étaient pas dans le
secret — secret divin — du Fils de Dieu. Lui était venu dans ce
monde tel qu’autrefois il vint à la maison d’Abraham, c’est-à-
dire, comme Celui qui ressuscite les morts. Il apportait avec lui
une vie triomphante, et il fallait qu’il fût connu dans la
manifestation de cette gloire. Ce pouvoir avait été exercé depuis
que le péché et la mort étaient entrés dans le monde ; mais la
nature n’est pas à la hauteur de ce grand mystère. La foi le reçoit
et le proclame, seulement la foi est l’opération de Dieu dans
l’âme. C’est ainsi que, lorsque Pierre reconnut cette vie en Jésus
et le confessa comme le Christ, le Fils du Dieu vivant, Jésus lui
dit : C’est le Père qui t’a révélé ces choses. Ici, dans ce chapitre,
personne ne les comprend. Tous, et Marthe et Marie elles-
mêmes, parlent de mort et non de vie. Mais Jésus a la vie en lui,
et il dit : « Moi, je suis la résurrection et la vie : celui qui croit en
moi, encore qu’il soit mort, vivra ; et quiconque vit, et croit en
moi, ne mourra point, à jamais ».
C’est la vie ainsi quali ée que le Fils nous communique, une vie
éternelle, incorruptible, victorieuse, et la foi la saisit, la reçoit, et
en jouit. « Celui qui a le Fils a la vie ». À Pierre, nous le savons, elle
fut révélée par le Père. Jésus déclare qu’elle existe en lui (vers.
25) ; le sépulcre vacant la reconnaît et la magni e ; le Christ
ressuscité la donne. Cette vie est, à la fois, incorruptible,
éternelle et triomphante. La mort ne peut l’atteindre, ni les
portes du hadès prévaloir contre elle.
Quelle histoire de la vie dans un monde où le péché a régné par la
mort ! Quelle gloire pour Dieu ! Quelle consolation pour nous !
C’est la vie recouvrée, mais la vie arrachée à la mort ; la vie
introduite par l’abolition du péché, au prix du sacri ce
inappréciable de l’Agneau de Dieu, de Celui « qui, par l’Esprit
éternel, s’est o ert lui-même à Dieu sans tache » (Hébreux 9.14).
Quel mystère ! Ah ! « prenez garde, frères, qu’il n’y ait en
quelqu’un de vous un méchant cœur d’incrédulité ! » (Hébreux 3
12) *.
*Qu’il me soit permis ici de considérer les pleurs de Jésus.
La conscience de posséder le pouvoir de la résurrection, et
le sentiment de remplir de consolation et de joie la maison
de Béthanie par l’exercice de ce pouvoir, n’a pas arrêté le
courant de ses a ections naturelles. « Jésus pleura ». Son
cœur était aussi sensible à la tristesse qu’à la dégradation
de la mort. Son calme durant cette remarquable scène
n’était pas de l’indi érence, mais de l’élévation de
sentiment. Son âme était dans la lumière de ces hautes
régions, où la mort n’est pas connue, qui sont bien au-delà
de la tombe de Lazare ; mais il pouvait visiter cette vallée
de pleurs et de larmes et pleurer avec ceux qui pleurent.
Mais le Seigneur avait la conscience de porter avec lui le jour
aussi bien que la vie, car « la vie est la lumière des hommes », de
sorte qu’en réponse aux craintes de ses disciples, il dit : « N’y a-t-il
pas douze heures au jour ? Si quelqu’un marche de jour, il ne
bronche pas, car il voit la lumière de ce monde » (Jean 11.9). Lui,
non seulement voyait la lumière, mais il était la lumière lui-
même ; pas seulement un ls de lumière, mais la source même de
la lumière. Les disciples, hélas ! ont l’ouïe dure. Ils ne
reconnaissent pas la voix du Fils de Dieu, et ne discernent pas le
chemin de la lumière de la vie. Ils jugent que la mort est là pour
le Seigneur plutôt que la vie pour les autres, et ils disent :
« Allons-y, nous aussi, a n que nous mourions avec lui ». Il y avait
en cela, sans doute, de l’a ection humaine, mais en même temps
une triste ignorance au sujet de la gloire du Seigneur. Les
disciples, comme plus tard les femmes auprès du sépulcre,
auraient apporté des aromates, pour honorer la sépulture du
Sauveur, tandis qu’eux et elles auraient dû savoir que Jésus n’y
était plus.
Le Fils de Dieu, qui ressuscite les morts, se rend en Judée, par un
chemin qui le conduit au tombeau de Lazare, son ami. Il se tient
là, ayant devant lui la vision du triomphe du péché dans toute
son étendue ; car « le péché a régné par la mort », et si tout
nissait là, la victoire resterait à Satan. Jésus pleure. Le Fils du
Dieu vivant pleure à la vue de la mort. Dans un autre évangile,
on lit que le Fils de David avait pleuré sur une ville qu’il avait
choisie pour y mettre son nom, mais qui le rejetait ; ici, le Fils de
Dieu, la source de la vie, pleure à la vue de la mort. Il frémit aussi
en lui-même, et Celui qui sonde les cœurs connut ce
frémissement. Jésus, assuré d’être entendu, n’a qu’à le
reconnaître avec des actions de grâces, et en prononçant la
parole qui pénètre dans la retraite de la mort : « Lazare, sors
dehors ». Aussitôt celui qui était mort se lève et sort, en
témoignage que si « le Père a la vie en lui-même, ainsi il a donné
au Fils aussi d’avoir la vie en lui-même ».
C’est ici que se termine le sentier du Fils de Dieu. Il s’était trouvé
en face de la puissance du péché et avait montré qu’il la
dominait, lui, la résurrection et la vie. Cependant celui qui avait
l’empire de la mort n’était pas détruit, car il n’y avait pas eu
encore la mort et la résurrection du Chef de notre salut. Il n’y
avait pas non plus pour les saints le gage de leur résurrection
dans des corps glorieux, car Lazare était sorti ayant les pieds et les
mains liés de bandes, et fut délié pour marcher à nouveau dans
un corps qui était chair et sang. C’était plutôt le gage pour Israël
de la puissance vivi ante du Fils de Dieu, laquelle il déploiera en
sa faveur, quand le moment de la vivi cation promise de sa
nation sera venu *.
* Je voudrais suivre les traces de Marthe et de Marie dans
cette circonstance. Marthe, dans l’ardeur bruyante de la
chair (car elle s’agitait pour beaucoup de choses), s’en va
au-devant du Seigneur, quand elle apprend qu’il
approche. Mais à peine peut-on dire qu’elle l’a rencontré.
Jésus était trop haut pour elle. Après les premières paroles
échangées, Jésus, dans la conscience de sa gloire, lui dit :
« Je suis la résurrection et la vie », et elle, rappelant sa foi,
lui répond : « Je crois que tu es le Christ, le Fils de Dieu, qui
vient dans le monde ». Puis, éprouvant de l’embarras, elle
s’éloigne. Un sentiment de vérité, je pense, lui avait sou é
dans l’âme que sa sœur, plus céleste de cœur et plus
éclairée, comprendrait mieux le Seigneur, et elle va
l’appeler secrètement. Là, je crois, est le secret des paroles
de Marthe à sa sœur. Le Seigneur n’avait réellement pas
appelé Marie ; et Marthe était, moins encore, porteur d’un
faux message. Mais elle comprenait que le cœur de Marie
entrait avec une sympathie plus grande dans les pensées
de Jésus, et sans commettre d’erreur proprement, elle
peut dire à Marie : Le Maître est venu, et il t’appelle. Et la
chose s’est trouvée vraie. Marie vient à Jésus et réellement
se rencontre avec lui. Il n’y a pas pour elle la même
distance avec Jésus qu’il y avait eu pour Marthe. En
rencontrant le Seigneur, elle se jette à ses pieds, et lui, en
ce moment, frémit en son esprit. Le Prince de la vie et l’un
de ses adorateurs étaient en présence. Marie ne se répand
pas en paroles et le Seigneur n’a pas à redresser ses
pensées. Toutefois, l’amour de Jésus appartient à l’une et à
l’autre. Quel bonheur que celui d’avoir une communion
vivante avec Jésus ! Des sentiments ardents, des vues
brillantes peuvent être le privilège de quelques-uns, mais
quoique notre mesure ne dépasse pas celle de Marthe,
néanmoins, quand la communion est vivante et vraie,
c’est pour tous la communion du ciel.
Malheureusement Israël n’avait pas d’yeux pour discerner le
signe de la miséricorde qui l’attendait, ni de cœur pour le saisir.
Bien loin d’y trouver le fondement de leur foi, la résurrection de
Lazare devient l’occasion d’une œuvre d’inimitié déclarée.
« Depuis ce jour-là, ils consultèrent ensemble pour le faire
mourir ». Les cultivateurs de la vigne s’apprêtent à se défaire de
l’héritier. Leur reniement d’Abraham, leur père, et leur
complète apostasie à l’égard de Dieu sont maintenant
manifestés. Israël avait été autrefois mis à part pour Dieu d’entre
toutes les nations, mais il délibère maintenant contre lui et
reprend sa place au milieu d’elles. Peu semblables à Abraham, ils
acceptent des dons du roi de Sodome, de préférence à la
bénédiction de la main de Melchisédec : ils choisissent la
protection de Rome, plutôt que de reconnaître la puissance de
résurrection du Fils de Dieu. « Si nous le laissons ainsi faire, tous
croiront en lui, et les Romains viendront, et ôteront et notre lieu
et notre nation ». — Et le jugement arrive sur eux : « Vous
entendrez, et vous ne comprendrez point ; vous verrez, et vous
n’apercevrez point » ; car la voix de l’Esprit s’était fait entendre
par leur Souverain Sacri cateur, et ils n’ont pas eu d’oreilles
pour la comprendre. Les œuvres du Fils de Dieu avaient été
opérées au milieu d’eux, et ils n’ont pas eu d’yeux pour les voir.
Jésus, toutefois, est Celui qui vivi era Israël, et les os secs, au
dernier jour, entendront la Parole du Seigneur et vivront.
Lazare, comme je l’ai dit, en est le gage : le résidu juif d’alors est
typi é dans la famille de Béthanie. Au sein de cette famille bien-
aimée, Jésus trouve du délassement, de la communion, et la
reconnaissance de sa gloire, comme il les trouvera chez son
résidu plus tard. Au milieu de ce cercle, il s’assied comme le
« Prince de vie », ayant à côté de lui le témoin de sa puissance
vivi ante ; et comme le « Roi de gloire », recevant à ses pieds
l’hommage de son peuple, porté de franche volonté. C’est dans
ces deux saintes dignités qu’il est reçu par cette famille dèle.
« Pendant que le roi est à table », semble dire Marie, « mon nard
exhale son odeur » (Cantique 1.12). Et Jésus est assis auprès de
ceux qu’il aime. Dans le pays apostat, une seule famille reconnaît
en lui le « Prince de vie » et le « Roi de gloire ». Cependant
Jérusalem et les étrangers qui y sont, ne devaient pas tarder à le
voir dans les insignes de cette gloire ; comme aussi, pour nos
temps, et avant qu’il s’écoule un grand nombre de jours, il sera
reconnu dans cette gloire, par le résidu de la n, la nation elle-
même, et la terre entière.
En conséquence, « le lendemain », une grande foule, émue par la
nouvelle qu’il avait ressuscité Lazare, vient à sa rencontre sur le
chemin de Jérusalem, et le conduit dans la ville royale, en lui
rendant les hommages dus au Fils de David, le roi d’Israël. C’était
le moment de la Pâque ; mais le peuple se réjouit comme à la fête
des Tabernacles, et prend des branches de palmier pour fêter son
roi. Les nations aussi semblent être montées à la fête, car
quelques Grecs viennent à Philippe et le prient, disant :
« Seigneur, nous désirons voir Jésus ». La gloire brille un instant
dans le pays des vivants. Lazare avait été ressuscité des morts, la
ville accueillait son roi, et les nations venaient pour adorer.
Jésus a vu, pour un moment, et comme passant devant lui, les
éléments du royaume dans lequel il sera glori é. Il a vu la joie de
Jérusalem et le rassemblement des peuples ; mais son âme est
occupée de la pensée que la mort attend toutes choses ici-bas,
quel que soit leur charme ou l’espérance qui s’y rattache ; et que
la gloire et le bonheur ne sont possibles que dans d’autres
régions.
De nouveau, au milieu de cette scène et de ces fêtes, Jésus est
assis solitaire. Tandis que tous, autour de lui, sont remplis de
l’attente d’un royaume avec ses honneurs et ses réjouissances,
son esprit songe à la mort. « En vérité, en vérité, je vous dis »,
telle est sa parole, « à moins que le grain de blé, tombant en terre,
ne meure, il demeure seul ». La résurrection était tout pour lui ;
elle était sa consolation dans les a ictions de la vie, comme nous
l’a montré le chapitre 11 ; elle est son objet devant les perspectives
d’un monde qui lui est promis, comme nous le voyons ici (chap.
12). Elle avait communiqué une douce sérénité à son âme,
lorsque de sombres nuages s’étaient amassés sur Béthanie ; et
maintenant que la splendeur d’un jour de fête répandait son
éclat sur le chemin de Jérusalem, elle calme et tient son cœur.
C’est ainsi que la pensée de la résurrection gouvernait son âme
dans les peines et les joies qu’il éprouvait. La résurrection était
tout pour lui. Elle faisait de lui ici-bas le parfait exemple de ce
principe, d’une valeur si actuelle : « Que ceux qui pleurent soient
comme ne pleurant pas ; et ceux qui se réjouissent, comme ne se
réjouissant pas » (1 Corinthiens 7.30).
Combien nous savons peu nous élever ainsi au-dessus des
situations et des circonstances de la vie !
Pour Jésus, ce moment était en réalité la Pâque et non la fête des
Tabernacles ; et pendant quelques instants, son âme anticipe
l’angoisse du sacri ce. Mais le Père lui rend témoignage de
nouveau. Il l’avait glori é au tombeau de Lazare comme le Fils de
Dieu, qui ressuscite les morts ; et maintenant, par la voix du ciel,
il le glori e comme le Fils de l’homme, qui jugera le monde et le
chef de ce monde.
Ici nit le chemin du Fils de l’homme, comme le chemin du Fils de
Dieu avait pris n au tombeau de Lazare. Le Fils de Dieu et le Fils
de l’homme avaient été pleinement manifestés devant Israël
incrédule. Jésus avait été glori é parmi eux comme le Prince de
vie, Celui à qui appartiennent toute autorité et tout pouvoir. Les
choses rapportées dans ces deux chapitres, accomplissaient la
parole qu’il leur avait dite au commencement ; elles étaient ces
« œuvres plus grandes » devant lesquelles ils seraient dans
l’admiration » (5.20). Ils venaient d’être témoins de sa puissance
vivi ante comme le Fils de Dieu, et la voix venue du ciel
con rmait sa gloire judiciaire comme le Fils de l’homme. Ils
devaient donc l’honorer comme ils honoraient le Père. Mais loin
de là : ils allaient, au contraire, le mettre à mort ; ils renieraient
le Prince de vie et le Roi de gloire, en qui se concentraient toutes
leurs espérances pour la vie et pour le royaume. Jésus les avait
mis à l’épreuve par ces « œuvres plus grandes » à eux promises ;
mais il n’y avait pas eu d’écho en Israël. La moisson était
terminée, l’été avait passé, et ils n’étaient pas sauvés. La
lamentation du prophète devenait une solennelle actualité : « Qui
a cru à ce que nous avons fait entendre ? » Non pas que ses œuvres
n’eussent pas manifesté Jésus comme l’espérance d’Israël, car
nous voyons même que plusieurs des chefs les avaient comprises
et acceptées dans leur conscience ; mais, ainsi que le Seigneur
avait dit : « Ils ont aimé la gloire des hommes plutôt que la gloire
de Dieu » (Jean 12.43). Désormais il ne restait à Israël que le
jugement, mais la gloire dans le ciel à ce Jésus rejeté de la terre.
L’évangéliste lui-même nous le dit, en traçant la morale de toute
la scène : « Il a aveuglé leurs yeux, et il a endurci leur cœur, a n
qu’ils ne voient pas des yeux et qu’ils n’entendent pas du cœur, et
qu’ils ne soient convertis et que je ne les guérisse. Ésaïe dit ces
choses parce qu’il vit sa gloire et qu’il parla de lui ». Pour Israël le
jugement, pour Jésus, la gloire, la gloire céleste, la gloire au-
dedans du voile.
L’évangile de Jean replace ainsi le Fils de Dieu dans le ciel. C’est
là que son chemin se termine ; c’est là qu’il avait commencé.
L’évangile de Matthieu introduit Jésus comme le Fils de David,
né à Bethléhem, et s’arrête, quant à son ministère, sur la
montagne des Oliviers (Matthieu 1 et 24) ; l’évangile de Jean au
contraire, s’ouvre en montrant Jésus venant du sein du Père, et
se ferme, également quant à son ministère, par sa rentrée dans le
ciel. Et Jésus est encore dans les lieux saints, en haut, et les
cœurs humbles et brisés y sont avec lui. Il parle du haut du ciel,
et sa parole est dans la puissance de l’œuvre accomplie qui l’a
conduit là. Il a pénétré dans le saint des saints, à travers les
parvis extérieurs, détruisant les inimitiés, renversant tout mur
mitoyen de clôture ; et de là il est venu de nouveau, par la vertu
de son sang et dans la puissance du Saint Esprit, annoncer la
bonne nouvelle de la paix à tous les hommes (Éphésiens 2). Il ne
nous parle que de ce qui est là-haut, et non de ce qui est ici-bas ;
par son Esprit, il ne nous entretient que de la paix, de la joie, de
la gloire qui s’y trouvent, et non des accusations dont le péché,
qui survient encore trop souvent, réussit à remplir nos cœurs.
Pendant tout le cours de son divin ministère dans cet Évangile,
ainsi que je l’ai remarqué, le Seigneur avait agi en grâce, comme
le Fils du Père, la « lumière de la vie ». Sa présence était « le jour »
pour le pays d’Israël. Il brillait, si les ténèbres avaient su le
comprendre. Et maintenant, au terme de son service, toujours la
lumière, nous le voyons projetant ses derniers rayons sur la
contrée et sur le peuple. Il ne peut cesser de luire, qu’ils veuillent
ou non le comprendre. Aussi longtemps qu’il est présent, c’est le
jour. La nuit ne viendra qu’après son départ. « Pendant que je
suis dans le monde, je suis la lumière du monde » (Jean 9.5). Mais
déjà la lumière s’éloigne : « S’en allant, il se cacha de devant eux »
et alors Dieu, par son prophète, amène la nuit sur le pays. Ce
n’est pas que la lumière eût été douteuse, leurs consciences
disaient le contraire ; — la lumière avait accompli son service et
avait dominé sur le jour, mais les ténèbres ne l’avaient pas
comprise. Et alors le soleil, qui s’était levé sur la Judée, se coucha
pour ce pays, mais a n de se lever dans d’autres sphères ; car la
parole que Jésus prononce, en terminant, s’adresse à Israël et à
la terre tout entière. La même lumière du monde, qui venait
d’accomplir son cours en Judée, sort de sa chambre pour
accomplir une carrière plus étendue. Et cette carrière, elle la
poursuit encore. Le jour du salut est encore avec nous. La nuit du
jugement sur les nations n’est pas encore venue. Éclairés de cette
lumière, nous savons où nous allons et nous pouvons marcher
sans broncher. C’est encore le jour auquel la lumière dit :
« Réveille-toi, toi qui dors, et relève-toi d’entre les morts, et le
Christ luira sur toi ». — Telles sont tes voies, Sauveur béni,
Agneau de Dieu, Fils du Père !
Chapitres 13 à 17
J’ai suivi le Seigneur dans les chapitres 1 à 12 de cet évangile,
observant ses voies comme le Fils de Dieu, l’Étranger venu du
ciel, le Sauveur des pécheurs, et en même temps ses rapports et
ses controverses avec Israël. D’une part, son chemin avait été
celui de la grâce, mais dans l’isolement ; — de l’autre, Jésus avait
semblé marcher sur les traces du prophète Jérémie. Comme lui,
le Seigneur avait vu l’apostasie de la lle de Sion. Comme lui, il
l’avait avertie et enseignée, et il aurait aimé la guérir. Mais
comme Jérémie, il avait été témoin de l’obstination de son cœur ;
il avait été méconnu et rejeté par elle, et il ne lui restait qu’à
pleurer sur Jérusalem. Jusqu’à la n de son ministère, il lui avait
parlé dans le langage du prophète : « Donnez gloire à l’Éternel,
votre Dieu, avant qu’il fasse venir des ténèbres, et avant que vos
pieds se heurtent contre les montagnes du crépuscule : vous
attendrez la lumière, et il en fera une ombre de mort et la réduira
en obscurité profonde. Et si vous n’écoutez pas ceci, mon âme
pleurera en secret à cause de votre orgueil » (Jérémie 13).
Ainsi Jésus avait pleuré sur la ville, car elle ne s’était pas
repentie. Le lion avait à nouveau quitté ses forêts pour la
dévorer ; le Destructeur des nations était encore une fois sorti de
son lieu, comme du temps du prophète (Jérémie 4). La captivité
de Babylone n’avait pas davantage nettoyé la souillure de Sion,
que les eaux de Noé n’avaient sancti é la terre, et tout avait mûri
pour un nouveau jugement. Cependant, ainsi que Jérémie, au
milieu de ces choses, avait eu son Baruch, le compagnon de ses
épreuves, à qui, de la part de Dieu, il avait donné sa vie pour
butin, et à qui il avait remis en dépôt le gage certain de l’héritage
nal — Jésus avait ses saints, les compagnons de sa réjection,
auxquels il donne l’assurance de la vie, et la promesse certaine
d’un repos et d’une gloire à venir. C’est dans l’intimité avec eux
que nous trouvons le Seigneur. Son ministère public est terminé,
et nous le voyons avec les siens, leur découvrant, comme leur
Prophète, les secrets de Dieu.
