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PDF Kalki Avatar

Ce document décrit la mission future de Kalki, le dixième avatar de Vishnu selon la tradition hindoue. Il sera un guerrier qui viendra détruire les méchants et inaugurer un nouvel âge d'or à la fin du Kali Yuga.

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Adrien Martin
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Ce document décrit la mission future de Kalki, le dixième avatar de Vishnu selon la tradition hindoue. Il sera un guerrier qui viendra détruire les méchants et inaugurer un nouvel âge d'or à la fin du Kali Yuga.

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KALKI (AVATAR) PURÂNA

(Notes importante. Le texte complet Le Kalki Purana fut publié par les Éditions Archè Milano en
1982. Ce texte qui décrit la mission du Kalki Avatar sur la Terre, s’est déroulé il y a 52 000 ans,
mais se réfère aussi à des événements survenus il y a 24 millions d’année ! Ce récit est présenté à
plusieurs niveaux de conscience et seul un érudit bien versé dans l’hindouisme peut en savourer le
vrai sens. Le Kalki Avatar est de retour sur Terre sous la forme de Sai Baba. Une mission qui se
déroule en trois étapes avec les trois Sai : Shirdi Sai Baba, Sathya Sai Baba et Prema Sai Baba.
Tous trois sont venus pour sauver le juste et détruire le mal. Avec Prema Sai Baba, cette étape va
être très intense et active sur le plan mondial. Après son intervention ce sera l’Âge d’Or.

Pour notre compréhension de profane André Preau nous présente son étude et ses commentaires.)

***

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KALKI

DIXIEME AVATARA DE VISHNU

D’après le KALKI-PURANA

KALKI, dixième et dernier avatara de Vishnu dans le présent Manvantara, est mentionné
dans une série de textes traditionnels hindous appartenant à la classe d’écrits désignée sous le nom
de Smriti, et particulièrement dans le Bhavishya-Purana. Kalki est le prêtre-guerrier qui doit, à la
fin du Kali-Yuga, anéantir les méchants, manifester à nouveau la Tradition dans son intégralité et
ouvrir un nouvel Age d’Or. Son rôle est donc comparable à celui du Poisson (Matsya), premier
avatara de Vishnu; c’est celui même que saint Jean, dans l’Apocalypse, assigne au Christ lors de
son second avènement.
Nous ne revenons pas sur la question des avatara de Vishnu, qui est généralement assez
connue, au moins dans ses grandes lignes, et qui a fait d’ailleurs l’objet d’un exposé de M. Clavelle
dans le numéro de novembre 1929 (pp. 722 et suivantes) des Etudes Traditionnelles; et nous ne
reviendrons pas davantage sur celle de la fin du Kali-Yuga, au sujet de laquelle il suffira de
renvoyer le lecteur à la chronique d’Argos de décembre 1929 et aux articles de MM- Guénon et
Clavelle de janvier 1931.
La vie et l’activité du « Messie futur » est décrite dans le Kalki-Purana, texte qui n’a pas
été traduit, mais dont le professeur Emil Abegg, de Zurich, a donné une analyse détaillée dans un
ouvrage très documenté, Der Messiasglaube in Indien und Iran, publié en 1928 - C’est à cet
ouvrage que nous empruntons la plupart des renseignements qui vont suivre.
Le Kalki-Purana n’est pas un des dix-huit grands Puranas, mais seulement un Purana
secondaire (Upapurana), peut-être identique au Bhavishya-Upapurana, peut-être au Bhagavata-
Upapurana. Il se présente lui-même comme un supplément au Bhagavata-Purana. Quoi qu’il en
soit de ces divers points, il importe de faire observer que, les Puranas n’étant point inspirés, les
indications sur la vie future de Kalki qui sont données dans ces textes et en particulier dans le
Kalki-Purâna ne peuvent être considérées à proprement parler comme des « prophéties ». Le
caractère symbolique de certains récits est d’ailleurs tout à fait apparent.
Le nom même de Kalki ou Kalkî (les deux formes se rencontrent) est assez curieux, car
kalka en sanskrit signifie « ordure », « souillure ». Dans le nom de Kalki, Abegg voit simplement
une dénomination par antithèse, alors que, d’après le Kalki-Purana. Kalki signifierait « celui qui
fait disparaître la souillure du monde » et Kalki est parfois qualifié de kalkavinâshana ou «
destructeur de la souillure ».

I. - Naissance et jeunesse de Kalki.

Vers la fin du Kali-Yuga, les dieux, privés de sacrifices, se plaignent à Brahma du désordre
croissant dans lequel le monde se trouve plongé, par suite de l’action de Kali, fils de Krodha (la
colère) et de Himsa (l’action nuisible). Brahma se rend avec eux auprès de Vishnu, qui leur
annonce sa prochaine descente sur terre et la destruction de Kali. A peine les dieux sont-ils rentrés
dans leurs cieux respectifs que Vishnu se dispose à remplir sa promesse. Il descend dans le sein de

