Dans mon village, il y a belle lurette
Par Fred Pellerin
4/5
()
À propos de ce livre électronique
En savoir plus sur Fred Pellerin
Un village en trois dés Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationComme une odeur de muscles Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Il faut prendre le taureau par les contes Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5De Peigne et de misère Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL’Arracheuse de temps Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationBois du thé fort, tu vas pisser drette Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5La DESCENTES AUX AFFAIRES: Contes de village Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa course de petits bateaux Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluation
Lié à Dans mon village, il y a belle lurette
Livres électroniques liés
L'âme à vif (22) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa rage de vivre (24) Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5160 rue Saint-Viateur Ouest Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationElle ou lui? (34): 34. La bisexualité Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationEcorché (17) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLove zone (2) Évaluation : 3 sur 5 étoiles3/5Le placard (11) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationTAGuée (31) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationDélinquante Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationMa vie en horoscope Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluation114, rue Saint-Louis: Toute une vie! Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationBonne fête...quand même Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationÀ la croisée des chemins, tome 2: Les vents contraires Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationMa vie dans le noir: Une journée dans la peau d'une non-voyante Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa Biscuiterie Saint-Claude, tome 1: Gabrielle Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationAdam Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationSolitude armée (9) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationSauver ma peau: Tout perdre pour échapper aux Témoins de Jéhovah Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe poids du mensonge (29) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Coconut Pizza Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationVivre (12) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationCorps étranger (39) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Garage Rose, tome 1 Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Onde de choc (13) Évaluation : 3 sur 5 étoiles3/5LA PREMIÈRE FOIS DE SARAH-JEANNE Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationUn tueur parmi nous Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5L'emprise (8) Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5L' AMOUR A MORT Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationSur les traces de Cédrika Provencher Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationDeux sœurs et un secret Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluation
Fiction générale pour vous
Mauvaises Pensées et autres Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Proverbes et citations : il y en aura pour tout le monde ! Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5L'Art de la Guerre - Illustré et Annoté Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Mes plaisirs entre femmes: Lesbiennes sensuelles Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5L'étranger Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/51984 Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5L'Alchimiste de Paulo Coelho (Analyse de l'oeuvre): Analyse complète et résumé détaillé de l'oeuvre Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Les frères Karamazov Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationManikanetish Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5La Légende du Roi Arthur - Version Intégrale: Tomes I, II, III, IV Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationMoby Dick Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Nouvelles érotiques: Confidences intimes: Histoires érotiques réservées aux adultes non-censurées français histoires de sexe Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationContes pour enfants, Édition bilingue Français & Anglais Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL'Odyssée Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Père Goriot Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Le pouvoir de la conscience (traduit) Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Maupassant: Nouvelles et contes complètes Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Monde d'hier (annoté): souvenirs d'un européen Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe paradis et l'enfer (traduit) Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Les Mille et une nuits - Tome premier Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Procès Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationSous le soleil de Satan (Premium Ebook) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Malade imaginaire Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5L'idiot: Édition Intégrale Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationMasi Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationTreize nouvelles vaudou Évaluation : 3 sur 5 étoiles3/5Shuni: Prix littéraire des collégiens 2020 Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationMythologie des Égyptiens, des Perses, des Indous, des Scandinaves et des Gaulois. Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Le secret des Chimneys (traduit) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluation
Catégories liées
Avis sur Dans mon village, il y a belle lurette
2 notations0 avis
Aperçu du livre
Dans mon village, il y a belle lurette - Fred Pellerin
Avant-propos
Le conte oral ne doit pas être confondu avec la littérature.
Jean-Aubert Loranger
« La prochaine histoire que je vais te conter, elle est dure à avaler ! Je vais aller mettre mon dentier pour la mâcher comme il faut ! » Voilà ce qu’elle disait, ma grand-mère, avant de commencer à rendre ses contes.
Elle partait à la salle de bains, à petits pas de pantoufles neuves sur un prélart usé, le dos courbé sous le poids de ses souvenirs. (Le passé laisse des traces, toujours ! Des traces qu’on suit encore, avec une brèche de nostalgie dans le cœur. Comme une grafignure qui ne cicatrise pas.)
Moi, je m’installais devant mon verre de lait dans lequel trempaient des morceaux de biscuits Goglu, puis j’attendais qu’elle se grèye les gencives.