Avant que nous l’écoutions dans son caractère de Prophète de
l’Église, je ferai remarquer que ce que le Seigneur nous
communique, comme tel, forme notre présente richesse. Il ne
s’agit pas pour nous, comme pour l’Israël de jadis, des
bénédictions de la corbeille et de la huche (Deutéronome 28.5),
ni d’avoir autorité sur des villes, comme cela aura lieu plus tard :
— ce qui nous est donné, c’est « la pensée de Christ ». « Les trésors
de la sagesse et de la connaissance » cachés en Dieu sont notre
trésor actuel (Colossiens 2). En conséquence, le Seigneur, après
s’être détourné d’Israël pour s’occuper de ses élus, et considérant
ceux-ci à part du monde, leur fait connaître tout ce qu’il a
entendu du Père. Bientôt, comme le Roi de gloire, il partagera
son autorité avec les saints ; — pour le moment, il n’a que la
langue des savants pour leur parler et leur enseigner les secrets
de Dieu. Il les enrichit, mais seulement des richesses que peut
donner un prophète. Quant aux autres richesses, ils peuvent se
regarder comme pauvres, ainsi que l’a exprimé un des leurs, qui
le disait sans honte : « Je n’ai ni argent, ni or ».
Le Seigneur Jésus est le Prophète semblable à Moïse qui avait été
promis jadis. Moïse voyait Dieu face à face. Dieu lui parlait
comme un homme parle à son intime ami et dit de lui : « Je parle
avec lui bouche à bouche, et en me révélant clairement, et non
en énigmes ; et il voit la ressemblance de l’Éternel » (Nombres
12.8). Dans toutes ces hautes prérogatives, Moïse était l’ombre du
Fils de Dieu. Il avait accès auprès de Dieu. Il était avec Dieu sur le
sommet de la montagne, au-delà des régions du tonnerre et de la
tempête. Il était avec Dieu dans la nuée de gloire, quand elle
s’arrêta à l’entrée de la tente d’assignation ; et jusque dans le saint
des saints, quand le tabernacle avait été établi (Exode 24 ; 33 ;
25.22) . Il se tenait dans cette proximité de Dieu d’une manière
habituelle, et sans qu’il fût besoin d’o rir du sang ; tandis
qu’Aaron lui-même, nous le savons, ne pouvait se trouver là
qu’une fois l’an et non sans du sang. Tout cela nous dit, dans un
langage aisé à comprendre et touchant, quelle est l’excellence
personnelle de notre Prophète — la gloire de la déité de Celui
dont Moïse était l’ombre, de Celui qui alors était dans le sein du
Père, et qui maintenant nous a parlé (Hébreux 1).
Et ce qui a été montré à Moïse sur le sommet de la montagne,
dans la nuée de gloire et auprès du propitiatoire dans le saint des
saints, est précisément le secret que le Fils nous a révélé du sein
du Père. Moïse y apprit la grâce de Dieu ; il vit la gloire de sa
bonté (Exode 33). Précieuse vision ! Et le Fils unique a été au
milieu de nous « plein de grâce et de vérité ».
Cependant le service du Seigneur envers nous, comme Prophète,
est varié ; et dans cette variété, nous verrons que le caractère
particulier de l’évangile de Jean est pleinement maintenu.
Dans les premiers chapitres de l’évangile de Matthieu, le
Seigneur, comme prophète, révèle la pensée de Dieu au sujet de
son peuple ; il interprète la loi dans toute sa portée et sa pureté,
déterminant le modèle divin et l’appliquant à la conscience. Il
prescrit le caractère et la conduite des saints, par lesquels, au
jour de la régénération, ils seront dignes d’entrer dans le
royaume ; amenant l’âme à être exercée devant Dieu, et plaçant
devant elle son vrai but et son véritable objet (Matthieu 5 à 7).
Dans l’évangile de Jean, Jésus est le prophète dans un caractère
plus élevé. Il fait connaître le Père, et révèle les choses célestes. Il
parle de Celui qui est monté au ciel et qui est d’en haut. Ce n’est
pas autant de notre marche que des pensées de Dieu qu’il nous
entretient. Il nous dévoile les mystères de la vie et du jugement.
Il révèle l’amour du Père, les œuvres et la gloire du Fils, la place
et les opérations du Saint Esprit dans l’Église et pour elle. Dans
l’évangile de Jean, Jésus est le prophète des secrets du sein du
Père, nous découvrant les choses cachées du sanctuaire. Il nous
parle comme la Parole qui était avec Dieu et qui était Dieu, nous
donnant la connaissance qu’une simple marche dans la justice et
dans le service n’aurait pas exigée, mais qui fait de nous rien
moins que des « amis », et nous place dans une communion
intelligente avec les voies du « Père de gloire » (Éphésiens 1).
Telle est la diversité que le Seigneur déploie dans l’exercice de
son o ce prophétique, tel surtout qu’il paraît dans l’évangile de
Jean, exercice du caractère le plus élevé, qui rend cet évangile
d’un si grand prix pour les saints. Et lorsque, dans le jour actuel
du salut, l’Église aura été rassemblée, et que tous seront
parvenus à l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu,
à l’état d’homme fait, nous ne perdrons pas Celui qui est notre
Prophète. Nous l’écouterons comme tel, même pendant le
royaume. Ses discours seront notre nourriture à jamais.
Salomon était prophète, aussi bien que sacri cateur et roi. Ses
serviteurs se tenaient continuellement devant lui, et les rois de la
terre cherchaient de voir la face de Salomon pour l’entendre. La
reine de Sheba vint l’éprouver par des questions obscures, et
Salomon lui expliqua tout ce qu’elle avait proposé. Quand elle vit
la magni cence du roi, la rampe par laquelle il montait dans la
maison de l’Éternel, et qu’elle entendit la sagesse du prophète,
c’était plus que son cœur ne pouvait supporter. On ne lui en avait
pas rapporté la moitié ; elle fut hors d’elle-même. Ainsi, dans le
royaume à venir, nos yeux seront immergés dans la gloire ; le
cœur trouvera ce qui satisfait toutes ses a ections ; l’esprit,
toujours plus vaste, sera nourri des trésors de sagesse qui sont
cachés dans le Prophète divin, pendant que l’harmonie de sa
louange résonnera à nos oreilles durant toute l’éternité.
Je voudrais ajouter toutefois, pour ma propre instruction et
pour celle de mes frères, qu’il faut toujours craindre les e orts
de l’intelligence, quand nous écoutons les paroles de notre
Prophète, c’est-à-dire quand nous lisons les Écritures. L’Esprit
est un suprême docteur, comme il est aussi un écrivain
infaillible ; et bien que parfois, à cause de nos propres ténèbres,
la lumière de l’Esprit nous arrive un peu confuse, elle nous
apporte cependant toujours plus ou moins de certitude.
Souvenons-nous, encore, que c’est la lumière du sanctuaire.
C’était dans le lieu saint qu’était placé le chandelier ; et
l’intelligence que le Saint Esprit apporte à l’âme est
accompagnée de l’esprit d’adoration et de communion.
J’ai déjà fait remarquer la di érence de l’exercice du service
prophétique du Seigneur dans l’évangile de Matthieu et dans
celui-ci. Et dans ses discours avec ses élus, après que son
ministère public est terminé, nous trouvons cette même
di érence caractéristique. Dans l’évangile de Matthieu, le
Seigneur parle à ses disciples, sur la montagne des Oliviers, de
sujets touchant les Juifs (Matthieu 24 et 25) ; ici, au contraire, il
les conduit en esprit dans le ciel, pour leur ouvrir le sanctuaire et
leur révéler des secrets célestes. Il ne prend pas sa place sur la
montagne des Oliviers, pour entretenir le résidu des douleurs
d’Israël et de son repos nal ; il se place dans le ciel, et dévoile à
ses saints l’œuvre de leur Souverain Sacri cateur, ainsi que les
sou rances et les bénédictions qui les attendent eux, comme
église de Dieu, pendant le temps de cette sacri cature céleste.
Celle-ci forme le grand sujet de tous ces chapitres, que je désire
examiner plus en détail. Ils constituent une section distincte de
l’évangile de Jean ; mais je les considérerai par portions
détachées, selon que leur contenu me paraît l’indiquer.
Chapitre 13
Le lavage des pieds des disciples, cet acte du Seigneur que nous
trouvons à l’entrée de ce chapitre, nous fait connaître une des
principales fonctions de son ministère dans le ciel.
Le lavage des pieds faisait partie des devoirs de l’hospitalité, et le
Seigneur, au chapitre 7 de Luc, en blâme l’oubli chez son hôte. Le
lavage des pieds apportait au convive un double soulagement : il
puri ait le voyageur de la poussière de la route, et le
rafraîchissait après sa fatigue. Abraham, Lot, Laban, Joseph et le
vieillard de Guibha (Genèse 18 ; 19 ; 24 ; 43 ; Juges 19) sont
distingués parmi ceux qui ont observé ce devoir, et le ls de Dieu,
recevant ses élus dans la maison céleste, voulait leur donner le
sentiment qu’il ne manquait rien à leur bienvenue ni à leur état,
pour se présenter ; a n qu’ils pussent prendre leur place, avec
une joyeuse con ance, dans quelque département que ce fût du
sanctuaire royal. C’était bien un sanctuaire, mais ce lavage les
rendait propres à entrer dans un pareil lieu. Le Fils de Dieu
accomplissait, à l’égard de ses disciples, le service que la cuve
d’airain rendait dans le tabernacle pour les ls d’Aaron (Exode
30). Lui-même se chargeait de les préparer pour la présence de
Dieu. Dans une famille bien tenue, il est d’usage que les
serviteurs se maintiennent nets, ou bien ils quittent la maison.
Mais telle est la grâce du Fils de Dieu, du maître de la maison
céleste, que lui-même se charge du devoir de maintenir ses gens
dans la sainteté et la dignité du sacerdoce.
Insondable merveille et mystère divin ! Ce qu’il nous faut, c’est
un esprit de foi simple et con ant, qui se repose dans la réalité de
cette grâce in nie.
Cependant ce service pour nous dans le sanctuaire comme le
Souverain Sacri cateur de notre profession, le lavage de nos
pieds comme le vrai Puri cateur de la maison de Dieu, Jésus ne
s’en est pas acquitté avant d’avoir accompli, sur la terre, l’œuvre
de la Passion et d’être monté dans le ciel ; aussi semble-t-il
traverser toute cette scène mystique dans la conscience d’avoir
achevé de sou rir, d’être déjà monté au ciel, et de regarder en
arrière vers ses saints ; car ces paroles au début du chapitre :
« ayant aimé les siens qui étaient dans le monde », paraissent
suggérer la pensée que le Seigneur considérait les siens comme
étant encore ici-bas, et que lui-même les avait quittés pour de
plus pures et de plus hautes régions. Et alors, bien que glori é de
nouveau dans le Père et avec le Père, et comme le serviteur de
leurs besoins et de leur in rmité, il se ceint d’un linge et lave
leurs pieds, leur donnant à entendre qu’il demeurait dans le
sanctuaire céleste, dans le but de les rendre participants de la
vertu constante de la « sainteté » que, comme leur Souverain
Sacri cateur, il portait continuellement sur son front devant le
trône de Dieu (Exode 28).
Il y a donc une di érence entre la signi cation mystique du
souper et le lavage des pieds qui vint ensuite ; di érence qui est la
même entre le jour des expiations et les cendres de la génisse
rousse, sous le régime de la loi. Le jour des expiations met en
évidence la vertu du sang du Fils de Dieu, comme le fait le
souper ; et les cendres de la génisse, comme le lavage des pieds,
montrent la vertu de son intercession. Le jour des expiations ne
se présentait qu’une seule fois dans l’année juive ; c’était un
grand jour annuel de réconciliation, auquel le péché d’Israël
était e acé une fois pour l’année ; tandis que les cendres de la
génisse étaient la provision pour les transgressions de chaque
jour, pour toutes les souillures accidentelles que l’Israélite
pouvait contracter pendant ce temps. Il en est de même de
l’e usion du sang en premier lieu, et des intercessions
sacerdotales du Fils de Dieu ensuite ; comme le dit l’Écriture :
« Si, étant ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la
mort de son Fils, beaucoup plutôt, ayant été réconciliés, serons-
nous sauvés par sa vie » (Romains 5.10).
Les mêmes bénédictions nous sont encore données dans le même
ordre, sous une autre forme. Ainsi, l’Agneau de Pâque délivrait
Israël de l’Égypte une fois pour toutes ; tandis que l’intercession
de Moïse au désert, détournait la colère de Dieu des
transgressions accidentelles du camp. Et nous avons le sang de
Jésus, notre Pâque, et l’intercession de Jésus, notre Médiateur ;
— le souper d’abord, puis le lavage des pieds ; la mort ici-bas, la
vie dans le ciel. Celui qui a été lavé une fois, n’a besoin que
d’avoir les pieds lavés ; et ce lavage des pieds, cette puri cation de
la souillure que le saint contracte sur la terre, dans sa marche
journalière, le Souverain Sacri cateur, qui est dans le ciel pour
lui, l’accomplit par sa présence et son intercession. Il est le
Médiateur de la nouvelle alliance, comme il en a o ert le sang.
C’est ainsi que l’amour du Fils de Dieu pour l’Église, un amour
qui a existé dès avant les siècles, doit subsister jusqu’à la n des
siècles, comme il est écrit ici : « Jésus, ayant aimé les siens qui
étaient dans le monde, les aima jusqu’à la n ». Tous les âges,
toutes les scènes seront les témoins des opérations variées de cet
amour, mais toujours dans sa richesse et sa réalité invariables.
Aucun changement ne peut l’a ecter. Les a ictions du monde,
comme les gloires du ciel, l’ont trouvé dans le cœur de Jésus,
toujours le même. Douleurs ou joies, sou rances ou gloires, rien
n’a pu y porter atteinte. Sa mort sur la terre, comme sa vie dans
le ciel, le déclarent. — Et plus encore. Dans cet amour, il a servi
l’Église avant que le monde fût, quand il disait : « Voici, je viens » ;
et quand le royaume sera venu, il la servira dans le même
amour ; il fera asseoir à table ses saints, et sera le serviteur de
leur joie.
Tel a été le Seigneur, tel il est aujourd’hui, et tel sera-t- il à jamais
dans son service d’amour à l’égard de ses saints ; et il leur
commande d’être ses imitateurs. « Si donc moi, le Seigneur et le
Maître, j’ai lavé vos pieds, vous aussi vous devez vous laver les
pieds les uns des autres ». Il s’attend à retrouver parmi nous sur
la terre, s’exerçant dans l’a ection mutuelle, les soins qu’il nous
donne du ciel. Il nous lave les pieds journellement ; il supporte
notre misère ; et devant le trône, il s’occupe de nos souillures ; et
il veut qu’ici-bas, sur le marchepied de la maison, nous nous
lavions les pieds les uns aux autres, que nous supportions
réciproquement nos in rmités, et que nous sachions contribuer
de part et d’autre à notre commune joie.
Cet acte du Seigneur et l’enseignement qui en découle
emmenaient ainsi l’Église sur la montagne, comme jadis Moïse,
lorsque lui furent montrées les formes d’après lesquelles les
choses devaient être faites sur la terre. Moïse, alors, était au-
dessus de la loi, au-delà des régions du feu consumant et des
tonnerres ; et ici, l’Église est pareillement placée. Les disciples
sont appelés en esprit dans le sanctuaire céleste, les voies du
Souverain Sacri cateur leur sont exposées dans son amour et sa
sollicitude de tous les jours, et il leur est dit de descendre et de
faire de même ; comme il avait été dit à Moïse : « Prends garde à
faire toutes choses selon le modèle qui t’a été montré sur la
montagne ». Le moment pour Moïse d’être appelé sur la
montagne et d’y rester, n’était pas encore venu. Il ne devait que
s’y arrêter un peu, pour voir le modèle du tabernacle et recevoir
des ordres. Et il en est de même ici. L’Église n’était pas encore
préparée pour la gloire et la maison du Père. « Là où moi je vais,
dit le Seigneur à ses disciples, vous, vous ne pouvez venir ». Il
leur promet qu’ils le suivront plus tard ; pour le présent, il ne
leur est donné que la vue du modèle sur la montagne, pour qu’ils
l’imitent sur la terre.
Mais ces copies, ce n’est que l’amour qui peut les produire, car
l’amour en est l’original dans le ciel ; ainsi que le Seigneur le
déclare : « À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si
vous avez de l’amour entre vous ». Il ne s’agit plus, comme jadis,
de l’intelligence de ceux qui travaillent l’or et l’airain (Exode 35) ;
mais de l’intelligence de ceux qui « marchent dans l’amour ». La
culture dans le cœur d’une pensée a ectueuse envers un frère ; la
puissance pour porter et supporter dans l’amour ; les sympathies
manifestées ; des soins pour corriger une tendance égoïste ou des
allures blessantes — voilà quelles sont les imitations du modèle
céleste. Mais ce n’est que comme de « bien-aimés enfants » que
nous pouvons être les « imitateurs de Dieu » (Éphésiens 5). —
Quel encouragement que celui-là ! Quand le Seigneur veut établir
sur la terre un témoignage de ses voies dans le ciel, il nous dit de
nous aimer les uns les autres, de nous laver les pieds les uns aux
autres ! Quelles beautés ce tableau nous révèle de Celui qui est au-
dedans du voile ! Il nous montre combien sa pensée est remplie
d’a ection, et quelle est l’occupation journalière de notre
Sacri cateur dans son sanctuaire céleste !
Chers amis, je voudrais nous exhorter, vous et moi, à marcher
davantage dans ces témoignages du Seigneur, car ce serait notre
assurance devant lui et notre propre joie. Si nos voies étaient des
voies fermes et inébranlables d’amour, nous cheminerions
immergés dans la lumière du Christ ; nous le trouverions
partout. Ses pensées seraient toujours devant nous dans leur
bonté constante, et quel bonheur et quelle con ance il
s’ensuivrait pour nous ! Aucun soupçon à l’égard de son amour,
aucun nuage, ni le doute, ni la crainte, ne viendraient s’établir
dans le cœur ; nous entendrions Jésus de nos oreilles, nous le
verrions de nos yeux, nous le toucherions de nos mains, car
toutes choses avec lesquelles nous serions en contact seraient un
témoignage de son amour et en auraient la saveur. Ce serait, en
e et, une agréable demeure dans la maison de l’Éternel, une
heureuse contemplation de la beauté du Seigneur.
Malheureusement le pauvre cœur de l’homme n’est pas propre à
rencontrer un pareil déploiement d’amour et de gloire. Pierre
exprime cette commune ignorance. Il ne comprend pas encore
cette relation entre la gloire et le service. Il donne cours à ses
appréciations humaines et dit : « Tu ne me laveras jamais les
pieds ». Mais Pierre saurait toutes ces choses plus tard, le
Seigneur le lui promet ; car le Seigneur, les disciples, Pierre sont
un. Judas, cependant, devait être séparé des autres : « Non pas
tous », dit le Seigneur. La présence du traître au milieu des saints
était nécessaire jusqu’à ce moment solennel, car l’Écriture avait
dit : « Celui qui mange le pain avec moi a levé son talon contre
moi ». Judas doit recevoir le morceau trempé, de la main du
Seigneur lui-même. Le gage d’amour doit avoir été donné et
méprisé, avant que Satan puisse entrer ; car c’est le rejet de
l’amour qui amène à maturité le péché de l’homme ; et en restant
insensible devant cette preuve signalée de bonté de la part de son
Maître, Judas a consommé son péché, et alors Satan pénètre.
L’entrée en lui de Satan n’est pas mentionnée avant que le
morceau ait été donné et reçu ; de même, dans la dispensation où
nous sommes, l’homme a méprisé l’amour et a, de cette manière,
consommé son péché, ainsi que le Seigneur le dit peu après : « Si
je n’avais pas fait parmi eux les œuvres qu’aucun autre n’a faites,
ils n’auraient pas eu de péché ». Ayant méprisé l’amour dont
l’Évangile fait preuve, l’homme est allé son propre chemin ;
comme ici Judas, qui, ayant reçu le morceau, sortit pour aller
trahir Celui qui le lui avait donné. Et l’apôtre ajoute : « Or il était
nuit ». Paroles solennelles : Nuit dans l’homme, et nuit pour
Jésus.
Jésus, toutefois, regarde aussitôt au-delà de cette nuit obscure,
car, quelque sombre qu’elle dût être pour lui, elle aboutirait à un
jour sans nuage. Jésus devait être glori é en Dieu
immédiatement, car Dieu était glori é en lui — en lui, le seul ls
d’homme dans lequel Dieu fut jamais glori é. Jésus avait
maintenu la nature sans tache, et allait l’o rir à Dieu comme la
gerbe de fruit humain pure, convenable pour le grenier de Dieu.
En Jésus, l’homme avait été glori é ; car tout ce qui était procédé
de lui, tout ce qui avait été tiré de lui, avait été selon Dieu. Nulle
tache ne souillait cette beauté morale. L’homme, en Jésus, n’était
pas resté en deçà de la gloire de Dieu ; et Dieu, qui avait été
glori é en lui, le glori erait par conséquent en lui-même. Quant
aux autres hommes, il en était autrement. Jésus pouvait aller à
Dieu immédiatement, en vertu de cette gloire morale, lui seul ;
car pour les autres hommes, qu’ils fussent des saints ou des
incrédules, des Pierre ou des pharisiens, cela ne se pouvait. Une
place devant Dieu devait être préparée avant que d’y rassembler
les saints ; c’est pourquoi le Seigneur leur dit : « Vous me
chercherez ; et comme j’ai dit aux Juifs : Là où moi je vais, vous,
vous ne pouvez venir, je vous le dis aussi maintenant à vous ».
Jésus anticipe ici le jour de sa propre gloire en Dieu, en disant,
aussitôt que le traître fut sorti : « Maintenant le Fils de l’homme
est glori é » *. Et cette gloire, le moment viendra auquel elle sera
manifestée. Quand le Fils de l’homme aura cueilli de son
royaume tous les scandales et tous ceux qui commettent
l’iniquité, quand le traître « sortira » de nouveau, alors la gloire
sera vue, et les justes resplendiront comme le soleil dans le
royaume de leur Père. L’aire une fois puri ée, les gerbes de gloire
seront rassemblées dans le grenier.
* Remarquons quelle assurance nous donne toujours la
conscience que nous aimons. Pierre et Jean ne sont
nullement alarmés des suggestions de Jésus, touchant le
traître qui se trouvait parmi eux ; ils prennent conseil
ensemble pour le découvrir, et à la n ils trouvent
l’énigme. Nos cœurs, bien-aimés, sont-ils en état de
soutenir les recherches de l’Esprit de jugement ? La
conscience d’aimer donne le courage du lion.
Chapitres 14 à 16
Ayant ainsi, en esprit, traversé la nuit et pris sa place dans le jour
au-delà, le Seigneur se tourne vers ses disciples et, comme le
Prophète des choses célestes, il les enseigne et les console ; leur
parlant du mystère de sa céleste sacri cature, et de leur vocation,
de leurs devoirs, de leurs bénédictions comme Église de Dieu
séjournant sur la terre, pendant la durée de cette sacri cature.