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la femme Sumati, par l’intermédiaire de son mari le brahmane Vishnuyashas (gloire de Vishnu).
Le douzième jour de la moitié claire du mois Madhava, il naît sous sa figure de divinité à quatre
bras, figure qu’il abandonne presque aussitôt, à la demande de Brahma, pour prendre une forme
purement humaine.
Kalki naît dans le village qu’habitent ses parents, c’est-à-dire à Shambhala (ou
Shambhalagrâma) - On sait que les Tibétains, de leur côté, attendent aussi un Messie guerrier qui
doit venir de Chambala, ou plus exactement Tchang Chambala (Chambala du Nord), circonstance
qui tend à faire identifier ce Messie à Kalki. D’autre part, Grunwedel nous apprend que le
calendrier tibétain est dit provenir de Zambhala et il en est de même d’une doctrine bouddhiste
assez récente, celle de l’école Kalachakra (roue du temps). Les princes de Zambhala porteraient
le titre de Kulika, mot qui rappelle Kalki, surtout lorsqu’il est écrit en caractères nagaris; c’est une
de ces Kulikas, nommé Suchandra, qui aurait reçu directement du Bouddha la doctrine
Kalachakra. Les textes de cette école, ajoute Grunwedel, sont, au moins quant à leur aspect
extérieur, « complètement vishnouïtes » et les avataras de Vishnu, et surtout Kalki, y sont
expressément mentionnés. On voit comme, en Asie, toutes les doctrines s’interpénètrent et
combien il est difficile d’établir entre elles des distinctions tranchées.
Kalki a trois frères aînés, Kavi, Prajna et Sumantu, qui sont eux-mêmes des avataras
partiels de Vishnu, comme l’avaient été les trois frères de Ramachandra (Lakshmana, Bharata et
Shatrughna).
Bientôt le père de Kalki fait préparer la cérémonie de la « dation du nom » (nâmakarana).
Alors se présentent quatre personnages célèbres: Rama (probablement Parashu-Rama, le sixième
avatara de Vishnu, Vyasa (l’auteur du Véda), le héros Kripa (l’un des sept chirajîvis) et Drauni
(descendant du héros Drona), Ils viennent s’incliner devant l’enfant, lui donnent le nom de Kalki,
exécutent les rites de la cérémonie et s’en retournent ensuite vers les régions mystérieuses d’où ils
sont venus. Parashu-Râma – qui n’est autre que Vishnu, c’est-à-dire le Logos - représente ici
l’autorité suprême, source commune de l’autorité spirituelle et du pouvoir temporel ; Vyasa
représente l’autorité spirituelle ou sacerdotale et les deux héros le pouvoir temporel, de sorte qu’il
est difficile de ne pas rapprocher l’hommage qu’ils rendent à Kalki de celui rendu, dans des
circonstances analogues, par les trois Rois-Mages à l’Enfant Jésus.
A l’âge prescrit, Kalki reçoit l’initiation brâhmânique (upanayana) et devient
brahmâchâri. Ici se place un autre épisode remarquable de sa vie. On sait que Parashu-Rama, dont
il vient d’être question, n’est pas mort, mais s’est retiré sur le mont Mahêndra, où il se livre à
l’ascèse. Or, Parashu-Rama apparaît à Kalki et se révèle à lui comme devant être son guru. Sous
sa direction, Kalki étudie le Véda et, lorsque son instruction est terminée, Parashu-Rama lui expose
brièvement sa destinée future et lui demande, comme prix de son enseignement, de remplir
fidèlement le rôle qui lui a été assigné et de rétablir le dharma (rectitude) sur terre. Kalki devant
être le premier instructeur du futur Manvantara, son instruction par Parashu-Rama offre un intérêt
tout particulier, en ce qu’elle marque la continué de l’enseignement traditionnel d’un Manvantara
à l’autre. Nous retrouvons d’ailleurs un récit semblable dans les textes bouddhistes concernant
Maîtreya, le « Bouddha futur ». Aussitôt après son illumination, Maîtreya se dirige vers le mont
Kukkutapâdagiri (aussi appelé Gurupâdaka), où réside Kâshyapa, le célèbre disciple de
Shakyamuni. La montagne s’ouvre devant lui et il reçoit de Kâshyapa un vêtement aux entrelacs
d’or, que Shakyamuni avait lui-même reçu de sa mère adoptive Mahâprajâpati et qu’il avait, au
moment de sa mort, confié à Kashyapa pour le remettre à Maîtreya. Il est à remarquer que le
vêtement est un symbole naturel de la manifestation, du « cosmos », qui est bien, pour employer
le mot connu de Goethe, le « vêtement vivant de la Divinité » -il peut donc être employé pour

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symboliser l’ensemble des sciences traditionnelles, qui ne sont au fond qu’une image du cosmos
et qui, si on les envisage dans leur expression formelle, peuvent être aussi considérées comme le
vêtement de la vérité. D’autre part, la Maîtreya Samiti et un texte du Tripitaka traduit en chinois
par Dharmaraksha précisent que Kâshyapa n’est pas mort, mais qu’il attend, plongé dans la
méditation, l’arrivé de Maîtreya; d’après le texte chinois, Kâshyapa est l’un des quatre disciples
éminents du Bouddha qui - bien qu’ayant atteint l’état d’Arhat - restent en vie jusqu’à la fin du
cycle. C’est seulement après l’exécution de la mission qui lui a été confiée par le Bouddha
Shakyamuni que Kâshyapa « entrera dans le Parinirvâna », c’est-à-dire mourra. Il est impossible,
en lisant ces textes, de ne pas se souvenir de la parole du Christ disant à Pierre, au sujet « du
disciple qu’il aimait »: « Si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne, que t’importe? » On
sait d’ailleurs que, suivant une tradition rapportée par saint Jérôme, saint Ambroise et saint
Augustin, saint Jean n’est pas mort, mais « est descendu vivant au tombeau », où il dort jusqu’à la
résurrection.
Après avoir reçu les dernières instructions de Parashu-Rama, Kalki adresse une prière à
Shiva, qui lui fait cadeau d’un cheval ailé (gâruda ashua), d’un perroquet omniscient et d’une épée
lumineuse ornée de joyaux.
Le cheval de Kalki est blanc et son importance symbolique est telle qu’il est parfois
identifié à Kalki lui-même. Les artistes hindous nous montrent, tantôt Kalki à côté de son cheval,
tantôt le cheval seul. Certains écrivains savants ou voyageurs, ont même rapporté que, dans son
dixième avatara, Vishnu devait s’incarner sous la figure d’un cheval; Abegg fait remarquer,
cependant, que tous ces renseignements viennent du Sud de l’Inde et que, dans les livres hindous,
Kalki est toujours représenté comme un cavalier, et non comme un cheval.
Plusieurs auteurs ont déjà rapproché le cheval blanc de Kalki de celui qui sert de monture
au Cavalier de l’Apocalypse. Ici aussi le cheval blanc est loin d’être un détail secondaire: c’est ce
qui ressort du fait qu’il est nommé avant le cavalier: « Puis je vis le Ciel ouvert, et il parut un
cheval blanc; celui qui le montait s’appelle Fidèle et Véritable; il juge et combat avec justice ».
L’épée étincelante de Kalki rappelle aussi le « glaive affilé » dont le Christ frappe ses ennemis et,
si ce dernier est « vêtu d’une robe teinte de sang », il est dit que Kalki porte « un vêtement
rougeâtre» (rôtliches Gewand). Pour le rôle attribué à l’un et à l’autre personnage céleste, on sait
déjà qu’il est identique. Enfin, comme on le verra plus loin, le règne de Kalki, comme celui du
Christ, doit durer « mille ans ».

