La Confrérie des Mages - Tome 1: Perception
Par Emmanuelle Ferré
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À propos de ce livre électronique
Lera ne doute pas que son père ait pris la bonne décision. Car cette agitation n’est que le préambule d’un conflit bien plus grave qui va mettre en péril la contrée mais aussi le royaume voisin de Tanera. Et pourtant… L’arrivée tant attendue de ces Mages fait ressurgir le passé de la jeune fille, dont elle ignore tout, ainsi que des dons oubliés. Bien que très jeune, Lera se fait une raison. Son avenir est aux côtés des Mages. Elle se lance avec détermination dans un apprentissage riche, complexe, déconcertant, allant même jusqu’à dévoiler l’antique savoir des Mages.
Un voyage initiatique qui va bouleverser le cours de son existence…
À PROPOS DE L'AUTEURE
Originaire de Carcassonne, Emmanuelle Ferré arpente toute son enfance les remparts de la cité médiévale, mille histoires en tête. C’est à Nantes qu’elle découvre une atmosphère propice à l’écriture. Son univers ? Un monde médiéval à la fois imaginaire et réaliste, foisonnant et mystérieux. Car le Moyen Âge représente une longue période florissante, mêlant festivités, art, voyages et grandes explorations…
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Avis sur La Confrérie des Mages - Tome 1
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Aperçu du livre
La Confrérie des Mages - Tome 1 - Emmanuelle Ferré
Chapitre 1
La requête
L’administrateur du village d’Eghenell sentait que sa patience allait bientôt atteindre ses limites. La séance du Conseil avait commencé deux heures plus tôt et le débat s’enlisait dans la confrontation à mesure que le temps passait. Chacun des membres de l’assemblée campait sur ses positions, aucun accord ne se dégageait. S’il ne mettait pas rapidement un terme aux échanges de plus en plus cinglants entre ses hommes, la séance de ce jour ne les aurait avancés à rien. Compte tenu de la situation actuelle, le Conseil ne pouvait se permettre de reporter la réunion.
En ce premier jour du mois de mai, une chaleur moite s’était installée dans la salle où siégeaient les conseillers, ce qui n’arrangeait rien à leur exaspération. Ils étaient réunis autour d’une table qui occupait toute la longueur de la pièce. Au fond de la salle, un petit homme rondouillard s’époumonait. De fines gouttes de sueur coulaient le long de son visage rougi par l’effort et l’énervement.
Sitôt son intervention terminée, le petit homme se rassit avec empressement, comme soulagé de retrouver le dossier de sa chaise. Plusieurs membres de l’assemblée l’acclamèrent en signe d’adhésion. Satisfait de l’effet produit par ses paroles, le petit homme sortit un carré de tissu de sous son vêtement et s’épongea le front. Son voisin de droite se leva et s’exprima à son tour.
Un autre homme prit ensuite la parole. Son front était dégarni et il parlait d’une voix chevrotante.
Les échanges reprirent de plus belle. L’assemblée était partagée, ce qui n’avait rien d’étonnant. La renommée de la Confrérie des Mages avait dépassé les frontières de la contrée des Bocages Mauves, où était établi le village d’Eghenell. Chacun avait en tête les combats héroïques que l’on attribuait à cette organisation à travers tout le pays. Si certains voyaient en elle une aide salutaire, la majorité des conseillers ainsi que la plupart des habitants du village l’assimilaient à un sombre groupuscule contrôlé par les autorités du Royaume.
Sachairi constata une fois de plus à quel point les hommes pouvaient manquer de discernement. Ils étaient prêts à accorder tout leur crédit à ces récits glorieux qui s’apparentaient plus à des affabulations qu’à des faits réels. Il ne doutait pas de l’étendue des pouvoirs de la Confrérie, mais il ne supportait pas que l’on s’arrête au simple statut de celle-ci au lieu de se poser les bonnes questions. La Confrérie pourrait-elle répondre favorablement à la requête qu’il avait fait parvenir à ses membres ? Serait-elle capable de faire face aux difficultés que le village rencontrait ? Telles étaient les questions majeures qu’il avait en tête et à aucune reprise ces interrogations n’avaient effleuré l’esprit de ses hommes. Sachairi commençait sérieusement à douter que le Conseil eût saisi la gravité de la situation. Kester, le Premier Conseiller, perçut l’agacement de l’Administrateur et jugea utile d’intervenir. Il eut bien du mal à ramener l’ordre dans l’assemblée.