Quand elle revenait à la cuisine, ma grand-mère, elle souriait. On voyait reluire ses vieilles dents enlignées, toutes droites ! Des dents de grandes occasions qu’elle tenait de son arrière-grand-mère. Un dentier, gossé dans du bois d’érable, qui avait jauni, mâchant d’une génération à l’autre. De bouche de chiqueuse de tabac à mordeuse de poussière, et ainsi de suite.
Joë Folcu, il disait que ma grand-mère, quand elle sortait son dentier, elle ressemblait à un épi de blé d’Inde du mois d’août : des rangs de petits grains jaunes bien cordés ! Moi, je la trouvais belle.
Il y a belle Lurette…
Ça disait :
« L’or naît de l’eau
comme naît de la mer l’astre d’or de l’aurore. »
[…] – C’est ben simple, vieille oreille,
c’est ma recette de tire d’érable.
Pierre Chatillon
Ma grand-mère disait que l’histoire s’est passée dans le temps où c’est que du temps, il y en avait encore.
« Oui ! Du temps, de reste, pour toujours. Toujours, puis même un peu plus après. Ça fait longtemps, ça ! Aujourd’hui, ti-gars, avec les cadrans qui tic-taquent à batterie, l’éternité a refoulé d’un bon bout. Par les temps qui courent, ça marche plus. Garrochés pour travailler, manger puis dormir, on se grouille même quand vient le moment de l’agrément. C’est rendu qu’il faut éjaculer à la première précocité pour sauver des minutes. C’est rendu que même le poulet puis le jambon sont pressés ! »
Ma grand-mère, elle disait, avec des miettes de souvenirs pognées entre les dents, que ça se déroulait dans une autrefois. Dans le temps où c’est que du temps, il y en avait encore.
Dans l’ancien temps, il y avait seulement quelques rues et des débuts de rangs, clairsemés par-ci, par-là, pour laisser deviner les traits qu’allait prendre le visage de Saint-Élie de Caxton. Encore à moitié déchiffré, notre territoire comptait si peu d’occupants qu’on l’appelait encore la mini-cipalité.
Là, au beau milieu de tout ça, plantées sur la rue principale, pas loin de l’église, se trouvaient les maison et boutique de Bustave Riopel. (Plus tard, ma grand-mère allait devenir propriétaire de cette maison.)
Le bonhomme Riopel, avec les années, s’était forgé une réputation d’habile habitant. D’ailleurs, c’est comme forgeron, et en tant que maréchal-ferrant du même élan, qu’il gagnait sa pauvreté. À grands swings de marteau sur l’enclume ! Dès la première sueur du jour, on pouvait l’entendre, comme une fanfare, battant le fer à plein régiment. Dans un vacarme des enfers, il chauffait, frappait et tortillait des retailles de métal qui finissaient par prendre des difformes parfaites. Ti-Bust Riopel savait le tour de fabriquer et réparer les cantouques, crochets et chaudières ; d’entretenir pattes de jouaux et roues de voitures. Toujours, à part de ça, avec grande minutie.
Son savoir-fer, le bonhomme prétendait le tenir de ses ancêtres. (Selon lui, le forgeage se trouvait dans la lignée depuis Gros-Magnon Riopel. D’aucuns vont jusqu’à dire que l’histoire du chaînon manquant pouvait se lire dans son album de famille : à cause d’une pénurie de fer, un des arrière-arrière-arrière-alouette-Riopel a pas pu boucler un certain maillon de la chaîne dévolution. Mais ça, c’est une autre affaire ! Laissez-moi tomber dans le vif…)
Bustave Riopel, fier forgé comme un coq de clocher en beau cuivre luisant, s’était, un jour, piqué la girouette sur le pignon de la chapelle d’une bonne créature. (En d’autres mots : il s’était marié !) Depuis de nombreux printemps, l’artisan et sa femme partageaient leur vie dans la fidélité, l’obéissance, puis tout le kit.
Comme des ouailles à l’ouïe fine, le couple croyait dur comme fer en la parole du curé de la paroisse. Réguliers sur la dîme, confessés hebdomadairement, prenant congé le dimanche : tout allait pour le monde dans le meilleur des mieux.
(Numéro un !)
À vrai dire, dans tout ça, il y avait une chose qui clochait. Ah ! Une petite chose de rien… Pas de la mauvaise volonté. Non ! Tout était tiguidou. En seulement, les Riopel n’avaient pas encore d’enfant.