La sacri cature du Fils de Dieu — ou la dispensation actuelle,
pendant laquelle le Seigneur est assis sur le trône du Père, et
nous, introduits dans le royaume du Fils de l’amour de Dieu —
était un mystère en Dieu, qui avait été caché à Israël. Le « peu de
temps » était une étape dans l’œuvre divine, dont les Juifs et les
disciples étaient également ignorants. Ils pensaient tous que
Christ demeurerait éternellement, car leurs prophètes avaient
parlé de lui en rapport avec une domination terrestre.
Cependant il y avait eu, dans la prophétie et dans l’histoire, bien
des indications qui auraient pu les préparer aux choses que
Christ leur révèle. La demeure de Joseph en Égypte et les années
de sa gloire — durant lesquelles il ne se souvint plus de sa
parenté au pays de Canaan, jusqu’au jour où l’angoisse de la
famine amena les siens auprès de lui — avait été un type de ce
mystère. Le séjour de Moïse dans le pays de Madian, également
(voyez Actes 7). Il est permis de penser que ni Joseph, ni Moïse
n’oublièrent leur peuple, et que l’un et l’autre gardaient bien des
souvenirs ; mais ces sentiments n’ont pas été signalés. Et de
même, nous savons que le Seigneur se souvient de Jérusalem,
que ses murs sont continuellement devant lui, et qu’il l’a gravée
sur les paumes de ses mains, quoique, en apparence, il soit pour
elle comme « un homme stupéfait, comme un homme fort qui ne
peut sauver » (Jérémie 14.9).
Outre ces récits typiques, les prophètes avaient mentionné le
mystère ; du moins ils en avaient tracé les grands contours. Ils
avaient prédit le veuvage de Jérusalem, qui devait durer un
temps déterminé. Moïse, anciennement, avait laissé à Israël le
témoignage que pendant un temps le Seigneur leur cacherait sa
face, et les émouvrait à jalousie par un peuple qui n’est pas un
peuple (Deutéronome 32). David avait dit que le Messie, comme
son Seigneur, serait assis pour un temps à la droite de Dieu
(Psaume 110). Ésaïe avait eu une vision de Christ dans la gloire
céleste, pendant une période de jugement sur Israël (Ésaïe 6).
Ézéchiel avait vu la gloire quitter la ville et y revenir plus tard
(Ézéchiel 11 ; 43). De plus, le Seigneur avait dit par Osée : « Je m’en
irai, je retournerai en mon lieu, jusqu’à ce qu’ils se reconnaissent
coupables et recherchent ma face. Dans leur détresse, ils me
chercheront dès le matin » (Osée 5.15). Pendant son propre
ministère, le Seigneur avait fait allusion à ce même mystère.
Dans l’évangile de Matthieu, en rappelant les passages des
Écritures relatifs à la pierre que ceux qui bâtissaient avaient
rejetée, il corrige l’erreur de ceux qui pensaient que Christ devait
demeurer éternellement. Dans l’évangile de Luc, il avait montré
par la parabole du Seigneur, s’en allant dans un pays éloigné,
qu’il y avait un intervalle entre la première apparition du Messie
et son apparition dans son royaume. Et ici, dans l’évangile de
Jean, il traite la question plus explicitement encore, en exposant
le caractère de cet intervalle, pendant le temps de sa séance à la
droite de Dieu, dans le ciel.
Aussi, après avoir terminé son ministère public et s’être retiré à
l’écart avec ses disciples, Jésus s’occupe de ce sujet, et dans la
scène du chapitre l3, dans l’enseignement des chapitres 14, 15 et
16, et de nouveau dans la scène du chapitre 17, il expose et
développe alternativement ce qu’est la sacri cature céleste ;
faisant voir que pendant l’intervalle de séparation d’avec Israël,
il est occupé de l’Église de la manière la plus précieuse. En
sympathies, en intercessions, selon la vigilance et la sollicitude
de quelqu’un dont le regard est sur eux, Jésus est tout activité
envers ses saints maintenant. Séparé, il est vrai, de ses frères
selon la chair, il garde, comme Moïse, le troupeau de son Père à
la montagne de Dieu pendant un temps, loin des souillures
d’Égypte et de l’incrédulité d’Israël, goûtant dans une sainte
retraite les douceurs d’une demeure et d’une famille chéries.
En lisant le commencement du chapitre 14, il me reste une
impression d’un caractère très doux, que voici : Le Seigneur
suppose que son ministère a amené le Père tellement près de ses
disciples, qu’ils doivent en avoir conclu que sa maison est la leur.
Il y a beaucoup d’encouragement dans cette pensée. Le ministère
du Seigneur avait été une révélation si claire de l’amour du Père
pour eux, que cela aurait été étrange, en e et, si tel n’eût pas été
le cas. Qu’il se trouvât des demeures pour ses disciples comme
pour lui dans la maison du Père, était tellement en accord avec
toutes les œuvres et toutes les paroles de Jésus, qu’un pareil fait,
une pareille vérité n’avaient pas même besoin d’être mentionnés.
C’était une conclusion nécessaire. Tous les privilèges de la
famille leur appartenaient, et naturellement la maison de la
famille était leur demeure.
Quelle chose, que nous puissions tirer une conclusion si grande
sans que ce soit directement enseigné ! Et non seulement cela,
mais nous mériterions le blâme d’être pris de pesanteur
spirituelle, si elle nous échappait ! Le ministère de Jésus « le Fils
du sein du Père » pouvait-il, en e et, parler de choses moindres
que celles qui concernent la maison du Père et notre privilège d’y
demeurer à toujours ?
Insondable merveille et mystère divin, je le répète. Ce qu’il nous
faut, c’est une foi simple et con ante qui se repose dans la réalité
d’une telle grâce !
Ah ! pourquoi la famille de Dieu ne sait-elle mieux réjouir les
solitudes du Fils de Dieu ! Que n’est-elle un plus « magni que
troupeau » comme résultat de ses soins et de sa vigilance à la
montagne de Dieu ! Que n’est-elle, en compensation de la perte
actuelle d’Israël, un chœur joyeux qui fasse éclater ses accents
devant lui ! Mais pour eux il a laissé sa vie ; il s’est livré lui-même
pour ses brebis, et dans son amour il reste dèle.
Ces chapitres nous montrent, en outre, que le ministère du Fils
n’avait rien produit d’e cace sur le cœur de ses disciples ; car
l’ordre divin était celui-ci : le Père avait travaillé jusqu’alors, le
Fils travaillait, mais le Saint Esprit devait aussi travailler, avant
que l’Église pût entrer dans sa demeure. Voilà pourquoi ce n’est
qu’ici que le nom de Dieu nous est pleinement révélé. La
révélation de Dieu brille de plus en plus à mesure que les
dispensations se déroulent. Mais c’est un grand sujet.
Dans le premier chapitre de la Genèse, nous ne voyons et
n’entendons que « Dieu » seul. C’est « Dieu » qui agit pendant les
six jours de création et qui, après cela, se repose le septième.
Mais dans le chapitre 2, nous voyons et nous entendons
« l’Éternel Dieu ». Il y a progression. Ce sont deux degrés dans la
révélation que Dieu donne de lui-même. Dans le premier
chapitre, il se manifeste simplement comme Dieu, agissant selon
son bon plaisir et pour sa propre gloire. Il trouve toute
satisfaction dans son œuvre, qu’il contemple et voit « très
bonne », et il se glori e lui-même, en plaçant au-dessus de
l’œuvre, et comme représentant de lui-même, un être qu’il crée à
son image. Dans le second chapitre toutefois, nous voyons
« l’Éternel Dieu », c’est-à-dire le Dieu des alliances, Dieu entrant
dans des conseils et des desseins, pour la bénédiction de sa
créature. Aussi, bien des détails de l’œuvre primitive, telle qu’elle
s’opérait sous la main de « Dieu », sont omis, et des choses sont
placées en évidence qui n’avaient pas été nommées d’abord. C’est
ainsi que nous trouvons mis en relief ici des sujets dont le
premier chapitre ne parlait pas du tout, tels que : le Jardin et le
Fleuve, la manière dont l’homme fut créé, dont la domination lui
fut donnée, la formation de la femme, l’institution de son union
avec l’homme ; ensuite nous avons l’Arbre mystique, et le
commandement, accompagné de la peine attachée à sa
transgression — toutes choses qui se rapportaient à la position et
à la bénédiction de la créature, dans son alliance avec « l’Éternel
Dieu ».
C’est ainsi que Dieu a commencé à nous révéler son nom. Après
les noms de « Dieu » et de « l’Éternel Dieu », nous trouvons celui de
« Dieu fort, Tout-Puissant », déclaré à Abram. C’était une
nouvelle révélation de lui-même que Dieu donnait à Abram,
quand il était « hors d’âges, et n’avait d’autre ressource que la
toute-puissance de Dieu, sa pleine su sance (Genèse 17). C’est
par ce nom, qui proclamait cette su sance nécessaire, que Dieu
a conduit Abram et Isaac, et après eux, Jacob ; car tous étaient
étrangers et voyageurs sur la terre, ne possédant que la promesse
d’un Ami Tout-Puissant, que serait leur bâton et leur houlette.
Plus tard, Dieu fut connu de ses enfants sous un autre nom
encore. En commençant de s’occuper des enfants d’Israël, pour
les introduire dans son alliance et dans l’héritage promis, Dieu se
révéla sous le nom d’Éternel, c’est-à-dire, le Dieu d’alliance avec
Israël (Exode 6) et c’est sous la protection de Dieu connu sous ce
nom, qu’Israël entra et s’établit dans le pays de Canaan.
Jusque-là cependant, Dieu n’était pas connu dans la pleine gloire
de son nom. Il y a en lui de la grâce, et des dons par la grâce, que
ces révélations ne dévoilaient pas complètement, et qui nous
sont révélés maintenant dans le nom de Père, Fils et Saint Esprit.
C’est là le nom complet, sous lequel la pleine gloire de notre Dieu
et la grâce et les dons par la grâce nous sont apportés en
puissance, par la dispensation qui nous révèle ce nom *.
*Quand nous prononçons le mot « Seigneur », nous avons
conscience que nous nommons quelqu’un qui est plus près
de nous que lorsque nous disons « Dieu ».
Par conséquent, ce n’est que dans l’ère actuelle que le nom et la
gloire de Dieu ont été pleinement manifestés. Le Père avait
travaillé, il est vrai, durant les âges des Juifs ; mais Israël, comme
nation et dans ses rapports avec Dieu, n’avait eu a aire qu’à
« l’Éternel ». La révélation du Père attendait le ministère du Fils,
et certaines dispensations devaient achever leur cours, avant que
le Fils pût venir. Le Fils ne pouvait pas être le ministre de la loi.
Ce ministère ne convenait pas à la dignité de Celui qui était dans
le sein du Père. Il fut con é à des anges. De même, le Fils n’entra
pas dans son ministère public avant que le « grand salut » ne fût
prêt à être annoncé (Hébreux 2). La manifestation du Saint Esprit
attendait également ; car, pas plus que le Fils, le Saint Esprit ne
pouvait s’occuper du ministère de la loi. La nuée, les éclairs, les
tonnerres signalèrent ce ministère (Exode 19) ; tandis que le Saint
Esprit apportait ses dons et sa puissance au service du ministère
du Fils, pour la publication du grand salut. L’Esprit de Dieu ne
pouvait pas être un esprit de servitude engendrant la crainte —
la loi le pouvait — mais le Saint Esprit devait engendrer la
con ance. « Tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu,
ceux-là sont ls de Dieu » (Romains 8.14).
Le Saint Esprit ne pouvait pas être manifesté tant que le Fils
n’avait pas achevé son œuvre. Le cœur devait premièrement être
puri é d’une mauvaise conscience, de manière à ce que le temple
fût sancti é, pour être la demeure de l’Esprit. L’ameublement de
l’intérieur, pour ainsi dire (l’esprit de liberté et d’adoption et la
connaissance de la gloire), devait être prêt pour ce moment, et
cela n’avait lieu que par la mort, la résurrection et l’ascension du
Fils. Il fallait que ces choses fussent accomplies pour que le Saint
Esprit fût révélé. Depuis le commencement, il est vrai, le Saint
Esprit a agi dans le monde comme puissance sainte. Il a parlé par
les prophètes. Il a été la force des juges et des rois. Il a aussi été la
puissance de la foi, du service, de la sou rance chez tous les
serviteurs de Dieu. Mais tout cela restait au-dessous de la place
que le Saint Esprit prend actuellement dans l’Église.
Précédemment, il n’habitait pas en nous comme dans son
temple ; tandis que maintenant il demeure en nous, et son
opération forme un royaume qui est justice, paix et joie. Comme
Esprit de sagesse, il nous donne « la pensée de Christ », des sens
exercés pour discerner le bien et le mal. Comme Esprit
d’adoption, il nous rend capables d’appeler Dieu, Père, et Jésus,
Seigneur. Il intercède aussi pour nous par des soupirs
inexprimables. Il répand l’amour de Dieu dans nos cœurs et nous
fait abonder en espérance. Il est en nous une fontaine d’eau,
jaillissant en vie éternelle, et il est la source des euves d’eaux
vives, découlant de nous pour le rafraîchissement de ceux qui
sont las. Il rassemble les saints pour être une maison spirituelle,
où sont o erts des sacri ces spirituels, ne reconnaissant plus de
sanctuaire terrestre, ni d’ordonnances charnelles ; car les saints
sont édi és ensemble pour être une habitation de Dieu par
l’Esprit, et des dons leur sont donnés pour croître en toutes
choses jusqu’à Christ.
Ce sont là quelques-unes des voies du Saint Esprit envers les
saints dans son royaume ; ce sont les œuvres qui resplendissent
dans l’étendue de son domaine. Dans les croyants, le Saint Esprit
est des Arrhes, une Onction, et un Témoin. Il nous parle
ouvertement du Père, et prend des choses de Christ pour nous les
annoncer. Sa présence en nous est si pure, qu’il n’y a point de
mal dont il ne s’aperçoive et ne se contriste (Éphésiens 4) ; et si
tendre et sympathique en même temps, qu’il n’y a pas
d’a iction selon Dieu, qu’il ne ressente et qui ne le fasse
soupirer (Romains 8). Comme je l’ai dit, il fait abonder
l’espérance ; il nous donne le sentiment de la faveur de Dieu ; il
fait connaître à la conscience son droit à une complète et paisible
assurance. Il n’y a rien de chétif, d’étroit, d’incertain, là où
l’Esprit exerce sa puissance. Ses opérations, dans leur ensemble,
c’est un royaume, mais un royaume qui est de Dieu, plein de
force et de beauté. Nous avons à confesser combien peu nous
vivons dans la puissance et la clarté de ce royaume ; cependant
voilà ce qu’il est en lui-même, bien que nos cœurs étroits et gênés
se l’approprient si pauvrement. Et l’œuvre de l’Esprit attend de
nous sa louange ; sa gloire doit être publiée dans ses temples. Il y
a sujet d’être humiliés, quand nous nous examinons nous-
mêmes en présence des richesses de ce royaume ; mais le
royaume lui-même ne trouve pas en nous sa mesure.
Ce mystère est précieux, bien-aimés, je n’ai pas besoin de le dire.
Tout l’état de choses dans lequel nous sommes introduits, nous
dit que c’est avec Dieu directement et non avec nous-mêmes que
nous avons a aire, et c’est un immense bienfait. Il n’en était pas
ainsi sous la loi. La loi procédait avec nous directement, quand
elle disait : « Tu feras » et « tu ne feras pas ». Maintenant, c’est tout
d’abord avec Dieu que nous avons a aire. Nous sommes
péremptoirement appelés en dehors de nous, pour ne plus nous
souvenir si nous sommes Juifs ou Grecs. Nous avons à regarder à
Dieu, à entendre Dieu, nous avons a aire à Dieu. C’est la
bénédiction la plus élevée que le pécheur puisse concevoir —
bénédiction si grande, que Satan fait ce qu’il peut pour nous en
tenir séparés ; pour nous rendre sourds à la voix de Dieu, ou
dérober à nos regards ses voies et ses œuvres, a n que nos cœurs
ne répondent point à son amour. Il voudrait nous occuper de
n’importe quoi, pour faire que la lumière de l’Évangile de la
gloire du Christ, « qui est l’image de Dieu », ne resplendisse pas. Il
tourne les pensées des uns sur leur justice, celles des autres sur
leurs péchés, pour que, d’une manière ou d’une autre, par vaine
gloire ou par crainte, il parvienne à tenir les hommes loin de
Dieu.
Sortir ses disciples d’une position simplement juive, pour les
amener à cette hauteur, et les consoler ainsi de la tristesse causée
par la perspective de son départ, tel est le but du Seigneur, dans
les discours qu’il leur tient dans ces chapitres, discours comme
jamais il n’en a été prononcé parmi les ls des hommes. Jamais le
cœur de Dieu n’avait aussi pleinement et aussi magni quement
communiqué ses trésors à l’attente de son peuple. Ce furent de
saints moments de communion entre le ciel et la terre.
Le Seigneur commence en disant : « Que votre cœur ne soit pas
troublé ; vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi ». C’était
annoncer d’un seul coup aux disciples un autre objet de foi que
celui qu’ils avaient eu jusqu’alors. D’après le sens de ces paroles,
Dieu était déjà connu en Israël. Les disciples, comme Juifs,
croyaient déjà en Dieu : leur foi n’était pas erronée, mais
seulement défectueuse, et le Seigneur voulait la compléter. Il
voulait leur apprendre à connaître le Père par le Fils, et tout ce
qu’il dit tend vers ce but. Il parle spécialement du Père, et il
promet que le Consolateur leur fera connaître les choses qui
regardent le Père et le Fils.
C’est ce caractère de grâce que notre Évangile donnait à entendre
au commencement, lorsque Jean écrivait : « Mais à tous ceux qui
l’ont reçu, il leur a donné le droit d’être enfants de Dieu » ; et cette
première mention de la valeur et de la puissance du ministère du
Fils est, dans ces chapitres, largement développée. Mais en
même temps que cela se poursuit, l’ignorance juive se montre
sous plusieurs de ses formes chez les disciples ; — et il n’en
pouvait être autrement : Israël n’était pas initié dans la
connaissance dans laquelle le Seigneur introduit maintenant les
siens. omas ignore le départ de Christ et sa séparation d’avec
cette terre, et il dit : « Seigneur, nous ne savons pas où tu vas » ;
car Israël avait appris à dire que le Christ demeurerait
éternellement. Philippe, de son côté, trahit son ignorance du
« Père » ; car ce n’était pas à connaître le Père dans le Fils qu’Israël
avait été conduit. Jude s’étonne à la pensée d’une gloire autre que
la manifestation de la gloire terrestre du Messie ; car celle-ci était
l’espérance d’Israël. Et tous restent ébahis devant ces
mystérieuses paroles : « un peu de temps ». Le prophète céleste les
fait sortir de ce courant d’idées. Déjà, comme le résidu de Dieu,
ils avaient été pris hors de la nation apostate, en recevant Jésus
comme le Messie venu de Dieu ; toutefois ils ont encore à
connaître le Fils comme venant de la part du Père, Celui qui,
pendant qu’il était avec eux, leur avait manifesté le Père. Le
moment était venu pour lui de s’en aller auprès du Père ; mais il
reviendrait pour les introduire dans la maison du Père. C’était
ces grandes choses, ce fruit de son amour, que le Prophète divin
leur révèle ici ; elles étaient encore pour eux des choses étranges.
Dans cet entretien cependant, le cours des pensées de notre
Seigneur n’est qu’un instant interrompu par les défectueuses
conceptions juives de ses disciples. Son but est de les élever
jusqu’à la conscience de leur appel comme Église de Dieu et de les
consoler de cette manière ; et il poursuit ce but avec
persévérance, lors même que, par moments, il doit les reprendre
à cause de la lenteur de leurs cœurs. C’est ainsi que dans
l’interruption causée par Pierre, le Seigneur, en lui répondant,
est amené à s’occuper de l’in délité et du reniement de son
disciple et à les prédire ; mais cela ne change en rien le cours de
ses préoccupations bienveillantes à son égard et à l’égard des
autres. « Que votre cœur ne soit pas troublé », dit ce maître plein
de grâce, immédiatement après avoir averti Pierre du péché dans
lequel il allait tomber. Il en est de même à la n de l’entretien. Il
avait à leur dire que l’heure était venue, à laquelle ils seraient
dispersés « chacun chez soi », et qu’ils « le laisseraient seul » ; mais
sans permettre que rien n’interrompe un seul instant l’e usion
de son amour envers eux, il revient aussitôt à ses pensées et leur
dit : « Je vous ai dit ces choses, a n qu’en moi vous ayez la paix.
Vous avez de la tribulation dans le monde ; mais ayez bon
courage, moi j’ai vaincu le monde ».
Et dès lors, bien-aimés, il en a toujours été de même. Il se peut
que nous ayons besoin d’être avertis par le cri du coq et de sortir
pour pleurer sur notre conduite — le cœur de Jésus ne revient
jamais sur les intentions de sa bonté envers nous. Son but est de
bénir, et il bénira ; son but est de sauver, qui l’en empêchera ? Il
n’a pas aperçu d’iniquité chez les siens. Ils auront la paix,
accomplie par sa mort ; la vie leur sera apportée par sa
résurrection, et la gloire plus tard, par sa venue. Ce sont là les
bénédictions qui les attendent et, quoique leur cœur pesant et
leurs misères rendent la chose di cile, Jésus les leur annonce,
a n qu’ils soient consolés sous le poids de leur tristesse en le
voyant partir.
Les œuvres que Jésus a faites sont reconnues dans l’évangile de
Matthieu comme étant les œuvres du Fils de David (Matthieu 12).
Elles sont le sceau de son caractère de Messie. Ici le Seigneur les
place devant les disciples comme le sceau de son caractère de Fils
du Père. Il voulait qu’on vît en elles non seulement la preuve qu’il
pouvait établir le royaume d’Israël, selon les promesses des
prophètes (Ésaïe 35), mais aussi le témoignage qu’il était le
dispensateur de la grâce et de la puissance du Père ; car il dit :
« Croyez-moi, que je suis dans le Père, et que le Père est en moi ;
sinon croyez-moi à cause des œuvres elles-mêmes ». Cela répond
parfaitement au caractère de l’évangile de Jean. Et les « œuvres
plus grandes » qu’aussitôt il mentionne — ces œuvres que
feraient ceux qui croyaient en lui, devaient avoir, je suppose, le
même caractère ; elles auraient la saveur de la grâce du Père, en
amenant de pauvres pécheurs perdus à la liberté d’enfants de
Dieu, comme Paul le dit : « Moi je vous ai engendrés dans le
Christ Jésus par l’Évangile » (1 Corinthiens 4.15) ; et il en est
toujours de même. Des pécheurs sont encore introduits dans la
liberté d’enfants bien-aimés.