Sachairi salua en lui-même la sagesse du Premier Conseiller. Ses paroles étaient justes et toujours mesurées. Aujourd’hui encore, il avait réussi à ramener un tant soit peu de lucidité dans l’esprit de chacun. Le Conseil devait effectivement cesser de perdre son temps avec ces échanges stériles. Les événements qui avaient touché la paisible contrée des Bocages Mauves ces dernières semaines étaient de très mauvais augure.
Les faits s’étaient d’abord produits près des frontières ouest de la contrée. On ne comptait plus les attaques sinistres, les pillages et les disparitions qui concernaient, la plupart du temps, de jeunes hommes. Certains villages avaient été entièrement détruits et témoignaient de la violence des assaillants. Les survivants de ces attaques n’avaient pas été en mesure de décrire avec précision leurs agresseurs. Les rares informations que le Conseil avait pu rassembler mettaient en scène des créatures à l’apparence inhumaine, dénuées de tout scrupule.
L’administrateur du village d’Eghenell prenait très au sérieux ces récits troublants et était en proie à une inquiétude latente. Il devait sans tarder trouver une solution pour mettre à l’abri l’ensemble de la population de la contrée. Pour cela, il avait envisagé tous les moyens à sa portée et avait jugé que la garde seule du village ne serait pas efficace. Il était fermement convaincu que ces actes n’avaient pas été causés par de simples malfaiteurs, encore moins par des créatures surnaturelles comme les survivants de ces agressions semblaient le croire.
Selon sa théorie, ces méfaits avaient bien été commis par des humains mais usant de méthodes de combat inhabituelles. Les dégâts laissés par leurs attaques n’étaient pas sans rappeler les effets des forces occultes employées par certains combattants de l’armée royale. Ces combattants, que l’on appelait Mages, leur avaient donné du fil à retordre durant la dernière guerre, alors que les troupes du Royaume tentaient de s’imposer sur leurs terres. Ils avaient pour rôle de seconder les escadrons de soldats. Ils adaptaient le terrain de combat à leur avantage tout en entravant l’avancée des troupes adverses. Les Mages étaient de redoutables guerriers qu’il valait mieux avoir à ses côtés plutôt que dans les rangs ennemis. Sachairi comprenait parfaitement les craintes qu’éprouvaient les membres du Conseil car cette guerre avait laissé des traces inaltérables dans la mémoire de chacun.
La contrée des Bocages Mauves était située en un lieu reculé au-delà des frontières sud du royaume de Tanera. Cependant, l’administrateur du village d’Eghenell s’informait régulièrement de ce qui se déroulait dans tout le pays. Il avait entendu parler de la Confrérie dix ans auparavant. Quelques mois après la signature du traité qui avait mis fin au conflit opposant la Coalition des Trois Contrées au Royaume, plusieurs Mages avaient précipitamment quitté l’armée royale pour former un groupement indépendant.
C’est ainsi que la Confrérie des Mages fut fondée. Ses membres s’éloignèrent peu à peu du pouvoir. Ils se donnèrent pour mission d’assurer l’apprentissage des jeunes Mages d’une part et de veiller à ce que la pratique des forces occultes se fasse dans le respect des populations. Sachairi avait immédiatement pensé à faire appel à leurs services dès l’apparition des troubles dans la région.