(Note : Lors de la rédaction de ce texte Sathya Sai Baba n’était pas connu. Les écrits de
l’Apocalypse de Jean se rapportent aussi à Sathya Sai Baba. Sathya veut dire Vérité.)

Muni des présents de Shiva, Kalki rentre dans son pays, se fait reconnaître du roi
Vishâkhayûpa et reçoit de lui la dignité royale. Brahmane et Kshatriya, Kalki est bien celui qui,
suivant l’expression de M. Guénon, « unissant en lui les puissances du Ciel et de la Terre, manifeste
au dehors, à la fois dans le domaine de la connaissance et dans celui de l’action, le double pouvoir
sacerdotal et royal ». Kalki « manifeste au dehors » ces deux pouvoirs; en outre, de par sa nature
divine, il détient l’autorité suprême d’où ils découlent tous deux.
Cependant, se conformant aux indications qu’il reçoit de son perroquet, Kalki se rend à
Ceylan, (Sri Lanka) dans la ville de Kârumati, où il épouse Padmâ (ou Padmâvati), la fille du roi
Brihadratha. Cette princesse, qui lui était destinée par le sort, n’avait pu trouver aucun époux: car,
par la puissance de Shiva, tout homme qui s’éprenait d’elle était aussitôt transformé en femme.
Les rois, ses anciens prétendants, ne forment plus qu’une troupe de femmes aux belles tailles.

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Après le mariage, ces rois viennent toucher les pieds, pareils à des lotus, de Vishnu et, sur son
ordre, vont se baigner dans la rivière prochaine, où ils redeviennent des hommes. Pendant qu’ils
reçoivent les enseignements de Kalki, le sage Ananta se présente et se réjouit de pouvoir
contempler Krishna revenu sur terre: « J’ai vu la forme de Celui qui est sans forme; j’ai touché les
pieds de Celui qui est sans pieds; j’ai entendu la parole du Soi suprême qui est au-delà de toute
parole. » Pendant que le sage s’en retourne, les rois, illuminés par le discours qu’il vient de
prononcer, atteignent le Nirvâna.
Kalki ne tarde pas à quitter Ceylan, accompagné de sa femme et d’une armée nombreuse;
il arrive au rivage de l’île, constate que la mer est devenue solide et la traverse à pied sec avec son
armée, Il est bientôt à Shambhala, qu’il trouve complètement transformée par l’industrie de
Vishwakarma, l’architecte des dieux: avec ses centaines de palais, la ville brille comme le soleil;
on la prendrait pour Amarâvati, le séjour d’Indra. Kalki vit de nombreuses années à Shambhala,
où Padmâ lui donne deux fils, Jaya et Vijaya. Il se prépare alors â conquérir le monde et offre le
grand sacrifice du cheval, celui qui, ne peut être offert que par un roi et qui procure la satisfaction
de tous les désirs. (Note : Le cheval n’est pas tué mais laissé en liberté.)
Kalki va mener successivement quatre campagnes et livrer quatre grandes batailles: contre
le Bouddha et les Bouddhistes, contre la géante Kuthodari, contre Kali (l’obscurité et le désordre
du Yuga finissant) et contre le Yogi Shashidvaja.

II. - La bataille contre les Bouddhistes.

Kalki conduit ses armées contre Kîkata, la puissante ville du Bouddha, d’où les Védas et
les usages sacrés sont bannis, où l’on n’honore plus ni les ancêtres, ni les dieux et où toute croyance
à un autre monde a disparu. Là on affirme que le corps est l’Atma (âme) et l’on ne connaît rien de
supérieur à l’argent, aux femmes et aux plaisirs des sens.
Aussitôt que Jina (vainqueur) est averti de l’arrivée de Kalki, il s’avance à sa rencontre
avec deux grandes armées. La terre se couvre d’éléphants, de chars de combat et de chevaux;
partout on voit étinceler les armes et flotter les étendards des héros. Jina, monté sur un taureau, se
dirige droit sur Kalki; il l’attaque avec une adresse et un courage qui remplissent les dieux
d’admiration. Kalki est blessé et, rapide comme l’éclair, Jina parvient à le saisir à bras le corps.
Mais il ne réussit pas à le soulever de terre et reconnaît alors que son adversaire est Vishnu, Celui
qui soutient l’univers. Le combat continue avec diverses péripéties, jusqu’à ce que, d’un coup de
pied, Kalki atteigne son adversaire à la hanche et le renverse. Les Bouddhistes, consternés par la
perte de leur chef et effrayés par l’approche des innombrables chars de guerre de Kalki, appellent
à leur aide la mère du Bouddha, Mâyâdevi (Déesse Mâyâ), à l’aspect de laquelle dieux, démons,
hommes et toutes les autres créatures perdent leurs forces et deviennent semblables à des statues.
La Mâyâ est, comme on le sait, la grande « illusion cosmique », c’est l’avidya (ignorance) qui fait
prendre l’irréel pour le réel. Montée sur un char de combat et suivie des Bouddhistes, la déesse
s’avance, caractérisée par les trois gunas, (qualités) se montrant sous des formes multiples,
entourée d’un mirage guerrier et accompagnée de chacals et de corneilles. Fascinés par cette
apparition, les guerriers de Kalki restent immobiles, les armes à la main. Mais, Kalki présent,
l’illusion ne peut durer. Il se montre lui-même à ses compagnons d’armes dans toute sa grandeur
et magnificence divines et fixe Mâyâ, dont la beauté égale celle de Shri (Shakti). Mâyâ le regarde,
éprise d’amour pour lui - et disparaît subitement dans son corps: comme l’erreur disparait lorsque
la vérité est contemplée et comme, lors du pralaya, (destruction) l’univers tout entier, produit de
la Mâyâ, rentre dans le sein de Narayana, dont il ne se distingue que d’une manière illusoire.