« Je ne vous laisserai pas orphelins », dit le Seigneur ; « je viens à
vous ». — « Parce que moi je vis, vous aussi vous vivrez ». Pour
eux, jamais la situation d’orphelins ; point de lamentations
comme il y en avait eu en Israël parce que le peuple était sans
père (Lamentations 5). L’adoption des saints, pendant qu’Israël
est orphelin, est mise en évidence ici par le Seigneur, dans des
termes d’une portée merveilleuse et profonde. Ils devaient
apprendre qu’il était dans le Père et eux en lui et lui en eux. Le
Père, toujours le Père, tel est le thème constant des paroles de
Jésus et le faix d’amour dont il nous charge.
Il y a un mouvement du Seigneur que je ne dois pas passer sous
silence. À la n du chapitre 14, il dit : « Je vous laisse la paix ; je
vous donne ma paix », leur faisant comprendre qu’avant de
quitter ce monde, il laisserait après lui sa paix — la paix
accomplie par sa mort pour eux, pécheurs. Et après leur avoir
ainsi parlé de paix, il dit : Levez-vous, partons d’ici » ; ce qui peut
nous faire supposer qu’ils se levèrent tous de la table pascale,
pour s’en aller du côté de la montagne des Oliviers. C’est en ce
moment qu’il se déclare à eux comme source et puissance de vie
ici-bas, en disant : « Moi, je suis le cep, vous, les sarments ».
Il y a dans l’ensemble de tout ceci une signi cation d’une beauté
particulière. Jésus demeure assis à la table du souper, jusqu’au
moment où la paix est prononcée, car sur cette table les gages de
paix étaient encore présents ; mais en se levant, il parle à ses
disciples de la vie qu’ils sauraient être en lui, élevé au dessus du
pouvoir de la mort, en lui, le vrai cep. Et il leur dit qu’il n’y a pas
d’autre vie que celle-là ; car il ajoute : « Si quelqu’un ne demeure
pas en moi, il est jeté dehors comme le sarment, et il sèche ». Et
leur ayant ainsi révélé la seule source de la vie, il leur expose les
joies et les saintes prérogatives de cette vie. Il leur apprend qu’ils
auraient sa propre joie — la joie du Fils — accomplie en eux-
mêmes ; que de plus, ils seraient amenés à l’honneur et à la grâce
d’être les amis de leur Seigneur, et qu’ils auraient la preuve que
sa gloire et leur bénédiction étaient devenues un seul et même
intérêt. En outre, le Seigneur fait entendre ici que la
préoccupation actuelle du Père est la beauté et la fertilité du cep ;
qu’il veut glori er Jésus comme chef de vie, ainsi qu’il le
glori era plus tard comme chef sur toutes choses.
Ceci dévoilait aux disciples d’immenses richesses de grâce. En
même temps toutefois, le Seigneur leur dit que l’union avec lui
allait les séparer du monde ; qu’être ses amis les exposerait à la
haine des hommes, qui manifesteraient bientôt toute leur
inimitié contre Dieu et ensuite contre eux. La révélation du Père,
dans le Fils et par le Fils, était sur le point d’être complètement
rejetée du monde. C’était, en e et, de la haine, une haine sans
cause, une haine en réponse à l’amour. La croix de Christ allait
montrer qu’au plus grand amour de Dieu avait répondu la plus
grande haine de l’homme. Ne connaissant pas le Père, il y aurait
encore du zèle pour Dieu, et on croirait rendre service à Dieu en
mettant à mort les enfants du Père ; car on peut être zélé pour la
synagogue et même pour le Dieu de la synagogue, tout en restant
éloigné de l’esprit de la dispensation qui déploie des richesses de
grâce et révèle le Père dans le Fils.
Cependant la perspective des sou rances que ses saints
pourraient endurer de la part du monde, conduit le Seigneur à
développer, d’une manière encore plus précieuse, le ministère en
eux et par eux du Consolateur promis. Il leur apprend que le
consolateur tiendrait pour eux contre le monde, convainquant
celui-ci de péché, de justice et de jugement ; qu’en même temps, il
habiterait en eux comme le témoin de l’amour de leur Père, et de
la gloire de leur Sauveur. Le Seigneur leur fournit cette
consolation pour le jour auquel ils éprouveraient la haine du
monde.
Je ferai observer que, selon la promesse qui est ici, l’Esprit serait
envoyé de la part du Père. Dieu avait approuvé Jésus le Nazaréen
(Actes 2) ; et, en donnant le Saint Esprit, le Père faisait connaître
l’agrément de sa pensée avec la présence ici-bas du Consolateur.
Remarquez le caractère de cette présence de l’Esprit dans
l’Église, immédiatement après qu’il eut été donné. Quelle huile
de joie, quel esprit de liberté, quelle largeur de cœur, il produisit
chez les saints ! Jésus avait reçu le Saint Esprit dans les hauts
lieux, où lui-même avait été rassasié de la joie de la face de Dieu ;
et en le donnant de là, l’Esprit se manifeste en conséquence, et
communique aussitôt quelque chose de cette joie de la face de
Dieu, dans laquelle le Seigneur venait d’entrer. Les foules
reçurent la parole avec joie, les disciples prenaient leur
nourriture avec joie et louaient Dieu. Et cette joie d’en haut
pouvait aisément tarir des joies qui n’avaient leur source que
dans les choses humaines. Le Saint Esprit en eux était joie,
liberté, largeur de cœur. C’était l’Esprit du Père. C’était le re et
ici-bas, sur les saints, de cette lumière qui avait brillé sur Jésus
dans le saint des saints. L’huile avait découlé de sa tête jusque sur
le vêtement.
Nous ne pouvons, en vérité, nous faire qu’une faible idée de la
valeur d’une dispensation comme celle que le Consolateur allait
introduire, et du changement qu’elle apportait pour une âme
placée sous l’esprit de servitude qu’engendre la loi. Que de
pensées au sujet d’un jugement à venir allaient disparaître ! Que
de terreurs de la mort devaient céder, devant la conscience
d’avoir déjà maintenant la vie dans le Fils de Dieu ! Que serait-ce,
sinon l’onction d’une huile de joie ? En entendant ces choses, les
disciples étaient formés pour cette joie et cette liberté. La chaire
de Moïse cédait la place ; le Fils, dans ses discours, conduit les
enfants dans le chemin de la maison du Père, loin de ces tuteurs
et gouverneurs qui n’enseignaient que des rudiments ; et bientôt
ils seraient arrivés jusqu’auprès du Père même, pour connaître,
par le Saint Esprit, la liberté et la joie de l’adoption.
Telle était cette heure pleine d’intérêt pour l’Église : le Saint
Esprit, le témoin du Père et du Fils, et ainsi l’Esprit d’adoption,
allait être communiqué, et les disciples étaient conduits hors de
l’école de la loi, pour l’attendre. Le Saint Esprit allait remplir le
cœur des saints de pensées bénies, au sujet du Père, du Fils et des
intérêts de l’Église. Et c’est ce qu’il fait dans la dispensation où
nous sommes. Il nous parle comme le Seigneur dit qu’il le ferait
— des délices que le Père trouve dans le Fils, de son dessein de le
glori er, et de notre place dans ces délices et dans cette gloire. Il
prend de ces choses et d’autres semblables et nous les annonce.
Voyez Genèse 24, passage bien connu et très goûté. Il montre
l’élection d’une Épouse pour le Fils par le Père ; — mais la place
occupée par le serviteur est précisément celle du Saint Esprit
dans l’Église ; il pourvoit, comme en grâce divine, à la joie du Fils
et de l’Église, en accomplissant les intentions de l’amour du Père.
Dans ce tableau, le serviteur d’Abraham dit à Rebecca comment
Dieu a fait prospérer son maître ; de quelle faveur et de quel
amour Isaac était l’objet ; comment il avait été « l’enfant de la
vieillesse », et comment Abraham lui avait donné tout ce qu’il
possédait. Il lui découvre les conseils, pris par Abraham,
concernant une épouse pour ce ls bien-aimé, et il lui montre
clairement qu’elle-même a été élue de Dieu pour remplir cette
place honorée et sainte. Et il termine en plaçant sur elle les gages
de cette élection et de l’amour d’Isaac.
Rien n’est plus doux et plus signi catif que cette scène. Puissent
nos cœurs, en jouissant de la réalité dont elle est un signe, en
ressentir la puissance par le Saint Esprit, comme Rebecca dut
l’éprouver par les discours du serviteur d’Abraham. C’était parce
qu’il avait rempli ses pensées d’Abraham, d’Isaac et de la part
qu’elle aurait, qu’elle s’était trouvée prête à traverser le désert
seule avec cet étranger. Son cœur avait été formé par ces
pensées, et elle avait pu quitter son pays, sa parenté, la maison de
son père, en disant : « J’irai ». De même, la pensée de l’amour de
notre Père céleste, et des délices que notre Isaac trouve en nous,
peut maintenant encore produire dans nos cœurs cette sainte
décision qui rompt tout autre lien et laisse tout pour être avec
lui. La communion avec le Père et avec le Fils, par le Consolateur,
est la voie sainte qui doit distinguer l’Église d’avec le monde. Il se
peut que la crainte d’un jugement à venir amène jusqu’à un
certain point une séparation d’avec le monde, ou bien que
l’orgueil du pharisien produise une séparation religieuse ;
toutefois c’est la connaissance présente de l’amour du Père et
l’espérance des gloires futures du Fils, qui seules peuvent opérer
une séparation réelle et selon Dieu d’avec le courant et l’esprit du
monde.
L’amour du Père, dont le Consolateur rend témoignage, est un
amour immédiat (16.26, 27). C’est l’amour de Dieu qui a visité le
monde, quand il fut manifesté dans le don du Fils ; et dès
l’instant que cet amour est cru, et que le message de la
réconciliation, qui procède de cet amour, a été accepté, les
croyants ont droit, par les richesses de la grâce, à connaître
l’amour du Père, pour en jouir comme d’un amour immédiat.
C’est de cet amour du Père et de la gloire du Fils, que le
Consolateur nous entretient le long du chemin. Le Consolateur
nous accompagne pendant tout le trajet et voilà de quoi il nous
occupe.
Sans doute, le serviteur d’Abraham, en marchant avec Rebecca à
travers le désert, a continué à lui parler de son maître, ajoutant
bien des détails à ce qu’il lui avait déjà dit en Mésopotamie ; car il
possédait la con ance de son maître qu’il avait connu depuis le
commencement. Il savait quel était son désir pour son ls, et
connaissait la promesse et la délité de Dieu. Il savait la victoire
d’Abraham sur les rois, et la délivrance de Lot, ainsi que la
rencontre avec Melchisédec. Il connaissait l’alliance, le gage de
l’héritage. Il savait le renvoi d’Ismaël hors de la maison où Isaac
avait dès lors habité sans rival. Il savait le voyage mystérieux à
Morija, Isaac en étant revenu comme vivant d’entre les morts.
Toutes ces choses il les savait, et sans doute il en parlait à Rebecca
pendant qu’ils voyageaient ensemble ; et par ces souvenirs et ces
perspectives, il entretenait l’intérêt du voyage et encourageait
Rebecca, bien que, pour elle, pays et maison paternelle fussent
laissés sans retour.
Chers amis, si nous marchions plus réellement dans la
communion du Saint Esprit, combien notre chemin en
deviendrait aisé ! et combien ses communications à l’âme, de
l’amour et de la gloire concentrés dans le Père et dans le Fils —
mais ouverts à notre foi — rempliraient nos cœurs de joie et de
courage ! Qu’il en soit ainsi de plus en plus pour nous, ton
peuple, glorieux Sauveur !
Chapitre 17
Après les avoir ainsi encouragés par la connaissance de leur
position comme famille du Père, et leur avoir donné toutes les
consolations de sa grâce en vue de son départ, le Seigneur
manifeste ici un de ses ministères sacerdotaux, comme il l’avait
fait au chapitre 13. Les ministères sont di érents entre eux, mais
réunis, ils présentent l’ensemble de ses voies comme notre
Avocat dans le sanctuaire céleste. Si, au chapitre 13, le Seigneur
semblait poser une main sur les pieds souillés de ses saints, ici il
pose l’autre sur le trône du Père, formant ainsi une chaîne
merveilleuse qui s’étend de Dieu jusqu’aux pécheurs. Au chapitre
13, son corps est ceint et il se baisse vers nos pieds ; ici, il lève les
yeux au ciel et contemple la face du Père. Quelle est la demande,
présentée par Celui qui remplit toute la distance entre le trône
resplendissant du Père et nos pieds vils, qui puisse essuyer un
refus ? Tout lui est accordé : sa voix est toujours écoutée !
Nous trouvons donc ici la pleine su sance et l’acceptation de
l’Avocat, et nous avons à remarquer l’ordre dans lequel il
présente ses requêtes et établit ses droits devant le Père.
Premièrement, il demande ce qui concerne la gloire du Père lui-
même : « Père, l’heure est venue ; glori e ton Fils, a n que ton Fils
te glori e ». Sa première pensée est le Père ; comme déjà il avait
enseigné ses disciples, lorsqu’ils adresseraient leurs prières, à
dire dès le début : « Notre Père qui es dans les cieux, que ton nom
soit sancti é ! ».
Le Seigneur met la vie éternelle entre les mains du Père, en
disant : « Comme tu lui as donné autorité sur toute chair, a n
que, quant à tout ce que tu lui as donné, il leur donne la vie
éternelle ». Notre Médiateur s’incline ainsi devant la vérité de
Dieu, que Satan avait anciennement calomniée, et que l’homme
avait mise en doute (Genèse 3) ; puis il ajoute : « Et c’est ici la vie
éternelle, qu’ils te connaissent seul vrai Dieu, et celui que tu as
envoyé, Jésus Christ » ; reconnaissant que maintenant la vie ne
peut être obtenue que par la rédemption ; que cette vie n’est pas
celle d’une simple créature, mais d’une créature rachetée, vie
recouvrée pour nous de la puissance de la mort, par la grâce du
Père et du Seigneur Jésus Christ, le Sauveur.
Secondement, il revendique sa propre gloire : « glori e-moi, toi,
Père, auprès de toi-même, de la gloire que j’avais auprès de toi
avant que le monde fût » ; et il fonde son titre sur ce qu’il a achevé
l’œuvre qui lui avait été donnée à faire : « Moi, je t’ai glori é sur la
terre, j’ai achevé l’œuvre que tu m’as donnée à faire ». Car dans
cette œuvre, aucune tache ne s’était glissée ; en elle, Dieu
trouvait une pleine satisfaction ; il pouvait se reposer, et comme
dans la création, il pouvait contempler l’œuvre et dire : Voilà,
c’est très bon. Dans cette œuvre, Dieu retrouvait un sabbat.
C’est l’assurance du croyant de savoir que son salut dépend d’une
œuvre accomplie, dans laquelle Dieu aire « une odeur agréable »
(ou : de repos) (Genèse 8.21). Au commencement, après avoir
terminé l’œuvre de la création, Dieu sancti a le septième jour, se
reposant avec une pleine satisfaction dans tout ce que sa main
avait créé. Mais l’homme troubla ce repos, de sorte que Dieu se
repentit d’avoir créé l’homme sur la terre. Plus tard, l’Éternel
institua un autre repos : il éleva un tabernacle dans le pays de
Canaan, et o rit à Israël une place dans ce repos, en leur
donnant le sabbat (Exode 31). Ce repos en Canaan fut assuré à
Israël, d’abord par l’épée de Josué (Josué 21 ; 23), et ensuite, sous
le règne de Salomon (1 Chroniques 22). Mais Israël, comme
Adam, troubla ce repos ; le pays ne garda pas ses sabbats, à cause
de la méchanceté de ceux qui y habitaient (2 Chroniques 36) ; et
maintenant le Dieu bienheureux a trouvé un autre repos ; un
repos qui ne peut être ni perdu, ni troublé. Dans l’œuvre
accomplie par le Seigneur Jésus Christ (et qu’il présente ici à son
Père), Dieu se repose de nouveau avec une pleine satisfaction,
comme dans ses propres œuvres d’autrefois. Cette œuvre
accomplie répond de toute manière à sa pensée. Dans la
résurrection de Christ, le Père a dit : Voilà, tout est très bon, car
la résurrection signi e cela. Cette œuvre est son repos à
toujours ; il y trouve toutes ses délices ; ses yeux et son cœur sont
là toujours. L’œuvre de Christ, faite pour des pécheurs, a donné à
Dieu un repos, pensée remplie de douceur pour le cœur. Et
lorsque la foi apprécie le sang selon sa juste valeur, c’est-à-dire
selon la valeur que Dieu lui donne, l’âme connaît le repos, le
repos de Dieu lui-même.
Cependant, c’est alors que le saint, le croyant, commence son
labeur. Aussitôt que je possède le repos comme pécheur, j’entre
dans le travail comme saint. Le repos pour le saint est un repos
qui reste à venir ; c’est pourquoi il est écrit : « Appliquons-nous
donc à entrer dans ce repos-là, a n que personne ne tombe en
imitant une semblable désobéissance » (Hébreux 4.11). Le
pécheur se repose maintenant, le saint travaille, et travaillera
jusqu’à ce que vienne le royaume.
Troisièmement, Jésus prie pour les siens. Il demande qu’ils
soient gardés en le nom du Père et sancti és par la vérité du Père,
a n qu’ils soient un dans la communion de la joie du Fils dès à
présent ; et il demande qu’ils soient avec lui là où il est, qu’ils
voient sa gloire, et soient un avec lui dans sa gloire quand le
moment viendra. Ce sont des demandes d’une grande portée.
L’Avocat céleste voulait que tous ses saints fussent un. — Cette
unité, toutefois, ne me paraît pas être celle qu’on entend
généralement, c’est-à-dire la manifestation d’une unité
ecclésiastique. C’est l’unité des saints, dans la connaissance
personnelle et la communion du Père et du Fils ; unité en esprit,
dans l’esprit de leur entendement, chacun d’eux ayant reçu
l’esprit d’adoption : grâce et puissance qui appartiennent à la
présente dispensation, laquelle le Fils allait introduire ; et il
désire que cet esprit ait son action dans le cœur de chacun des
élus et de tous ceux qui devaient être rassemblés.
Cela a-t-il manqué ? Impossible. Toutes les épîtres rendent
témoignage du contraire. Partout nous trouvons les saints, Juifs
et Gentils, en tout lieu, considérés comme gardés par le Père en
son propre nom, gardés comme des ls, comme étant « rendus
agréables dans le Bien-aimé », comme ayant « l’esprit
d’adoption », comme réunis pour parvenir « à l’unité de la foi et
de la connaissance du Fils de Dieu ». Ces déclarations nous
assurent que le désir du grand Avocat a été entendu, chacun des
croyants ayant la joie du Fils accomplie en lui-même, et tous
ainsi étant un dans l’esprit de leur entendement. Ce désir, j’en
suis certain, ne se rapportait à aucun ordre de choses
ecclésiastique. Les chrétiens, en le supposant, ont tenté bien des
e orts humains. Ils s’accusaient de ce qu’ils ne répondaient pas à
la prière du Seigneur, et ils en sont venus à l’usage de moyens
pour la produire. Mais cette prière a-t-elle besoin du concours
des saints, je le demande ? Ne s’adressait-elle pas au Père, pour ce
qui ne dépendait que du bon plaisir, de la puissance, et du don du
Père ? Assurément. Elle fait appel au Père, lui demandant de
garder les élus en son nom, de les sancti er par sa vérité, et de
leur donner la joie du Fils, a n que chacun d’eux eût cette joie en
lui-même.
Ce désir a été réalisé. L’Esprit du Fils est là pour tous les saints et
pour chacun d’eux, et ils sont un dans cet Esprit et dans cette
joie. Quand le moment arrivera, nous verrons s’accomplir toutes
les autres demandes du chapitre. Tous ceux qui doivent recevoir
le témoignage n’ont pas encore été appelés ; la gloire n’a pas été
manifestée et ne leur a pas été communiquée encore, de sorte
que, jusqu’à présent, le monde n’a encore ni cru ni connu que le
Père a envoyé le Fils. Jusqu’à présent, le monde ne connaît pas
les saints (1 Jean 3). Mais ces demandes auront leur réponse,
quand le temps sera là. De même aussi pour la vue de la gloire.
Pour autant que nous avons pénétré dans la dispensation divine,
les désirs du Seigneur ont reçu leur réponse ; le reste attend son
heure.
Pour nous toutefois, bien-aimés, il est doux de trouver que le
Seigneur fonde ces glorieuses demandes en faveur des saints,
uniquement sur le fait qu’ils avaient reçu le témoignage du Fils
au sujet du Père, et qu’ils avaient vraiment cru à l’amour du Père.
« Je leur ai donné les paroles que tu m’as données, et ils les ont
reçues ; et ils ont vraiment connu que je suis sorti d’auprès de toi,
et ils ont cru que toi tu m’as envoyé ».
Qu’il est précieux de voir que nous sommes présentés devant
Dieu simplement comme croyant à son amour ! Avec quelle
certitude cela nous dit que le bon plaisir de Dieu est que nous le
connaissions dans son amour, comme le Père ; que nous le
connaissions selon les paroles de Celui qui est venu d’auprès de
lui ! C’est la joie et la liberté. En e et, ce n’est que d’avoir vu Dieu
en amour, d’avoir vu et entendu le Père en Jésus, qui fait de nous
sa famille. Ce ne sont pas les grâces qui nous parent, ni les
services que nous accomplissons, c’est uniquement que nous
connaissons le Père. Voilà ce qui distingue le saint d’avec le
monde, et lui donne, quoique ici-bas, sa position dans la
présence du Père. Ainsi que le Médiateur le dit au Père en parlant
de nous, c’est uniquement en ce que nous avons reçu sa parole,
reçu du Fils le témoignage d’amour qu’il a apporté du sein du
Père.