Quelques semaines plus tôt, il avait eu vent de la venue prochaine d’un de leurs détachements dans la contrée des Landes, région voisine des Bocages Mauves. Il avait aussitôt envoyé un messager à Muirkatel, le village principal de cette contrée, pour faire parvenir sa requête à l’équipe en question. Il espérait désormais que la missive arrive à temps et que la Confrérie réponde favorablement à sa demande. Tout reposait entre les mains de son messager et il était trop tôt pour qu’il puisse dire si la résolution de ce premier point était en bonne voie. Le second problème que l’Administrateur voulait régler aujourd’hui était de convaincre l’assemblée d’Eghenell du bien-fondé de cette requête.
Comme il l’avait appréhendé, les conseillers étaient perplexes et le débat faisait rage depuis plusieurs heures. Il était temps qu’il leur rappelle comment il avait reçu, par la voix de chacun d’eux, la légitimité de prendre une telle décision. Le Premier Conseiller ayant rétabli un semblant d’ordre, Sachairi profita de cette accalmie pour entamer une dernière tentative afin de les raisonner. Il se leva prestement. Tous se turent.
Sachairi avait regagné l’attention des hommes même s’ils restaient vigilants. Le moment était propice pour que les conseillers revoient enfin leur jugement.
L’Administrateur balaya l’assemblée du regard, ses hommes semblaient plongés dans une intense réflexion. Cette fois, c’était en chacun d’eux que le débat se faisait. Il leur laissa encore quelques minutes pour considérer ses paroles. Son regard se posa sur Kester qui inclina légèrement la tête en signe d’assentiment.
Un imperceptible frisson parcourut l’assemblée. Sachairi sut alors qu’au moins l’un de ses deux problèmes serait résolu aujourd’hui. Il se rassit et demanda que l’on procède au vote. Sans compter l’Administrateur et le Premier Conseiller, l’assemblée était constituée de quatorze hommes, tous représentatifs des différents corps de métier assurant l’activité économique du village d’Eghenell. Le vote se comptait à main levée, seuls trois conseillers ne furent pas favorables aux services de la Confrérie, dont le petit homme rondouillard qui s’était farouchement opposé à cette décision. Qu’importe
, pensa Sachairi, la majorité était atteinte et son objectif également.
L’Administrateur mit fin à la réunion. Les hommes se dispersèrent dans un vacarme de chaises et quittèrent avec soulagement la salle surchauffée. Sachairi sortit à son tour et salua les membres de l’assemblée.
*
Sachairi Correnaigh exerçait cette fonction depuis plus de huit ans. Le poste d’administrateur était désigné par les membres du Conseil pour un an et son statut avait été invariablement reconduit chaque année. Sachairi était également l’un des Maîtres d’armes du village d’Eghenell qui était reconnu depuis des générations pour l’habileté de ses combattants au maniement de la lance et qui avait gagné en notoriété durant la dernière guerre. Sachairi avait dès son plus jeune âge montré des aptitudes prometteuses qu’il eut l’occasion d’exercer lorsqu’il intégra la Coalition des Trois Contrées.
À la fin du conflit et porté par le souhait de transmettre l’art du maniement de la lance aux jeunes générations qui, il l’espérait, n’auraient pas à connaître la guerre, Sachairi avait mis en place un centre de formation. Il organisait aujourd’hui la vie de ce centre et assurait une partie des enseignements. Selon lui, le maintien de la paix et de la stabilité passait avant tout par l’éducation. C’était aussi un moyen de maintenir une place forte dans la région afin de dissuader les envahisseurs potentiels. Les jeunes gens accouraient des quatre coins de la contrée pour suivre l’entraînement au maniement de la lance, attirés par cette formation de qualité qui dépassait le simple cadre du combat dans bien des domaines. Suivant la logique de son évolution et la reconnaissance qu’on lui portait, Sachairi avait ensuite été désigné comme administrateur du village d’Eghenell.
Le bâtiment où siégeait le Conseil était situé aux abords du centre de la bourgade. Sachairi devait remonter un petit chemin de terre battue pour rejoindre sa demeure qui surplombait le village. Avant de se mettre en route, il remercia Kester pour le travail qu’il avait accompli ces derniers jours. Le Premier Conseiller était plutôt jeune par rapport à la moyenne d’âge des membres du Conseil. Pourtant, il faisait souvent preuve de discernement au cours de réunions mouvementées à l’image de celle que Sachairi venait de clore.