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La partie est perdue pour les Bouddhistes. Les frappant de l’épée ou les criblant de flèches,
Kalki les envoie en foule dans les demeures du dieu de la mort. La bataille devient furieuse, Un
fleuve de sang se forme, entraînant avec lui les guerriers qui s’y noient; au milieu des flots
pourpres, on aperçoit des chevaux nageant avec peine et, semblables à des bancs de sable, les dos
immobiles des éléphants blessés.
Alors paraissent sur le champ de bataille, armées d’épées, d’arcs et de lances, les femmes
des Bouddhistes, jeunes, belles, fidèles à leurs maris, rendues furieuses par leur mort et accourant
en hâte pour les venger. Kalki s’approche d’elles et leur parle doucement: « Femmes, écoutez-moi.
Que venez-vous faire dans la bataille? C’est une affaire pour les hommes. Qui voudrait frapper
vos têtes aux cheveux bouclés, vos visages doux comme la lune? En face de vos yeux allongés,
brillants comme de jeunes lis, qui pourrait encore combattre? » Mais les femmes restent insensibles
à son langage courtois. Alors apparaissent, sous forme humaine, les armes damasquinées d’or de
ceux qui viennent d’être tués; « Reconnaissez, disent-elles aux femmes, reconnaissez Celui que
nous avons nous-mêmes cherché à blesser: c’est l’Atma qui remplit l’Univers, Il est notre maître
et, ce qu’Il ordonne, nous l’exécutons: aussi bien sommes-nous sorties de Lui par le
développement des noms et des formes. Par Son ordre se manifestent les cinq éléments, objets des
cinq sens. C’est Kalki, le Soi suprême, par la volonté duquel la Substance primordiale (Prakriti)
crée l’œuf du Monde, d’où naissent Ahamkâra (ego) et les autres principes de la manifestation.
Par Sa puissance d’illusion, (Mâyâ), Il a mis en mouvement le processus cosmique (jagadyâtrâ)
qui est création, persistance et destruction: « Lui, qui est le Premier et le Dernier », Il est mon
Epoux, dit une des armes, et je suis son épouse. Mes fils et mes parents demeurent en Lui;
semblables à des songes, ils avaient été créés par un mirage, Ceux qui les croient réels sont encore
aveuglés par l’illusion de l’amour et continuent à regarder avec curiosité le va-et-vient des choses
du monde; mais ceux qui vénèrent Kalki-Vishnu pensent différemment. Où est le temps? Où est
la mort? Où est Yama? Où sont les dieux? Tout est Kalki, le Seigneur, Celui qui par Mâyâ a été
fait plusieurs. Nous, les armes, sommes irréelles et nous n’avons personne contre qui combattre.
Dans le Soi, plus de distinction entre l’arme et l’ennemi. Nous ne pouvons blesser même un simple
serviteur de Kalki; comment pourrions-nous tuer Hari (Vishnu). Lui qui a protégé Pralhâda contre
son père, le roi des Daityas.
Délivrées de l’illusion de l’amour, les femmes se tournent vers Kalki comme vers leur
unique refuge. Celui-ci leur enseigne la doctrine des trois yogas: le yoga de la dévotion et de
l’amour (bhakti-yoga), celui des œuvres (karma-yoga) et celui de la connaissance (jnâna-yoga).
Grâce à cette science, les femmes des Bouddhistes et des Barbares obtiennent le Bien suprême et
atteignent le Lieu auquel les Yogis eux-mêmes parviennent si difficilement, Après avoir accordé
la Délivrance, Kalki reprend la bataille, extermine à nouveau Bouddhistes et Barbares et fait
rayonner sa gloire sur tout le pays.

III, - Le combat contre la géante Kuthodari

Sa première œuvre achevée, Kalki quitte le pays de Kîkata et se rend à un lieu de


pèlerinage dit Chakratirtha, pour s’y baigner dans l’étang sacré. Des ascètes se plaignent à lui des
dangers que leur fait courir la géante Kuthodari, fille du démon (râkshasa) Nikumbha et mère de
Vikanja. La tête appuyée sur l’Himalaya, les pieds sur le Dekhan, elle allaite Vikanja. Kalki part
avec ses armées vers l’Himalaya et voit des éléphants balayés par le souffle monstrueux de la
Rakshasi. Des lions ont pris place dans les pavillons de ses oreilles et y dorment; des gazelles se
sont réfugiées dans ses cheveux comme dans un bois épais. Kalki se prépare à l’attaquer avec une