Ainsi l’Avocat divin accomplit son o ce devant le trône. La
gloire du Père, la sienne propre, celle de son peuple, à toutes il
est pourvu, et toutes sont assurées. Après qu’il a ainsi épanché
son cœur, il soumet « le monde », le grand ennemi, à l’attention
du Père juste. « Père juste ; — et le monde ne t’a pas connu ». Car le
monde venait de prouver qu’en e et il ne connaissait pas le Père,
qu’il haïssait Celui que le Père avait envoyé, et le Seigneur se
sépare du monde et en sépare aussi les siens. Il n’appelle pas le
jugement sur le monde ; il en parle comme d’une chose dont il
n’avait pas à s’occuper, étant notre Avocat ; il remet le monde à
l’attention du « Père juste », à qui le jugement appartient.
Le Seigneur présente le monde simplement comme ne
connaissant pas le Père. Il n’expose pas devant le trône les péchés
du monde ; il le mentionne comme ne connaissant pas le Père. De
même, en parlant de l’Assemblée, il ne met pas en avant ses
grâces et ses services, comme nous voyons, il dit simplement
qu’elle a connu le Père. Car, ainsi que la connaissance du Père fait
l’Église ce qu’elle est, c’est l’ignorance du Père qui fait le monde
ce qu’il est. Le monde refuse de connaître le Père de manière à se
réjouir en lui. Il veut se créer ses propres plaisirs et puiser à ses
propres ressources ; il veut tout, sauf les réjouissances de la
maison du Père (Luc 15). Le monde a été formé par Satan dans le
jardin d’Éden. C’est là que le serpent trompa la femme ; et
comme il fut écouté et qu’on lui parlait, il façonna le cœur de
l’homme à sa propre image. L’histoire et la nature de cette œuvre
mauvaise nous sont racontées dans le chapitre 3 de la Genèse.
L’amour de Dieu et les paroles de Dieu furent calomniés par
l’Ennemi ; et l’homme crut le mal et t Dieu menteur. La
convoitise de la chair, la convoitise des yeux, et l’orgueil de la vie
furent plantés dans l’âme comme des puissances dominantes, et
alors l’homme, ayant une conscience, eut peur de Dieu et l’évita.
Cela devint la condition de l’homme. L’homme et la femme
s’aperçurent qu’ils étaient nus, et se cachèrent parmi les arbres
du jardin quand ils entendirent la voix de Dieu. Puis ils
trouvèrent des excuses pour se justi er et accuser Dieu. « Le
serpent m’a séduite, et j’en ai mangé », dit Eve. « La femme que tu
m’as donnée pour être avec moi, elle, m’a donné de l’arbre, et j’en
ai mangé », dit Adam.
Tel fut l’homme alors, et tel a été le monde depuis. L’homme est
gouverné par ses convoitises ; en même temps il a peur de Dieu et
se tient loin ; et son cœur pense dans le secret, que tout ce mal
vient de Dieu.
C’est d’un monde pareil que, en esprit et par vocation, les saints
sont délivrés ; et le monde lui-même est abandonné au jugement.
« Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde ».
Le monde n’avait rien en Jésus. Quand le chef du monde vint, il
n’obtint du Seigneur que le témoignage qu’il aimait le Père, et
ferait comme le Père lui avait commandé. Et les saints ont quitté
le monde. À la voix du Fils, ils en sont sortis. L’amour du Père
envers eux leur a été annoncé, ils y ont cru, et ont marché à sa
bienfaisante clarté. C’est donc la foi au message d’amour que le
Fils nous a apporté du sein du Père, c’est cela précisément, qui
fait des saints ce qu’ils sont : une élection hors des régions
ténébreuses où le monde gît loin de Dieu, où l’esprit du monde a
son action. Et, comme nous l’avons déjà vu, c’est le refus
d’écouter ce message qui fait que le monde demeure toujours le
monde. « Père juste, le monde ne t’a pas connu » ; car les hommes
n’ont qu’à recevoir la parole de réconciliation de la part de Dieu,
à croire à son amour, manifesté dans le don de son Fils, et ils
prennent place dans la famille de Dieu, au nombre des élus
« rendus agréables dans le Bien-aimé ».
Ici se termine la troisième section de notre Évangile. Nous avons
vu Jésus, le Fils du Père, comme notre Avocat, accomplissant
sans relâche son service envers nous ; — et ensuite, le Fils du
Père, révélant le Père à ses enfants. Le Dieu béni avait pris le nom
d’Éternel dans ses relations avec Israël, et se l’était acquis par des
signes et des miracles, opérés en Égypte et dans la terre de
Canaan (Jérémie 32) ; maintenant il a pris un nom d’une grâce
plus riche, le nom de « Père ». Et ce nom, il l’établit dans la
personne et l’œuvre du Fils de son amour. Le Saint Esprit réalise
dans le cœur des enfants de Dieu la puissance de cette grâce.
Ce sont là tes voies, notre Dieu et Père ! mais combien peu nos
cœurs fermés savent te comprendre et jouir de Toi !
Cependant, avant d’entrer dans la dernière partie de notre
Évangile, je désire faire remarquer que les écrits de Jean mettent
devant nous quelque chose de spécialement personnel, soit en
Christ premièrement, soit aussi en nous, par suite du propos
divin. Nous rencontrons cela dès le début, dans cet Évangile. Le
monde n’a pas connu Celui qui l’avait créé ; Israël n’a pas reçu
Celui à qui il appartenait, mais « à tous ceux qui l’ont reçu, il leur
a donné le droit d’être enfants de Dieu ». Voilà ce que nous lisons
dans le premier chapitre. L’Évangile vient jusqu’à nous, pour
nous rencontrer dans notre place de perdition ; il s’adresse à
nous dans notre caractère de pécheurs, victimes du mensonge
du serpent ancien. Il ne s’adresse pas à nous comme nous
trouvant dans une condition exceptionnelle, mais comme nous
rencontrant là où la commune corruption de la nature nous a
conduits, dans ces « ténèbres », cet éloignement de Dieu, que
notre chute du commencement a amenés.
Quel caractère distinctif cela donne aux écrits de Jean ! Que nous
ouvrions l’Évangile ou les Épîtres, partout nous lisons que nous
devons avoir, et connaître que nous avons, chacun de nous,
notre place et notre intérêt devant le Dieu vivant. Et, en accord
avec cela, nous remarquons, dans la manière de faire du
Seigneur, quelque chose de particulier à cet Évangile, et qui fait
partie de cette personni cation marquée dont je veux parler.
Au début, pendant le ministère public de Jésus, les apôtres sont
tenus à quelque distance de lui ; puis après, dans les entrevues et
les discours du Seigneur avec eux, ils se trouvent avec lui dans
une grande intimité. Pendant son ministère public, Jésus est
remarquablement seul dans son travail, ainsi que je l’ai déjà fait
observer. Il n’appelle point les soixante-dix disciples, comme
dans les autres Évangiles, pour être ses compagnons dans son
ministère ; il est seul avec les pécheurs, réglant avec eux les
grands intérêts de leurs âmes, dans la puissance et la grâce du
Fils de Dieu. Il est doux de le remarquer. C’est une précieuse
pensée pour nous, pécheurs, de nous trouver seuls avec Jésus,
sans que des apôtres et des églises, des frères ou des ordonnances
aient à voir en ce qui doit décider de notre bonheur personnel
pour l’éternité. La fontaine de Samarie, où le Fils du Père
rencontre la pécheresse, fut pour elle un endroit aussi solitaire
que Luz l’avait été pour Jacob jadis ; mais comme Luz pour Jacob,
il devint Béthel aussi pour elle, la porte même du ciel.
Cependant, la distance où le Seigneur se tenait des apôtres, la
solitude du Fils de Dieu avec le pécheur, était l’e et de son amour
pour les pécheurs, et ne provenait d’aucun éloignement pour ses
disciples. Jésus aimait ses serviteurs et ses compagnons, et ne
songeait point à leur refuser une part dans son service et à ses
récompenses. Mais il devait s’occuper du pauvre pécheur, et ne
voulait pas le priver de la consolation de régler ses intérêts
éternels avec le Seigneur seul.
Ce ministère public prend n au chapitre 10. Le fruit de la grâce
ayant été scellé aux pécheurs, dans sa saison, Jésus quitte ce
service extérieur et s’occupe des siens dans l’intimité. Nous
voyons qu’il les rapproche de lui-même plus près que jamais,
aussi près qu’il le peut, aussi près que l’a ection pouvait le
souhaiter.
Après le départ de Judas (13), quand tout est ni entre Jésus et ce
qui l’entoure, et qu’il peut être seul avec ses disciples, comme il
l’a été avec les pécheurs, nous le trouvons avec eux dans
l’intimité la plus étroite et la plus précieuse. Il s’ouvre à eux,
comme dans le sein d’une famille, laissant s’épancher
l’abondance de son cœur. Il parle du Père, de la maison du Père,
de l’amour du Père, des secrets du Père, promettant que le
Consolateur rendrait ces choses e caces pour leurs âmes, et que
lui-même, bien qu’éloigné, se souviendrait d’eux et les servirait.
Quelle vision que celle qui passe devant nous, à mesure que nous
avançons dans cet Évangile ! Si la solitude du Fils de Dieu avec le
pécheur donnait à celui-ci de se sentir comme à la « porte des
cieux », l’intimité du Fils du Père avec ses élus, qu’est-elle pour les
saints, sinon le ciel même ?
L’évangile de Jean est, en e et, l’évangile des intimités du Fils de
Dieu, avec le pécheur d’abord, avec le disciple ensuite. Cette
pensée est précieuse au-delà de toute expression ; si seulement
nous avions des cœurs ouverts et tendres pour la recevoir ! Tout
est grâce ; et la grâce aime à déployer la diversité de ses voies et la
richesse de ses ressources. Que ne sommes-nous simples et
pleins de foi, et capables ainsi de rechercher de pareils secrets et
de semblables trésors !
Chapitre 18 à 21
J’ai suivi cet évangile dans l’ordre qui lui appartient, jusqu’à la
n du chapitre 17, le divisant jusqu’ici en trois sections
principales : la première, qui introduit le Seigneur Jésus Christ
comme le Fils de Dieu, l’Étranger venu du ciel, et montre sa
réception et son action dans le monde ; la seconde, qui expose ses
rapports et ses controverses avec Israël ; la troisième, qui le fait
voir au milieu de ses élus, les enseignant dans le mystère de sa
sacri cature céleste et de leur position d’enfants du Père. Il me
reste à considérer une quatrième section, qui nous parle de ce qui
a accompagné la mort et la résurrection du Seigneur. Puisse
l’entrée de ses paroles continuer de nous illuminer, et apporter à
nos âmes un parfum du Bien-aimé dont elles nous
entretiennent !
Mais pendant que nous nous occupons ainsi à découvrir l’ordre
de la Parole divine, et que nous sommes conduits à nous étonner
devant ses profondeurs et à admirer sa beauté, il faut nous
rappeler que c’est sa vérité que nous avons à considérer avant
tout. C’est lorsque la Parole vient à nous avec une « plénitude
d’assurance » qu’elle agit e cacement. Elle ne pro te pas si elle
n’est pas mêlée avec la foi. Son pouvoir, pour nous réjouir et
nous puri er, dépend de ce qu’elle est reçue comme la vérité ;
aussi, en découvrant et en savourant, dans la communion
mutuelle, les beautés, les profondeurs et les merveilles de la
Parole, il sera bon de nous arrêter quelquefois pour nous dire,
comme l’ange le disait à l’apôtre, étonné des visions magni ques
et des révélations étonnantes qu’il avait vues et entendues : « Ce
sont ici les véritables paroles de Dieu » (Apocalypse 19.9).
La partie de l’Écriture à laquelle nous sommes parvenus,
présente le Seigneur Jésus Christ dans ses sou rances.
Toutefois, ce n’est pas d’elles qu’il est préoccupé dans l’évangile
de Jean, où il semble ne pas être atteint par les accusations du
peuple et la réjection du monde. Aussi, remarquons-nous, à
l’approche de la fête de Pâque, bien que dans les autres Évangiles
il paraisse pénétré de ce qu’il est l’Agneau choisi pour le sacri ce,
et qu’il dise à ses disciples : « Vous savez que la Pâque est dans
deux jours, et le Fils de l’homme est livré pour être cruci é »
(Matthieu 26.2) — qu’il n’en est pas ainsi dans le récit de Jean.
Quand le moment est venu, il monte à Jérusalem, mais pour
aller s’asseoir en paix au milieu d’une famille élue (12) ; et toute la
suite est sur ce pied. Est-il seul avec ses disciples, on le voit au-
dessus des sou rances et du monde. Il ne leur parle pas des Juifs
qui le livreraient aux Gentils, et des Gentils qui le cruci eraient ;
il ne dit pas qu’il sera raillé et fouetté, et qu’on lui crachera au
visage. Tout cela est passé sous silence. Les choses que le Fils de
l’homme aurait à sou rir par les mains d’hommes iniques, ne
sont pas racontées. D’autre part, il regarde l’heure des ténèbres
comme déjà passée, et dès que nous le trouvons seul avec ses
élus, il prend sa place au-delà de cette heure (13). Gethsémané et
le Calvaire sont derrière lui, et il se voit parvenu au moment,
non du jardin et de la croix, mais de la montagne des Oliviers, le
moment de son ascension ; car notre Évangile dit : « Or Jésus,
sachant que son heure était venue pour passer de ce monde au
Père » ; et ces paroles montrent clairement qu’il n’était pas occupé
de ses sou rances, mais du ciel du Père qui était au delà. Ce n’est
pas le mémorial de sa mort, c’est celui de sa vie dans le ciel qu’il
déploie devant ses disciples, comme nous l’avons vu ; car, après le
souper, il lave leurs pieds. Et tous ses discours avec ses bien-
aimés, plus tard (14-16), ont ce même caractère. Tous supposent
que ces sou rances sont passées — qu’il a ni sa course — qu’il
s’est trouvé en face du chef du monde et qu’il l’a vaincu — qu’il
est demeuré dans l’amour du Père, et que tout est prêt pour qu’il
soit glori é. Les paroles qu’il leur dit supposent ces choses ainsi ;
et sur ce fondement il forti e les saints pour vaincre comme il a
vaincu. Au lieu de leur parler de ses sou rances, son but est de
les encourager dans les leurs. Il leur donne la paix, avec la
promesse d’un Consolateur et de la gloire qui viendrait après. Et
lorsque, comme poussé par l’état de leurs âmes, il leur dit qu’ils
allaient le laisser seul, c’est avec cette assurance : « Et je ne suis
pas seul, car le Père est avec moi ». De même en est-il lorsqu’il
sépare Judas des autres disciples ; nous lisons qu’il « fut troublé
dans son esprit » ; mais aussitôt que le traître est sorti, il se
retrouve dans sa grandeur, et il dit : « Maintenant le Fils de
l’homme est glori é, et Dieu est glori é en lui ». Ainsi, quand son
âme passe par l’angoisse ou la douleur, ce n’est que pour un
instant, et seulement pour lui découvrir une vue plus complète
de la gloire qui est au-delà.
La même chose encore, quand il descend dans les profondeurs
les plus sombres de son chemin solitaire. La force l’accompagne
jusqu’au bout, et la gloire est toujours devant lui ; de sorte que,
soit qu’il travaille, qu’il rende témoignage ou qu’il sou re, il
reste, dans l’évangile de Jean, à l’élévation qui est celle du Fils de
Dieu. Il poursuit sa marche dans la conscience de sa dignité ; il
prend la coupe de la main du Père, et laisse sa vie de lui-même.
Chapitres 18 et 19
Nous nous rappellerons qu’au chapitre 17, nous avons vu notre
Avocat dans le sanctuaire céleste, présentant ses requêtes ;
maintenant il descend de là, pour se trouver devant l’heure de la
puissance des ténèbres. Au chapitre 17, son cœur et ses regards
avaient été remplis de la gloire du Père, de la sienne propre, de
celle de l’Église ; et de ces choses, devant lui placées en esprit, au
chapitre 18, il s’avance pour venir endurer la croix.
Dans les autres évangiles, c’est après avoir été forti é par l’ange
en Gethsémané, qu’il rencontre la croix ; ici, nous n’avons pas ce
trait. Là, c’était le Fils de l’homme, anticipant sa dernière
angoisse : son âme était de toutes parts saisie de tristesse jusqu’à
la mort ; et le secours de Dieu lui fut porté par l’ange. Ici, le Fils
de Dieu descend, pour ainsi dire, du ciel vers la croix ; et son
passage, à travers toute cette heure de ténèbres, est accompli
dans la force du Fils de Dieu. Il ne cherche pas à être
accompagné. Ailleurs, nous le voyons prendre avec lui Pierre, et
Jacques, et Jean, dans l’espoir que leur sympathie les fera veiller
avec lui une heure ; cela ne se trouve pas ici ; il traverse seul ses
douleurs. Les disciples, à la vérité, sont avec lui dans le jardin,
mais il les sait là dépendants de sa protection, et non en état de
lui témoigner la sympathie désirée. « Si donc vous me cherchez,
laissez aller ceux-ci ». Le secours de l’ange et la sympathie
demandée aux disciples, tout cela est omis. Jésus descend de sa
place dans les hauts lieux comme le Fils de Dieu, pour se rendre
seul au Calvaire. Bien que son chemin d’alors le conduisît à la
croix, c’était toujours un chemin où la personne qui y marchait
n’était rien moins que le Fils de Dieu. L’isolement de l’Étranger
céleste est reconnu ici, comme il l’a été tout le long de cet
évangile.
Je désire ajouter une ré exion qui s’est présentée à moi et qui
m’a fort encouragé, c’est qu’il y a en Dieu une grandeur, dont le
sentiment devrait profondément pénétrer nos cœurs. Il n’y a pas
d’étroitesse en lui. Dans le Psaume 36, le psalmiste paraît être
occupé de cette pensée. Tout ce qu’il voit en Dieu, il le voit dans
sa grandeur et son excellence divines. La gratuité de l’Éternel
atteint jusqu’au ciel, sa délité jusqu’aux nues ; sa justice est
comme de hautes montagnes ; ses jugements sont un grand abîme ;
ses soins protecteurs sont si parfaits, que les animaux en sont les
objet aussi bien que les hommes ; sa tendresse est si grande, que les
ls des hommes se retirent sous l’ombre de ses ailes ; sa maison est
tellement remplie de tous les biens, que son peuple est
abondamment rassasié de sa graisse ; et les délices qu’il leur
réserve sont telles, qu’ils en sont abreuvés comme d’un euve.
Telles sont la grandeur et la muni cence de Dieu, non seulement
dans ce qu’il est en lui-même, mais dans ses voies et ses
dispensations à notre égard. C’est une vérité d’un grand prix ; et
nous devons juger nos péchés dans la conscience de cette
grandeur de Dieu. Le péché est excessivement pécheur. La
moindre souillure, la moindre tache sur la belle œuvre de Dieu
est quelque chose d’horrible pour l’œil de la foi qui apprécie
réellement la gloire de Dieu. Une petite ouverture, pratiquée
dans un mur, su t pour découvrir à un prophète les plus
grandes abominations (Ézéchiel 8) ; mais, comparées à
l’immensité de la grâce qui est en Dieu notre Sauveur, comment
apparaissent-elles ? Que devint l’horrible péché de la femme
adultère ? Où sont-ils, ceux dans lesquels la Samaritaine avait,
pour ainsi dire, vieilli ? On peut les chercher ; on ne les trouvera
pas. Ils disparaissent, en présence de la grâce qui vint tout
auprès répandre ses clartés. La grâce qui surabonde les a lavés
pour toujours. Dieu, qui enlève les îles comme un atome, qui a
mesuré les eaux dans le creux de sa main (Ésaïe 40.15, 12), a aussi
jeté nos péchés au loin, dans une terre inhabitée (Lévitique 16).
Ces pensées sont bien de nature à nous encourager. Notre Dieu a
voulu que nous le connussions dans la lumière de sa propre
grandeur. Laissez le péché apparaître dans sa nudité, la moindre
parcelle est un monstre ; approche la grâce, le péché n’existe
plus. Cette expression de grandeur divine se fait jour en Jésus,
dans l’évangile de Jean. Que nous voyions le Seigneur dans le
travail ou dans la sou rance, le ton et le maintien du Fils de Dieu
sont vus partout en lui et autour de lui.
Mais ceci en passant. — Nous venons de suivre le Seigneur au-
delà du torrent de Cédron, à cet endroit auquel bien des
souvenirs touchants et sacrés devaient se rattacher pour lui.
C’était là que David, fuyant de Jérusalem par crainte d’Absalom,
s’était arrêté avec Itthaï, son ami, et Tsadok, et l’arche. C’est au-
delà de ce torrent, et gravissant cette même montagne des
Oliviers, que le roi d’Israël était allé en pleurant, la tête couverte
et les pieds nus, pendant qu’Akhitophel, autrefois son conseiller,
le vendait (comme Judas) à ses ennemis (2 Samuel 15). Jésus se
rendait souvent dans ce lieu, et sans doute il se souvenait alors de
ces choses. Cependant, c’est du Fils de Dieu qu’il s’agit en ce
moment, et non du Fils de David — Le torrent est passé ; Jésus est
entré dans le jardin ; l’arche aussi est avec lui, et même plus que
l’arche, avec sa gloire et sa puissance, allait être manifesté. Le
Seigneur s’avance au-devant de la compagnie d’huissiers et de
soldats, et dit : « Qui cherchez-vous ? » leur parlant du haut du
repos du ciel, qui était le sien. Et c’est dans la puissance, aussi
bien que dans ce paisible état céleste, qu’il s’avance, car lorsqu’il
leur dit : « C’est moi ! » ils reculent et tombent par terre. Aucun
homme ne pouvait prendre sa vie. C’est lui, de fait, qui leur
indique leur proie, car ni ambeaux, ni lanternes n’auraient
su . Il disposait de toutes les stations du chemin. Il donne sa vie
lui-même. Ceux qui veulent se repaître de sa chair doivent
broncher et tomber. Ceux qui machinent son mal doivent être
repoussés « en arrière » et « confondus » (Psaume 35). Le feu est
prêt à consumer ce capitaine et sa cinquantaine (2 Rois 1). Si tel
avait été le bon plaisir du Fils de Dieu, l’ennemi serait resté
étendu par terre devant lui. Mais il était venu, non pour détruire
la vie des hommes, mais pour les sauver ; c’est pourquoi il
donnera sa vie. La gloire, qui aurait confondu toute la puissance
de l’adversaire, avait été entrevue cachée, comme le ambeau
des hommes de Gédéon, caché dans des cruches (Juges 7) ; et
Jésus veut la cacher encore.