Les deux hommes retrouvèrent leurs chevaux et firent un bout de chemin côte à côte tandis que Kester commentait le déroulement de la séance.
Sachairi esquissa un sourire. Il ne l’avouerait pas à Kester, mais cette idée lui avait également traversé l’esprit.
Il se tut quelques minutes et se perdit dans ses pensées. Sachairi avait le don de percevoir clairement l’état d’esprit dans lequel chaque individu se trouvait. Il comprit alors que Kester s’interrogeait lui aussi.
Kester sursauta imperceptiblement. Bien qu’il connût Sachairi depuis un certain temps, il était toujours surpris de cette facilité qu’il avait de lire en chacun comme dans un livre ouvert.
Comme Sachairi ne répondait rien, il poursuivit.
Après un court silence, Sachairi se tourna vers le Premier Conseiller.
Ils étaient parfaitement seuls désormais. L’après-midi touchait à sa fin et Sachairi apercevait sa demeure au loin dont la façade claire prenait une teinte ocre à la lumière du soleil couchant. Il reprit son récit.
Kester était totalement captivé par le récit de l’Administrateur et il médita longuement ces dernières paroles.
Les deux hommes se quittèrent, chacun reprenant la route en direction de sa demeure respective. L’heure avançait et Sachairi n’avait qu’une hâte, retrouver sa petite famille.
*
En regagnant son foyer, il fut accueilli par des éclats de rire en provenance de l’arrière de la maison. Les Correnaigh vivaient dans une grande demeure située un peu en retrait du village. S’élevant sur trois niveaux, la bâtisse de pierre à la toiture recouverte d’ardoise, typique des habitations de la contrée, offrait un espace de vie confortable pour lui, son épouse, leurs quatre enfants. Les abords de la maison étaient envahis par une multitude de buissons de chèvrefeuille qui exhalaient une agréable senteur en cette belle journée de printemps. Un vaste terrain s’étendait à l’arrière de la bâtisse. Il comprenait un enclos abritant quelques animaux de ferme et s’achevait par une partie basse où s’alignaient plusieurs rangées d’arbres fruitiers. L’espace restant était abandonné à la nature et servait de terrain de jeu aux enfants.
La famille était composée de trois garçons et d’une fille. En entendant ses enfants qui s’agitaient à l’arrière de la maison, Sachairi décida de s’octroyer quelques minutes de distraction après cette dure journée. Les événements de ces dernières semaines l’avaient conduit à travailler plus qu’à l’accoutumée et il avait été très peu présent à la maison. Il profita donc de l’occasion pour passer un peu de temps en compagnie de ses enfants.
Il descendit de son cheval, contourna la bâtisse de pierre et approcha du petit groupe tapageur. Trop absorbés dans leurs jeux, les enfants n’avaient pas remarqué sa présence. Les garçons étaient rassemblés au pied de deux piquets de bois solidement ancrés dans le sol et reliés à leur sommet par une barre de fer. Sachairi avait fait installer cet équipement pour ses fils lorsqu’ils avaient pris la décision d’entrer au Centre de formation d’Eghenell. Placée à hauteur d’homme, la barre de fer leur permettait d’effectuer des exercices de traction afin de développer leur endurance. Lorsque l’heure n’était plus au travail mais à la détente, ils profitaient également de l’installation pour se lancer des défis divers.
Sachairi pensait interrompre ses fils au beau milieu d’une nouvelle démonstration de force. Il fut surpris de trouver Lera, sa fille, perchée sur la barre de fer. Cette enfant ne tenait pas en place et redoublait d’inventivité pour distiller son intarissable énergie. Elle commença tout d’abord par agripper fermement la barre de fer. À cause de sa petite taille, ses pieds pendaient largement au-dessus du sol. Elle déplaça ensuite son corps d’avant en arrière à la manière d’un pendule jusqu’à effectuer un tour complet puis elle se retourna pour reprendre la barre au vol, dans le sens opposé. Le défi du jour consistait, semblait-il, à réaliser le plus grand nombre de tours consécutifs. Bien contents du caractère intrépide de leur sœur, les trois garçons l’encourageaient bruyamment tout en comptant le nombre de passages. Au seizième tour, Lera prit de l’élan et lâcha la barre. Elle effectua un dernier saut et atterrit lestement sur le sol.