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petite troupe de cavaliers, d’éléphants et de chars de guerre, quand la géante se lève furieuse, ouvre
une bouche effroyable et avale en criant chars et éléphants. A leur suite, les guerriers et Kalki lui-
même tombent dans son ventre, comme des fournis avalées par un ours. Témoins du spectacle, les
dieux et les chanteurs célestes (Gandharvas) poussent un cri d’effroi, les ascètes s’enfuient, les
démons de la nuit se réjouissent, les grands Rishis disent des prières, tandis que les soixante mille
Vâlakhilyas (petits êtres célestes) prononcent contre la géante des paroles de malédiction. Kalki
cependant « se souvient de lui-même ». Avec des flèches, des vêtements, des boucliers et des roues
de char, il allume un feu dans le ventre de la géante, perce la paroi abdominale de son épée et, tel
Indra aux mille yeux crevant d’un trait de foudre le ventre de Vritra, il sort, accompagné de ses
compagnons bien armés et montés sur leurs chars. Eléphants, chars de guerre et chevaux
s’échappent du corps de la géante, les guerriers lui coupent bras et jambes et lui transpercent le
ventre. Bientôt la mutilée expire, remplissant le ciel et la terre de son cri et ébranlant de ses
convulsions les cimes des montagnes. Vikanja, son enfant de cinq ans, court sur l’armée de Kalki
et la piétine: brandissant l’arme de Brahma, que Parashu-Rama lui avait donnée. Kalki le décapite.
Dans ce récit, c’est le feu allumé avec des armes et autres moyens de fortune qui marque
le moment décisif du combat, dont il change l’aspect. Il est au moins curieux d’observer que ce
même motif symbolique se retrouve dans Ezéchiel, associé à des événements qui nous paraissent
identiques à ceux dont il est question dans le Purana. « Dans les derniers jours », Gog et ses troupes
fondent sur Israël « comme une tempête et comme une nuée », Mais le Seigneur Dieu brise l’arc
dans la main gauche de Gog et fait tomber les flèches de sa main droite.
« Les habitants des villes d’Israël en sortiront; ils brûleront et réduiront en cendre les
armes, les boucliers, les lances, les arcs et les flèches, les bâtons qu’ils portent à la main, et les
piques, et ils les consumeront par le feu pendant sept ans. »
« Ils n’emporteront point de bois des champs, et ils n’en couperont point dans les forêts,
parce qu’ils feront du feu de ces armes; qu’ils feront leur proie de ceux dont ils avaient été la proie,
et qu’ils pilleront ceux qui les avaient pillés, dit le Seigneur Dieu. » (XXXIX, 9 et 10)
Gog une fois vaincu, les enfants d’Israël sont rassemblés dans leur pays, sans qu’aucun ne
soit laissé en terre étrangère. L’Age d’Or est prédit en ces termes par Ezéchiel:
« Je ne leur cacherai plus alors mon visage; parce que je répandrai mon esprit sur toute la
maison d’Israël, dit le Seigneur Dieu. » (XXXIX, 29).
D’après une tradition juive, ces événements coïncideraient avec l’avènement du Messie.
Gog serait l’Antéchrist et Magog les peuples ameutés par lui contre Israël. L’interprétation
chrétienne paraît se conformer dans l’ensemble à cette tradition.

IV. - La réapparition des Sages.

Le jour même de sa victoire sur Kuthodari, Kalki se rend à Haridvâra sur le Gange et il y
passe la nuit.
Le lendemain matin, Kalki voit autour de lui une foule d’ascètes venus pour l’admirer et
le vénérer: Vâmâdeva, Vasishtha, Bhrigu, Parashara, Narada, Rama, Kripa, Véda, Angiras et
beaucoup d’autres. Ces personnages sont les anciens Rishis, auteurs du Véda et des Shâstras. Ils
sont précédés par les rois Maru et Dévâpi, représentants respectifs de la dynastie du Soleil et de la
dynastie de la Lune. Par la puissance de leur ascèse, les deux rois sont restés en vie pendant les
quatre Yugas, (grand cycle cosmique) vivant en ermites à Kalâpagrâma dans l’Himalaya. Pour les
Rishis, il n’est pas précisé s’ils sont restés en vie ou s’ils sont ressuscités, point qui d’ailleurs,

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même si leur énumération n’avait pas un caractère purement symbolique, serait d’assez médiocre
importance: le seul obstacle à la « réapparition » ou à la « résurrection » est en effet le passage de
l’être à un autre « monde » ou, pour employer une expression musulmane, à un autre « degré de
l’Existence universelle »; la mort n’implique pas nécessairement ce passage et, en particulier, elle
ne l’implique pas pour les êtres qui suivent le déva-yana et qui peuvent alors subsister jusqu’au
pralaya dans telle ou telle modalité « subtile » du « monde » où ils ont vécu. C’est pourquoi, par
exemple, la question de savoir si saint Jean est mort ou n’est pas mort apparaît comme dépourvue
de véritable intérêt, dès lors qu’on ne limite pas les modalités de l’existence à la seule forme
corporelle.
A propos du retour des deux rois et des Rishis, Abegg rappelle la « légende » du roi
Muchukunda, dont Krishna provoqua le réveil; celle de Keresaspa (aussi nommé Karshasp ou
Sâma), qui d’après le Bundahishn dort jusqu’à la fin des temps et se réveillera alors pour tuer le
serpent Dahâk; celle de Yima, dont le paradis souterrain Var s’ouvrira le jour de la résurrection et
qui paraîtra alors à la lumière du jour, avec les hommes de son royaume; celle du dernier Imâm
Mahdi, celle de Frédéric Barberousse et celle enfin des trois Tell, qui vivent cachés dans une
caverne au-dessus du Rutli, Il aurait pu rappeler aussi les deux « témoins » de l’Apocalypse
(chapitre XI), en lesquels la majorité des Pères de l’Eglise reconnaissent Hénoch et Elie revenus
sur terre; la tradition relative à l’apôtre Jean, que nous avons déjà mentionnée deux fois; et enfin
la croyance, répandue dans l’Inde et dans l’Asie centrale, à une réapparition future du « Roi du
Monde » et des autres membres de l’organisation hiérarchique dont il est la tête. En ce qui concerne
le récit du Kalki-Purana, le sens symbolique en est assez clair: la Tradition n’avait disparu qu’en
apparence pendant l’« Age sombre » et, au début du nouvel Age d’Or, ses représentants viennent
se grouper autour de l’Envoyé divin, qui doit rétablir l’ordre sur terre et dicter au monde sa loi. Et
ce qui est tout à fait remarquable, c’est que cette réapparition des sages et des justes est aussi
prédite par l’Apocalypse (chapitre XX):
« Je vis aussi des trônes et des personnes qui s’assirent dessus, et la puissance de juger
leur fut donnée, Je vis encore les âmes de ceux qui avaient eu la tête coupée pour le témoignage
qu’ils avaient rendu à Jésus, et pour la parole de Dieu, et qui n’avaient point adoré la bête, ni son
image, ni reçu son caractère sur le front ou aux mains; et elles entrèrent dans la vie, et elles
régnèrent avec Jésus-Christ pendant mille ans,