C’est dans ce moment, on peut le penser, qu’en esprit il chanta le
Psaume 27. L’Éternel était sa lumière et son salut, de qui aurait-il
peur ? Il venait de contempler la gloire de Dieu dans son
sanctuaire, et, comme le Psaume l’exprime, son désir était
d’habiter dans la maison de l’Éternel tous les jours de sa vie.
C’était, il est vrai, un temps de détresse, mais, en esprit, sa tête
s’élevait au-dessus de ses ennemis ; et quelques heures encore, et
il sacri erait dans le tabernacle des sacri ces de cris de
réjouissance ; il chanterait et psalmodierait à l’Éternel.
Comme Fils de Dieu, il tint ferme dans cette heure, et il aurait
soutenu un millier d’heures semblables ; mais il voulait prendre
la coupe de la main de son Père et donner sa vie pour l’Église.
Cependant, ceux qui sont avec lui, lui sont en scandale par leur
obstination. Son royaume n’était pas de ce monde, c’est pourquoi
ses gens ne devaient pas combattre. Pierre a tiré son épée ; il
aurait volontiers transformé la scène en une simple lutte
d’hommes. Cela ne devait pas être. Il est vrai que le Fils de Dieu
aurait pu résister. Il aurait pu, encore une fois, être l’arche de
Dieu, devant laquelle tombait la puissance de l’ennemi ; mais
comment les Écritures seraient-elles accomplies ? Non. — Jésus
s’abandonne entre les mains de l’ennemi. La compagnie de
soldats, le chiliarque et les huissiers des Juifs se saisissent de
Jésus, le lient et l’emmènent.
Voilà jusqu’où en sont les choses pour le moment, quant au
Seigneur. Et en continuant à suivre ses traces, nous trouvons
toujours celles du Fils de Dieu, les traces du Seigneur du ciel. Que
nous l’entendions parler aux huissiers, au souverain
sacri cateur, à Pilate, c’est toujours le même ton de sainte
distance d’avec tout ce qui l’entoure. Ils peuvent le traiter comme
bon leur semble ; il y demeure étranger. Il ne s’inquiète pas de
leurs a aires ou de leurs préoccupations, dans ses réponses ; il
passe isolé au travers de tout. Ici, les lles de Jérusalem ne lui
témoignent pas leur pitié et ne reçoivent pas la sienne ; il n’y a
pas de brigand, attendant de partager cette heure avec lui.
Durant tout ce sombre chemin, il est seul. Pierre est trouvé dans
la voie des impies, se chau ant au milieu d’eux, comme un homme
qui n’a pas d’autres ressources que les leurs. Un autre disciple,
Jean lui-même, prend sa place, peut-être, comme étant connu du
souverain sacri cateur, et s’en prévaut. Tout cela, c’était
retomber dans ce qui n’est autre chose que la nature, et laisser le
Fils de Dieu seul ; — comme il le leur avait dit : « Vous me
laisserez seul ; et je ne suis pas seul, car le Père est avec moi ».
Et son chemin est sans tache, je n’ai pas besoin de le dire. Que
Dieu soit vrai et tout homme menteur. Jésus est sans reproche,
bien que tous à côté de lui fassent défaut. Il était « justi é en
esprit ». Il n’avait aucun pas à refaire, pas une parole à rétracter.
En toutes choses, il pouvait se justi er avec justice, et même
reprendre celui qui l’accusait : « Si j’ai mal parlé, rends
témoignage du mal ; mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-
tu ? » — Paul, qui se vit dans un cas semblable, reste bien en
arrière ; car il dut revenir sur ce qu’il avait dit : « Je ne savais pas,
frères, que ce fût le souverain sacri cateur » (Actes 23.5).
Des mains du souverain sacri cateur, le Seigneur passe dans
celles du gouverneur romain ; et ici s’ouvre une scène pleine de
sérieux avertissements pour nous, bien-aimés ; et qui, en même
temps, maintient dans son entier le caractère de cet Évangile.
Il est évident que, pendant tout ce qui se passe, Pilate cherchait à
apaiser le peuple, et à délivrer Jésus de la méchanceté des Juifs.
Dès le premier moment, il paraît avoir eu la conscience de
quelque chose d’extraordinaire chez le prisonnier qu’ils lui
avaient amené. Le silence de Jésus avait un tel caractère que le
gouverneur « s’en étonnait » (Marc 15). Quelles divines
attractions il devait y avoir dans chacun des moindres détails de
la vie de Jésus, dans chacun des sentiers où il marchait parmi les
hommes ! et quelle devait être, chez l’homme, la condition de
l’œil, de l’oreille et du cœur, pour ne pas savoir les discerner et
les reconnaître ! — La première impression, chez Pilate, était
forti ée par tout ce qui avait lieu à mesure que la scène se
déroulait. Le songe de sa femme, la haine trop évidente des Juifs
et, par-dessus tout, ce prisonnier innocent et juste (quoique dans
l’opprobre et la sou rance), qui maintenait toujours qu’il était le
Fils de Dieu, tout assaillait sa conscience. Hélas ! ces convictions
ne su saient pas ; le monde était si puissant dans le cœur de
Pilate ! Elles avaient beau élever leur voix à l’intérieur, la voix du
monde l’emportait ; et tout en étant convaincu, Pilate suivit le
chemin du monde. S’il avait pu, en même temps, conserver le
monde, il aurait volontiers garanti Jésus. Il t clairement
comprendre aux Juifs qu’il ne craignait nullement Jésus ; que ce
n’était pas l’homme qui pouvait l’alarmer au sujet des intérêts de
l’empereur, son maître. Mais ils insistèrent sur ce que Jésus
s’était fait roi, et que si lui, Pilate, le laissait aller, il ne pouvait
être ami de César. Et cela prévalut.
Combien ceci nous fait voir qu’il n’y a de sécurité pour l’âme que
dans la foi qui est victorieuse du monde ! Pilate ne demandait
pas, comme les Juifs, le sang de Jésus ; mais il fallait ne pas
compromettre la con ance de César. Les anciens d’Israël avaient
craint une fois que, s’ils laissaient faire Jésus, les Romains
viendraient ôter et leur lieu et leur nation ; et Pilate, maintenant,
craint de perdre la considération de ce même monde, dans la
personne de l’empereur romain. Et alors le monde unit Pilate et
les Juifs, dans l’acte de cruci er le Seigneur de gloire ; ainsi qu’il
est écrit : « En e et, dans cette ville, contre ton saint serviteur
Jésus, que tu as oint, se sont assemblés et Hérode et Ponce Pilate,
avec les nations et les peuples d’Israël » (Actes 4.27).
Pourtant, comme je l’ai fait observer, Pilate aurait voulu sauver
Jésus, s’il avait pu en même temps sauver sa réputation devant
César ; voilà pourquoi il rentre dans le prétoire et demande à
Jésus : « Toi, tu es le roi des Juifs ? » Car les Juifs, ayant conduit le
Seigneur devant lui, sous l’accusation de s’être fait roi (Luc 23),
Pilate calculait que, s’il pouvait amener Jésus à retirer ses
prétentions à la royauté, il pourrait à la fois le garantir et se
garantir lui-même. C’est dans cette intention qu’il paraît entrer
dans le prétoire alors. Mais le monde qui était dans le cœur de
Pilate ne connaissait pas Jésus. Le monde « ne l’a pas connu » (1
Jean 3) ; et Pilate allait trouver que le Chef du monde n’avait rien
en Jésus. Jésus lui répondit : « Dis-tu ceci de toi-même, ou
d’autres te l’ont-ils dit de moi ? » En s’exprimant ainsi, Jésus
mettait Pilate en demeure de déclarer si l’accusation, portée
contre lui et contre son titre à être roi des Juifs, procédait de
Pilate, comme protecteur des droits de l’empereur sur la Judée,
ou simplement de la haine des Juifs.
Dans la conjoncture présente, tout dépendait de cela ; et la
sagesse du Seigneur et son but en posant cette question, sont
manifestes. Si Pilate répliquait qu’il avait eu des craintes pour les
intérêts de Rome, Jésus en aurait aussitôt référé à tout le cours
de sa vie et de son ministère, pour établir, en ce qui concernait le
roi, que toute innocence avait été trouvée en lui, Jésus. Il avait
enseigné « à rendre à César ce qui était de César ». Quand il avait
su que la multitude allait venir l’enlever a n de le faire roi, il
s’était retiré sur la montagne, tout seul. Ce n’était pas avec Rome
qu’il avait de controverse. En venant en Judée, il y avait trouvé
César, et jamais il n’avait contesté son titre à être là ; au contraire,
il l’avait reconnu, et avait pris la place de la nation qui, par sa
désobéissance, avait l’image et la devise de César imprimées,
pour ainsi dire, sur son front. Il est vrai que c’était le mépris de la
majesté de Jéhovah qui avait frayé le chemin aux nations pour
entrer à Jérusalem ; mais, pour le moment, Jérusalem était la
demeure des nations, et le Seigneur n’avait rien à dire aux Juifs à
cause de cela. Le retour d’Israël à la foi et à la soumission à Dieu,
pouvait seul anéantir avec justice ce droit des nations. Le
Seigneur n’avait donc pas de débat avec Rome. Voilà ce que Jésus
aurait pu répondre à Pilate, si l’accusation était procédée de lui,
comme représentant du pouvoir romain. Mais tel n’était pas le
cas. Pilate répondit : « Suis-je Juif, moi ? Ta nation et les
principaux sacri cateurs t’ont livré à moi ; qu’as-tu fait ? »
Ces paroles de Pilate apportaient la preuve péremptoire de la
culpabilité d’Israël. Par la bouche de celui qui représentait alors
la puissance du monde, la chose était établie. Israël avait
désavoué son roi, et s’était vendu aux mains d’un autre. Pour
Jésus, tout était là dans ce moment. Cela le transportait d’un
coup au-delà de la terre, hors du monde. Israël l’avait rejeté, son
royaume n’était donc pas d’ici ; car Sion est le lieu où le Roi de
toute la terre doit avoir son siège et régner ; mais l’incrédulité de
la lle de Sion tenait son Roi éloigné.
Le Seigneur, par conséquent, en entendant ce témoignage des
lèvres du gouverneur romain, ne pouvait, comme le roi rejeté,
que reconnaître la perte actuelle de son trône. « Jésus répondit :
Mon royaume n’est pas de ce monde. Si mon royaume était de ce
monde, mes serviteurs auraient combattu, a n que je ne fusse
pas livré aux Juifs ; mais maintenant mon royaume n’est pas
d’ici ». Si Israël le rejetait, il n’avait pas d’armes pour lui faire la
guerre. Il n’avait pas à fouler son aire, car Israël était sa herse
pour fouler les montagnes (Ésaïe 41.15 ; Michée 4.13 ; Jérémie
11.20). Israël ne voulait pas de lui. C’est de la maison de Juda, et
d’elle seule, que le Seigneur fera son « cheval de gloire » au jour de
la bataille (Zacharie 10.3) ; et par l’incrédulité de Juda, il n’avait
rien en mains pour briser les éclairs de l’arc, le bouclier, l’épée, et
soutenir la bataille (Psaume 76). Son royaume ne pouvait pas être
« de ce monde » ; il ne pouvait pas être « d’ici » ; il n’avait pas de
gens qui pussent combattre, de manière à tenir contre ses
ennemis.
Cependant, la perte actuelle de son royaume n’annulait point les
droits du Seigneur ; et lui, tout en admettant cette perte, il le fait
dans des termes qui con rment pleinement son titre et reçoivent
de Pilate cette réponse : « Tu es donc roi ? » paroles qui
témoignent de la belle confession que t alors le Seigneur (1
Timothée 6). Or Pilate n’aurait eu aucun motif de craindre le
déplaisir de son maître, ou le tumulte du peuple ; il aurait
librement pu écouter son désir et délivrer son prisonnier, si le
Seigneur avait voulu modi er la parole qui était sortie de sa
bouche, et retirer ses droits à être roi. Mais Jésus répondit : « Tu
le dis que moi je suis roi ». Il ne pouvait pas renier son titre. Ce
fut là sa « belle confession devant Ponce Pilate ». Quoique les
siens ne le reçussent pas, il était néanmoins à eux ; quoique le
monde ne le connût pas, il était néanmoins le créateur du
monde ; quoique les cultivateurs le jetassent dehors, il était
néanmoins le maître de la vigne. Il avait été oint pour le trône de
Sion, lors même que ses concitoyens disaient ne pas vouloir qu’il
régnât sur eux ; et, par sa « belle confession », il doit pleinement
rati er ses droits à la royauté, et les maintenir devant toute la
puissance du monde. Lors même qu’elle s’arme contre lui tout
entière, cette confession doit être faite. Hérode et tout Jérusalem
avaient été troublés en apprenant que le Roi des Juifs était né, et
avaient cherché à tuer l’enfant ; mais la terre entière serait-elle
dans l’émoi, et armerait-elle sa puissance contre Jésus, il doit
déclarer le conseil de Dieu. « J’ai oint mon roi sur Sion, la
montagne de ma sainteté » (Psaume 2). Il doit témoigner de son
droit, quoique dans la présence de l’usurpateur, et à l’heure
même de son pouvoir.
Là-dessus d’autres révélations nous sont données. La « belle
confession » ayant été faite, le Seigneur peut dévoiler d’autres
portions des conseils divins. Après avoir clairement constaté, à
la face du monde, son titre au royaume, il peut rendre
témoignage de son caractère et de son ministère actuels : « Moi, je
suis né pour ceci, et c’est pour ceci que je suis venu dans le
monde, a n de rendre témoignage à la vérité ». L’incrédulité du
peuple mettait obstacle, pour un temps, à ce qu’il possédât son
royaume ; mais il fait voir que le dessein de Dieu n’était pas
manqué à cause de cela, et que lui, Jésus, était venu dans le
monde pour une autre œuvre encore que celle de prendre
possession de son trône en Sion. Il était venu pour rendre
témoignage à la vérité ; et l’évangile de Jean, spécialement,
présente le Seigneur dans ce ministère, ainsi qu’il est dit au
commencement : « Le Fils unique, qui est dans le sein du Père,
lui, l’a fait connaître ». Il était venu dans le monde, a n de
pouvoir dire : « Moi, je suis le chemin, et la vérité, et la vie ». Il
était venu pour nous donner une intelligence, a n que nous
connaissions le Véritable (1 Jean 5). Il avait manifesté le nom du
Père à ceux qui lui avaient été donnés du monde, et c’était une
même chose que de rendre témoignage à la vérité. Quiconque
était de la vérité, comme il le dit à Pilate, avait écouté sa voix ; ses
brebis l’avaient écoutée, tandis que les autres ne l’avaient pas
écoutée, parce qu’ils n’étaient pas de ses brebis. Celui qui était de
Dieu l’avait entendue ; et d’autres ne l’avaient pas entendue,
parce qu’ils n’étaient pas de Dieu.
C’était là le service actuel du Seigneur, pendant qu’Israël était
dans l’incrédulité. Bien que roi des Juifs, et comme tel roi de
toute la terre, il ne pouvait pas prendre possession de son
royaume, son peuple ayant désavoué ses droits. Il doit donc
s’occuper d’un autre ministère, et c’est le caractère de ce
ministère qu’il révèle à Pilate, et que cet évangile tout entier met
devant nous.
La « belle confession » devant Pilate continue à diriger les pensées
du Seigneur dans le courant de l’évangile de Jean. S’il consent à
rendre compte de lui-même, c’est toujours dans la conscience de
son ministère, le plus élevé et le plus saint de tous, ministère
divin, puis-je dire ; ministère que nul ne pouvait accomplir que le
Fils unique du Père, Celui qui était dans le sein du Père, plein de
grâce et de vérité.
Cela est frappant. En suivant Jésus à la croix, nous trouvons
toujours le Fils de Dieu. Nous voyons son titre au royaume
con rmé en toute autorité. L’ennemi aurait voulu l’e acer, mais
il n’y réussit pas. Pilate, qui avait d’abord méprisé les droits de
Jésus, disant aux Juifs : « Voici votre roi ! » — maintenant veut
qu’ils soient publiés dans tous les langages de la terre ; et les Juifs
ne peuvent pas, comme précédemment, le faire changer d’avis.
La croix devient l’étendard du Seigneur, et l’Éternel y peindra le
blason de sa dignité royale, quelle que soit l’opposition de la
terre.
L’évangile de Jean est le seul qui nous fasse connaître le
pourparler entre Pilate et les Juifs, au sujet de l’inscription sur la
croix ; car cela se rapporte à la gloire de Jésus. Seul aussi, il
mentionne la tunique sans couture que les soldats ne voulaient
pas déchirer ; — circonstance en elle-même peu importante,
mais qui contribue à ne pas laisser perdre de vue la dignité sainte
de Celui qui passait alors par l’heure des ténèbres.
C’est aussi ici, que le Seigneur met de côté ses a ections humaines.
Il voit près de la croix sa mère et le disciple qu’il aimait, mais
c’est pour les recommander l’un à l’autre, renonçant ainsi à la
place qu’il avait une fois occupée auprès d’eux. Il est doux
d’observer avec quelle délité il reconnaît cette a ection,
jusqu’au dernier moment qu’il peut y consacrer ; aucunes
sou rances personnelles (bien qu’elles fussent cruelles, nous le
savons) ne peuvent faire qu’il l’oublie. Il ne devait pas la
connaître toujours ; car dans la résurrection, on ne se marie ni
on n’est donné en mariage. Désormais, eux aussi ne le
connaîtraient plus « selon la chair ». Il doit les former à le
connaître selon d’autres pensées, car bientôt ils seront unis à lui
comme « un seul esprit ». Telles sont ses voies précieuses. S’il
s’éloigne de nous, comme ne nous connaissant plus selon la
chair, c’est a n que nous lui soyons unis par des a ections plus
étroites et des intérêts plus intimes.
Et si nous regardons au-delà des circonstances de cette heure, si
nous considérons l’état d’esprit dans lequel était le Seigneur sur
la croix, nous discernerons encore le Fils de Dieu. Il est vrai qu’il
eut soif ; — qu’il goûta la mort ; — il connut la sécheresse de ce
pays où le Dieu vivant n’est pas ; — mais la conscience qu’il en
avait est exprimée du ton qui lui appartient. Il ne fait pas
entendre le cri : « Mon Dieu ! mon Dieu ! pourquoi m’as-tu
abandonné ? » Ces paroles nous sont données à leur propre place ;
ici elles ne sont pas mentionnées. Il n’y a pas d’épouvantement
d’esprit, pas de frayeur, de grande obscurité pendant trois
heures. Jésus ne se recommande pas au Père ; il dit seulement :
« J’ai soif » ; et après avoir éprouvé et traversé cette soif, il
constate le plein accomplissement de toutes choses en disant :
« C’est accompli ». Il ne remet pas son œuvre à l’approbation de
Dieu, il la scelle de son propre sceau, attestant qu’elle est
complète et lui donnant la sanction su sante de sa propre
approbation. Et quand il peut ainsi reconnaître que tout est
achevé, il laisse sa vie de lui-même.
Ce sont de remarquables témoignages de l’esprit dans lequel
Jésus traversait ces heures ; elles ont pris n maintenant. Le Fils
de Dieu était consommé comme l’auteur du salut éternel pour
tous ceux qui lui obéissent ; et la source qui puri e du péché et de
la souillure est ouverte. L’eau et le sang coulèrent pour rendre
témoignage que Dieu nous a donné la vie éternelle, et cette vie
est dans son Fils (1 Jean 5). Nous ne trouvons pas ici la confession
du centurion : « Certainement celui-ci était Fils de Dieu »
(Matthieu 27), ni la femme de Pilate ; ni l’aveu de Judas,
convaincu d’avoir trahi Jésus et lui rendant témoignage. Jésus
ne reçoit pas ici témoignage des hommes, mais de Dieu. L’eau et
le sang sont le témoignage que Dieu rend à son Fils, et à la vie
que les pécheurs peuvent trouver en lui. — C’est le péché qui
perça le côté de Jésus. L’acte du soldat était le stigmate de la
haine de l’homme ; c’était le coup de dépit donné par l’ennemi
vaincu, après la bataille, disant hautement l’inimitié profonde
qu’il y a dans le cœur de l’homme contre Dieu et contre son
Christ. Mais la richesse de cette grâce qui y a pourvu et a
surabondé, ressort d’autant plus ; car l’amour de Dieu a répondu
à cette inimitié.
La pointe de la lance du soldat toucha le sang. La source est ouverte
qui e ace le péché : le sang et l’eau sortent du côté percé du Fils
de Dieu. Le jour d’expiation était réellement venu ; l’eau de
puri cation, les cendres de la génisse rousse étaient maintenant
répandues. Là était l’agneau qu’Abel avait o ert ; et le sang que
Noé avait versé et qui donna un libre cours à la pure grâce du
cœur de Dieu envers les pécheurs. C’était le bélier de Morija, et le
sang qui coulait journellement autour de l’autel d’airain, dans le
tabernacle. C’était le sang qui est l’unique rançon des
innombrables milliers de sauvés qui sont devant le trône de
Dieu.
Cependant le corps du Seigneur, bien que percé pour être la
source du sang et de l’eau qui nous sauvent, ne doit pas être
rompu. L’Agneau de pâque sera égorgé, mais pas un de ses os ne
doit être brisé. Il accomplira tout le propos de l’amour divin, en
garantissant les premiers-nés de la main du destructeur ; mais
passé cette limite, il est sacré ; nulle main profane ne doit le
toucher. Jésus devait pouvoir dire en louant l’Éternel : « Tous
mes os diront : Éternel ! qui est comme toi, qui délivres l’a igé de
celui qui est plus fort que lui, et l’a igé et le pauvre de celui qui
les pille ? » (Psaume 35.10).
Ainsi en fut-il du Seigneur pendant qu’il était sur la croix. Dans
chaque détail nous discernons le Fils de Dieu ; et si nous
l’accompagnons à la tombe, nous voyons encore le Fils de Dieu. Il
n’est pas mis au rang des transgresseurs ni avec les méchants
dans sa mort. Son sépulcre est parmi les riches. Deux honorables
ls d’Israël viennent le reconnaître et prennent son corps, qu’ils
entourent de leurs aromates et de leurs soins.
Il y a quelque chose à remarquer ici. Quand le corps de Jésus fut
percé, ce n’est pas seulement pour qu’il y eût les témoins de
Dieu : le sang et l’eau ; mais pour que l’occasion fût donnée à
l’accomplissement de ce qui est écrit : « Ils regarderont vers Celui
qu’ils ont percé » (Zacharie 12). Et cette parole, qui annonce la
repentance d’Israël au dernier jour, introduit l’acte de Joseph et
de Nicodème, et fait d’eux les représentants du peuple repentant.