Sachairi, partagé entre l’admiration et l’inquiétude que sa fille ait pu se blesser, trouva le moment opportun de manifester sa présence. Il applaudit vivement la performance de Lera. Aussitôt, les enfants se tournèrent vers lui.
Lorsque Lera aperçut son père, elle afficha une mine incertaine. Elle semblait hésiter entre la fierté d’avoir remporté le défi et la crainte d’être réprimandée.
Tous partirent à rire. Dans la minute qui suivit, Sachairi fut pris d’assaut par ses enfants qui le pressèrent de questions. Depuis que l’on parlait des agressions et de la venue prochaine d’un groupe de Mages dans la contrée, leur curiosité était piquée au vif et sitôt rentré dans son foyer, il n’avait plus de répit. Comme ils regagnaient la maison tout en chahutant, il en profita pour saluer en aparté les prouesses de sa petite tête brûlée, selon le surnom qu’il avait donné à sa fille. Il lui rappela aussi de ne pas trop causer d’inquiétude à sa mère qui craignait toujours que Lera ne se rompe le cou à trop vouloir suivre les jeux de ses frères.
Seona, l’épouse de Sachairi, observait le petit groupe depuis le devant de la porte de l’arrière-cuisine. Elle s’efforçait d’adopter une attitude sévère mais cachait difficilement l’amusement qui la gagnait. Sachairi salua chaleureusement sa femme en lui enlaçant la taille.
À ces mots, Lera fit la moue tandis que les garçons pouffaient de rire.
D’un geste de la main, elle entraîna sa famille à l’intérieur. Elle jeta un dernier regard vers la barre de fer qui trônait fièrement dans le jardin puis referma la porte.
*
La demeure des Correnaigh était spacieuse. Le rez-de-chaussée était en grande partie occupé par un vaste salon dont le plafond aux poutres apparentes, les murs isolés par un enduit clair et le sol recouvert de dalles en terre cuite de couleur brune apportaient beaucoup de chaleur à la pièce. Une table de banquet en bois massif se trouvait au centre, face à une imposante cheminée dont l’âtre avait noirci au fil des ans. La table de banquet était réservée aux jours de fête et la maisonnée prit place autour d’une table plus petite, installée près d’une fenêtre donnant sur le verger.
Des rires étouffés et des bruits de vaisselle s’échappaient du fond de l’arrière-cuisine. Moyra et Peader, un couple au service de la famille depuis de nombreuses années, s’activaient pour préparer le dîner. Un fumet alléchant envahissait le salon. Moyra apparut quelques minutes plus tard, les bras chargés d’une lourde soupière fumante remplie d’une soupe de cresson qu’elle déposa sur la table.
Le repas commença et chacun fit honneur à la soupe apportée par Moyra. Durant tout le dîner, la discussion tourna principalement autour de la décision des conseillers et l’éventuelle réponse de la Confrérie. Seona s’enquit du déroulement de la séance du Conseil auprès de son mari. Sachairi relata les événements de la journée mais il épargna à sa famille les détails et s’en tint à la conclusion du Conseil. Les enfants commentaient ses propos d’un ton enjoué, surexcités par les faits inhabituels qui touchaient la contrée.
Les garçons approchaient de l’âge adulte et Niven, le fils aîné de la famille, manifesta une fois de plus sa volonté de prendre part à l’action. Il était âgé de seize ans et son caractère s’était endurci ces derniers temps. Il avait demandé à plusieurs reprises pourquoi son père ne mettait pas en place une expédition pour aller au-devant des agresseurs. Sachairi était prêt à parier que Niven se serait porté volontaire pour en faire partie. Encore une fois, son fils ne manqua pas d’en reparler.
Seona soupira de soulagement