« Les autres morts ne rentrèrent point dans la vie jusqu’à ce que les mille ans fussent
accomplis: c’est là la première résurrection,
« Heureux et saint celui qui a part à la première résurrection; la seconde mort n’aura point
de pouvoir sur ceux-là, mais ils seront prêtres de Dieu et de Jésus-Christ et ils régneront avec lui
pendant mille ans ».
Maintenant d’où viennent ces Rishis, ces rois et ces justes? A cette question, la tradition
hindoue fournit, nous semble-t-il, une réponse, en indiquant que, sur certaines « îles » ou «
continents » (dvipas), l’Age d’Or dure perpétuellement, Il ne s’agit naturellement pas d’îles ou de
continents au sens propre du mot, mais bien d’états appartenant au même « degré de l’Existence
universelle » que l’état corporel, mais qui, étant différents de ce dernier, doivent être classés parmi
les modalités « subtiles ». Ces états nous paraissent constituer ce « Paradis terrestre » dont certains
Pères de l’Eglise, et notamment saint Augustin, disent qu’il a été épargné par le Déluge: c’est «
l’habitation d’Hénoch et la Terre des Saints », dont le sommet « touche la sphère lunaire ». Comme
M. Guénon le fait remarquer, ce « Paradis terrestre », où l’Age d’Or dure perpétuellement, n’est
autre chose que le « centre du monde », c’est ce qu’on pourrait appeler la pointe supérieure de

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l’état subtil ou les premières « enveloppes » d’Hiranyagarbha (œuf cosmique), C’est, en termes
chrétiens, ce royaume qui « n’est pas de ce monde » et où les saints et les bienheureux sont unis
au Christ, là est le véritable centre suprême, le véritable Agartha. Le centre suprême peut être ou
ne pas être représenté visiblement « sur terre », c’est-à-dire dans le monde physique où nous
vivons; mais s’il y est représenté, il est clair qu’il ne peut l’être que par les hommes qui restent en
contact direct avec lui, en d’autres termes, qui ont « réalisé » les états auxquels il correspond: que
ces « hommes transcendants » vivent comme les autres hommes, qu’ils soient doués de longévité
ou qu’ils soient « ressuscités », il n’y a là, évidemment, rien qui puisse accroître ou diminuer leur
autorité.
Après ces digressions, nous reprenons maintenant notre récit.
Kalki ordonne aux deux rois Manu et Dévâpi de le suivre et de combattre avec lui; Maru
rentrera plus tard à Ayodhyâ, siège de la dynastie du Soleil, et Dévâpi s’établira à Hâstinapura.
Tous deux assureront ainsi la continuation des deux dynasties qu’ils représentent et dont, comme
on s’en souvient, la première a donné le jour à Rama, fils de Dasharatha (Ramachandra) et la
seconde à Krishna.
Kalki n’a pas encore fini de parler aux rois que deux chars descendent du ciel (Vimana ou
autre véhicule céleste). Ces chars sont l’œuvre de Vishwakarma, l’architecte des dieux; doués
d’esprit, ils se meuvent d’eux-mêmes; ils sont faits de pierres précieuses et brillent comme le soleil.
Kalki invite Maru et Dévâpi à monter sur ces chars dont Indra leur fait présent. A ce moment
tombe du ciel une pluie de fleurs envoyés par les dieux; un vent tiède, rafraîchi par l’eau du Gange
et chargé de pollen odorant, passe sur l’assemblée.

V. - Le retour du Krita-Yuga et la défaite de Kali.

Le bâton de pèlerin à la main, un ascète aux yeux de lotus se présente à son tour devant
Kalki; son corps brille comme un or ardent, c’est un protecteur de la loi, qui a vaincu le monde et
qui, d’un seul souffle de sa bouche, fait disparaître des foules entières de méchants; il est aussi
riche en ascèse que le rishi Sanaka. Cet ascète est le Krita-Yuga (Age d’Or) sous forme humaine,
venu pour contempler Kalki. Il expose à ce dernier la théorie du temps et de ses divisions, depuis
le moment insaisissable jusqu’au Jour de Brahma, qui comprend mille quadruples Yugas régis par
quatorze Manus qui sont autant de manifestations de Vishnu. Après cent grandes années, Brahma
rentrera dans le sein de Vishnu, puis, le pralaya achevé, créera le monde de nouveau. « Alors
j’apparaîtrai à nouveau devant Toi, moi, ce Krita-Yuga, dont on dit qu’il fait prospérer les bonnes
œuvres et pendant lequel les hommes accomplissent les tâches qui leur sont assignées ».
L’ascète Krita fait ici allusion, non plus à l’Age d’Or inauguré par Kalki et qui constitue
le premier Yuga du futur Manvantara, mais bien au premier Age d’Or du futur Kalpa. Il s’agit
donc d’un autre « degré de l’Existence universelle ». Dans l’intervalle ont eu lieu le Jugement
Dernier (Apocalypse, XX, II à 15) et la « rénovation du monde » mentionnée dans le Purana. Dans
la tradition judéo-chrétienne, nous retrouvons la « rénovation du monde » et l’Age d’Or qui la suit
prédit par lsaïe et par saint Jean. Après avoir annoncé l’extermination des méchants, Isafe ajoute:
« Voici ce que dit le Seigneur:...
« Car je vais créer de nouveaux cieux et une terre nouvelle; et tout ce qui a été auparavant
s’effacera de la mémoire, sans qu’il revienne dans l’esprit.
« Mais vous vous réjouirez, et vous serez éternellement pénétrés de joie dans les choses
que je vais créer; parce que je vais rendre Jérusalem une ville d’allégresse, et son peuple un peuple
de joie. » (LXV, 17-18).