Ils arrivent les derniers dans l’ordre de la foi. E rayés de la nation
incrédule et des foudres de la synagogue, ils n’avaient pas
persévéré avec le Seigneur dans ses tentations, et n’avaient été
ses disciples qu’en secret. Ils étaient lents de cœur. À la n
cependant, ils reconnaissent le Seigneur, et sont amenés à
regarder vers Celui qu’ils ont percé. Ils ôtent de la croix son
corps, que la lance du soldat venait d’injurier ; et, en le
descendant du bois, leurs yeux ne peuvent éviter de voir ce corps
percé, et même on ose dire qu’ils ont mené deuil, car déjà leurs
cœurs avaient été adoucis, et attirés vers le Cruci é. Il en sera de
même d’Israël. Eux aussi viennent les derniers dans l’ordre de la
foi, et sont lents de cœur ; mais à la n ils regarderont vers Celui
qu’ils ont percé et se lamenteront sur lui, comme on se lamente
sur un ls unique (Zacharie 12.10).
Il en était ainsi de Joseph et de Nicodème, et il en sera de même
plus tard des habitants de Jérusalem. Les deux Israélites, comme
de vrais enfants d’Abraham, réclament le corps du Seigneur, et,
dans la foi du patriarche, ils le consacrent en le plaçant dans un
sépulcre neuf (Genèse 23.19) ; eux, vrais sujets du roi d’Israël, lui
rendent les honneurs dus à un ls de David (2 Chroniques 16.14)
Ils le couvrent en profusion d’aromates précieux, et le mettent
dans le jardin, dans un sépulcre net, sur lequel l’odeur de la mort
n’avait jamais passé.
Et, pour le moment, toutes choses sont terminées ; dans le second
jardin, pour l’appeler ainsi, le second Homme est gisant dans la
mort. Dans le premier, le premier homme avait été placé, ayant
accès à l’arbre de vie ; mais dans l’égarement de son chemin, il
choisit la mort. Ici, dans le second, la mort, peine de cet
égarement, est subie : Jésus, sans avoir touché à l’arbre de la
connaissance, goûte la mort. Dans le premier jardin se trouvait
tout arbre désirable à la vue et bon à manger ; ici, on n’aperçoit
que le sépulcre de Jésus. C’est là, pour ce qui concernait
l’homme, où le péché de l’homme a abouti. Mais attendons. À
travers ceci, le Fils de l’homme deviendra bientôt la mort de la
mort, la destruction de l’enfer, pour faire luire la vie et
l’incorruptibilité, et planter à nouveau dans le jardin l’arbre de
vie pour l’homme. Que le troisième jour se lève, et le jardin,
témoin de Jésus dans la mort, verra le Fils de l’homme ressuscité
et triomphant, dans une vie victorieuse pour des pécheurs.
Chapitre 20
Aussi, dès le début de ce chapitre, trouvons-nous les choses ainsi.
Jésus est ressuscité ; il a vaincu par la mort celui qui avait le
pouvoir de la mort.
Remarquons avec quelle puissance l’Esprit de Dieu, au travers de
toutes les Écritures, nous dévoile les mystères de la vie et de la
mort. Il voudrait pénétrer nos âmes du sentiment que nous
avons perdu la vie, et, pour autant qu’il dépend de nous, que
nous l’avons perdue irrévocablement ; mais que, en christ, nous
l’avons recouvrée, et en lui, recouvrée d’une manière certaine et
pour toujours. Dieu est « le Dieu vivant », et il agit comme tel
dans cette scène de mort. Il y est descendu comme le Dieu
vivant ; et comment aurait-il pu venir d’une autre manière ?
Assurément nous pouvons dire, à la gloire de son Nom, que s’il
n’est pas venu dans ce caractère, il n’est pas venu du tout. Le
triomphe du Dieu vivant dans ce lieu de la mort, c’est la
résurrection. Celle-ci est-elle niée, Dieu n’est pas connu, et on
nie ainsi que le Dieu vivant soit venu et intervenu dans la
condition de ce monde, retenu sous le pouvoir de la mort et
perdu.
Il est précieux de le saisir ; et pourtant c’est une vérité à la fois
simple et assurée. Le Dieu vivant, à part dans sa gloire et dans les
ressources qui appartiennent à sa propre nature, a opéré en
dehors du monde, et au-dessus de la scène dans laquelle le
monde est enveloppé par la mort. Si sa créature, revêtue de la
dignité la plus haute, établie par lui sur les œuvres de ses mains,
a été in dèle et l’a, pour ainsi dire, déçu, se révoltant contre lui et
introduisant la mort, Dieu (il est doux de le dire) a regardé à lui-
même et a compté sur lui seul. Dans ses propres ressources et les
richesses par lui fournies, il a trouvé le remède. Et c’est dans sa
victoire comme le Dieu vivant, dans la résurrection, que se
concentrent les inépuisables ressources de la vie, en dépit des
conquêtes du péché et de la mort. Que la mort apparaisse, que le
jugement du péché soit sur le point d’être exécuté, il a été pourvu
par Dieu d’une expiation pour le péché — et le péché est la racine
de la mort — et il a tiré la vie de dessous le juste jugement qui
avait son e et jusqu’à la mort ; de quoi Jésus ressuscité est le
sceau pour nous.
C’était le troisième jour, le jour qui avait été annoncé — le jour
auquel Abraham jadis avait reçu son ls comme d’entre les morts
— le jour du rétablissement promis à Israël (Osée 6) — le jour
aussi auquel Jonas s’était retrouvé sur la terre à sec.
Cependant, les disciples ne connaissent pas encore le Seigneur
en résurrection. Ils ne le connaissent que « selon la chair » ; et
nous voyons Marie de Magdala déjà au sépulcre le matin de
bonne heure, cherchant le corps du Seigneur ; et Pierre et son
compagnon accourent peu d’instants après dans la même
intention. Mais ce n’est pas l’intelligence de la foi qui les amène.
À leur arrivée, ils voient, non pas Celui qu’ils cherchent, mais les
trophées de sa victoire sur le pouvoir de la mort. Ils contemplent
les portes d’airain et les barres de fer mises en pièces. Les linges,
et le suaire qui avait enveloppé la tête du Seigneur comme s’il
était le captif de la mort, sont les dépouilles du vaincu sous la
main du vainqueur. Les armes de l’homme fort sont exposées en
spectacle dans sa propre demeure ; proclamant hautement que
Celui qui est le vainqueur de la mort et de l’enfer avait été là et
avait fait son œuvre. Malgré tout cela cependant, les disciples ne
comprennent pas ; ils ne connaissent pas encore l’Écriture qu’il
devait ressusciter d’entre les morts, et ils s’en retournent chez
eux.
Mais Marie ne s’éloigne pas de cette place aimée ; elle refuse
d’être consolée parce que son Seigneur n’était plus. Volontiers
elle aurait pris un sac et l’aurait étendu pour elle sur le roc,
comme avait fait une autre femme (2 Samuel 21), si elle pouvait
trouver le corps de Jésus pour le garder et veiller sur lui. Elle
pleurait et, se baissant dans le sépulcre, elle vit les anges. Mais
que lui importaient les anges ? Leur vue ne l’épouvante pas
comme les autres femmes (Marc 16) ; elle était trop remplie
d’autres pensées pour éprouver de l’e roi. Sans doute les anges
étaient pleins de majesté et d’un aspect céleste ; ils étaient vêtus
de blanc et assis, l’un à la tête et l’autre aux pieds, là où le corps
de Jésus avait été couché. Mais qu’était pour elle toute cette
splendeur ? Elle ne cherchait et ne désirait que le corps sans vie
du Seigneur, et elle se détourne de ces êtres glorieux pour le
chercher encore. Apercevant alors le jardinier, comme elle le
suppose, elle lui dit : « Seigneur, si toi tu l’as emporté, dis-moi où
tu l’as mis, et moi je l’ôterai ». Elle dit : « Si toi tu l’as emporté »,
sans nommer Jésus, car, attachée comme elle l’est au Seigneur,
elle croit que tous doivent être occupés de lui autant qu’elle l’est
elle-même.
Et c’était peut-être un amour auquel se mêlait une a ection
ignorante, mais c’était pour Jésus ; et plût à Dieu, chers amis,
qu’un peu de ces sentiments fût répandu dans nos cœurs !
L’a ection de Marie de Magdala s’attachait à un digne objet, tout
en laissant percer des pensées humaines ; et Celui à qui elle a
a aire, fera, selon sa bonté et sa grâce accoutumées, qu’elle en
trouvera le fruit. À celle qui avait, il fut « donné davantage ». Elle
avait dûment appris à connaître Jésus « selon la chair ». En cela
elle avait été la plus dèle ; et maintenant, le Seigneur veut
l’amener à une connaissance de lui plus étendue et meilleure. Il
veut la conduire dans des régions plus élevées que celles où ses
pensées la retiennent : « à la montagne de la myrrhe et à la colline
de l’encens » (Cantique 4.6).
A n de le faire avec toute douceur, Jésus répond d’abord à
l’a ection humaine de Marie et, de sa voix bien connue, il lui fait
entendre encore une fois son nom, à elle. C’était bien là la note
qui répondait à tout ce qui était dans son cœur, la seule pour
laquelle il y avait de l’écho dans l’âme de Marie. Si Jésus lui était
apparu dans sa gloire céleste, il serait resté un étranger pour elle,
car jusqu’à ce moment elle ne le connaissait que comme Jésus.
Toutefois, c’est la dernière fois qu’elle doit le connaître « selon la
chair », car il est ressuscité d’entre les morts, et il va monter vers
son Père dans le ciel ; la terre ne doit plus être le lieu de leur
communion. « Ne me touche pas », lui dit Jésus, « car je ne suis
pas encore monté vers mon Père ».
Est-il besoin de faire remarquer combien ceci est en accord avec
l’évangile de Jean ? Dans celui de Matthieu, nous voyons les
femmes, en revenant du sépulcre, rencontrer le Seigneur, et il
leur permet de saisir ses pieds et de lui rendre hommage, tandis
qu’ici il dit à Marie : « Ne me touche pas ». C’est que l’évangile de
Jean nous montre le Seigneur au sein de la famille céleste, et non
dans son royaume d’Israël et sa gloire terrestre. La résurrection,
il est vrai, lui garantit cette gloire et ce royaume (Actes 13) ; mais
elle est aussi la condition de vie pour les lieux célestes, et par
conséquent le premier pas de ce côté ; et c’est de quoi notre
Évangile s’occupe.
Marie est donc la première à être instruite de ces voies plus
étendues de la grâce et de l’amour du Seigneur, et elle devient
auprès des frères l’heureuse messagère de ces mêmes bonnes
nouvelles du pays éloigné. Jésus lui dit : « Va vers mes frères, et
dis-leur : Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu
et votre Dieu ».
Marie, ainsi honorée, va porter aux frères le message du
Seigneur ; et lui-même s’apprête à aller à eux avec une
bénédiction qui dépasse tout ce qu’ils avaient connu jusqu’à
présent. Les nouvelles apportées par Marie paraissent, en e et,
les avoir préparés ; car lorsque le Seigneur vient à eux, le soir de
ce même jour, ils ne sont pas e rayés et incrédules comme on les
voit dans l’évangile de Luc ; mais semblent être dans
l’expectative. Ils ne sont plus dispersés comme auparavant ; ils
sont ensemble réunis, avec la famille de Dieu, et le Premier né
entre, chargé du fruit de son saint labeur pour eux.
C’était en vérité un rassemblement, et la présence de Jésus ; une
visite du Premier-né à la famille du Père céleste ; dans une sphère
qui se trouvait au-delà de la mort et en dehors du monde. Et tel
est en réalité le lieu de la réunion promise avec le Seigneur. Ceux
qui, en esprit, ont leur demeure ici-bas, ne le rencontrent jamais,
car il est le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu des
étrangers et des voyageurs. Le monde est un domaine souillé, et
nous devons nous trouver avec le Seigneur dans la résurrection,
dans le royaume qui n’est pas du monde.
Il en était ainsi du Seigneur et de ses frères. Pour la première fois
il est véritablement assemblé avec eux, à la place désignée, et il
est assemblé avec eux comme avec ses propres frères. C’est alors
qu’il commence à accomplir ses vœux. Il les avait formés à la
croix (Psaume 22). Premièrement, il déclarerait le nom de son
Père à ses frères ; secondement, il le louerait au milieu de
l’assemblée. Il commençait par l’accomplissement du premier de
ces vœux ; et il continue pendant toute la durée de la
dispensation actuelle, révélant à nos cœurs le nom du Père par le
Saint Esprit. Le second, il l’accomplira quand l’assemblée de tous
les frères sera réunie, et qu’il conduira leurs chants dans la joie
sans mélange et sans n de la résurrection.
La vie promise est aussi communiquée. « Encore un peu de
temps, et le monde ne me verra plus ; mais vous, vous me verrez ;
parce que moi je vis, vous aussi vous vivrez ». Le Fils de Dieu, qui
a la vie en lui-même, l’apporte à ses saints. Il sou e en eux,
comme autrefois il a sou é dans les narines d’Adam (Genèse 2),
mais cette fois, c’est le sou e du second Adam, l’esprit vivi ant,
qui communique une vie recouvrée du pouvoir de la mort, et par
conséquent une vie au-delà de son atteinte. Les frères
apprennent que Christ était dans le Père, et eux en lui, et lui en
eux. Ils connaissent la pleine paix de la croix, en voyant Jésus,
ses mains et son côté percés. Leur douleur est transformée en
joie, car « ils se réjouirent quand ils virent le Seigneur ». Lui se
révélait à eux autrement qu’il ne s’était révélé au monde. Celui-ci
n’était point admis dans cette petite entrevue ; et les disciples,
haïs du monde, sont réunis à huis clos, là où il convenait au
Seigneur de les rencontrer pour se manifester à eux, comme il le
leur avait dit : « Celui qui m’aime, sera aimé de mon Père ; et moi
je l’aimerai, et je me manifesterai à lui » (14.21). Ainsi ils auraient
de la tribulation dans le monde, mais en lui ils avaient la paix.
Tout ceci est donné aux disciples, dans cette précieuse visite du
« premier-né d’entre les morts » à ses frères, quand il leur
communique la bénédiction qui est à eux comme enfants ; et
cette petite entrevue devient ainsi un exemple de la communion
dont nous, nous jouissons dans la dispensation où nous sommes.
La communion avec Christ ne change rien à notre condition
dans le monde, ni n’allège les circonstances de la vie ; elle nous
laisse dans le lieu de l’épreuve. Nous sommes heureux en lui,
dans la pleine conscience de sa présence et de sa faveur.
Comme les disciples ici, nous apprenons à connaître notre unité
avec Jésus ; et par l’adoption et par la communion avec le Père,
nous possédons la paix stable que donnent les mains et le côté
percés de Jésus. Nous sommes joyeux à cause de Celui qui est
ressuscité d’entre les morts ; et la vie dans l’Esprit — la vie du
Seigneur ressuscité — nous est donnée. Ainsi que nous avons vu
l’armure de l’ennemi vaincu, jonchant au loin le champ de
bataille, nous voyons ici le fruit de la victoire apporté à la
maison, pour réjouir et a ermir la famille du vainqueur. Mais
plusieurs d’entre nous connaissent bien pauvrement ces choses !
Ce fruit de la victoire doit être porté en saint triomphe dans le
monde entier. « Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous
envoie » ; telles sont les paroles du Seigneur à ses frères. Lui-
même était venu du Père avec un message, non de jugement,
mais de grâce ; et c’est d’une mission de la même grâce que les
frères sont chargés. Envoyés par le Seigneur de vie et de paix,
leur ministère met à l’épreuve toute âme vivante. Le message
qu’ils apportent vient de la part du Fils du Père ; c’est un message
de paix et de vie, garanti par lui-même et en lui-même. La parole
qui a dit : « Celui qui a le Fils a la vie, celui qui n’a pas le Fils de
Dieu n’a pas la vie » (1 Jean 5.12), le dit encore ; et pour mettre en
évidence qui a le Fils ou qui ne l’a pas, le Seigneur ajoute, faisant
de ses témoins comme la pierre de touche : « À quiconque vous
remettrez les péchés, il sont remis ; et à quiconque vous les
retiendrez, ils sont retenus ».
Telle fut la première entrevue du Seigneur avec ses disciples
après sa résurrection. Elle place devant nous les saints comme
les ls du Père, ainsi que leur ministère comme tels ; et elle nous
a donné les prémices de cette moisson par l’Esprit Saint, qui
depuis lors a continué dans la dispensation actuelle.
Bien que cela me détourne un peu de mon sujet, je ne puis éviter
de remarquer que le ministère, con é par le Seigneur à ses
disciples, après qu’il fut ressuscité d’entre les morts, prend dans
chacun des évangiles un caractère di érent. Et comme chaque
évangile a un but distinct, en vue duquel les récits sont choisis et
rapportés, les formes diverses sous lesquelles le Seigneur remet
le ministère, doivent être comprises et interprétées, selon le
caractère spécial de l’évangile lui-même.
Dans l’évangile de Matthieu, le message est ainsi formulé : « allez
donc, et faites disciples toutes les nations, les baptisant pour le nom
du Père et du Fils et du Saint Esprit, leur enseignant à garder toutes
les choses que je vous ai commandées ». Or ce message était
exclusivement donné aux apôtres, qui avaient déjà été consacrés
par le Seigneur et associés à lui, le serviteur de la circoncision
(Romains 15.8). Ils sont considérés comme étant à Jérusalem, et
comme partant de là, pour rendre disciples toutes les nations, et
les maintenir dans l’observance des commandements et des
ordonnances du Seigneur. Car le but de l’évangile de Matthieu
est de montrer le Seigneur dans sa relation avec les Juifs comme
l’espérance d’Israël, peuple élu autour duquel devaient se
rassembler tous les autres peuples ; et en accord avec ceci, la
conversion des nations et l’arrangement du monde entier autour
de Jérusalem comme centre de culte, sont supposés. Un corps de
nations restaurées et soumises, se réjouissant avec Israël, sera
bientôt manifesté, et c’est là ce que le Seigneur ressuscité a
devant les yeux dans l’évangile de Matthieu, lorsqu’il con e le
ministère à ses apôtres.
Dans l’évangile de Marc, la perspective de la conversion des
nations est passablement modi ée. Voici les termes du message :
« Allez dans tout le monde, et prêchez l’évangile à toute la création.
Celui qui aura cru et qui aura été baptisé, sera sauvé ; et celui qui
n’aura pas cru, sera condamné ». Il n’est pas parlé de faire disciples
les nations, mais d’un témoignage universellement rendu et
partiellement accepté. Car Marc présente le Seigneur dans le
service, et le cas est prévu auquel quelques uns recevraient la
parole et d’autres ne la recevraient pas ; parce que tels sont les
résultats qui ont accompagné tout ministère, comme il est dit
quelque part : « Et les uns furent persuadés par les choses qu’il
disait ; et les autres ne croyaient pas » (Actes 28.24).
Dans l’évangile de Luc, le Seigneur, après avoir expliqué Moïse et
tous les prophètes et avoir ouvert l’intelligence des disciples
pour les comprendre, leur délivre le ministère en ces mots : « il
est ainsi écrit, et ainsi il fallait que le Christ sou rît, et qu’il
ressuscitât d’entre les morts le troisième jour, et que la repentance et
la rémission des péchés fussent prêchées en son nom à toutes les
nations, en commençant par Jérusalem. Et vous, vous êtes témoins
de ces choses ; et voici, moi, j’envoie sur vous la promesse de mon
Père. Mais vous, demeurez dans la ville, jusqu’à ce que vous soyez
revêtus de puissance d’en haut ». La mission ne paraît pas
s’adresser aux onze exclusivement, mais aussi à d’autres (Luc
24.33) ; et elle devait commencer par Jérusalem et non partir de
là. Ensuite, ils ne doivent pas exercer leur ministère avant
d’avoir reçu la puissance d’en haut, reconnaissant ainsi que ce
qu’ils avaient reçu du Seigneur sur la terre, ne su sait pas.
C’était rompre avec tout ordre simplement juif ou terrestre. Tel
est le message, quelque peu modi é, qui convenait à l’évangile de
Luc, où le Seigneur est vu plus en dehors des Juifs, et non pas
strictement associé à eux.
Ici, dans l’évangile de Jean, il n’y a pas de message ; aucune
mention n’est faite non plus de « la puissance d’en haut ». Nous
trouvons simplement la communication de la vie de l’Homme
ressuscité, et les disciples, participant de cette vie, envoyés pour
juger, en vertu de cette vie même, de la condition de toute âme
vivante. Le Seigneur leur donne leur mission comme du haut du
ciel, et non du haut de la montagne en Galilée. Il les envoie de la
part du Père, non de Jérusalem ; car, dans cet évangile, le Seigneur
a laissé derrière lui tout souvenir de Jérusalem ; il renonce, pour
le présent, à tout espoir de restaurer Israël et de rassembler les
nations.
Cette diversité dans les termes de la mission et du ministère est
très frappante ; et, en considérant les di érents buts de chaque
évangile, elle est exquise et parfaite. L’homme qui ne fait que
raisonner peut y trouver achoppement ; et celui qui honore les
Écritures, mais sans faire la part de cette diversité, et qui
voudrait en défendre la bonne réputation, pourrait essayer de
montrer l’accord littéral des choses dites. Mais la Parole de Dieu
ne cherche pas la protection de l’homme ; elle ne demande pas
qu’on présente des apologies en sa faveur, quelque bien
intentionnées qu’elles soient. Il n’y a en elle aucune
contradiction ; il n’y a qu’une diversité qui répond aux buts
di érents du même Esprit ; et bien qu’ainsi variés, chaque
pensée, chaque parole est également et entièrement divine, et
nous n’avons qu’à bénir Dieu pour la sûreté, l’encouragement et
la complète su sance que nous trouvons dans ses parfaits
témoignages.
Je dis ceci en passant, mes frères ; veuille le Seigneur garder
notre intelligence dans toutes nos méditations et dans tous les
conseils de nos cœurs !