(Pas un !)
Prends-donne, tire-pousse (fast-forward-rewind, eject-power !) : toutes leurs tentatives de se mettre en famille avortaient. La bonne femme avait beau s’éjarrer, le cœur rempli d’amour, elle ne pouvait rien offrir de plus qu’un derrière aride comme une terre de roches. Il n’y avait pas une graine qui arrivait à germer dans ce sol-là !
Depuis le temps qu’il verbait en chair, le curé du village avouait n’avoir jamais vu un postérieur nuire autant à la postérité. Jamais ! Puis malgré tous les moyens qu’il utilisait pour convertir les ovaires et testicules des Riopel, les échecs s’accumulaient. (Pris avec son mandat divin de promotionner l’engendrement au maximum, il ne devait tout de même pas lâcher. À tout bout de champ, comme de fait, on le voyait se pointer le crucifix dans l’entrebâillement de la porte pour vérifier si ça engrossait.)
— Faudra essayer encore une foi !
Thérapie divine, priage de Sainte Vierge, dévotion à la Marie de l’Incarnivore, branlage de chapelets, envoye par là ! Il repassait dans l’intégral le set des appels aux miracles : du Kama Sutra jusqu’au fond de la boîte à bois…
Puis malgré tout, au grand désappointement des parties, les entreprenances restaient sans fruit. C’était comme si le airline des cigognes ne livrait pas chez les Riopel.
Vous comprendrez qu’à la longue, le forgeron commençait à en avoir assez du curé. (La face du confesseur étampée dans les couvertes de son lit, ça lui donnait l’impression de dormir dans le suaire de Turin.) C’est pour ça qu’à un bon moment donné, avant d’en venir à sacrer une volée à son représentant divin, Ti-Bust se prit en main.
— On va procréer autrement !
Par un soir d’orage, de tonnerre qui bardasse, l’homme de fer décida de mettre son plan à exécution. Cette fois-là, il fit appel aux bons soins de la Sauvagesse, l’Indienne à laquelle les villageois attribuaient des pouvoirs de sorcellerie. (Elle était, en vérité, une simple pratiquante de la médecine sympathique. Très sympathique !)
Ce soir-là, que je disais donc, le forgeron s’étira en overtime dans son atelier. À la brunante, sous une pluie battante aux allures de déluge, la sorcière marcha dans les flaques d’eau pour venir rejoindre le bonhomme Riopel.
(Ce qui se brassa là, pour être honnête avec vous, je ne le sais pas exactement. Ma grand-mère elle-même ne pouvait rien m’assurer, rapport que personne n’a eu le droit d’assister aux opérations. Personne ! Pas même la femme de Ti-Bust ! Tout ce qui demeure, dans la poussière du souvenir délavé par l’orage, c’est un ramassis de suppositions et d’histoires : de suppose-histoires pour soulager notre incertitude.
D’abord, on sait que Ti-Bust se rendit dans son hangar. Fouillant dans le débarras comme on cherche dans son inconscient, il aurait trouvé là le matériel nécessaire à sa création. À la boutique, ensuite, derrière des fenêtres trop sales pour y voir, ça mena du train. Jusqu’à tard dans la nuit, sous un ciel noir comme de l’asphalte, on entendit Ti-Bust fesser (Han !), marteler (Han !), frapper et taper (Han ! Han !). Ça, c’est sans compter les cris (Ah ! Oui ! Ah ! Encore…) de l’assistante-magicienne qui étalait au complet son gréement de formules magiques, d’incantations merveilleuses. Ces sparages-là, ça dura durant des heures, des heures…)
Pas loin de l’aube, l’orage tu et le branle-bas achevé, on entendit un cri : un braillage qui s’accordait avec le raillage matinal du cocorico. Un son des entrailles de la vie qui sonnait comme les premiers pleurs d’un bébé naissant. C’était ça, l’enchantement : l’enfantement.
Par-derrière la Sauvagesse, qui replaçait sa jupe pour s’être trop démenée la magie, Ti-Bust sortit de sa boutique avec un poupon dans les bras. Il alla porter l’enfant directement à sa femme. Tellement contente, la Riopel, que même un illettré aurait pu lire le bonheur dans