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La fin du chapitre LXV est remplie par la description de cet âge, où les élus « ne
travailleront pas en vain » et où « le loup et l’agneau iront paître ensemble ».
Quoique le texte correspondant de l’Apocalypse soit bien connu, nous en rappellerons ici
les deux premiers versets:
« Après cela, je vis un ciel nouveau et une terne nouvelle; car le premier ciel et la première
terre avaient disparu, et la mer n’était plus.
« Et moi Jean je vis descendre du ciel la ville sainte, la nouvelle Jérusalem qui venait de
Dieu, étant parée comme une épouse qui s’est revêtue de ses riches ornements pour paraître devant
son époux » (XXI, 1-2).
Nouvelles concordances entre les Puranas et la Bible, qui viennent s’ajouter à celles que
nous avons déjà relevées.
Enchanté des paroles de Krita, Kalki se décide à attaquer dans sa ville Vishasana (carnage).
Il part, suivi de huit armées: la sienne, celle du roi Vishakhayûpa et six autres commandées par les
rois Manu et Dévâpi. Sur sa route, il rencontre Dharma (la loi, l’ordre), accompagné de ses
nombreux fils aux noms allégoriques (Rita, Prasada, Abhaya, Sukha, etc.) et de ses femmes
Shraddhâ, Maitni, Shanthi, etc. Dharma se plaint à Kalki des persécutions qu’il endure de la part
de Kali et du démon Bali. Kalki lui ordonne de le suivre et de combattre à ses côtés et bientôt la
bataille est engagée avec Kali. La lutte est acharnée et le Purana la décrit d’une façon très vivante,
encore que la plupart des combattants portent des noms bien abstraits (Droit, Paix, Sans-Crainte,
Joie, Hypocrisie, Désir, Colère, Peur, etc.). Les compagnons de Kali, cependant, moins courageux
que ne l’avaient été les Bouddhistes, s’enfuient en partie et échappent ainsi à une destruction
complète. Attaqué par Dharma et Krita, Kali est obligé de quitter l’âne qui lui sert de monture et
de se réfugier dans Vishasana, sa ville, celle où les femmes gouvernent. Finalement, la ville est
incendiée et Kali, les membres brûlés, s’enfuit vers une autre région (vers un autre monde). Kalki,
cependant, est toujours aux prises avec Koka et Vilkoka, les deux chefs des démons Dânavas - Il
parvient à les assommer tous deux et tranche la tête de Vikoka. Mais un regard de Koka tombe sur
le frère tué; aussitôt ce dernier se redresse et le voilà sur pied. Kaki s’empresse de briser le crâne
de Koka, mais un regard de Vikoka le ressuscite à son tour et les deux frères, prenant à volonté
des formes diverses, attaquent Kalki de concert, Celui-ci les crible de flèches, mais leurs blessures
se ferment instantanément. Le guerrier divin s’étonne et commence à pendre courage. Le cheval
blanc piétine et mord les deux démons, il leur arrache à chacun un bras et leur assène de
formidables coups de sabots. Tout est en vain: à peine à terre, les démons se relèvent intacts et
reprennent le combat. Brahma s’approche alors de Kalki et lui enseigne comment il pourra venir
à bout des deux démons. Ils ne peuvent être vaincus par les amies, il faut les assommer ensemble
avec les poings, car, lorsque l’un d’eux jette un regard sur son frère mort, il le rappelle par là-
même à la vie. Le conseil est exécuté et bientôt les deux poings de Kaki s’abattent comme des
traits de foudre sur les crânes des deux démons, qui s’écroulent, effrayant encore les dieux dans
leur chute, La bataille est terminée. Gandharvas et Apsaras chantent et dansent dans le ciel. Une
pluie de fleurs tombe sur la terre, Le monde a retrouvé la paix.

VI. - La lutte contre le Yogi Shashidvaja.

Kaki n’a plus qu’une bataille à livrer et, cette fois-ci, ce n’est plus contre des méchants
qu’il lutte, mais contre un juste. Aussi la signification symbolique de cette bataille nous semble-t-
elle très différente de celle des combats précédents.