Nous avons laissé le Seigneur dans la compagnie de ses frères,
s’occupant de les placer dans leur position d’enfants du Père, et
de les élever jusque dans les lieux célestes. Cependant, il a des
intentions touchant Israël aussi bien que touchant son Église. Au
dernier jour, il appellera Israël à la repentance et à la foi, et leur
donnera, aussi à eux, leur vraie position et leur ministère : C’est
ce qui apparaît d’une manière typique dans les détails qui
suivent.
omas, est-il dit, n’était pas avec les frères quand le Seigneur
vint les voir. Il n’avait pas gardé sa première origine : il était
absent, pendant que la petite assemblée se tenait prête pour son
Seigneur ressuscité. Apprenant ce qui venait d’arriver, il refuse
de croire ses frères, s’il n’a le témoignage de ses propres mains et
de ses yeux. Les Juifs, comme omas alors, refusent jusqu’à ce
jour de croire l’Évangile ou la bonne nouvelle du Seigneur
ressuscité.
Cependant il ne fallait pas que les choses en restassent là.
omas retrouve sa place ; et « huit jours après », les disciples, et
omas avec eux, étant de nouveau réunis, Jésus se présente ; car
cette visite était pour l’amour de omas, et le disciple incrédule
est amené à reconnaître Jésus comme son Seigneur et son Roi.
Ainsi aussi, « huit jours après », lorsqu’une semaine ou une
dispensation aura tout entière achevé son cours, on dira dans le
pays d’Israël : « Voici, c’est ici notre Dieu ; nous l’avons attendu, et
il nous sauvera ; c’est ici l’Éternel, nous l’avons attendu. Égayons-
nous et réjouissons-nous dans sa délivrance » (Ésaïe 25.9). Alors
Israël reconnaîtra Emmanuel ; et, de même que le Seigneur
reçoit omas, il dira d’Israël : « Tu es mon peuple ».
Cependant il y a une chose à remarquer. Le Seigneur reçoit
omas, il est vrai, mais c’est en lui disant : « Parce que tu m’as
vu, tu as cru ; bienheureux ceux qui n’ont point vu et qui ont
cru » ; et il en sera ainsi d’Israël au dernier jour. Ils connaîtront la
paix de la croix, la pleine paix que donnent les mains et le côté
percés de Jésus ; toutefois leur bénédiction sera inférieure à celle
de l’Église. Ils auront la vie par le Fils de Dieu ; mais ils se
tiendront sur le marchepied, tandis que les saints seront assis
sur le trône.
Ici le mystère de la vie prend n, soit pour l’Église maintenant,
soit pour Israël plus tard ; et l’apôtre fait une pause. Ceci était
l’Évangile de Jésus, le Christ, le Fils de Dieu, dont il est dit que
quiconque croit en lui a la vie par son nom. Bien des choses
auraient pu être ajoutées, mais celles-ci su saient pour rendre
témoignage du Fils, et être ainsi la semence de la vie. Le
troisième témoignage de Dieu venait d’être entendu ; l’eau et le
sang avaient coulé du côté percé du Fils cruci é ; et maintenant
l’Esprit était donné par le Fils ressuscité. Les trois qui rendent
témoignage sur la terre avaient été entendus, et le témoignage de
Dieu : « qu’il nous a donné la vie éternelle et cette vie est dans son
Fils » était donc complet. L’apôtre ajoute simplement : « Ces
choses sont écrites, a n que vous croyiez que Jésus est le Christ,
le Fils de Dieu, et qu’en croyant vous ayez la vie par son nom ».
Chapitre 21
Nous avons vu le Seigneur ressuscité donner la vie à ses frères et
leur con er un ministère ; puis, dans la personne de omas,
assurer la vie à Israël. Mais omas restauré, ou l’Israël de Dieu
au dernier jour, recevra un ministère aussi bien que la vie,
comme l’Église maintenant. Il sera employé aussi bien que
vivi é. Le gage nous en est donné en son lieu.
Le chapitre 21 nous fait voir les apôtres, revenus à l’état dans
lequel le Seigneur les avait trouvés au commencement. Pierre et
les ls de Zébédée sont de nouveau occupés de leur pêche. Leur
premier travail n’avait, en e et, rien produit. Les lets s’étaient
rompus. Le Seigneur avait voulu se servir d’eux, mais Israël avait
été dans sa main comme un arc qui trompe, un let rompu.
Maintenant ils sont de nouveau à leur labeur ; le Seigneur leur
apparaît une seconde fois, et leur donne une seconde pêche qui
est abondante, et les lets ne se rompent point. Ensuite, les
disciples, dans la compagnie du Seigneur lui-même, prennent le
dîner, font la fête.
L’Israël de Dieu, au dernier jour, fera la même expérience.
Comme omas, ils marcheront à la lumière du Seigneur, et
alors aussi, l’abondance de la mer se sera tournée vers eux (Ésaïe
60.5). Les eaux sortiront de la maison de l’Éternel à Jérusalem, et
des pêcheurs se tiendront là, étendant leurs lets, et leur poisson
sera en fort grand nombre, comme le poisson qu’on pêche dans
la « grande mer » (Ézéchiel 47 :10). La grande mer, la grande
Méditerranée, comme le prophète en suggère la pensée, et non
pas le lac étroit de Tibériade, remplira leurs lets, et le poisson
sera « chacun selon son espèce » ; car Madian et Épha et Kédar et
Nebaïoth et tous les pays, leur apporteront leurs richesses (Ésaïe
60.6, 7). Le let, jamais rompu, sera encore préparé pour d’autres
pêches. Une génération dira la louange des œuvres de l’Éternel à
une autre génération, et elles raconteront ses actes puissants
(Psaume 145.4).
L’apôtre fait remarquer que c’était « la troisième fois » que Jésus
était manifesté aux disciples, après qu’il fut ressuscité d’entre les
morts. La première fois, il se trouva avec les frères, pour les
placer, comme la famille céleste, dans la communion et le
ministère. La deuxième fois, il restaure omas, gure de la
conversion et de la vivi cation nales d’Israël ; et maintenant, la
troisième fois, il donne les gages du ministère futur d’Israël, et
des fruits qu’il portera pour Dieu. Ces trois di érentes visites
nous donnent de cette manière un aperçu complet de l’Église et
d’Israël.
Mais il y a un acte, produit par la conscience d’être aimé, auquel
il est doux de s’arrêter un instant. Pierre savait que, malgré tout
ce qui s’était passé, il existait un lien entre lui et le Seigneur, de
sorte qu’il ne craint pas de se trouver seul avec son maître. La
dernière fois qu’ils s’étaient rencontrés, Pierre l’avait, il est vrai,
renié, et le Seigneur, se retournant, avait regardé Pierre. Pierre,
toutefois, avait la conscience qu’il aimait son Maître, et il n’a pas
peur de se jeter à la mer maintenant et de rejoindre le Seigneur
avant les autres. Et il y a quelque chose de très précieux dans ce
mouvement. La loi ne l’aurait jamais produit, et ne l’aurait
d’ailleurs pas autorisé. La verge de la loi aurait chassé Pierre, et
l’aurait tenu à distance. La grâce seule pouvait permettre cet
acte ; rien que les cordeaux de l’amour pouvaient attirer l’in dèle
Pierre auprès de son Seigneur, pour qui il avait montré si peu
d’estime devant ses ennemis. Mais il y a plus. Le dîner était
terminé ; le but de cette troisième visite était atteint ; cependant,
a n de clore le tout selon une grâce et une gloire merveilleuses,
et dans l’esprit de cet Évangile, le Seigneur se tourne vers Pierre.
Il s’adresse à lui particulièrement, et l’interpelle d’une manière
qui ne pouvait manquer, et qui ne manque pas, de lui rappeler
son péché.
Donnons un moment d’attention à tout cela. Pendant tout le
temps que le Seigneur s’était trouvé avec ses disciples, il avait eu
à s’occuper de Pierre bien plus que des autres ; et après sa
résurrection, il en est encore ainsi ; dans tout ce chapitre 21, il ne
s’agit, pour ainsi dire, que de Pierre.
Le Seigneur poursuit à son égard l’œuvre de grâce qu’il avait
commencée avant de le quitter, et la reprend au point même où il
l’avait laissée.
Pierre avait manifesté de la con ance en lui-même. Quand
même tous seraient scandalisés, il ne le serait pourtant pas,
avait-il dit. Quand il lui faudrait mourir avec son Maître, il ne le
renierait point. Jésus lui avait fait observer combien de pareilles
vanteries étaient vaines ; mais en même temps il ajoute qu’il
avait prié pour lui, pour que sa foi ne défaillît point. Et lorsqu’il
eut été démontré que la vanterie avait, en e et, été vaine, et que
Pierre eut renié son Maître, même avec blasphème, le Seigneur
avait regardé son disciple et ce regard avait eu son résultat béni.
La prière et le regard avaient fait leur œuvre. Si la prière avait
empêché la foi de Pierre de défaillir, le regard avait brisé son
cœur. Il ne « sortit » pas comme un homme qui s’en va, mais il
pleura, et pleura amèrement.
Nous trouvons Pierre ici dans la condition où la prière et le
regard de son divin Maître l’ont placé, et il est en état de donner
une douce preuve que sa foi n’a pas failli ; car aussitôt qu’il a
compris que c’est son Seigneur qui se tient sur le rivage, il se jette
à l’eau pour aller à lui. Et ce n’est pas comme un homme
repentant ou qui n’a pas encore pleuré sa faute qu’il s’approche
de Jésus ; mais comme pouvant se présenter avec con ance et
d’un cœur assuré, devant ce Maître qu’il avait renié.
La prière et le regard avaient eu leur e et envers Pierre et ne
seront pas répétés. Le Seigneur continue simplement l’œuvre
commencée, a n de la rendre complète. Par conséquent, la prière
et le regard sont suivis de la parole. Après la conviction de péché
et les larmes, vient le relèvement : Pierre est mis à même de
forti er ses frères, comme son Seigneur le lui avait dit une fois,
et aussi de glori er Dieu par sa mort ; privilège que son
incrédulité et son reniement du Seigneur lui avaient fait perdre.
Ainsi fut la parole qui releva Pierre, après que la prière eut
soutenu sa foi et que le regard eut brisé son cœur.
Ce moment, d’un profond intérêt pour nous, renferme autre
chose encore. Aux jours du chapitre 13 de cet Évangile, Jésus
avait dit à ce même bien-aimé Pierre, qu’un homme qui avait
tout le corps lavé, n’avait besoin que de se laver les pieds ; et il
agit ici à son égard de cette manière. Il ne le fait pas passer
encore une fois par l’expérience du chapitre 5 de Luc, où la prise
de poissons écrase Pierre et le fait se reconnaître pécheur ; il le
restaure et le rétablit dans sa place, c’est-à-dire, il lave les pieds
de Pierre, comme d’un homme qui avait déjà le corps lavé.
Maître parfait ! le même pour nous hier et aujourd’hui et
éternellement ; le même dans son activité pleine de grâce et
d’amour ; poursuivant l’œuvre commencée, reprenant auprès des
siens, comme le Seigneur ressuscité, le service demeuré
inachevé quand il leur fut ôté ; et le reprenant au point où il
l’avait laissé, reliant ainsi, avec une habileté pleine de grâce, le
service passé au service présent. Les trois reniements de son
Maître sont pleinement rappelés au souvenir du disciple, quand
Jésus lui demande pour la troisième fois : « M’aimes-tu ? »
Cependant le Seigneur ne fait que restaurer entièrement l’âme
de Pierre et le diriger vers de plus riches bénédictions. Il le rend à
son ministère, car un autre ne devait pas prendre sa charge, et il
lui garantit la force de servir son Seigneur sans le renier une
seconde fois. Il fait de lui son témoin et son serviteur, dans la
pleine puissance de foi d’un martyr ; et après lui avoir ainsi
rati é la grâce de rendre témoignage de lui dèlement jusqu’à la
mort, il lui dit : « Suis-moi ! »
Ce fut un doux moment. Nous savons que si nous sou rons avec
le Seigneur, nous régnerons aussi avec lui ; et si nous le suivons,
là où sera le Seigneur, là aussi sera son serviteur. Or cet appel fait
à Pierre, était l’appel à suivre Jésus dans la puissance de la
résurrection, le long du sentier du témoignage et de la
sou rance, jusqu’au repos où ce sentier aboutit et auquel la
résurrection mène. Précédemment, avant de quitter son
disciple, Jésus lui avait dit : « Là où je vais, tu ne peux pas me
suivre maintenant, mais tu me suivras plus tard » ; et le Seigneur
allait alors au ciel et auprès du Père, en passant par la croix. Le
présent appel était l’accomplissement de cette promesse :Pierre
aurait à suivre son Seigneur à travers la mort jusqu’à la maison
du Père. Et, comme il le paraît, après lui avoir dit ces mots, Jésus
se lève de la place où ils avaient mangé, et Pierre, appelé, se lève
pour le suivre.
Jean avait écouté l’appel comme s’il lui avait été adressé à lui
aussi, et en voyant le Seigneur se lever, et Pierre se lever, lui aussi
immédiatement, se lève. Car il s’était constamment trouvé le
plus rapproché de Jésus. Pendant le souper, il s’était penché sur
sa poitrine ; et il était le disciple que Jésus aimait. Il avait vécu
dans la plus grande intimité avec le Seigneur : ses yeux avaient
été sur ses yeux, sa bouche avait touché sa bouche, sa main, la
main de Jésus ; de sorte que, par une espèce de nécessité
(heureuse nécessité !), quand le Seigneur se lève, lui aussi,
quoique n’étant pas appelé, se lève également.
C’est dans cette attitude que nous les voyons. Le Fils de Dieu s’est
levé ; il marche ; nous le perdons de vue, et Pierre et Jean le
suivent. Tout cela est plein de charme et d’une grande portée.
Nous ne voyons pas jusqu’où va leur chemin car, pendant qu’ils
marchent, l’Évangile se clôt. La nuée les reçoit, pour ainsi dire,
et les dérobe à notre vue. En vain nous tâchons de les suivre du
regard ; le chemin des disciples se dérobe à nous autant que celui
de leur Maître. Dans le fait, c’était le chemin de la maison du
Père, préparée pour le Seigneur et pour ses frères, la présence de
Dieu dans le ciel.
Certes nous pouvons dire qu’à cette fête, l’époux a gardé le
meilleur vin pour la n. Si nos âmes étaient capables d’entrer
dans ces choses, nous trouverions qu’il n’y a rien de pareil.
L’évangile de Marc nous parle du fait que le Seigneur a été reçu
dans le ciel, et Luc nous fait voir l’ascension elle-même, le
Seigneur levant ses mains et bénissant ses disciples. Mais
quelque précieux que soient ces détails, ce n’est pas ce que nous
trouvons ici ; car ils nous montrent les disciples séparés du
Seigneur : il monte au ciel, et eux ont à s’en retourner à
Jérusalem. Ici, au contraire, ils le suivent là où il va. Le chemin
des disciples ne s’arrête pas en deçà de celui du Maître.
Ainsi l’évangile de Jean nous conduit jusqu’à « la porte du ciel » et
nous y laisse. Le Seigneur agit ici dans une grâce parfaite envers
ceux qu’il a choisis : le gage nous est donné de la réception de ses
frères dans la maison du Père, car Pierre et Jean nous
représentent tous. Quelques-uns d’entre nous auront peut-être à
glori er Dieu par leur mort, comme Pierre ; d’autres, comme cela
est dit de Jean, vivront et resteront jusqu’à ce que Jésus vienne ;
mais que ce soit Pierre ou Jean, Moïse ou Élie, que nous
dormions ou que nous veillions à sa venue, tous nous suivrons le
Seigneur, tous nous serons ravis ensemble dans les nuées à sa
rencontre en l’air, et nous serons toujours avec lui. Ce sera
comme l’enlèvement d’Énoch avant le déluge ; et, étant reçus par
le Seigneur, nous entrerons avec lui dans les demeures préparées
pour nous dans la maison du Père, ainsi qu’il l’a promis. *
* Nous ne voulons pas faire entendre qu’il devait rester
quelqu’un jusqu’à ce que Jésus vienne. Le verset 23 règle la
chose sur ce point. Mais le même verset nous permet
d’a rmer que le Seigneur, s’il lui convient, peut venir
avant que nous délogions.
C’est le seul aperçu de l’ascension du Seigneur que l’évangile de
Jean nous présente. Il s’accorde pleinement avec tout le
caractère de cet Évangile, où le Seigneur est en relation avec
l’Église comme famille du Père, famille céleste. Car ici Jésus ne
monte pas au ciel proprement pour prendre place à la droite du
Père, au siège de la puissance, et y demeurer seul ; il entre dans la
maison du Père, où les enfants doivent aussi habiter. Par sa grâce
sans limites, leur sentier, dans cette direction, va aussi loin que
le sien. Quelque part que Jésus aille, que ce soit vers un lieu
inconnu et sans nom sur la terre, Pierre et Jean le suivent. Jésus,
en disant : « Si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne »,
rend présente la scène de son retour, et procède comme si déjà il
était allé préparer les demeures dans la maison du Père, et qu’il
fût revenu auprès des siens pour les prendre avec lui, a n que là
où il est, ils y soient aussi ; car il se pouvait que ce disciple ne
mourût pas et qu’il fût présent quand Jésus viendrait. Il en sera
ainsi, en e et, à la résurrection de ceux qui sont de Christ, à sa
venue, quand les derniers, ceux qui seront demeurés sur la terre,
s’en iront avec eux à sa rencontre, en l’air.
Le Fils de Dieu, arrivé au terme, fait ce qu’il avait fait au début : il
montre aux siens où il demeure (1.40) ; seulement, au début, il
était sur la terre, un Étranger, et les disciples ne restent avec lui
qu’un jour ; tandis que maintenant il retourne dans son ciel, où
ils seront avec lui éternellement.
Jean nous fait connaître encore la réponse de la foi des élus de
Dieu aux vérités et merveilles qu’il nous a révélées : « Nous
savons que son témoignage est vrai ». Ils scellent que Dieu est
vrai. Puis le tout est clos par une simple parole d’admiration, car
c’est là, je crois, le sens du dernier verset. En e et, que pouvait-il
dire ? Cela ne dépassait-il pas toute louange ? Quel cœur était en
état de comprendre l’excellence et la perfection des voies de
Celui dont Jean venait de proclamer le Nom ?
Conclusion
Ici se termine la quatrième section de l’évangile de Jean, et ainsi
le tout. Quel chemin que celui du Fils de Dieu dans cet évangile !
Fait chair au commencement, il a marché sur la terre comme un
Étranger venu du ciel, sauf quand il allait apportant la grâce et la
guérison à des pécheurs. Le Chef du monde vint à lui, à la n, et
ne trouvant rien en lui, il chercha à l’ôter du monde, mais il
échoua. Le Fils de Dieu s’en est allé quand le moment est venu
pour lui, et il n’est pas parti avant d’avoir, comme Sauveur,
accompli la paix pour tous ceux qui se con ent en lui. Alors le
Christ, triomphant, brisa le pouvoir de la mort et, comme
ressuscité, il a communiqué la vie qu’il avait recouvrée pour son
peuple. En n, par une dernière action dans laquelle sa pensée se
révèle, il assure aux siens que là où il allait, eux le suivraient, a n
que là où il serait, ils y fussent avec lui… et pour toujours.
L’évangile de Jean avait commencé par la descente du ciel du Fils
de Dieu ; il se clôt par l’ascension des saints. Quant à l’époque de
cette ascension, ou de l’enlèvement dans les nuées, elle reste
ignorée pour nous. Cet enlèvement peut avoir lieu demain, et
aura lieu certainement quand la plénitude des Gentils sera
entrée, et que tous les saints seront parvenus, dans l’unité de la
foi, à l’état d’hommes faits. Il ne dépend d’aucun laps de temps
qui devrait préalablement s’écouler. Aucune prophétie,
impliquant une supputation de temps, ne s’y rapporte, ce me
semble ; la prophétie a trait au retour du Seigneur sur la terre, et
non à l’enlèvement des saints à la rencontre du Seigneur en l’air.
Quand le Seigneur reviendra sur la terre, ses saints seront avec
lui, et cette terre sera préparée pour être leur royaume et fera
partie de leur commun héritage. Cet événement, l’apparition du
Seigneur, attend le moment prescrit et l’accomplissement
complet des jours et des années annoncés par les prophètes ;
tandis que l’intervalle entre l’ascension de Jésus et celle des
saints n’est pas mesuré par des jours et des années. Le Saint
Esprit nous fait connaître, il est vrai, le caractère moral de
certaines époques, et il les désigne par ces mots « les derniers
temps », « les derniers jours » (1 Timothée 4 ; 2 Tim 3) ; mais il
nous dit aussi que, même en ce cas, « la dernière heure » était déjà
venue (1 Jean 2) ; de sorte que la foi peut s’attendre à chaque
instant à la joie d’aller à la rencontre du Seigneur en l’air, mais
s’appliquant en attendant à faire sa volonté avec patience. Les
temps auxquels appartient la prophétie non accomplie sont pour
le moment interrompus, et ne reprendront leur cours que
lorsque l’enlèvement dans les nuées aura eu lieu. Alors sera sur la
scène d’ici-bas le résidu sou rant d’Israël, qui pourra
commencer à compter les jours, pour le soutien de sa foi, au
milieu de sa profonde a iction. Connaissant par les livres que sa
délivrance est proche, il lèvera les mains avec con ance vers le
ciel.
Après cela, bien-aimés, Dieu a bien le droit d’attendre que nous
lui montrions de la con ance, et que nous trouvions en lui les
motifs d’une entière et sainte liberté, ainsi qu’une source de
bonheur constante et sûre. Ce sera honorer le Père. Et s’il y a en
nous une pensée qui nous laisse un regret, c’est celle de notre
incrédulité et de notre folie. Tout est mis en lumière pour la foi.
Tel est Dieu notre Père, et nous sommes rendus agréables dans le
Fils de son amour. Il ne veut pas être dans la gloire et nous laisser
dehors. Nos cœurs devraient constamment lui dire : « Viens,
Seigneur Jésus ». Et cette con ance dans une adoption actuelle,
cette joie de l’espérance, nous les possédons par le Saint Esprit
qui habite en nous, et qui est notre compagnon pendant le
voyage, notre « autre Consolateur », en attendant que vienne
l’Époux.
Au Dieu de toute grâce, Père, Fils et Saint Esprit, soit gloire aux
siècles des siècles ! Amen.
Table des matières
Chapitres 1 à 4
Chapitre 1.1-18
1.19-28
1.29-43
1.44-51
Chapitre 2.1-12
2.13-22
2.23 à 3.21
3.22-36
Chapitre 4
Chapitres 5 à 12
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitres 9 et 10
Chapitre 10
Chapitres 11 et 12
Chapitres 13 à 17
Chapitre 13
Chapitres 14 à 16
Chapitre 17
Chapitre 18 à 21
Chapitres 18 et 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Conclusion