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Kaki veut conquérir la ville de Bhallâta et s’avance vers elle avec ses armées. Il se heurte
aux guerriers et aux éléphants de Shashidvaja, le seigneur de la ville, qui est un Yogi et qui a
reconnu que son agresseur était Vishnu, le maître des mondes. Son épouse Sushântâ lui demande
s’il osera frapper Narayana le bien-aimé, l’ordonnateur interne de toutes choses. « Le devoir,
répond Shashidvaja, est de se défendre dans la bataille, même contre son maître, et dut ce maître
être Vishnu. Celui qui survit obtient la dignité royale, celui qui tombe est heureux dans le ciel.
Ainsi la victoire comme la mort est profitable au guerrier, Bonheur des dieux et bonheur des rois,
répond Sushântâ, tel peut être le partage des insensés qui recherchent les biens extérieurs; mais ces
bonheurs sont sans attrait pour ceux qui adorent les pieds de Hari. Comment un serviteur de Hari,
qui se sait un avec Lui, pourrait-il combattre contre Lui? - Le Seigneur, dit Shashidvaja, est au-
dessus de toute dualité. S’il Lui plaît de faire naître une dualité, de sorte que Lui et Son serviteur,
qui en réalité ne sont qu’un, se présentent l’un en face de l’autre comme deux personnes
différentes, je resterai Son adorateur, même lorsque je combattrai contre Lui. Vishnu est à la fois
le vénérateur et le Vénéré; la vénération elle-même est pure illusion, comme tout ce qui appartient
au monde des apparences. C’est pourquoi, moi et mon armée, nous allons accepter la bataille, Il
t’est loisible, cependant, de vénérer l’époux de Kamalâ. - Il me suffit, répond Sushântâ, que ton
âme appartienne à Vishnu. Dans l’autre monde comme dans celui-ci, il y a un chemin qui conduit
vers Lui ».
Une bataille immense, semblable à celle des dieux et des démons, s’engage devant
Bhallâta. Une partie de l’armée de Kalki est mise en fuite.
Les guerriers tombent par milliers; un fleuve de sang se répand à nouveau sur la terre.
Shashidvaja cependant voit Kaki paraître devant lui. Celui qui contient en Lui tous les inondes, Le
voici, entouré d’un éclat lumineux qui fait pâlir le soleil: cavalier à la peau foncée, aux longs bras,
habillé d’un vêtement rouge, l’épée en main, le front surmonté d’un diadème étincelant, bras et
jambes ornés de joyaux de toutes sortes. C’est Lui, Celui qui chasse l’obscurité des yeux et du
cœur des hommes, vénéré par Dharma et par Krita.
« Approche, s’écrie Shashidvaja, ô Toi dont les yeux sont pareils à des lotus! Frappe-moi
au cœur ou lance Tes flèches, comme une pluie bienfaisante, dans les ténèbres de mon âme! Celui
qui est sans qualités connaît donc les qualités; Celui qui est sans dualité sait cependant combattre
avec des armes; Celui qui est sans désir aune armée qui aide à ses victoires et à ses succès. Puissent
tous les mondes assister à notre combat! » Aussitôt, des deux côtés, les flèches volent à travers
l’espace. Mais bientôt les deux adversaires ont recours aux armes célestes: arme de Brahma contre
arme de Brahma, vents contre montagnes, feu contre éclairs, nagas (serpent) contre garudas
(aigle). Les quatre gardiens du monde sont saisis de terreur et ils croient que la fin de toutes choses
est proche. Les dieux effrayés s’enfuient à travers l’espace. Les deux héros jettent finalement leurs
armes et combattent avec leurs poings. Shashidvaja est atteint d’un coup terrible qui l’étourdit;
mais il se ressaisit aussitôt et, de ses deux poings, il frappe son adversaire, qui tombe à terre sans
connaissance. Dharma et Krita accourent pour sauver Kalki. Shashidvaja les prends tous deux sous
son bras, saisit Kalki par le corps et rentre satisfait chez lui avec ses trois prisonniers.
Kalki, reprenant ses sens, voit autour de lui Sushântâ et ses amies, qui disent les louanges
de Vishnu, et, près d’elles, Shashidvaja, Krita et Dharma. « Punis-moi, lui dit le Yogi, pour m’être
opposé à ta volonté. - C’est moi, répond Kalki en souriant, qui ai été vaincu par toi ». Shashidvaja
rappelle ses fils du combat et prie Kalki d’agréer sa fille Ramâ comme épouse. Les guerriers
reviennent de la bataille, et dans une grande fête, les noces de Kalki et de Ramâ sont célébrées.
Shashidvaja laisse sa famille aux soins de Kalki et se rend à Haridvâna sur le Gange pour y vivre

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en ascète, Il mourra dans une forêt, frappé du disque de Vishnu, et parviendra ainsi au ciel
Vaikuntha.

VII. - L’Age d’Or.

Après le départ de Shashidvaja, Kaki se dirige avec son armée vers Kânchanî (la dorée),
ville défendue par des remparts inaccessibles et par des serpents venimeux. Les remparts sont
abattus, les armes empoisonnées détruites, et la ville apparaît, scintillante d’or et de pierres
précieuses, mais interdite aux hommes, car elle grouille de filles-serpents.
Une voix prévient Kaki que lui seul pourra pénétrer dans la ville. Il ne tarde pas à y
rencontrer une fille au regard empoisonné, nommé Sulochanâ (fille aux beaux yeux) et qui lui
raconte comment, maudite autrefois par un Yaksha (dieu de la richesse) dont elle s’était moquée,
elle est condamnée à vivre dans cette ville de serpents, causant la mort de tous les hommes qui
s’approchent d’elle. Mais le regard, doux comme le nectar, de Kalki a déjà rompu le charme et
bientôt Sulochanâ rejoint le ciel des Gandharvas sur un char éblouissant (vaisseau).
On observera que Sulochanâ, cette « Kundry hindoue », rôde, elle aussi, aux bords d’une
ville « inaccessible aux hommes » et qui rappelle aussi bien Montsalvat que la Jérusalem céleste
de l’Apocalypse.
Kalki distribue villes et territoires à ses amis, ses parents et ses fils, il consacre le roi Maru
à Ayodhyâ et rentre à Shambhala, où il vit heureux entre les épouses Padmâ et Ramâ.
L’esprit des hommes qui sont encore sur terre est purifié et s’ouvre à la compréhension de
la vérité, Ces hommes forment le germe de l’humanité future.
Leurs descendants, dans l’âme desquels Sattva (équilibre) domine, vivront selon les règles
du Krita-Yuga (Âge d’Or).
Le Dharma est à nouveau ferme sur ses quatre pieds et la perfection de l’Âge d’Or s’étend
sur les trois mondes. Partout les dieux cheminent sur terre et répandent leurs faveurs. La terre porte
des récoltes abondantes. Les hommes sont heureux, exempts de maladie, ornés sur tous leurs
membres de signes sacrés. La durée de la vie humaine, qui était devenue si courte pendant le Kali-
Yuga, est à nouveau normale. Brahmanes, Kshatriya, Visayas et Sûdras s’acquittent avec
exactitude de leurs fonctions respectives.

Au cours de son règne de mille ans, Kalki reçoit la visite de personnages importants:
Narada, fils de Brahma, l’instructeur et le messager des dieux, accompagné du Gandharva
Tumburu, et plus tard Parashu-Rama, venu de Mahendra pour revoir Kalki et qui enseigne à Rama
les rites et les prières qui lui permettront de donner des fils à son mari.
Les mille ans accomplis, les dieux prient Kalki de rentrer au ciel Vaikuntha. Kalki prend
congé des siens et se retire vers l’Himalaya peuplé de Rishis. Sur les bords du fleuve sacré, le Dieu
aux quatre bras entre en extase: le joyau Kaustubha sur la poitrine, loué par ses attributs, la conque,
le disque, la massue, le lotus et l’arc, entouré de la multitude innombrable des dieux, il confond
son être avec le Soi suprême: pur Esprit, antérieur à toutes choses, réunissant en Lui l’éclat de
mille soleils, Océan de lumière illimité.
Padmâ et Ramâ se jettent dans les flammes du bûcher funèbre et sont réunies à Vishnu.

André PREAU

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